« C’est une histoire passionnante. »
Pour un observateur extérieur, cette réponse aurait pu paraître chargée d’un cynisme visant à signifier le total désintérêt qu’aurait mon interlocutrice pour mon histoire. Toutefois, je croyais pouvoir décerner de subtils indices signifiant le contraire : un rythme respiratoire très légèrement accéléré, une discrète étincelle au fond d’un regard autrement impénétrable et une posture qui apparaissait un peu moins stoïque qu’à l’accoutumée. A croire que je commençais à réussir à lire au travers de la carapace ignée qui semblait l’habiller. Ou bien était-ce simplement que je faisais un léger transfert de mon excitation devant pareille énigme scientifique.
Nous étions assises dans son bureau de l’université de Manehattan. Une pièce à la sobriété spartiate correspondant totalement à la personnalité de sa propriétaire. La seule fantaisie qu’elle semblait s’être autorisée, si l’on pouvait appeler cela ainsi, étaient les très nombreux spécimens de roches tous plus différents les uns que les autres présentés sur les étagères bordant les côtés de la pièce. Le reste n’était constitué que d’un bureau, d’étagères et de chaises dont la simplicité confinait à la froideur. Je lui demandais alors si elle avait une idée de ce à quoi nous étions confrontés. La réponse fut laconique :
« Non. Aucune. »
Devant mon expression visiblement déçue, la jument fut apparemment consciente de la nécessité d’apporter une touche d’optimisme bien que sur un ton sans aucune chaleur :
« Ne fais pas cette tête. Si je ne peux te donner ne serait-ce que la moindre information sur cette météorite, c’est que nous sommes sans doute à l’aune d’une découverte scientifique majeur. »
En dépit du fait que cette phrase ait été dite de la même façon qu’elle m’aurait annoncée sa décision de cuisiner pour ce soir une omelette au poireau, elle avait néanmoins réussie à me donner du baume au cœur. « Toutefois, » continua-t-elle « c’est problématique si ton échantillon disparaît. Surtout qu’il ne semble pas avoir le même comportement que Boulder qui adore certes se cacher mais qui finit toujours par revenir à son point de départ. »
Je restais interdite quelques instants. J’avais complètement oubliée l’existence de l’étrange caillou de compagnie de Maud, qui reposait sur un coin du bureau. Du moins le supposais-je tant j’aurais été incapable de le reconnaître parmi d’autres pierres. Voyant que je le fixais, Maud me donna néanmoins raison :
« N’est-il pas adorable ? Mais assez parlé de choses triviales, revenons à notre météorite. Je pense que tu attends de moi que nous réalisions de nouveaux tests afin de réussir à au moins avoir quelques réponses et à donner quelque chose d’un minimum consistant à la communauté scientifique ? »’
Sans me laisser le temps de répondre, Maud descendit de sa chaise et me signifia de la suivre, non sans oublier de prendre le fragment de météorite. Ce dernier reposait dans un seau à mes côtés et l’on pouvait l’entendre ronger doucement la matière du récipient dans lequel il reposait. Le laboratoire était incontestablement plus fourni en matériel que ne l’était celui de mon château. Je fus à nouveau prise d’une montée d’excitation à la vue de tous ces outils qui allaient sans aucun doute nous permettre de faire tomber un nouveau pan des mystères de la nature.
Passant une blouse et m’invitant à faire de même, Maud s’approcha du récipient que je trimballais magiquement et utilisa une pince pour en extraire la roche venue des tréfonds de l’espace. Elle l’examina un court instant, sans expression décelable, avant de se mettre au travail.
Les analyses durèrent jusqu’à tard dans la nuit et recouvrirent un spectre de domaines scientifiques incomparable à celui de mes expériences de la veille. La météorite fut soumise à des tests extrêmes ou à d’autres qui m’étaient totalement inconnus. Maud travaillait d’une façon particulièrement efficace, de sa froideur découlait la plus parfaite rigueur nécessaire à toute recherche scientifique. Mais malgré les heures passées et bien que ce fut une journée particulièrement formatrice pour moi, les réponses furent à nouveau loin de celles escomptées.
Tout ce que nous apprirent nos expériences, c’est qu’il était tout d’abord impossible de définir si ce n’était ne serait-ce qu’une roche ou un métal. Devant son apparente absurdité, Maud proposa même d’appeler cet élément la pinkite en hommage à sa sœur et ce trait d’humour glacé, à ce point inattendu de sa part, réussi à encore plus m’étonner que l’étrange pierre que nous étudions.
Mais nous ne pouvions en dire que peu de choses, sinon qu’il se délitait apparemment dans l’air sans toutefois créer le moindre gaz. Et si notre atmosphère semblait lui faire de l’effet, il ne faisait état d’aucune réaction aux produits les plus agressifs que nous connaissions. Tout au plus semblait-il capable de ronger les matériaux les plus stables que nous avions en notre possession, allant jusqu’à apparemment dissoudre le diamant. Et restait toujours cette étrange couleur, que nous ne pouvions placer autrement que dans le spectre de la lumière visible, car nous le voyions très bien de nos propres yeux, mais qui n’avait sa place nulle part dans la gamme chromatique.
« Il va falloir refaire la coiffure de Rainbow Dash » blagua à nouveau Maud de son ton monocorde et j’étais désormais certaine que ces étranges traits d’humour étaient sa façon de faire paraître sa profonde excitation face à l’incongruité que nous étudiions en ce moment. Néanmoins se posait la question de la conservation de la pierre, celle-ci diminuant à vue d’œil sans qu’il soit pourtant possible de l’imputer aux effets de nos expériences. La docteur ès géologie me proposa alors comme solution de diviser l’échantillon en trois et de les placer sous différentes méthodes de protection : sous vide, dans l’azote liquide et sous un sort de stase.
A l’idée de devoir à nouveau fragmenter cette roche et réentendre ces sons qui ne devraient pas exister, mon corps se bloqua sans que je puisse y faire grand-chose. Bien que je m’attendais à une intensité moindre en raison de la faible taille de notre échantillon, quelque chose dans mon esprit refusait même cette possibilité. Maud n’eut donc d’autre choix que de réaliser ce travail seule alors que j’attendais dans une pièce située à l’autre bout du bâtiment, essayant tant bien que mal de me détendre après cette crise inattendue. Et lorsqu’elle vint me chercher, je notais de légères crispations sur son visage. Même si celui-ci gardait toujours cette expression profondément neutre, il semblait donc que même la stoïque jument ne pouvait rester insensible à ces sons.
Elle n’en fit cependant aucune mention, préférant me faire part de sa volonté de m’accompagner à mon retour à Ponyville afin d’observer de ses propres yeux l’impact et ce qu’il restait de la météorite. Ce qui lui donnerait aussi l’occasion de rentre visite à sa sœur. J’acceptai avec plaisir, ne serait-ce que pour Pinkie et après une courte nuit, durant laquelle je suis certaine d’avoir rêvée de ces horribles sons et de cette étrange couleur, nous étions à nouveau en chemin pour Ponyville.
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