Errance.

La jument noctambule venait de sortir du palais, regardant autour d’elle. Ces frissons qu’elle avait ressentis à son réveil ne l’avaient pas quitté. La princesse Luna avait demandé à son plus fidèle batpony de vérifier les journaux de la veille, mais elle repensait à son rêve, les bordels notoires n'existaient plus, enfin, du moins, ils n'étaient pas aisé de les trouver en marchant dans la rue. Elle avait finalement demandé à une autre de ses protégés de regarder dans les archives, et fut surprise que cette batpony lui trouve un fait divers qui avait eu lieu quelques années avant son bannissement. Se laissant guider au gré du vent, l’alicorne à la robe bleu nuit regarda vers les rues pavées de cette grande ville de Canterlot. Les derniers poneys rentraient chez eux. La ville avait bien changé depuis son bannissement. À cette époque, ce n'était qu’une simple bourgade, quelques maisons et une rue principale, encore aujourd'hui, les villages ressemblent à ça. Bien qu’il y ait plus de couleurs et que la vie des poneys ait changé, ils ne travaillent plus pour survivre, mais pour leur talent. La vie en elle même était plus facile, plus besoin d’être armé d’une dague ou autre épée pour se protéger, aujourd'hui, à n'importe quel moment du jour ou de la nuit, les poney se promènent, sans crainte pour leur vie.

L’alicorne baissa la tête, observant les ruelles désertes. Elle avait fini par arriver dans un coin de Canterlot, les bâtiments les plus anciens étaient faits de bois, et pour une raison bien étrange, cette zone était abandonnée par les poneys. Elle ne voyait aucune maison habitée, les vitres étaient brisées, pas par vandalisme, mais par les années et les intempéries. La jument à la robe nuit se posa au milieu de la ruelle, levant la tête et regardant à travers une fenêtre où un vieux bout de tissu ondulait au gré du vent. Un poney avait du être à cette fenêtre et avait dû regarder dans la rue. Cette vision fit baisser la tête de l’alicorne. Son immortalité lui pesait lourd en ces moments, quand elle pensait aux être qui avaient vécu en cet endroit, maintenant inhabité. Une forme de couleur blanche la sortit de ses pensées. Elle releva la tête, observant le poney qui se dirigeait vers elle. La jument releva une paupière, étonnée de voir une jument dans ce quartier abandonné. C’était une licorne, sa robe de couleur blanche semblait être entourée d’une aura blanche. L’alicorne reconnut bien assez vite cette grande licorne qui faisait sa taille, sa crinière aux deux tons de couleur, rose et blanc. Elle lui offrit un sourire, mais son sourire disparut bien vite, voyant la licorne qui semblait essayer de fuir quelque chose. “Fleur de lys, que se passe-t-il ?” La grande licorne s'arrêta, observant la jument à la robe noire. Elle semblait comme surprise. La jument se rapprocha de l’alicorne, ses lèvres semblaient bouger, mais l’alicorne n'entendit aucun son. “Fleur de lys, non, pas toi, comment est-ce possible ?” La jument à l’aura blanche baissa la tête. Ses lèvres bougèrent de nouveau, sans qu’aucun son ne puisse être entendu. L’alicorne connaissait bien des langues étrangères, mais la seule qui puisse l’aider en ce moment était la langue des signes, mais celle-ci ne lui serait d’aucun secours. La licorne ne savait pas s’en servir. Puis Luna s’assit, soufflant par les naseaux.

Elle redressa ses oreilles, il y avait bien longtemps, elle avait appris à lire sur les lèvres des poneys. “Fleur ? regarde moi et parle-moi, pourquoi, que s’est-il passé ?”

La licorne releva la tête, la penchant sur le côté “Vous ne pouvez m’entendre ?”

L’alicorne lui offrit un timide sourire. “Si, je peux t’entendre, ou plus exactement, te lire.” La jument à la robe bleu nuit releva un sabot, frottant légèrement sa crinière éthérée. “Fleur, as-tu compris se qui se passe, te souviens-tu de ce qui s’est passé ?”

La jument regarda quelques instant ses sabots. Relevant la tête elle se mit à regarder l’alicorne. “Je suis venue ici, car on avait dit que dans ce quartier abandonné se trouvaient de magnifiques objets, eux aussi abandonnés, et en visitant l’une de ces maisons…” La licorne se tourna, regardant une demeure abandonnée. Puis se retournant et regardant la jument de la nuit “J’ai traversé le sol, mais je ne me suis pas fait mal, mais un poney, un terrestre blanc me suit partout, mais il semble qu’il ne sorte pas de cette maison et moi, je n’arrive pas à quitter ce quartier.” Luna releva ses paupières, un autre poney serait lui aussi bloqué dans cette vieille demeure?

Osant s'approcher de la licorne, l’alicorne fit un pas en direction de la vieille bâtisse que la jument lui avait indiquée. “Veux tu bien… m’accompagner ?” Elle remarqua l'hésitation de la licorne, et pour la persuader de l'accompagner, elle lui rappela qui elle était, “N’oublie pas que tu ne risques rien avec moi, je suis l’alicorne qui veille sur vos rêves” La jument à la crinière aux deux tons releva la tête, dévisageant l’alicorne quelques secondes, avançant la patte droite, elle inclina la tête, en signe de soumission.

Luna ne put cacher un léger sourire, ça lui rappelait tant de vieux souvenirs. La jument blanche ouvrit ses yeux et dans un ton neutre, “Veuillez me pardonner, maîtresse. La peur m’a fait oublier ma place.”

“Relève-toi, mon amie. Je ne voulais pas te forcer, mais je souhaite que tu viennes avec moi.” La licorne se redressa, un léger sourire aux lèvres. Puis les deux juments se dirigèrent vers la vieille bâtisse. Arrivées sur le seuil, les deux se mirent à frissonner, la licorne s'immobilisa quelques instants, avant de passer l’entrée, la porte était ouverte, et ne risquait plus de se fermer, elle était au sol, ses gonds arrachés par le temps. Luna la suivait, restant sur ses gardes à chaque pas qu’elle faisait, serrant la mâchoire à chaque grincement du plancher. Elle ne risquait rien, mais son amie… L’alicorne s'arrêta, devant elle se trouvait un trou béant. Elle releva la tête pour regarder le plafond, celui-ci avait disparu. Elle se tourna, baissant les oreilles et regardant la licorne à ses côtés. Elle regardait au fond du trou, dans le vieux sous-sol.

“Je suis remontée, je ne sais pas vraiment comment... Il y avait ce poney recouvert d’un habit noir, je ne pouvais pas voir son visage, alors je me suis rapprochée de lui… Arrivée a moins d’un mètre de lui, je lui ai demandé s’il était perdu ?” La licorne releva la tête, regardant le trou au plafond. “Puis il a relevé sa capuche, sans rien dire, il m’a souri, un sourire si doux, innocent, chaleureux… Puis le plancher a cédé. Quand j’ai rouvert les yeux, j'étais là où je suis, et ce terrestre blanc était à votre place, il souriait toujours, me tendant son sabot.” La licorne s’arrêta de faire bouger ses lèvres, regardant une porte fermée, sûrement un cagibi, ou bien une autre pièce à vivre, elle ferma ses yeux quelques secondes avant de les rouvrir pour regarder l’alicorne. “Il y avait comme une aura blanche autour de cette porte, et ce terrestre qui l’invitait à le suivre… J’ai pris peurs, et j’ai fuis, j'ai passé la porte et sauté dans la rue, j’ai essayé de quitter ce quartier… Mais à chaque fois, je me retrouve devant cette maison abandonnée…”

Luna se rapprocha, déployant une aile pour la couvrir et la calmer, mais elle s'arrêta en remarquant le poney blanc. Il la dévisageait, comme pour lui dire de ne pas la toucher. La licorne continua de regarder le fond du trou, des larmes s'étaient mises à couler le long de ses joues. L’alicorne replia son aile et baissa la tête avant de la relever pour regarder le poney terrestre qui se trouvait de l’autre côté du trou. Il avait disparu. Fleur de lys releva sa tête, observant son amie. “ Je suis morte ? Oui c’est ça, aucun poney n’aurait pu s’en sortir sans une seule égratignure.” L’alicorne baissa la tête et lui fit un signe.

“Je suis désolée, je n'étais pas présente, je n’ai rien pu faire. Et je ne peux rien faire.” La jument à la robe nuit ferma les yeux, laissant ses sentiments parler, elle se mit à pleurer. “Je suis désolée, désolée mon amie, j’aimerais te dire que tu es vivante, mais ça serait se voiler la face, tu es morte, et je n’ai rien ressenti, je n'étais pas présente pour t'aider.” Une douce chaleur lui toucha l'épaule, avant de se répandre sur tout son corps. C'était une chaleur douce et amicale, comme quand on est avec une personne que l’on aime. Luna releva la tête et regarda son épaule, le sabot de la licorne, où une très belle aura enveloppait, elle lui souriait.

“Merci mon amie, de m'avoir guidée, de m'avoir accompagnée dans ce moment douloureux, j'avais peur de la vérité, de savoir que j'étais morte, seule, sans personne qui me pleurait. Mais vous êtes là. Maîtresse, je vous remercie d'avoir été toujours présente, et encore en ce moment, de me pleurer.” L’alicorne ne pouvait s'empêcher de pleurer, mais ce n'était pas des larmes de tristesse, mais des larmes de joie. Elle était heureuse que son amie ne lui en veuille pas de ne pas avoir été là, au moment où elle aurait pu lui être d’un secours. La licorne se tourna, passant à travers son amie, se dirigeant vers un terrestre blanc vêtu d’un habit noir. Elle lui souriait, l'étalon lui tendit son sabot, et la conduisit vers la porte, celle qui devait donner dans une autre pièce, arrivée auprès de cette porte, celle-ci s’ouvrit, une forte lueur blanche obligea l’alicorne à lever un sabot et le placer devant son visage, de cette lueur, Luna ressentit une douce chaleur.

Tout était devenu sombre, la chaleur avait disparu aussi vite qu’elle était apparue, et la jument noctambule se retrouva seule, dans cette vieille bâtisse. Elle baissa son regard vers le trou dans le plancher, elle pouvait remarquer le corps de Fleur de lys, recouverte de quelques planches, une grande licorne à la crinière aux deux couleurs, rose et blanc, sans aucune marque, son flanc était redevenu vierge de toute marque. Elle s’en détourna, reniflant, elle s'approcha de la fameuse porte, relevant un sabot, elle le gardait en équilibre, à quelques centimètres au-dessus de la vieille clenche, elle se mit à l’abaisser, la porte commença à s’ouvrir avant de tomber au sol, soulevant un nuage de poussière, l’alicorne se mis a éternuer avant de secouer la tête, regardant dans la pièce, où un vieux lit se trouvait, fait de paille, quelques commodes sur un côté du mur. Aucune photo, aucun objet personnel ne s’y trouvait, elle avait dû être vidée. Elle se retourna, regardant la grande pièce où elle s’était retrouvée avec son amie quelques minutes auparavant. Un vieux bar s’y trouvait et il y avait des débris de meubles un peu partout, ça ressemblait à de très vieilles tables, elle se redressa sur toute sa hauteur. C’était l'étable de la licorne de son rêve, ça ne se pouvait pas. Combien y avait-il de chance qu’elle le retrouve, que son amie y trouve la mort. L’alicorne se mit à ressentir un frisson qui avait disparu, quelques minutes, elle se mit à regarder tout autour d’elle, mais elle était bien seule. La jument couleur nuit se mit à galoper, au risque de faire s'écrouler la bâtisse, arrivée à la porte d’entrée, elle sauta et déploya ses ailes, battant l’air pour se propulser et s'éloigner au plus vite de ce quartier. Sans se retourner, elle se dirigea vers le palais, entrant dans sa chambre où une batpony était installée, lisant un roman, des lunettes fixées sur son museau. Luna se précipita sur la jument, l'attrapant et la serrant aussi fort qu’elle le pouvait, elle frottait son visage à l’encolure de la batpony à la robe grise. Bien que la jument soit heureuse de cette situation, elle n’en profita pas, sa maîtresse était dans le besoin, un besoins de sentir quelqu'un auprès d’elle, la réconfortait. La batpony déposa un baiser sur le front de sa reine, et tout doucement à son oreille, elle lui susurra, “Ça va aller ma reine, je suis là, je serai toujours là pour vous.”