PARTIE II - Chapitre 2 : Glace et Cristal

La Vie Ennuyeuse de Dreary Sky

PARTIE II : Le Voyage de Dreary Sky

Chapitre 2 : Glace et Cristal

Dreary et Dream se réveillèrent avec le soleil, et s'activèrent rapidement pour ranger la tente et partir alors que la température était encore supportable. Après un frugal petit déjeuner et quelques gorgées d'eau, ils se mirent en route.

« On va vite devoir trouver une oasis, prévint Dreary. À deux, nos réserves ne vont plus tenir très longtemps.

- Je suis allé repérer le terrain depuis le haut des rochers, tout à l'heure. » l'informa le pégase. J'ai cru voir quelques arbres en bonne santé dans cette direction. »

Dreary trouvait qu'avoir un compagnon pour lui tenir compagnie n'était pas si mal. Il avait voyagé seul jusqu'à présent, mais se dit qu'il n'y avait pas de mal à faire un bout de chemin avec quelqu'un à ses côtés. Alors qu'ils marchaient l'un derrière l'autre, Dream menant la voie, Dreary vit pour la première fois la Cutie Mark de son compagnon, qui consistait en une simple plume noire. Il se demanda brièvement ce qu'elle pouvait bien signifier.

Puis il leva les yeux, croisant le regard du pégase, qui le fixait intensément.

Il soupira. « Tu veux la suite de mon récit, c'est ça ? »

Il secoua la tête vivement, un grand sourire aux lèvres.

Dreary ne put que sourire à son tour devant tant d'enthousiasme. « Très bien. Ce n'est pas comme si on avait grand chose d'autre à faire après tout. »

Il prit une seconde pour rassembler ses pensées et trouver ses mots, et reprit son récit :

« J'en étais resté au moment où ma camarade m'avait laissé seul au milieu des montagnes... »

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Dreary jeta un œil au soleil. Il était à peine plus de midi. Difficile de croire qu'en quelques heures seulement, il avait pris une des plus grandes décisions de sa vie, s'était fait kidnapper, s'était échappé en compagnie d'un personnage de fiction dont il n'était même pas sûr de ne pas avoir rêvé l'existence, et qu'il se trouvait à présent seul au beau milieu d'un des endroits les plus reculés d'Equestria.

Puis il se dit qu'il ne servait à rien de se demander comment il en était arrivé là, et qu'il ferait mieux de se mettre en route. Il avait du chemin à parcourir. Déterminé, l'étalon se mit à avancer.

Avant de se rendre compte qu'il n'avait absolument aucune idée de la direction à prendre.

Sortant une boussole et une carte de son sac, il tenta de se repérer et de trouver la direction générale à suivre, mais Dreary comprit vite qu'il fallait plus que du matériel d'explorateur pour en devenir un. Il se débattit encore quelque temps avec sa carte, avant de se décider à aller en direction du sud. D'après ses vagues connaissances en géographie Equestrienne, les montagnes étaient situées au nord de Canterlot. En allant tout droit vers le sud, il devrait donc logiquement revenir à son point de départ, la capitale. Confiant et déterminé, il se mit en route.

À cette hauteur, les montagnes étaient entièrement recouvertes de neige. Le paysage blanc réverbérait la lumière du soleil, forçant Dreary à plisser les yeux. Ses sabots s'enfonçaient profondément dans la poudreuse à chaque pas, rendant sa marche pénible et rapidement fatigante.

Parfois, il devait escalader des parois rocheuses raides afin de continuer à progresser. Heureusement, il avait pensé à prendre du matériel d'alpinisme dans ses affaires, même si entre le posséder et savoir s'en servir, il y avait un grand pas. L'étalon réussit néanmoins à franchir certains passages, mais dut se résigner à en contourner d'autres qu'il jugeait trop dangereux.

Il alternait ainsi montées et descentes, grimpant, dévalant, parfois tombant, et continua sa route vers le sud. Sa marche ne lui laissait pas le temps de penser, occupé qu'il était à chercher où placer chaque sabot pour éviter de déraper et tomber dans un ravin. Le poney aimait bien cette sensation. Il était pleinement concentré sur ce qu'il faisait, conscient de chacun de ses mouvements, sans une minute pour réfléchir à ses problèmes. Il s'oubliait dans son périple comme il s'était un jour oublié dans l'architecture.

Et pour ne rien gâcher, la vue était splendide. De temps en temps, il s'arrêtait au bord d'une falaise pour contempler le paysage dont la beauté lui coupait le souffle. Les montagnes s'étendaient à perte de vue, colossales et majestueuses, et le manteau blanc qui les recouvrait sublimait leur pureté brute. Grattant le ciel de leur immensité, elles mettaient au défi quiconque oserait s'aventurer sur leurs flancs déchiquetés et leurs sommets aiguisés.

Dreary s'enivrait de la vue qui s'offrait à lui. Jamais il ne s'était senti aussi petit de toute sa vie. Là, devant la toute-puissance immobile de ces montagnes millénaires, le poney se dit qu'à côté de tout cela, ses soucis n'avaient aucune importance. Qu'il soit mort ou non cette nuit fatidique n'aurait au final rien changé au monde. Seul devant l'infini, Dreary Sky vit à quel point ses problèmes et sa courte vie étaient dérisoires.

Et c'était précisément pourquoi il devait la remplir le plus possible.

Si son existence ne signifiait rien à l'échelle du monde, ce qu'il lui restait à faire était simplement de la vivre pleinement, savourant chaque instant du présent à son maximum. Le poney gris se dit alors qu'il avait peut-être trouvé un début de réponse à sa quête. Lorsqu'il avait commencé son voyage, Dreary Sky cherchait un but pour continuer à vivre. Mais peut-être qu'au final, tout le monde ne vivait que pour chercher un but à atteindre.

Les Cutie Mark représentent-elles réellement l'entière destinée d'un poney ? Ou bien n'était-ce que le premier pas ? Devait-on se contenter d'un même objectif toute sa vie, ou passer sa vie à chercher de nouveaux objectifs ? Toutes ses questions flottaient allègrement dans l'esprit du poney terrestre, s'entremêlant, se mélangeant, tandis qu'il contemplait l'horizon.

Puis à un moment, il sortit de ses réflexions, et se secoua. Il réfléchissait beaucoup trop. La réponse à ses problèmes n'allait pas sortir par miracle de ses spirales mentales, qui ne faisaient que l'entraîner plus profond dans des pensées bien trop compliquées pour coller à la réalité. L'étalon se dit qu'il fallait garder les choses simples. Il allait faire ce voyage, rencontrer différents types de poneys, voir toutes sortes d'endroits, en parler avec d'autres, et alors seulement, il pourrait revenir sur ce que ce périple lui aurait appris. Son voyage ne faisait que commencer, après tout, et il allait en savourer chaque instant.

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Il glissa.

Alors qu'il escaladait le flanc d'une montagne abrupte, Dreary sentit son sabot glisser sur la roche, et entraîner tout son corps dans une chute inévitable. Son cœur rata un battement alors qu'il se décollait de la paroi et tombait.

La neige amortit plus ou moins sa chute, même si le choc se répercuta dans tout son corps, lui coupant la respiration. L'étalon resta allongé quelque temps, se remettant de sa frayeur.

Il commençait à fatiguer. Le poney avait marché toute la journée, et ses jambes le faisaient souffrir. Les montagnes avaient beau être magnifiques, elles n'en restaient pas moins impitoyables, et Dreary réalisait l'étendue de ce qu'il avait entrepris.

Il se demandait si traverser seul l'immense chaîne de montagnes avait vraiment été une bonne idée.

C'est alors qu'il aperçut, à quelques mètres de là, ce qui ressemblait à un trou dans la montagne. Intrigué, il se remit sur ses quatre sabots, secoua la neige de sa fourrure, et s'en approcha prudemment.

Alors qu'il avançait en direction du trou, il vit qu'il s'agissait en fait d'une grotte, et pendant quelques secondes, il se demanda s'il n'était pas tombé sur une autre tanière de chiens adamants. Ses premiers pas à l'intérieur de la caverne lui prouvèrent que ce n'était pas le cas. La grotte dans laquelle les canidés avaient élu domicile avait été raclée, grattée et ravagée pour en extraire jusqu'à la dernière gemme.

Ce n'était pas le cas de celle-ci.

Dreary contemplait, médusé, les reflets des rayons du soleil sur les murs criblés de gemmes et de cristaux, créant des jeux de lumière colorée sur les parois de la caverne. Chaque pierre précieuse incrustée dans la roche était à elle seule un trésor magnifique projetant des raies de couleurs cristallines tout autour d'elle, et passant le relais à ses voisines. La lumière se transmettait ainsi de proche en proche, éclairant le fond de la caverne couverte de gemmes du sol au plafond.

Le poney entra doucement dans la grotte, ébloui par la magnificence du lieu. Il s'y enfonça, admirant la beauté naturelle qui s'offrait à lui par hasard.

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« Et là, alors que j'avançais de plus en plus loin dans la caverne... »

Dreary s'interrompit, et stoppa net, le regard dirigé vers un point précis devant lui.

Lui et Dream étaient toujours dans le désert, voyageant en direction d'Appleloosa. Ils avaient marché toute la matinée, et à présent, la température ne faisait qu'augmenter de minute en minute. Le sable commençait à devenir brûlant sous leurs sabots, et leur réserve d'eau diminuait à grande vitesse. Il devenait urgent de trouver une oasis.

Et c'était justement la raison pour laquelle Dreary s'était arrêté.

« Est-ce que tu vois aussi ce que je vois ? » demanda-t-il à son compagnon.

Celui-ci tenta de regarder ce que fixait le poney gris, et vit qu'en effet, au loin, un bosquet de végétation fleurissait au milieu du désert.

« Si ce n'est pas un mirage, je dirai qu'on a trouvé notre salut. » confirma-t-il.

Ils se remirent en marche, heureux de savoir qu'ils seraient encore vivants durant quelques jours.

« Et donc, qu'est-ce qu'il y avait dans la caverne ? »

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Dreary marcha longtemps, très longtemps, entouré par les pierres précieuses et les cristaux. Il était plongé dans ses pensées, la beauté du lieu réveillant en lui plus de choses qu'il ne l'aurait pensé. Une question en particulier trottait dans sa tête. Les montagnes de cristal avaient-elle été nommées ainsi à cause de l'empire cristallin tout proche ? Ou bien les appelait-on ainsi à cause des grottes comme celle qu'il était en train de parcourir ?

Mais surtout, ce qu'il n'avait pas remarqué tout de suite, c'était que cette formation géologique lui donnait des idées de constructions et de bâtiments à base de pierres précieuses. Lorsqu'il s'en rendit compte, Dreary sourit. Il se dit pour la première fois depuis son départ que son voyage était finalement une bonne idée.

Au bout d'un moment, il sentit la fatigue le rattraper. Il regarda derrière lui, et vit que l'entrée n'était plus visible. Il ne savait absolument pas où il se dirigeait, ni ce qu'il pourrait trouver dans ce genre de caverne, mais décida de persévérer malgré tout et de ne pas rebrousser chemin. Le poney ne pouvait pas dire quelle heure il pouvait bien être, ou s'il faisait déjà nuit au-dehors, et il était de toute façon bien trop fatigué pour continuer à marcher. Alors, sortant une couverture de son sac, il se roula en boule par terre et s'endormit.

Il se réveilla plein de courbatures, le sol n'étant pas très confortable, et encore une fois, il ne put dire combien de temps il avait dormi ou l'heure à l'extérieur. Les cristaux semblaient diffuser la même quantité de lumière quelle que soit l'heure, ce qui étonna l'étalon. Il supposa que ces cristaux avaient pour propriété d'emmagasiner la lumière le jour et de la diffuser la nuit, mais n'étant pas un spécialiste en minéraux, il ne poussa pas sa réflexion plus loin et se remit en marche.

Dreary avait l'impression que le temps était suspendu, alors qu'il qu'il progressait de plus en plus profondément dans la caverne. Il était hors de tout, ici, et l'absence de variation d'intensité de la lumière ne faisait que renforcer cette idée. C'était la première fois que le poney se sentait aussi désorienté, sans aucun autre repère que la direction que le forçait à prendre la caverne. Il ne sut dire combien de temps il passa à marcher dans le faible éclairage de la grotte, sans autres compagnons que ces milliers de gemmes et de cristaux qui fleurissaient sur les murs. Dreary Sky n'était pas un poney avide : il n'en toucha pas une seule. Il ne voulait surtout pas ressembler aux chiens qui l'avaient kidnappé.

Il dormit et mangea plusieurs fois, avant de voir enfin une sortie, au loin. Un rectangle de lumière blanche brillait au bout de ce qui était en fait un tunnel naturel traversant la montagne de part en part. Courant vers l'issue, Dreary plissa les yeux, aveuglé par l'intense lumière. Lorsqu'il s'y habitua, il était sorti, et il put voir où l'avait mené le tunnel.

Devant lui s'étendait une plaine verdoyante, traversée par une rivière qui prenait sa source dans les montagnes et partait en direction du sud. Il s'avança un peu, et regarda derrière lui. La montagne de laquelle il était sortie était nue, sans neige. Tout autour, le reste de la chaîne montagneuse était également nue, et stoppait devant la plaine, formant une ligne de séparation nette entre les deux espaces. Dreary se trouvait à la limite entre les montagnes de cristal et les grandes plaines au nord de Canterlot.

Il avait réussi à traverser seul les montagnes.

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Les deux poneys étaient arrivés à l'oasis et remplissaient leurs gourdes, non sans s'être abondamment abreuvés d'abord. Il était presque midi, et la chaleur devenait insoutenable. Ils se mirent d'accord pour faire une pause à l'ombre des arbres qui poussaient là avant de repartir.

« Quelle aventure... » dit Dream, impressionné.

Dreary haussa les épaules. « Ça peut se voir comme ça.

- Et après ? Qu'est-ce qui t'es arrivé ? Parce que là, dans ton récit, tu es toujours à l'extrême nord du royaume... et tu dis que tu es arrivé dans ce désert en moins de deux semaines ? Et à pied ? Ça me paraît limite impossible... »

Le poney gris se mit à rire. « Et pourtant c'est ce qu'il s'est passé. Mais je te raconterai la suite plus tard, pour l'instant, il vaut mieux économiser nos forces et éviter de parler. On a encore du chemin à faire. »

Le pégase acquiesça, et ils reprirent la route en silence.