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La logique (5) - Le raisonnement
20 novembre 2014

Hi'.

Vous allez rire, j'ai voulu écrire cet article en mode "bon allez abrégeons" et après trois heures de rédaction je me suis rendu compte que même moi je 'comprenais plus ce que j'écrivais.

Ouais j'avais voulu simplifier les choses mais wow, je ne suis définitivement pas pédagogue, et maintenant qu'on en est arrivé au tournant, au moment clé, celui où on passe enfin à l'application, ben... pfouuuh... j'ai l'impression qu'il reste encore mille choses à vous introduire avant d'oser le faire.

Laissez-moi vous expliquer.

Dans le second article sur la logique, on avait ce passage :

1) Twilight hésitait. Starswirl avait raison, mais si elle le soutenait elle allait perdre ses amies. Pire encore, elle risquait de perdre Dash ! Mais, se dit-elle, il avait raison !

Notre but désormais, maintenant qu'on a tout l'attirail logique pour, est de traduire cela en termes logiques et, dans la foulée, découvrir comment fonctionne le texte.

Le problème c'est que le résultat c'est ça (fermez vos yeux ça équivaut à un screamer) :

1a) [pqrs][ >( MAIS(p) >( MAIS( >( q s ) >( MAIS( >( q r ) >( p MAIS( p MAIS( ^( >( q r ) >( q s ) p ) ) ) ) ) ) ]

À une ou deux parenthèses près. Autant dire que c'est au-delà de l'illisible et qu'il y a tellement de trucs nouveaux qu'en voyant ça je me suis presque foutu une gifle.

Alors.

 

1. L'hypothèse

Déjà, je suis forcé de revenir sur l'hypothèse. J'avais introduit ce terme dans le second article et dit que c'était "un truc dont on sait pas si c'est vrai mais on fait comme si".

En gros on a "p", qui est une variable, ça vaut donc 10 (ce qui signifie que "ça peut être vrai ou faux"). Si on écrit notre variable toute seule :

1 p

Bah... la ligne 1, là, où on a écrit "p", elle vaut 10. Ah parce que oui, maintenant on va aligner les formules, à raison d'une formule par ligne, qu'on numérote :

1 blababla
2 balblabal
3 balba
4 ...

Et donc là notre ligne 1 vaut 10... ce qui ne veut strictement rien dire à part un haussement d'épaule monumental. Nous, on veut une valeur unique : VRAI ou FAUX. Donc on quantifie :

1 [p][ p ]

Eeeeet... c'est faux. Donc si on voulait faire l'hypothèse "p", en l'introduisant toute seule dès le départ on aurait une énorme erreur 404 "désolé votre variable c'est nawak je peux pas travailler dans ces conditions et je claque la porte".

Quand on raisonne, TOUTES nos expressions, TOUTES nos formules, TOUT doit être vrai.

Donc comment on fait ?

On fait des hypothèses.

C'est ce que je disais à propos de Twilight : elle n'énonce pas des vérités absolues, elle se contente de faire des hypothèses. Elle ne sait pas si Starswirl a raison, elle le suppose, elle part du principe que oui.

Mais alors à quoi ressemble une hypothèse ?

Je pourrais, ici, vous faire "ça ressemble à ça vos gueules" mais je me sens obligé de détailler. Ce qu'on veut, c'est une expression qui soit toujours vraie. Et ça, dans le dernier article (sur les quantificateurs), on connaît :

2) [p][ ≡( p p ) ]

Ça là on l'a dit c'est vrai de toute éternité, ça signifie que "p équivaut à p", "un chat est un chat", c'est le chat de Shrödinger, mort ou vif ça reste un chat. Ce qui signifie que "si c'est un chat alors c'est un chat" ou, en termes bien barbares et effrayants : "l'équivalence contient deux implications".

2a) [p][ >( p p ) ]

La formule en (2a) est toujours vraie également. Si "p équivaut à p" alors forcément, "p implique p". Et vous pouvez calculer les valeurs de vérité d'ailleurs :

2b) >( 10 10 ) = 11( 10 10 )

Pour rappel, donc, "p" vaut 10, ce qui signifie "il est vrai ou faux" et ">" vaut 1011, ce qui signifie "si p et q sont vrais, > est vrai. Si p est vrai mais q est faux, alors > est faux. Etc..." En l'occurrence là on n'a que des p et donc seulement deux cas de figure qui correspondent aux résultats 1 et 1. L'implication vaut donc toujours 1 et la quantification est contente.

Maintenant, si on paraphrase : dans le cas où "p" est faux, l'équivalence nous dit : "si p est faux alors p est faux". Grmf. Nous, on veut faire des hypothèses : on veut faire comme si p était vrai. Alors on paraphrase l'implication : "si p est faux alors p est vrai." Pour le comprendre il faut revenir à la valeur de vérité de l'implication et à son fonctionnement et c'est un brin compliqué et arbitraire.

L'important dans tout ça c'est que oui, >( p p ) est une hypothèse. On fait l'hypothèse que "p", et ça nous permet de dire "p". L'hypothèse est à gauche et à droite on peut mettre tout ce que cette hypothèse permet de conclure. On fait, littéralement, comme si p était vrai (dans les cas où il est faux c'est vrai quand même).

Donc quand Twilight dit "Starswirl avait raison", elle fait l'hypothèse :

1 [p][ >( p p ) ]

Où vous pouvez remplacer "p" par "Starswirl a raison". Elle dit "Si (on prétend que) Starswirl a raison, alors Starswirl a raison." C'est ce qu'on appelle aussi le contrat de lecture dans un texte, ou la suspension de crédulité du lecteur. On fait comme si ce que nous racontait le texte était vrai.

 

2. Les opérations

En logique classique, vous pourriez introduire "p" tout seul, vous appelleriez ça une prémisse et vous vous sentiriez un peu stupide. Enfin je sais pas c'est comme ça que je me suis senti moi, à faire "mais c'est quoi ce truc".

Dans la logique qu'on utilise ici, on travaillera toujours avec des hypothèses, donc avec des >( - - ). Et puisque les hypothèses nous assureront que tout ce qu'on écrit est toujours vrai, on peut se passer des quantificateurs ! Halléluiah !

Donc notre ligne 1 :

1 [p][ >( p p ) ]

On peut la réécrire en :

1 >( p p )

C'est déjà un peu plus lisible. Admettez. Ce n'est pas pour autant que vous devez faire comme si la quantification n'existait pas. Elle est toujours là. Et si vous l'oubliez, je la remets direct. C'est juste pour notre confort personnel mais n'oubliez jamais que tout ça est quantifié.

On va également, pour notre confort personnel, mettre les ">( ... )" en gras, question de bien les voir :

1 >( p p )

Et maintenant... on est libre ! On peut faire ce qu'on veut !

Je l'avais dit à propos des connecteurs, ceux-ci sont composés de trois choses : le symbole, la valeur de vérité et... les règles. Ces règles, dont on n'a pas encore parlé, nous disent ce qu'il est possible de faire avec ce connecteur.

Car oui, un connecteur ne sert pas juste à calculer les valeurs de vérité. Il permet d'opérer. Il permet de modifier les formules, d'en créer des nouvelles, etc...

Je ne vais pas passer en revue ici toutes les règles, il y en a beaucoup trop. Dans les faits je ne vous en montrerai que deux, mais juste par acquis de conscience je préciserai que chaque connecteur a deux règles (et plus si affinités) :
- Une règle d'introduction
- Une règle d'élimination
Chaque règle est alors représentée par le symbole suivi de la lettre "i" ou "e". Par exemple :

2.1 L'introduction de l'implication

">i" signifie "introduction de l'implication", parce que ">" c'est l'implication et "i" signifie introduction. Woohoo. Et comme c'est fait exprès, voyons cette règle.

Déjà, en termes logiques, elle dit ça :

[p][ >( p p ) ]

Ouais ce truc est une vérité vraie, donc tu peux l'introduire quand tu veux. En l'occurrence c'est si courant qu'on se contente d'écrire HYP, tout en majuscules. Parce que c'est une hypothèse et des hypothèses on va en faire à la pelle.

Cela dit, l'hypothèse c'est puissant. Pourquoi ? Parce que :

[p][ >( p T ) ]

Il y a une autre manière de l'écrire mais qui m'obligerait à faire un détour des enfers donc je vous laisse simplement vérifier que ça c'est toujours vrai (T signifie "vrai", ça vaut 1) et je vous l'explique : l'hypothèse dit que "on fait comme si p était vrai", ça veut dire qu'au sein de l'hypothèse "p" équivaut à une vérité absolue du type l'eau ça mouille et tout ça.

Donc, à la place de "T" on peut mettre n'importe quelle vérité vraie. Du genre... une seconde hypothèse ?

1 >( p p )          HYP
2 >( p >( q q )) HYP

Et on peut faire ça des dizaines de fois. Les hypothèses s'imbriquent les unes à l'intérieur des autres, ce que j'appelle personnellement un "contexte hypothétique" pour des raisons qui échappent à la logique donc appelez ça juste "une saleté d'équation" si ça vous chante, je ne vous en voudrai pas.

Et vous devriez commencer à comprendre pourquoi je mets les hypothèses en gras, ça peut vite devenir illisible.

À noter que cette règle est encore plus puissante, parce qu'elle permet de faire :

1 >( p p )          HYP
2 >( q >( p p ))  HYP

Ouais, l'hypothèse "q" est aussi une hypothèse, elle peut faire la même chose que "p" donc oui, messieurs les logiciens, dans ce système on peut introduire une hypothèse à gauche ou à droite, selon l'humeur. Ça ne vous semble rien vous autres mais ce truc sauve des chatons.

Pourquoi ?

Parce que ~i.

2.2. L'introduction de la négation

Je ne sais pas pourquoi mais "~" m'a toujours fait penser à de la pub' pour les cigarettes. Inexplicable. Anyway non, ce n'est pas un chameau, c'est le symbole de la "négation", le "ne... pas..." et on va donc apprendre à en faire apparaître.

1 >( p ^( q ~(q) ) )

L'expression en ligne 1 est une contradiction. On a fait deux hypothèses contradictoires et constaté, avec la conjonction ^( - - ), que ça faisait un smiley déprimant. Plus sérieusement, là on a abouti à un résultat qui permet de dire tout et son contraire, et même si techniquement la ligne 1 est toujours vraie, bah l'expression à droite elle elle ne l'est pas.

Quand on arrive à un tel cas, cela signifie qu'une de nos hypothèses est fausse.

La question c'est laquelle.

La logique te dit que c'est l'hypothèse dominante. Bon pas la logique classique mais on verra vite que ça importe peu. Pour le moment, et par défaut, la règle dit de prendre l'hypothèse dominante et de lui faire "t'as voulu contradictorer ? Va contradictire sur la Lune !"

1 >( p q )
2 >( p ~(q) )
3 ~(p)          1,2, ~i

Vous avez fait une hypothèse, elle vous a fait conclure (lignes 1 et 2) à une contradiction, donc en ligne 3 vous pouvez rigoureusement conclure que "p" c'est du foutage de gueule.

Et oui, on est logique, ici c'est le principe du tiers exclu, c'est tout noir ou tout blanc, sans nuance :

[p][ ≡( p ~(~(p)) ) ]

Si vous niez "p", ça donne "~(p)". Mais si vous niez "~(p)", vous retombez sur "p". C'est toujours vrai, nécessairement vrai, indiscutablement vrai et c'est à ça que sert la logique.

Mais là vous vous dites... j'espère... "Attends ça veut dire que si je fais l'hypothèse que Twilight est une bille, que j'arrive à une contradiction, ça prouve sans conteste que dans tous les mondes possibles, même ceux où Twilight n'existe pas, elle est la meilleure ponette ?"

Euh... non ? >( p q ) n'était pas vrai au départ, pour pouvoir y arriver il t'a fallu faire un tas d'autres hypothèses derrière qu'on ne montre pas. Ta contradiction ne vaut qu'à l'intérieur de ces hypothèses, c'est la "portée", la limite de la vérité que tu établis. Avec suffisamment d'hypothèses et de mauvaise foi (patapé humour !), tu peux parfaitement démontrer que Sombra est génial.

 

3. Le MAIS

On a introduit deux règles jusqu'ici, il y en a un paquet d'autres qu'on inscrit à la création du connecteur. Car oui, notre logique permet de créer des connecteurs.

Par exemple le "mais".

En logique classique, le "mais" est réputé non-logique. Quand tu argumentes avec un "mais", tu as déjà quitté les rivages de la raison, tu parles de trucs insensés, c'est fini. Je dois rajouter du sarcasme ? Dans notre logique à nous, rien ne nous empêche de créer un connecteur MAIS( ).

Et on va en avoir besoin :

1) Twilight hésitait. Starswirl avait raison, mais si elle le soutenait elle allait perdre ses amies. Pire encore, elle risquait de perdre Dash ! Mais, se dit-elle, il avait raison !

Que se passe-t-il quand quelqu'un dit "mais" ? C'est un peu mon boulot de linguiste que de répondre à des questions du genre et c'est en fait un boulot que j'ai fait. Avant de disposer de l'outil logique avec lequel je vous bassine depuis cinq articles, la réponse en gros c'était :

mais( p q ) = ( p ET q ) et euh NON-r

On "sentait" que "mais" impliquait que les deux choses dites, que "Starswirl a raison" et que "si Twilight blablabla...", étaient vraies. À cela, on "sentait" également que "mais" sous-entendait une troisième variable, "r", que la partie qui suit, "si Twilight blablabla...", viserait à nier.

Nous, nous dirons que :

[q][ ≡(MAIS(q)[pr][ >(>(rp)>(q>(r~(q)))) ]) ]

Ce qui nous donne un connecteur MAIS( - ) avec une seule variable, et une définition barbare à droite qui dit que si on a >( r p ) alors on peut obtenir >( q >( r ~(q) ) ). Oui c'est un casse-tête chinois mais, surprenamment, ça marche.

1 Starswirl avait raison...
1 >( p p )
2 Starswirl avait raison, mais...
2 >( MAIS(q) >( p MAIS(q) ))
3 Starswirl avait raison, mais si elle le soutenait...
3 >( MAIS(>( q r )) >( p MAIS(>( q r )) ))
4 Starswirl avait raison, mais si elle le soutenait elle allait perdre ses amies.
4 idem

Jusque-là on a simplement regardé Twilight introduire des hypothèses. Que Starswirl a raison. Que si elle le soutient elle perd ses amies. On a réécrit le texte en langage logique. Rien ne nous empêche de continuer et de finir la paraphrase, hein :

5 ...
6 Starswirl avair raison, mais... mais il avait raison !
6 >( MAIS(p) >( MAIS(>( q s )) >( t >( MAIS(>( q r )) >( p MAIS(p) )))))

J'ai mis "t" pour "pire encore" au sens de "c'est pire" mais là il y a toute une histoire d'anaphore et puis flemme quoi... Là on s'est contenté d'écrire le texte tel qu'il "est", le texte pour lui-même, ce que nous dit Twilight. On pourrait l'écrire autrement, il y a un tas de nuances et ce n'est pas ce qui m'intéresse.

Moi, ce qui m'intéresse, c'est la manière dont le LECTEUR lit le texte.

Par exemple, aux lignes 2 et 3, la seule différence est le remplacement de la variable "q" par ">( q r )". Pourquoi ? Parce qu'au stade de "mais", on n'a aucune idée de ce qu'est cette variable, seulement que grammaticalement un truc doit suivre "mais". Même en ligne 4, on ne sait toujours pas ce qu'est "r", on sait juste que quand il y a un "si", à moins de signifier "tellement", alors il faut que quelque chose suive. Le langage aménage de telles places vides qui attendent d'être remplies, définies.

Maintenant, une fois qu'on en est à la ligne 4, est-ce qu'on reste passif ?

Non.

Le lecteur interprète le texte. Et ici en l'occurrence le texte lui dit : "regarde, j'ai mis un 'mais', fais ton boulot". Et le "mais" dit au lecteur ce qu'il doit faire.

5 >( MAIS(...) >( p >( s s )))
6 >( MAIS(...) >( p >( s p )))
7 >( MAIS(...) >( p >( ... >( s ~(...) ) ) )))

En ligne 5, on a introduit l'hypothèse "s". On ne sait pas ce que c'est, on s'en fout un peu. Ce qui nous importe est que cette hypothèse "s" doit permettre de conclure "p". Ce qui est facile : "p" est déjà une hypothèse. On obtient donc la ligne 6 qui, parce que le "MAIS" le rend possible, nous donne la ligne 7. On a fait une élimination du MAIS.

Le résultat ? Une contradiction. On a forcé le lecteur à faire l'hypothèse "..." et, en même temps, à conclure, puisqu'il a également fait l'hypothèse "s", que ~(...).

Comment on résout la contradiction ? Par l'introduction d'une négation. Quelle est l'hypothèse dominante ? ... okay c'est MAIS(...) et vous pourriez la supprimer, mais vous vous retrouvez à nier le texte. C'est très coûteux. Dans les faits on travaille "à l'intérieur" de l'hypothèse, au niveau de "s". C'est donc en fait "s" l'hypothèse dominante. Et c'est donc elle qui trinque :

8 >( MAIS(...) >( p >( q ~(s) )))

Vous pouvez reprendre la lecture tranquille : avec ce contexte (ces trois hypothèses) vous retrouverez toujours ~(s), c'est sous-entendu. Et c'est ça un sous-entendu dans un texte. Une variable que le texte vous pousse à ajouter par vous-même.

En l'occurrence si on continue la lecture :

9 ...
10 ... mais il avait raison !
10 >( MAIS(p) >( ... >( p ~(~(s)) )...))

Le texte vous pousse d'abord à nier le sous-entendu, puis à nier cette négation (c'est-à-dire à affirmer le sous-entendu, tiers exclu, tout ça).

 

4. Le sous-entendu

Ce qui m'amène à faire deux remarques.

A) Le contexte

Quand je parle de contexte, dans un texte, je ne parle pas de ce qui est écrit. Je parle de la série d'hypothèses que le texte demande au lecteur de faire pour pouvoir le lire.

B) L'implicite

Ou sous-entendu, c'est ce dont je parlais dans mon article sur la pertinence. Tout le contexte n'est pas noir sur blanc devant les yeux, il y a de l'information que le texte attend du lecteur mais que le lecteur va apporter de lui-même. Le "mais" en est l'exemple par excellence.

Quand Twilight dit "mais si elle le soutenait..." qu'est-ce qu'elle sous-entend ?

Le "mais" fait faire une hypothèse encore complètement inconnue, une sorte de place vide à définir. Tout ce qu'on sait de cette hypothèse, c'est que : 1) elle n'est pas contradictoire avec "p" et 2) elle est contradictoire avec "q". Ce "q" c'est "si Twilight le soutient alors elle perd ses amies". Qu'est-ce qui est contradictoire avec ça ?

Eh bien en fait il y a tout un raisonnement que je résumerais par la contraposée. C'est une règle qui n'est pas liée à un connecteur et qui dit (promis c'est la dernière fois) :

[pq][ ≡( >( p q ) >( ~(q) ~(p) ) ) ]

Cette règle, à la base de quelques sophismes, signifie donc que si elle ne veut pas perdre ses amies, Twilight ne doit pas soutenir Starswirl. Vu qu'autrement elle les perd. C'te logique. Et comme dans sa tête "~(q)", aka "elle ne veut pas perdre ses amies", est vrai, alors "~(p)" l'est également.

Donc quand elle dit "Si je le soutiens je les paume" elle veut dire "je ne vais pas le soutenir". Ce qui pose la question : pourquoi elle le soutiendrait ? Et la réponse est évidemment : "parce qu'il a raison". L'hypothèse que le "mais" dit de créer est donc contrainte, et on peut en définir sa valeur grâce à ça :

s =df "Si Starswirl a raison alors Twilight le soutient."

C'est la règle qu'on avait vue dans le second article (sur les valeurs de vérité) et c'est tout l'enjeu du passage, savoir si elle va le soutenir, aka suivre la règle.

Ce qui signifie que quand je parle du contexte, cela comprend TOUTES les hypothèses implicites, sous-entendues, ajoutées par le lecteur pour l'interpréter, souvent à la demande (volontaire ou non) du texte lui-même.

 

5. Conclusion

Un texte est une série d'hypothèses. Chaque "phrase" demande au lecteur de faire "comme si" c'était vrai. Et si le lecteur fait "c'est nawak" il brise le contrat de lecture.

C'est la différence entre "invraisemblance" -- où bah non désolé j'arrive pas à faire comme si une chute de trois cents mètres était pas mortelle -- et "incohérence".

Dans le second cas, l'incohérence est produite par le contexte, par ce que dit le texte ou ce qu'il fait déduire, par sa logique interne. Parce qu'il a, là j'espère que c'est clair, vraiment sa logique interne.

1) Twilight hésitait. Starswirl avait raison, mais si elle le soutenait elle allait perdre ses amies. Pire encore, elle risquait de perdre Dash ! Mais, se dit-elle, il avait raison !

2) Soudain Pinkie Pie entra lui demander si elle voulait jouer au ballon. Twilight répondit joyeusement que oui et trotta dehors, toute contente.

Ce que voulait dire l'auteur, c'est que Twilight était soulagée de pouvoir se changer les idées et venait de sauter sur l'occasion pour oublier tous ses problèmes. Cette... "invraisemblance"... n'en est pas une. C'est un comportement tout au plus surprenant mais parfaitement possible.

Le problème est que le texte ne le dit pas. Ça n'apparaît pas dans sa logique interne. Et en l'absence de cette information, le texte devient incohérent. On nous disait "regarde c'est grave c'est la fin du monde" et l'instant d'après "way nan c'tait rien !"

Comment résoudre ce problème si courant ?

3a) Soudain Pinkie Pie entra lui demander si elle voulait jouer au ballon. Twilight sauta sur l'occasion pour oublier toutes ses préoccupations, répondit joyeusement que oui et trotta dehors, toute contente.

Ça les auteurs ont tendance à le faire beaucoup : dire les choses noir sur blanc. Ça évite au lecteur de trop cogiter, c'est clair, sans ambiguïté et ça permet aussi de faire des monologues intérieurs sur deux trois paragraphes quand c'est pas des pages...

Ou alors :

3b) Soudain Pinkie Pie entra lui demander si elle voulait jouer au ballon. Twilight sauta sur Pinkie pour lui crier : "oui !" puis trotta joyeusement dehors.

Le texte vous met face à une nouvelle "invraisemblance", c'est un drôle de comportement... et c'est une contradiction pour vous forcer à déduire ce qui la motive. C'est donc un texte qui sous-entend, qui dépend du lecteur et qui, en quelques détails, grâce à sa logique interne, permet de résumer des pavés de pensées sur la pluie et les petites fleurs et autres "je suis une princesse et oh Celestia je sais pas choisir quelle robe mettre aujourd'hui".

On peut se reposer sur le lecteur pour lui faire déduire un tas de trucs, jusqu'à ce qu'il renvoie un gros "je vois pas ce que tu veux dire" qui, là, est un problème de pertinence :

3c) Soudain Pinkie Pie était rose.

Beuh... oui ? Quel rapport avec quoi que ce soit ? Quelle est la variable, le connecteur ? Je fais quoi là ?!

 

Alors oui, on pourrait se passer de la logique pour parler de toutes ces histoires, mais là peu à peu on entre vraiment dans la logique du texte, au sens fort, et on va vraiment commencer à parler de choses concrètes. Toujours en vue d'apprendre le langage logique, hein, les articles sur les questions d'écriture sont à part, mais tout doucement on va découvrir jusqu'à quel point nos textes sont en vérité incroyablement... logiques.

Mais je comprendrais aussi parfaitement que vous préfériez simplement retourner, fanficers,
à vos plumes !

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La logique (4) -- Les quantificateurs
18 novembre 2014

Hi'.

J'ai un super mal de crâne aujourd'hui, du coup j'ai décidé de me ménager et de faire ce qu'il y avait de plus facile sur ma to-do list, c'est parti pour un nouvel article sur la logique !

0. Rappel

Là je suis censé faire un résumé pour les retardataires mais bon sang... comment résumer quatre articles...

1) Si la pub' de la S5 existe alors si elle te rappelle le Magical et qu'elle ne montre rien de nouveau alors elle te déçoit.

Ouais Hasbro a balancé une vidéo pour annoncer l'arrivée de la S5, sans surprise ce printemps, et je devrais être "joie" à cette idée mais même l'animatic vu y a des mois en dévoilait plus. Et ils sont pas foutus de faire un clin d'oeil correct ("nothing could prepare her for what's to come")...

Cela dit, rappelons ce que sont les "variables" :

2) Si p alors si q et r alors s.

Les quatre lettres là ce sont des variables. On a "abstrait" le contenu et maintenant on veut savoir ce qui est vrai là-dedans. On va donc attribuer des valeurs de vérité :

3) <-.(\>

On ne va donc pas attribuer de valeurs de vérité sinon ça va vous faire peur (les valeurs pour quatre variables font 16 chiffres). Bon là en l'occurrence on a un avantage : la pub' de la S5 existe vraiment et elle ne montre effectivement rien de nouveau. On dira donc qu'elles sont vraies et on réduit tout ça à deux variables :

3a) Si T alors si p et T alors q.
3b) Si 1111 alors si 1100 et 1111 alors 1010.

Le "1" signifie vrai et le "0" signifie faux. On veut couvrir tous les cas de figure, c'est-à-dire quand "p" et "q" sont vrais, quand seul "p" est vrai, quand seul "q" est vrai, etc... ça fait quatre cas de figure, quatre chiffres, c'est un rappel pas l'explication complète donc pour le reste merci de retourner à l'article sur les valeurs de vérité.

Maintenant qu'on a nos variables et leurs valeurs de vérité, il ne nous reste plus qu'à réintroduire les "connecteurs" :

4) >( p >( ^( q r ) s ) )

J'ai remis les variables en gras pour vous faciliter la vie. Là on a trois connecteurs, deux fois ">" et une fois " ^ ", donc deux implications et une conjonction, ce sont nos "si... alors..." et notre "et". Ces connecteurs vont nous permettre de calculer à partir des valeurs de vérité :

4a) >( T >( ^( p T ) q ) )
4b) >( 1111 >( ^( 1100 1111 ) 1010 ) )
4c) >( 1111 >( 1100 1010 ) )
4d) >( 1111 1011 )
4e) 1011

Okay j'ai triché, je suis passé de quatre à deux variables (si la variable est toujours vraie c'est une constante...) mais l'idée est là, on sait désormais que notre exemple (1) vaut "1011" ou "tu es déçu du moment que tu es déçu". J'ai l'impression de m'être fait avoir là pour le coup...

1. Déclarer les variables

J'avais promis pour cet article qu'on introduirait un nouveau connecteur, et sans doute le plus compliqué, tortueux et malade de toute la logique formelle. Ce connecteur est dans le titre. C'est le quantificateur. Et si vous êtes logicien vous devriez être en train de m'écrire des menaces de mort.

Ce connecteur est tellement basique qu'on ne le considère même pas comme tel, mais inversement il est tellement fondamental que ne pas en parler est suicidaire.

Qu'est-ce qu'il fait ?

C'est lui qui permet de "créer" des variables.

Ouais.

Sans quantificateur tu ne peux même pas travailler. Genre. Mais assez traîné, on veut sa définition. Et sa définition d'un connecteur, on l'a vu, c'est "symbole = valeur de vérité". Donc sa définition c'est :

[ ][   ] = 10

Comme dit, le quantificateur n'est pas considéré comme un connecteur, donc là la définition que je donne est "ad hoc". Mais l'idée c'est ça. Et comme à chaque fois, on va commencer par la valeur de vérité.

1.1 Valeur de vérité

Déjà, contrairement aux autres connecteurs, on ne vous dit pas sur combien de variables porte le quantificateur. Un peu normal vu que c'est lui qui les crée. Cela dit, à strictement parler, il ne porte que sur une seule expression (le connecteur dominant) d'où une valeur de vérité à deux chiffres. J'ai choisi "10" et si vous savez lire les valeurs de vérité désormais ça signifie :

5) "Si l'expression est vraie alors le quantificateur est vrai ; si l'expression est fausse alors le quantificateur est faux."

Mais alors si on reprend notre exemple (1), sa valeur de vérité en (4e) c'est "1011". Elle est vraie ou fausse ? Aaaaah ! Impossible de décider ! On est foutus ! Des siècles de logique pour rien !

Non je déconne : si l'expression n'est pas toujours vraie alors elle est fausse. Cette phrase je suis obligé de vous la mettre en gras, et je vous la répète carrément : si ce n'est pas toujours vrai alors c'est faux. Et je vous le refais carrément en langage logique : >( ~(T) F ) Ce qui est toujours vrai, d'ailleurs.

Donc notre exemple (1) est faux. Ouais, pas de discussion, on n'entre même pas en matière : faux. "Mais dans tel cas il es-" non ta gueule : faux. La quantification est sans pitié, la nuance elle aime pas, c'est du manichéisme primaire.

1.2 Symbole

Qu'en est-il du symbole ? Un connecteur est formé du symbole lui-même, genre ">" ou "~", et de parenthèses (le "contexte"). On a déjà dit que les parenthèses n'indiquaient pas le nombre de variables qu'elles contenaient mais dans l'absolu il n'y aura jamais qu'une expression dedans, donc en gros une seule variable, donc en gros ça c'est réglé.

Par contre le symbole lui-même, "[ ]" euh ça c'est pas normal. Ça c'est une autre série de parenthèses (des crochets en l'occurrence).

En fait, la quantification est formée de deux parties :
- le quantificateur
- le sous-quantificateur
Je ne sais plus si ce sont les bons termes (je pourrais ouvrir le bouquin à portée de bras qui y répond mais flemme) mais on utilisera ceux-là. De toute manière ça fait longtemps que j'ai abandonné les vrais termes techniques.

Le quantificateur est le "[ ]" de gauche. C'est là qu'on va lister toutes les variables qui apparaissent dans notre expression (notre formule logique). Le sous-quantificateur est le "[   ]" de droite. C'est là qu'on place ladite expression. En pratique ça donne :

6) [pqrs][ >( p >( ^( q r ) s ) ) ]

J'ai remis les variables en gras, pour vous aider. À gauche la liste de variables, à droite l'expression (la même qu'en (4) ). Et oui, si l'exemple (4) vaut 1011, l'exemple (6) vaut 0. Parce qu'on l'a dit, si ce n'est pas à 120% vrai, alors c'est faux. Biatch.

Pause.

 

2. Pause

Avec les variables, les valeurs de vérité, les connecteurs et maintenant les quantificateurs on a enfin l'arsenal complet pour raisonner logiquement.

Mais tout ça est, je le sais, abominablement difficile à comprendre. Alors maintenant on va arrêter d'introduire de nouvelles choses et on va se contenter de jouer avec ce qu'on a déjà.

Donc.

2.1 Une variable seule

Disons que quelqu'un me dise "je suis passé chez Marc ce matin". Quelle est la valeur de vérité de ce truc ?

On décide de remplacer l'ensemble par une unique variable : ce sera "p". Notre premier réflexe sera donc d'écrire :

7) p

Quelle est la valeur de ce truc ? Bah on sait pas. C'est une variable. Ça peut être vrai ou faux. Vous pouvez faire confiance au type ou bien jouer à l'inquisition espagnole.

Mais là nous on est logiciens, et désormais les variables ont les quantifie : on les crée, on les introduit, on les annonce, on les peluches à poil ras ! Et là attention :

7a) [p][ p ]

C'est la même chose mais quantifié. La différence ? En (7) on disait "p". Ici on dit "Pour tout p, p." Quelle est la valeur de vérité de "p" ? C'est demander la valeur de vérité d'une variable. C'est variable... Voilà on a bien rigolé donc ouais, ça peut être vrai ou faux, "1" ou "0", donc 10. Et si ce peut être faux, la quantification dit que ce l'est :

7b) 0

Donc quand l'autre vous dit qu'il est passé chez Marc ce matin, il vous MENT ! Ou pas. En fait, ce qu'on est en train d'évaluer c'est si dire "je suis passé chez Marc ce matin" est vrai pour tout le monde, en tout endroit et à tout moment de l'univers (et au-delà). Et là surprenamment bah c'est pas très très très vrai.

2.2 Le vrai

Maintenant j'aimerais faire remarquer quelque chose. (7a) est toujours faux. Ce qui signifie que :

8) ≡( F [p][ p ] )

Ceci signifie que "le faux (F) équivaut à [p][ p ]". C'est ce qu'on vient de dire, (7a) est toujours faux.

Remarquez que l'exemple (8) est quantifié. La variable "p" a son quantificateur et... et il n'y a pas d'autre variable, donc pas besoin de placer une quantification vide.

Mais là la quantification elle est un peu violente ! Si ce n'est pas toujours vrai alors c'est faux... du coup c'est super dur d'avoir une quantification vraie ! Ça ressemblerait à quoi ?

8a) [p][ ≡( p p ) ]

Ceci se lit "pour tout p, p équivaut à p", autrement dit "un chat est un chat". La valeur de vérité de l'équivalence (le "≡") vaut 1001, check ! Si vous calculez, "≡( p p )" donne bien 1111, c'est toujours vrai donc (8a) vaut... 1 ! Woohoo !

Mine de rien là on a quelque chose qui sera vrai dans n'importe quel univers.

N'importe quel univers.

N'IMPORTE LEQUEL.

Vous voyez le chaos de Discord ? Eh ben même dans son chaos, (8a) est toujours vrai. Ou comme dirait Celestia, "mais s'il n'y a pas de règles comment tu pourrais les enfreindre ?" Le chaos a besoin d'ordre, l'ordre a besoin de chaos, aaah cette philosophie...

Bref ! Cela signifie que :

8b) ≡( T [p][ ≡( p p ) ] )

"Le vrai équivaut à blablabla..." bon okay vous ne voyez pas l'utilité...

2.3 Définir la négation

Alors si je vous proposais de redéfinir la négation ? Imaginez qu'on soit dans un monde où la négation n'existe pas. Vala'. On a supprimé la négation. Cadence aimait pas que Shining dise non donc elle a balancé un sort et paf, le connecteur "~" s'est perdu dans les limbes.

Twilight est donc super-contente (parce que "paniquée" impliquerait une négation) et décide d'avoir un sort (parce qu' "apprendre" sous-entend une négation) pour que le monde soit positif. Et elle te sort ça :

9) [p][ ≡( ~(p) ≡( p [q][ q ] ) ) ]

Okay on ne s'affole pas ! Et on calcule tout ça dans l'ordre. Je vous rappelle que là on essaie de sauver- pardon, de "joie-les-fleufleurs" Equestria. Donc :

9a) [p][ ≡( ~(p) ≡( p F ) ) ]
9b) [p][ ≡( ~( 10 ) ≡( 10 00 ) ) }
9c) [p][ ≡( ~( 10 ) 01 ) ]

En (9a), on ne sait plus (parce que la négation n'existe plus) que [q][ q ] peut être remplacé par "F" (voir l'exemple (8) ). En (9b) on regarde les valeurs de vérité et on résout, en (9c), l'équivalence à droite. Le résultat ?

Mh...

Voyons voyons... on a une équivalence avec, à gauche, un symbole étrange, "~", et sa parenthèse... et à droite... une valeur de vérité...

C'est curieux comme ça me rappelle quelque chose.

Ouais, Twilight Sparkle vient de redéfinir la négation. Et oui, la logique permet de faire ça. Pas de chance Cadence ! Twilight a fait logique sup' et Shining va continuer à pouvoir refuser de porter des tutus roses.

Jusqu'à présent la définition des connecteurs on la présentait comme ça :

~( - ) = 01

Maintenant vous savez que le vrai langage c'est :

[p][ ≡( ~(p) ≡( p [q][ q ] ) ) ]

C'est la même chose, mais forcément la première forme est plus lisible que l'autre. L'autre est juste plus rigoureuse et complète.

Et oui, on peut faire pareil pour TOUS les connecteurs. La démarche est la même : une équivalence avec à gauche notre connecteur et à droite une expression dont la valeur de vérité correspond à ce qu'on veut. Et c'est comme ça qu'on fait les enfa- les connecteurs !

Ce qui signifie aussi que (8) et (8b) sont également des définitions, de "F" et "T" respectivement. Ouais on a défini le vrai et le faux en langage logique. Bon c'est pas très spectaculaire mais ça valait de le mentionner.

 

3. Seconde pause

Je vous ai dit que les logiciens avaient une conception étrange de la récréation ? Ouais je sais ce qui précède était pas exactement la pause que vous auriez voulu mais eh. Vous savez quoi ?

Je viens de me rappeler que dans le tout premier article (sur les variables), on avait cité un passage de texte :

10) "Le rapport des frontières était arrivé quelques minutes à peine après le retour du souverain. Après avoir appris l’évasion, il venait maintenant de prendre connaissance de la débâcle dans l’Empire de Cristal." (Acylius, Dernier Sortilège, ch.14)

Ah ça date ! Un peu comme si ça faisait plus ou moins deux semaines.

Est-ce qu'on peut représenter ce colosse en langage logique désormais ?

Tout d'abord, cherchez les connecteurs.

Pas de "si... alors" ? Pas de "et" ? Pas même une petite négation visible ? C'est horrible ! Si on essaie de réécrire ça en langage logique (on dit "formaliser" siouplait) ça donnera juste une suite de variables ! Et si on a juste une suite de variables on pourra rien calculer !

Rassurez-vous, la science du langage est passée par là.

À minima, vous pouvez décider de tout relier par des conjonctions.

L'idée serait que le texte se contente de mettre côte-à-côte un tas de "phrases". Donc à chaque fois qu'on a deux "phrases", genre "p" et "q", on écrira :

10a) ^( p q )

Et si on a une troisième phrase, genre euh... euh... "r" ?

10b) ^( ^( p q ) r )

Et si on en avait quatre, comme en (10) ?

10c) ^( ^( ^( "Le rapport des frontières est arrivé" "le souverain est revenu" ) "Le souverain apprend l'évasion" ) "Le souverain prend connaissance de la débâcle" )

J'ai viré toutes les nuances surtout pour gagner de la place mais voilà, là on a déjà traduit en termes logiques notre paragraphe de texte. C'est complètement foireux mais on l'a fait.

Ou presque. Petit rappel : la quantification.

On a quatre variables ici, quatre "phrases" (les "propositions") qu'il nous faut introduire, donc quantifier. Ce qui va alourdir l'expression de 50% mais c'est nécessaire :

10d) [pqrs][ ^( ^( ^( p q ) r ) s ) ]

Et voilà, notre paragraphe du chapitre 14 de Sortilège, en termes logiques. Je vous mets l'expression elle-même en gras pour que vous arriviez à la retrouver. Petite larmichette pour l'accomplissement et on passe aux choses sérieuses.

Parce que le texte ne met pas les phrases côte-à-côte.

Vous voulez une preuve ? Très bien. Petit moment de logique de bac à sable : pour que le souverain apprenne la débâcle de blablabla, est-ce qu'il faut que le rapport soit arrivé ?

10e) Le rapport des frontières était arrivé (...) . (...) il [le souverain] venait maintenant de prendre connaissance de la débâcle dans l’Empire de Cristal.

C'est parce que le rapport des frontières arrive que le souverain apprend la débâcle. Ce n'était pas nécessaire, hein : même si le rapport n'était pas arrivé, machin aurait eu mille autres manières de le savoir. Mais le texte nous suggère qu'il y a implication :

10f) [pqrs][ >( ^( p q ) ^( r s ) ) ]

Autrement dit "Si le rapport des frontières était arrivé... alors le souverain venait de prendre connaissance..." le connecteur n'est pas visible mais il est bien présent, bien caché dans le fonctionnement interne du texte.

On pourrait continuer comme ça, à raffiner notre expression parce que bon à ce stade ce n'est toujours pas bien représentatif du fonctionnement du texte. Mais là on fait de la logique, je n'ai pas envie de m'enfoncer dans les considérations "linguistiques" ou textuelles.

Je ferai juste observer deux choses.

La première est que oui, ici dans le texte il est possible d'évaluer si le texte dit vrai. En l'occurrence l'implication doit être respectée : si le rapport est arrivé alors il y a intérêt à ce que le roi soit au courant. C'est un peu ce que nous dit le texte quand même, et oui le texte nous donne, comme ça, des tas de règles à suivre pour le lire -- et affûter nos syllogismes dessus.

La seconde est que (10f) vaut 0. Okay je n'ai pas calculé mais les probabilités pour que l'expression soit toujours vraie sont proches de 0 alors je ne vais pas me fatiguer. Ce qui signifie qu'en l'état, à la manière dont on représente le texte... le texte est toujours faux.

 

4. Troisième pause

Avant de vous laisser, j'aimerais revenir sur l'article précédent (sur les connecteurs), et sur mon fameux et totalement pas polémique d'exemple politique :

11) On défend la Constitution.
Si on défend la Constitution alors on respecte le droit international.
Donc on défend le droit international.

Est-ce qu'on peut formaliser ce truc ? Oui, facilement :

11a) p
>( p q )
q

Est-ce qu'on peut évaluer ça ? Euh... en l'état, non. On ne le pourra qu'au prochain article.

Mais, une fois encore : on a oublié de quantifier. Et vous allez voir que ça change tout :

11b) [p][ p ]
[pq][ >( p q ) ]
[q][ q ]

Très bien ! Qu'est-ce qu'on a là ? Alors : première ligne, [p][ p ] on a vu (exemple (8) ) que c'était toujours faux. Idem pour la troisième ligne, ce qui nous permet également de dire que la conclusion et l'hypothèse (en termes de syllogisme) sont équivalentes. Woohoo ! Tu conclus la même chose que tu supposais au départ, t'es génial ! Plus sérieusement ça aurait été plus rapide de juste remplacer la variable, pas besoin de règle...

Quant à la règle, au passage... elle est toujours fausse également. Bah oui, quantificateur.

Donc ! On a une hypothèse toujours fausse et une règle toujours fausse qui donnent une conclusion toujours fausse, notre logique est sans faille.

 

Dans le prochain article on parlera (enfin) du raisonnement et on verra comment parer à ce problème de "toutes tes expressions sont fausses", on bannira Discord et on récoltera enfin les premiers fruits de ce long périple au travers des bases de la logique.

On est encore à des kilomètres de pouvoir appliquer ça à nos textes mais eh. De toute manière vous feriez mieux de retourner les écrire, donc, fanficers,
à vos plumes !

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Et le Meta' continue !
16 novembre 2014

Hi'.

Pour l'anecdote, cet article a été préparé dès 12h. Ouais.

Bon bah on va pas se mentir hein ! Il est bientôt 18h et pas de Metasigma, et si vous êtes fan comme moi vous vous inquiéterez doublement parce qu'apparemment c'est pas juste du retard, y a bien quelque chose en gestation derrière. Autant dire que je stresse depuis des heures.

J'ai aussi abattu 8 pages de trad' depuis, ce qui sans Meta' derrière est un petit exploit.

Okay non correction, j'ai fait 14 pages, le minimum syndical est fait et Meta' n'est toujours pas là, 20h30, je suis de mauvais poil. Mais l'objectif est toujours de 20 pages et le défi d'en faire 26 pour que la prochaine fois le chapitre soit fini à coup sûr.

Donc :

Va là -> Metasigma (live stream anglais sur SoE)

Ou là -> Chapitre 44 (traduction de FO:E en cours)

Pour l'anecdote, Cesese s'est lui aussi amusé à écrire "live" et je me dis que ça serait sympa' de répandre la pratique, même si avouons-le c'est ennuyeux comme la pluie.

Du coup je teste de mon côté, en notant notamment que c'est au fanficer d'engager la conversation. J'ai donc décidé de déjà dire en début de document à quel page prendre le train puis, à partir de là, commenter à chaque fois que j'ai envie de râler. Et il y en a déjà un sacré florilège.

À mon avis ça ne prendra pas. Regarder quelqu'un écrire est trop plat, peu importe la bonne humeur qu'on mettrait derrière. Ça et bonne chance pour modérer. Mais eh ! J'aime expérimenter et ça ne me coûte rien, voire, ça peut me pousser à traduire encore donc yay !

...

Okay il est 23h15 et des poussières et Meta' va ENFIN démarrer son stream et oh punaise j'ai dormi pendant deux heures tellement j'ai attendu ça, j'ai eu le temps de découvrir Epic Pixel Battle mais pas grave, je saurai enfin le pourquoi du comment et peut-être au moins faire six pages de plus, voire douze si le moral y est. On tient bon !

L'important c'est que FLEX ! et, fanficers,
à vos plumes !

EDIT: Okay il y a une bonne et une mauvaise nouvelle.
La mauvaise nouvelle c'est que le dimanche c'est mort. Meta' va aller à l'église et en gros bah la probabilité d'un stream (à des heures convenables pour nous autres européens) est à peu près réduite à néant.
La bonne nouvelle c'est qu'il va streamer le lundi. Matin pour lui, donc soir pour nous. Et ça ça peut le faire.

Ce qui signifie qu'on va essayer de faire six pages ce soir et VINGT MOTHERBUCKIN' PAGES lundi soir ! Parce qu'on est des malades ! On est comme ça ! On FLEXE !

 

EDIT2: Okay Il est 2h du mat' à peu près, j'ai traduit 21 pages, objectif rempli, j'ai sommeil et visiblement je vais remettre ça demain soir (et non, il n'y aura pas d'article pour vous avertir, je reprendrai celui-là. 'Faut pas déconner non plus).
La journée a été frustrante as hay, mais au moins le résultat est là. Au passage je laisse mes commentaires de râlage pour demain soir, donc si vous voulez me voir hurler (j'ai vraiment hurlé) en live, ou que vous voulez sentir le pouvoir du flex et de l'Evermore, on se retrouve d'ici moins de vingt-quatre heures.

 

EDIT3: Meta's back! Il est 16h lundi et... trop occupé pour trad'. On se retrouve dans quelques heures.
EDIT4: Okay, 18h40 (ouais c'est pour les archives), Meta' va pas tarder à passer de Dark Sleep à SoE donc je m'apprête à m'y remettre. Mais d'abord niom.

EDIT5: Là ! Cette fois c'est bien la fin de cet article.
Il est 22h50, 5 pages de plus au compteur, il en reste 54 à faire dont 19 pour ce chapitre ce qui signifie que la semaine prochaine à coup sûr le 44 sera traduit et le minimum syndical est tombé à 11 pages par semaine.
Ouais c'est pas les vingt pages que j'aurais espéré faire aujourd'hui mais comme dit Meta' joue à Dark Sleep et n'a pas switché sur SoE, il est motivant mais 'faut pas déconner non plus. On est en semaine, j'ai du boulot, un peu fatigué, bref, à la semaine prochaine.

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La distance.
15 novembre 2014

Hi'.

Quand je suis arrivé sur MLP Fictions, mon premier article était pour dire que commenter sur le site était... compliqué. Je pensais à des questions abstraites mais de façon plus pratique, bêtement, il y a déjà que dans un commentaire on ne peut pas clairement citer des passages de texte.

Du coup, quand AuBe me fait remarquer que "Le Cours du siècle" aurait pu s'arrêter à la réplique de Celestia et que la dernière phrase ne sert à rien, et que pour lui répondre je devrais citer le texte à tout va, bah sans passer par un article ma réponse se résumerait à "oui, c'est vrai, c'est même ce que prévoyait le plan à la base". Autant dire que niveau discussion c'est un peu mort.

Alors qu'en fait, derrière cette question anodine (et la remarque de BroNie que bon, le rapport entre le texte et "le cours des choses" est pas évident), il y a tout un mécanisme littéraire.

Ouais, on va parler de la distance.

La distance c'est quoi ?

Imaginez le dialogue suivant :

"Applejack pense que tu es une tarte."
"Tu m'as traitée de tarte ?!"
"Ah non ! C'est Applejack qui le dit, c'est pas moi !"

On vient de se distancer des propos d'Applejack. Elle dit un truc et on signale bien que "c'est pas moi c'est elle !" La distance en gros c'est ça.

En apparence, la "distance" est l'ennemi juré de "l'identification". L'identification c'est quand le lecteur se met à la place de tel ou tel personnage. Il se met à interpréter l'histoire à travers le point de vue de ce personnage. Mais l'identification ne signifie pas que le lecteur approuve : c'est juste qu'on est en train d'avoir la version de ce personnage. Bêtement :

"Oui c't une tarte ! J'lui explique trois fois comment s'servir du harnais et elle arrive encore à m'l'endommager, j'suis désolée p'tit sucre mais y a pas moyen !"

Durant le court temps de cette réplique, le texte a voulu que vous vous identifiiez à Applejack. Vous la lisez et pour la lire vous devez adopter, ne serait-ce qu'une fraction de seconde, son point de vue : endommager les harnais est une raison suffisante pour traiter les poneys de tartes. Et ensuite, si vous avez de la sympathie pour je sais pas mettons Dash allez (c'est la mort de l'originalité là) vous vous distancierez la seconde d'après.

En d'autres termes, on peut passer le texte entier à suivre Applejack qui s'entête à être fâchée contre Dash (le texte veut donc qu'on s'identifie à Applejack) tout en désapprouvant son attitude parce que c'est elle la tarte (le texte veut donc qu'on se distancie d'elle, et est totalement de bonne foi). Et si les tartes ne vous suffisent pas, pensez à Sombra : on vous met dans les sabots d'un despote sadique mais, du simple fait qu'on veut choquer, le texte vous dit "t'as vu c'est mal". Prise de distance. C'est la différence entre :

1a) Applejack était furieuse. Toutes ses copines étaient contre elle ! C'étaient toutes des tartes, se dit-elle en remontant le chemin de la ferme, la tête basse.

1b) Applejack était furieuse. Aucune de ses amies ne l'avait soutenue. Elle remontait seule le chemin de la ferme, avec un mauvais goût de trahison.

Dans les deux cas l'identification est la même : on a accès aux pensées d'AJ, on est avec elle sur le même chemin à faire exactement la même chose. Mais en (1a) on dit qu'elle a tort, t'as vu, même qu'elle baisse la tête, si c'est pas une preuve ça... et en (1b) on dit qu'elle a raison, t'as vu comme les autres sont méchantes, si c'est pas une preuve ça...

Oui. Le texte vous dit quoi penser. J'espère que vous vous en étiez rendu compte depuis le temps.

Prenons un exemple concret. Dans "Testing testing 1 2 3", au début on a Twilight qui veut faire la leçon à Rainbow Dash. Au bon sens du terme. La leçon tourne court et Dash se met à accuser Twilight d'être nulle. Twilight se défend et on est un peu d'accord parce que bon, c'est quand même Twilight qui a essayé de l'aider. Ou alors vous êtes du côté de Dash et vous vous dites que c'est Twilight qui sait pas expliquer. Ce que je peux comprendre. Ouais... je peux parfaitement comprendre. Ahem je reprends ! Ce qui m'intéresse, c'est qu'au plus fort de la dispute on a les deux juments face à face, à égale hauteur, à voix égale, et toutes deux interrompues par Fluttershy.

Yup. La mise en scène vous dit "elles ont tort toutes les deux". Et effectivement, à la fin on découvre qu'étudier c'est cool (t'avais tort Dash) mais qu'il faut savoir s'adapter (t'avais tort Twilight). Punaise que cet épisode est bien fait.

Inversement, dans FO:E il n'y a pas de prise de distance. LittlePip a raison ta gueule. Il y a même des poneys qui pleurent tellement qu'elle est gentille (authentique) et chaque fois qu'on la critique, pour les mauvaises raisons, c'est une excuse pour la glorifier. En fait, on lui donne même des états d'âme juste pour qu'elle paraisse encore plus "je poutre ta mère". Et c'est une volonté de l'auteur : que son personnage soit exemplaire. C'est fait exprès. Et c'est super, super, super super super super (...) SUPER énervant.

Bien.

Ce râlage passé, est-ce qu'on a compris ce qu'est la distance ?

La distance, ou "prise de distance", c'est donc ce que le texte vous dit d'approuver ou non. Tout comme Fluttershy vient voir Dash pour lui dire ce qu'a raconté Applejack, le texte vient vous raconter cette histoire et peut vous faire "c'est pas moi c'est l'histoire". C'est ce qu'en logique naturelle on appelle la "prise en charge", à qui on attribue le propos. Bref.

Maintenant qu'on sait ce que c'est, la question c'est : comment on la met en scène ?

Tout d'abord, choisissez qui le lecteur est censé approuver et qui il est censé désapprouver. Par exemple, dans "Le Cours du siècle" on voudra qu'il approuve la classe et qu'il désapprouve Celestia. Notre objectif à partir de désormais est de mettre le maximum de distance entre le lecteur et Celestia.

Pour cela, donc, déjà on abandonne le récit à la première personne. C'est bête mais c'était une option (penser à "Melodrama" par exemple). Mais ce n'est pas suffisant. On va carrément s'interdire d'accéder aux pensées de la princesse. On la regardera faire mais pas une fois, pas une seule fois on ne suggèrera même ce qu'elle pense. Alors que pour le reste des personnages ? Pas de problème !

2a) Cette idée fit rire Celestia. Elle secoua doucement la tête.

2b) « Mais c'est stupide ! » Grogna Ringabell. Elle en voulait moins à la princesse à présent qu'elle ne cherchait à prouver qu'elle avait raison.

Celestia rit. Pourquoi ? Okay elle désapprouve merci on sait, elle secoue la tête. Mais alors pourquoi elle rit ? Le texte ne vous le dira jamais. Jamais. Jamais ! Tu mourras sans jamais avoir la réponse ! Notamment parce que moi-même je ne suis pas bien sûr. Je sais que c'est lié à son vécu mais ce qu'elle a vécu exactement... eh.

Par contre, Ringabell pas de problème. Le grognement est expliqué de long en large, tu lis en elle comme dans un livre ouvert. Que ce soit Nitpick ou les écolières, tout est détaillé et ce sont même les seules pensées détaillées.

Car oui, à ce niveau-là d'autres personnages ont leurs pensées scellées.

Vous ne voyez pas lesquels ? Très bien. Je pense à deux personnages : la maire et la mascotte.

Ce n'est pas tout à fait vrai pour la maire : au départ on dit qu'elle rit de la naïveté de ses concitoyens. Mais on ne dit pas ce qu'elle sait (que Celestia visite fréquemment les poneys) et on ne peut le savoir que si on additionne deux et deux (Celestia connaît déjà Nitpick). Maintenant regardez ce passage :

2c) ... tandis que la maire allait saluer Celestia. Elle regarda la vieille jument plaisanter avec la princesse, supposa que c'était normal puis paniqua en voyant l'alicorne venir vers elle.

Comparez le comportement de la maire et de Nitpick. C'est le jour et la nuit ! La première va rencontrer Celestia et plaisante, la seconde panique quand Celestia vient vers elle. Ça dure tout juste une phrase mais l'opposition est complète. Or, on n'a accès qu'aux pensées de Nitpick. On sait pourquoi elle stresse. On ne sait pas pourquoi la maire, elle, est si détendue. On peut seulement s'en douter.

Mais si la maire est vieille (et sait donc des choses que les habitants ne savent pas), la mascotte (monsieur Kiwi) est une autre paire de manches.

Et là j'ai envie de dire que ça aurait peut-être été plus clair si, au lieu d'un lapin, j'avais utilisé un chat.

2d) Elle regarda du côté de la cage en verre où la mascotte, monsieur Kiwi, continuait de se rouler dans la paille pour faire disparaître l'odeur du savon.

2e) Elle s'arrêta devant la cage de monsieur Kiwi qui grignotait alors, insouciant, et qui cessa pour se tourner face à l'alicorne. Le lapin hésita, s'approcha et regarda le sabot posé contre le verre.

Je passe le moment où le lapin "ronronne". Ici encore, on nous dit qu'il veut faire disparaître l'odeur du savon mais c'est tout. Et quand Celestia vient le voir, le lapin hésite et regarde le sabot : qu'est-ce qu'il pense ? On n'en sait rien. Même Angel est plus facile à décoder.

Il y a donc, dans "Le Cours du siècle", tout un jeu déjà au niveau de l'accès aux pensées. Il y a ceux qu'on peut comprendre et ceux qui sont mis à distance, qui ont leur monde à eux, loin du nôtre, qui sont mis en scène comme des étrangers.

Bien.

C'était une technique pour la mise à distance. Quelle autre technique on pourrait avoir ?

Le discours.

Tout comme le narration peut être à la première ou à la troisième personne, tout comme la narration peut avoir accès à telle pensée et pas à telle autre, la narration vous rapporte le discours des personnages. Et le discours peut être plus ou moins indirect.

Cela signifie que, pour mettre de la distance entre nous et le discours du poney, on pourrait simplement choisir le discours indirect.

2c) ... tandis que la maire allait saluer Celestia. Elle regarda la vieille jument plaisanter avec la princesse, supposa que c'était normal puis paniqua en voyant l'alicorne venir vers elle.

Que se sont dites la maire et la princesse ? Vous ne le saurez jamais. On vous dit juste qu'elles "plaisantent" et c'est tout. Plus indirect, comme discours, c'est difficile. Et donc oui, c'est une mise à distance. Mais pour l'essentiel, "Le Cours du siècle" fait le choix de quasiment tout mettre au discours direct. Du coup, la mise à distance au travers du discours est plus... subtile.

3a) « Les bébés naissent dans les choux. Le chou cherche ce qu'il y a de meilleur dans la terre et l'accumule en son coeur… »
Un poids de déception s'abattit sur la pouliche...

Ici on entend parler Celestia, puis soudain points de suspension et vous ne saurez jamais la suite. Naturellement vous vous êtes dit "ouais mais non c'était juste que son discours était trop long" et il y a de ça, mais c'est aussi que la pouliche a arrêté d'écouter. Et vous aussi, par la même occasion. Si vous regardez bien, plus tard on n'a pas peur des pavés.

Autre exemple ?

3b) « Je crois qu'il serait temp- »
Elle fut coupée.
La princesse l'avait arrêtée et lui offrait un regard à l'amabilité infinie.

La technique est la même. Nitpick dit quelque chose et se fait couper par Celestia. Traduction : Celestia désapprouve. Et comme le texte a laissé Nitpick se faire couper, le texte désapprouve également.

Disons les choses autrement : il y a un temps de parole, et en règle général celui qui parle le plus est celui qu'on favorise. Repensez aux débats minutés. Cela dit, on peut inverser la technique, et c'est ce que fait "Le Cours du siècle" : noyer la parole pour rendre le propos inintelligible. Vous ne voyez pas ? Le "tl;dr" ("too long; didn't read" -> "trop long ; pas lu"). Le personnage est libre de parler abondamment, un peu comme un poisson est libre de se débattre dans son filet. On le regarde s'enfoncer un peu plus.

3c) C'était tellement insensé que les petites ne savaient plus quoi dire.

C'est comme dans un débat, quand l'autre a tellement tort que c'est même plus la peine d'argumenter. Le type te fait un pavé de trois pages et toi tu te facehoof parce que la quantité changera rien au fait qu'il a tort. Parce qu'il a tort, hein, précisons-le. C'est mon exemple je fais ce que je veux.

Donc.

D'un côté on ne donne accès qu'aux pensées de la classe.

De l'autre on joue sur le discours pour décrédibiliser la parole de Celestia.

Si on additionnait les deux ?

Dit autrement, qui approuve Celestia ? Pour Nitpick c'est clair et net : jusqu'au dernier mot elle ne l'envisage même pas. Pour la classe ce l'est relativement aussi : on passe la majorité du texte à démontrer qu'elle a tort. Mais un mouvement se fait à la fin où elles jouent le jeu de la princesse, et où le discours offre des répliques égales, qui s'enchaînent, jusqu'à ce que la question de Ringabell fasse tout dérailler. Même alors, le raisonnement du texte est le suivant : ce sont des écolières, des petites. Elles sont naïves. Pas pour rien que Punchline est là.

Il n'y a, en fait, qu'un seul personnage qui approuve vraiment, et c'est le seul personnage dont on peut supposer qu'il se fiche complètement de la discussion. C'est monsieur Kiwi. De "circonspect", on pourrait dire, tête penchée, le lapin passe soudainement à un ronronnement improbable sous les caresses de Celestia. C'est la seule fois de tout le texte où le texte prendra le parti de Celestia.

Le reste du temps, le schéma c'est : "Celestia parle", "la narration désapprouve". À chaque fois que Celestia dit quelque chose, la narration qui suit est censée dire à quel point c'est absurde. Je vous rapporte à (3c), mais l'exemple le plus parlant est... la dernière phrase.

Si vous avez suivi ce qui précède, un enjeu du texte est le droit à la parole. Pas seulement la possibilité pour les personnages de parler, mais le crédit qu'on apporte à leur discours.

Si le texte s'arrêtait à la dernière réplique alors cette réplique aurait du poids. On serait obligé d'écouter Celestia parce que rien ne viendrait contrecarrer son discours. Elle aurait, littéralement, "le dernier mot". Et, on l'a vu, le texte s'acharne à faire exactement le contraire. Donc on répète le schéma. Celestia dit quelque chose ? On va narrer à quel point non c'est faux, et suggérer que la toiture a du mou. Avec du discours indirect, question de bien dire qu'on a arrêté d'écouter. Le dernier mot, c'est Nitpick qui l'a, et c'est "sénile".

Vala'.

Je te laisse imaginer de répondre ça dans un commentaire, sans la mise en page d'un article. Bonne chance.

"Le Cours du siècle" prend parti contre Celestia. Tout vous dit de ne pas la croire, toute la mise en scène est faite pour la discréditer, à commencer par la réponse elle-même. C'est ce qui a cours dans ce texte. C'est comme ça qu'il fonctionne. Et pour la discréditer il y a tout un enjeu quant au droit de parole. À la fin, désolé de reformuler, Nitpick lui dit "ta gueule", de façon très polie mais en gros c'est ça. Et si vous regardez bien, même Celestia a ses moments de silence :

4) Les poneys n'en mangent pas assez pour atteindre la petite. Et puis… »
Elle se tut.

Qu'est-ce qu'elle allait ajouter. Eh bien, en gros, que s'il y a trop de feuilles, la petite en grandissant va manquer d'oxygène. Et que donc, dans les choux trop gros, il y a des petites pouliches mortes. Je te laisse imaginer l'ambiance si elle avait expliqué ça.

Ce qui m'intéresse, dans ce texte, c'est qu'il n'y a pas de censure. Si Celestia veut dire un truc, c'est la dirigeante d'Equestria, elle peut. Mais quoi qu'elle dise, on ne l'écoutera pas. Et c'est elle-même qui, à la fin, au lieu de maintenir sa position cède soudain et avoue avoir raconté nawak. Oublions même de savoir qui a tort ou raison (rappelez-vous : Celestia a tort). Ça n'a jamais empêché celui qui avait tort de s'entêter, bien au contraire. Alors pourquoi Celestia cède ?

Pourquoi est-ce qu'elle ne cède pas dès le départ ?

Et là, il faut revenir à (2c) :

2c) ... tandis que la maire allait saluer Celestia. Elle regarda la vieille jument plaisanter avec la princesse, supposa que c'était normal puis paniqua en voyant l'alicorne venir vers elle.

Cet article parle de distance, alors quelle est la distance entre Celestia et la vieille jument ? La maire vient la saluer, elles plaisantent, bonnes copines ! Quelle est la distance entre Celestia et Nitpick ? C'est carrément la panique quand elle essaie de l'approcher. C'est dû au stress, c'est dû au rang, Nitpick met de la distance entre la princesse et elle, "simple professeure de bourgade paumée". Comparez :

5a) Elle lui sourit, enchantée.
« Nitpick, c'est un plaisir de te revoir. » Se réjouit la princesse.

5b) Celestia sourit aimablement et hocha la tête...

Celestia arrive en mode keupine, elle tutoie, elle retrouve une vieille jeune amie, c'est limite si elle n'apporte pas le pack de bières avec elle. Nitpick lui impose une fin de non-recevoir et on passe à (5b) : Celestia se tait, se contente de hocher la tête et reprend son rôle de princesse.

Ce n'est pas la seule fois dans le texte où Celestia joue à ça. Dès qu'elle entre dans la classe, elle parle aux écolières, et le texte insiste maladroitement là-dessus :

5c) Demanda-t-elle, amicale, mais vraiment amicale, avec le même ton qu'elle employait auprès de la professeure.

Ce que le texte cherche à dire, ici, est qu'elle s'adresse aux écolières comme à des égales. Elle cherche, là encore, à abattre la distance, à "se rapprocher" d'elles, quitte à se promener parmi les bancs. Et rebelote avec monsieur Kiwi. Elle passe la moitié du texte à vouloir gagner la cage pour aller caresser le lapin. C'est une lecture assez littérale de la "distance" : c'est la Celestia de "Melodrama", elle veut être proche des poneys. Elle est programmée génétiquement pour ça.

C'est pour ça qu'elle va voir les poneys dans leurs villages, c'est pour ça qu'elle accepte de dire ce qu'elle pense devant une classe et que quand Ringabell, qui se sent trahie par une amie, lui dit qu'elle a tort, elle a cette réaction :

5d) Celestia s'arrêta, surprise, presque choquée, et se renfrogna. Pour la classe, pour l'enseignante, pour la petite foule dehors qui essayait de guigner aux fenêtres, ce froncement ne signifiait pas grand-chose...

Qu'elle ait raison ou tort, Celestia est en train de se confier. Pourquoi est-ce que la réaction de Ringabell ne s'appliquerait pas à la princesse ? Parce que c'est une princesse ? Parce que c'est une adulte ? Ce n'est pas parce que le texte ne donne pas accès aux sentiments de Celestia que cette dernière n'en a pas !

Derrière l'histoire absurde, derrière la question du préjugé (au sens de "juger avant d'avoir entendu l'autre"), derrière les luttes pour la parole il y a simplement l'enjeu d'une alicorne qui essaie de se rapprocher des poneys, mode "Grand Galloping Gala" et qui supporte que ceux-ci la confinent dans un palais (premier paragraphe du texte) mais qui pète soudain un câble quand une pouliche lui refuse un répit. C'est l'histoire d'une jument qui n'est qu'une jument.

Et à ce titre, si le texte se finissait sur sa réplique, alors le lecteur finirait tellement proche de Celestia qu'elle serait quasiment en train de lui parler dans le creux de l'oreille. Une phrase plus tard, non seulement elle est partie (comme son absence au départ) et remise dans le moule du "les princesses vivent dans les palais" mais surtout elle repart seule. Ouais vous vous êtiez en train d'écouter Nitpick alors vous avez raté ce détail banal, normal : elle repart seule.

Donc.

Je résume parce que tl;dr.

La (mise à) distance c'est le texte qui dit au lecteur "untel a raison, untel a tort" et qui le pousse dans ce sens. C'est le texte qui se distancie de tel ou tel personnage, de ce qu'il fait, dit, pense.

Il y a une tonne de manières de mettre en scène la (mise à) distance. Le type de narration, le type de discours... qui on laisse parler, qui on écoute... il y a juste trop de techniques pour toutes les passer en revue.

Mais la (mise à) distance couvre beaucoup d'autres aspects, dont la distance entre les personnages, leurs relations. Et parfois, un texte peut s'intéresser à la façon dont les poneys mettent à l'écart une jument (et son discours), pas par méchanceté, juste parce que c'est ainsi que vont les choses.

Je sais, c'est un pavé, mais quitte à faire un article autant être aussi complet que possible. J'espère avoir répondu à la question et que ce soit le cas ou non, fanficers,
à vos plumes !

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Un mot sur PonyCell.
10 novembre 2014

Hi'.

Ouais je suis censé être en train de traduire là tout de suite -- le minimum syndical est fait, on est en pause, reprise dans deux heures, ça devrait me laisser tout juste le temps de ne pas pouvoir finir cet article -- oui ça commence à faire beaucoup d'articles en même temps -- je n'aime pas le spam -- et oui je vais critiquer mon propre texte -- j'aime râler.

À l'heure où on parle, PonyCell a 500 vues, deux fois plus que n'importe laquelle de mes autres fics'. 58 votes, 30 favoris, coup de coeur de l'équipe et même avant ça elle avait tellement plu qu'elle se trouvait sur Frenchy Ponies avant même mon arrivée là-bas.

Question d'en rajouter, Evy Eltrian en a fait la lecture : PonyCell - french reading.

Maintenant quelqu'un vient carrément de faire un article dessus -- d'ailleurs ce site, "Fic is not your enemy" a l'avantage d'offrir une jolie ouverture sur les fanfics' d'autres fandoms -- mais bref autant dire que je devrais me sentir fier.

J'en suis fier. Et j'aime bien ce texte. Mais étonnamment je ne peux pas me réjouir de ce succès. En fait, ça me mine un peu le moral.

Pourquoi ?

Pour rappel, PonyCell SA est l'histoire d'un live stream qui prend vie, avec dedans un clone de Fluttershy. Le héros, un "je" aussi transparent qu'un buvard, devient alors spectateur passif d'une course en avant pour, à partir de cet incident, promouvoir ces clones au grand public.

Je l'ai relue ce soir et je dois lui laisser ça : ça se laisse lire. Aucune formule difficile, aucun moment compliqué. On est loin d'un "Déesses" qui demande un décryptage à la Enigma. En fait, et c'est un reproche que je partage avec moi-même, le style est plutôt plat, un peu répétitif, assez flemmard. Alors oui, ça colle au fond, c'est pour l'atmosphère, mais littérairement ce texte est aussi intéressant qu'une brochure de gare.

Outre le héros en carton pâte et le style digne d'un fer à repasser, certains ont noté la fin plutôt étrange, qui semble tomber du ciel. Gardez ça en tête pour plus tard.

Mais pour le reste, les gens qui lisent PonyCell ressentent le malaise et ça c'est bien.

C'est dû bien sûr au florilège de détails (cornes, ailes, etc...) qui attire le regard et attise l'imagination, mais c'est dû surtout au silence, aux sous-entendus. Tout ce qui est vraiment révoltant est en général tu, gardé en coulisse. Le mécanisme du texte est au fond une curiosité malsaine, un voyeurisme. Les détails sont là pour suggérer une "Rainbow Factory" en coulisse qu'on ne montre jamais clairement et que le lecteur attend au détour de chaque page. C'était, du moins, l'intention : ne rien dire, tout sous-entendre, laisser l'imagination (et le raisonnement) faire le reste.

L'imagination a fait le reste, et le texte aidant, les gens se sont persuadés que PonyCell était une critique de la société. La plupart des commentaires vont dans ce sens, y compris quand les gens disent que l'univers de la fiction est le nôtre, ou que c'est réaliste, etc...

Oui, c'est vrai. Je me suis effectivement renseigné, j'ai cherché un certain réalisme. Reliance existe vraiment, le résumé du texte est inspiré presque mot pour mot d'une question sur leur site. L'ICMR existe aussi, et si Dambo est fictif (le nom d'un brony à qui on avait volé sa statue de poney en bois et qui s'était filmer en train de la récupérer) son champ de recherche est réel également.

Donc je critique le clonage ? La société ?

Eh bien... non.

PonyCell, à la base, critiquait le HiE. Plus précisément, l'opposition entre un monde humain tout pourri tout méchant tout qui a éteint la lumière et un monde équestre paradisiaque au point que c'est là où tu vas quand tu meurs (non mais littéralement). Cette opposition a le don de m'agacer.

Pourtant, elle est logique. Le but d'une HiE est de pouvoir s'évader. Pas au sens "oh non je veux me suicider lol" mais au sens "les choses peuvent s'améliorer". Imaginer des temps meilleurs, positiver... C'est une pause, un moyen de décompresser, comme une récré'. Et c'est donc normal de laisser derrière nous le monde tout pourri, voire même de le combattre.

La HiE est un moyen de réaffirmer ce qu'on aime, ce qu'on approuve, ce qui nous fait nous lever le matin. Ce qu'on a envie de voir plus souvent dans la réalité.

Et maintenant, un peu de contexte.

Je ne me souviens plus de quand date PonyCell, mais il y a un passage dedans qui est daté qui fait référence au Twilicorn et à la réaction de la communauté.

Durant toute la S2, et encore un peu en S3, la question que je ne croise plus vraiment aujourd'hui mais qui était pressante alors était de savoir si la série était "juste une série" ou "plus que ça". Le "juste une série" a gagné et c'est tant mieux, ça a évité des contraintes, le côté culte. Ouf. Mais ça a causé pas mal de désillusions, d'espoirs déçus. Je suis d'ailleurs toujours partisan du "plus que ça", tant qu'on n'essaie pas de l'imposer.

Le "plus que ça", ce peut simplement être le côté positif. Un îlot de bon sens au milieu du cynisme et de l'actualité. Ça peut aller plus loin, avec l'idée que le brony sera [insérer whatever ici] et, plus loin encore, qu'MLP pouvait rendre le monde juste un tout petit peu, tout tout petit peu meilleur.

Eh.

C'est là le vrai thème de PonyCell. Les clones n'y sont qu'une métaphore. Ce n'est pas une vision de notre monde, c'est notre vision de la série. Une vision où la série n'est vue que comme un produit de consommation, traité comme tel, parce que c'est un produit de consommation, conçu comme tel. Et le côté vivant, le malaise, c'est le "plus que ça". La scène finale, si inexplicable, c'est le "plus que ça", en face à face, qu'on regarde mourir. Oui j'avais toujours le Twilicorn au travers de la gorge. Et la saison 4, pour cool qu'elle soit... n'est pas la même chose.

Les gens aiment le PonyCell qui critique la société, le PonyCell où le monde est tout pourri et qu'on a toujours pas rallumé la lumière.

Eh, tant mieux ! C'est votre texte. Quand je publie un texte, je considère qu'il ne m'appartient plus. Vous en faites ce que vous voulez et vous y voyez certainement ce que bon vous semble. Content que vous ayez passé un bon moment.

Mais vous devez sans doute comprendre à présent pourquoi chaque fois qu'on me dit que le texte est bien, je baisse un peu plus la tête. Le texte qui se révoltait contre une vision très noire de l'humanité, applaudi pour sa vision très noire de l'humanité. Dommage que les idées, les valeurs, les principes, ne soient pas des êtres vivants.

Bon je retourne traduire dans mon coin à présent, il me reste du flex pour quelques heures et j'ai besoin de me changer les idées. On se retrouve à l'occasion et, fanficers,
à vos plumes !

 

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3615 Meta'.
09 novembre 2014

Hi'.

Il est 13h30, le stream a déjà commencé et ça fait un quart d'heure que les gens écoutent Metasigma parler de filles. C'est mignon et romantique mais pas exactement le hype idéal pour aligner des pages de trad'.

Les plus attentifs se seront rendus compte que le dimanche soir, à minuit plus précisément, il était censé y avoir les Lunatiques. Mais comme tout le reste, les Lunatiques ont été sacrifiées à l'autel du rush pour terminer la traduction de FO:E. Elles reviendront à partir de janvier. Qu'il y ait des participants ou pas.

Par chance, le projet Hydre tourne "tout seul", dans la mesure où c'est aux autres d'écrire. Un chapitre a été achevé mais j'y reviendrai à une autre occasion. Pour le moment : j'ai vaguement calculé que FO:E comptait 1'300 pages et qu'il m'en restait 102 pour achever ce monstre. Notre but aujourd'hui : tomber sous la barre des 100, et si possible aligner 30 pages, parce que je le sens bien. Le minimum syndical est à 15 pages mais pour être honnête j'ai aussi envie de terminer le plus vite possible pour vous épargner ces articles un peu embarrassants... de la pub' chaque semaine, sérieux.

Et en même temps, quand j'aurai fini FO:E, à côté de mon râlage infini ça me servira d'archives pour me rappeler de cette dernière ligne droite.

Wait.

On était censé parler de Meta' :

Va là -> Metasigma (stream anglais sur SoE)

Ou là -> Chapitre 44 (traduction d'FO:E)

On se met dans l'esprit, on sort le coca (ou la bière) et on se motive pour faire de "grandes" choses au nom de la communauté.

Chose amusante, ça date un peu mais quand la trad' sera terminée... oui je radote si je veux ! Quand la trad' sera terminée, il était prévu que j'enchaîne sur Asylum. Mais je suis un peu épuisé, du coup... Evy (le gars qui fait des lectures de fics' que va le soutenir punaise !) m'a suggéré de traduire les vidéos de FiMFlamFilosophy. Et l'idée me plaît. Beaucoup.

Donc ouais. Finissons-en avec cette fic' et passons à des choses plus sérieuses.

FLEX! À vous et, fanficers,
à vos plumes.

 

EDIT: Okay, 2h30 du mat' à peu près, j'ai traduit 19 pages et bon... Meta' joue à Dark Souls et moi je stresse un peu pour le lundi.
Je verrai encore si je peux rogner quelques pages en semaine mais mine de rien le minimum syndical est désormais à 14 pages et le chapitre est entamé à "un tiers", à trois pages près. Il reste 6 semaines et je suis toujours persuadé de pouvoir tenir le délai.
Au passage, j'allais oublier, j'ai vu quelques gens rester un peu, et même quelqu'un essayer de sauver le désastre qu'est ma trad' kilométrique. N'hésitez pas à commenter, pas pour la relecture hélas mais pour donner votre avis ou vous plaindre quand je fais des pauses. Si vous ne vous amusez pas à mes dépens, ce n'est pas drôle.
Et si vous êtes assez fous, dimanche prochain on peut se donner le défi de finir le chapitre.

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La logique (3) -- Les connecteurs
08 novembre 2014

Hi'.

Je suis obligé de commencer cet article par une image, et oui ça va être un râlage gratuit mais qui explique pourquoi, au-delà de la littérature, j'ai un besoin viscéral de parler de logique. Et 'pis vous êtes majoritairement français donc la politique suisse vous en avez ranabattre.

La jument colorée à droite c'est "Helvetia", moi je voulais l'appeler Edelweiss mais les gens ont pas voulu. Pour les besoins de la caricature, Helvetia représente ici la Constitution suisse. La Constitution suisse a un article intéressant (Titre 1, article 5, alinéa 4) qui dit que : "La Confédération et les cantons respectent le droit international." Et donc, pour défendre la Constitution, un parti suisse veut que la Constitution prime sur le droit international.

Au-delà de mon avis politique bien tranché sur la question, je vous invite à considérer la logique de la chose. On veut pouvoir ne pas respecter le droit international pour défendre une Constitution... qui dit de respecter le droit international. Vous savez comment faire désormais :

p =df "On respecte la Constitution"
q =df "On défend le droit international"

On défend la Constitution.
Si on défend la Constitution alors on respecte le droit international.
Donc on défend le droit international.

D'où vient l'erreur ? Eh bien, nos braves défenseurs de la Constitution ont décidé de la règle suivante :

On défend le droit international.
Si on défend le droit international, alors on ne défend pas la Constitution.
Donc on ne défend pas la Constitution.

Où que j'ai déjà vu cette logique, moi... ah oui, Twilight, dans l'article précédent ! La conséquence nous plaît pas donc buck la cause, et j'aurai enfin l'occasion de vous démontrer à quel point c'est logiquement absurde, au sens fort du terme, parce qu'aujourd'hui on va parler des connecteurs.

1. Définition

Eh. Les logiciens. J'ai dit définition. Pour les connecteurs. Ah ah. Drôle.

Ahem.

Si vous vous rappelez du tout premier article (sur les variables), les variables sont les objets qu'on va manipuler et les connecteurs... sont les outils qui vont nous permettre de les manipuler. En l'occurrence on en a déjà utilisé un, abondamment. Mais si, dans le second article (sur la valeur de vérité), et encore ci-dessus avec mon exemple politique tendancieux et mon dessin moche. Je parle du "si... alors..." qui permet de connecter la première ligne à la troisième, l'hypothèse à la conclusion. Connecter, connecteur, c'est bon, on a compris.

On a déjà fait des variables de connecteurs plus tôt mais c'est pas super intéressant pour nous alors tous les connecteurs qu'on utilisera désormais seront des constantes. Ce qui signifie qu'on sait ce qu'ils font. Un peu comme l'addition, on sait ce que ça fait... euh... ouais. On a appris par coeur tous les symboles mathématiques et comme on est en mode "tout tellement simple que c'en est insultant" on va devoir faire du par coeur également les symboles logiques.

Alors.

Pour définir un connecteur, il va nous falloir trois choses : a) son symbole, b) ses règles et c) sa valeur de vérité. Merci de ne pas faire de blagues avec (b), on vaut mieux que ça. En fait vous m'énervez, on ne va même pas parler de (b). Pas encore du moins. On attendra un prochain article pour ça. Pour le moment on va déjà se dépatouiller avec les symboles et la valeurs de vérité.

En même temps ces deux choses vous les connaissez. Bah si. Les variables. Genre "p", c'est un symbole, vous savez (ahem) que c'est une variable, vous avez reconnu le symbole, et vous pouvez même me donner sa valeur de vérité. C'est "vrai ou faux", qu'on écrira "1/0" parce qu'on aime les chiffres. Ou parce que c'est plus court. Aussi. Donc la définition de la variable, c'est ça :

p = 1/0

Vala', désormais quand vous verrez un "p" dans un texte, vous saurez que c'est une variable et vous le saurez parce que sa valeur de vérité est totalement inconnue, il peut valoir n'importe quoi.

Maintenant si on reprend notre "si... alors..." qui permet de mettre les capitales en bouteille, à quoi ressemble sa définition ? Eh ben à ce stade, c'est ça :

>( - - ) = 1011

Très bien stop, on va décoder.

À gauche on a le symbole. Okay c'est plus compliqué qu'une lettre mais vous allez vous en sortir. Pour le moment regardez à droite, du côté de la valeur de vérité. On a un bizarre de truc, là, le "1011" qui pour vous ne signifie absolument rien. On va se concentrer dessus et ensuite on reviendra sur le sac de noeuds du côté gauche de la définition.

Comment on connaît la valeur de vérité d'un connecteur ? Je veux dire, à part en l'apprenant par coeur ? Eh bien, déjà, on notera que c'est une constante : la valeur on la connaît. Le problème c'est qu'il n'y a pas qu'une valeur, il y en a quatre. "1", "0", "1" encore et enfin "1". Quatre valeurs de vérité pour un seul connecteur, y a un truc pas logique...

Mais si on reprend l'exemple politique totalement irrespectueux du départ :

1) Si on défend la Constitution alors on respecte le droit international.

Je suis vraiment désolé mais moi je vais écrire "Si p alors q", c'est bien plus rapide à taper et je suis flemmard. Il faudra de toute façon un jour faire le pas alors autant le faire aujourd'hui.

Question : est-ce que l'exemple (1) est vrai ? C'est quoi la valeur de vérité de l'ensemble ?

Eh bien, déjà, ça va dépendre de la valeur de vérité de chaque variable. Là des variables y en a deux, "p" et "q". Donc selon qu'elles sont vraies ou fausses, la valeur de l'ensemble peut changer. "p" peut valoir 1 ou 0, ça fait déjà deux valeurs de vérité possibles pour l'ensemble de l'exemple (1). Tu rajoutes à ça les deux valeurs de vérité de "q" (aussi 1 et 0 pour ceux qui suivent) et tu obtiens... quatre cas possibles. Quatre... valeurs de vérité... attends ça rappelle un tr- ah oui la vlaeur de vérité du connecteur !

Le connecteur "si... alors..." porte sur deux variables. Cela signifie que la valeur de vérité du connecteur dépend des valeurs de vérité des variables sur lesqu- la phrase est trop longue c'est ça ? Quand une variable connectée par le connecteur change, le connecteur change également. Le seul changement possible c'est 1 ou 0 donc "1011" liste toutes les variations possibles à l'intérieur du connecteur. Et comme c'est toujours difficile à comprendre, on va passer à la pratique :

1a) Si 1 alors 1
1b) Si 1 alors 0
1c) Si 0 alors 1
1d) Si 0 alors 0

En (1a), les deux variables sont vraies. En (1c), la première est fausse, la seconde vraie. Alors maintenant, que vaut l'ensemble pour chaque cas ? La réponse est dans la valeur du "Si... alors..." : 1011.

1a) "Si 1 alors 1" = 1
1b) "Si 1 alors 0" = 0
1c) "Si 0 alors 1" = 1
1d) "Si 0 alors 0" = 1

Cela signfie que "Si... alors" sera toujours vrai si la première variable est fausse. "Si le Titanic n'avait pas coulé..." alors tout est possible. Bah oui, le Titanic a coulé, on a aucune idée de ce qui serait arrivé autrement. Là je suis obligé d'avouer qu'en fait c'est une convention, la véritable valeur de vérité vraie on ne la connaît pas, mais on a décrété que c'était 1011 et ça nous arrange donc le seul cas où ce connecteur donne un résultat faux, c'est quand la première variable est vrai, "Si le Titanic a coulé..." et que la seconde variable est fausse, "... alors Vuld Edone dessine bien."

On peut du coup revenir au syllogisme : si l'hypothèse est fausse, la règle associée sera toujours vraie. Le problème vient donc de l'hypothèse, pas de la règle. Si l'hypothèse est vraie, la règle associée ne sera fausse que si la conclusion est fausse. Le problème vient donc de la règle, pas de l'hypothèse. Donc si la conclusion est fausse, c'est soit la règle, soit l'hypothèse, mais jamais les deux.

Je ronronne secrètement devant cette rigueur.

Désolé d'insister donc mais "1011" signifie "ce n'est faux que si la première variable est vraie et que la seconde est fausse". Cette suite de chiffre se décode donc ainsi : "voici le résultat pour la premier cas de figure... pour le second cas de figure... etc..." sachant que l'ordre des cas de figure est toujours le même. Vous vous y ferez.

Okay alors à ce stade je sais, je sais, vous n'avez aucune pratique et donc vous ne pouvez pas vraiment lire la valeur de vérité d'un connecteur. Rassurez-vous, vous allez avoir l'occasion de vous exercer au travers de l'article. Mais là vous devez déjà être gavé d'en parler donc on va laisser ça de côté et revenir sur le symbole, le ">( - - )" qui fait peur à gauche de la définition.

Pour faire simple :
">" C'est le symbole du connecteur
"( - - )" Ce sont les variables sur lesquelles "porte" le connecteur

Donc on reprend notre exemple (1), "Si p alors q" (ou remettez les phrases si vraiment c'est trop traumatisant) et on le réécrit mais avec le symbole cette fois :

2) >( p q )
2a) >( On défend la Constitution   On défend le droit international )

Voilà ! Je vous ai mis les phrases alors lâchez-moi !

Et je sais, pour les malheureux qui ont eu à subir la logique classique, en général on met le ">" au milieu, pas à gauche. Nous on va le mettre à gauche. Vos gueules vous comprendrez pourquoi. Et quand vous aurez compris pourquoi vous vous demanderez comment on a jamais pu imaginer le faire autrement.

Maintenant si je vous écris :

3) ≡( p q )
3a) ≡( On défend la Constitution   On défend le droit international)

Est-ce que c'est toujours le même connecteur ? Non ! Vous avez remarqué que le symbole à gauche n'est plus ">" mais "≡". Donc pour savoir de quel connecteur on parle on regarde à gauche de la parenthèse. Et pour savoir quelles variables sont concernées par ce connecteur on regarde l'intérieur de la parenthèse. On pour gagner de la place on utilise des lettres pour les variables, parce que grmf...

2. L'implication

Maintenant qu'on ne sait pas encore mais bientôt on saura lire la définition d'un connecteur, il est temps de se faire la liste par coeur, et on va commencer, bien sûr, par le "Si... alors..." également appelé ">( - - )" avec amour. Donc :

Implication :
>( - - ) = 1011
"Si... alors..."

J'ai déjà eu à apprendre du vocabulaire allemand durant le lycée, je sais à quel point c'est pénible donc ne vous inquiétez pas, lisez juste, comprenez ce que vous comprenez et laissez tomber le reste. Vous vous soucierez d'apprendre quand les prochains articles vous donneront une raison de le faire. Là, essayez juste de comprendre.

L'implication est donc le fameux "si... alors..." nécessaire au syllogisme, et qui est censé représenter la relation de cause à conséquence. "Si Rarity tue Tom alors Tom est mort", ce qu'il y a à gauche cause ce qu'il y a à droite. Si ce qui est à gauche est vrai alors ce qui est à droite le devient aussi.

3. L'équivalence

L'implication c'est chouette, ça signifie que si on a une variable on peut en obtenir une seconde. Ça fait avancer le schmilblick. Le problème c'est que ça ne va que dans un sens. Bah ouais... si la variable de droite est vraie, ça ne nous dit absolument rien sur la variable de gauche... ou comme je l'avais dit à propos des sophismes : "Si la conclusion est vraie, ça ne veut pas dire que l'hypothèse l'est aussi. Il peut y avoir d'autres raisons." C'est un peu le coup des tigres en papier :

"Si mes trucs en papier font fuir les tigres alors il n'y a pas de tigres."

La conclusion est vraie, il n'y a pas de tigre... ou alors vous avez un problème et commencez à courir... mais l'hypothèse est foireuse, les trucs en papier ne font pas fuir les tigres. C'est juste que les tigres ont mieux à faire que de vous regarder lire des articles sur la logique.

Le sophisme consiste en fait, en termes logiques, à confondre l'implication et l'équivalence.

Équivalence :
≡( - - ) = 1001
"... équivaut à..."

Tout de suite, on doit remarquer deux choses. La première, c'est que ce connecteur porte également sur deux variables. La seconde, c'est que sa valeur de vérité est très, très, très, trèèèèès proche de celle de l'implication. La seule différence c'est que désormais la variable de droite nous permet d'obtenir la variable de gauche. En cas d'équivalence, l'absence de tigres signifie que les trucs en papier les font effectivement fuir.

Pour le vérifier :

3b) ≡( 1 1 ) = 1
3c) ≡( 1 0 ) = 0
3d) ≡( 0 1 ) = 0
3e) ≡( 0 0 ) = 1

Si les deux valeurs de vérité (donc les deux variables) ne sont pas identiques, le connecteur est faux. Quand une variable est vraie, les deux le sont. Quand une variable est fausse, les deux le sont. Vous me dites si je radote.

4. La négation

J'aurai un dernier connecteur à deux variables à vous montrer mais pour le moment, question de bien comprendre comment ça fonctionne, on va voir un connecteur... à une seule variable ! Ouais ouais ça existe. En fait vous n'avez pas idée de ce qui peut exister mais simple, simple... sinon on est encore là demain. Et techniquement c'est demain. D'ailleurs c'est quoi cette lumière à ma fen- la suite !

La négation, donc, intuitivement vous savez ce que c'est, mais logiquement c'est ça :

Négation :
~( - ) = 01
"non-..."

À droite de la définition on est passé de quatre à deux chiffres, c'est cool. C'est aussi dû au fait qu'il n'y a plus qu'un tiret dans la parenthèse, signe que le connecteur ne porte que sur une seule variable. Du coup... c'est plus vraiment un connecteur... mais on a décidé d'appeler ça un connecteur donc on va rester cohérents.

Cela dit, vous ne savez déjà pas lire les valeurs de vérité à quatre chiffres alors à deux chiffres c'est même pas la p- qu'est-ce que je raconte moi je vous le fais tout de suite :

4a) ~( 1 ) = 0
4b) ~( 0 ) = 1

Si la variable est vraie, la négation la rend fausse. Si la variable est fausse, la négation la rend vraie. Bah oui, c'est une négation. En gros rappelez-vous, on a défini "p" par "1/0". Si on définissait un connecteur qui ne porte que sur une variable et qui ne fait rien, ce connecteur vaudrait alors "10" : vrai si la variable est vraie, faux si la variable est fausse. Un connecteur change donc les valeurs de vérité.

La même logique s'applique pour les connecteurs à deux variables : c'est juste qu'on a deux fois plus de variables.

5. La conjonction

Okay je vais expédier celle-là, elle sert quasiment à rien mais :

Conjonction :
^( - - ) = 1000
"... et ..."

Bah c'est le "et" qu'on connaît et qu'on voit partout et qu'on est tellement habitué à l'utiliser sans réfléchir ni regarder. Son symbole on s'en fiche, sa valeur c'est "1000", ce qui signifie "ce n'est vrai que si les deux variables sont vraies", ce qui est un peu le but d'une conjonction.

5) "Je ne viens que si Sombra est cool ET que Chrysalis est un mec."

Autant dire qu'il risque pas de venir mais ce qui nous intéresse c'est qu'il veut que les deux conditions soient remplies. Si l'une manque c'est mort, tout est annulé.

Petite anecdote pour votre culture, la logique classique part du principe que le nombre de connecteurs est limité. En gros il n'y a que quatre connecteurs à une variables (11, 10, 01, 00) et seize connecteurs à deux variables (1111, 1110, etc...) couvrant toutes les combinaisons possibles. Bien sûr nous on est en train d'apprendre une logique kidéchir donc ces foutaises nous font rire mais dans le principe c'est ça. Il y a un connecteur pour le cas où "une des deux variables peut être vraie" (la disjonction) et même un connecteur pour le cas où "les deux connecteurs ne peuvent pas être vrais en même temps" (disjonction exclusive)... Mais on s'en fout.

6. Matrices

Vous avez désormais des variables, des valeurs de vérité et des connecteurs. Bon, quelques connecteurs. Vous n'êtes pas encore des dieux vivants mais c'est pas loin de ça.

Pour rappel on a donc :

Négation : ~( - ) = 01
Implication : >( - - ) = 1011
Équivalence : ≡( - - ) = 1001
Conjonction : ^( - - ) = 1000

Et comme je suis un petit sadique je vais vous en rajouter deux :

Vrai : T = 1
Faux : F = 0

Ouais ce sont des connecteurs. À zéro variable. Donc "T" vaudra toujours "vrai" et "F" vaudra toujours "faux". Pour le cas où vous n'aimez vraiment pas les 1 et les 0, vous pouvez désormais utiliser ça. Et oui, chez nous les connecteurs à 0 variable ça existe.

Mais bon, là on a des variables, des connecteurs, des valeurs de vérité... concrètement on en fait quoi ?

Concrètement vous pouvez désormais vous amuser à créer des tas de formules compliquées et surtout vous pouvez lire lesdites formules compliquées. En supposant que vous ayez appris les symboles par coeur. Forcément si on ne vous donne pas la définition... mais quel espèce de sadique roux ferait ça...

6) >( p q )

Vous voyez ça, vous êtes censés lire "Si p alors q" (et comme vous vous rappelez de l'exemple (2a) vous avez même remplacé les variables, ce luxe...) c'était facile j'ai triché, on le refait :

7) ^( p q )

Okay moins évident, on lève les yeux, dans la liste le symbole " ^ " c'est la conjonction, ça se lit "et", donc : "p et q". Vous pouvez  même jouer au malin et dire que ça vaut 1000. Ça sert à rien mais vous pouvez. On tente plus difficile ?

8) >( p ~( p ) )

Mh. C'est bizarre. On a un connecteur... à l'intérieur d'un second connecteur. On a le droit de faire ça ? Évidemment que oui, répondront ceux qui se rappellent du premier article sur les variables : on peut remplacer "q" par ce qu'on veut, donc par un connecteur également. Là j'ai remplacé "q" par "~( p )" et vous ne pourrez rien pour m'en empêcher.

Comment ça se résout ? Comme ça :

8a) >( 10 01 )

On remplace donc "p" par sa valeur de vérité, "10", qui signifie "il vaut vrai ou faux". Et on remplace "~( p )" par "01", qui signifie "il vaut faux ou vrai". Yup, on "fixe" les cas de figure de "p" et tous les connecteurs se lisent par rapport à ces cas de figure. Ici "10" est inversé. Grâce à ça on sait que quand la première variable, "p", est vraie, la seconde variable, ~( p ), est fausse... c'est un peu sa définition. Idem quand "p" est fausse, bref : on ressort la définition de l'implication, "1011", et on en déduit... "01".

Si vous avez compris comment... vous m'impressionnez. Moi à votre place je me gratterais le crâne à essayer de comprendre.

Si vous n'avez pas compris : on a deux cas de figure. Dans le premier cas, "p" vaut 1 et "~( p )" vaut 0. C'est le second cas de figure de notre définition, "1011". Le second cas, nous dit la définition, vaut "0". Maintenant on revient à la formule : "p" vaut désormais 0 et sa négation 1. C'est le troisième cas de figure de notre définition, "1011". Le troisième cas, nous dit la définition, vaut "1". Résultat : 01. On a couvert toutes les combinaisons possibles, il y en a deux, et on donne le résultat pour chacune d'elles.

Vous verrez, petit à petit, à force d'en lire vous finirez par comprendre la logique derrière ces valeurs de vérité bizarres.

Là, mauvaise nouvelle, je me dois de compliquer encore. Mais vous avez le droit de décrocher à ce stade, personne ne vous en voudra. C'est juste que j'ai une dernière chose à vous dire sur les connecteurs :

9) >( p ^( q p ) )

Même logique que pour (8), on a un connecteur dans un autre connecteur. Même logique que pour (8), on a simplement remplacé "q" par " ^( q p ) ". Même logique que pour (8), on va passer en revue tous les cas de figure pour définir la valeur de vérité de (9).

Et là ce sont des formules encore assez simples, avec juste deux connecteurs. Avec la pratique vous manipulerez des formules qui peuvent aligner facilement dix connecteurs ou plus. Mais pour le moment, rien qu'un connecteur c'est galère et deux vous êtes perdus, donc on reprend et on essaie d'y aller méthodiquement.

Déjà, on a combien de cas de figure ? On a deux variables, chacune a deux valeurs de vérité possible (1 ou 0), ça nous donne... quatre valeurs de vérité. Yup, le nombre de cas de figure dépend du nombre de variables dans la formule. Là on a juste deux variables, et on fera en sorte de ne jamais monter au-dessus, mais le jour où vous travaillez sur le connecteur "mais" et qu'il y a trois variables je vous jure que c'est pas drôle.

Maintenant, comme il y a quatre cas de figure on va tout devoir lire avec des valeurs à quatre chiffres. Y compris nos variables. Donc "p" qui valait 10 on va le réécrire... 1100. On a juste dédoublé chaque chiffre. Et pour "q" qui valait... aussi 10, on va le réécrire... 1010. Wat ? Bah si on l'avait aussi réécrit en 1100, "q" aurait été équivalent à "p". On veut donc leur donner des valeurs différentes pour couvrir, comme dit, tous les cas de figure :

p q
1 1
1 0
0 1
0 0

Je vais être franc. Il est 8h du mat', j'ai pas dormi, je suis encore agacé par je-vais-pas-polémiquer et je sais que ce point 6 est abominablement compliqué pour vous. Mais j'ai envie de dire qu'ici, "tout s'éclaire". Et je sais que vous m'en voulez à mort de dire ça mais regardez bien: on a quatre lignes de chiffres et chaque ligne nous donne une combinaison différente : "11", "10", "01" et "00". En attribuant "1100" à p et "1010" à q, on a donc réussi à couvrir tous les cas de figure, selon la valeur de vérité de p et q.

Mais ces deux colonnes de quatre chiffres devraient aussi, si vous êtes particulièrement réceptifs, vous rappeler les valeurs de vérité de nos connecteurs. Je vous le refais :

p q     >( p q )
1 1     1
1 0     0
0 1     1
0 0     1

Et là, enfin, enfin, ça devient lisible. Quand on écrit les valeurs de vérité, on le fait comme ça : on écrit tous les cas de figure possible en autant de lignes sous la formule, puis on donne la valeur de vérité, pour chaque cas de figure, des variables et de là, des connecteurs (notez qu'on aligne alors la valeur de vérité pile sous le symbole du connecteur). À la première ligne les deux variables sont vraies et donc ">" est vrai. À la seconde ligne... et ainsi de suite.

Bien sûr ça prend une place incroyable et c'est facilement décalé selon la police utilisée mais ça rend les choses teeeeeellement plus claires. Même si je me doute que pour vous ça reste pas mal obscur.

7. Dominance

Et maintenant vous avez tous les outils pour lire (9) :

>( p ^( q p ) )
1  1 1  1  1
0  1 0  0  1
1  0 0  1  0
1  0 0  0  0

En espérant que la mise en page n'aura pas tout décalé pour vous : "p" vaut 1100, et le vaudra partout. "q" vaut 1010 et le vaudra partout aussi, même s'il n'apparaît qu'une fois. ^( q p ) vaut donc, vous pouvez tester si vous êtes courageux, 1000. Vu qu'il n'est vrai que quand p et q valent 1, donc les inverser dans les parenthèses n'a servi à rien. On a désormais "p" qui vaut 1100 en variable de gauche et " ^ " qui vaut 1000 en variable de droite. Là encore vous pouvez faire le calcul vous-même, reportez-vous à la définition de l'implication mais sinon croyez-moi sur parole, ">" vaut toujours 1011.

C'était pas drôle, on va s'en faire une compliquée :

10) >( p >( q ^( ~(q) >( q ~(p) ) ) )

On ne s'affole pas et on le fait dans l'ordre. L'ordre, c'est la "dominance", d'où le titre de cette ultime partie. Si vous êtes arrivés jusqu'ici déjà toutes mes excuses et ensuite, considérez ça comme un exercice que je vais faire à votre place, au prochain chapitre on fera une petite pause en causant du connecteur le plus compliqué de l'univers donc pantouflez et laissez-moi calculer la vérité à votre place.

10a) >( q ~(p) ) = >( 1010 0011 ) = 0111
10b) ^( ~(q) >( ... ) ) = ^( 0101 0111 ) = 0101
10c) >( p ^( ... ) ) = >( 1100 0101 ) = 0111

L'exemple (10) vaut donc 0111. Dit autrement, si les deux variables sont vraies en même temps, alors le résultat est faux.

Comment on a fait... eh bien on y est allé étape par étape. Par ordre de dominance. La "dominance" nous dit quel connecteur "domine" les autres. Ouais... ouais. En fait je ne sais pas si vous avez remarqué, mais dans toutes nos formules il y a toujours un connecteur tout tout tout à gauche de la formule, et tous le reste se trouve à l'intérieur de sa parenthèse. Ce connecteur, c'est le connecteur "dominant". Il porte sur l'ensemble de la formule (séparée en deux variables). À l'intérieur, chaque variable a à son tour son connecteur dominant, et ainsi de suite...

Donc ce qu'on a fait, c'est qu'on a démarré par le connecteur tout en bas de l'échelle (10a), en ignorant la négation parce que la négation je la fais de tête. J'ai donc isolé le plus petit connecteur, celui qui ne domine rien, puis j'ai remplacé ses variables par leurs valeurs de vérité et j'ai écrit le résultat pour chaque cas. J'ai obtenu 0111.

J'ai alors pris cette valeur et remonté d'un rang dans la dominance (10b). Une partie de la formule compliquée est déjà résolue (0111), je n'ai pas eu à m'en soucier et j'ai pu résoudre directement la valeur de vérité du connecteur dominant en (10b). Et idem en (10c), et ibidem s'il y avait encore eu d'autres connecteurs au-dessus. La dominance nous dit dans quel ordre calculer la formule pour obtenir sa valeur de vérité. Cette valeur de vérité correspond à la valeur de vérité du connecteur "dominant", le connecteur tout au-dessus ou, généralement, tout à gauche.

Mais résumons parce que là on est clairement dans un cas de tl;dr.

 

8. tl;dr

On a découvert une liste de connecteurs :

Négation : ~( - ) = 01
Implication : >( - - ) = 1011
Équivalence : ≡( - - ) = 1001
Conjonction : ^( - - ) = 1000

Je ne vous demande pas de les apprendre maintenant mais on va les utiliser jusqu'à l'écoeurement. Les trois premiers du moins.

On a aussi découvert comment les lire :

">" = symbole du connecteur
"( - - )" = variables sur lesquelles il porte
1011 = valeur de vérité du connecteur

On et on sait désormais que 1011 liste en fait le résultat de tous les cas de figure, selon la valeur de vérité des variables, c'est-à-dire selon si "p" vaut 1 ou 0 et si "q" vaut 1 ou 0 :

p q     >( p q )
1 1     1
1 0     0
0 1     1
0 0     1

Une fois qu'on a la valeur de vérité des variables, la définition du connecteur nous donne le résultat. Donc le connecteur, c'est un super-transformateur à valeurs de vérité.

Après bon, je veux bien faire un article entier par connecteur mais... en un sens c'est ce qu'on fera plus tard. Là je ne veux pas que vous appreniez les connecteurs par coeur ou que vous soyez soudainement et miraculeusement capables de lire des formules complexes comme si vous aviez fait ça toute votre vie. Je veux juste que vous compreniez le principe derrière.

Il y a des variables, elles ont des valeurs de vérité et les connecteurs vont permettre de modifier ces valeurs.

C'tout.

La prochaine fois on va donc, comme promis, découvrir le connecteur le plus compliqué jamais inventé par l'équinité (et l'humanité aussi dans son temps libre), celui qui alourdit de 50% à lui tout seul n'importe quelle formule mais qui est tellement fondamental qu'on en oublie carrément de le définir... et comme définir un connecteur ça prend pas long on en profitera pour faire une pause et revenir sur tout ce qu'on a appris, question que vous ayez le temps d'assimiler.

Donc on reste calme et on panique, on continue de se demander le rapport avec ses textes, on demande gentiment aux autres de l'appliquer à l'occasion sur des sujets d'actualité et bien sûr d'ici là on s'intéresse, fanficers,
à vos plumes !

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