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La Vie Ennuyeuse de Dreary Sky

Une fiction écrite par Betshet.

PARTIE II - Chapitre 4 : Eau et Nuages (2)

Le reste de la journée se déroula comme dans un rêve pour le poney gris, qui avait du mal à réaliser ce qui lui arrivait. Il dut subir plusieurs examens avant que les médecins ne consentent à lui enlever la majeure partie de ses plâtres. Il ne garda qu'un bandage autour de la jambe arrière gauche, qui avait été la plus sévèrement touchée. Il lui faudrait encore quelques jours avant de pouvoir marcher dessus sans risque.

Le poney réalisa qu'il était parti de Canterlot depuis plus d'une semaine à présent. Il était parti un dimanche, et s'était réveillé à l'hôpital un lundi, ce qui signifiait, s'il enlevait ses deux jours d'inconscience, qu'il avait passé cinq jours entiers à marcher seul. Il n'avait pas vraiment pris conscience du temps qui passait, pris par ses réflexions et par le paysage.

Les deux juments qui l'avaient accueilli à son réveil étaient sœurs et se nommaient Cloudchaser et Flitter, et d'après ce qu'elles lui racontèrent, elles travaillaient avec Rainbow Dash quand celle-ci avait secouru le poney. C'étaient elles qui avaient transporté le blessé jusqu'à l'hôpital. Quand Dreary leur dit qu'il voulait remercier sa sauveuse, elles lui apprirent qu'elle était partie depuis un moment pour une autre mission de contrôle du climat.

« Et vous alors ? Vous ne devriez pas être en train de travailler ? » demanda Dreary alors que les deux sœurs l'accompagnaient dans les rues de Cloudsdale. Il était en fauteuil roulant, ne pouvant marcher sur sa jambe blessée, et se laissait transporter à travers la ville.

« Notre capitaine nous a demandé de s'occuper de toi le temps que tu te remettes, l'informa Cloudchaser, la jument à la coiffure ébouriffée. Elle voulait aussi qu'on t'amène à elle dès que tu serais en état de te déplacer.

- C'est pour ça qu'on t'y amène maintenant ! » enchaîna sa sœur.

Dreary se demanda brièvement qui pouvait bien être cette capitaine, avant de se laisser distraire par le paysage. La ville volante était pour lui comme un rêve. Chaque mur, chaque bâtiment, même le sol étaient faits en nuage. Les juments qui l'accompagnaient lui avaient expliqué qu'il pouvait tenir dessus grâce à un collier magique permettant aux non-pégases qui le portaient de visiter la cité, ou, comme dans son cas, de s'y faire soigner. Dreary avait entendu parler de ces colliers dans les journaux, lorsque la princesse Twilight les avait créés pour permettre à tous l'accès à Cloudsdale sans avoir besoin d'une licorne connaissant le sort de marche-nuages. La méthode utilisée par la princesse avait révolutionné toute une branche de la magie, car même si le sort restait en soi le même, elle avait trouvé une façon de l'incorporer à des objets tellement simple qu'ils pouvaient ensuite être produits en masse pour le grand public.

Mais aussi innovante fut-elle, cette magie était encore récente, et Dreary devait sûrement être le seul poney de la ville à se déplacer au sol. Il leva les yeux pour regarder le fantastique ballet aérien au-dessus de sa tête. Il n'avait jamais envié les pégases et leurs ailes, mais mentirait s'il disait qu'il n'avait pas eu envie, juste une fois, de parcourir les cieux comme ils le faisaient si naturellement.

Les trois poneys arrivèrent bientôt à leur destination, un bâtiment administratif au cœur de la ville, dans lequel nombre de pégases entraient et sortaient, que ce soit par la porte principale ou par les fenêtres et plates-formes d'envol situées un peu partout sur les façades. Dreary ne put s'empêcher de comparer cela à une ruche bourdonnant d'activité.

Fort heureusement, le bureau du capitaine se trouvait au rez-de-chaussée, pour faciliter l'accès à ceux qui n'étaient pas des pégases. Lorsqu'ils passèrent devant la réception, le poney gris lut sur une plaque qu'ils se trouvaient actuellement dans le centre administratif de l'équipe de contrôle du climat d'Equestria. Ici était centralisé toutes les informations concernant le climat dans tout le royaume, et c'était également de là que partaient chaque jour les ordres pour les équipes locales. Dreary se rendit compte que le « capitaine » dont parlaient Cloudchaser et Flitter devait être la dirigeante d'une des plus grosses organisations d'Equestria, et déglutit.

Cloudchaser frappa à la porte, et ouvrit en entendant un « Entrez ! » venir de l'intérieur de la pièce. Poussant le fauteuil derrière sa sœur, Flitter entra à son tour. Là, derrière un bureau sur lequel s'empilait la paperasse, une jument au pelage jaune et à la crinière de feu salua les trois poneys à leur entrée.

« Merci les filles, remercia-t-elle les juments lavande. Vous pouvez nous laisser, je vous appellerai quand j'en aurai fini avec lui. »

Saluant, elles obéirent sans broncher, et Dreary se retrouva seul en face d'une légende vivante. Après sa rencontre avec la princesse de l'amitié et un personnage tout droit sorti d'un roman, il pensait que plus rien ne pouvait l’étonner.

Il n'empêche que rencontrer Spitfire en personne avait de quoi rendre l'étalon nerveux.

« Alors c'est toi que Dash a repêché dans les chutes ? demanda-t-elle sèchement. Tu sais qu'à cause de toi, un de mes meilleurs pégases a failli se blesser ? »

Dreary se sentit rétrécir face au capitaine des Wonderbolts. Il n'avait pas l'habitude d'être intimidé par l'autorité, après tout il était un étalon adulte et avait déjà géré une société. Mais il ne pouvait nier que face à la voltigeuse, il se sentait de nouveau comme un poulain devant le directeur d'école.

Spitfire, se rendant compte de l'effet qu'elle avait sur le poney gris, se détendit visiblement.

« Pardon, s'excusa-t-elle, j'ai été un peu dure. Toute la ville est en effervescence depuis quelques semaines, et je crois que je commence à fatiguer. Tu t'appelles Dreary Sky, c'est bien ça ? »

Il hocha la tête, et, rassuré par le changement d'attitude de la jument, demanda avec curiosité :

« Comment ça, en effervescence ? »

Elle soupira, et, se levant de sa chaise, se dirigea vers la fenêtre.

« J'ai été appelée à ce poste en urgence pour coordonner les pégases du climat il y a près d'un mois. Il s'agit d'une vieille loi d'Equestria stipulant qu'en cas de nécessité et avec l'accord des princesses, les Wonderbolts peuvent déclarer l'état d'urgence à Cloudsdale et gérer la ville entière pour faire face à une menace. Or, depuis quelque temps, le climat se détraque un peu partout dans le royaume. La situation a fini par devenir tellement alarmante que les princesses m'ont personnellement demandée de prendre le contrôle de la ville et de diriger tous les pégases du climat présents dans le pays. Depuis un mois, Cloudsdale se déplace aux quatre coins d'Equestria pour calmer le temps qui semble devenir fou et recruter des volontaires.

- J'en ai entendu parler, à Canterlot, mais ça n'avait pas l'air aussi grave... dit Dreary, choqué par ce que lui disait la jument. Je pensais que c'était encore un orage magique de la forêt d'Everfree, pas quelque chose de cette importance...

- Les princesses tentent de ne pas faire paniquer la population, acquiesça Spitfire, mais en vérité – et ne va pas le répéter sur tous les toits – on est plutôt désespérés. C'est pour ça que je n'étais pas spécialement contente que Dash, le meilleur pégase du climat qu'on ait vu depuis dix ans, se ramène avec un blessé et qu'elle me dise qu'elle-même avait failli se tuer. Mais j'imagine que ce n'était pas de ta faute. » finit-elle avec un autre soupir.

Dreary réfléchit un instant, et tenta de traiter toutes les informations qu'on venait de lui donner. Une pensée lui traversa l'esprit.

« Une minute ! Si vous me dites que la ville se déplace... Ça veut dire qu'elle n'est plus près des chutes ?

- Bien sûr. Tu es resté dans les vapes deux jours, on a fait un bon bout de chemin depuis. Je crois que la ville vient de dépasser la forêt d'Everfree, et elle se dirige vers Las Pegasus pour y recruter des volontaires. On devrait y être d'ici un jour ou deux. D'après ce que m'ont dit les médecins, tu pourras gambader librement d'ici-là, donc on t'y déposera et tu pourras prendre le train vers la destination de ton choix. »

Las Pegasus... Si l'architecte se souvenait correctement de ses cours de géographie, il s'agissait d'une ville située sur la côte ouest, au sud du royaume, mais c'étaient là ses seules connaissances sur la ville.

« En attendant, je laisse Flitter et Cloudchaser avec toi. J'ai besoin du plus de sabots possibles pour aider, mais ça ne m'arrangerait pas non plus que tu passes par-dessus bord pour je ne sais quelle raison. Donc jusqu'à ton rétablissement, elles te conduiront là où tu voudras.

- Merci, madame. »

Alors qu'il s'apprêtait à sortir du bureau, Spitfire l'arrêta :

« Une minute. J'ai oublié de demander, mais qu'est-ce que tu faisais aux chutes ? Ce n'est pas exactement la partie la plus visitée du royaume...

- Je me dirigeais vers Canterlot. » répondit l'étalon en se retournant.

La voltigeuse le regarda d'un air sceptique.

« Tu te rendais à Canterlot depuis l'Empire Cristallin ? À sabot ?

- Non, pas depuis l'Empire. J'ai traversé les montagnes de cristal avant d'aller vers les chutes. »

À présent, ce n'était plus le doute, mais la surprise qui se lisait sur le visage de la jument.

« Et dire que je pensais que tu n'étais qu'un poney ordinaire...

- Mais c'est ce que je suis, répondit Dreary, ne comprenant honnêtement pas la phrase du pégase. Un simple poney de Canterlot sans rien de spécial. »

Il sortit de la pièce, sans remarquer qu'il laissait derrière lui une Spitfire éberluée, qui le regardait avec des yeux ronds.

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Dreary passa le reste de la journée à l'hôpital, où il contemplait depuis sa fenêtre le décor de rêve s'offrant à lui. Flottant ainsi des centaines de mètres au-dessus du sol, le poney terrestre, qui avait passé toute sa vie sur le sol, avait l'impression d'être dans un autre monde. Qui sait, peut-être était-il mort, et s'était en fait retrouvé au paradis des poneys. Il pensait, lors de sa marche à travers les montagnes, ne rien voir de plus exceptionnel de sa vie. Il se trompait.

Au loin, par-delà la cité, Dreary pouvait voir la terre, les montagnes, les villes, les plaines par-dessus lesquelles passait Cloudsdale, survolant Equestria comme un gigantesque nuage solitaire. Les pégases qui volaient sans contraintes au sein de la ville et à l'extérieur de celle-ci lui rappelaient cependant l'image de ruche qu'il avait déjà eue plus tôt. La ville grouillait d'activité, les poneys s'affairant à tout un tas de tâches un peu partout. L'étalon se dit que cette agitation venait de l'état d'urgence déclaré par les princesses.

Il contempla une fois de plus la beauté de l'architecture de la ville, entièrement basée sur le nuage. Les toits étant légers, les pégases construisaient peu de murs pleins, préférant un style de colonnes. Ainsi, certains bâtiments étaient ouverts aux quatre vents, permettant à n'importe quel pégase de voler à travers.

Le fait de construire sur un nuage permettait aussi des folies architecturales qui faisaient pétiller les yeux du poney gris. La ville était ainsi bâtie sur plusieurs niveaux, les maisons s'empilant parfois les unes sur les autres, des quartiers entiers pouvant même se superposer. Les architectes pégases semblaient en vérité avoir construit la ville non pas d'un bloc, mais en agglomérant au hasard divers bâtiments déjà existants, rassemblant des maisons éparpillées en une seule grande cité.

Et bien sûr, surplombant le tout, l'usine de climat, responsable du temps et des saisons dans tout Equestria, de laquelle tombait une magnifique chute arc-en-ciel qui traversait toute la ville, pour finalement se jeter dans le vide. Cloudsdale, en se déplaçant, laissait donc dans son sillage une traînée multicolore, qui disparaissait après quelques temps.

Dreary se rappela la sensation qu'il avait eue lorsque, au sommet des montagnes de cristal, il avait contemplé la paysage qui s'offrait à lui. À cet instant, pour lui, il était au plus bel endroit du monde. Là, à Cloudsdale, la ville qui volait librement au-dessus du royaume, il comprit à quel point son champ de vision était étriqué. L'étalon s'était rendu à un bel endroit, et en avait conclu qu'il n'en existait pas de plus beau. Or, il n'avait encore rien vu. Il venait à peine de commencer son voyage, et chaque endroit qu'il visitait était plus beau que le précédent.

Une fois de plus, Dreary Sky se félicita d'avoir pris la décision qui avait bouleversé sa vie, auparavant si étriquée et petite. Il eut encore cette sensation de n'être rien devant le monde, et que sa vie misérable importait peu ; mais là, volant au-dessus des terres, il sentit que quelque chose était différent. Il sentit que le monde l'appelait, et qu'il devait en voir le plus possible. Non plus pour lui et son problème, mais pour témoigner de cette époque dans laquelle il vivait. Il voulait tout voir, tout visiter, tout savoir de son univers, et l'élargir au maximum, pour pouvoir, une fois la mort venue, se présenter à elle fièrement et dire, « j'ai fini ce que j'avais à faire ».

Encore une fois, Dreary repensa à la nuit fatidique où, au bord de ce balcon, il s'était senti si inutile qu'il avait eu la faiblesse de vouloir en finir. Et puis il se dit qu'au final, peu importait d'être utile ou non : le monde n'en avait rien à faire du statut d'un poney, de son nombre d'amis ou de ce qu'il avait accompli dans sa vie. Depuis le début, le poney gris avait pris le problème à l'envers : ce n'était pas lui qui devait changer le monde, mais le monde qui devait le changer.

Un bruit derrière lui le sortit de ses pensées. L'infirmière avait toqué à la porte, lui apportant son repas. Regardant de nouveau par la fenêtre, Dreary vit qu'il était resté immobile pendant un long moment, le soleil commençant à décliner à l'horizon. Il se secoua. Je réfléchis trop, encore une fois, se dit-il.

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« Je suis resté deux jours à Cloudsdale, le temps que l'on arrive à Las Pegasus. Entre-temps, ma jambe avait guéri, et je pouvais de nouveau gambader comme... »

Le poney terrestre s'interrompit lorsqu'il vit que son compagnon s'était endormi en écoutant son histoire. Avec un sourire, il sortit une couverture et la plaça sur le pégase, qui se pelotonna dedans avec plaisir.

Dreary, lui, resta éveillé encore quelque temps, les souvenirs de son voyage s'entremêlant dans sa tête en même temps que ses réflexions sur le sens de sa vie. Il se demandait combien de temps encore il devrait voyager avant de se sentir satisfait. Il redoutait même que parcourir tout Equestria ne suffise pas à calmer sa soif d'aventure. Il frissonna d'excitation en pensant qu'il pourrait aller visiter des pays exotiques, des zones reculées, ou même des contrées encore inexplorées... L'excitation résonnait dans son corps, tout comme sa peur de l'inconnu. Même dans ce désert, ces deux émotions déchiraient le poney entre son ébahissement devant la toute-puissance du désert, et sa peur de l'étendue impitoyable.

Il aimait ce conflit entre ces deux parties de lui-même. Dreary ne s'était jamais senti aussi vivant que durant ces deux semaines de voyage.

Le poney fouilla son sac à la recherche de la photo qu'il gardait depuis qu'il était parti. Il savait qu'il était égoïste en partant ainsi seul et en la faisant attendre son retour à Canterlot. Chaque jour qui passait, son envie de revoir celle dont il était tombé amoureux grandissait, mais il savait qu'il ne pouvait pas rentrer avant d'avoir comblé le vide qu'il sentait en lui.

Se sentant doucement glisser dans le sommeil, il rangea la photo, et s'enroula dans une couverture, fermant les yeux.

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Note de l'auteur

Fin de l'arc Cloudsdale, où va donc aller Dreary après son passage dans la ville volante?
Je dois dire que je m'amuse beaucoup à balader Dreary un peu partout à Equestria :D (encore une fois, pour ceux que ça intéresse, je respecte plus ou moins cette carte d'Equestria -> [lien] )

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Sliter
Sliter : #27743
Pourquoi pas le faire visiter la lune, c'est jolie la lune.
Il y a 2 ans · Répondre

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