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Élaborer une histoire.
18 mai 2015

Hi'.

Lorsque le Mary's challenge est sorti, je me suis dit deux choses. La première était "wow ce nombre d'articles" et la seconde, avec mon commentaire comme appui : "j'ai aucune idée de ce que je vais faire".

Moins d'une heure plus tard, j'avais écrit le plan de mon texte, et commencé la rédaction.

Puis bon, vers 17h j'ai eu un coup de déprime, du coup le texte est en stand-by mais je voulais profiter de la nuit pour expliquer comment je suis passé de "pas la moindre foutue idée" à "voilà mon plan en cinq parties".

Commençons brièvement par le concept.

 

1. Le concept

Il me faudrait un article complet pour en parler mais on va résumer.

Le concept, au départ, c'est juste l'idée de base. Par exemple, ici, c'est le thème du concours : et si je faisais une Mary-Sue ?

Le concept, dans un second temps, c'est l'unité fondamentale du texte. Je vous rapporte au lien ci-dessus pour le détail, c'est compliqué, mais l'important est que c'est l'alpha et l'omega du texte, le core, le- dans quel langue je dois te dire que c'est important ? Et c'est horriblement abstrait et difficile à décrire.

Sauf pour moi.

Chez moi, le concept du texte est ce que j'ai à dire. J'utilise mes textes pour dire indirectement ce que je ne peux pas faire en public. PonyCell ? Une critique de la HiE. Caudectomie ? Mon avis sur le gore. Melodrama ? Je me moque de mes propres textes. "Ce n'est rien" répondait à un avis sur le suicide, tandis que "Déesses" traitait du greuh et ainsi de suite. Les textes que je préfère sont ceux qui disent quelque chose et ce message, c'est le concept, ce qui justifie chaque mot que j'y utilise.

Donc pour le concours, j'ai soudain eu mon message.

Et c'était facile, ce n'est pas comme si j'avais fait tout un article sur les personnages secondaires. Alors comment j'allais faire ? Facile. Être hors-sujet et fidèle au concours à la fois. Faire un personnage complètement fumé sans que le lecteur, habitué à en croiser tous les jours, ne s'en rende compte.

Le héros doit être un Gary-stu par défaut.

Le lecteur allait lire un texte où le héros ne lui semblerait "pas si puissant que ça", alors qu'en fait tout indique que c'est un bourrin sans nom. Et comme dans tous mes textes, l'enjeu ne sera pas donné clairement, à savoir reconnaître le héros pour le deus ex sur pattes qu'il est. Au contraire, comme à mon habitude, je jouerai l'avocat du diable en suggérant qu'au fond il est tout à fait "dans la norme", justement parce que c'est ce qu'on attend du héros.

 

2. À partir de là ?

Deux questions méritent d'être posées.

La première, comment j'en suis venu à mon concept ? Ce n'est pas si évident. Au départ je voulais critiquer justement les Mary-Sue & co, mais il y a des tonnes de manières de le faire. Pourquoi cette approche plutôt qu'une autre ?

La seconde, comment, depuis ce concept, développer mon histoire ?

Les deux réponses sont les mêmes.

On fonctionne un peu tous pareil, plus ou moins fondamentalement par association d'idées. Chez moi, ça consiste à imaginer tout et n'importe quoi, à tout balancer sur la table pêle-mêle comme ça vient. En gros j'étais en train de faire la cuisine en même temps que j'imaginais tout ce que je pourrais faire avec un Gary-Stu : des scènes, des répliques, un peu tout et n'importe quoi.

Ce que je veux dire par association, c'est qu'on n'estime jamais une idée pour elle-même. On n'évalue une idée que par rapport à une autre. C'est ce qu'en science du langage on appelle la "valeur oppositive". Par exemple, disons que j'écrive un texte romantique entre Berry Punch et euh Trenderhoof. Soudain je me dis "et si j'ajoutais un vaisseau spatial ?" En soi les croiseurs sidéraux c'est cool, mais si je l'ajoute, va savoir pourquoi, ça va un peu mal passer.

Donc retournons à ma cuisine.

Sans même y penser, une chose que j'ai fait a été d'appliquer l'idée d'un Gary-Stu à tous mes textes ou projets de texte sur MLP. Et dans mon fanon, ça m'a tout de suite redirigé sur Tartarus et sur un monstre en particulier : Ikorion. Je passe les détails mais Ikorion est proche des héros classique au sens où on attend des héros classiques qu'ils se surpassent et accomplissent l'impossible.

Ce n'est pas la seule piste qui m'est venue en tête. Par exemple, j'ai imaginé le cliché où un gentil se retournerait contre le héros et se révélerait le gros meuchant. Et c'est tombé sur Celestia. Sauf que dans mon fanon, Celestia aurait de bonnes raisons de le faire, vu que le héros y serait considéré comme un monstre.

Petit à petit, je me suis mis à comparer ces nouvelles idées -- Ikorion, le héros monstre -- non plus seulement avec l'idée de base, du "Gary-Stu", mais aussi entre elles. Pour voir si elles étaient cohérentes, si je pouvais les combiner. Et l'intersection, le point commun entre toutes, c'était justement cette vision de l'héroïsme : le lecteur veut que le héros soit puissant parce qu'il aime se sentir lui-même puissant.

D'où je me suis demandé : et si on aimait les Mary-Sue ? Et paf, j'avais mon concept.

Ce concept est également une idée, donc à partir de là je n'avais plus qu'à, de nouveau, jeter pêle-mêle toutes les idées et regarder celles qui étaient cohérentes avec mon lecteur qui veut se sentir puissant.

 

3. Le cycle de développement

Développer un texte ne consiste donc pas juste à jeter des idées comme elles viennent, tout et n'importe quoi. Oui, il y a de ça, et beaucoup, et plus on balance d'idées plus on a de chances d'en avoir de bonnes.

Mais la phase de développement -- qui ne s'arrête jamais, y compris quand on commence à écrire et, même, après qu'on ait mis le point final -- consiste aussi à trier, à sélectionner, à éliminer les "mauvaises idées".

Et là, les gens qui ont déjà lu mes autres articles connaissent l'équation :

Idée A + Idée B = Idée C

Pour trouver de nouvelles idées, c'est simple :

Je pars d'une idée A, par exemple que mon héros aura des rayures ; je veux aller vers une idée C, à savoir exprimer l'idée de puissance. Je n'ai plus qu'à trouver l'idée B qui fera des rayures un signe de puissance. Ce sera un zèbre ? Ouais bof ça le rendrait exotique mais ça rendrait les rayures, au contraire, banales. Blessé par un monstre ? Meh, déjà trop caricatural, j'essaie de camoufler. Et si c'était... un accident de travail ?

Ouais ouais, tu m'as bien lu : un accident de travail lui aurait fait trois balafres à l'épaule, comment me demande pas j'en ai aucune idée mais résultat son pelage reformé sur les blessures serait noir et paf, mon héros a trois balafres totalement et parfaitement et tellement logiquement justifiées.

Pour valider une nouvelle idée, c'est simple :

Je pars de ma nouvelle idée A, ici l'accident de travail, et je le compare avec toutes les autres idées déjà en place (enfin une partie, bref...) pour voir ce que ça donne. Mon but ? L'idée C qui en résulte doit être mon concept. Par exemple ma blessure est liée au travail. C'est lié à mon concept ? Yup, c'est en même temps anodin, tout le monde se blesse au travail, et complètement absurde vu que comment punaise tu peux te faire une blessure pareil en coupant des arbres ?! Sérieux ! Un lecteur peut se dire "eh, cette blessure est un gros cliché stupide, autant foutre un tatouage" tandis qu'un autre pourra se dire "ah ouais, l'origine de la blessure est normale, il est normal, tout va bien".

Est-ce que c'est cohérent avec tout le reste ? Yup. Je dois de toute manière parler de l'enfance du héros alors autant qu'il s'y soit passé des trucs. Je veux mettre l'accent sur son travail donc c'est fait, et ainsi de suite.

Une dernière remarque.

Une idée déjà en place, déjà validée, peut être révisée à tout moment. Si je découvre que cette blessure me gêne ou empêche quelque chose, ou que je peux faire mieux, je ne devrais pas hésiter à la supprimer. Quand je valide une nouvelle idée, si quelque chose bloque je dois soit abandonner la nouvelle idée, soit modifier les idées déjà en place.

Un bon exemple de ça est le compagnon du héros. Au départ j'avais pensé "mon héros est tellement puissant qu'il n'a besoin de personne !" Et il irait donc seul au château. Mais ensuite je me suis dit que ce serait bien si le héros perdait un compagnon et pleurait sur celui-ci. J'avais donc besoin d'un compagnon, j'ai donc décidé que finalement quelqu'un l'accompagnerait. Ce qui était cohérent avec une autre absurdité, bref...

 

4. Le plan

Je dis souvent aux gens que le plan sert à "mettre de l'ordre" dans toutes les idées de la phase de développement. Mais chez moi... eh, pas vraiment.

Chez moi le plan sert d'abord et avant tout à estimer la quantité de travail qui m'attend. Quand je définis mon plan je commence par décider du nombre de chapitres que je vais écrire, et le nombre de pages par chapitre (en moyenne). Ici, en l'occurrence, j'ai spontanément choisi un plan classique de one-shot :

5 parties de 6 pages, soit 30 pages

À ce stade mon plan est vide. Littéralement. Tout ce que j'ai, c'est cinq cases blanches à remplir avec les idées validées précédemment -- et à venir. Le but est que j'aie suffisamment d'idées pour tenir trente pages.

Mon idée était que mon héros apparaisse de nulle part, tue un gros monstre et sauve des gardes, demande à les rejoindre et qu'à partir de là on l'envoie en quête, genre dans un château et blablabla... Je ne vais pas passer l'article à décrire tout ce que j'ai en tête mais en gros mon plan donne au final ceci (de mémoire) :

1- Arrivée au Tartarus
2 - Castle Hereafter
3 - La meute de Winniper
4 - Woodwalls
5 - Lucky Woods

Mon plan est découpé en cinq lieux géographiques, les cinq lieux où se dérouleront tour à tour l'action. J'ai donc six pages en moyenne à chaque fois, et je sais plus ou moins ce qui s'y passe. Par exemple c'est dans la première partie, à Tartarus, que mon héros sauve les gardes, etc... Il m'arrive d'ajouter une brève description de ce que j'ai en tête mais ici je prévoyais d'écrire le texte d'une traite, donc inutile de me le rappeler.

Qui plus est, comme à mon habitude, j'ai commencé à écrire avant même que les parties 4 et 5 soient vraiment fixées.

Cela dit, le plan est utile justement pour les "cases blanches" qu'il crée. Ici, en l'occurrence, le plan m'a dit que j'allais avoir beson de personnages. De... pas mal de personnages, en fait. Par exemple, je l'ai dit, mon héros allait avoir besoin d'un compagnon. Donc il me faut un compagnon. Idem, il me fallait un meuchant, qui sera Winniper, mais comme je suis flemmard je ne voulais pas créer d'autre méchant à côté. Finalement j'ai dû rajouter Rascal.

Mon plan intègre donc tous les personnages qui m'ont semblé utile, avec une brève description pour que je ne les oublie pas :

1 - Arrivée au Tartarus

Lieutenante Hummingbird (cheffe de la garde lunaire)
Soldat Brisk Pace (premier compagnon de ?)
Constable Meatlof (meuchant de Woodwalls)
Lightning Bug (petite amie supposée de ?)

2 - Castle Hereafter

Capitaine Pipe Dream (dirige la garnison d'Hereafter)
Peeling Duty (cuisinière)
Easy Care (caporale, défend l'orphelinat)
Meter Maid (garde, Brisk la reconnaît)

3 - La meute de Winniper

Threadbare (bûcheron de Woodwalls)
Cortisone (marchande âne)
Rascal (celui qui a capturé Cortisone)

4 - Woodwalls

5 - Lucky Woods

On remarquera que les parties 4 et 5 n'ont pas de personnage. C'est normal à un double titre : d'une part ces parties sont moins développées que les autres, vu que je mets la charrue avant les boeufs ; d'autre part à ce stade de l'histoire quasiment tous les personnages ont déjà été introduits, je n'ai pas besoin d'en rajouter.

Ce que vous ne remarquerez pas, c'est que certains personnages dans le plan n'ont plus d'utilité. Par exemple, le constable Meatlof était censé être le genre de seigneur tyrannique et détestable... mais le texte ayant changé, il ne sert plus à rien. De même, mon héros devait avoir une petite amie, Lightning Bug, mais elle était surtout censée se faire capturer par Winniper et du coup bah... Threadbare et Cortisone la remplacent.

Enfin, dans le plan mon héros s'appelle "?". C'est normal, à ce stade je n'avais toujours aucune idée de comment je voulais appeler mon héros.

 

5. tl;dr

Pourquoi avoir écrit cet article ?

Parce qu'en environ une heure j'ai pu établir le plan (dans les grandes lignes) d'une histoire de trente pages, que j'avais commencé à écrire à environ 2-3 pages avant que les circonstances m'en détournent. La fin est encore ébauchée et posera sans doute problème et beaucoup de détails manquent encore mais c'est suffisant pour écrire ou en tout cas je l'avais estimé suffisant.

Là, j'aurai encore toute la semaine pour peaufiner les détails.

Ce que je voulais, c'était en profiter pour montrer en gros comment je travaillais.

1) Je trouve un concept. Ce qui, chez moi, signifie un message, quelque chose que j'ai envie de dire.
2) J'élabore. Ce qui revient à trouver de nouvelles idées et soit à la valider, soit à les abandonner, etc...
3) Je planifie. Ce qui revient à créer les cases vides que je devrai remplir.

Je trouvais intéressant, même si c'est un survol assez rapide, de décortiquer la manière dont je travaille, et aussi dont j'envisage mes textes. Et à titre personnel je serais intéressé de connaître, dans le détail, comment les autres font.

C'est quelque chose que je demanderais volontiers, fanficers,
à vos plumes !

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Pourquoi que Twins Memory c'est bien.
09 mai 2015

Hi'.

Je ne prends aucun risque à dire que Twins Memory est une fiction cool. Elle est dans mes favoris et dans les coups de coeur de l'équipe, elle a des avis massivement positifs et j'en passe... mais qu'est-ce qui fait, au juste, qu'elle est bien ?

 

Avant de devoir y répondre, et donc de spoiler pas mal, dressons un tableau général.

Twins Memory est l'histoire d'Aloe, l'une des juments du spa qui sont jumelles parce qu'on peut. Ces derniers temps Lotus (la soeur jumelles, donc) agit bizarrement et c'est en train de saborder leur quotidien. Aloe tente de recoller les morceaux et, dans la foulée, de comprendre ce qui arrive à sa soeur.

Premier point remarquable du récit : le cadre. Twins Memory nous plonge dans le quotidien des bains de Ponyville avec sa propre routine, crédible, les clientes, le repas et le livre de comptes. Rien que pour découvrir ce quotidien la fic' vaut le coup, et on pourrait presque s'intéresser uniquement aux aléas de leur entreprise (que quelqu'un écrive un tel texte sur les frères FlimFlam, siouplait).

Second point remarquable du récit : les personnages agissent. Ça devrait aller de soi mais une routine inviterait au contraire le héros à être passif, et les poneys à faire des trucs inutiles. Ici Aloe se bouge le train dès le départ et chaque geste contribue plus ou moins à l'intrigue, y compris les plus anodins. Quand elle doit s'occuper d'une cliente au lieu de sa soeur ? Elle est aussi pressée que nous d'en finir.

D'où le troisième point remarquable : les détails. Comme toute bonne romance (ou autre texte triste) le texte regorge de petites "attentions", de petits gestes qui expriment les émotions :

"Je passai mon sabot rose le long de sa robe bleue avant de le faire glisser sur sa crinière..."

Phrase tirée du troisième paragraphe du premier chapitre, c'est dire si ça commence tôt. Ce genre de détail se retrouve partout et permet de s'immiscer, pour ainsi dire, d'abord dans la relation fraternelle (mais au féminin) puis dans la relation amoureuse... plus ou moins. Ces détails contribuent surtout, avec les pensées d'Aloe, à l'atmosphère constante du texte qui en fait son principal intérêt.

Mais pour moi ce texte a une quatrième force, et peut-être le plus important à mes yeux, qui en fait même le plus grand intérêt : la relation est équilibrée. Et là je suis forcé de spoiler.

 

Il est temps de spoiler

Le premier chapitre en lui-même aurait déjà fait un excellent one-shot, ouvert certes mais suffisant en ce qu'il posait à lui seul un monde. À la fin Lotus va se lamenter dans une forêt et cela ouvre tellement de possibilités que rien qu'à ce stade le texte a réussi son boulot. Mon hypothèse préférée, à ce stade, était que Lotus était morte et qu'elle hantait toujours sa soeur, vu que cette dernière ne pouvait pas s'en passer. On pouvait penser n'importe quoi, le texte offrait autant d'indices que de questions, perso' j'étais content.

Par la suite Lotus s'avère effectivement morte et celle qu'on voit n'est pas un fantôme mais un changelin, femelle et reine, qui va tomber amoureuse d'Aloe parce que ta gueule. J'avoue qu'avec le recul c'est une bonne question, perso' si des cafards tuent toute ma famille puis qu'une cafarde me sauve la vie, bah j'aurais quand même du mal à tomber amoureux. Mais dans le texte on oublie tout cela volontiers.

Pourquoi ? Parce que c'est bien fait. Au départ Aloe n'est pas plus amoureuse de la changeline que de Lotus et changy' le fait plus par obligation qu'autre chose.

Question de comparer, il y avait eu un autre texte où, en plein assaut de Canterlot, un changelin tue un poney puis est secouru par une jument qui tombe amoureuse va-savoir-pourquoi et le protège. Un peu comme Ripley cachait un alien dans son placard. T'vois. La différence entre les deux textes est que dans ce second l'amour est un coup de foudre, la jument est neuneu' ou alors elle déteste le genre équin, je sais pas. Dans Twins Memory, au départ les deux partis réagissent normalement : "moi, aimer ça ? C't'une blague ?!" Mais ensuite la relation s'installe, forcée par les événements : Aloe désespérée y trouve un refuge, ce que la fic' souligne plusieurs fois, tandis que Chry' vaguement désespérée aussi y voit d'abord une charge, puis une alliée, puis plus que ça.

Bref, que j'approuve ou non, il y a bien une évolution cohérente mise en scène par le texte :

« Je veux revoir ma sœur Chrysalis. » implora-t-elle au bord du déchirement. Elle ne parlait pas d'un simple déguisement, elle voulait revoir sa sœur, comme avant.

On joue en équilibre entre amour véritable et amour mensonger, illusoire, pour d'autres raisons plus personnelles, avec un certain côté tragique si on considère que ces raisons l'emportent. Cet équilibre donne à la romance une toute autre dimension et à chaque geste une double signification.

Et là, comme je le disais, la relation est équilibrée.

Ce qui me déplaît, dans la majorité des fictions (EDIT: comprendre "romances"), c'est qu'un personnage fait tout le boulot pendant que l'autre est zombifié avec autant de libre-arbitre que Twilight durant la saison qu- okay j'arrête mais ouais, l'un des personnages dans le couple sert en général de faire-valoir, de trophée.

Dans Twins Memory, les deux personnages sont actifs et les deux ont des raisons de l'être. Aloe veut retrouver Lotus, maintenir l'illusion en même temps qu'elle apprend à aimer Chrychry' ; et la changeline en retour doit jongler entre cacher sa nature, contenter la p'tite et apprendre à aimer Aloe. Résultat, chacune agit de son côté pour avancer ses intérêts, et tantôt ça passe, tantôt ça casse, dans les deux cas les deux ont leur mot à dire. Une vraie relation, quoi.

— Bien sûr Aloe, j'ai du mal à franchir le pas, tout comme toi. Mais on est ensemble, on peut se serrer les coudes et surmonter ça... ensemble.
— Mais moi je veux retrouver ma sœur. » dit-elle la voix tremblante en se plaquant à moi.

Alors oui, on peut nuancer mais ce qui m'impressionne le plus avec Twins Memory, et qui la met à part de beaucoup d'autres romances que j'ai pu lire, c'est ce rapport de force entre les deux amoureuses, où chacune est vivante, chacune a ses objectifs et chacune agit.

 

Cette relation équilibrée est pour moi le plus important, mais derrière il y a toujours au moins le cadre et l'atmosphère, donc le style.

Pour le cadre, à dire vrai, il perd assez vite en importance. L'histoire de dettes, par exemple, est vite expédiée, on hypnotise le créancier et baste. Toute l'histoire des casernes avec la maire Mare sonne assez creux aussi, même si on voit le lien avec l'histoire (notamment, à ce stade, inquiéter Chrychry'). Le cadre importait surtout dans le premier chapitre, et dans les deux suivants encore avant de devenir très secondaire. Le cadre, surtout, offre un point de vue hors de la romance et de ses enjeux, et fait retomber le texte dans un classique "changelin caché" qui bon voilà ne va pas très loin.

Donc yup, le cadre est un point fort mais qui reste assez inexploité. En même temps, le texte prend vite la forme d'un huis clos, d'un secret entre les deux amoureuses où tout se joue entre elles. Le cadre, du coup, ne devrait pas dépasser les bains et peut même devenir hostile.

La romance, elle, ne faiblit pas du début à la fin. On a des "voix tremblante", des plaquages de corps et toute la panoplie de gestes, mais aussi des pensées :

« (...) Je commençais à m'éloigner pour enfin la quitter. J'aurais dû le faire depuis longtemps, je suis faite pour diriger des empires, ordonner des armées, conquérir des nations. « Ne m'abandonne pas ! » gémit-elle toujours allongée dans coussin.

De l’abattement, non, de l'accablement... ou plus du chagrin, à moins que ça ne soit une dépression. Est-ce que c'était vraiment des émotions ou des états ? De la douleur, pure. C'était la seule chose que je sentais, ça n'était pourtant pas un sentiment ? Je l'avais pourtant bien senti, et même entendu, son cœur qui se brisait. Par-dessus ses pleurs et ses cris, la douleur l'avait frappée au même moment où je l'avais attaqué...

Dégoûtée... écœurée. C'était ce que je ressentais et ce que je pensais de moi en ce moment. Mon cœur aussi me faisait atrocement mal. J'avais pourtant réussi à ouvrir la porte pour voir qu'il faisait noir, le ciel étoilé semblait pourtant m'indiquer que le monde était pourtant impatient de me revoir en son centre. Les étoiles ne brillaient pas aussi fort quand vous preniez la mauvaise décision. Ces milliers d'étoiles qui me scrutaient ressemblaient à mes enfants qui me regardaient, attendant de voir ce que j'allais faire. Les étoiles ne brillent pas quand vous preniez la mauvaise décision...

Si on regarde, on a trois paragraphes avec chacun sa fonction : premier paragraphe, séparation. Second paragraphe, douleur. Troisième paragraphe, hésitation (ou plus précisément, retournement). Donc déjà là chaque paragraphe a son unité et ça c'est cool.

Mais si on note, les deux derniers paragraphes sont crêpés de pensées. Le second n'est qu'un monologue intérieur, tandis que le troisième décrit aussi l'environnement extérieur (les étoiles). Et le paragraphe qui suivra, lui, sera essentiellement descriptif, avec le retour à Aloe. Autrement dit, on a une transition "brusque" au moment de l'abandon, puis une transition progressive des pensées au retour vers Aloe : passage du monologue intérieur à l'observation du monde, au retour. C'est une bonne mise en scène.

Et ce n'est pas le plus important. Le plus important est le lieu où se trouve le paragraphe de monologue intérieur. Aloe est en train de gémir, Chrysalis de se barrer. Soudain, on n'a plus que les pensées de cette dernière. Pourquoi ?

Eh bien, déjà, pour ce côté "tempête intérieur" bien connu des amoureux, qui fait qu'on n'arrive même plus à suivre ce qui se passe autour de soi. Aussi pour ne pas avoir à entendre Aloe gémir, et donc, enfin, pour signifier qu'on est bien parti. Le monologue n'a pas juste pour rôle de causer de la pluie et du beau temps, appuyer sur "pause" et taper la discut' avant de relancer le film : le monologue fait avancer l'action. On est sorti, on est parti, c'est fait, acté. Le personnage a d'excellentes raisons de s'enfermer, à cet instant précis de l'intrigue, dans ses pensées, et c'est ce qu'il fait (sans qu'à un seul instant le texte n'ait à nous le dire).

Donc oui, il y a pas mal de soliloques (et de dialogues) dans ce texte, mais bien placés et pertinents. Les répliques ont du poids, ce sont quasiment des passes d'armes entre les personnages. Les pensées ne sont pas juste un droit de regard, elles participent à l'action.

On les lit parce que ces pensées nous disent ce qui se passe, et pas juste ce qui s'est passé (merci on sait).

 

tl;dr

Donc yup, dire que Twins Memory est cool ce n'est pas difficile. Mais qu'est-ce qui la rend cool ?

À mes yeux en tout cas, trois choses : cadre, activité, style.

Ce cadre qui certes est devenu secondaire et sous-exploité (mais c'est pas plus mal) a permis de donner vie à l'univers, de découvrir un quotidien presque intime et passionnant en lui-même. Une fois encore, quelqu'un écrirait l'histoire de Trixie qui, depuis sa roulotte perdue dans les bois, veut se produire dans je-sais-plus-quel théâtre de Manehattan, et ses tribulations pour y arriver, tant qu'on a son quotidien ce texte serait probablement excellent (risqué mais si ça réussit...)

Cette activité équilibrée entre les deux personnages principaux qui rend la romance non seulement crédible mais qui, en donnant à chacun des intérêts égoïstes au-delà du seul coup de foudre obligatoire, permet une interaction en même temps tragique et omniprésente. Les personnages luttent vraiment pour leur couple et chaque fois que leur relation progresse, il y a un passif derrière pour l'expliquer. Les voir se débattre, à mon sens, est ce qu'il y a de plus touchant.

Tout cela suffirait mais PonyCroc y ajoute le style qui va bien, fait de petits gestes attentionnés partout où il a pu en mettre, et de pensées qui au lieu d'alourdir inutilement le texte le servent au contraire en participant à l'action. Le résultat est assez exemplaire, je suppose, du style à adopter pour une romance.

C'était peut-être un article un peu long juste pour dire ça, mais je me suis réveillé ce matin en me demandant quel texte j'aimerais lire, et bon avec le Manoir c'est celui-là qui m'est venu en tête.

Donc voilà.

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Libra -- Le concours des Chroniques
02 mai 2015

Hi'.

Je vais être honnête, je ne pensais pas du tout écrire cet article. Parce que c'est de la pub' et parce que ce n'est pas du poney. C'est au final l'article de Toro' qui me fait penser que ça a peut-être sa place.

 

Comme vous le savez, les Lunatiques ont pris fin et je suis heureux de voir que les gens ont pris la relève, à commencer par le groupe des challenge et le sacré boulot de Constantoine. Pour ce qui est d'Equestria je pense qu'on est bon, et je compte bien en profiter.

Mais aujourd'hui je viens de donner le coup d'envoi d'un nouveau "concours", si l'on peut dire, qui s'inspire fortement de l'expérience acquise sur les Lunatiques et qui, justement, n'a aucun rapport avec les poneys.

Pour ceux qui ne le savent pas, donc, je suis aussi chroniqueur, membre du site d'écriture des Chroniques, celui-là même qui a accueilli le projet Hydre avec un espace forum pour bosser. Ce site a une vieille coutume appelée RdM, pour "Récit du Mois", qui consiste à... ben... à voter sur les textes du mois. Et faute de textes la formule évolue, avec ce mois-ci la mise en place d'un thème. Et ça donne :

Libra -- Après la fin

Je ne vais pas le cacher, c'est surtout un concours fait par et pour une bande de vieux grognards, en chantier qui plus est, je n'avais absolument pas prévu ce qui suit mais comme dit l'article de Toro' m'a fait tilter. J'ai pensé que si des gens voulaient écrire sur autre chose que les poneys, et notamment faire découvrir leurs univers, alors ce "concours" était l'occasion parfaite pour ça.

Mon idée est de dédoubler le concours. Si effectivement les gens ont envie d'écrire au-delà des poneys alors chaque mois je pourrais écrire un article tant pour annoncer le nouveau thème du "Libra" que pour montrer ici, sur MLP Fictions, les textes que vos auteurs préférés auraient écrit là-bas.

 

À vous de voir si ça vous tente ou si c'est une mauvaise idée, mais au moins vous saurez désormais d'où vient mon fameux, fanficers,
à vos plumes !

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Sombra... un bon méchant ?
14 avril 2015

Hi'.

Non c'est pas une blague. Enfin c'était prévu pour être une blague du premier avril mais j'avais abandonné l'idée. Seulement l'épisode 3 a été tellement b- m'a tellement plus qu'il m'a forcé à réviser mes positions.

Et je vous jure qu'on part de loin.

Je devais être le plus extrême dans le piétinage du greuh. À mes yeux il représente tout ce qu'il ne faut pas faire, patchwork générique des clichés les plus éculés de gropabô d'service. Mais pas seulement. Je soutiens qu'il est impossible d'en faire un truc bien, et par-dessus le marché que ce n'est pas Sombra que ses fans apprécient, mais la magie noire.

J'en aurais autant pour Twilight. Depuis qu'elle a ses ailes elle est devenue une cruche insipide, porte-manteau à l'image de Luna et "miss buckin' perfect" kifouplurien, au grand désespoir du fan que je suis. On a bien des petits éclats ici et là, Twi' qui bouffe du hayburger ou Twi' à la foire aux échanges, ou encore Twi' qui donne des leçons d'histoire mais le reste du temps bah on a surtout envie de lui mettre une gifle. Je pisse sur Sombra mais je suis pas plus tendre avec mon poney préféré.

Jusqu'à l'épisode trois.

 

1
Le méchant dépend des autres

Épisode trois qui m'a forcé à inverser complètement ma logique. Et si ce n'était pas la faute de Twilight ? Et si c'était... exactement ce que Twilight ferait ? On la sacre princesse, forcément qu'elle va se forcer à être la meilleure princesse possible. Forcément que c'est insipide vu que c'est pas du tout elle. Alors je sais, on peut me répondre que "c'est les commerciaux qui veulent ça" et c'est vrai, mais donnons aux scénaristes le bénéfice du doute ? Face à des circonstances impossibles -- jouer les princesses -- Twilight s'enferme dans un rôle suicidaire et forcément ça passe pas. Sitôt qu'on l'en sort ? Elle est spectaculaire. Retour dedans ? C'est la catastrophe.

Ce n'est pas Twilight qui est devenue pourrie, ce sont les circonstances qui sont du gros foutage de gueule et le personnage, derrière, subit. Mais le personnage, derrière, est le même, et fait exactement ce qu'il est censé faire.

Le fan que je suis a envie d'y croire, en tout cas.

Et comme le fan que je suis n'aime pas les double standards, j'ai forcément dû appliquer ça à Sombra.

J'étais déjà conscient que Sombra n'était pas le seul problème du Crystal Empire. Une foire débile qui a pour but de de NE PAS prêter attention au grand méchant ? Un examen absurde qui rend Twilight aveugle à ce qui l'entoure ? Une foutue Cadance qui te balance du bouclier à la demande ?! Au secours ! C'est du grand nawak face auquel n'importe quel méchant se serait retrouvé dépassé.

Il m'a donc fallu envisager l'hypothèse que non, Sombra n'est pas inexploité : il est au top de sa forme dans cet épisode, et c'est juste qu'à sa place PERSONNE n'aurait pu réussir. C'était purement suicidaire.

Ce qui est cohérent avec la théorie littéraire, du reste.

Lorsque quelque chose se produit dans un texte, un meurtre par exemple, ce n'est pas l'acte lui-même qui dit comment réagir. Ce sont les réactions. Les personnages se réjouissent ? C'était joyeux. Les personnages se désolent ? C'était triste. Cela vaut aussi pour le narrateur :

1) Twilight frappa Thrackerzod. Le tyran mourut enfin sous le laser de la justice.
2) Twilight frappa Thrackerzod. Le pauvre s'effondra, lutta encore mais en vain et, le regard suppliant...

Le discours est pas le même, et le lecteur est invité tantôt à faire "yay on a gagné !" et tantôt à faire "ah ouais mince..." Ce qui explique aussi pourquoi la majorité du temps mes textes sont relativement neutres. Je déteste dire au lecteur quoi penser. J'aimerais qu'il juge et réagisse par lui-même, au lieu qu'on lui mette une grosse pancarte "applause". Mais ça c'est moi, c'est ma philosophie : un bon texte donne au lecteur les instructions sur comment il doit se sentir et réagir aux événements. C'est même un défi littéraire que de contrôler les réactions du lecteur, et le lecteur le demande.

Cela vaut pour les méchants, et tous ceux qui ont fait du jeu de rôle sur forum savent de quoi je parle. Vous pouvez tenter de faire le meilleur méchant de l'univers, si en face vos joueurs font nawak bah c'est foutu. Le méchant dépend de ses adversaires pour être mis en valeur.

Et à cette aune-là, force est d'admettre que Sombra s'est fait remettre la pire bande de bras cassés qu'MLP puisse offrir.

 

2
Qu'est-ce que Sombra ?

Impossible de nier que Twilight en princesse c'est foireux, tout comme Sombra dans le Crystal Empire c'était pitoyable, mais le personnage n'est plus en cause. Twilight n'y est pour rien et Sombra non plus.

Mais si Twilight a l'excuse de jouer un rôle pour lequel clairement elle était pas prête -- non j'ai pas fini de râler là-dessus même deux ans après -- Sombra lui a pour excuse qu'il essaie de faire peur à un mur de briques. On connaît la "vraie" Twilight, la petite nerveuse asociale à ses heures perdues, mais qui est le "vrai" Sombra ?

Pas la version des fans, en tout cas.

Si l'épisode m'avait convaincu que Sombra n'était qu'un mauvais OC, c'est la version des fans qui m'a persuadé qu'il n'y avait vraiment plus rien à faire. Si on essaie de me faire croire que ce patchwork de Dracula en herbe qui te philosophe ses plans sur les comètes est Sombra alors désolé mais je vais lui rouler dessus. Pas juste parce que ça ne me plaît pas, mais parce que n'importe quel poney pourrait être Sombra : Twilight, Dash, Spike... n'importe qui peut se mettre à philosopher les oeufs à la poêle en mode "j'avais tout prévu depuis le départ !" Le comic a bien essayé une Nightmare Rarity...

Et entendons-nous. Les fans font ce qu'ils veulent. Si les méchants CAPCOM font triper alors tant mieux. Mais ça c'est pas Sombra, ça c'est un OC inventé de toutes pièces sur le principe, justement, que le Sombra de base serait pourri.

Un exemple ?

Pour mettre Sombra en valeur, la majorité des textes le font gagner. Mais les fans avaient fait observer qu'au contraire Sombra était conçu pour être une menace : il n'est pas fait pour gagner. Dans sa fonction même, le Sombra de base et le Sombra des fans diffèrent.

Un autre exemple ? La corruption. Tout le monde, moi compris, part du principe que Sombra corrompt. Cristal, yeux verts, poporte... Quand j'ai découvert l'épisode, j'avais cru spontanément qu'il avait corrompu Shining Armor. Mais non. Il ne corrompt pas. Il ne planifie pas. Il n'est pas subtil. Il n'est pas philosophe. Quand je regarde le Sombra de la série, moi je vois un gros barbare.

Un dernier exemple ? La parole. Fanfic' Sombra te saoule avec ses réflexions sur la vie et le beau temps. Le Sombra de la série te dit trois mots max'. J'avais comparé cela avec la chimère qu'Applebloom rencontre : les scénaristes font parler la chimère, et je me suis rendu compte que cela atténuait la menace. Ça rend la chimère plus hum- plus équine. L'objectif avec Sombra aurait alors été, au contraire, de le rapprocher encore plus de l'animal.

Et c'est ça pour moi le concept des scénaristes.

Ils voulaient un poney proche du monstre. Un monstre de puissance. En fait, et pour faire simple, remplacez Sombra par un dragon noir : on aurait une créature effrayante qui grifferait le bouclier et gronderait des mots informes. D'ailleurs un dragon noir aurait mieux fonctionné ? Mais, pour les jouets peut-être ou peu importe, il fallait un poney, et les scénaristes ont cherché tous les moyens de transformer ce poney en bête.

 

3
L'interdit

Je ne vais pas essayer, à partir de là, de vous convaincre que Sombra serait bien. Je n'en suis pas convaincu moi-même. Et je sais que la version fanfic' plaira toujours plus aux fans. C'est ce qu'ils ont voulu y voir, et tant mieux je suppose.

De toute manière, seul le fanfic' Sombra apparaît dans les textes, et on fait pareil pour Luna donc j'ai qu'à fermer ma gueule.

Mais.

Un méchant dépend vraiment de ses adversaires, et Sombra a vraiment subi une incompétence rare. Ce qui permet de supposer que le Sombra de la série était, lui-même, ... réussi.

Et dans la série, qu'est-ce qu'il incarne ? À mon avis, la puissance, le pouvoir. Le contrôle. La domination. On a envie d'être lui parce qu'on a envie d'être tout-puissant. Imposer sa volonté, faire plier les autres par la force. Laisser libre cours à ses pulsions. Le côté cruel, pervers, sadique, tout ça est accessoire et tient au mieux du dégât collatéral.

On peut le résumer ainsi : Sombra aurait été mieux en dragon noir. Mais faute de dragon noir, est-ce qu'un monstre de puissance aurait pu fonctionner ? Eh bien... sans doute, oui. Si les poneys avaient pris la peine d'en avoir peur, oui. Du moment, justement, qu'il reste une menace et qu'il ne gagne pas, parce que s'il gagne, bah... bah pas de torture, pas de corruption, pas de rien, Sombra pourrait seulement enchaîner les poneys et c'est marre.

Ou à l'inverse...

Sombra représente le pouvoir, pouvoir faire n'importe quoi. La magie noire était la porte ouverte à tous les abus, à tous les interdits. Sombra était la promesse de briser, quelque part, le côté "tout gentil", le côté tout public, le cadre même de la série. Pas pour rien qu'on flirte constamment avec lui dans le NSFW et la demande existait avant lui.

Sombra, dans la série, incarne cette possibilité et on part du principe que s'il gagne, au contraire, bah Equestria est finie. Pas juste un règne horrible : finie. Fin. Terminé. Le texte s'arrête là, sec, sur un point final. Sombra, du fait qu'il incarne les interdits, est par définition un méchant qui ne peut pas gagner, qui ne doit pas gagner, qu'on ne peut pas laisser gagner si on veut rester fidèle au principe.

Et par ce principe, tant qu'il ne gagne pas il peut faire trembler tous les empires.

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Jouer avec les mots.
10 avril 2015

Hi'.

En 1906-1910 un certain Ferdinand de Saussure inventa le mot. Puis il mourut. Puis il y eut une guerre mondiale. Puis une seconde. Et bon d'accord il a pas causé tout ça mais il a quand même causé la linguistique moderne donc ça compte. Pourquoi je vous dis ça ? Parce que je l'ai ponifié en Pferdinand de Spur et j'ai jamais su où le placer.

Non plus sérieusement c'est parce que la définition du mot est fondamentale. Et elle est essentielle à vos textes :

1) Khorzal était un tueur apprécié par le peuple.

Navré pour l'exemple pas trop équin mais là spontanément si c'était un début de texte il serait très intéressant. On a un peuple qui valorise les tueurs, mh pas mal : peuple barbare ? Peuple d'intrigues ? Une critique moderne peut-être, à la Kira. Nope, rien de tout ça. L'auteur a dit "tueur" pour dire "guerrier", Khorzal est un héros classique dans un peuple classique, ça ou alors un nain dans Warhammer.

Que s'est-il passé ?

 

1
Sens et signification

Quand on parle de mots, de lexique, de vocabulaire, les gens se figurent un dictionnaire avec la liste des mots et leur définition. Cette, ou ces définitions, ce sont les "significations" du mot. Dans l'absolu, le mot il veut dire ça. Par exemple si je dis "poney", la signification c'est :

subst.masc. Cheval de petite taille, à crinière épaisse, trapu et vigoureux, appartenant à diverses races et utilisé pour l'équitation, l'attelage ou le sport (notamment le polo).

C'est le tlf qui le dit alors c'est la vérité vraie.

Laissons les poneys un instant et retournons à notre mot, "tueur", qui signifie tantôt le banal fait de tuer et tantôt un m'sieur très pas bô. Où est la signification du mot ? Par réflexe, on pensera que la définition est un dénominateur commun, c'est le point commun entre tous ceux qui parlent le français : le sens serait la "valeur ajoutée". Donc la signification de "tueur" serait le banal fait de tuer.

Euuuuh... c'est vrai pour le verbe, par exemple "tuer un insecte" ou "tuer le temps", mais ce n'est pas vrai pour le nom. Le héros "tua son ennemi" mais n'est pas un tueur. Le bourreau tue les condamnés mais n'est pas un tueur. Le soldat est entraîné à tuer mais n'est ni un tueur ni un assassin. Tout ce beau monde peut être un tueur, mais ça signifie qu'on ne les aime pas, qu'on les désapprouve et qu'on leur pisse dessus. Yup, par défaut un "tueur" désigne un méchant pas bô. Et ce n'est pas tout :

2) Le tueur s'approcha de sa victime.

Qu'est-ce que vous voyez ? Un couteau qui s'approche d'une dame qui prend sa douche ? Le tout en noir et blanc ? Combien d'entre vous ont pensé qu'on parlait ici d'un loup s'approchant d'un mouton ?

Laissez-moi expliquer le problème autrement. Quand on parle de poneys, ici, la première chose qui vous vient en tête c'est des choupinettes en sucre guimauve sous bad trip et licence commerciale. C'est la première chose à laquelle vous pensez -- je me promène en forêt, je vois des traces de sabot sur le sentier, je me mets à rire bêtement -- c'est ce que, pour vous, le mot signifie par défaut.

(D'ailleurs, le tlf nous dit que "poney" est un emprunt de l'anglais qui a lui-même emprunté à l'ancien français *poulenet, dérivé hypothétique de poulain, aka "petit du cheval" pour dire "petit cheval", on en apprend tous les jours...)

On l'a observé scientifiquement, et l'exemple canonique est l'oiseau. Quand on dit "oiseau", les gens ont tous l'idée d'un oiseau qui leur vient en tête. Mais TOUS ont un oiseau différent. Pour certains c'est l'aigle, pour d'autres le pigeon, pour d'autres le moineau ou le perroquet... ce sont les oiseaux qu'ils connaissent le mieux, les plus représentatifs, les premiers qui leur viennent en tête ! Vous en avez tous un et chez chacun il est différent. Et pourtant, cet oiseau-là est ce que, pour vous personnellement, le mot oiseau "signifie". Ce cas particulier est sa "signification", au même titre que le couteau en noir et blanc sous la douche.

Vous voulez un dernier exemple ? Allez, retour à l'époque où j'étais haut comme trois pommes sur les bancs d'école :

3a) Il versa un verre de liquide.
3b) Le liquide pétillait dans son verre.

Ouais donc là en l'occurrence on parle de vin. Hein. C'est utile de préciser parce que normalement en (3a) vous avez dû faire une sacrée tête. Pourtant le même mot, "liquide", passe très bien en (3b). Pourquoi ?! Enfant, pour moi ça n'avait pas le moindre sens. Adulte... c'est difficile à expliquer.

Le "sens" d'un mot est le sens qu'il prend selon les emplois réels. Il y a donc autant de sens qu'il y a d'emplois d'un mot, et cela pour les 400'000+ mots du langage. Et on ne peut même pas se fier à la "signification", qui est censé être le point de repère commun puisque ce point de repère n'est qu'un emploi par défaut, particulier à chacun. Solution ? Apprendre la liste par coeur. Ça prend des années mais eh, je suis sûûûûr que votre texte peut attendre.

Ou alors on comprend comment tout ça fonctionne.

 

2
Le champ sémantique

Jusqu'à présent on a tourné le couteau dans la plaie : on a des mots, ils prennent différents sens, on sait pas comment ni pourquoi et ça pourrit nos textes.

Comme je nous ai abandonnés sur les bancs d'école bah restons-y et voyons ce que nos cours de français nous disent. Déjà ils vous disent de suivre les cours, désolé c'était la seconde de morale de papy Edone. Redevenons sérieux : parmi la boîte à outils de la littérature, il y a ce truc appelé "champ sémantique". Je résumerai ça par : "une suite de mots qui évoquent la même idée". Application :

4a) Pinkie sautillait et chantonnait sous le beau soleil de Ponyville, avec un sourire pour les autres passantes.

Quelle est l'idée évoquée ? Oh je ne sais pas...

4b) Pinkie traînait la patte parmi les ombres des maisons et baissait la tête sous les regards des passantes.

Là c'est un peu plus clair comme principe ? Dans les deux cas on a une jument qui se déplace dans le village, mais curieusement y a comme un genre de, je sais pas, différence. Alors que nous dit le champ sémantique ? Que c'est une suite de mots qui est en cause. On peut les lister.

4c) "sautillait" ; "chantonnait" ; "beau" ; "soleil" ; "sourire"
4d) "traînait" ; "ombres" ; "baissait"

Le point commun entre ces mots ? Une idée de "joie", contre une idée de "tristesse". C'est ce que moi j'appelle la "saturation" : à force de répéter la même idée le lecteur finit par la remarquer. Donc je fais en sorte que touuuuus les mots de la phrase quasiment répètent la même idée en filigrane et en général le message passe. Alors pourquoi le faire comme ça plutôt que de dire immédiatement "Pinkie était triste" ou "Pinkie était joyeuse" ?

Il y a d'autres raisons mais et si nous voulions dire "Pinkie était une tueuse" ?

Aaaaaah là ça devient intéressant ! Un mot seul, on n'est jamais sûr de ce qu'il veut vraiment dire. Même si on avait un certificat de l'Académie, on ne sait jamais comment notre lecteur le comprendra. Alors, pour éviter les malentendus : on le place parmi d'autres mots évoquant la même idée.

4e) Pinkie apaisait les poulains trop malades ; elle était tueuse à l'hôpital, responsable des euthanasies.

Trois manières de dire la même chose : la version édulcorée "elle apaise les malades", la version technique "elle est responsable de tuer les patients" pour ceux qui n'étaient pas encore allé voir 'euthanasie' sur le wiki', et la version qu'on veut que le lecteur apprenne, "tueuse". On a insisté très fort pour que quand on dit "Pinkie était une tueuse", le lecteur comprenne "employée à l'hôpital... à tuer des gosses".

Petit remarque -- pour ceux qui ne me connaissent pas encore, je grave "après c'est trop tard" sur tous les fronts que je croise -- on peut se demander à quel moment mettre le mot qu'on sait pas comment le lecteur va le comprendre :

4f) Pinkie apaisait les poulains trop malades ; responsable des euthanasies, elle était tueuse à l'hôpital.
4g) Pinkie était tueuse à l'hôpital ; responsable des euthanasies, elle apaisait les poulains trop malades.
4h) Pinkie était une tueuse. Elle apaisait les poulains trop malades à l'hôpital, à l'aide d'injections.

Un champ sémantique peut s'étendre sur plusieurs phrases, voire plusieurs paragraphes, mais là on n'a qu'une phrase alors faisons preuve d'imagination : en (4f) le lecteur a été graduellement préparé à l'idée que Pinkie tue. Le terme est bizarre mais au moins il est honnête. En (4g) la première réaction devrait être "euh wat" et ensuite "à l'hôpital" aaaah d'accord, j'ai pu me tromper, j'ai cru que tu disais que ma petite fêtarde toute gentille avait des cadavres sous son tapis. L'explication vient (très) vite mais la surprise demeure.

J'ai rajouté (4h) pour montrer un cas où elle tue toujours des poulains à l'hôpital, de la même manière mais va savoir pourquoi c'est pas la même ambiance. C'était déjà assez triste avant mais là c'est carrément criminel. Pourquoi ? Parce que "responsable" sous-entend qu'on le sait, qu'on l'y autorise voire que c'est son boulot. Ce que sous-entend également "tueuse à l'hôpital", un peu comme on dirait "mangeur de fromage à la cour de Celestia", soudain la passion pour le fromage devient un métier, en l'occurrence "goûteur". Ou autre.

Une fois encore, ça se joue à quelques mots. 

Le champ sémantique n'est donc déjà pas sûr à cent pour cent, on peut croire avoir clarifié les choses alors qu'on a utilisé d'autres mots qui posent problème. De plus, à moins d'avoir l'habitude, il faut penser à utiliser un champ lexical (aka utiliser d'autres mots) et du coup soit on le fait partout, avec un texte qui gonfle comme une baudruche, soit il faut savoir par avance quels mots peuvent poser problème. Si on le savait on se contenterait d'utiliser un autre mot.

Aussi, le champ sémantique ne repose pas que sur les mots. Si on reprend l'exemple (4b), on a aussi des expressions :

4b) Pinkie traînait la patte parmi les ombres des maisons et baissait la tête sous les regards des passantes.
4i) "traîner la patte" ; "dans l'ombre", "baisser la tête" (ou les bras), "subir les regards"

Et il est également possible d'évoquer une idée sans même utiliser d'expressions ou de mots, mais à l'aide de la seule grammaire :

4j) Il faisait beau. Les enfants jouaient. Les murs se coloraient de dessins. Sur le tableau, on avait dessiné un soleil qui souriait.

Phrase courte, ponctuation au niveau de la mort clinique, y a un cadavre dans le placard c'est pas possible prends tes antidépresseurs ! Et pourtant, tous les mots sont positifs. Petit exercice pour vous, il est possible de faire la même chose avec notre Pinkie tueuse/euthanasi-quelque-chose. Pour les autres, on avance.

 

3
La définition du mot

Le champ sémantique est une jambe de bois pratique quand on est désespéré : on entoure un mot d'autres mots pour qu'on comprenne de quoi on parle. Mais la majorité du temps soit on n'a pas la liberté de le faire, soit on n'y pense pas -- parce que "tueur" ça veut dire "tueur", pourquoi je me fatiguerais...

Ou alors c'est juste qu'on ne comprend toujours pas comment ça fonctionne.

Ouais on n'y coupera pas.

Je vais donc vous donner la définition du mot et vous allez me faire le plaisir de, étape un, faire semblant de la lire ; étape deux, hocher la tête avec un grand sourire et ; étape trois, l'oublier dans les trois secondes. Non mais attendez que je la donne aussi...

Déf. : Le mot est le rapport entre un objet formel, ensemble de symboles, et un objet conceptuel, ensemble de concepts.

À l'écrit -- parce qu'on va en rester à l'écrit si vous voulez bien -- l'objet formel (ou "graphique) c'est la chaîne de lettres de l'alphabet et autres ponctuations. "Patate" est un objet dont l'ensemble est {"p", "a", "t", "a", "t", "e"} ou quelque chose comme ça, jusque-là c'est pas compliqué ça correspond à l'intuition.

Okay, comment on sait où le mot commence et où il s'arrête ?

Intuitivement on dit que le mot se trouve entre deux blancs. Sauf qu'on a "pomme de terre" qui, à moins de défier le bon sens, ne fait qu'un mot ; et on a le Moyen Âge qui écrivait toutattachéetoncomprenaitquandmême. Moins pratique mais ça passait et on gagnait de la place sur le papier kikoutaichèr. Donc si c'est pas le blanc c'est quoi ?

Eh bien c'est le second objet, que moi j'appellerai "objet mental" et on s'en fiche du nom, ça correspond à l'idée qu'évoque le mot. C'est cet objet mental qui nous permet de retrouver l'objet graphique, et inversement c'est l'objet graphique qui nous permet de retrouver l'objet mental. Exemple ?

5) Rarity avait reçu une pomme de...

Une pomme de quoi ? Vous pouvez décider que l'objet graphique est "pomme", et donc l'objet mental est, ben, une pomme. Mais si l'objet mental est une pomme de pin alors l'objet graphique est "pomme de pin" et vous vous êtes planté. À ce stade vous n'êtes pas sûr de l'objet mental et du coup vous ne pouvez pas être sûr de l'objet graphique, quand bien même il est potentiellement écrit à 100% noir sur blanc sous vos yeux. Yup.

C'est pour ça qu'on dit que le mot n'existe pas. Le mot n'est pas un objet, c'est un "rapport", c'est la relation qui unit l'objet graphique et l'objet mental, qui sont alors indivisibles, inséparables l'un de l'autre.

Au passage, vous savez à quoi ça fait penser ça ? Un objet formel en rapport à un contenu ? Bah au rapport "forme" et "fond" voyons ! Une distinction fondamentale dans l'analyse de texte.

Quand je vous disais que tout ça était fondamental.

Maintenant qu'on sait que l'objet graphique permet d'accéder à l'objet mental et inversement, et qu'on sait ce qu'est l'objet graphique, demandons-nous ce qu'est l'objet mental. On a dit que c'était un ensemble de concepts, d'idées ou, comme les barbares dans mon genre les appelle, de "sèmes". "Sème" comme dans "sémantique", comme dans "champ sémantique", aaaaaah tout s'explique ! Ouais, vous auriez dû vous demander comment le champ sémantique faisait pour, à partir d'une série de mots, évoquer une idée commune. La réponse ? Les sèmes.

Pour le comprendre, laissez-moi vous montrer un autre truc.

L'objet graphique est un ensemble de lettres. Qu'est-ce qui est un ensemble de lettre ? La phrase. Le texte. Ouais, le texte est techniquement un mot. Il fonctionne comme un mot, en tout cas. Il a donc aussi un objet mental, créé ad hoc (sur le moment, pour les besoins de la cause), il a donc un ensemble de sèmes. Ouais, comprendre comment le mot fonctionne, c'est comprendre comment fonctionne le texte.

Ce qui se passe avec le champ sémantique est donc que les mots qui composent le passage de texte lui fournissent une partie de leurs sèmes ; et de même, le passage de texte en retour fournit une partie de ses sèmes aux mots. C'est normal : ce sont ces sèmes qui nous permettent de retrouver l'objet mental, donc de découper les mots, donc de lire le texte. C'est un mécanisme inhérent à la lecture. Et c'est pour ça qu'on n'aime pas évoquer le clop en même temps que les bronies : le mot "brony" va activer le mot "clop" et inversement. Ce qui est paaaas forcément optimal.

Si je dis "Rarity", à quoi vous pensez ? Test de Rohrschach simple : c'est une jument, elle est belle (dixit Spike), c'est une artiste, elle vend des robes... Donc si j'écris :

6a) Rarity était une...

Comment vous faites pour compléter la phrase ? Le mot "Rarity" vous a fourni un tas de sèmes qui vous donnent le mot le plus probable. Le mot "tueuse" n'en fait pas partie, parce qu'il n'a pas de sèmes associés. Sauf si vous considérez le meurtre comme artistique. Ou au sens qu'elle faisait des ravages dans la gente masculine, je sais pas, on peut changer de sujet ?

J'ai besoin d'un adulte. D'urgence.

Inversement, comme dit, le "champ sémantique", la situation en gros, va fournir des sèmes pour le mot Rarity :

6b) La jument se tenait face à sa victime, le couteau en bouche. Rarity...

Est-ce que la première chose qui vous vient en tête est qu'elle vend des robes ? Non. "Victime", "couteau", les sèmes sont ceux d'une agression, d'un meurtre, y a un tueur ! Il ne vous reste plus qu'à choisir si Rarity est la "jument" ou la "victime".

6c) La jument se tenait face à sa victime, le couteau en bouche. Rarity était belle même dans la moooo- haine.

 

4
La valeur du mot

Je sais que ce qui précède est un gros morceau. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'un mot est un paquet de sèmes, que ce mot fait partie d'un mot plus grand (le passage de texte) auquel il fournit des sèmes et dont, en retour, il en reçoit. C'est important à comprendre pour comprendre l'histoire du liquide :

3a) Il versa un verre de liquide.
3b) Le liquide pétillait dans son verre.

La question n'est pas "quelle est la signification de 'liquide'" mais "quels sèmes le mot 'liquide' transmet" et reçoit. "Il versa un verre de..." nous dit déjà que c'est une boisson. En contexte on sait même que c'est du vin. Les sèmes du "champ sémantique" c'est ça, l'idée de boisson, l'idée de vin, avec le geste du serveur et tout. Est-ce que ces sèmes se retrouvent dans le mot "liquide" ?

Oui et non. Oui, il peut correspondre à une boisson raffinée là où le mot "parapluie" le pourra difficilement. Mais non, il peut désigner un tas d'autres choses et, du coup, il brise le champ sémantique. En fait, le mot "liquide" est en train d'ajouter ses propres sèmes qui ne sont pas ceux déjà présents : demandez-vous à quoi vous pensez par défaut quand on vous dit "liquide", moi vous allez rire mais j'ai des éprouvettes chimiques.

7) Il versa le liquide dans l'éprouvette.

Inversement, en (3b) c'est le mot "liquide" qui arrive en premier. On s'intéresse donc au liquide, à la matière même du vin, et en effet cette matière "pétille" : inversement, le pétillement nous confirme que c'est bien du vin. Et juste pour être sûr, le mot "verre" confirme qu'on parle bien d'une boisson. Même si au mot "liquide" j'avais pensé au slime de Ghostbuster, le reste de la phrase corrige le tir.

Autrement dit.

Le mot n'a pas de valeur par lui-même. Le sens qu'on lui donne dépend de l'emploi qui en est fait : il vaut "la valeur du passage moins la valeur de tous les autres mots", c'est ce qu'on appelle une valeur oppositive et j'espère que vous applaudissez mes efforts pour éviter tout langage logique.

Cela signifie qu'on peut contrôler le sens des mots. Ou à défaut mettre des filets de sécurité.

On va, pour tester ça, inventer un mot : "ga". Pour plus de difficulté, je décide que je dois faire apparaître ce mot dans mon prochain texte. Pour moi le sens est clair et je ne soupçonne pas un instant que vous n'en compreniez pas le sens.

8) Pinkie alla ga chez Twilight.

Semi-échec : vous avez compris que "ga" était un adverbe, parce que voilà vous connaissez la grammaire, mais c'est tout. Vous pouvez supposer, ouais, qu'elle alla "vite" ou "droit" ou peu importe, mais vous n'en savez rien.

Cet échec est dû au fait que je n'ai pas appliqué ce qui était écrit ci-dessus.

Ce mot fait partie d'un passage plus large. Ce passage plus large a des sèmes. Le mot, tout comme "liquide", doit donc partager les mêmes sèmes. Il doit pouvoir recevoir ces sèmes, il doit pouvoir en donner. Si j'écris :

8a) Pinkie se glissa ga chez Twilight.

Je n'ai ajouté aucun mot, "ga" est toujours autant dérangeant mais le simple changement de verbe vous permet de déduire ce que j'ai pu vouloir dire : pourquoi elle se "glisse" chez Twilight ? En cachette ? Discrètement ?

8b) Pinkie se ga discrètement chez Twilight.
8c) Pinkie ga la boîte à biscuits.
8d) Ga, Pinkie secoua la tête.
8e) Pinkie rendit un ga navré en retour à Twilight.

Je pourrais multiplier les exemples, et les smileys apparemment... mais le principe reste le même. Il y a un mot que vous ne comprenez pas, mais ce n'est qu'un mot : le reste de la phrase vous donne l'idée générale, les sèmes qui importent et que vous appliquez au mot mystère pour au moins en deviner le sens.

Corollaire : moins il y a de "mots", plus chaque mot a de poids.

C'est pour cela qu'on vous dit aussi de ne pas utiliser les verbes "être/avoir" ou les mots génériques de type "aller", ou encore de juste dire le nom du personnage. Plus vous spécialisez les mots, plus ces mots ont de chances d'être mal employés mais plus, aussi, vous contribuez au "champ sémantique" et plus il y a de chances que votre lecteur repère les bons sèmes. C'est ce qui différencie l'accident :

9a) Daring Do évapora son adversaire.

Où le lecteur corrige le tir pour vous parce que voilà ; et la catastrophe :

9b) Notre héroïne brisa la nuque sec et laissa- non regarda sa victime s'effondrer à ses sabots.

Je sais qu'elle vient de tuer un pas bô, maaaaaais... je sais pas, psychopathe ? C'est pas possible de s'être trompé sur autant de mots, là c'est volontaire. Après, vous pouvez penser que ça la rend "badass" et donc admirable ? Mais ça en fait juste une grosse tarée qui se douche avec le sang des cad- okay j'arrête.

 

5
tl;dr

Chaque mot de votre texte compte. Mais ce qui compte ce ne sont pas les mots, c'est l'idée générale que vous voulez en voir ressortir. Une sorte d'idée générale qui, au niveau du texte, s'appelle le "thème".

Si tous vos mots contribuent à cette idée générale alors peu importe qu'il soit faux, le lecteur sera capable de corriger pour vous. Le lecteur interprète vos mots, en trouve le sens grâce à cette idée générale, tout passe par ce filtre et donc tant que ce filtre, ce tamis de "sèmes" est actif, un mot mal employé ne sera qu'une petite bosse sur la route.

Ce qu'il faut maîtriser, donc, ce ne sont pas les mots, vous ne pourrez jamais vraiment prédire leur effet.

Ce qu'il faut maîtriser, c'est cette idée générale.

Voyez-le, si vous voulez, comme un filet de sécurité, mais c'est plutôt la grille de lecture de base dont le lecteur inconsciemment se sert pour comprendre votre texte. C'est quasiment le moteur qui fait tourner le texte ! Alors je sais que "tous les mots doivent correspondre au thème" peut sembler extrême, et ce l'est, que "votre texte doit dire la même chose tout du long" semble absurde, et ce le serait, mais c'est le principe.

10) Pour Pinkie Pie, la maternité de l'hôpital de Ponyville était synonyme de joie. Elle pouvait y côtoyer les toutes petites, les faire rire, voir les parents et les rassurer. Elle y allait le coeur léger les jours où on l'appelait, comme si on ne l'appelait jamais pour rien d'autre. Elle réconfortait les petits qui toussaient ou qui pleuraient sans cesse. Elle parlait avec le père, la mère, le père surtout. On la voyait souvent joyeuse avec son thermomètre. On voyait parfois la petite jument, bravement, quand toutes à part elle s'y étaient résolu, se rendre à la pharmacie pour y prendre une seringue et rejoindre à l'écart le poulain ou la pouliche endormie. Là, avec des larmes, elle restait un temps au côté du lit, à se rassurer elle-même, puis elle lui murmurait qu'on l'aimait quand même, et elle regardait la souffrance partir.

Une fois encore, je pourrais le dire plus directement, plus clairement, "Pinkie Pie tuait les bébés malades" mais va savoir pourquoi, ça peut potentiellement ne pas avoir le même impact.

L'important n'est pas d'utiliser des tas de mots compliqués : l'important est que le plus possible de vos "mots", de tout dans le texte en fait, dise la même chose, contribue à la même idée. Faites ça et vous pourrez vous autoriser toutes les anses de la victoire qu'il vous plaira.

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J'ai arrêté de lire.
02 avril 2015

Hi'.

Sous ses aspects inutile et égoïste, cet article veut vous rappeler à quel point l'attention de votre lecteur est fragile.

Les gens ont dû s'en rendre compte, je commente rarement. Et en général je commente ce que je lis. Donc yup, même si je passe chaque jour environ quatre à cinq fois sur le site, la majorité du temps je soupire en regardant les nouveaux textes et j'en reste là. Et si c'était tout ce que j'avais à dire j'aurais sans doute été candidat au prix du plus grand gâchis de bande passante, mais allons plus loin.

Comme n'importe quel lecteur, j'ai mes préférences. Déjà, si vous avez fait une traduction, c'est mort : je ne m'intéresse qu'aux textes franco-francophones (quoique, le Seepferden me tente pour l'exotisme). Ensuite, si vous avez fait une de l'NSFW, c'est mort. Et si vous avez fait une romance, il vous faudra un sacré bon titre / synopsis pour que je vous donne une chance.

Mais.

Déjà, des préférences, on en a tous. Et il reste quand même bien 50% des textes qui sont de l'aventure, de la comédie ou peu importe... alors pourquoi ceux-là je ne les lirais pas ?

C'est là que cet article commence à être un crin plus intéressant. Il se trouve que ces textes, en général, je prends la peine d'en lire le synopsis et, même, dans la majorité des cas, les premières lignes.

 

1
Absolute Zero

J'ai vu l'image, j'ai vu le titre et je me suis dit "texte d'aventure épique". Par chance je n'ai pas lu le synopsis qui, de toute manière, ne m'aurait rien dit ("blablabla méchant glace méchant blabla mystère blabla greuh") désolé mais punaise des menaces du nord vous savez combien il y en a à la minute ?! J'ai déjà fait un article sur les synopsis et c'est pas le sujet mais comme dit, si j'avais lu le synopsis j'aurais déjà été refroidi. Ah ah.

J'aurais quand même lu le début du texte parce que le titre reste cool et que s'arrêter au synopsis c'est quand même malheureux.

Voici le début :

La solitude.

Réfléchissons ensemble à ce concept un instant. Il existe différents degrés de la solitude, allant du mal à l'aise en présence d'autres individus à l'isolement complet et définitif...

Déjà, on m'a donné le thème. C'est la solitude. Je sais déjà de quoi l'ensemble du texte me parlera après deux mots. Merci. Merci ! Je ne passerai plus quinze paragraphes à me demander de quoi on parle et entendons-nous, pas besoin d'être aussi brut de décoffrage que ça, mais ouais, là au moins le texte joue cartes sur table.

Ensuite, le texte m'interpelle (grmf) et me dit "réfléchissons". Réfléchir ? Hay yes! J'aime réfléchir ! Mais au-delà de ce petit plaisir, le texte me rend actif. Il va me dire des trucs et sa consigne c'est "réfléchis-y". Et effectivement, le passage qui suit pose le problème du texte : la solitude extrême, sans échappatoire, et ses conséquences.

Je veux insister sur ce point précis : là, le texte me fait un exposé scolaire, il ne se passe rien per se (on n'a même pas encore introduit un héros pour troncher du méchant ou compter fleurette) mais je suis actif. Je sais pourquoi je lis ce texte et j'y participe, je réfléchis à ce qu'on me dit, je le juge et je me fais mes propres idées. J'aurai l'occasion de revenir sur l'activité du lecteur en juillet mais bon sang que ça fait plaisir.

Conclusion ?

Ce début de fiction est classique, c'est une introduction avant l'histoire même et qui pose le contexte. Pour les plus jeunes ça peut même être barbant parce que "quand c'est qu'elle vient l'action ?!" Mais pour un grognard comme moi, le texte me dit de quoi il parle et me donne les moyens de m'y investir.

J'ai donc accroché et continué à lire.

 

2
Quand une vie s'éteint

Si le titre n'était pas assez clair, l'image vous donne la couleur : ce sera un texte sniff-sniff, c'est-à-dire triste. Je n'aime pas vraiment ce genre, mais je peux l'apprécier.

Donc, pour m'encourager, j'ai lu le synopsis :

Le moment où l’on perd un être cher, tous les maux d’Equestria apparaissent comme invisibles, insignifiants, on se rend compte à quel point la vie est précieuse. Applejack n’est pas épargnée. Il y a des cas où les personnes ne comprennent pas et pour ces cas elles ne comprendront peut-être jamais…

Okay donc je reprends. Quand on perd quelqu'un c'est triste. Non. Sans rire. La moitié du synopsis me balance une banalité. Et okay je sais, c'est super triste c'est clair, c'est dévastateur et toutes les hyperboles que vous voulez mais c'est la base ! Là vous ne me dites rien !

Seconde partie, on me dit que ça concerne Applejack et enfin on me donne le thème du texte, ce qui le rend particulier : on va parler de l'incompréhension. Pourquoi ne pas avoir commencé par là ?!

Certaines personnes ne comprennent pas ce qu'on peut ressentir quand on perd un être cher. Peut-être même qu'elles ne comprendront jamais. Applejack y est confrontée à son tour...

Voilà, ça reste vague, ça reste... pas très engageant pour moi mais c'est plus court, plus clair et plus percutant. En prime on peut se demander si Applejack est celle qui perd l'être cher ou celle qui se montre bornée, et cette simple question crée une tension qui peut attiser l'intérêt. Encore une fois je ne suis pas censé parler des synopsis mais mince...

Je ne suis pas allé plus loin.

Ouais, le synopsis n'est pas très engageant mais là c'est purement subjectif, au sens où des personnes qui ne comprennent pas qu'on soit triste parce que QUELQU'UN EST MORT... sérieux ? Dans MLP ? Et en disant même qu'on arrive à trouver le cas le plus asocial d'Equestria, AJ elle a cinq keupines et deux cents membres de sa famille pour lui remonter le moral ! C'est quoi ce point de départ de...

Mais c'est subjectif et encore à présent, si je consacrais plus de temps pour ça, j'irais quand même lire.

 

3
La légende de Mégane

Jusque-là j'ai parlé de textes que j'ai voulu lire parce que ben voilà ils existent et j'aime bien la fanfic'. Mais quand j'ai vu que le texte était écrit par Acylius, dans ma tête ça a fait "okay, ce texte sera forcément génial". J'ai donc sauté la case synopsis et plongé dans le texte.

La lumière tombait sur les murs de pierre, fugace et dansante. Trois poneys s’avançaient avec prudence dans le sombre tunnel, à la lueur de la corne de celui qui marchait en tête. Les deux autres...

Cette introduction est plutôt bonne. La lumière permet d'introduire les murs, les murs nous amènent au tunnel qui nous amène aux trois poneys qui nous amènent à la corne qui nous ramène à la lumière, excellent. Petit hic, on introduit les poneys avant le tunnel mais eh, ça arrive. On rajoute que la lumière est décrite, que l'avance est détaillée et on peut facilement s'immerger.

Ouais, Acylius sait quand même y faire.

Pourtant j'ai décroché.

Et c'est là que je me suis dit qu'il y avait un sérieux problème avec moi. J'adore les textes d'Acylius, je ne vois pas de problème à la narration mais... ben...

C'est du JdR. Je suis dans un tunnel lambda avec trois poneys lambda (à ce stade) qui s'avancent de façon lambda avec la lumière lambda, et là j'avais dit qu'elle avait l'avantage d'être décrite, mais "fugace et dansante", surtout "dansante", c'est un détail qui revient constamment dans tous les textes. C'est effectivement ce que fait une torche en mouvement sur de la pierre, elle semble "faire danser les ombres".

Ça fait deux phrases et il ne se passe rien ! J'ai l'impression d'être à une séance de Warhammer avec mon groupe de mercenaires, à guetter du Skaven.

Pour les besoins de cet article je suis quand même allé voir et ce n'est qu'après un paragraphe et deux répliques qu'on a enfin le contexte :

Découvrir une tombe de cette taille...

Okay, on est dans une tombe, je peux commencer à réfléchir. Et bon, soyons honnête, je me plaignais du côté JdR mais ce n'est pas forcément un mal : les poneys aussi peuvent aller s'aventurer dans des donjons et combattre des gogoles. Mais même alors, j'ai besoin d'un thème. Et là, même après m'avoir mentionné la tombe, je n'en ai toujours pas. Est-ce qu'on va parler du passé d'Equestria ? Est-ce qu'on s'intéresse à la généalogie d'un personnage ? Un méchant, une malédiction ? Et d'accord, le texte me dit que la tombe est spéciale, mais pour ce que j'en sais on va découvrir que c'est la tombe de Luna et que le porte-manteau nocturne à Canterlot est une imposteure.

Okay d'accord le titre (et le synopsis, si je l'avais lu) m'auraient aidé mais voilà quoi... eeeeet je viens de réaliser que ce texte est probablement le défi pour lier G1 et G4. Je note. Quoi qu'il en soit, quand je me plains qu'il y a trop de mystère, ce n'est pas pour rien : le lecteur peut décrocher très, très vite.

 

4
Fragments

Comparé à La légende de Mégane, Fragments a un style disons... moins maîtrisé. Là aussi, je me suis dit qu'au titre le texte serait sympa' et j'ai sauté le synopsis.

"Friendship Cottage, veuillez rectifier votre trajectoire, vous déviez de quelques degrés par rapport à l'azimut du ponton d'atterrissage."

C'est bon, ce texte m'a accroché.

Déjà, on est clairement sci-fi, ou comme on dit, "ponies in space". C'est ponifié parce que nom du vaisseau, c'est sci-fi parce qu'azimut et ponton et c'est "in media res", on me jette tout de suite dans le bain. On a un vaisseau qui visiblement a du mal à se poser, la tension est immédiate et j'ai déjà tout le contexte pour m'y intéresser.

'Me manque encore un thème mais je ne suis pas aussi pressé.

Twilight sursauta presque dans son cockpit à l'entente de cette voix brouillée par la déformation...

Etc... vous savez quoi on va sauter quelques phrases, c'est le style qui veut ça,

...le regard de Twilight s'attarda anormalement sur sa main.

D'un violet clair, comme d'ordinaire donc.

Okay, j'ai loupé le tag "humain". Ouais c'est le défaut de se jeter directement dans la fic', et pour être honnête ça m'a refroidi. C'est moins marrant de voir piloter des humains, j'aurais été intéressé de voir une énième fois comment les poneys s'en seraient sortis.

Mais revenons à l'histoire.

Twilight sursauta à nouveau, avant d'appuyer sur un bouton au sommet de son levier, énonçant à voix haute :

"Bien reçu. Correction de trajectoire."

Ta mère. Je rappelle que jusqu'à présent toute la tension du texte se résumait à ne pas louper l'atterrissage. Problème réglé en... une réplique. Deux phrases. Cinq mots. Punaise.

Alors là je pourrais râler que c'est Twilight, qu'elle serait bien gentille de paniquer un minimum, de surréagir un brin mais bon, en même temps c'est une pilote entraînée donc c'est normal qu'elle garde la tête froide. Non, ce qui me dérange c'est que ça fait minimum trois paragraphes, sans compter les reliquats, que je subis cette tension et qu'on me la règle avec un claquement de doigts.

Si j'avais eu la patience de lire quelques phrases de plus, j'aurais découvert la véritable tension, le véritable problème, qui était :

Pourquoi avoir réagit de la sorte ? Elle n'avait même pas répondu au premier appel, alors que c'était la procédure !

Comportement inhabituel, influence sur le personnage, c'est bon, je peux me mettre à réfléchir : je suis de nouveau actif. Et je commence à me faire une idée du thème du texte, en tout cas dans ma tête à ce stade ça fait "probable que ce monde ne devrait pas être comme ça, etc." avec le thème de l'identité et tout ça. Très bien.

C'est trop tard ! Ça fait trois phrases que j'ai ragequit le texte ! Ça aussi je râle constamment dessus mais pour un lecteur dont la patience se compte en secondes, c'est l'élimination directe, allez en prison sans passer par le start. Si au lieu de secouer la tête et de se concentrer pendant deux paragraphes à ne pas poser son appareil -- parce que sa main est 'achement plus intéressante -- Twi' avait fait "mince qu'est-ce qui m'arrive" j'aurais pu continuer le coeur léger.

 

5
Conclusion

La principale explication au fait que j'ai arrêté de lire est ce manque constant de patience. J'ai mille préoccupations, ne serait-ce que mes propres textes et bref, j'hésite à me lancer dans des lectures plus ou moins longues. Il y a d'autres facteurs, comme la crainte que les commentaires soient mal pris ou encore le contexte étrange d'MLP Fictions qui me fait attendre des textes "finis" et donc avec une sorte de "garantie qualité" ou quelque chose, d'où que je suis beaucoup moins tolérant que sur un forum.

Eh. J'ai beau aimer les poneys, je reste humain.

Mais ce que je constate, c'est que l'envie de lire est toujours là. J'ouvre toujours les textes, je commence à les lire et ce sont souvent de "bêtes détails" qui m'arrêtent. L'absence de thème ou de contexte, la passivité... Quand j'ai vu que j'allais laisser la légende de Mégane "pour plus tard" alors que je m'étais volontiers plongé dans Absolute Zero, je me suis dit qu'il y avait vraiment un problème et je voulais cerner ce que ça pouvait être.

Donc oui, ça peut venir de moi, et pour une grande part c'est le cas. Mais, et c'est vraiment important : vous devez, le plus tôt possible, dire au lecteur de quoi votre texte parle. Vous devez lui donner une tension, vous devez le rendre actif. Je sais que c'est très abstrait, assez difficile de s'en faire une idée et probablement que moi-même dans mes textes j'échoue lamentablement mais c'est important.

Parce que si tous vos lecteurs ressemblent à moi -- et fort heureusement ce n'est pas le cas -- alors en deux phrases vous pouvez l'avoir perdu.

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Les sons.
28 février 2015

Hi'.

Cela fait un moment déjà que je déroge à une règle pourtant fondamentale dans la critique d'un texte : ne pas juger le fond. Le principe est simple, "toutes les histoires sont bonnes" et si vous voulez raconter l'histoire d'Éolienne l'alicorne cochon-zèbre venue de l'interdimension Terra... ça peut être une histoire énorme !

Maintenant, faire la différence entre "fond" et "forme" n'est pas évident. Intuitivement, quand on juge un personnage l'auteur est en droit de se dire "mince, mais le perso' fait partie de mon histoire !" Inversement, quand quelqu'un te dit que dans ta phrase il y a beaucoup de /r/ tu te dis "euh ouais okay si ça te chante". Ça change rien à la chevrotine que se mange AJ.

Mon point de vue de littéraire est que la "forme" doit de toute manière "être adaptée au fond", donc séparer l'un et l'autre n'a pas beaucoup de sens. Juger le fond tout seul est stupide, et juger la forme pour elle-même est... tout autant dépourvu de sens.

Vous voulez savoir pourquoi ?

 

1
Mimer les sons

Quand j'étais à l'école et que je commençais enfin à m'intéresser à la manière de comment qu'on fait des textes, la poésie faisait partie des trucs les plus incompréhensibles de l'univers. Il fallait que ça fasse "super compliqué" pour être bien, mais quand toi tu faisais super compliqué c'était nul. Logique.

Et là un jour le prof' s'est installé devant la classe et a accepté de nous dévoiler les arcanes des sons. En gros il nous a dit "le 's' permet de mimer le sifflement du serpent" et donc quand il y a plein de "s" c'est qu'il y a un serpent qui siffle.

...

Ta mère l'alicorne.

Sérieux ?! Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse avec ça ! Mais oui, ma première approche des sons dans les textes était "mimétique" : il y a un bruit dans la réalité que tu vas tenter de reproduire dans ton texte. Par exemple dans "métal contre métal" on va essayer de mimer... ben le bruit du métal... contre le métal... ouais. Quand on tire des lasers on dira que les lasers "fusent" parce que /f/ et /z/ ça donne "fzzzzz" et ça fait très laser. Je ne plaisante pas ! Tu veux un un feu qui ronfle ?

1) La braise à chaud chargeait l'air de cendre rêche.

Ça veut dire quoi "rêche" ? J'en sais rien ! Je peux juste affirmer avec 67% de certitude que ce mot n'a rien à faire là. On l'a juste ajouté pour ses /r/ et ses /ch/ parce que "rrrrsssshhhh". C'est pas une blague c'est scolaire.

Alors sur le papier "mimer les sons" c'est bien mais dans la pratique ça marche moyen, le lecteur passe en général complètement à côté -- n'essayez pas de lui faire deviner un son par ce biais il y arrivera pas -- et ça vous pousse à utiliser des mots qui peuvent n'avoir rien à faire là. Alors okay "cendre rêche" c'est pas trop grave, mais c'est comme une faute d'orthographe, pour ceux qui la remarquent bah c'est un peu ridicule. D'autant qu'ici on aurait pu dire "cendre âcre". Ce qui nous amène à un second risque : "en faire trop". Vous savez le nombre de fois qu'il faut répéter un son pour que le lecteur le retienne ? Vous imaginez si on fait ça partout ?

Mon conseil : c'est bien d'expérimenter mais à terme, mieux vaut privilégier "le mot juste". Mais expérimenter c'est bien.

 

2
Des rimes en prose

Bon, "mimer les sons" c'est bien gentil mais ça ne nous mène pas très loin. Qu'est-ce que l'école nous a dit d'autre à propos des sons ? Je veux dire, à part la poésie ? Ouais, les histoires de rimes et tout ça ?

Bon vu que tous les poètes sont en train de faire de grands gestes avec les bras on va quand même parler des rimes. Pourquoi ? Parce qu'avoir deux fois le même son en fin de de vers c'est bien gentil mais ça sert à rien. Ce qu'on veut c'est que ce lien formel, ce rapport de son, soit suivi d'un lien sur le fond, un rapport de sens. On ne fait pas rimer "rose" et "arthrose" à moins d'avoir un point de vue super négatif sur les plantes.

Donc pour ceux qui ont lu/fait de la poésie, vous savez le plus grand crime : faire la rime pour la rime.

Fort heureusement la "prose", aka le texte "normal" de tout les jours de comment que les gens y parlent, ce texte-là n'a pas de rimes. Sauf que c'est dans le sous-titre, on va proposer le contraire. Et si on appliquait les rimes à nos textes pas-trop-poétiques ? Oui oui, des procédés poétiques dans l'histoire de Kiwi l'héroïne zèbre amnésique et orpheline. Tombée des étoiles. Et semi-démon- bref ! Prenons un passage au hasard.

2) Kiwi regarda les étoiles. Elles brillaient de mille feux. Peut-être que la nuit n'était pas si effrayante après tout, et sur cette pensée notre héroïne alla trotter dans les champs.

Et maintenant, essayons de faire rimer.

2a) Kiwi regarda les mille feux des étoiles, et leur lueurs la rendirent confiante. Peut-être qu'après tout la nuit n'était pas si redoutable, se dit-elle avant de gagner les champs.

Okay ça rime pas mais on est en prose, on n'est pas à ça près : "étoiles / redoutables" ont des sons qui se ressemblent et là, plusieurs observations. Déjà, la rime est pertinente en ce que Kiwi juge la menace de la nuit aux étoiles, donc oui les étoiles sont liées à ce qu'elle redoute. Ensuite, même si on a réorganisé les phrases, ça reste du langage "naturel", loin du "super compliqué" qu'on ne devrait jamais faire en poésie mais que par préjugé on s'attend à trouver là-bas.

Ce qui nous amène à la plus importante de toutes les observations : les mots censés rimer se trouvent au même endroit. Plus ou moins "en fin de phrase". Et ça, vous allez voir, c'est la clé de tout.

 

3
Lier les mots entre eux

Mais avant d'en venir à la clé de tout, intéressons-nous (tavu) à une/deux notions de littérature à propos des sons. Je veux parler du "consonantisme" et de "l'allitération". Ce qui se résume à "une suite de sons qui se ressemblent".

Je m'explique.

Jusqu'à présent on a vu que les sons pouvaient servir à "mimer un son réel" et on a vu qu'avec les sons on pouvait faire des rimes pour lier deux mots, en supposant qu'il y a un sens à le faire. La littérature, elle, donne un outil plus vaste : une simple suite de sons, consonnes ou voyelles, qui parce qu'on le retrouve souvent en peu de temps devient remarquable. Notre feu qui ronfle est un exemple mais sinon...

3) Toute les tentations de la terre n'étaient rien sans cet étalon spartiate.

Alors ? Quel est le son qui revient le plus souvent ? Okay et maintenant question subsidiaire, il sert à quoi ? Si vous cherchez un son réel qu'il mimerait, euh... moi perso' je ne vois pas.

On dira souvent que cette suite de sons ne cherche plus, alors, à mimer un son réel, mais plutôt un état d'esprit. Là, par exemple... euh... euh... Euh c'est une consonne "sourde" et plutôt "agressive" donc on peut spéculer que c'est pour mimer le... conflit ? L'émotion irrationnelle ? Non okay soyons sérieux, j'ai juste commencé par "toutes" et comme il y avait /t/ dedans j'ai aligné une phrase avec plein de /t/, c'est tout.

Cela dit, ces suites de sons ont un rôle beaucoup plus simple : découper le texte.

À partir de là je vous préviens on va devoir jouer aux grammairiens en herbes mais oui, la logique des sons suit celle du découpage du texte. Par exemple :

4) Si la tentation était grande, l'attente l'était encore plus.

Où sont les /t/ ? Bon on a les "était" qui sont des verbes, woohoo, mais sinon ? "Tentation" et "attente" sont des substantifs, des noms communs. Plus important ? Ce sont des sujets. Et juste question de bien attirer l'attention dessus, regardez les voyelles : /en/-/a/ pour le premier, /a/-/en/ pour le second, c'est comme si on avait passé ces deux mots au stabylo. Là le texte vous hurle de porter votre attention sur ces deux mots.

D'ailleurs cette structure /en/-/a/ puis /a/-/en/ vous la reconnaissez ? Okay les poètes, donnez la réponse, c'est la structure ABBA, yup ! Encore une technique de versification applicable à nos textes communs.

Et allons plus loin.

Si on peut lier les mots entre eux, pourquoi ne pourrait-on pas faire l'inverse ? Bien séparer deux mots ou groupes de mots, créer une frontière de sons pour bien dire que c'est plus du tout la même chose ?

5) La porte à peine refermée sa peine s'envola et la jeune jument alla se joindre aux nuages.

Qu'est-ce qui se passe ? Au début on a des /p/, (porte, peine puis encore peine) et soudain, paf... plus rien. Plus un seul "p". Exemple un peu extrême mais oui, ce son est clairement concentré au départ. Et ensuite ? On a du /l/, on a du /j/... deux sons qui n'apparaissaient pas avant. On voit même où a lieu la transition : "sa peine s'envola".

Et là j'ai besoin que vous prêtiez bien attention à ce qui se passe : "la porte à peine refermée" est un groupe, "sa peine s'envola" un second groupe et "la jument alla..." un troisième. Premier groupe ? /p/. Second groupe ? Transition. Troisième groupe ? /l/-/j/. Oui, les sons ont été répartis selon les groupes dans la phrase, selon le découpage. Et au passage les sons correspondent à ce qui se passe : premier groupe on est encore dans la douleur, second groupe on dit littéralement qu'on passe à autre chose et troisième groupe on est en mode ranaf'.

Donc la clé elle est là depuis le départ.

 

4
La grammaire des sons

Je ne vais pas jouer mon linguiste ici pour vous expliquer à quel point la grammaire qu'on apprend à l'école est foireuse. la plupart d'entre vous avez dû vous en apercevoir par vous-mêmes de toute manière. À défaut de mieux, on en restera à la notion intuitive de "groupes de mots" et on ne cherchera pas à expliquer pourquoi ces mots vont ensemble. Observons juste que :

6) Lorsque la superbe jument blanche entra dans la pièce emplie de poneys, tous se retournèrent et ceux qui ne bavaient pas, extasiés quand même, en oublièrent les tables couvertes de mets.

Là on a une phrase, il faut la découper. Alors...

6a) lorsque [ la superbe jument blanche entra dans la pièce emplie de poneys ] [ tous se retournèrent ] et [ ceux qui ne bavaient pas en oublièrent les tables couvertes de mets ] [ extasiés quand même ]

On a un premier découpage en ce qu'on appellerait intuitivement des "phrases". Notons surtout le "extasiés quand même" qui est mis de côté parce que oui, c'est en fait une phrase en soi : "ceux qui ne bavaient pas étaient extasiés quand même".

Maintenant est-ce que ce premier découpage suffit ? Non.

6b) lorsque [ (la superbe jument blanche) (entra dans la pièce (emplie de poneys) ) ] [ (tous) (se retournèrent) ] et [ (ceux (qui ne bavaient pas) ) (en oublièrent les tables (couvertes de mets) ) ] [ (extasiés quand même) ]

Je ne peux pas promettre que ce soit le bon découpage mais yup, là on commence à avoir un découpage un tant soit peu plus précis et exploitable, en "groupes de mots" du type "sujet" et "verbe/complément".

Maintenant qu'on connaît le découpage, on veut pouvoir l'exploiter. En d'autres termes, savoir où mettre les sons. Alors commençons par poser la question la plus bête : qu'est-ce qu'on veut mettre en avant ? Qu'est-ce qu'on veut stabylobosser dans notre longue phrase, là ? Suivant la réponse, on ne placera pas du tout les sons au même endroit.

Déjà, observons ce que j'ai fait sans même y réfléchir.

6c) "entra dans la pièce emplie de poneys"

Vous ne remarquez rien ? Yup, trois /p/ (pièce / emplie / poneys). Vous allez me dire que c'est normal, c'est la langue qui veut ça, mais ça c'est une logique médiévale. Non non, avec l'habitude on sélectionne volontairement des sons proches dans le même groupe de mots. "Tous se retournèrent", deux /t/. Cela dit, pourquoi j'ai vraiment mis plein de /p/ dans (6c) ? Parce que... parce que regardez les parenthèses, il y a un complément à "pièce" et j'avais besoin de dire "non mais c'est pas la jument blanche qui est emplie de quoi que ce soit".

6d) "ceux qui ne bavaient pas... en oublièrent les tables"

Okay, comptez le nombre de /b/ dans toute la phrase. Il y en a cinq. Deux au départ, (superbe / blanche) et trois en (6d). Les /b/ du départ c'est la même logique qu'en (6c), privilégier les mêmes sons pour le même groupe. Mais ici, pourquoi ? Ce ne sont pas les mêmes groupes, non ?

Regardez le découpage. Il y a "extasiés quand même" qui s'invite au beau milieu, et j'ai besoin de dire au lecteur "okay, fin de la parenthèse, on reprend depuis là". Je mets donc un /b/ avant la parenthèse, et un /b/ après. Et vous me direz qu'il y a déjà les virgules mais c'est super facile de manquer une virgule à la lecture, mieux vaut être sûr.

Ce n'est pas fini :

6e) "superbe" "pièce", "poneys", "retournèrent", "et", "bavaient", "extasiés", "même", "oublièrent", "couvertes", "mets"

Je viens de vous lister tous les mots avec le son /e/, et ça en fait quand même un paquet. Alors okay, c'est un son assez fréquent en français mais avec une telle fréquence ? Non, même si c'est involontaire, y a quelque chose là. À titre de comparaison, le premier groupe c'est "la superbe jument blanche", le son /e/ n'apparaît qu'une fois.

Regardez les mots concernés : sur 11 mots, 5 sont des verbes. Okay, "extasiés" et "couvertes" sont des participes passés mais la logique est la même. En fait, ce sont toutes les terminaisons de verbes. Mais regardez aussi : les autres mots apparaissent à côté : "retournèrent et", "couvertes de mets" par exemple. La terminaison du verbe me pousse à répéter ce son. Parce que j'aurais pu faire autrement :

6f) "tous se retournèrent. Ceux qui ne bavaient pas, ravis pour autant, en oublièrent les tables avec leurs plats."

Ici, soudain, le /a/ est beaucoup plus fréquent, fin de la suprématie du /e/. Pourquoi j'ai préféré l'un à l'autre ? Aucune raison ! J'ai pris le premier son venu et je l'ai exploité sans même y réfléchir pour que la phrase se ressemble du début à la fin. On a l'impression d'entendre la même chose et donc, de parler de la même chose, ce qui est bien vu qu'on est toujours dans la même phrase. D'où, donc, ces rajouts un peu partout et ces choix de mots pour faire gonfler le nombre de /e/ que le lecteur rencontrera.

Enfin...

6g) "emplie de poneys... extasiés quand même..."

Pourquoi est-ce que j'isole ces deux passages ? Parce que si vous regardez où sont les virgules, il y a trois pauses successives : "emplie de poneys... qui ne bavaient pas... quand même..." et la fin avec "couverte de mets". Vous ne remarquez rien ? Non, vraiment ?

"Poneys / mets" riment.

Mais entre ce "poneys" et la fin de la phrase il y a quand même une sacrée flopée de mots, sans parler des pauses comme dit, et "ne bavaient pas" ça rime pas vraiment. Donc qu'est-ce que j'ai fait ? À la seconde pause, "ne bavaient pas", je me suis rendu compte que ça ne rimait pas et du coup j'ai créé encore une pause avec cette fois un mot à la sonorité proche, "quand même".

Le rapport entre des poneys, des mets et des memes ? Aucun. Ces rimes-là n'ont pas pour but de produire du sens mais de signaler au lecteur chaque "phrase" à l'intérieur de notre méga-phrase.

 

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tl;dr ?

Je sais que c'est assez technique mais reprenons.

Au départ, on utilisait des sons pour mimer les sons "réels", et on le faisait en mettant autant de fois un même son que possible à la suite.

Ensuite, on utilisait des sons pour lier des mots ensemble, comme des "rimes", et on voulait au contraire que leurs sons se distinguent de tout le reste.

Enfin, on a observé que les sons pouvaient servir à indiquer le découpage du texte : de façon générale, regrouper les mots entre eux ou au contraire séparer ces groupes le plus clairement possible.

 

On a donc découpé une phrase en "phrases" simples et dans ces phrases on a découpé des "groupes de mots". Puis je me suis amusé à analyser ce que j'avais fait sans même réfléchir.

Et là on a vu que :
a) À l'intérieur d'un même groupe de mots, j'essaie d'utiliser toujours les mêmes sons ("pièce emplie de poneys" -> /p/)
b) À la frontière entre deux groupes, j'essaie de répéter un même son pour la transition ("blanche entra" -> /en/)
c) Je fais "rimer" des mots en fin de groupes, ou aux mêmes places (sujets, verbes...)

Bien sûr, c'est mieux s'il y a une motivation aux sons qu'on rencontre (/p/ pour la "peine", /j/-/l/ pour la légèreté, l'insouciance) mais, et c'est l'observation qui motive cet article, il me semble que les sons servent et peuvent servir surtout à découper le texte, à indiquer clairement au lecteur les différentes parties d'une phrase, les mots qui vont ensemble, les parenthèses, les changements de sujet et tout ce que la grammaire peut faire pour vous.

-- à noter que ce n'est qu'une observation, elle peut être fausse et tout ça... --

 

Je trouvais la réflexion intéressante. J'ai personnellement cette réaction très positive quand je vois qu'un texte prend la peine de travailler les "sons" et même si pour beaucoup ça peut encore paraître un luxe, un ornement, je vous invite encore à expérimenter, à y réfléchir et, fanficers,
à vos plumes !

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