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Paranormal Canterlot : Chained by y [...]

Une fiction écrite par Ponycroc.

Les enfants de la ruche

« Et sinon, tu n’as pas une petite faim ? » Demanda l’étalon rouge zébré en me décochant un léger sourire.

« Je t’assure que non, j’ai déjà mangé, mais merci encore, je ferai de mon mieux pour mon enquête. » Répondis-je en écartant ma mèche de crin noir de mon visage. Je voyais dans son regard insistant qu’il n’était pas satisfait de ma réponse.

« Oh, mais je ne parlais pas de cette faim. » Rétorqua-t-il en s’avançant brusquement. J’avais l’impression de sentir le sol trembler à chaque pas qu’il faisait vers moi. Je restai alors immobile, incapable de bouger à cause de la peur quand il vint passer un sabot autour de mon encolure, pour ensuite venir presser ses lèvres contre les miennes.

Je gardais les yeux écarquillés face à son regard d’un rouge intense. Ses lèvres étaient humides, mais aussi incroyablement chaudes, comme tout le reste de son corps. J’avais du mal à respirer et je sentais tout mon corps se tendre à l’approche d’une fatalité que je ne pouvais éviter. Je me mis alors à grogner quand je sentis ma nature de succube remonter en moi. Le pouvoir appelait le pouvoir.

« Fous le camp ! » Lâchais-je avant de lui envoyer mon sabot au visage.

L’étalon recula en titubant quand il reçut le coup en plein dans le museau. Il réussit à se rattraper avant de se mettre à ricaner, en levant une patte vers sa gueule en sang.

« Je ne sais pas pour toi, mais le goût du sang a souvent tendance à m’exciter. » Fit-il d’une voix langoureuse en léchant son sabot ainsi que son museau. J’étais étonnée de savoir qu’il pouvait saigner, mais je ne me faisais pas d’idée, cela ne signifiait en rien qu’il était mortel. Je restai silencieuse en l’observant alors qu’il se contentait de me sourire en terminant de se nettoyer. « J’ai toujours voulu me faire une succube… » Ricana-t-il avant de se retourner. « Famine a vraiment envie de te voir au restaurant et moi aussi d’ailleurs. T’as intérêt à venir dans la semaine, et crois moi, la seule excuse que tu pourrais avoir, c’est d’être morte… Et encore, je pourrais m’arranger avec Mort… »

Puis, sans rien ajouter, il reprit la route vers chez lui, fredonnant tranquillement en adoptant une démarche décontractée.

« Ce sont des menaces ?! » Éructais-je en sentant mon propre pouvoir me piquer les yeux. Mes lèvres étaient brûlantes, car la succube en moi voulait goûter à cet étalon, profiter encore de sa force et de son ardeur.

« Bien sûr Mi Amor Cadenza, pourquoi, ça te pose un problème ? » Demanda-t-il en tournant légèrement la tête pour m’adresser un regard en coin.

« Ok, c’était juste pour savoir… Bonne journée… » Répondis-je lascivement, sachant pertinemment que ce poney se fichait bien de nos lois.

« Bonne journée ma belle. »

Mes jambes se mirent à trembler, je n’arrivai pas à reprendre mon calme. Rien que la vue sur la croupe de cet étalon suffisait à me faire grogner entre deux expirations lourdes. Je n’avais pas faim, mais cet idiot avait réussi à réveiller mon pouvoir d’un simple baiser. Je me mis alors en marche, je n’avais aucune direction précise, je voulais juste m’éloigner de cette maison. Je gardais les yeux baissés, ne voulant pas être à nouveau tentée par le premier poney qui passerait trop près de moi.

J’essayais de garder mes distances avec tout le monde en respirant à grands coups. Je sentis l’énergie me serrer la gorge alors que je m’entendais pousser de petits ricanements. Je mis un sabot devant ma bouche et me mit à le mâchouiller instinctivement avant de me mettre à trotter dans les rues. Les gens ne devaient remarquer qu’une folle qui courrait dans tous les sens en riant. C’était certainement un moindre mal…

Je finis par croiser un étalon blanc à la crinière bleue et m’arrêtai alors brusquement lorsque nos regards se croisèrent. J’avais hésité à lui sauter dessus, mais me retint au dernier moment en sachant parfaitement ce que cela allait provoquer. Il me remarqua et je pouvais déjà voir dans ses yeux qu’il était inquiet. Je me plaquais alors contre le mur le plus proche pour éviter de tomber et me mis à secouer la tête en le voyant s’approcher de moi.

« Non, non, non. » Marmonnais-je en boucle sans davantage de conviction.

« Est-ce que tu vas bien ? » S’inquiéta-t-il en accélérant le pas.

« Non… non. » Continuais-je alors que je sentais une nouvelle vague brûlante se propager dans tout mon corps.

« Tu as besoin d’aide ? » Me demanda-t-il alors qu’il n’était plus qu’à un mètre.

« Ne me touche pas ! » Soufflais-je à la limite de l'inaudible, alors que tout mon être voulait lui hurler le contraire. Mais il fit exactement ce que la succube espérait et quand je posais mes yeux sur son sabot qui touchait simplement mon épaule, je fus aussitôt envahie par une nouvelle vague de chaleur qui se propagea dans tout mon corps. Plus violente, plus brûlante que les autres, cette dernière me fit battre le coeur à toute allure alors que j’étirais un large sourire. Je sentis mon pouvoir me submerger entièrement, m’empêchant de respirer et de voir. Tout ce dont j’étais capable, c’était de sentir mon corps bouger tout seul pour venir serrer le sabot de l’étalon en me mettant à expirer lentement.

« Marsh… Cadance, tu vas bien ?

-Parfaitement bien, maintenant que tu es là Cherba. » Dis-je d’une voix mielleuse en empoignant son encolure du sabot pour le tirer vers moi. À présent, je m’en fichais totalement de la foule, ce n’était plus comme si je pouvais faire quelque chose. Mon corps réagissait de lui-même à ses besoins, j’étais moi-même spectatrice.

Nos lèvres se rencontrèrent brusquement et j’ouvris aussitôt la bouche pour utiliser ma langue, mais le jeune changelin ne semblait pas vraiment savoir comment s’y prendre et garda ses lèvres scellées.

« Allons Cherba… » Marmonnais-je contre sa bouche. « Tu n’aimes plus me lécher les dents ? » Je me mis à glousser avant de retourner à l’attaque, attrapant sa lèvre inférieure avec mes dents en tirant légèrement.

« J-je serai puni si je fais ça… » Souffla-t-il pour ne pas être entendu par les gens qui faisaient semblant de ne pas nous voir. Les poneys qui s’embrassaient de cette manière en public n’étaient pas souvent très bien vus.

« Ça ne t’a pourtant pas dérangé la première fois. » Rétorquais-je en le serrant un peu plus contre moi, m’apprêtant à l’embrasser.

« C-c’est parce que tu ne savais pas qui j’étais, le plan aurait marché si tu ne m’avais pas démasqué… S-s-si Chrysalis et Chicha sont au courant, ils me tueront.

-Et alors ? Tu ne penses pas que ça en vaut le coup ? » Gloussais-je en pressant à nouveau mes lèvres contre les siennes. Je le sentis alors aussitôt se détendre. Mes mots, mon parfum, mon regard, mon contact, tout transpirait mon pouvoir, ma nature de succube qui voulait se nourrir et faire en sorte que mon partenaire ne dise pas non.

« S-s’il vous plaît… » Supplia-t-il en tentant vainement de se retirer, mais son propre corps ne voulait plus se défaire de moi.

Je me mis à rire davantage avant de continuer à l’embrasser, le sentant ouvrir sa bouche à son tour pour introduire sa langue. Je pouvais le sentir s’amuser à caresser mes dents, cela devait vraiment être son délire, mais après tout, la succube savait utiliser ce genre de fantasme à son avantage. Et c’est ainsi que sans même réfléchir ou considérer cela comme gênant, je me mis à parcourir toute sa mâchoire en faisant bien en sorte de passer ma langue sur ses dents.

Je le sentis aussitôt frémir à ce nouveau contact. Il s’avança davantage, me poussant légèrement pour m’embrasser avec une fougue renouvelée. Il n’avait plus du tout peur des représailles. Ma langue se piqua légèrement contre ses crocs qui avaient repris leur forme naturelle, ouvrant légèrement les yeux, je vis que son regard se faisait de plus en plus livide avant de passer à un bleu laiteux. Malgré tous les risques, les problèmes que ça allait provoquer s’il perdait son déguisement maintenant, je m’en fichais éperdument.

Il posa un sabot sur mon épaule bandée et remonta lentement sur mon encolure avant de venir caresser ma crinière.

« Aaaah ! On est joueur à ce que je vois ! » Lâchais-je en souriant, surprise de le voir me tirer la crinière aussi brusquement. Je m’y étais attendue quelque peu, bon nombre d’étalons timides s’étaient trouvé une virilité cachée lorsque j’étais avec eux.

« Reprends-toi tout de suite Cadance ! » Éructa Cherba d’une voix que je ne lui connaissais pas, et en effet, il s’agissait de celle de Chrysalis. Je regardais le pégase blanc à la crinière bleue et vis que ses yeux n’étaient plus vitreux et possédaient même des iris vertes ainsi que des pupilles fendues.

« Chrysti ? Je ne savais pas que tu pouvais faire ça, tu es venue regarder ? » Demandais-je en souriant. Je la sentis alors tirer plus fort sur ma crinière pour rapprocher nos deux visages. Son regard émeraude brillait d’une étrange intensité.

« Sale petite garce ! Rappelle toi qu’avec le lien, j’ai encore moyen de te calmer ! » Ses sabots se collèrent contre mon encolure alors qu’elle vint m’embrasser sans la moindre retenue. Chrysalis résistait encore moins bien que ses fils…

C’était toujours un pégase blanc qui était en face de moi, pourtant je pouvais ressentir une grosse différence dans sa technique. En effet je pouvais sentir sa langue s’enrouler autour de la mienne dans un geste expert. Il gardait les yeux ouverts, me permettant de déceler cette lueur émeraude qui ne me trompait pas sur la véritable personne que j’avais en face de moi. Ce n’était pas Cherba, mais bel et bien Chrysalis qui avait pris possession de son corps d’une manière ou d’une autre.

« Je t’assure que tu vas le regretter, petite chuka !

-Continue de me parler en changelin, j’adore ça ! » Raillais-je avant de sentir une étrange sensation remonter le long de ma gorge. Mon sourire se dissipa peu à peu quand je ne parvins plus à respirer. Je sentis mon pouvoir lutter pour sortir, tandis qu’une autre chose était en train de le retenir. Cela semblait être provoqué par notre baiser. Je voulus reculer, mais Chrysalis me retenait avec force contre elle. Je me mis à me débattre alors que je la sentais toujours m’embrasser, ainsi que cet étrange mélange magique me serrer la gorge. Je poussais sur mes poumons en espérant réussir à les vider de nouveau, mais quelque chose me bloquait la trachée. Je vis alors des taches noires danser devant mes yeux alors que ma vision commençait à se brouiller. Mes sabots se mirent à trembler alors que peu à peu, je fermais les yeux en m'évanouissant.

Mais à la dernière seconde, je sentis les lèvres de Chrysalis s’éloigner. Elle me retenait toujours avec ses sabots, mais je ne sentais plus la moindre trace d’énergie à son contact. Je tentai de résister d’une quelconque manière, maintenant mon équilibre, cherchant à réveiller mon pouvoir pour qu’il me protège, mais rien ne se passa. Je m’écroulai alors en avant en sentant les sabots du pégase blanc me rattraper.

« M-Marshall ! Vous allez bien ? » Je le reconnaissais au ton de sa voix et au peu d’assurance qu’il avait, Cherba était de retour. Instinctivement, je me mis à sourire en résistant du mieux que je pouvais pour ne pas perdre connaissance.

Le monde se mit à trembler de moins en moins autour de moi, ce qui était bon signe. Je restai tout contre lui, respirant son parfum, celui de la ruche. Habituellement, Chicha faisait en sorte de changer son odeur, mais pas lui, et c’était plutôt une bonne chose en ce moment.

« Dites-moi… S’il vous plaît Marshall, dites-moi ce qui ne va pas ! »

Je passais un sabot autour de son encolure pour m’aider à me tenir, et le sentit aussitôt se raidir, à mon avis, il n’avait pas apprécié ce que je lui avais fait. Et maintenant que j’avais récupéré tous mes esprits, je n’étais pas non plus très contente. J’étais autant victime de mon pouvoir que les poneys que j’utilisais pour me nourrir. L’Ardeur était difficile à ignorer, surtout quand elle provenait de moi.

« Désolée mon grand… » Soufflais-je à l’oreille du changelin en le serrant davantage. Je ne voulais pas le lâcher, mais je pouvais le sentir tendre chacun de ses muscles au fur et à mesure que je le serrais. « Je te promets que je ne te ferai plus le moindre mal ! »Jurais-je en collant mon front contre le sien.

« V-vous n’avez pas à me faire de promesse… » Répondit-il en restant immobile.

Je reculai légèrement en souriant. Ce changelin était décidément trop innocent et dévoué à sa matriarche pour accepter la moindre faveur de ma part.

« Si… Je… Ce qui vient de se passer n’était pas intentionnel de ma part… Disons que je me suis laissée emporter à cause de ma part succube et… Et je me sens véritablement coupable de ce qui vient de se passer. »

Le changelin s’inclina aussitôt en baissant la tête avant de rétorquer :

« J-je suis désolé que vous vous sentiez coupable par ma faute ! Veuillez m’excuser sincèrement ! »

Je le relevai rapidement en l’attrapant par la peau du cou avant de rire légèrement en secouant la tête. Je l’embrassai ensuite sur la joue en ignorant toujours les gens qui nous observaient.

« Espèce d’idiot, je ne veux plus t’entendre t’excuser face à moi, c’est compris ?

-D-d’accord Marshall…

-Et je t’ai déjà dit de m’appeler Cadance ! » Réprimandai-je en gloussant, plaquant mon encolure contre la sienne. Après quelques secondes, je finis par le lâcher en me sentant mieux. Chrysalis avait réussi à retenir l’Ardeur grâce au pouvoir de la ruche certainement, mais je me demandais encore comment il avait été provoqué. Bien entendu, la question ne se posait pas, Guerre était le responsable, mais comment est-ce qu’il avait réussi cela ? Je m’étais nourrie plus que de raison cette semaine…

Je me saisis légèrement en sentant Cherba marcher tout contre moi. Même si c’était pour mieux jouer le petit copain, cela avait de quoi m’étonner dû à sa timidité. Mais en le regardant, il n’avait pas l’air plus enclin à vouloir se rapprocher de moi, j’en déduisis donc qu’il s’agissait de moi. Pourquoi avais-je autant besoin de me sentir en contact avec eux ? Et puis qu’est-ce que j’avais pu dire à Cherba ? C’était comme si je me refusais à lui faire de la peine alors que ce n’était qu’un changelin parmi tant d’autres… Carmen avait raison, ma relation avec les changelins devenait de plus en plus étrange.

« Chrysalis nous demande de nous rendre au Tasty Treat, elle doit te voir. » Me dit Cherba, la tête baissée. « Et… Elle veut te voir tout de suite…

-Pas de problème mon grand, j’ai du temps avant mon prochain rendez-vous. » En réalité, Guerre m’avait donné beaucoup de temps avant mon prochain rendez-vous, alors ça valait bien la peine de le perdre en face de Chrysalis. J’avais beau apprécier le contact avec les changelins, Chrysalis représentait toujours un défi pour moi, heureusement, je pouvais me réconforter en sachant que j’y retrouverai certainement Chicha.

Le Tasty Treat était un petit restaurant qui avait rapidement réussi à se faire une clientèle régulière. Chicha m’y avait invité plusieurs fois. Personnellement, je n’étais pas une grande fan de ce restaurant, mais je devais avouer qu’il faisait le meilleur gratin au curry de la ville. En fait, c’était surtout le look propre à Saddle Arabia qui me dérangeait, je trouvais qu’il en faisait toujours de trop.

Il se situait dans la rue des sabots gourmands, là où se trouvaient la plupart des restaurants de la capitale. Autrement dit, un endroit fréquenté par beaucoup de monde. Ce n’était pas plus mal, la plupart des créatures surnaturelles qui n’étaient pas très puissantes aimaient bien être en contact avec la foule. Cela leur donnait un lieu où ils pouvaient se fondre dans la masse et subvenir à leur besoin en toute discrétion.

Cherba me guida rapidement au restaurant voulu sans dire le moindre mot, peut-être était-il choqué de ce que je lui avais fait. Je ne pouvais pas lui en vouloir, bien au contraire, je le comprenais parfaitement et je me sentais incroyablement coupable.

« Chrysalis nous demande d’attendre un peu ici… » M’annonça-t-il en s’arrêtant au coin d’une rue. Nous n’étions plus qu’à deux pâtés de maisons du Tasty Tread, je pouvais même déjà voir l’enseigne de là où je me trouvais.

« Pourquoi ça ?

-E-elle dit qu’elle ne veut pas que tu la déranges maintenant… » Il baissa alors les yeux en gémissant légèrement quand il vit le regard que je lui adressai. « Elle sera en colère si tu lui désobéis… » Dit-il pour me convaincre, mais cela était bien peu suffisant.

« Elle ne s’en prendra pas à toi Cherba. » Répondis-je en roulant des yeux avant de lui tapoter le crâne et de me diriger vers le restaurant.

Je me demandais comment j’allais retrouver Chrysalis au beau milieu de ce restaurant qui accueillait certainement autant de poneys que de créatures surnaturelles. Bien entendu, la reine des changelines savait toujours soigner son apparence, la faisant toujours se démarquer du reste de la foule. Au final, c’était peut-être la moins discrète de tous les changelins.

Une grande licorne noire était installée sur une chaise en terrasse. Sa longue crinière bleu vert était toujours dressée en un chignon strict, qui laissait pourtant glisser deux trois mèches de crin le long de son visage et de son encolure. Elle portait aussi une petite paire de lunettes verte, certainement pour masquer ses yeux aux pupilles fendus. C’était étrange de se dire que Chrysalis n’arrivait pas à masquer ce détail. Bien entendu, elle ne pouvait pas s’empêcher de sortir en portant encore une tenue différente, chaque fois que je la voyais elle en avait une nouvelle. Celle-ci était bien voyante : une robe d’un rouge vif, tellement grande qu’elle traînait au sol. Il y avait des motifs de fleurs de lotus un peu partout dessus, ceux-ci étaient brodés avec du fil doré. Je me mis à secouer la tête en constatant qu’elle devait toujours en faire de trop, puis je montrai davantage mon agacement quand je vis qu’à côté d’elle, un narguilé était allumé pour son usage personnel. Je détestais discuter avec Chrysalis quand elle avait l’un de ses fichus appareils avec elle. C’était un coup à se faire refiler un cancer et j’étais certaine que Pestilence serait la première à en profiter.

« Salut Chrysti… » Fis-je lascivement en m’asseyant sur la chaise qui était juste à sa gauche. Je n’allais pas attendre qu’elle m’invite à sa table, elle voulait me voir, eh bien j’étais là !

Elle se contenta pourtant de m’ignorer, le regard dirigé vers la rue où circulaient bon nombre de poneys, tirant sur la pipe de son stupide narguilé.

« Et… merci d’être intervenue quand j’étais seule avec Cherba… » Je sentis mes oreilles se coucher alors que je me renfrognai davantage sur ma chaise. Je détestais la remercier, j’avais l’impression que je lui donnais davantage d’emprise sur moi. Et c’était peut-être ainsi qu’elle le percevait, car elle tourna aussitôt toute son attention sur moi en expirant la fumée juste avant de me sourire.

« Tu n’as pas oublié la politesse ? C’est parfait. » Me dit-elle avant de glousser. « Mais ne nous éternisons pas sur cette histoire, tu aimes mon restaurant ?

-TON restaurant ? » Demandais-je en penchant la tête sur le côté.

« Bien sûr, ce n’est pas en récoltant de l’amour que j’arrive à faire fortune, mais je ne te cache pas qu’une armée de changelin, ça aide beaucoup dans le domaine des finances. » Gloussa-t-elle en tirant rapidement sur sa pipe. « Je vois que tu aimes ma tenue à la manière dont tu baves en regardant ma robe. »

Je secouais la tête en me demandant si je venais de penser ça tout haut et au vu du regard qu’elle m’adressa, je compris aussitôt que c’était bien le cas, je lui adressais alors un air tout à fait menaçant pour bien lui faire comprendre que je n’allais pas jouer à ce petit jeu.

« Du calme, ma chérie, je trouvais cela juste flatteur. Tu veux quelque chose à manger ? Gâteau, fruit, fromage, UN AUTRE DE MES FILS !? » Éructa-t-elle avant de se mettre à rire. J’en étais certaine, même si elle m’avait dit de ne pas m’étendre sur la discussion, elle n’allait pas s’empêcher de me le ressortir à chaque occasion.

« Je ne pourrais pas avoir du poulet à la place ? » Demandais-je en gémissant légèrement pour essayer de l’apitoyer.

« Tu as un véritable problème avec le poulet ma chérie. Désolée, mais ils ne servent pas de viande ici, et de toute façon, c’est mauvais d’en consommer de trop.

-Pourquoi, tu crois ces rumeurs qui disent que ça finit par rendre les poneys fous ?

-Non, c’est juste que ça a tendance à te descendre directement sur les flancs. » Son regard glissa légèrement sur ma croupe et me fit comprendre qu’elle était sérieuse.

« Ça, ça ne regarde que moi et mes flancs ! » Rétorquais-je vexée. « E-et puis c’est facile de dire ça quand on peut changer de forme comme on veut pour avoir l’air à chaque fois super sexy ! » Je regrettai aussitôt ce que je venais de dire quand je vis le sourire ravi de Chrysalis. Merde, maintenant elle savait qu’elle me plaisait.

Je laissais alors mon regard vagabonder ailleurs tandis que j’essayais de diminuer le rouge qui me montait aux joues. Je pouvais voir que l’intérieur du restaurant était presque plein, et pratiquement que par de jeunes couples. Je fronçais légèrement les sourcils en observant la plupart d’entre eux. C’était toujours de très jolies juments qui semblaient boire les paroles des étalons qu’elles avaient en face d’elle, sans compter celles qui s’amusaient à leur donner de léger coup de sabot sous la table.

« C’est le meilleur endroit pour récolter de l’amour, une jolie jument qui vient vous accoster, le courant passe tout de suite, elle lui demande s’il n’a pas faim, elle lui propose ce petit restaurant à l’allure tout à fait pittoresque, et ainsi je fais d’une pierre deux coups. De l’amour, et une boutique qui marche. » Elle tira à nouveau sur son narguilé en souriant, certainement satisfaite de son plan génial. Je devais avouer que ça semblait un plan gagnant sur tous les points, excepté un seul.

« Dis-moi, combien de temps dure cette relation ? J’imagine que tu ne veux pas la faire durer trop longtemps pour éviter que la victime s’attache de trop, mais si tout cela ne se faisait qu’en une journée, est-ce que les poneys ne finiraient pas par ne plus du tout venir en comprenant l’entourloupe. »

Chrysalis haussa les épaules en hochant la tête et en expirant la fumée au-dessus d’elle.

« Je ne te cache pas que je suis plutôt vieux jeu en amour. Et l’idée que ces étalons puissent être charmés, tomber amoureux et oublier mes fils en l’espace d’une journée... » Elle laissa un grondement sourd naître au fond de sa gorge avant de se reprendre. « Mais après tout, c’est ce qui semble marcher le mieux, mais je ne néglige pas qu’une relation longue puisse exister. Et dans ce cas-là, j’encourage mon enfant à poursuivre quelque temps jusqu’à ce qu’il sente le moment où il pourra partir sans faire trop de mal au poney.

-Trop de mal ?

-Certains poneys font la bêtise de trop s’attacher à mes fils, mais malheureusement, ce n’est pas quelque chose de bien vu et de sans danger, c’est pourquoi je limite les relations à un an maximum. Le but étant de faire en sorte que le poney supporte la séparation, et si possible qu’il passe rapidement à autre chose. Pour cela, on l’aide encore en envoyant un autre changelin, mais cette fois-ci sans aucun but de récolter de l’amour. Un simple support. »

Je gardais la tête penchée, essayant de déceler dans le regard de la reine changeline derrière ses lunettes, le moment où elle avait décidé de se foutre de moi.

« C’est très sérieux ma chérie. » Rétorqua-t-elle aussitôt, ce qui me fit froncer les sourcils. « J’ai beaucoup de respect pour les poneys qui croient à la valeur de l’amour. Et cela me désolerait énormément s’il venait à perdre sa foi à cause de l’un de mes enfants. Ils m’ont offert leur amour, c’est la moindre des choses que de leur montrer notre respect.

-Tu me dis ça comme si les changelins n’avaient jamais été accusés d’abus ou de violence. »

Je vis Chrysalis rouler des yeux en faisant claquer sa langue avant d’extirper la fumer en formant des ronds.

« Si je devais uniquement m’inspirer du passé pour avancer, j’arracherais encore le coeur des poneys après avoir couché avec comme le faisait ma mère. »

Je déglutis, légèrement dégoutée par cette image.

« Ma mère adorait le dévorer en face d’eux, elle disait que ça lui donnait l’amour des ancêtres de sa victime.

-C’est bon, j’ai compris ! » Fis-je en frappant sur la table et en baissant la tête, sentant une légère nausée remonter.

« Ah ah ah, je n’ai jamais le temps de m’ennuyer avec toi ma chérie.

-Et les vrais amoureux ? » Demandais-je en reprenant mon sang-froid. « Il doit bien y avoir des poneys qui considèrent leur amour comme tellement grand qu’il est impossible de les séparer… Est-ce qu’il y a déjà eu des changelins qui se sont fait démasquer ? » Cette question, qui n’avait aucun rapport avec la première venait de me frapper étrangement, comme si elle venait simplement compléter un scénario logique.

« Sois plus discrète, Cadance ! » Je savais que quand Chrysalis utilisait mon nom, c’était qu’elle était très sérieuse. Je regardai autour de moi, mais ne vis aucun autre client à la terrasse, néanmoins, un peu plus de prudence n’était jamais de trop. « C’est très rare qu’un poney ne puisse plus se passer de l’un de mes enfants… et disons que c’est en général à cause de ces derniers si ce scénario arrive. C’est justement à ce moment qu’on laisse tomber le masque, et s’il accepte la chose qu’il a en face de lui… Eh bien j’organise une entrevue entre eux et moi et procède à une union qu’ils ne pourront briser.

-Aussi simplement que ça ?

-C’est plus facile à dire qu’à faire. » Rétorqua-t-elle sèchement en crachant sa fumée. « Ce n’est pas vraiment ainsi que la plupart des poneys envisagent leur relation. Surtout quand il sait que son épouse sert une matriarche et qu’elle récolte de l’amour pour elle.

-Il arrive que des poneys refusent ? »

Chrysalis se mit à glousser d’une voix profonde avant de rejeter lentement la tête en arrière en m’observant du coin de l’oeil.

« Jamais.

-Pourtant tu as dit « et s’il accepte » donc, c’est que c’est déjà arrivé. Tu parles aussi d’union qu’ils ne pourront briser, ne me fais pas croire qu’il n’y en a jamais eu un pour se lasser ! » Dis-je en frappant légèrement sur la table avec mes sabots.

Chrysalis se pencha légèrement sur moi avant de prendre mes pattes entre les siennes et de les lever entre nous.

« Cadance, il y a des choses qui ne s’expliquent pas, et l’amour véritable en fait partie. Jamais aucun poney n’a regretté son choix de rejoindre ma famille. Et aucun n’a encore réussi à se lasser de l’un de mes enfants, je veux dire… ce sont des changelins, tu sais toi-même à quel point nous sommes une source d’imagination et de fantasme. »

J’écartai mes sabots en secouant la tête. Chrysalis me mentait certainement, je ne croyais absolument pas à ses histoires d’amour sans faille quand celles-ci venaient d’une reine changeline.

« Voilà ton plat qui arrive. » M’avertit-elle en se reculant. Je tournai la tête vers l’entrée du restaurant et vit une licorne plus large que la moyenne apporter un plateau de fromages ainsi qu’une grappe de raisin et du pain.

« Et voici pour la demoiselle ! » Annonça-t-il en passant un sabot dans sa crinière bouclée avant de poser le plat à notre table ainsi que deux jus de fruits. Il se tourna ensuite vers Chrysalis en s’inclinant légèrement avant de lui dire de son étrange accent. « J’espère que vous ne manquez de rien, madame Chrysti. Prévenez-moi s’il faut recharger votre narguilé.

-ça ira Coriander Cumin, vous l’avez assez bien chargé je dois dire. » Répondit-elle en expirant une large quantité de fumée tout en riant.

« C’est du tabac qui vient directement de Saddle Arabia, y a pas mieux dans tout l’Equestria ! » S'exclama-t-il en agitant les sabots.

« Hmmm, prévenez-moi la prochaine fois que vous irez y faire un tour dans ce cas, j’aurais bien besoin d’en faire quelque stock. »

Le poney semblait honoré par sa demande et c’est presque en lui chantant ses grâces qu’il retourna à l’intérieur de son commerce. Chrysalis se mit à me sourire en voyant mon air consterné.

« Oui, il est au courant que je suis reine. » Dit-elle en devinant la question que j’avais sur les lèvres. « Eh oui, ce lèche sabot est ainsi avec moi uniquement parce que je suis la propriétaire de son restaurant. Avoue qu’il est tout de même amusant, c’est toujours drôle de voir que les poneys sont prêts à faire n’importe quoi pour de l’argent.

-Dit celle qui me court après depuis deux jours. Et TOC ! » Rétorquais-je d’une voix grinçante.

« AH touché ! » Chrysalis se mit ensuite à rire avant de tirer à nouveau sur son narguilé. Je voulais lui demander où se trouvait Little Star, mais un autre invité intervint avant que je n’eus le temps de poser ma question. « Te voilà enfin Cherba ! » Annonça-t-elle en lui offrant un regard que je n’aurais pas décrit comme bienveillant.

« E-excusez-moi, il m’a fallu du temps pour trouver un endroit tranquille pour me changer… » En effet le changelin ne portait plus le même déguisement… Enfin, il l’avait juste modifié en prenant l'apparence d’une jument… Déjà qu’il était timide, il avait aussi un gros problème d’imagination.

« Très bien, tu vas pouvoir aller à ton entrainement, mais avant ça, j’aimerais savoir… » Elle fit briller sa corne et je me tendis aussitôt en me préparant à n’importe quoi de sa part. Mais tout ce qu’elle fit, ce fut de faire léviter un raisin jusqu’à sa bouche. Elle m’observait du coin de l’oeil, comme si elle s’attendait à ce que je réagisse à son geste. « Cadance ? » Sa voix n’indiquait rien d’autre que de l’interrogation. La tête penchée, elle continuait de me scruter, cherchant certainement un moyen de jouer avec moi. « J’imagine que Cherba a dû être un poids pour toi, mais dis moi, pourquoi lui as-tu demandé de prendre l’apparence que Chicha utilise ? »

Je me mis à froncer les sourcils, pendant que mon regard faisait la navette entre le changelin qui gardait la tête basse, et sa matriarche qui tirait sur sa pipe. Qu’est-ce qu’elle voulait m’entendre dire ? La vérité ou bien que je m’enfonce davantage dans mon mensonge ?

« Disons qu’il a voulu bien faire en prenant cette apparence… » Répondis-je en secouant la tête. J’entendis le changelin gémir légèrement alors que Chrysalis reportait son regard sur lui. « Mais il n’a absolument rien fait de mal ! » Intervins-je pour le défendre. « J’ai demandé de l’aide, et c’est lui qui a répondu à mon appel.

-Penses-tu que j’aurais dû la laisser faire ce qu’elle veut de toi ? » Demanda alors Chrysalis en m’ignorant totalement.

« J-je ne sais pas. » Dit Cherba en gardant le regard rivé au sol.

« Moi si ! » Rétorqua-t-elle sèchement. Je pouvais déjà sentir son pouvoir comme un léger courant d’air chaud. « Je l’aurais bien laissée faire en t’observant tout en riant de ta détresse ! C’est uniquement parce que tu mettais ma famille en danger si tu te laissais démasquer ! »

J’entendais toujours Cherba gémir en tremblant alors que Chrysalis laissait son pouvoir couler de son corps pour se répandre le long du corps de ce dernier. Je n’aimerais pas être la cible de cette sensation désagréable que je pouvais déjà en partie percevoir dû à ma proximité.

« Il n’a rien fait de mal. » Intervins-je en me montrant plus présente que la première fois.

« Je t’en prie Cadance, je sais très bien que tu me mens et par sa faute, il a mis la ruche en danger en désobéissant ! » En tentant d’être la plus discrète possible.

« Ça aurait été la même chose avec n’importe qui d’autre ! » Objectais-je en sifflant moi-même entre mes dents.

« Pas avec Chicha ! » Répliqua-t-elle en se penchant sur moi. J’en fis de même en la fusillant du regard de la même manière qu’elle le faisait à mon égard.

« Oh que siii ! Il n’a jamais réussi à tenir plus de dix minutes avec moi !

-Peut-être, mais ça ne m’empêchera pas de le punir !

-Hors de question !

-Ce n’est pas toi qui vas me dire comment j’éduque mes enfants ! »

Nous restâmes plusieurs instants ainsi, museau à museau, observant le blanc de nos yeux. Je n’allais pas lâcher l’affaire, et la reine des changelins non plus. Cherba avait fait une erreur, c’était certain, mais moi aussi. Je n’allais pas lui en vouloir parce qu’il avait voulu jouir d’une meilleure place dans la ruche, et cela me donnait une bonne idée pour contrer Chrysalis.

« Non, mais tu ne toucheras pas à mon compagnon !

-Je te demande pardon ?! » La changeline n’était pas la première étonnée, Cherba était bon deuxième, mais c’était bien moi, celle qui était la plus choquée par ce que je venais de dire.

« T-t’as bien entendu, ne me fais pas répéter !

-Oh si ! J’ai besoin de l’entendre à nouveau pour être certaine.

-S’il te plait Chrysalis. » Fis-je en secouant légèrement la tête, en haussant les épaules.

« Cadance !

-C’est bon, c’est bon ! Cherba est mon compagnon ! » Je gardais la tête baissée tout comme le changelin qui était le sujet de conversation. Chrysalis, elle, se replaçait tranquillement sur sa chaise en soupirant. Elle arborait un léger sourire pincé que je n’arrivais pas à déchiffrer. Certainement qu’elle se demandait ce qu’elle allait faire de Cherba… ou de moi.

« Tu es consciente que je n’accepterai pas des mots en l’air ? Que si tu me mens, Cherba risque bien plus que sa punition initiale ? »

J’étais tentée de demander en quoi consistait sa punition initiale pour savoir s’il ne valait pas mieux me rétracter, mais je pouvais bien faire confiance à Chrysalis pour être certaine que ça n’allait pas plaire à Cherba… ni à moi.

« Et je l’accepte. Mais tu me promets qu’il ne risquera plus rien de toi ou d’un autre de ses frères ?

-Et toi tu me promets que tu ne le mettras pas de côté, que tu le considéreras vraiment comme un compagnon !?

-Euhm… Attends, n’oublie pas que j’ai déjà Chicha… et j’ai aussi fait un marché avec Little Star qui n’est pas prête de me lâcher… Je ne peux pas l’avoir tout le temps avec moi.

-Très bien, quatre jours par semaine dans ce cas.

-Quoi ?! Même Chicha et moi ne nous voyons pas aussi souvent.

-Bon alors tu me promets que tu feras en sorte de le voir au moins le mardi et vendredi ? »

Cherba releva brusquement la tête pour intervenir : « Mais, je ne peux pas, vendredi, j’ai…

-La ferme !

-La ferme ! » Ordonnâmes Chrysalis et moi-même.

« Bon écoute, je ne te promets pas qu’il sera tous les jours collés à mes sabots, mais je saurai passer du temps avec lui et je te l’assure, alors, entendu ?! » Je tendis mon sabot à la changeline qui porta son regard au ciel pour se mettre à réfléchir, tapotant le bout de ses lèvres avec la pipe de son narguilé. « Chrysti !

-C’est bon, c’est bon ! » Fit-elle en me serrant le sabot à son tour avant de soupirer. Moi même je me sentais un peu épuisée après cette séance de marchandage. Je n’étais pas encore consciente dans quoi je m’étais embarquée, mais après tout, ce n’était qu’un bordel de plus dans ma vie, ce n’était pas comme si j’avais déjà une quinzaine de changelin chez moi. Je portai mon regard sur le changelin qui avait les yeux rivés sur moi désormais. Est-ce qu’il était d’accord avec cette décision ? Est-ce que je ne m’étais pas mêlée d’affaires qui ne me regardaient pas ? Je me mis à avoir peur tout à coup, mais cela fut bien vite oublié quand Cherba se dressa sur ses pattes postérieures pour venir se serrer contre moi. Il ne disait rien, mais je n’avais pas besoin de ses mots pour savoir à quel point il était reconnaissant pour ce que je venais de faire. Son corps tremblait encore, mais il se détendit légèrement quand je lui rendis son étreinte avant de lui souffler : « De rien ». C’était peut-être un peu étrange de lui dire cela sous son apparence de jument au faux air de Shining, mais ce n’était définitivement pas la chose la plus bizarre que j’avais pu faire ces derniers temps.

Une fois qu’il s’écarta, je pris enfin le temps de souffler et me sentis incroyablement soulagée, j’en profitai pour prendre un morceau des fromages qui étaient sur la table.

Cherba se dirigea ensuite vers sa mère et attendit silencieusement que celle-ci se penche sur lui pour tendre son cou et venir la lécher discrètement le long de la ligne de sa mâchoire. Elle vint ensuite lui embrasser le front en souriant, avant de lui dire : « Vas à ton entraînement maintenant ! » Le changelin s’en alla alors sans rien ajouter.

« Qu’ech que ch’était que cha ? » Demandais-je la bouche pleine en prenant un air dur, ce qui ne devait pas marcher avec mes joues à moitié gonflées.

« Ça ? Oh, c’est juste un geste que mes enfants ont l’habitude de faire, ça veut dire beaucoup de chose : Pardon, protège-moi, je t’aime, est-ce que j’ai le droit ? Le langage des changelins est aussi très tactile et gestuel, mais ça, Chicha te l’a sûrement fait comprendre depuis longtemps.

-D’accord, mais pourquoi est-ce que tu sembles si joyeuse après la dispute qu’on vient d’avoir ? »

Chrysalis se mit alors à sourire davantage, ce qui me fit serrer les dents. J’en étais sûre ! je venais encore de tomber dans l’une de ses magouilles, et ça, il ne fallait en vouloir qu’à elle. Je frappai violemment sur la table en repoussant ma chaise.

« Ne me dis pas que tu as fait tout ça pour que je l’accepte en tant que compagnon ?!

-Tu ne trouves pas ça incroyable la manière dont tu souhaites tout à coup protéger des changelins ? De leur propre mère qui plus est !?

-T’es pas une mère, t’es juste une salope qui fume et qui a de l’argent avec des ovaires plus gros que le type qui sert dans ce restaurant ! »

Chrysalis était déjà en train de rire que mes insultes ne semblaient même pas l’affecter, elle secoua ensuite la tête avant de reprendre son sérieux.

« Calme-toi ma chérie, si j’ai fait cela, c’est pour ton bien.

-Là, j’avoue que c’est bien ce qu’une mère dirait quand elle essaye de refourguer son gosse à une autre jument.

-La crise que tu as eue en quittant la maison des quatre… » Elle prit son verre dans les sabots pour en boire une gorgée avant de reprendre. « Tu te doutes que c’est Guerre qui a provoqué cela.

-Oui, et je ne vois pas le rapport entre lui et Cherba.

-S’il a réussi à faire cela, c’est uniquement parce que ton pouvoir a faim. »

Je penchais la tête sur le côté en essayant de comprendre où elle voulait en venir. Au même moment, je pris un autre morceau de fromage. Ce n’était pas ma faute si je n’avais encore rien mangé de la journée. Chrysalis connaissait très bien mon travers et avait toujours réussi à en profiter. En général, je ne parlais pas quand je mangeais.

« Mais Che me Chui nourri plujieur fois chette chemaine ! » En général avais-je bien dit.

« Oui, tout juste de quoi calmer ton pouvoir. » Répondit-elle en hochant la tête. « Depuis tout ce temps, tu n’as jamais cherché à réellement comprendre ta nature…

-J’ai jamais demandé à devenir ce que je suis, et je considère plus ça comme un boulet, même si c’est pratique par moment.

-Tu ne peux ignorer ta nature, ma chérie. Ignorer tes besoins n’est pas une solution.

-Mais je me nourris ! Je me sers de Chicha et Little Star au moins une fois par semaine chacun, quand ce n’est pas plus ! C’est suffisant, je ne ressens plus aucune urgence, ni d’envie.

-Peut-être, mais ton pouvoir reste encore très susceptible, et dès l’instant où une créature cherche à s’en servir contre toi, elle aura le dessus.

-Je ne sais pas ce que Guerre cherchait à faire, il est pourtant venu de lui même pour m’aider.

-Ces personnes ne sont pas fiables, tu le sais bien. Tout est une occasion pour se divertir, briser la monotonie de l’éternité. Pour eux, il n’y a pas de gagnant ni de perdant, il ne restera rien à part eux. Ne cherche pas à comprendre ses raisons, cherche plutôt un moyen pour te défendre.

-Et c’est pour ça que tu me colles un autre de tes fils ? Pour avoir encore plus de contrôle sur moi ?

-Je l’aurais réellement tué, tu sais. » Me dit-elle sur un ton glacial en laissant la fumée de son narguilé glisser hors de sa bouche. « J’ai préféré le rendre utile pour m’épargner cette peine.

-Oh, merci Chrysalis la sainte ! » Raillais-je en secouant la tête. « Et moi, t’y as réfléchi deux secondes seulement ?

-Je te rappelle que c’est toi qui as proposé cette solution. Au départ, je voulais uniquement te faire comprendre que tu n’avais aucun pouvoir sur ma ruche, mais… » Elle se pinça les lèvres avant de tiquer nerveusement de la langue en grognant entre ses dents.

« Qu’est-ce qu’il y a ? » Demandais-je en haussant les épaules. Un léger sourire s’étira sur mes lèvres en comprenant ce qu’elle voulait dire… ou du moins, ce qu’elle ne voulait certainement pas dire. « J’ai du pouvoir sur ta ruche, c’est bien ça ? Au fond, tu cherchais à me dissuader d’utiliser tes changelins à ma guise, mais tu sais que ça me fait plaisir. » Je me mis à rire avant de la pointer du sabot. « J’espère que tu apprécies notre lien ma grande, parce que cette situation, c’est toi qui l’as provoquée ! »

Chrysalis se mit à me sourire à son tour, sous cette forme, elle n’avait pas ses impressionnants crocs ce qui lui donnait un air bien moins menaçant, mais tout se jouait dans son regard, caché derrière ses lunettes, et je savais qu’elle n’était pas sans danger.

« Je t’aime Cadance, et c’est bien à cause de ça que tu as du pouvoir sur moi. Je pourrais tuer Chicha ainsi que Cherba, prendre ce qui me revient de droit, mais je n’en fais rien, parce que je sais que cela te ferait de la peine. Alors oui, cette situation n’est pas agréable pour moi comme pour toi, mais si seulement… » Elle posa ses coudes sur la table en serrant les dents pour ne pas se mettre à exploser. « Si seulement tu arrivais à prendre conscience de ce que je veux t’offrir, de ce que ça t’apporterait. Si seulement tu acceptais ce lien, alors tu verrais que l’on se porterait tous tellement mieux ! » Elle me fusillait encore avec un regard qui ne se voulait en rien amical, j’avais même l’impression qu’elle était sur le point de pleurer.

Je ne pouvais pas accepter. Chrysalis était un danger, et même si elle pouvait me faire un emballage avec un joli ruban doré, je savais qu’à l’intérieur, rien n’allait vraiment me plaire. Je serais l’instrument d’une matriarche, une reine changelin qui cherchait juste à accumuler de la puissance pour je ne sais quoi faire avec.

« Chrysalis…

-De quoi !? » Répondit-elle sèchement, s’attendant certainement que je ne la contredise une nouvelle fois.

« Devoir éliminer Chicha et Cherba… ce n’est pas quelque chose que tu peux faire comme ça, tout de même ? Je veux dire… tuer ses propres enfants… »

Chrysalis me fixa un long moment derrière ses lunettes vertes qu’elle retira pour me dire :

« Je suis une reine changeline, Cadance… »

Chrysalis replia alors ses lunettes sur la table avant de se lever de sa chaise. Elle ne semblait pas en colère, mais je pouvais tout de même l’entendre soupirer alors qu’elle se rapprochait de moi pour me chuchoter.

« Cherba a bien transmis ton message quant à l’apparence de Chicha, j’aurais dû y penser moi-même je dois dire… c’est pourquoi j’ai décidé de rajouter deux trois petites choses. Enfin, je te laisse admirer le résultat, j’ai un petit détail à régler. » Puis, la changeline se dirigea jusqu’à l’entrée du Tasty Treat. Elle s’arrêta juste devant pour discuter avec un pégase blanc à la crinière bleue, c’était certainement Chicha. Elle n’avait pas l’airparticulièrement ravi, est-ce qu’elle lui en voulait à lui aussi, où était-ce la marché que j’avais fait avec elle ?

Je vis alors l’étalon planter son regard bleu dans le mien. Il ne me souriait pas, alors que moi, je devais avoir l’air d’une cruche qui n’arrivait pas à rester stoïque en le regardant venir. Mais mon enthousiasme disparut rapidement lorsque je vis son accoutrement. Figée avec un léger sourire, je ne bougeai pas d’un poil lorsqu’il se pencha sur moi pour venir m’embrasser. Je ne sentis même pas ses lèvres contre les miennes, à vrai dire, même la succube devait se demander ce qu’elle avait en face d’elle.

Chicha dut sentir mon incompréhension, car il fit des tours sur lui-même en m’expliquant : « Désolé Cadance, mais tu sais, une fois que tu donnes des ordres à Chrysalis, elle a souvent tendance à vouloir en rajouter une couche juste pour avoir le dernier mot. »

Je n’arrivai pas à emmagasiner les informations qu’il me transmettait, me contentant de l’observer alors qu’il continuait de tourner. Au départ, il n’y avait rien de grave, un anneau à l’oreille gauche, de l’argent, ça c’était très joli. Je devais même remercier Chrysalis pour avoir fait graver ma marque de beauté sur ce dernier. Ça devait couter une fortune, mais au moins, j’étais certaine qu’aucun autre changelin ne ferait l’erreur de prendre l’apparence de Chicha. Après… les choses commençaient à se corser. L’anneau retenait une longue et fine chaîne en argent qui pendait le long de son corps jusqu’à un autre anneau beaucoup plus large qui entourait tout le haut de la patte arrière gauche du changelin. Ce bracelet en argent ne devait déjà pas être agréable à porter, mais quand celui-ci reliait votre patte arrière à votre oreille, cela devait certainement être douloureux. Pour conclure le tout, un autre anneau était placé à la base de sa queue, la retenant bien dressée et serrée, laissant sa croupe un peu plus en évidence.

« Un anneau, c’est tout ce que je demandais… Un truc discret, c’est votre spécialité, ça, non ? » Demandais-je en soupirant, regrettant cette simple chose que j’avais demandé. Je ne savais pas si je préférais encore me faire harceler par ses frères plutôt que de le voir ainsi.

Le changelin se mit à rire légèrement avant de s’installer à la chaise de Chrysalis en la rapprochant de moi. Il entoura ma taille d’une de ses pattes en se penchant sur moi pour venir m’embrasser. Je ne pouvais pas être en colère contre lui, ce n’était pas sa faute de toute façon, mais je ne pouvais m’empêcher d’être tout de même sur les nerfs.

« Calme-toi, tu verras, tu vas vite t’y faire. » Fit-il en grognant légèrement, il venait sans doute de sentir mes émotions.

« Qu’est-ce que t’en sais ? Non, mais t’as vu la dégaine que tu te payes ? C-c’est moche, t’es plus sortable… Si j’étais toi, j’aurais même honte ! » Dis-je en secouant la tête, m’écartant légèrement.

« Mais qui t’a dit que cette tenue était faite pour sortir ? »

Je me mis à froncer les sourcils avant de regarder à nouveau ses anneaux et sa chaîne. J’approchais ensuite mon sabot pour tirer légèrement sur cette dernière, et le vis faire une légère grimace en plaquant son oreille sur son crâne. Je me mis à sourire en comprenant ce qu’il avait voulu dire… ce n’était pas si mal après tout.

« En plus Chrysalis a dit que c’était assorti avec ta tenue de bondage. »

Je tirai violemment sur sa chaîne pour ramener son visage contre le mien avant de lui grogner dessus.

« Je t’interdis de dire ce que je fais avec toi à Chrysalis !

-Pas devant tout le monde, Marshall ! » Gémit Chicha d’une voix suave en souriant.

Je le repoussais en grommelant avant de reporter mon attention sur mon plat de fromage. Ça, c’était un incroyable avantage sur moi, si Chrysalis était au courant de toutes mes… dérives, j’étais mal.

« Pourquoi fais-tu la tête à ce point ? En quoi c’est si grave que Chrysalis sache ça ?

-Parce que depuis que je la connais, elle n’arrête pas de profiter du moindre de mes travers. Elle amène toujours à manger, elle adore me faire envie avec ses superbes robes, et elle ne peut même pas s’empêcher d’être sexy !

-Oh, et donc, tu penses que maintenant, la prochaine fois que tu la verras, elle t’attachera les pattes sur ta chaise ?

-Avec elle, je peux m’attendre à tout ! » Rétorquais-je en reprenant un morceau de fromage, tandis que Chicha se contentait de rester contre moi. Lui aussi semblait éprouver un besoin de rester à mon contact, même si en tant que mon compagnon, il avait déjà cette habitude.



« Sur ce point tu as raison… » Souffla-t-il en venant coller sa tête contre mon encolure. « Elle devient de plus en plus imprévisible…

-Qu’est-ce que tu entends par là ? » Je ne savais pas que Chicha pouvait à ce point se méfier de sa mère, mais pour moi, ça n'annonçait rien de bien.

« Cherba, il ne faisait pas partie de son plan… »

Je déglutis bruyamment avant de me tourner vers lui.

« Écoute… je sais que tu ne dois pas être d’accord, mais je…

-Merci, Cadance… » Souffla-t-il contre moi. Je m’attendais à ce qu’il soit jaloux, qu’il me dise que j’ai été idiote de faire cela, ou même qu’il m’en veuille. Mais à la place de ça, il me remerciait. « Je sais que ça doit te dépasser… qu’au fond, tu te demandes encore pourquoi tu as fait ça, mais quoi qu’il en soit, je te suis reconnaissant.

-M,-mais… tu n’es pas jaloux ?

-Bien sûr que je le suis ! » S’exclama-t-il en se redressant brusquement. « De Cherba, mais aussi de Little Star. Je voudrais te garder pour moi tout seul, mais je sais que ce n’est pas possible, parce que tu ne peux pas te contenter d’un partenaire à cause de ta nature. Ce n’est pas ta faute, c’est la mienne si je suis jaloux, j’étais conscient de la situation lorsque j’ai décidé d’être avec toi. »

Je me mis à glousser avant de venir l’embrasser. Chicha était un partenaire bien particulier, qui était conscient de mon état et de mon problème, et même si cela lui causait des soucis, il n’irait pas s’en plaindre, parce qu’il m’aimait.

« Merci beaucoup... » Soufflais-je contre ses lèvres alors que je sentais encore sa langue contre les miennes.

« Tu sais, ce n’est pas pour autant que je vais l’accepter… » Murmura-t-il en ne lâchant pas ma bouche.

Je le repoussais alors un peu plus brusquement que je l’aurais souhaité.

« S’il te plait, ne va pas rendre la chose plus compliquée qu’elle ne l’est déjà. Tu avais dit que tu étais reconnaissant ! » Dis-je en fronçant les sourcils et en penchant la tête sur le côté. Le pégase à la crinière bleue se mit alors à sourire légèrement en roulant des yeux.

« Bien sûr, Cadance, je suis heureux que tu aies sauvé l’un de mes frères d’une exécution pour un faux pas que beaucoup auraient commis, mais c’est dans ma nature de protéger ma place ainsi que ce qui m’appartient. Il est encore jeune et n’arrivera pas une seule seconde à satisfaire la moindre de tes envies et soulager tes angoisses. Il sera juste un boulet pour toi et te fera sentir encore plus mal qu’autre chose ! » Il haussa les épaules en gardant son regard dans le vague comme si c’était une évidence et qu’il n’avait même pas besoin de me convaincre.

« Tu sais que tu peux être très con quand tu t’y mets ? » Rétorquais-je sèchement ?

« Non, je suis juste un changelin, et je sais comment NOUS fonctionnons. » Dit-il en buvant une gorgée dans mon verre. « Et puis, je suis TON con. » Plaisanta-t-il en serrant un peu plus son sabot autour de ma taille.

J’avais compris la leçon de la dernière fois : Chicha s’y connaissait mieux que moi en histoire de changelin. Je ne voulais plus que nous nous disputions à cause de ça… à cause de moi.

« D’accord… Je crois que je peux comprendre ce que tu veux dire, mais sérieusement, Cherba n’est pas méchant, je ne vais pas avoir de problème avec lui. »

Je vis Chicha rouler à nouveau des yeux, ce qui me fit aussitôt grommeler avant de le frapper à l’épaule.

« Ouch ! Oh c’est bon, tu l’as vu, non ? Il a peur de tout ! Si vraiment il fallait que tu choisisses un autre changelin, je ne vais pas te mentir, il y avait de bien meilleurs choix. Cheat, Change ou même Choko. Ceux-là seraient parfaits pour te protéger et en plus ils sont moins intéressants que moi. » Il me décocha un léger sourire avant de prendre un morceau de fromage pour le placer juste devant mon museau.

Je l’acceptai sans problème avant de secouer la tête.

« T’as vraiment ‘eur de ‘erba ? » Demandais-je la bouche pleine de fromage. Le changelin se renfrogna aussitôt. S’attaquer au pouvoir de séduction d’un mâle n’était jamais une bonne chose, étalon comme changelin. Ou peut-être que j’avais juste mauvaise haleine à cause du fromage ? Merde !

« Disons que le lien à changé ton comportement vis-à-vis de la ruche, et tu te trouves être quelqu’un de très protectrice. Malheureusement, tu appliques ce comportement quand tu es face à des changelins vulnérables, ce que je ne suis pas. Cherba, lui, en est un parfait exemple et cela me met en colère quand je le vois profiter de ta faiblesse ! » Je l’entendis se mettre à grogner légèrement et lui attrapait le museau du sabot avant de me pencher sur lui.

« Tu sais que tu seras toujours le premier pour moi. Je n’ai fait ça que pour lui sauver la vie et tu le sais bien, mais je vais avoir besoin de toi pour m’aider à le garder encore en vie. Je sais que je n’y arriverai pas sans toi, tu es mon compagnon, celui sur qui je peux me reposer quand ça ne va pas et sur qui je peux compter chaque fois que je suis perdue. » Je libérais son museau avant de lui sourire tendrement et d’enlacer son encolure. « Je ne peux pas me résoudre à l’abandonner et j’espère que tu le comprendras… Quoi qu’il en soit, tu seras toujours le premier pour moi, j’aime m’occuper de ceux qui sont vulnérables, mais toi, tu seras toujours mon dominant. » Lui soufflais-je à l’oreille, ce qui le fit aussitôt siffler entre ses dents alors qu’il se serrait un peu plus contre moi. J’avais touché la corde sensible et il avait toujours l’habitude de répondre au quart de tour. Chicha était un dominant, et chez les changelins, c’était très important de le démontrer à chaque occasion.

Je terminais mon repas tandis que mon changelin me tenait compagnie en silence. Cela ne me dérangeait pas, je savais que Chicha aimait rester ainsi, silencieux pendant que j’étais occupée à faire autre chose. Il m’avait dit une fois que c’était parce qu’il aimait prendre son temps pour m’observer, me sentir, goûter et toucher mes émotions. Ça ne me dérangeait pas spécialement, après tout, cela faisait du bien de se retrouver au calme pendant quelques minutes, juste de quoi finir de manger.

« Chrysalis va bientôt revenir… » M’avertit Chicha en me caressant l’épaule, je hochais alors simplement la tête en me préparant mentalement à sa venue. J’observais Chicha du coin de l’oeil pour voir son état et il ne semblait pas particulièrement réjoui, depuis quand il craignait être en compagnie de sa mère ? J’aurais bien voulu savoir ce qu’il voulait me dire quand nos regards se croisèrent, mais tout ce que je vis, ce fut un air totalement neutre sur son visage comme il avait l’habitude de faire.

La reine des changelins sortit alors du restaurant sous son déguisement de jument fatale. Je devais l’avouer, même moi je ne disposais pas d’autant de prestance. On aurait dit que sa simple venue était suffisante pour que tout le monde arrête ce qu’il était en train de faire. La vérité n’était pas loin, car Chicha et moi-même restions immobiles en attendant que la changeline nous rejoigne. Mon compagnon se retira de la chaise qu’il occupait et l’offrit à sa matriarche en s’écartant légèrement. Elle ne chercha même pas à le remercier avant de s’accouder sur la table et de me regarder en souriant.

« Alors, tu aimes ce que j’en ai fait ? » Demanda-t-elle en désignant Chicha de la tête. Est-ce qu’elle espérait m’entendre dire que j’appréciais ou tout l’inverse ? Son air n’était en rien rassurant et je ne voulais certainement pas poursuivre la moindre discussion avec elle.

« C’est quelque peu extravagant… Mais disons que je vais rapidement m’y faire. »

Chrysalis se mit à sourire en roulant des épaules avant de me dire d’une voix langoureuse :

« Je le savais, tu as quasiment les mêmes goûts que moi. »

Je retins un léger frisson qui parcourut toute mon échine. J’espérais plus que tout que ses mots soient faux.

« Tu ne sais rien de moi ! » Répondis-je sèchement avant de reprendre rapidement d’un air jovial. « Disons que tu as eu beaucoup de chance. »

Chrysalis hocha alors simplement la tête, comme si elle acceptait ce que je venais de dire. Elle devait certainement considérer cela comme une victoire, peu importe ce que je venais de lui dire. Ça m’énervait beaucoup de lui accorder ça cependant.

« Où est Little Star ? » Lui demandais-je rapidement pour éviter qu’elle ne m’embarque à nouveau sur un autre sujet délicat, où elle aurait un avantage certain pour me mettre en rogne.

Chrysalis fit un nouveau signe de la tête pour m’indiquer la rue adjacente à la terrasse.

« Tu ne l’as toujours pas vue ? Ça fait bien dix minutes maintenant qu’elle a commencé l'entraînement.

-L’entraînement de quoi ? » Lui demandais-je en observant la rue et les poneys qui s’y trouvaient. Dans toute la cohue, je pus apercevoir la pégase jaune canari qui était à un pâté de maison de là et qui se trouvait face à trois autres juments. Dedans, je pus reconnaître une autre pégase qui portait les mêmes couleurs que Shining. « Cherba ?

-Oui, lui aussi doit encore revoir les bases. Tu comprends que même si tu as décidé d’en faire ton compagnon, je me dois d’en faire un adulte, et il se trouve que Little Star est très bonne pour m’aider dans cette tâche. »

J’étais toujours anxieuse de découvrir ce que Chrysalis lui faisait, mais à vrai dire, la pégase jaune ne semblait pas en mauvaise situation, elle était même en train de sourire en pointant l’une des juments. En fait, ce qui attira davantage mon regard, ce fut le collier vert foncé qu’elle avait autour du cou.

« Qu’est-ce que c’est que ce truc qu’elle porte ? » Demandais-je aigrie.

« Le collier ? C’est juste un accessoire que je donne à toutes mes nurses. Ainsi mes enfants et les autres juments qui travaillent pour moi la reconnaissent facilement.

-Le travail de nurse consiste à entraîner tes enfants ? Je pensais qu’elles devaient juste prendre soin d’eux ? »

Chrysalis haussa des épaules en reprenant le tube de son narguilé pour tirer dessus.

« Elles doivent protéger les nouveau-nés, les entraîner, leur enseigner le fonctionnement du monde d’Equestria, les lois, les protéger et les soigner, servir de substitut quand les récoltes n’ont pas été assez bonnes, et gérer ma compta.

-C’est un travail compliqué ? » Avoir la charge d’autant de personnes quand on n’en avait pas l’habitude n’était pas quelque chose que j’étais prête à faire.

« Pourquoi, ça t’intéresse ma chérie ? Deux de mes enfants ne te suffisent déjà plus ? »

Je roulais des yeux en secouant la tête.

« Oublie ma question.

-J’ai besoin de juments comme Little Star, qui sont capables de séduire un étalon du premier regard, mais qui arriveront aussi à lui faire ressentir de l’amour tout au long de leur relation. Elle a une vision globale des choses qui m’étonne, tellement elle dissone avec la tienne. Elle leur apprend à évaluer leur cible, comment réagir selon l’heure et le lieu, la position à adopter… En clair, une véritable prédatrice. Tout le contraire de toi.

-Je te demande pardon ? » Demandais-je vexée. « Je te rappelle que tu t’adresses à une succube. » Soufflais-je pour ne pas me faire remarquer.

« Ah ah, tu sais, je n’ai aucun mal à avouer mes défauts, alors tu pourrais en faire de même. Je suis quelqu’un de vieux jeu en amour, et je sais que n’irai jamais changer mes principes pour séduire un poney. Il est là mon point faible ma chérie. Tu vois, j’ai la beauté de mes formes, l’élégance de mes gestes, et le charisme dans le moindre de mes mots, mais j’attache trop de principes à mes traditions qui m’empêchent de devenir un véritable monstre de séduction. Envouter un étalon est une chose tellement commune, le manipuler reviendrait à lui faire croire à l’amour, et je sais que ce n’est pas ainsi que ma ruche prospérera. Et toi… Eh bien tu n'es pas trop mal, c’est déjà ça… Et puis... parfois tu peux être intéressante à écouter. Par contre, tu as un énorme défaut, c’est ton rire.

-Quoi ? Qu’est-ce qu’il a mon rire ? » je me sentais réellement offensée. J’entendis alors Chicha se mettre à tousser et j’attrapai aussitôt sa chaine pour le tirer sur moi. « T’as quelque chose contre mon rire, toi !?

-NON ! Non, non, j-je t’assure que ça ne me dérange pas les rires aigus comme le tien.

-Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes ?

-Cadance, calme-toi bon sang ! À l’écoute on dirait juste une pouliche de six ans, mais ce n’est pas si dramatique ! » Enchérit la changeline.

« J-je t’assure, ça ne me dérange pas…

-Ferme-la toi ! » Ordonnais-je en lâchant sa chaîne violemment. Je reportai mon attention sur Little Star tandis que je sentais plus que je ne voyais Chrysalis et Chicha en train de se foutre de moi. Je venais de comprendre la leçon, on ne m’entendrait plus rire en présence de ces cafards, ça allait être une histoire cent pour cent triste.

Je continuai d’ignorer Chicha qui essayait de me réconforter alors que sa matriarche était encore en train de glousser. J’aurais bien voulu trouver quelque chose à dire sur son rire à elle, mais même lui était sexy !

Je continuai alors d’observer la pégase, bientôt suivie par la changeline et son fils. Tous les trois, nous restions attentifs à la scène qui était sur le point de se dérouler. Après quelques signes du sabot, Little Star sembla inviter une jument à s’avancer plus loin dans la rue. Je pensais au départ qu’elle voulait l’éloigner, mais en réalité, elle lui demandait de se rapprocher d’un étalon. Je compris qu’elle était certainement déjà en train de faire les essais pratiques.

Toute notre attention était alors concentrée sur cette jument verte à la crinière brune. Personnellement, si je pouvais choisir mon apparence, je n’aurais pas fait ce choix de couleurs. Elle finit par s’approcher d’un étalon qui était juste en face du restaurant où nous nous trouvions. Je ne pouvais pas entendre ce qu’elle disait à ce dernier, mais à la manière qu’elle avait de s’approcher de lui en faisant rouler ses hanches et agiter sa queue, ainsi que l’air langoureux qu’elle arborait sur son visage à l’instant où elle l’accosta, il n’y avait aucun doute, elle cherchait à le séduire rapidement. Cependant, son plan ne semblait pas marcher comme prévu, et en un instant, le poney se retourna sur elle avant de lui hurler dessus et de partir aussitôt la jument écartée. Cette dernière restait sur la croupe, étonnée de cette réaction qu’elle n’avait sans doute pas prévue. Little Star finit par la rejoindre en riant avant de l’aider à se relever. Elle se dirigea ensuite, accompagnée de son petit groupe, jusqu’à la terrasse où nous nous trouvions.

« Je le répète encore une fois, ne jamais oublier la première règle, qui est ? »

Cherba qui était sous l’apparence de la pégase blanche à la crinière bleue leva le sabot.

« Toujours bien analyser notre cible, madame Star ?

-Exactement ! La nuit il vous suffira d’attendre qu’il se présente devant vous, et vous devrez juste juger son niveau de dangerosité et de dépression. En journée, c’est VOUS qui devez faire le premier pas, et c’est d’autant plus difficile, car beaucoup de poneys ne souhaiteront pas être vus en votre compagnie.

-Le niveau de dangerosité et de dépression ? » Répétais-je en me retenant de rire pour ne pas entendre Chrysalis se foutre encore de moi. « C’est quoi cette invention ?

-Hey, c’est une science très sérieuse ! » Me répondit-elle en prenant un air professionnel. « Il faut déterminer les clients potentiels qui ne seront pas des psychopathes ou des dépressifs qui cherchent juste à se soulager sans rien éprouver. » J’avais du mal à savoir ce qu’elle voulait dire par là, et encore plus à imaginer ça comme quelque chose de scientifique, mais quoi qu’il en soit, je lui faisais confiance pour ce qui était de juger rapidement une personne. Son métier n’était pas le plus calme la plupart du temps, et savoir jauger le danger était un avantage indispensable.

« Et comment tu veux qu’ils fassent ça alors que tu as mis des années à en être capable ? » Demandais-je en m’accoudant sur la table tandis que la pégase jaune se recoiffait.

« Ce sont des changelins, Cadance… » Chuchota-t-elle en mettant un sabot sur le bord de ses lèvres en fronçant les sourcils. Un point pour elle, ça m’énervait, mais je m’étais fait avoir plus d’une fois à oublier que les changelins pouvaient sentir les émotions. « Un trop-plein d'excitation est déjà un bon signal. » Expliqua-t-elle en reportant son attention sur son petit groupe. « Si l’étalon est encore jeune, ça peut être juste à cause du stress de la première fois, mais s’il a l’air d’avoir l’habitude, éloignez-vous tout de suite de lui ! » Je l’écoutais tout comme Chrysalis et Chicha, faire cours à son petit groupe. « Ne vous déplacez jamais seules. Et cela pour plusieurs raisons, quelles sont-elles ? » Demanda la pégase avec un regard malicieux, le même que celui d’une maîtresse qui cherchait un poulain qui n’avait pas bien révisé sa leçon. « Chnikov ! » Annonça-t-elle en pointant la jument verte qui se grattait le museau, celle qui venait de se faire rembarrer par l’étalon.

« Euh… eeeeuuuuhmmm… Euh, ce n’est pas… hmmmmm… » Les autres juments se mirent à rire face à la victime de Little Star qui ne savait plus où poser le regard. Il fit l’erreur d’observer Chrysalis et se ravisa aussitôt. Si la maîtresse pouvait être intimidante, la directrice de l’école, elle, était terrifiante. « Cccc’eeeesssst… pour la sécuritéééééé » hésita le changelin avant de souffler rassuré quand il vit la pégase lui sourire.

« En effet la sécurité est le but premier. Protégez-vous, ainsi que votre identité. Si un étalon violent vous voit à plusieurs, il hésitera bien plus que si vous étiez seule. » Je doutai légèrement de l’issue d’un combat entre un changelin et un poney, encore qu'en y repensant, Cherba ne semblait pas vraiment capable de se défendre.

« Le repérage ! » Annonça un autre changelin en réponse à Little Star tout en levant le sabot exagérément haut.

« Parfaitement, Chami ! À deux, vous pouvez couvrir un plus gros secteur et ainsi gérer votre sécurité ainsi que cibler les candidats potentiels. » Elle fit un léger clin d’oeil sur ces deux derniers mots, à mon avis, « victimes » était un meilleur terme. « Et sinon, quelle est la dernière raison qui justifie de se déplacer toujours en groupe ? »

Je haussai légèrement un sourcil à l’intention de Cherba qui me regardait alors qu’il levait timidement le sabot pour répondre. Je sentis mes oreilles se redresser brusquement alors que j’en faisais de même sur ma chaise, je voulais qu’il réponde juste et dans son regard, je pouvais voir qu’il en voulait de même.

« P-pour attirer plus de clients… » Demanda-t-il sur un ton peu assuré.

« C’est exact ! »Je soufflais de soulagement. « Un étalon résistera très difficilement à deux juments pour le même prix, sans compter ceux qui aiment faire ça entre amis et espèrent trouver ce genre d’occasion rare.

-Mais pourquoi Cherba doit jouer la jument… » Murmurais-je en roulant des yeux. Quitte à ce qu’il devienne mon compagnon, je ne pouvais pas cacher une certaine préférence pour les étalons.

« Tu sais que c’est bien plus facile de récolter l’amour d’un étalon que d’une jument… » Me souffla Chrysalis qui venait de m’entendre.

« Et depuis quand t’as un problème contre les juments ?! » Demanda à voix haute Little Star pour qui notre discussion n’était en rien discrète. « Je te rappelle que même avec ton numéro de jument fatale, je t’ai appris deux trois trucs que t’adores.

-J’aimerais bien savoir lesquelles… » commenta Chicha en passant sa langue sur ses lèvres.

« Moi de même… » Compléta la reine changeline.

« Vous n’avez pas bientôt fini ! » Lâchais-je en me relevant de ma chaise. « Si vous continuez, plus personne n’entrera dans mon lit à part Cherba ! »

« C’est vrai ? »

J’observais le changelin dans son déguisement de jument me regarder avec des étoiles dans les yeux.

« Calme-toi tout de suite ! C’était qu’une façon de parler ! » Rectifiais-je en levant un sabot entre lui et moi. Je le vis alors se mettre à gémir en baissant la tête alors que les deux autres juments se mettaient à glousser. Il me faisait de la peine quand je le voyais ainsi, mais je ne pouvais pas m’empêcher de le trouver mignon. Je fronçais aussitôt les sourcils en secouant la tête pour chasser cette pensée persistante.

« Bon, je reprends où je m’étais arrêtée. » Annonça Little Star en se retournant sur son petit groupe.

Moi, je me contentais de me rasseoir en grommelant de ne plus avoir de quoi manger. Il me restait mon jus de fruit, mais ce n’était clairement pas ce qui allait me suffire.

« Tu l’as encore fait ! » Annonça Chicha en se penchant sur moi.

« Fais quoi ?

-Ce que tu viens de ressentir ne fais pas semblant bon sang !

-Quoi ? Parce que je voulais encore du fromage ? Je t’en prie, j’ai plus de sentiment pour le poulet.

-Pas la nourriture. Cherba ! » Grommela-t-il entre ses dents. « Ça se voit dès que tu le regardes. Tu t’inquiétais pour lui, tu avais même PEUR, et tu as eu un léger soulagement et même du réconfort lorsqu’il a bien répondu. Je ne te parle pas du moment où tu l’as remis à sa place, une vraie pluie de tendresse.

-C’est bon le psychologue, t’as fini de faire le jaloux ! » Je jetai un rapide coup d’oeil à Chrysalis qui restait silencieuse à nous observer. « J’imagine que tu as quelque chose à ajouter pour enfoncer un peu plus le couteau dans la plaie ?

-Hmmm… » Commença la jument en replaçant ses lunettes vertes. « Non, disons que ce n’est pas toi à qui j’aurais quelque chose à dire… » Elle tourna alors son regard sur Chicha qui plaqua les oreilles sur son crâne tout en grondant légèrement. Chrysalis me vit sur le point de rétorquer quelque chose et décida de prendre les devants. « La jalousie ma chérie. Bien entendu, tu devras y faire attention. En général, je fais en sorte de ne jamais mettre mes fils sur la même proie… mais dans cette situation, c’est à Chicha de changer rapidement de comportement.

-Je ne suis pas une proie ! » Sifflais-je en fronçant les sourcils. Chrysalis se mit à me sourire en penchant la tête sur le côté.

« Ne t’inquiète pas ma chérie, je t’ai déjà dit que j’ai énormément de respect pour les poneys qui contribuent à l'entretien de ma famille. Et nous cherchons toujours à le leur rendre du mieux que nous pouvons. Après tout, mes fils ont un don pour faire découvrir un amour encore inconnu à cette ville.

-Pfff, tout ça pour nourrir une ruche dans la capitale d’Equestria… » Marmonnais-je en appuyant ma tête sur mon propre sabot. « Je me demande bien pourquoi tu as fait ce serment de neutralité pour pouvoir venir vivre à Canterlot… je veux dire, tu y perds tellement comparé à la reine changeline que je connaissais lorsque tu étais encore dans les badlands.

-Oh bien sûr, rester en guerre contre Equestria m’aurait certainement donné des facilités, mais sur le long terme, crois-moi, j’y aurais perdu bien plus. Ici, à Canterlot, ma situation et mon statut font en sorte que je me retrouve à la tête de l’une des ruches les plus puissantes du monde entier.

-Il y en a autant que ça ? » Demandais-je curieuse.

« Neuf, très exactement, mais quatre sont situées sur d’autres continents, dont l’un d’eux n’est même pas connu des poneys. » Elle tira sur son narguilé avant de reprendre. « Quoi qu’il en soit ma chérie, ici, tout n’est pas forcément plus facile, avec ce serment, je suis obligée de suivre les mêmes lois que les batponies sur la manière de subvenir aux besoins de ma ruche. Même si nous pouvons nous nourrir en toute discrétion, nous devons faire en sorte de ne pas blesser les poneys qui nous aident à cette tâche… Et avec tout le respect que j’ai pour eux, il est très difficile et très peu rentable de ne gratter que la surface de ce dont nous avons besoin.

-Ne pense pas que je vais te plaindre grâce au lien qui nous unit… Je me retrouve peut-être attirée par Cherba, mais je te déteste encore et te voir dans la merde ne me dérangerait absolument pas. » Je me mis à lui sourire en sentant un élan de colère me remonter le long de la gorge. Je pouvais voir au regard de Chrysalis qu’elle l’avait ressenti et se demandait ce que j’allais bien lui dire. « Ces règles sont là pour me permettre de faire la différence entre un véritable monstre et une créature trop faible pour passer à l'attaque contre Canterlot. Alors, continue à te soumettre, et tout ira bien. » Finis-je en haussant les épaules et en m’installant un peu plus au fond de ma chaise.

La changeline se contentait de m’observer en silence. Je pouvais la voir garder les mâchoires serrées, certainement pour éviter d’exploser en public. Elle finit par tourner légèrement la tête en se mettant à glousser, je pouvais voir que ses crocs venaient de reprendre leur forme naturelle… Elle devait avoir du mal à garder son calme.

« à mes yeux… » Commença-t-elle en retirant ses lunettes. « Tu n’es qu’une petite garce que j’ai le malheur d’aimer… » Dit-elle en s’étranglant presque entre chaque mots. Elle passa sa langue le long de ses lèvres, celle-ci n’était plus du tout celle d’un poney à en juger par la longueur. « Mais… » Elle se mit à me sourire de tous ses crocs avant de me souffler. « Aux yeux de ces poneys, tu ne seras jamais qu’un monstre en rien différent de moi. Et quand ce jour arrivera... quand les poneys comprendront qui tu es vraiment, je me montrerai clémente et t’accorderai ma protection. »

Je secouais la tête avant de rétorquer :

« Je préfère encore crever plutôt que de me lier à toi ! Je ne sais pas ce que ça t’apporte, mais au final, j’ai appris qu’à force d’accumuler du pouvoir, les gens finissent par devenir fous. Et à voir ton état, je pense que tu en accumules depuis bien trop d’années. »

Chrysalis finit par se détendre en gloussant légèrement tout en passant un sabot dans sa crinière verte avant de me dire d’une voix bien plus douce.

« Je n’ai pas toujours été ainsi ma chérie. » On aurait presque dit que cette voix ne lui appartenait pas tellement cela soulignait un contraste. « Vu le temps que j’ai passé sur ce monde, il y a bien des choses que j’ai pu apprendre et expérimenter. J’ai démarré en bas de l’échelle, et il a bien fallu que je me débrouille seule à une époque, et c’est ce que je veux éviter de devoir faire à nouveau… Même s’il n’y avait pas que du négatif à cette vie de solitude.

-On dirait Luna qui me parle de son bannissement dans l’autre monde… » jugeais-je rapidement avec un léger frisson. Je savais que si l’alicorne m’entendait dire ça, plus personne n’aurait le souvenir de mon existence à l’esprit. « Qu’est-ce que qu’il y avait de si particulier à ce mode de vie ?

-J’y ai rencontré des poneys incroyables. Des étalons qui se voulaient protecteurs avec la jeune reine que j’étais… » Elle baissa les yeux en souriant légèrement. « Des conquérants, qui désiraient le pouvoir et qui étaient prêts à tout… » Au ton qu’elle employait, je me doutais qu’elle ne considérait pas cela comme un point négatif. « Des êtres désespérés qui ne cherchaient qu’à noyer leur chagrin en ma compagnie… et même une jument totalement inconsciente qui ne cherchait qu’à s’amuser. » Finit-elle en riant. « Tous ces poneys, je les ai aimés ma chérie. J’ai vécu plus d’une cinquantaine de vies, et cela, je le dois grâce à mon pouvoir.

-La mission que j’ai dû remplir pour toi, t’amener cette urne à Canterlot pendant que tu gardais Shining en otage… Qui était ce poney ? » Demandais-je en faisant rouler mon sabot le long du bord de mon verre.

« Oh, Speed Date… » Murmura-t-elle avec un léger sourire pincé. « Tu sais, si c’est encore pour qu’on reparle de Shining, tu n’es pas obligée d’utiliser des sujets détournés. Je ne souhaite pas t’entendre me dire…

-Non non… » Répondis-je sincèrement. En réalité, je ne cachais pas que oui, Shining était plus important que le reste, mais cette histoire représentait ma toute première rencontre avec Chrysalis et je n’avais jamais pris le temps de savoir pourquoi j’avais fais tout ça.

« Très bien… » Elle releva la tête en tripotant ses lunettes entre ses sabots de manière distraite. « Speed Date, il n’était pas un protecteur, un conquérant, quelqu’un de triste ou à la recherche d’une expérience hors du commun… En fait, c’est lui qui m’a trouvé un jour où je n’allais pas bien… Je sais, c’est dur à croire, mais moi-même, aussi puissante et belle que je sois, j’ai eu à un moment un instant de faiblesse. » Avoua la changeline comme si c’était quelque chose de dramatique. « I-il n’était pas particulièrement fort, ni beau, en fait il était tout à fait banal comme étalon… même un peu plus petit que la moyenne. Il était timide, énormément même… mais il avait tellement de coeur… » Je vis Chrysalis ne pas réussir à se retenir de sourire. Cette dernière ferma même les yeux, certainement en train de se maudire intérieurement de paraître aussi niaise devant moi. « Il me faisait rire et me protégeait d’une manière que je n’avais encore jamais vu. Il n’avait pas besoin de m’entendre lui dire les choses pour comprendre où se trouvait mon problème… en réalité, je n’ai jamais réussi à lui cacher quoi que ce soit, je n’étais qu’un livre ouvert pour lui. J’ai failli abandonner la changeline que j’étais pour lui… et il a fait ce que j’étais incapable de faire, il m’en a dissuadé, il m’a fait comprendre que je ne serai pas complètement heureuse avec lui, qu’une vie de poney normale n’était pas quelque chose qui me conviendrait… il avait raison, une jolie maison avec deux poulains qui se baladent dans le jardin bien gardé par une belle petite barrière blanche… Ce n’est pas pour moi. »

Je déglutis légèrement à l’entente de cette dernière phrase… Chrysalis aussi avait un jour imaginé vivre une vie de poney ? C’était trop gros pour y croire.

-Toi, te faire diriger par un simple poney ? Il y a beaucoup de choses que j’ai du mal à croire… comment cela se fait que tu oses te montrer à quelqu’un alors que tu es faible ? Sans compter que tu puisses choisir un poney qui n’a aucune caractéristique primordiale pour tes enfants. » Chicha m’avait déjà expliqué comment fonctionnait les matriarches et à quoi leur servait leur partenaire… il ne fallait pas être un prix Nobel pour le comprendre.

« Je te raconte l’histoire, peu importe que tu me croies ou non. »

Je reportai mon attention sur Chicha, mais celui-ci chercha à fuir rapidement mon regard, Chrysalis intervint aussitôt.

« Il ne t’aidera pas à connaître la vérité. Parce que je suis la seule à connaître cette histoire maintenant qu’il est mort. Il faut que tu apprennes à penser par toi-même ma chérie. Ne te contente pas de te reposer sur ce que tu as, va au-delà des apparences. Speed Date n’était pas un combattant, un stratège ou même un scientifique. Mais il avait un véritable talent, il savait tout de l’amour et comment partager le bonheur… » Elle me regarda avec un léger sourire avant de conclure : « Et si je peux ajouter une dernière chose, Cherba est l’un de ses descendants. »

Je dirigeais alors mon regard vers le changelin qui s’entraînait toujours avec Little Star. Ils s’étaient un peu éloignés de nous et cela ne me plaisait pas. J’aurais bien voulu le surveiller encore un peu, juste pour voir s’il s’en sortait bien…

« C’est pour ça qu’il est aussi faible. » Commenta Chicha en grondant légèrement. Je lui envoyai aussitôt mon coude dans les côtes.

« Ses qualités ne résident pas dans sa force physique et dans son assurance… » Corrigea Chrysalis en souriant légèrement avant de remettre ses lunettes.

« Chrysti… pourquoi m’avoir fait tout ce cinéma pour que je récupère les cendres de cet étalon à l’époque ?

-Ce sont nos traditions, ma chérie. Je ne m’attends pas à ce que tu me comprennes, mais pour moi, chacun de ces poneys que j’ai rencontrés et qui m’ont offert tout ce que je voulais… Cela pourrait ressembler à de la manipulation, mais en réalité, je ne leur ai jamais caché mon objectif, ils savaient tous dans quoi ils s’engageaient et étaient prêts à le faire pour moi, parce qu’ils m’aimaient… moi, ou ce que je représentais. Alors non, je ne peux pas les abandonner ou même les oublier. Ils font partie de la ruche à leur manière et ils savent qu’à partir du moment où ils m’ont acceptée, rien ne pourra effacer cela.

-Qu’est-ce que je dois faire Chrysti ? » M’énervais-je légèrement. « Chaque fois que je suis en présence d’un monstre, il arrive toujours à me montrer que les bons côtés. Pas les morts qu’il a provoquées, pas le mal et la tristesse. J’ai juste droit au bonheur qu’il amène dans ce monde, comme si sa venue était un cadeau plus qu’un problème. Á vous entendre, il n’y a pas besoin de Marshall à Equestria, vu qu’il n’y a aucun monstre ! »

Chrysalis baissa légèrement la tête pour que je puisse voir ses yeux par-dessus ses lunettes. Elle voulait me faire comprendre de rester discrète. Même s’il n’y avait personne sur la terrasse avec nous, on n’était jamais assez prudent. Elle approcha ensuite l’un de ses sabots pour attraper le mien et le serrer comme si elle cherchait à me réconforter… ça n’aidait vraiment pas.

« Nous faisons tous cela, ma chérie. Qui serait assez idiot pour être honnête avec toi et te dire que le monde des braves petits poneys serait bien mieux sans lui ? » Elle me fit un léger clin d’oeil à travers ses lunettes. « Mais… sois sûre d’une chose ma chérie… Ce sont bel et bien des monstres, tous, toi et moi y compris. » Elle se mit à glousser légèrement avant de terminer sa phrase d’une voix extrêmement douce. « Le mal, c’est quelque chose de toujours possible, alors que le bien est une chose d’éternellement difficile. »

Je n’eus pas le temps de répondre à Chysalis qu’elle entendit un poney se mettre à hurler au beau milieu de la rue. Je détournais alors mon regard pour espérer voir d’où cela provenait. Comme la dernière fois, je vis l’une des élèves de Little Star se faire rabrouer, mais cette fois-ci, l’étalon semblait particulièrement énervé. Je me levai aussitôt de ma chaise en remarquant que la jument n’était autre que Cherba. Accourant à son secours, je me plaçais rapidement entre l’étalon et mon compagnon avant de tendre l’aile où se trouvait mon insigne. « Marshall fédéral pour la zone de Canterlot, quel est votre problème ? » Ce poney brun ne devait certainement pas savoir ce que signifiait mon rôle de Marshall au sein de la ville, mais je comptais surtout sur l’éclat de ma jolie insigne pour lui faire comprendre de s’arrêter.

« C-c’est cette jument ! » Éructa-t-il en pointant Cherba du sabot. « C’est tout ce quartier même ! Il n’est plus comme avant, on ne peut plus faire dix mètres sans se faire harceler par des mendiants ou ces… juments !

-Vous semblez fatigué, monsieur, il faudrait peut-être mieux aller vous reposer, je vais m’occuper de cette jument. Je commencerai par un interrogatoire. » Déclarais-je en lançant un regard dur à Cherba qui jouait parfaitement bien le rôle de la jument plus bas que terre.

« M-merci… » fit l’étalon avant de se retourner et de reprendre sa route. « Vous avez certainement raison, il faut vraiment que je me repose… » Marmonna-t-il en s’éloignant d’un pas lourd. C’était étrange, à quel point ça avait été facile, en général, les poneys qui se plaignaient adoraient m’en faire voir de toutes les couleurs avant de partir. Je reportais alors aussitôt mon attention sur Chrysalis ainsi que le groupe de juments qui était auprès de Little Star. Toutes observaient encore l’étalon d’une manière que j’aurais qualifié de bien suspecte… Elles avaient l’air imperturbables jusqu’à ce que ce dernier ne disparaisse complètement au détour d’une rue. Oui, sans colère, cet étalon ne pouvait plus faire grand-chose…

Je me retournai alors sur Cherba pour lui tendre mon sabot en gardant un air sévère à son égard. Il accepta mon aide pour se relever, mais n’osait pas soutenir mon regard, certainement trop gêné.

« P-pardon… » Murmura-t-il de sa voix féminine.

« Oui, tu fais bien de t’excuser ! » Rétorquais-je en passant mon sabot sur l’une de ses ailes qui était recouverte de poussière. « Je ne serai pas toujours là, mais il faut quand même que tu apprennes à juger tes cibles !

-Je l’ai pas fait exprès…

-ça je m’en doute ! » Je n’aimais pas la manière dont il me répondait, j’essayais de lui apprendre quelque chose, et lui se contentait de chercher des excuses minables. « C’est justement pour ça que tu t’entraines, pour être meilleur, sinon, comment est-ce que tu veux que je te considère comme mon compagnon si je ne peux pas avoir confiance en toi ?! » M’exclamais-je avant de moi-même écarquiller les yeux. Cherba, mon compagnon… j’avais toujours du mal à l’imaginer et cela devait être la même chose pour le changelin. Je ne le connaissais que depuis aujourd’hui, et pourtant, j’avais déjà l’impression d'éprouver quelque chose pour lui… je me mis à froncer les sourcils en me massant les tempes du sabot.

« Vous… Tu vas bien Cadance ? » S’inquiéta Cherba en tendant légèrement un sabot vers moi. Je reportai mon attention sur lui et le sentit se tendre aussitôt, je lui souris légèrement sans trop savoir pourquoi avant de venir lui caresser légèrement l’encolure.

« Ne t’inquiète pas pour moi… J’ai compris que c’est à moi de faire attention à toi, et puis ça ne fera jamais que la deuxième fois de la journée que je te sauve la vie. » Je vis le changelin baisser à nouveau les yeux, certainement parce qu’il était gêné, mais sur lui, je n’arrivai qu’à trouver ça mignon.

« J’ai peur d’y retourner… » Me confia-t-il le regard toujours rivé au sol.

Cela me fit légèrement paniquer, si Chrysalis entendait cela, elle allait encore le considérer comme un mauvais changelin.

« Hey, ne dis pas ça ! » Murmurais-je en relevant son visage avec un sabot sous son menton. « Je ne veux pas t’entendre douter de toi ainsi. Il faut que tu sois fort !

-Mais je ne suis pas comme Chicha…

-Non, mais tu as d’autres atouts ! » Rétorquais-je en plaquant mes sabots sur ses joues. « Et c’est bien pour ça que je t’ai choisi, moi. Si tu as réussi à me séduire, alors tu peux faire ça avec n’importe qui, c’est compris ?

-Oui, mais…

-C’est bien compris ?! » Répétais-je un peu plus fort. Je l’entendis gémir légèrement depuis le fond de sa gorge avant de relever les yeux sur moi.

« D’accord Cadance, j’ai bien compris. »

Je lui souris en me sentant complètement soulagée avant de me pencher un peu plus sur lui pour venir l’embrasser. Son déguisement n’était pas vraiment dérangeant, étant donné que Cherba avait exactement les traits aussi fins que ceux d’une jument. Sa mâchoire n’était pas aussi large que celle de Chicha, et même sa langue que je pouvais sentir se précipiter dans ma bouche était bien plus fine. Je brisai cependant rapidement notre baiser, ce n’était pas qu’il était désagréable, mais uniquement parce que je savais que Chicha nous observait et que cela devait certainement le rendre jaloux. Même si j’étais quelque peu contente de savoir qu’un étalon était jaloux à cause de moi…

Je m’éloignai ensuite pour retourner en spectatrice au côté de Chrysalis et de Chicha, offrant un dernier regard à Cherba pour l’encourager. De retour à la terrasse, je m’installais sur ma chaise avant de me pencher sur la reine changeline et de lui demander :

« Pourquoi je m’attache autant à lui, Chrysalis ? Je sais que je ne suis pas amoureuse de Cherba, mais pourtant, je l’aime et je ne veux pas qu’il lui arrive le moindre mal !

-Peut-être que tout comme moi, tu es victime du charme des Speed Date. » Chantonna-t-elle en penchant la tête sur le côté.

« Ne me prends pas pour une conne Chrysalis ! » M’énervais-je « Je sais que c’est uniquement à cause du lien que je m’attache à ce point à Cherba ! il y a encore quelques jours de ça, je m’en foutais d’eux quasi autant de toi, excepté Chicha, mais maintenant, je n’arrive plus qu’à me sentir concernée chaque fois qu’ils sont auprès de moi !

-Tu sais, t’es peut-être vraiment tombée sous le charme de Cherba… » Commenta Little Star qui nous avait rejoint sur la terrasse.

« Si c’est vraiment le cas, alors je peux t’assurer que je pourrais tomber sous le charme de TOUTE sa foutue ruche ! Cherba n’a rien d’intéressant, pourtant, je ne peux pas m’empêcher d’être heureuse quand il est près de moi ! » Je fermais les yeux en plaçant un sabot devant ma bouche, je n’aurais pas dû aller jusqu’à dire ça. Oui, c’était réellement ce que je ressentais quand j’étais en sa présence, mais ça n’allait pas plaire à Chicha.

« Le fait que tu sois attirée par Cherba est parfaitement logique… » Répondit alors ce dernier en soupirant, toujours à mes côtés. « Même si le lien avec la ruche fait en sorte que nous ne te laissons pas indifférente, Cherba est le genre de changelin qui correspond parfaitement à ton caractère.

-Qu’est-ce que tu veux dire ? » Demandais-je en me tournant sur lui.

« Oh, la technique de l’étalon sans défense, bien sûr, je lui ai toujours dit de jouer sur ça. » Compléta Little Star alors que je me retournais sur elle.

« Qu’est-ce que vous voulez dire bon sang !? » M’exclamais-je en laissant la colère poindre peu à peu dans ma voix.

« Ce qu’ils cherchent à te faire comprendre ma chérie, c’est que Cherba est l’exemple parfait d’un étalon totalement soumis, et que tu es justement attirée par ça.

-C’est complètement idiot ! » Rétorquais-je en secouant la tête et en faisant la grimace. « J’avoue, que je suis plutôt du genre dominante, mais ce n’est pas pour autant que je veux quelqu’un qui se soumette à absolument tout !

-Peut-être que ce n’est pas toi qui as choisi… » Supposa la pégase jaune en souriant légèrement avant de reprendre plus doucement. « C’est la succube qui a essayé de lui sauter dessus, pas toi. Au final, peut-être que toi, tu te sens juste coupable de lui avoir fait ça, tandis que ta part succube l’adore.

-Euh… t’es pas en train de me prendre pour une folle là ? » M’énervais-je rapidement.

« Pourtant, c’est peut-être une bonne explication… » intervint Chicha.

« Arrête de dire des conneries ! » M’exclamais-je en frappant du sabot sur la table. Chrysalis se contentait toujours de m’observer sans rien dire, mais le changelin, lui, me fusilla aussitôt du regard.

« Je t’ai déjà dit qu’entre toi et ton pouvoir, il y avait un écart énorme !

-Qu’est-ce que t’en sais ?! » Rétorquais-je en me levant de ma chaise.

« Je le vois quand on couche ensemble ! » Hurla-t-il ce qui attira aussitôt l’attention de tous les passants sur nous. Il reprit cependant à voix basse. j’aurais pu le remercier pour ce détail, mais j’avais juste envie de lui foutre mon sabot dans la figure. « Tu es bien différente quand je suis avec toi et quand tu réveilles ton pouvoir pour te nourrir. Tu t’énerves à chaque fois qu’on entre sur ce sujet, mais je veux juste que tu comprennes que c’est aussi compliqué pour moi.

-Il n’y a rien de compliqué à cela. » Intervint Chrysalis qui était accoudée sur la table, la tête posée sur ses sabots. « Ma chérie est simplement victime de son pouvoir et elle ne l’accepte pas. Si ça se trouve, elle ne s’en rend même pas compte. Elle a des besoins à nourrir, et ceux-ci lui font bien comprendre leur préférence, alors ma chérie, dis moi quel est le type d’étalon avec qui tu couches ?

-ça ne te regarde pas ! » Je savais que jouer la prude en présence d’une matriarche, d’un changelin et d’une prostituée était une jolie blague, mais je n’avais pas envie de lui parler de cela. Elle avait raison, je me laissais guider par mon pouvoir, et c’était ça qui me mettait à ce point en colère. « M,-mais ils ne sont pas comme Cherba !

-Ouais, entre l’idiot musclé ou l’ivrogne que t’as rencontré dans une ruelle sombre... »

J’empoignai rapidement la chaîne à l’oreille de Chicha, que j’eus presque l’impression d’arracher quand je l’entendis se mettre à siffler bruyamment, avant de se retenir en s’étranglant.

« C’est bon, je la ferme, je la ferme ! » Dit-il la tête baissée.

« Tiens t’as raison, je crois que je commence à aimer les partenaires soumis ! » Dis-je les dents serrées.

« Quoi qu’il en soit, ton pouvoir te fait ressentir d’autres envies, et Cherba est la dernière victime sur laquelle il s’est libéré, peut-être que ta nature de succube veut juste terminer ce qu’elle a commencé. » Reprit Chrysalis en ignorant notre dispute.

« Ça t’arrange bien… » Lâchais-je sur un ton sec. « Mais il n’y a absolument rien de tout ça, mon pouvoir n’est en rien responsable pour le choix de mes partenaires, c’est moi qui ai décidé à chaque fois. » Je vis Chrysalis se mettre à rire en secouant la tête.

« Allons ma chérie, c’est bien ton pouvoir qui est derrière tout ça, honnêtement, si tu étais seule à chaque fois que tu étais en présence d’un étalon, il n’aurait aucune envie de te parler.

-Tu te crois mieux ? » En réalité, je ne pouvais pas mentir, Chrysalis le sentirait facilement. “...Pleine de trous ! » Lâchais-je en la pointant du sabot alors que je ne réussis qu’à lui faire lever un sourcil. Ah, c’était déjà un point pour moi.

« Tu sais ma chérie, je ne sais pas s’il est intelligent de ta part que de me comparer à toi… Une succube contre une matriarche… J’adorerai voir ça…

-Me pousse pas à bout sinon tu risques de le voir bien assez vite… » Répondis-je en haussant les épaules et en souriant, ce n’était que de la provocation de sa part, mais je devais tout de même me montrer forte.

« Oh, mais je veux voir ça. » Dit-elle avec un réel sourire jovial. « Je t’ai vu sermonner Cherba… En réalité, je n’aurais laissé personne d’autre que moi faire ça, ou encore l’une de mes nurses si elle a une bonne raison. Mais je dois dire que je t’ai trouvé très convaincante et je te propose de mettre en pratique ce que tu lui as dit. Un défi entre toi et moi, sans le moindre pouvoir l’une, comme l’autre.

-J’ai donné aucun conseil, juste de se montrer fort ! » Me justifiais-je alors que mon sourire s'effaçait peu à peu.

« Eh bien c’est peut-être ce genre de conseil qu’il te faut, te montrer forte ! » Dit-elle en se dressant sur sa chaise pour se rapprocher de moi. Pratiquement couchée sur la table, la changeline m’observait dans le blanc des yeux, attendant que je rentre dans son jeu idiot. Cela ne pouvait que mal finir, c’était certain, je n’avais même pas besoin de voir les regards de Chicha et de Little Star pour comprendre qu’ils voulaient m’entendre dire :

« J’accepte, cafard ! »

Je reportais alors mon attention sur Chicha en souriant pour le voir se frapper le crâne du sabot en secouant la tête.

« Hey, fais pas la tête toi, je te rappelle que c’est moi qui t’ai séduit.

-Avec un couteau sous la gorge ! » Lâcha-t-il en frappant légèrement sur la table.

« Oh, c’est bon, tu ne vas quand même pas me le reprocher éternellement.

-Peut-être, mais tu n’auras pas droit à tes couteaux pour ce défi, et si je me souviens bien, j’ai eu droit à une succube enragée lorsque nous nous sommes rencontrés. »

Je me mis à réfléchir en pinçant les lèvres. Oui, j’avais utilisé mon pouvoir sur Chicha pour le séduire la première fois, mais par la suite je ne l’avais plus fait… la première fois n’était pas forcément la plus dure. Je reportais mon attention sur Little Star, elle par exemple, je l’avais séduite sans le moindre pouvoir…

« Je te rappelle que tu m’as sauvé la vie et que c’est toi qui m’as clairement fait comprendre que je pouvais te remercier en passant dans ton lit. » Répondit-elle comme si elle lisait dans mes pensées. Merde !

Chrysalis était toujours allongée sur la table et gardait la tête appuyée sur l’un de ses sabots en attendant que je me décide à bouger. Rien n’était perdu, il me restait toujours un plan de secours.

Je me levais lentement de ma chaise avant de me retourner doucement et de me mettre en marche vers mon appartement.

« Cadance, tu n’es quand même pas sérieusement en train de penser pouvoir fuir ? Tu sais que j’habite chez toi ?

-Je t’entends pas ! » Hurlais-je alors que je me mis à galoper au beau milieu de la rue.

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Note de l'auteur

Bonjour à toi,

Alors, désolé de ne pas avoir tout de suite fait cette note en bas de page pour discuter un peu avec toi. J'étais assez pressé le jour où j'ai placé ce chapitre et il a été validé in extrémis. Donc, maintenant que j'ai pris un peu de temps pour toi, laisse-moi te montrer un petit truc.

J'ai le plaisir de t'annoncer que la furry, qui est la personne qui m'a déjà offert une figurine de la danseuse dans sa malle (le fond est en velours, c'est très agréable), a décidé d'en recommander une autre (je n'ai plus le lien de l'artiste, donc si possible, je le redemanderai à la furry. Donc, je te présente avec un très large sourire, Chicha avec son nouveau look :
[lien]
[lien]
(tu commences à bien imaginer le truc dans ta tête maintenant ? Oui, ce n'est absolument pas pratique pour galoper.)

Bref, j'en ai moins, mais tout de même, voici quelques questions qui me permettrons moi de voir rapidement si mes objectifs sont réussit. Tu es libre de ne pas y répondre.
-Est-ce que tu ne trouves pas le chapitre un peu trop long ?
-Comment trouves-tu le nouveau look de Chicha ?
-Est-ce que tu n'as pas eu de difficulté à suivre les explications de Cadance que ce soit quand elle saute sur Cherba, ou même quand elle demande à Chrysalis pourquoi elle se sent attirée par lui ?
-Est-ce que tu aimes ce changement vis-à-vis de Cherba qui n'en ai jamais qu'à son deuxième chapitre de présence. (c'est même pas un mi-temps, sérieux)
-Penses-tu que Cadance a ses chances de gagner ?

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Ponycroc
Ponycroc : #47115
@AuRon : Alors oui, Cadance, à cause de l'exposition intenpestive que je fais par crainte que les gens ne comprennent pas tout, cette dernière souffre énormément d'un manque de caractère et se contente de poser des questions pour pousser encore cette exposition.

Chrysalis est quelqu'un de fier, qui aime prendre son temps, pour moi, ça ne me choquais pas de la voir autant balancer tout son lore, vu que ça correspond au personnage. En réalité, cette exposition est celle que je trouve la moins gênante. Il est clair que Chrysalis est importante dans la fiction et elle le fait déjà bien savoir à elle toute seule.

Pour moi, il était capital de montrer que Cadance se pose des questions sur le fait que tout à coup, sans raison particulière, elle se met à "aimer" Cherba et le but était de mettre une cause dessus. Ce n'est pas de l'amour, c'est juste le lien qui provoque ça. Bien sûr, Cadance ne peut pas le deviner, mais il est vrai qu'elle répète beaucoup la chose.

Regarde les liens de la figurine de Chicha et tu verras que ça fait quand même pas vraiment Draqueen.

En tout cas, merci pour ton commentaire, et j'espère que tu supporteras le chapitre suivent (je te cache pas qu'il n'est pas mon préféré).

Il y a 9 mois · Répondre
AuRon
AuRon : #47067
Aaaah !! Un chapitre bien plus intéressant ^^

Peut-être que Cadence jouenun peu trop les imbéciles cela dit. Surtout que tu répètes pas mal de truc sur les succubes que ça en devient lassant.

Mais le truc que j'adore, c'est les motivations de Chrysalis :D elle, malgré qu'elle est un peu en mode «j'expose mon lore, faites place» reste un personnage véritablement fare. Il était temps que Cadence abandonne son régime de vegan, maintenant c'est trois compagnons pour trois fois plus de fun.

Passons aux réponses :
- chapitre un poil interminable certe mais pas comme tu l'entends. C'est ces explications sur la fin qui sont répétitives et que globalement ont connaît déjà.

- le nouveau look de Chicha en mode draqueen est ridicule.

- - des difficultés ? T'es sérieux là ? Le truc c'est que tu nous le rabâches deux ou trois fois xD.

- honnêtement, le personnage en lui même reste peu attractif pour le moment. Il sert surtout à développer Cadence mais qui sait ? On peut être surpris.

- mec, Chrysalids est déjà complètement out of score. Cadence à aucune chance.
Il y a 9 mois · Répondre
yolo157
yolo157 : #47001
Je me suis bien marré sur ce chapitre ^^. Très agréable à lire.
Il y a 9 mois · Répondre

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