Chapitre 6: I Would Do Anything For You

Le carrosse doré attendait déjà Sunset lorsqu’elle arriva au lieu de rendez-vous avec SweetSpring à ses côtés.

La nuit avait été courte, trop courte selon la jaune. Et lorsque son regard se posa sur l’air visiblement gêné des deux soldats, elle ressentit soudain l’envie de faire demi-tour, d’oublier la princesse et de seulement profiter du sourire de son amie. Elle l’aurait fait si la situation ne lui imposait pas d’affronter Célestia. Mais elle ne pouvait plus se permettre de fuir la discussion avec elle plus longtemps, pour son propre bien, mais surtout pour celui de SweetSpring. C’était une chance de se montrer un peu adulte, et il était justement grand temps pour la princesse de se rende compte que ses secrets ainsi que ses actes avaient un impact sur sa plus fidèle disciple. La colère de Sunset n’avait été que le commencement. Restait encore à Célestia de comprendre qu’à partir de maintenant, l’un de ses petits sourires ne suffirait plus à faire taire toutes les interrogations qui pataugeaient dans l’esprit embué de la licorne.

- Bon… Il est temps que j’y aille. -lança t-elle en se retournant vers son amie.

SweetSpring s’avança, effleurant son sabot avant droit du sien. Ce matin elles n’avaient pas beaucoup parlés, se préparant certainement autant l’une que l’autre à se retrouver séparer pour la première fois depuis une semaine. Sunset n’avait pas envie de partir, et de toute évidence la pégase n’avait pas non plus envie de la voir s’en aller loin d’elle. Elles avaient passés tant de temps ensemble ces derniers jours, retrouver la solitude ainsi que le silence allait leur faire un drôle d’effet. Sunset imaginait déjà sa chambre, devenu soudainement trop grande pour elle seule… et sans cette discrète mais agréable odeur qui régnait dans la petite maison des Tale. Oui, décidément ce serait étrange de ne pas voir son amie toute la journée durant.

- Tu… viens toujours au palais demain, hein?

- Oui, bien sûr!... Mais seulement si tu veux bien de moi…

La licorne roula légèrement les yeux avant de lui donner un petit coup de sabot contre la jambe. La question ne se posait même pas! Bien sûr qu'elle voulait son amie pégase à ses côtés, jamais elle ne lui aurait proposé de venir sinon. Après tout Sunset ne s'était jamais forcé à fréquenter quelqu'un si elle exécrait sa simple présence. Et ce n'était pas le cas pour SweetSpring.

Au contraire, elle appréciait absolument tout chez elle. Surtout le fait qu'elle n'avait pas à avouer à voix haute ce genre de choses... Nul doute qu'elle en aurait rougi, ou alors qu'elle aurait bégayé comme une de ces stupides jument amourachées de quelque étalon qu'il soit. Heureusement pour elle, Sunset n'aurait pas à montrer cette partie gênante de sa personnalité, SweetSpring comprenait assez bien les choses pour se rendre compte qu'elle était spéciale. Elle ne faisait que la taquiner un peu, comme il était commun de le faire entre deux amies. 

- Evidemment! -répondit-elle alors avec entrain.

- Génial.

- Ouais.

- Hm hm.

Leurs regards se croisèrent, et une sorte de gêne silencieuse s’installa entre elles. Sunset n’avait déjà pas envie de quitter son amie de base, et sentir que cette dernière était dans le même état d’esprit n’allait pas l’aider à tourner les sabots. Elle se mit à rire un peu, mal à l’aise. Même si elles se revoyaient demain… La journée serait longue sans la pégase à ses côtés, la pouliche imaginait à peine sortir de la salle du trône, et se retrouver confronter au vide. Ce serait barbant ! Pourquoi avait-elle dit qu’elle devrait y aller seule ?!... Maintenant Shimmer regrettait amèrement ces mots-ci, en tout cas l’espace d’un instant. Et puis elle pensa à l’état dans lequel elle pourrait être après sa confrontation avec la princesse. Finalement c’était mieux ainsi. Tant pis pour l’ennui, elle arriverait à le supporter, après tout elle pourrait toujours profiter de son temps pour apprendre d’autres sorts seule !

Un baiser sur sa joue la sortit de ses pensées. SweetSpring s’était encore un peu rapprochée d’elle, elle riait un peu.

- Tu devrais vraiment y aller. La princesse va se poser des questions si tu es en retard.

- Oui tu as raison !... Mais avant, donne-moi un autre baiser, j’en ai besoin pour me donner du courage.

- D’accord, mais juste parce que c’est toi.

Les lèvres de la pégase percutèrent en une douce sensation la joue droite de Sunset. Oui elle allait avoir besoin de courage pour oser tenir tête à la princesse. Elle allait avoir besoin de quelque chose pour ne pas se mettre à regretter ses mots et à s’excuser pour une réaction logique.

Sunset sourit, puis se permit à son tour d’embrasser son amie avant de rejoindre la carrosse au petit trot. Il était temps.

- A demain !

- A demain Sunset !

Les roues d’or se mirent en route, accompagnées par les sabots claquant des pégases sur les tendres nuages. Il faisait beau aujourd’hui, le soleil tapait fort, et au loin dans les cieux un arc-en-ciel commençait à s’effacer doucement. Cloudsdale était magnifique vu d’ici, mais il n’y avait qu’un spectacle sur lequel s’était concentrée la jeune pouliche… Celui de son amie, souriante la saluant avec entrain à l’ombre d’un petit nuage passant.

- … Elle est mignonne quand même…

Les mots étaient sortis tous seuls. Mais aussitôt entendit-elle sa propre voix les prononcer, que la pouliche se frappa, d’un coup, le crâne contre la bordure du carrosse. Bien sûr que SweetSpring était mignonne ! Elle avait… quelque chose, quelque chose que les autres n’avaient pas. Un truc qui la rendait agréable à ses yeux… Un petit plus qui lui donnait envie de bien agir, d’être aussi mignonne qu’elle pour ne pas risquer de la perdre.

C’est pour elle qu’elle avait insulté Célestia.

Le vague rougissement de la pouliche s’intensifia alors qu’elle reposait sa petite tête sur ses pattes avant, étendues sur le rebord doré de son transport. Tout ce qu’elle avait fait ces derniers temps avaient étés pour SweetSpring. Elle avait beau retourner toutes ses actions selon les possibilités, la conclusion restait toujours la même : le bien être de la pégase avait été son principal objectif. Elle avait délaissé tout le reste, y compris ses précieuses études pour elle. Elle s’était même insurgée contre sa princesse, son soleil, sa grande Déesse à qui elle s’était complètement dévouée jusqu’à maintenant. Elle lui avait hurlé dessus comme jamais elle n’avait hurlé auparavant.

Elle avait pu voir Célestia se murer d’incompréhension, puis de douleur, et ses orbes clairs s’étaient soudainement ouverts à l’obscurité. La dirigeante d’Equestria s’était pliée à son vœu, abandonnant toute fierté pour simplement détourner le regard, comme une enfant blessée par un trop fort reproche.

Et pourtant n’avait-elle pas mérité ce châtiment-ci ? En cachant à son élève l’état de santé de SweetSpring, elle avait mis cette dernière en danger !... Pire que ça, Sunset avait failli la voir mourir à cause de cela. Que serait-il advenue de son état si Sunset n’avait finalement pas réussir à les téléporter ?... Sans doute se serait-elle éteinte en poussant un dernier et long cri d’agonie.

Cette simple image la fit terriblement frissonner.

Célestia avait provoqué tout cela. Indirectement certes, cependant au lieu de lui expliquer la situation comme toute personne logique le ferait, elle s’était cachée derrière d’étranges paroles. Au lieu de lui répondre tout simplement, elle avait jouée la carte du mystère comme s’il s’agissait d’une sorte de chasse au trésor. Pourquoi avait-elle fait cela ? N’aurait-elle pas pu lui dire la chose, dont s’était de toute manière un peu douté sa disciple. Cela aurait été tellement plus simple, et elle-même ce serait contrôler ce soir-là. Elle aurait juste demandé à SweetSpring de l’attendre au bout de la colline, et son spectacle aurait quand même eu lieu. Elles auraient même passés une très bonne soirée ensemble après cela, en riant et en observant les étoiles apparaître dans le ciel noirci de la nuit.

« On ne refait pas le monde avec des si ou aurait Sunset »

Le vent souffla un peu plus fort contre son pelage, accompagnant sa pensée. En effet, elle ne pouvait pas se permettre de faire de telles allégations. Les choses étaient qu’elles étaient. Et c’est pour cela qu’elle ne devait pas s’excuser. Ou alors seulement pour la rudesse de certains de ses propos. Le fond restait parfaitement compréhensible, et c’était à sa princesse de saisir le tort qu’elle avait eu de se taire… Pas à elle de s’excuser d’avoir ignoré quelque chose dont on ne l’avait de toute façon pas avertie.

Bien sûr que la licorne avait eu de gros doutes, voir même quelques suppositions sur le cas de SweetSpring… Mais elle n’aurait pas pu deviner avec exactitude de quoi il s’agissait. Alors Célestia aurait dû lui parler, point. Elle avait été en tort dans cette histoire, et ce depuis le début.

- Mademoiselle Shimmer, nous arrivons.

- Bien.

Il était grand temps de faire comprendre à la princesse qu’elle grossière erreur elle avait commis. Sunset bondit du carrosse à peine fut-il posé au sol, animée par une soudaine confiance. Et tandis qu’elle pénétrait dans le grand palais, la pouliche repensait au regard de SweetSpring, à sa douceur, son baiser… Pour elle, elle affronterait sa princesse.

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- Sunset.

- Princesse.

- Il y a quelque chose que tu souhaitais me dire ?

La haute stature de Célestia, droite et ferme fit reculer Sunset. Il y avait dans le regard de la souveraine une lueur sombre, douloureuse qu’elle n’aurait jamais crue voir une seconde fois. Cependant cette fois, cela l’a toucha d’une toute autre manière. Sachant parfaitement qu’elle était la cause de cette soudaine noirceur, elle s’en voulut l’espace d’une seconde puis se rappela soudain pourquoi elle s’était présentée à elle. Ses quatre sabots se plantèrent fermement contre le tapis de soie de la salle, et ses grands yeux se vêtirent de leur plus belle détermination.

- Je suis désolée de vous avoir insultée avant mon départ. Ce n’était pas correct de ma part.

Les lèvres de la princesse s’ouvrirent, mais la disciple ne lui laissa guère le temps de répliquer quoique ce soit :

- Cependant je ne m’excuserai pas pour tout ce que j’ai pu vous dire d’autre. Vous avez eu tort de me cacher la maladie de mon amie, et vous aurez beau dire tout ce que vous voulez pour vous justifier, ma princesse, mais le constat restera le même.

Il y eu un nouveau silence, et encore une fois il fut interrompu par les noirs sentiments qu’avait accumulé Shimmer.

- Et le pire c’est que vous n’aviez pas l’air de vous soucier de son état plus que de raison. Pourquoi vous, qui êtes à l’écoute du moindre cloporte venu quémander votre aide refusez purement et simplement de préserver la santé d’une jeune ponette malade! Que vous a-t-elle fait pour que vous vous montriez soudainement si cruelle ?

Une fois de plus, elle se laissait guider par ses émotions. Il en avait été de même pour Célestia, à une époque pas si lointaine que cela. En effet, elle s’était sue capable de n’importe quoi pour elle et pour ce titre sublime qu’elle lui promettait une fois sa valeur prouvée. Mais la princesse s’était elle-même éjectée de cette position, au détriment de la petite pégase. C’était de sa faute si maintenant sa jeune disciple se comportait ainsi, d’une manière totalement inconvenante en sa présence.

- Et moi dans tout cela… Je ne comprends pas pourquoi vous me refusez encore mon titre ! Je serai bientôt une adulte… J’en sais plus sur Equestria que n’importe quel autre poney. Et j’en sais plus sur la magie que n’importe quelle licorne qui se trouve dans ce royaume. Avec mes capacités, et celles d’une alicorne je serai capable de grandes choses ! Alors pourquoi continuez-vous ce petit jeu ? Pourquoi vous n- 

- Sunset…

- Non je n’ai pas fini ! Je veux que vous m’écou-

- Sunset.

La voix de Célestia n’avait laissé aucune place à la repartie. Elle s’était redressée d’un seul coup, projetant son ombre impériale jusque sur le petit corps tendue de la jaune. Et tandis qu’elle descendait calmement les marches qui les séparait, ses mots, durs et fermes se rependirent comme des flammes :

- Il y a de nombreuses choses que tu ignores Shimmer... Il en est de même pour tous les poneys, et même toutes les créatures qui peuplent cette terre. C’est une chose que tu devrais savoir, car toute personne investit de responsabilités doit avoir la présence d’esprit de reconnaître ses faiblesses.

- Peut être m-

- Cependant…

Ses fers claquèrent, elle s’arrêta à quelques centimètres de la plus jeune.

- Cela n’excuse pas les conséquences désastreuses qui se sont produites à cause de mon silence. Et je pense qu’il est temps que tu connaisses la vérité sur la raison de mon mutisme...

Sunset ne s’était pas attendu à cela. La princesse lui aurait menti pour… une quelconque raison dont elle n’aurait pas eu vent ? Ses sourcils se froncèrent, tout ça lui semblait louche. Elle était même prête à parier qu’elle n’apprécierait pas ce qu’elle allait entendre sortant d’entre ses grandes lèvres blanches.

- C’est SweetSpring elle-même qui m’a demandé de ne rien te dire.

- … Qu… Quoi ?! Mais quand aurait-elle…

- Il y a encore de nombreuses choses que tu ignores Sunset. Et l’une de ces choses c’est bien la manière dont tu es perçue par les autres.

Le sabot de Célestia s’étaient délicatement placés derrière sa disciple afin de la pousser à se tourner en direction des grandes baies vitrées de l’immense salle. Toutes deux s’étaient alors perdues dans la contemplation d’un des vitraux gravés représentant la princesse devant ses sujets, inclinés devant son élégante stature.

- Un souverain ne peut régner s’il provoque la peur chez ses fidèles sujets. Peut être restera t-il au pouvoir quelques années, avant de se faire renverser par une foule terrorisée ne pouvant subir plus longtemps sa tyrannie.

- … Pourquoi me racontez-vous cela… ? Qu’est-ce que cela à en rapport avec moi ?

La jeune pouliche n’aimait pas ce qu’elle semblait comprendre des paroles de son soleil. Non décidément, elle ne pourrait pas supporter d’entendre ce qu’elle croyait être la suite de son exposition. Ses sourcils se froncèrent largement, et elle recula à nouveau d’un bon pas, les yeux rivés sur Célestia.

- Cette mission que je t’ai confiée Sunset t’a permis de t’ouvrir un peu aux devoirs d’une véritable princesse. Grâce à SweetSpring tu as commencé à comprendre les responsabilités et les devoirs qui t’attendront lorsque tu deviendras une alicorne. –poursuivit la princesse très calmement. Je l’ai vu, et cette réaction que tu as eu à mon égard ne fait que me prouver que tu as été capable de trouver en cette pégase plus qu’un objet d’étude… Tu t’es faite une amie Sunset.

- Je le sais. Je n’avais pas besoin de… votre raisonnement pour m’en rendre compte… Mais je ne comprends toujours pas ce que cel-

- Malheureusement ma chère disciple… Tu ne peux pas, en tant que souveraine, te contenter d’être gentille et aimante envers une seule personne. Tu dois distribuer ton amour à tous ceux qui sont dans le besoin, et cela implique tous tes sujets… Quand bien même tu ne puisses pas être d’accord avec eux. Tu ne peux pas te permettre de les considérer avec dédain sous prétexte qu’ils seraient inférieurs à toi…

Le regard que porta la princesse sur elle ne plu guère à la licorne. Elle replia un peu ses oreilles contre son crâne, s’apprêta à répliquer sèchement, mais ce fut au tour de Célestia de l’empêcher de parler :

- Si tu persistes à arborer cette attitude en public Sunset Shimmer.. Tu finiras par faire disparaître ceux et celles auxquelles tu tiens le plus au monde.

- C’est fau-

- N'oublie pas cela Sunset: chaque parole, et chaque geste ont une influence sur ce que les autres pensent de toi… Et c’est pour cela que ton amie n’a rien voulu te dire… Parce que tu donnes cette impression constante de haïr tout ce qui pourrait s’approcher d’une sorte de faiblesse.

Le cœur de Sunset se serra brusquement. Elle crut manquer d’air pendant un temps, tandis que le reste de son corps était accablée par un sombre sentiment… La culpabilité. C’était donc de sa faute ? C’était… Entièrement de sa faute si tout le monde s’était tut… Et c’était elle qui devait porter le blâme pour la crise de son amie ? Ses yeux s’ouvrirent en grand, déformés par une expression indescriptible. Sa gorge lui sembla sèche, et pourtant l’humidité commençait à poindre au bord de ses yeux.

- C’est… c’est de ma faute si…

Alors qu’une première petite goutte s’écoulait le long de sa joue, le visage de Sunset percuta la poitrine immaculée de la princesse. Peut être avait-elle remarquée son trouble ? En tout cas ses sabots commencèrent à caresser lentement, presque tendrement la crinière ébouriffée de sa disciple.

- Tu as fait une erreur Sunset… Mais tout le monde en fait, c’est ainsi que l’on apprend.

- Cette erreur aurait pu la tuer !

Tentant de repousser la princesse, la jeune pouliche se sentait complètement perdue. Elle s’éloigna rapidement de Célestia, soudainement apeurée. Elle s’était trop approchée du soleil, et maintenant elle se brûlait les sabots à en hurler d’horreur.

- Je… Je voulais juste…

- Sunset…

- Je ne voulais pas qu’elle…

- Ecoute-moi maintenant, d’accord ?

La voix de la souveraine s’était à nouveau adoucie. Et à défaut de détendre, ou de soulager la peine qui venait d’enserrer le cœur de Shimmer, cela permis au moins d’obtenir son attention. Elles se regardèrent, un long moment sans qu’aucune d’elle ne prononce le moindre mot, puis finalement Célestia s’avança, paisible :

- Tu as appris beaucoup de choses aujourd’hui… Et j’ai bien conscience que cela risque de te torturer un long moment. Je te conseille de retourner dans ta chambre, d’oublier les études afin de réfléchir à ce dont nous venons de discuter… Mais je souhaite que tu le fasses seule. Le temps que tu te remettes de tout cela SweetSpring ne reviendra pas au château, et je refuse que tu retournes à Cloudsdale.

- Pourquoi ?!

- Sunset… Je sais ce que tu peux ressentir… Je n’en donne pas l’air, mais je suis vieille, très vieille maintenant. J’ai vécu des choses que tu n’imagines pas, et comme tout à chacun, j’ai déjà fait souffrir des personnes que j’aimais à cause de mon égo. Aujourd’hui tu as la chance de pouvoir changer cela avant qu’il ne soit trop tard… Et pour ça, il faut que tu te pardonnes à toi-même.

- Mais si jamais il lui arriv-

- Sa mère veille sur elle, et il y a de nombreux bons médecins à Cloudsdale.

La licorne baissa la tête, ses dents grincèrent, elle fit aussitôt volte-face et quitta la grande salle tandis que Célestia lui lança un dernier conseil qu’elle n’écouta même pas.

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A peine la porte de sa chambre fut-elle refermée que Sunset se laissa tomber sur le sol en un bruit lourd de signification. Elle était complètement effondrée.

« Tout est de ma faute »

Ces cinq petits mots ne cessaient de se répercuter contre les parois de son esprit, détruisant petit à petit les minces protections de ce dernier. Avait-elle donc été si odieuse pour faire peur à SweetSpring, et ce dès leur première rencontre ? Cela ne pouvait être autrement. La pégase ne s’était retrouvée seule avec Célestia que lors de leur première balade dans le château. Il n’y avait qu’à ce moment-là qu’elle avait pu confié à la princesse vouloir garder le secret sur sa maladie. Mais alors… Depuis tout ce temps… avait-elle encore peur d’elle ? Nourrissait-elle encore la même crainte d’être faible devant elle, et d’être indigne de sa présence ?

Cette pensée glaça à nouveau le sang de la pouliche. Jamais… Non jamais elle n’aurait rejeté SweetSpring à cause de ça… A moins que… Ses sabots tremblants vinrent se poser contre ses yeux. Elle n’était même plus sûre de ce qu’elle aurait pu faire si elle avait su dès le début… Celle qu’elle avait été aurait-elle donc été si cruelle ? L’aurait-elle repoussé avec dédain sans la moindre considération pour ses propres états d’âmes ?

Sunset se dressa d’un coup sur ses jambes, soudainement nauséeuse. Celle qu’elle avait été aurait très certainement envoyé SweetSpring paitre. Ou alors à défaut de cela, elle l’aurait tenu à l’écart pour ne pas risquer d’être interrompue dans ses études. Mais si Célestia ne lui avait pas donné la mission de devenir son amie… Non. Non elle ne voulait pas y penser.

Ses orbes retombèrent sur le miroir de sa commode, la licorne fut prise d’horreur devant son propre reflet.

- Arrête de me regarder ! –hurla t-elle d’un coup.

Sa corne brilla, le miroir se brisa en milles morceaux.

Elle était entrée dans une colère noire contre elle-même. Tout ce qui s’était mal passé était de sa faute… C’était de sa faute si SweetSpring ne lui avait rien dit. Sa faute aussi si cette dernière avait eu une crise presque mortelle… Et encore son blâme pour avoir hurlé sur sa princesse. Elle avait quelques torts dans cette histoire certes, mais c’était bien loin de ce qu’elle avait cru jusqu’à présent. Et elle lui avait crié dessus comme si elle n’avait été qu’une sale enquiquineuse.

Par Célestia qu’elle s’en voulait.

Et maintenant elle n’avait même plus le droit de voir son amie. Comment allait-elle faire pour s’excuser ? De nouveau elle en voulu à la princesse. Comment pouvait-elle se montrer aussi cruelle ?! Certes peut être méritait-elle une punition pour avoir agi ainsi, mais à ce point-là ? La pouliche commença à faire les cent pas, voilà qu’elle recommençait à s’agacer. A ce rythme Sunset était certaine qu’elle allait détruire quelque chose, ou même quelqu’un.

On toqua soudainement à sa porte, la faisant sursauter et marcher sur un bout de verre.

- Par Célestia, quoi encore ?!

Il y eu un silence, puis la porte s’ouvrit lentement, presque timidement. Les oreilles de Sunset se dressèrent sur son crâne, et une sorte de petit espoir se mit à germer dans son esprit. Était-ce… ?

- Hm… Sunset, ça va ?

Ses sourcils se froncèrent et son vain espoir mourut aussi vite qu’il était apparu.

- Qu’est-ce que tu fais là ?

- J’ai… hm… entendu du bruit alors je me suis permis de toquer.

Yellow Prism. Encore lui. Depuis son arrivée, Sunset ne pouvait tout simplement pas le supporter. Peut être était-ce dû à son caractère ? Ou sa façon de la regarder ? Ou tout simplement sa voix bien trop aiguë qu’elle trouvait parfaitement irritable ? Elle-même n’aurait pas su dire. Mais en tout cas, une chose était certaine, elle n’avait aucune envie de le voir maintenant.

- Tu m’espionnes ?

- Hein… ? Moi ? Bien sûr que non. C’est juste le hasard…

- Ouais c’est ça. …

- Ton sabot, tu t’es blessée avec les bouts de verres ?

- D’après toi ? -lança t-elle avec véhémence.

Elle aurait réellement aimé qu’il se taise, ou qu’il tourne les sabots comme il l’avait fait la dernière fois qu’elle s’était adressée à lui. Mais visiblement il n’était pas décidé à s’en aller. Il restait planté là, à fixer sa blessure qui commençait à saigner. Sunset grogna, puis utilisa sa magie pour jeter les morceaux de miroir dans sa petite poubelle. Ils se fracassèrent une fois de plus, brisant le silence pesant qui venait de s’installer entre les deux camarades. Et suite à cela la licorne chercha de quoi panser son entaille sans plus se soucier du poulain au pelage blanc. Elle se mit à espérer silencieusement qu’il abandonne, malheureusement le sort semblait s’acharner sur elle.

- Hm… Quoi encore ? Tu m’as vu, je vais bien alors pourquoi tu es toujours là à me fixer avec tes yeux d’imbécile heureux ?

La jaune était bien trop agacée pour se contenter de hausser légèrement le ton. Sa langue brûlait d’envie de lui envoyer une réplique cinglante qui le briserait assez pour qu’il n’ose plus jamais la regarder en face. Oh oui, elle mourrait d’envie de se montrer encore un peu plus horrible avec lui. Depuis le temps qu’il tentait de lui parler, et de devenir son « ami », cela la démangeait.

- Ahah… Tu es toujours aussi rude… Mais je suppose que tu as raison. –répliqua t-il de sa petite voix enjouée. En fait avec les autres étudiants nous allons faire une petite fête… Tu sais pour fêter la fin du semestre et se réunir de façon... Conviviales tous ensemble. Alors je me disais que tu aimerais peut être te joindre à nous ?

Shimmer se retourna d’un coup vers lui, une expression partagée entre l’étonnement et le dégoût plaqué sur son visage. Elle acheva son bandage, puis s’avança vers lui d’un pas rageur :

- Je ne sais pas ce que tu me veux, mais tu dois être sacrément id-…

Ses mots étaient morts au fond de sa gorge tandis qu’une idée venait de fleurir dans le coin de son esprit exaspéré.

Alors… La princesse refusait qu’elle voie de nouveau SweetSpring tant qu’elle ne se serait pas ouverte un peu à ses « camarades »… Et Yellow Prism venait de lui offrir sur un plateau d’argent l’excuse parfaite pour que Célestia les autorise à se revoir. Mais oui ! C’était simple comme bonjour ! Comment avait-elle pu être assez sotte pour ne pas y penser plus tôt ?! Elle n’avait qu’à faire semblant d’apprécier ces idiots lui servant de compagnons d’études, et le tour serait joué. Elle pourrait enfin retourner à Cloudsdale, ou alors la pégase viendrait à elle ! Un sourire léger se fendit sur le coin de ses lèvres. Pour une fois, cet imbécile de poulain lui servirait à quelque chose d’utile. Elle ferait d’une pierre deux coups !

Grâce à cela elle serait en mesure de voir son amie, et ainsi Célestia ne pourrait plus lui refuser son titre d’Alicorne. Elle la transformera sous peu, puis avec ses nouveaux pouvoirs acquis, elle pourra enfin soigner son amie malade, tout comme l’avait fait Mythic Soul avec la mort.

- Sunset… ?

- Oui ?

Son attitude changea du tout au tout. Une sorte d’air légèrement charmeur remplaça le sourire victorieux qu’elle avait eu, et pour faire bonne mesure elle se frotta légèrement le crâne.

- Ecoute… Je suis un peu… agacée ces derniers temps. Ce n’est pas contre toi personnellement, j’aimerais… m’excuser pour ça.

Ses yeux retombèrent sur le poulain d’en face, visiblement son petit manège fonctionnait. Un grand sourire venait d’apparaître sur le visage de Yellow, et il s’empressait déjà d’hocher négativement la tête.

- Ce n’est pas de ta faute !... Tu t’inquiètes pour tes études, et ton amie. Tout cela doit te faire beaucoup de pression sur les épaules… Mais, je… Enfin je ne m’attendais pas à ce que tu t’excuses. C’est un peu surprenant tu vois.

- Oui !... Bien sûr… Cependant, je me rends compte que je suis un peu vache avec toi… Et aussi avec les autres poulains de l’académie..

- Alors tu es d’accord pour venir ?

- Evidemment !... Si tu es sûr que ça ne dérangera personne…

Le petit poulain s’approcha d’elle, tapotant doucement la base de son encolure avec le même petit sourire niais.

- Au contraire ! Tous les autres seront heureux de l’apprendre ! Même si tu as… ton caractère, tu restes une licorne d’exception ! Tout le monde le sait.

- Oui… Enfin ! Je veux dire, je travaille dur pour ça.

- On a tous remarqués Sunset. Et c’est justement pour ça qu’il faudrait que tu te reposes un peu, sourire ça te va bien mieux que ton air toujours irritable ou… supérieur.

- Ah... Ah... A ce point-là ?

Pour toute réponse, son camarade hocha la tête. Fort heureusement pour lui, Sunset pouvait avoir une grande maitrise d’elle-même lorsque la situation l’exigeait. Le poulain serait déjà passé par la fenêtre sinon. Oh pour sûr elle se serait fait un très grand plaisir de le balancer par cette dernière. Était-ce de sa faute si ses soi-disant camarades étaient tous si lents ? S’ils étaient incapables de comprendre la moindre petite chose, quand bien même fut-elle risiblement simple ? Ce n’était pourtant pas difficile de saisir l’essence des sorts pour ensuite se les réattribuer.

- Si tu le permets j’aimerais me reposer un peu.

- Oui bien sûr Sunset !

- On se revoit en classe demain pour en reparler ?

- Oui oui. A demain Sunset.

- A demain.

La pouliche le salua du sabot, et c’est donc avec un air satisfait que Yellow Prism quitta sa chambre sans faire de vague.

- Un peu plus et je lui aurais foutu mon sabot dans la figure.

Sunset soupira, cette mission-là par contre allait lui demander beaucoup beaucoup de retenu. Célestia allait se montrer très méfiante, c’était une évidence qu’elle ne se pouvait d’ignorer. Alors il n’y avait aucun doute qu’en au fait qu’il lui faudrait se comporter ainsi un long moment avant qu’elle n’accepte de lever sa « punition ». Mais qu’importe ! Si c’est le prix qu’elle avait à payer pour pouvoir enfin revoir le sourire de SweetSpring, elle le supporterait. Pour elle, elle serait capable de faire preuve de contenance…. De toute manière, elle n’avait pas d’autres choix.

Un nouveau et long soupir fatigué lui échappa.

« Je dois le faire pour SweetSpring. »

Ses yeux retombèrent sur les rayons de soleil passant au travers des rideaux clairs de sa chambre. Elle lui avait fait la promesse que rien ne l’empêcherait de triompher. Elle avait juré en la regardant dans les yeux, qu’elle ferait tout son possible pour la sauver, et c’est ce qu’elle allait faire. Rien, pas même ces imbéciles ne pourraient retarder indéfiniment leur ascension commune. Yellow Prism venait de lui donner une occasion en or pour achever son plan, ce n’était plus qu’une question de temps maintenant pour qu’elle parvienne à impressionner assez Célestia. Elle finirait par entrer dans ses bonnes grâces en feignant l’amitié. C’était un plan tout simplement parfait… Et comme elle avait été chamboulée par les révélations de la princesse, cela allait forcément jouer en sa faveur. Oui ! La souveraine penserait certainement que ce choc lui avait permit de se remettre en question, et d’entrer sur le droit chemin qu’elle souhaitait pour elle.

Sunset ferma les yeux un instant. Elle imprégna son esprit des souvenirs de cette dernière semaine, et pour se donner du courage, elle imagina sans vraiment s’en rendre compte que SweetSpring et elle s’échangeaient un tendre mais affectueux baiser. Personne d’autre n’était digne d’elle, c’était maintenant une certitude.

« Ne t’inquiète pas SweetSpring… Moi je vais réussir là où Célestia a échoué. Encore une fois je te le promets. »

Elle rouvrit les yeux, armée de courage ainsi que d’une confiance sans borne sur ses propres capacités. Cette torture ne durerait que le temps qu’elle réussisse à convaincre Célestia… Après… Après sa vie et celle de son amie seraient tout simplement parfaites.

Avec sa magie, elle sortit de sa commode sa plus belle plume et son plus délicat morceau de parchemin. Après tout la princesse n’avait jamais précisé qu’elle ne pouvait pas envoyer une missive à son amie, autant exploiter cette faille avant qu’elle ne vienne changer les termes de sa punition.

Elle rédigea quelques lignes destinées à rassurer son amie, et à lui faire état de la situation. La moindre des choses était de ne pas l’inquiéter quant à leur plus longue séparation. Elle insuffla toute sa force dans ces quelques mots écrits à l’encre noir, puis comme pour sceller ces derniers, elle porta doucement le papier à ses lèvres, déposant un petit baiser sur les derniers mots qu’elle avait couché :

« J’ai hâte de te retrouver. »