Naturellement, l'expérience d'un 'temps mort' fut source d'humiliation pour Octavia. Celui-ci survint lors de sa quatrième diatribe à propos des méthodes de Lyra qui, selon elle, feraient penser à un lama castrant un chat d’une manière des plus irritantes. Ce qui l’affecta beaucoup, cependant, ce fut le moment où Hoofz Zimmer décida de les séparer du groupe pour les déposer hors de la salle après une tirade quelque peu embarrassante. Heureusement, il n’avait pas simplement viré Octavia et Lyra du quatuor, il leur avait seulement demandé de se calmer.
Toutefois, alors qu’Octavia appréciait l’idée que Lyra souffre tout autant qu’elle-même, elle n’appréciait pas d’avoir été déposée dans la même salle d’attente que la licorne. Les vingt dernières minutes ne furent qu’un bouillon de silence inconfortable et de batailles de murmures railleurs entre elles. Inévitablement, et fort heureusement pour Octavia, le mutisme avait pris le dessus sur la dispute, et étouffé la conversation dans une couverture de silence faisant paraître le tic-tac de l’horloge plus bruyant que le fracas d’un marteau.
Octavia et Lyra étaient assises côte à côte. Tandis qu’Octavia semblait fascinée par ses propres sabots avant, Lyra ne se lassait pas de jouer avec sa crinière.
Si Vinyl et Bonbon n’étaient pas entrées au bout d’un moment, les musiciennes auraient sans doute suffoqué dans l’air dense chargé de tension entre elles. Ou se seraient battues encore.
Bonbon entra la première en souriant et en tenant la porte pour Vinyl.
« Salut, Octavia. Vous vous amusez bien ? Je t’ai amené ton amie spéciale rien que pour toi. »
« Bonbon, je ne sais pas ce que tu essaies d’insinuer, mais moi et Vinyl sommes juste des amies proches. »
« Oui, très proches, si j’ai bien compris. »
Octavia perdit tout son sang-froid en un instant.
« Tu n’as pas fait ça, Vinyl ! »
« J’ai rien fait, Octy ! »
« Mais tu viens de le faire, Octavia ! » dit Bonbon, un sourire sur ses lèvres alors qu’elle fermait la porte. « Ça a mieux marché que prévu. »
Lyra sourit et éjecta Octavia peu subtilement de son siège à côté d'elle pour que Bonbon prenne sa place.
« Eh, j'adorerais te féliciter, Pommettes en sucre, mais Octavia n'est pas si maligne que ça, pas plus que son 'amie'. »
Octavia ricana dans son sabot. « Pommettes en sucre ? Et c'est moi qu'on traite d'immatu- »
« La ferme, ‘Octy’. »
« Franchement, tu ne pourrais pas juste la fermer et jouer cette satanée musique, Lyra ? Après nous pourrons toutes nous en aller. »
« Je le ferais si tu n'essayais pas de les couvrir avec cette horreur bourdonnante que tu appelles spiccato ! »
« Ce n'est pas moi le poney qui fait tout pour rendre tout le monde sourd avec ce pizzicato bancal suraigu que tu as choisi de ‘jouer’ ! »
« Oh, tu peux parler ! La façon dont tu as joué le dernier morceau était tout simplement atroce ! »
Vinyl avait essayé de s'intéresser aux magazines éparpillés sur les tables basses dans la pièce. Déçue à ce niveau-là, elle trouva nécessaire de réclamer le silence pour empêcher sa migraine, qu'elle avait contractée en tentant de comprendre la théorie des cordes quantiques dans un hebdomadaire scientifique, d'empirer.
« Ok les filles, sérieusement. Et si vous jouiez toutes les deux, et qu'après on rentrait ? »
« Eh bien, Vinyl, j'en serais ravie si Lyra voulait bien m'accompagner correctement. »
« Et j'en ferais autant si Octavia savait jouer. »
Bonbon s'étira, se leva et trotta vers la porte. « Bon, je vois que Lyra fait une de ses petites crises. J'aimerais bien rentrer un jour, tu sais. Je suis sûre que toi aussi, Lyra. On est mardi, tu te souviens ? »
« Qu'est-ce que tu veux dire par… ohhh, ‘mardi’. Ouais, je voudrais pas ruiner les mardis soirs après tout. »
Lyra et Bonbon éclatèrent de rire, puis remarquèrent les expressions des deux autres poneys dans la pièce. C’est dans ces moments-là qu’il serait intéressant de pouvoir lire dans les pensées d’un poney, acte qui s’apparenterait alors à une sorte de test de pureté. Tandis qu’Octavia s’était arrêtée à tenter de deviner quel sorte d’engagement social un poney pouvait avoir les mardis, Vinyl avait déjà généré une représentation viscérale et quelque peu fidèle des mardi soirs de Lyra et Bonbon dans sa tête, en full-HD. Certains artistes auraient argué qu’une telle imagination pourrait créer d’excellentes œuvres d’art, mais ce qui se tramait dans la tête de Vinyl aurait été rejeté de n’importe quelle galerie de toute façon.
En conséquence, ce fut plus l’expression de Vinyl que celle d’Octavia qui pressa Lyra et Bonbon à réprimer leur crise de fou rire avec gêne. Lyra fit de son mieux pour trouver un sujet moins embarrassant sur lequel enchaîner. Heureusement, Bonbon avait une longueur d’avance.
« Écoutez, les filles, je pense que nous devrions toutes grandir un peu. De toute évidence, si vous avez été prises, c’est que vous êtes douées. Peut-être que vous devriez arrêter de vous crêper le chignon. »
« Je serais plus qu’enchantée de faire une trêve avec Lyra, fût-elle partante. »
« Comme si c’était facile, Octavia. C’est toujours toi qui crées les disputes. »
« Il me semble que la dernière était entièrement de ta conception. »
« Dans ton petit monde imaginaire où tu sais jouer de la musique, oui. Mais ici en Équestria nous- »
« Lyra Heartstrings ! Franchement, parfois je me demande pourquoi je suis avec toi, tu es incapable de garder ta langue dans ta poche. »
« Eh, ça te déplaît pas les mardis soirs. »
Vinyl s’était lentement faufilée vers Octavia pendant la trêve tentée et subséquemment annulée. Elle se pencha vers elle pour murmurer furtivement à son oreille. Elle était parfaitement audible pour tous les poneys dans la pièce, mais l’audience, polie, fit mine de l’ignorer.
« J’aime bien quand tu sors la langue moi aussi. »
« La ferme, Vinyl. »
« Quoi ? T’es mignonne quand tu es en colère et que tu te mets à dire des mots compliqués. »
« Vinyl, je jure devant Célestia que je vais t’éviscérer ! »
« Tu embellis. »
« Vas-tu te taire ? Tu ne fais qu’exacerber les choses. »
« Hhngh, je crois que mon cœur vient d’éclater. »
Octavia secoua la tête et opta pour le traitement par le silence avant que Vinyl ne parvienne à l’exaspérer plus encore. Elle l’espionna du coin de l’œil, sourire bénin et lunettes brillantes, en attente du moment où elle daignerait regarder dans sa direction.
« Eh, Octy. »
« Quoi encore ?! »
« T’es encore plus mignonne quand tu boudes sans rien dire. »
* * * * * *
Lyra et Bonbon observèrent les minces volutes de fumée s’échapper par les oreilles d’une Octavia bouillonnante. Ironiquement, plus Vinyl était proche du danger, plus elle s’évertuait à railler Octavia. En conséquence, la théorie de la sélection naturelle de Charles Darwhinny se vit démontrée d’une bien belle façon quand Octavia asséna à Vinyl un coup dans les côtes, qui s’écroula sur un siège. Vinyl réarrangea ses pattes après l’atterrissage pour faire croire qu’elle l’avait fait exprès, et non pas qu’elle s’était fait botter la croupe.
Bonbon applaudit légèrement pendant qu’Octavia se calmait tout en offrant un sabot navré à Vinyl pour l’aider à se remettre debout.
« Wouah, Octavia, c’est que t’as du caractère. Mieux vaut être prudente, Lyra. »
Lyra s’ébroua. « Bien sûr, elle peut mettre à terre la première catin infâme venue, mais sûrement pas un poney comme moi. »
« Vinyl n’a rien d’infâme ! »
« Ouais, je suis pas sa femme, les filles ! »
« Non… tu… » Octavia soupira dans son sabot. « Elle est… DJ. Et puis en quoi ça vous regarde de toute façon ? »
Lyra s’avachit plus confortablement sur son siège pour mieux profiter des événements à venir.
« Ça ne nous regarde pas. On admire juste la façon hypocrite dont tu te comportes, Octavia. »
« De quelle hypocrisie parles-tu, Lyra ? »
« Oh, tu me calomnies pour avoir épousé une jument. Puis tu te pointes avec une ponette. Une licorne, aussi. Très intriguant. »
« Je jure devant Célestia que je ne suis pas en relation avec Vinyl. Nous sommes… amies. »
« Bien sûr, bien sûr. Eh, Vinyl ? »
Vinyl apparut de derrière Octavia pour se faire bien visible de Lyra.
« Ouais, quoi d’neuf ? »
« Réflexe ! »
Lyra saisit une copie cartonnée particulièrement épaisse du Kazoo Hebdo avec sa magie, et l’envoya vivement à la tête de Vinyl. Un réveil instinctif de la corne sauva les lunettes de Vinyl de la casse par un article fascinant sur les étuis à kazoos, en l’enveloppant dans une aura de magie grise et l’arrêtant avant qu’il ne puisse atteindre son museau.
Bonbon se tordit de rire et tomba à la renverse sur sa chaise, tout en pointant du sabot une Vinyl Scratch et une Octavia maintenant confuses.
« Je le savais ! Je savais que vous étiez ensemble ! »
Le cerveau d’Octavia fut le premier dans le feu de l’action, comme d’habitude.
« Quoi ? En quoi jeter un livre à Vinyl prouve quoi que ce soit ? »
« Je ne sais pas, Octavia. Peut-être… sa magie ? Tu ne vois rien de différent, Vinyl ? »
C’est seulement à ce moment-là que Vinyl remarqua l’absence d’aura blanche nacrée, maintenant remplacée par une aura gris ardoise. Elle se concentra, mais cela ne fit qu’augmenter le contraste de gris plutôt que le diminuer.
« Tu as Octavia partout sur ta corne ! Bande de petites coquines ! »
« Quoi ?… Mais je… »
« Ha ! On ne cache pas la magie, tout dans le subconscient ! »
« Qu’est-ce qui se passe ? »
Lyra s’assit correctement, et regarda Vinyl et Octavia droit dans les yeux tout en souriant comme un chat du Cheshire.
« En fait, une licorne tire son pouvoir d’une intense concentration… oui, même elle. La plupart se concentrent sur elles-mêmes, pouvoir inné et cætera. Mais parfois… » Lyra saisit un livre d’une table basse en le nimbant d’une aura beige, en place de l’aura verte attendue. « Une licorne trouve un autre poney sur lequel se concentrer, sans avoir à penser à lui… ou elle. »
Octavia croisa les pattes de devant et se tint devant Lyra d’un air de défi.
« Ça ne prouve en rien que je suis impliquée. »
« Ça arrive seulement quand on… devient très proche de l’autre poney. »
« Je… euh… hm… c’est que… »
« Eh ben, Octavia. T’es trop facile à piéger. »
Si Bonbon couvait un ardent accès d’hilarité jusqu’à présent, c’était maintenant une fournaise qui la dévorait de l’intérieur. Elle se plia en deux, tomba de sa chaise sur le sol, mais continua de rire néanmoins.
« Vous deux… c’est juste… c’est adorable la façon dont… elles nient… tellement mal ! De nous deux c’est moi qu’elles me rappellent, Lyra. »
« Eh bien, Octavia. Je me dois de retirer mes insultes, il semble que nous ayons plus en commun que je ne le pensais. Même avant que je ne reçoive ce magazine sous ma porte. »
« Qu-quel magazine ? »
« Tuba. »
Octavia aurait pu mourir heureuse ici et maintenant. Fût-ce au moins pour ne pas subir l’intervention de Vinyl. Dans un malavisé accès de bravoure, celle-ci passa une patte autour des épaules d’Octavia et la serra étroitement près d’elle. Au moins, Octavia était heureuse d’avoir un poney derrière lequel se cacher pour le moment.
« Fichez-lui la paix. Qu’est-ce qu’on vous a fait pour mériter ça ? »
« Vinyl, je t’en prie. Elles ont lu le magazine. »
« Quoi, celui du poney à la glace ? »
« Oui, celui là. »
Vinyl resta coite un long moment alors que ses joues albinos se vidaient du peu de sang qu’elles contenaient en temps normal. Elle fixa au loin tout en réfléchissant à un moyen de s’échapper, pendant qu’Octavia l’utilisait comme couverture pour la salve de railleries qui se profilait.
Lyra était déjà debout, bien qu’à la plus grande surprise de Vinyl, son sourire était amical, pas intimidant. Bonbon se tenait à côté d’elle, sa tête reposant sur l’épaule de Lyra avec une expression de contentement sur son visage.
« Vinyl, je suis contente qu’Octavia ait finalement trouvé quelqu’un pour l’aider à retirer ce balai qu’elle avait dans le derrière, même si pour ça il a fallu coincer un instrument à vent ailleurs. »
« Minute, c’est pas vraiment arri- »
« Oui, je sais. Je blaguais. »
« Oh, ok. Comment vous l’avez eu sinon ? »
« Boîte aux lettres. C’était entre deux lettres d’avocats, et une offre pour un kit d’extensions de corne. »
« Ça existe ?! »
« Tu me files les jetons. »
Octavia émergea depuis derrière Vinyl, bien qu’elle gardât sa patte autour de son épaule, et imita la pose avec la sienne.
« Et maintenant, Lyra ? Tu vas le dire à la Terre entière pour me faire virer ? Je ne t’en voudrais pas. Avec le recul, j’ai à peine dit un mot quand c’est toi qui t’es retrouvée sous le microscope. »
« Aussi tentant que voir ton arrière-train recevoir le traitement qu’il mérite puisse être, je ne peux pas m’empêcher de penser que depuis que Bonbon a fait de moi un poney meilleur… la revanche est une chose stupide. »
« Donc tout est pardonné ? »
« Mais pas oublié. De plus, une lesbienne qui pointe du sabot une autre lesbienne, ça ne fera jamais les gros titres. Il y a le réchauffement climatique pour occuper tout le monde à la place. En plus, vous me rappelez Bonbon et moi. Ha, vous allez en passer des bons moments. »
Octavia se détacha de Vinyl avec hésitation, fit quelques pas, et leva un sabot à l’intention de Lyra. Celle-ci le toisa avec une abjecte suspicion, avant de tendre le sien et de le serrer fermement.
« Souviens-toi, Octavia : je ne vais pas t’embêter, mais d’autres poneys le feront. »
« J’en suis consciente. » Octavia revint vers Vinyl et l’enlaça étroitement. « Mais je suppose qu’ensemble, nous pourrons ignorer leurs sifflets. Bien, il me semble qu’il y a un certain quatuor dont nous représentons la moitié, n’est-ce pas ? »
« En effet, Mlle Philharmonica. Êtes-vous prête à vous joindre à moi ? »
« Mlle Heartstrings, ce sera avec plaisir. »
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