Le marchand

La pluie finit par s'arrêter aussi rapidement qu'elle était arrivée. Refermant le parapluie que Rainy lui avait prêté, Cadence le rangea sous son aile avant de se remettre en marche en sentant ses épaules se relâcher. Plus de pluie, c'est que l'esprit s'en était allé.

Bien sûr, il y en avait d'autres qui n'obéissaient pas aux mêmes règles que l'esprit de la pluie. Il y en avait bien plus qu'on ne le croyait, et tous les retenir était tout simplement impossible. Certains aimaient le contact avec les êtres équins, comme d'autres voulaient juste les voir mourir. Pas parce qu'ils avaient quelques choses contre eux, mais simplement parce que c'était la nature même de leur existence. Personne n'allait traîner en justice les tempêtes qui tuaient à tour de sabot, alors pourquoi s'attaquer aux esprits qui les provoquaient ?

Marchant tranquillement dans les rues de la capitale, l'alicorne rose finit par secouer la tête en remarquant qu'elle allait devoir faire un détour pour pouvoir arriver sans problème. En effet elle n'avait pas remarqué qu'elle avait pris le mauvais chemin à la mauvaise heure, et maintenant, elle était en face d'une rue remplie d'ombres qui se déplaçaient sans poneys.

Ce genre de phénomène arrivait souvent à des moments précis du soir, comme en journée. Il ne fallait pas espérer que ça n'arrivait qu'à la nuit tombée. En général ces ombres suivaient un schéma précis, celui de leur mort. Il y a des centaines d'années de ça, un incendie avait complètement ravagé cette rue. Accident ou incendie volontaire, les poneys n'avaient pas eu le temps de s'enfuir et désormais, des centaines d'ombres erraient dans la rue et dans les maisons en répétant les mêmes derniers gestes d'il y avait quelques minutes avant leur mort jusqu'à l’événement fatidique.

Toutes les nuits, de une heure moins cinq du matin jusqu'à une heure dix, Cadence devait éviter d'emprunter cette rue pour ne pas revoir cet atroce spectacle encore et encore. Et comme pour la forcer à devoir assister à ce spectacle, cette rue était la plus courte pour rentrer chez elle, comme pour aller là où elle devait. Elle se mit à serrer son pendentif en murmurant quelque chose.

Cadence recula précipitamment quand elle vit une ombre surgir juste devant elle. Cette dernière ne faisait même pas attention à elle et semblait fuir quelque chose qui était dans la direction de l'alicorne. La jument rose pouvait voir la tête de l'ombre tourner rapidement de tous les côtés. Constatant sûrement qu'elle devait être cernée, celle-ci posa ses sabots sur son visage avant d'ouvrir la bouche pour hurler, mais aucun son n'était audible…

Se retournant brusquement pour échapper à cet atroce tableau macabre, la Marshall se mit à courir le plus vite possible quand elle se sentit craquer. Elle esquiva une ombre qui lui fonçait dessus, sauta au dessus d'une autre qui était en train de se rouler au sol. Elle souhaitait plus que tout devenir sourde, car même si les sons étaient inaudibles, elle avait pourtant l'impression d'entendre les centaines de gémissement et les cris d'agonie produits par les ombres.

Continuant toujours tout droit, fermant les yeux pour ne pas voir l'horreur qui se jouait tout autour d'elle, elle ne manqua pas de heurter une chaise qui se trouvait sur son chemin. Elle roula plusieurs fois au sol en se blessant les jambes avant de se remettre presque aussitôt debout en s'aidant du parapluie. Toujours sur ses gardes, elle fit un rapide tour de l'endroit où elle était pour constater qu'elle se trouvait juste devant la terrasse d'un restaurant. Le pire dans tout ça était que plusieurs poneys l'avaient vu tomber.

Sentant son visage virer au rouge, elle fit pivoter ses ergots et se remit en marche en tentant de garder le peu de dignité qu'il lui restait. Elle avait quitté la rue remplie d'ombre et pouvait enfin respirer normalement, mais pourtant, elle expirait toujours bruyamment alors même qu'elle s'était remise de sa petite course.

Une fois à un endroit un peu plus isolé, elle s'appuya contre le mur d'une maison pour tenter de reprendre son souffle. Ça lui semblait impossible. Elle avait ressenti ses choses, leurs douleurs, leurs pleurs. Elle les entendait encore dans sa tête alors qu'ils étaient loin.

« C'est à se demander comment les nouveaux habitants de cette rue font pour y vivre, hein ? » Elle reconnut aussitôt la voix qui venait de s'exprimer.

« Joue pas le con Shining, tes parents habitent dans cette rue. T'as bien dû leur poser la question.

— Et ils m'ont répondu la même chose que tous les habitants du quartier. Ils ne voient rien. »

L'alicorne releva la tête pour faire face à l'étalon qui lui souriait. Il semblait fatigué et gardait ses yeux bleus à moitié fermés. Elle les adorait. Reprenant une position plus droite, elle haussa un sourcil en le regardant avant de lui demander : « Pourquoi est-ce que tu es là ?

— Toutes ses ombres… et dire qu'il ne suffirait qu'une petite cérémonie avec l’encens et les paroles appropriées pour pouvoir effacer les traces de ce tragique accident.

— Tu sais très bien qu'il faut au minimum un exorciste pour faire ça ! » dit-elle avec une pointe de colère dans sa voix qui ne cessait de s’accroître.

— Et tu n'en connais certainement pas. » jugea-t-il en levant le menton et en secouant la tête. « Tu pourrais libérer cet endroit ma belle.

— Tu es au courant qu'il va les conserver pour lui ? »

Il se remit à lui sourire en approchant son visage du sien.

« Je n'ai jamais dit qu'il fera la bonne chose à faire, mais le lieu sera tout de même libéré. »

— Je ne savais pas que tu étais aussi pragmatique dans tes méthodes. » L'alicorne rose renâcla bruyamment avant de s'éloigner de l'étalon. Regardant les rues éclairées, elle aperçut un groupe de poneys qui allait dans la direction où se trouvaient les ombres. « C'est pas croyable, il est une heure du matin, on est à la Heart and Hooves Day et pourtant, il y a encore des idiots pour rester éveillé cette nuit !

— Ils sont amoureux, pour eux, cette fête commence le vendredi et dure tout le week-end. Je ne savais pas que tu étais aussi stricte dans tes habitudes. »

Cadence se retourna vivement pour lui jeter un regard noir, mais l'étalon semblait avoir disparu. Elle ne le revit que quand elle retourna son regard droit devant, à la limite de le heurter.

« J'aime ta nouvelle couleur ma belle. » ronronna-t-il avant de tendre son sabot pour caresser la mèche noire qui ornait sa crinière. « Elles te donnent un côté beaucoup plus strict. »

Ils se dévisagèrent pendant plusieurs secondes, comme attendant que l'un ou l'autre brise le silence. Cadence laissa malgré elle apparaître un sourire sur ses lèvres et leva à son tour sa patte pour la placer sous le menton de l'étalon.

« Joyeux anniversaire ma belle.

— Ce n'est pas drôle Shining. » murmura-t-elle avant de se rapprocher de lui.

Dans les rues encore mouillées de Canterlot, au beau milieu de la nuit de la veille de la Heart and Hooves Day, une alicorne tendait le sabot dans le vide en soufflant un nom qu'elle n'avait jamais oublié.

Réalisant le tour qui venait de se jouer, Cadence ne put qu'afficher un sourire amer en se trouvant particulièrement idiote. Heureusement qu'il ne pleuvait pas, sinon Rainy aurait pu se moquer d'elle à leur prochaine rencontre. Prenant une profonde inspiration pour chasser toutes ses mauvaises idées, elle se concentra autant qu'elle le put sur le problème présent.

Elle devait aller voir Uncle Wing, un terrestre qui était reconnu pour être le premier vendeur d'artefacts de l'autre monde. Bien sûr, il avait acquis cette réputation malgré lui le jour où il avait vendu un artefact puissant et dangereux à la première licorne qui lui avait donné un bon paquet de bits. Depuis, il avait reçu l'ordre de ne faire du commerce d'objets étranges et magiques qu'à d'autre créature surnaturelle. Bien sûr, il pouvait toujours vendre des antiquités et d'autres breloques inoffensives au premier touriste venu.

Quand Cadence aperçut enfin la devanture du magasin, elle ne put contenir son soulagement, et c'est d'un pas un peu plus pressant qu'elle se dirigea vers la porte. Elle n'avait rien à craindre dans le quartier, heureusement après tout, elle vivait deux rues plus loin. C'était l'un des vieux quartiers de Canterlot, ceux qui étaient encore chargé par d'anciennes magies qui ne cessaient d'affluer. C'était le genre de lieu rêvé pour les spectres ou toute autre créature à la recherche d'un point de repère sûr.

L'alicorne ne chercha même pas à frapper à la porte et l'ouvrit en sachant qu'elle devait être ouverte, comme toujours. Uncle Wing n'avait absolument rien à craindre, que ce soit des voleurs ou des mauvais esprits. Les uns étaient éloignés par un charme qui leur faisait prendre distance sans pouvoir l'expliquer, et les autres n'étaient pas assez fou pour provoquer une guerre en essayant de s'en prendre à lui.

Le marchand faisait partie des neutres. Il ne favorisait ni les protecteurs comme Cadence, ni les démons ou autre monstre prêt à tuer pour le plaisir. Pour lui, seul l'argent valait la peine qu'on prenne des décisions, et il avait très vite compris que commercer avec les deux camps valait bien mieux que de se contenter d'un seul.

De toute façon, il avait juré qu'il ne possédait plus le moindre objet capable de détruire Canterlot ou même Equestria d'une simple pression du sabot… du moins, c'est ce qu'il disait. Même s'il n'avait qu'une parole, le mensonge était quelque chose de très flexible dans son langage.

Quoi qu'il en soit, l'alicorne n'était pas venue pour marchander un collier de pouvoir, mais pour faire appel à son don particulier. En fait, Uncle Wing était un haptique, ou comme Cadence aimait le dire : « Un spécialiste en perception tactilo-kinesthésique ». Et il fallait avouer que sa boutique était le reflet exact de ses dons : un véritable souk. Pour beaucoup d’haptiques, leur don était un calvaire au quotidien, et ce n'était pas difficile à comprendre. Si à chaque fois que vous touchiez un objet vous ressentiez chaque étape de son histoire, vous commenceriez par faire attention où vous mettez vos sabots.

Étrangement, Uncle Wing était un haptique qui avait pris la fâcheuse manie d’amasser des objets. Mais même ça était compréhensible étant donné que c'était simplement son travers. Un travers était une contrepartie des êtres de puissance. Quand vous possédiez un certain don, une faculté pour une chose ou l'autre, vous deviez forcément en payer le prix. Un travers pouvait être une chose banale, comme terriblement incommodante. Cadence avait comme travers la gourmandise, principalement pour le sucré. Plus tôt, elle avait rencontré Rainy qui ne pouvait pas s'empêcher de sourire et d'avoir l'air tout le temps heureux. Certains avaient comme travers l'alcool, l'hyperactivité, le mutisme, la colère, la dépression. Il fallait simplement faire la différence entre quelqu'un victime d'alcoolisme et une autre personne qui ne pouvait pas s'empêcher de boire, car elle était tout simplement obligée.

Incapable de toucher la plupart de ses articles sans revivre leur histoire, Uncle Wing laissait tout trainer dans un foutoir qu'il considérait comme 'organisé'.

« Bienvenue étrangère, bienvenue dans la boutique de Uncle Wing, ici vous trouverez des reliques ancestrales renfermant des secr... » La voix provenait de derrière un comptoir encombré de diverses breloques. Quand l'alicorne vit le terrestre gris à lunette, elle haussa un sourcil en souriant, attendant qu'il continue sa tirade. Étrangement, ce dernier n'eut plus du tout son étrange accent quand il s'adressa à nouveau à elle. « Qu'est-ce que tu veux Cadence ?

— Bonsoir Uncle Wing, tu t'attendais à voir des touristes à une heure du matin ?

— On est à la veille de la Heart and Hooves Day, j'ai plein de licornes qui viennent à toute heure pour essayer de trouver quelque chose de soi-disant magique. » Il replaça son drôle de chapeau sur son crâne avant de faire un vague geste du sabot. « Si c'est pour vérifier que je ne vends rien d'illégal, tu peux tout de suite repartir, la plupart du temps, je ne leur donne que des colliers à la noix, ou des aphrodisiaques. Bon, il y a bien eu un bébé timberwolf, mais ça s'était pour un dresseur, je lui ai même demandé sa carte, alors tu ne peux rien me faire ! » s'exclama-t-il en la pointant du sabot.

« Du calme Uncle, je ne suis pas là pour faire un contrôle, je veux juste te demander un service.

— Hop hop hop, et qui te dis que je vais accepter ?

— Ooooh aller, je suis sûr que j'ai quelque chose qui te fera plaisir. » dis Cadence en faisant la moue. « Il n'y a pas quelque chose qui te ferait plaisir ? Un petit objet qui pourrait s'ajouter à ta collection ? » Elle fit un pas vers lui, le faisant sursauter au passage.

Il se retourna brusquement pour lui tourner le dos, s'asseyant en croisant les sabots.

« La boutique est fermée, revenez demain mademoiselle. »

L'alicorne secoua la tête en souriant, il n'allait pas se laisser faire aussi facilement, mais s'il voulait la voir partir, c'était justement parce qu'il savait qu'il allait craquer. Cadence contourna simplement le comptoir.

« Aller, je suis sûr que des comme ça, tu n'en as jamais vu.

— Je ramasse n'importe quoi depuis que tu es née ma petite, alors ne pense pas trouver quelque chose que je ne connais pas ! » affirma-t-il en détournant son regard de la jument.

Mais cette dernière était obstinée et n'allait pas lâcher l'affaire aussi facilement. Elle s'approcha aussi près qu'elle le put de lui sans pour autant le toucher. Elle savait l'effet désagréable que ça lui ferait. Elle plaça son visage juste à côté du sien et porta son regard sur son sabot qui passa sous son aile pour aller chercher l'objet dont elle parlait.

« Essaye de me dire que tu ne trouves pas ça magnifique. »

Dans son sabot reposait une étrange petite boite rose en forme de cylindre. Il y avait des petits trous sur le dessus comme pour y faire passer de l'air. Que pouvait-il donc se trouver à l'intérieur ? se demandait l'étalon dans son drôle de costume en baissant son regard sur l'étrange objet.

« Provenance ? » demanda-t-il d'une voix rauque, celle qu'il avait quand il se sentait céder.

« Des enfants, tu aurais dû les voir rire et s'amuser quand ils jouaient avec.

— Tu l'as volé ?

— Non non, c'est un cadeau ! » rétorqua la jument sûre d'elle.

L'étalon tendit son sabot pour prendre l'étrange boite, mais l'alicorne l'éloigna en chantonnant : « Je savais que ça te plairait ! » Elle recula alors de quelque pas en posant l'objet sur le comptoir. « Donc si tu es d'accord, je vais avoir besoin de ton talent pour m'aider à savoir à quoi j'ai affaire. Alors, conclu ?

— Une histoire de meurtre ? Tu ne peux pas te débrouiller seule pour une fois ? Elle est où l'époque où on récoltait les indices, on interrogeait les témoins et la famille, on parlait de sa femme, mais on ne la voyait jamais ? » se plaignit l'étalon en agitant les sabots.

Cadence hocha la tête comme si elle était intéressée par ce qu'il disait, mais fini par lui répondre le plus brièvement possible.

« Mais moi je t'ai, et tu m'aimes bien après tout, hein ? Tu peux bien faire ça pour moi ? » Elle reprit la boite rose en sabot et la colla contre sa joue rose. « Pour moi et la petite boi-boite que tu veux tant. »

C’était amusant de constater que cet objet semblait être devenu important pour l'étalon alors que c’était la première fois qu'il la voyait. Bien entendu, Cadence adorait jouer avec son travers, il était facile d'obtenir des petits services de sa part sans avoir à dépenser le moindre sou.

Uncle Wing soupira en secouant la tête, l'air résigné.

« D'accord conclu, qu'est-ce que je dois regarder pour toi ? Encore une histoire de meurtre ?

— Ouaip. » fit la jument en étendant une de ses ailes pour en sortir le chapeau qu'elle avait rapporté de la scène du crime. « Un étalon qu'on suspecte de s'être suicidé. Mais bon, je n'y serais pas allé si c'était vraiment le cas. Il n'y a aucun indice pour m'aider à deviner l'identité de celui qui a fait ça.

— S'il avait un chapeau, c'est peut-être qu'il allait sortir ? » interrogea l'étalon, ce qui fit rouler les yeux de l'alicorne.

« Meh, tu connais les habitudes vestimentaires des habitants de Canterlot ? Même chez eux, il y en a pour garder leur costume. »

Le terrestre gris soupira avant de tendre les deux sabots vers Cadence, restant assis pour ne pas perdre l'équilibre par la suite.

« Donne-le-moi, mais ne me touche surtout pas ! » ordonna-t-il en fermant les yeux.

« Je connais la chanson. » répondit l'alicorne distraitement avant de placer le haut-de-forme entre ses sabots gris et de faire un pas en arrière.

Elle observa le visage de l'étalon qui était en train de se déformer en serrant les dents. Elle savait qu'il devait revivre les scènes atroces où le chapeau s'était retrouvé. Ce n'était pas vraiment gentil de sa part, mais se n'était pas totalement sa faute, Uncle Wing n'avait qu'à refuser son offre.

Le terrestre à lunette se mit à siffler entre ses dents avant de respirer bruyamment. Il commençait à transpirer à grosses gouttes en fronçant les sourcils. Pendant ce qui semblait être une éternité, l'étalon retraça chaque étape de l'histoire de cet objet, de sa fabrication, jusqu'à son achat, et ensuite, une fois liée à la personne, de sa vie. L'étalon gris finit par perdre l'équilibre et s'étala par terre. Cadence aurait bien voulu le rattraper, mais ça aurait voulu dire le toucher, et si un simple chapeau pouvait le mettre dans cet état, le résultat avec un être vivant pourrait être bien pire.

Après encore une bonne minute, les sabots de Uncle Wing s'écartèrent pour laisser rouler le chapeau un peu plus loin. Ouvrant finalement les yeux, il prit un moment pour rassembler ses esprits ainsi que pour récupérer son souffle. Cadence eut la bienveillance d'attendre le temps qu'il fallait pour que ce dernier recouvre ses forces.

Il se releva difficilement, toujours essoufflé, et s'appuya sur son comptoir, prenant garde à ne pas toucher le moindre objet.

« Alors Uncle, c'est quoi ?

— J'en sais rien. » souffla-t-il entre deux expirations bruyantes.

« Comment ça, t'en sais rien ? T'as bien vu ce qui a tué la licorne ? » dit-elle en haussant le ton. Le terrestre hocha la tête en pinçant les lèvres. « Alors, c’était quoi ? Un démon, un spectre, un esprit, une âme vengeresse ?

— Je t'ai dit que je n’en savais rien ! » rétorqua-t-il sèchement face au ton élevé de la jument. « C'était noir, non s'était gris au début, puis c'est devenu noir. Je n’ai jamais vu un truc comme ça avant, ça a le corps d'un poney, mais tiré en longueur. Ses jambes, son corps, son cou et même ses oreilles. Il a les paupières fermées, mais quand il les a ouverts... » Il écarquilla les yeux un moment en imaginant à nouveau la scène. « Il avait des yeux rouges, s'était affreux ! Puis, il a poussé l'étalon à se trancher la gorge.

— Comment.

« Il regardait l'étalon, tout le temps, et il continuait de le regarder quand le poney a pris le couteau pour... » Il fit un geste évasif du sabot pour ne pas à devoir repenser à cette scène atroce.

« Donc tu ne sais rien me dire sur ce que c'est vraiment ?

— Non, je n'en ai jamais vu des comme ça. » Il laissa le silence s'installer entre eux en repensant à certains passages qu'il avait entraperçus. « Par contre, il y avait une jument avec lui. U-une courtisane pour être précis.

— Et alors, elle est de mèche avec cette chose ? » interrogea-t-elle en haussant un sourcil.

« N-non, elle s'est juste disputé avec la licorne… un problème d'argent… quand elle est partit, c'est cette chose qui est intervenue. »

Cela n'était pas suffisant pour Cadence. Son travail n'était pas d'enquêter, mais de trouver rapidement le responsable pour le capturer ou le tuer. Encore que s'il s'agissait d'un esprit, elle n'avait tout simplement rien à faire, il était au dessus de la loi. Un raclement de gorge la fit sortir de ses pensées.

« Tu n'as pas quelque chose à me donner ? » demanda l'étalon en haussant un sourcil. Même s'il semblait mal en point, il arrivait toujours à se remettre en forme pour récolter son dû.

« Amuse toi bien mon chou. » répondit l'alicorne en lançant la petite boite dans sa direction.

L'étalon l'attrapa et se mit à sourire en la contemplant avec ses sabots. Il était en train de sourire, les yeux fermés, mais son visage prit peu à peu une expression grave avant de lâcher l'objet qui tomba au sol avant de meugler.

« Tu m'as menti ! Tu l'as trouvé à terre ! » s'exclama-t-il en pointant un sabot accusateur vers elle.

« Oh fait pas la tête, oui, j'ai trouvé la boite à terre et je l'ai lavé. Mais elle appartenait sûrement à un enfant qui était heureux de l'avoir, non ?

— Oui, c'est exact, mais c'est sa mère qui lui a confisqué la boite parce qu'elle l'énervait ! Tu sais ce que ça fait de ressentir la tristesse d'un enfant ? Et dire que c'est pour ensuite tomber sur une alicorne qui la ramasser en pensant la refourguer à un idiot avec un chapeau ridicule ! Donne-moi le parapluie qu'on t'a donné et on sera quitte.

— Ooooh dit pas ça. » fis Cadence en fronçant les sourcils et en faisant une moue du bout des lèvres. « Je ne pensais pas du tout ça quand j'ai ramassé la boite. Et bon, l'enfant était sûrement très content en jouant avec le temps que ça a duré. Et de toute façon, on avait conclu l'accord, c'est de ta faute, point. Et puis c'est celui de Rainy, si je le perds elle me tue. »

Uncle Wing soupira avant de hocher la tête.

« Oui, il était très content avec la boite, et non, tu ne pensais pas à un idiot quand tu imaginais me la refourguer… Mais tu t'es vraiment moqué de mon chapeau ! »

Cadence dut mettre son sabot devant sa bouche pour ne pas montrer le large sourire qu'elle arborait.

« J'ai pas besoin de te toucher pour savoir que tu te moques de moi ! » informa-t-il, réellement vexé.

« Oh, excuse-moi, au moins ça t'apprendra à te méfier avant de conclure un accord.

— J'ai appris ces règles bien avant toi ! » répliqua-t-il toujours énervé avant de reprendre d'un ton plus calme. « Tu vas faire comment pour savoir à quoi tu as affaire ?

— Je n'en sais rien, je pensais peut-être aller voir Luna…

— Tu sais qu'elle ne pourra pas t'aider.

— Alors, je marchanderai.

— Elle refusera.

— Qu'est-ce que tu en sais ? » demanda-t-elle en levant les yeux au ciel.

« On sait tous que Luna ne veut plus intervenir dans quoi que ce soit. Toi, moi et quasi toutes les créatures surnaturelles de ce monde.

— Et qu'est-ce que je peux faire alors selon toi ? » Elle commençait à être légèrement agacée. Pas à cause de Uncle Wing, mais à cause de Luna et de ses stupides principes.

« Il y a bien une personne qui peut t'aider, qui connaît un peu près toutes les créatures étranges de ce monde. En plus, elle est passée neutre il y a une grosse année de ça. »

Cadence se mit à froncer les sourcils, réfléchissant à la moindre personne qui correspondrait à cette description. Soudain, elle écarquilla les yeux en

« Non, tu ne penses quand même pas à…

— Pourquoi cet air si inquiet ? Tu n'as pas entendu ? Je t'ai dit qu'elle était passée neutre.

— Tu ne sais pas ce que je lui ai fait.

— Allons, je ne vais pas dire qu'elle te porte dans son cœur, mais de toute façon, elle ne peut pas te faire du mal, c'est son propre règlement qui lui interdit de le faire.

— Tu ne comprends pas Uncle… J'ai fait quelque chose qu'elle ne pourra jamais me pardonner.

— Ah bon ? Et qu'est-ce que tu as fait à Chrysalis pour qu'elle t'en veille autant ?

— J'ai tué son fils. »