Chapitre 24: Le prix de la loyauté

Azral Ombrefeu, l’un des membre de la Garde de Nuit, serra sa lance de ses sabots tremblotants et sentit des gouttelettes de sueur glacée perler sur sa fourrure tandis qu’il contemplait les cadavres gisants à ses pattes sur le sol poli du palais. Il n’était jamais agréable de trouver des frères et sœurs batponeys de la garde rapprochée de Sa Majesté Luna morts et encore moins à proximité de la chambre de cette dernière.

Azral était seul, et il se tenait dans ce couloir éclairé par la lumière des rayons du soleil qui traversaient les vitres des fenêtres. Les murs étaient recouverts de grandes tentures de velours noir, entre lesquelles étaient accrochés des boucliers et des armes entrecroisées portant le croissant de lune de la princesse de la nuit.

Le batponey frissonna ; il était membre de la Garde de Nuit depuis des années, il avait des nerfs d’acier et un sang-froid à toute épreuve… Mais là, comme des déchets entassés dans un large caniveau ; une quinzaine de ses camarades mutilés gisant dans le sang ainsi que de nombreux autres domestiques du château qui avaient subi le même sort. Même l’estomac d’un soldat d’élite avait ses limites.

« Que s’est-il passé ? Pourquoi personne n’avait entendu ? Pourquoi n’avais-je rien entendu ? » se tourmenta le soldat.

Azral n’était pas particulièrement vif d’esprit, mais il nota tout de même que les victimes paraissaient terrorisés. Comme s’ils avaient vu un démon monstrueux tout droit sorti du Tartarus et qu’aucun d’entre eux n’avaient essayé de se défendre.

Serait-ce le monstre gigantesque à tête de chien qui serait revenu pour assouvir sa vengeance ? On y repensant, le batponey sentit que son cœur allait éclater.

Le garde avança en enjambant les corps sanguinolents, et se dirigea vers la chambre de sa maîtresse. Il aurait pu fuir et chercher du secours, mais si sa princesse était blessée ou pire encore, il se devait de savoir. Car après tout, n’avait-il pas prêté serment de servir et de protéger la Dame de la Nuit jusqu’à sa mort ? Il ne pouvait pas se permettre de partir tant qu’il ne saura pas ce qui est arrivé à Luna. Que dira-t-on de lui ou de la garde elle-même si l’un des leurs s’enfuyait alors que leur princesse avait certainement besoin d’elle.

Et pourtant que pourrait-il faire ? Lui tout seul, là où au moins une quinzaine de guerriers avaient trouvé la mort ?

Il tressaillit soudain ; son regard se figea et les poils de son corps se hérissèrent. Surgissant des appartements royaux, venait d’apparaître une grande silhouette.

Azral vit sa princesse, mais très différente. Noire comme le néant, des yeux de rapaces nocturnes prêts à s’embraser, une crinière éthérée d’un bleu sombre et glaciale et surtout couverte de sang rouge… Du sang de poney.

L’étalon sentit ses muscles se crisper et caressa sa lance avec fébrilité, à moitié d’avis de planter le fer dans le cœur de cette créature avant même d’avoir la certitude que s’était bien Luna qui le toisait comme un déesse en colère. Mais il redoutait, à juste titre, ce qui se passerait s’il ratait son attaque.

L’alicorne noire regarda Azral Ombrefeu avec une haine et une colère à peine contenue.

-Toi aussi tu veux me tuer ? demanda-t-elle en dévoilant des crocs blancs maculée de sang.

L’étalon avait reculé, passa sa langue sur ses lèvres et le sang se glaça dans ses veines quand il lut au fond des yeux de la jument divine une envie meurtrière.

-M… Majesté ? dit-il sans comprendre la question. Je ne comprends pas.

-Comme les autres… Tu me trahis pour de l’or, des titres et des terres ? Comme les autres tu essaies de m’assassiner dans mon lit pendant que je dormais ?

A mesure que le poney s’éloignait, la princesse s’approchait en marchant sur le charnier en emportant avec elle une aura de noirceur et de peur.

-Non.. Majesté… Non ! Je vous suis loyal ! Je l’ai toujours était, implora le batponey qui ne pouvait pas se faire à l’idée qu’autant de membres de la Garde de Nuit avaient tenté de tuer leur propre princesse.

Ces étalons et juments auraient fait avaler les pièces d’or et les promesses à l’impudent qui oserait leur demander de faire quoi que ce soit qui nuirait à la Dame protectrice de la nuit. C’était impossible qu’ils aient pu faire une chose pareille. Pas ce nombre-ci. Et pourtant, ce fut bien Dame Luna, la princesse d’Equestria, qui confirma haut et fort la félonie de la Garde de Nuit aux oreilles rabattues d’Azral Ombrefeu. Et qui était-il pour oser mettre en doute sa parole ?

Si des poneys de la garde étaient corrompus d’une manière ou d’une autre, Celestia l’était également. Mais pas Azral Ombrefeu, jamais il ne trahirait sa princesse.

-Ils disent ça. Et quand on a le dos tourné, ils se précipitent sur le premier objet pointu pour me poignarder, continua de parler la princesse avec toute la haine possible. A peine que j’ai ouvert les yeux, une sauvage de zèbre avait tenté de m’emprisonner dans un cercle de rituel immonde pour, soi-disant, « m’aider » en me traitant de « possédée ». Et quand j’ai appelé au secours cette vermine que tu vois pars terre ont préféré croire en la parole d’une sauvageonne du sud que moi. Leur princesse. Pour leur félonie, je les ai tous tué…

Pour toute réponse, le soldat s’inclina devant elle, la lance posé au sol, tout du moins sur les cadavres de ces prétendus félons, et déclara quelque chose qui pourrait apaiser la furie de Luna de la Nuit.

-Votre Grâce, si vous jugez que je ne suis plus digne de votre confiance et que je suis une menace pour votre personne, je vous offre ma tête sans hésiter… Quoique…

-Quoique ? interrogea l’aliconre ensanglantée se demandant si s’était une preuve de loyauté sincère ou juste une pathétique excuse de sauver sa vie de parjure.

-Je me lamenterai de ne plus pouvoir vous servir, Majesté, conclu-t-il encore plus nerveux qu’avant.

Il ferma les yeux, si fort qu’il n’osa plus regarder en face sa princesse de cet état. C’est alors qu’il sentit un sabot lui soulever le menton et une douce voix lui dire.

-Regardes-moi Azral.

Il obéit. Et à son grand soulagement, la personne qui se trouvait devant lui, n’était autre que Luna. La Luna d’avant, qui n’avait plus rien de la monstruosité ténébreuse qui marchait sur le corps de ses propres soldats.

Il vit un visage emplit de compassion.

-Où se trouvent les autres ?

Encouragé par l’heureux changement de comportement de sa maîtresse, le batponey s’empressa de parler en se remettant sur ses pattes.

-En patrouille dans la ville et à l’extérieur du palais, votre Grâce.

-Et LameNoire ?

-Je pense qu’il est dans les jardins royaux, avec une Lettre… Oui…Oui une lettre.

L’alicorne bleue fronça les sourcils sans dire un mot ; songeuse. Ce qui mit à nouveau Azral Ombrefeu mal à l’aise. S’imaginant la princesse redevenir… Terrifiante.

-Dans les jardins… murmura-à nouveau la princesse.

-Vous pensez qu’il est de mèche avec les assassins ?

En désignant les juments et les étalons morts portant l’armure noire d’ « assassins », Azral essaya, en réalité, de se persuader que c’était vrai. Même pour LameNoire, le champion de la Garde de Nuit, le meilleur d’entre eux. Pourquoi ont-ils fait ça ?

-Je vais le chercher, dit-elle tout simplement.

Alors qu’elle se mit en route, la jument royale s’arrêta un instant. Et se retourna vers le batponey qui la suivait.

-Tu n’es pas un traître, Azral Ombrefeu, mais j’ai senti ta peur quand tu as prononcé tes mots. Que si je t’estimais indigne de confiance tu m’offrirais ta tête.

Le teint du soldat devint pâle quand il vit la corne magique de Luna s’illuminer.

-Et je ne peux faire confiance à un lâche.

Bien avant que le batponey puisse dire quoique ce soit, il sentit une épée lui traverser le torse par derrière et ressortir. Hébété, il examina le bout de fer et redressa la tête pour voir Luna disparaitre dans les couloirs.

Il avait rêvé, depuis qu’il était un poulain, de pouvoir servir directement la jeune sœur de Celestia, de pouvoir suivre quelqu’un qu’il pourrait aimer plus que tout, de protéger avec loyauté quelqu’un de digne et noble d’entre tous, quelqu’un qu’il pourrait dire avec fierté ; elle est ma princesse légitime.

-Je… Vous… Aimez…. J… Loyal…

Ses gargouillis s’éteignit et ses yeux noyés de larmes perdirent de leurs éclats de vie quand le corps d’Azral s’effondra au sol rajoutant un mort de plus dans se tas de braves qui avaient payé le prix de leur loyauté.

Rarity examina de haut en bas et inversement l’affreuse statue qui trônait au centre du labyrinthe des jardins royaux. L’art est quelque chose de subtil et de compliqué à comprendre, mais tout de même ; celui qui avait bien put sculpter une espèce de créature hybride dans une position grotesque qui semblait l’aire de chanter, avait bien l’esprit dérangé. Mais après-tout, la folie n’est-il pas le fardeau de tous les grands artistes ? Elle doit bien avouer qu’elle avait une folle imagination quand elle confectionnait ses robes pour les vendre dans son magasin à Poneyville.

Poneyville… Il va falloir un jour y retourner avec ses amies. Voilà plus d’un mois que la licorne perlée l’avait quitté en accompagnant Rainbow et Fluttershy afin qu’elles bénéficieraient des meilleurs soins et d’un endroit où elles seraient en sécurité durant leurs convalescence. Sa petite sœur lui manquait, ses parents aussi ainsi que son magasin. Demain, certainement…

Mais serait-elle à nouveau capable de recoudre ? De reprendre en sabot son travail ?

Depuis qu’elle avait sentit qu’elle pouvait tuer, Rarity n’était plus vraiment la même. Parfois la licorne croyait voire ce loup déformé qui emprisonnait Fluttershy sous ses crocs abominables. Les démons qui sortaient de ce tourbillon magique pour s’en prendre aux poneys. Et aussi… Ulrik. L’humain qui pouvait massacrer une masse entière de monstres avec sa seule épée. Un monstre lui aussi… De chevalier, il n’avait que le titre. Depuis qu’il avait montré son ingratitude envers Twilight et agressé Rainbow, à ses yeux, le chevalier borgne n’était finalement qu’une simple brute sanguinaire sans aucune valeur, sans aucun honneur. Et l’idée que la licorne eut accomplit un geste semblable au colosse la répugnait et l’effrayer. Elle pouvait prendre une vie, même si cette vie était celle d’un démon.

Le bruit de sabots résonna sur les dalles de pierre qui formait le chemin du labyrinthe de verdure. Sans réfléchir, Rarity tourna la tête en direction du bruit pour savoir qui venait.

C’étaient des poneys vêtus de mentaux sombres à capuchon, qui toisait la licorne avec des yeux mauvais. L’un des encagoulés s’avança vers elle l’air menaçant.

-N’approchez pas ou je crie à la garde, avertit Rarity en s’adossant contre le piédestal de la statue de marbre blanc.

-Ils sont bien trop occupés pour venir pour toi, jolie pucelle, railla l’assaillant avec une voix de jument. Il y a quelqu’un qui souhaite te voir. Alors tu as intérêt à nous suivre bien gentiment ou il va falloir entailler ta délicate peau.

-Moi… dit-elle complètement ahurie. Je ne suis qu’une couturière, je ne suis même pas de sang noble, je n’ai pas non plus une grande fortune. Pourquoi moi ? Qu’ai-je fais ? Je n’ai rien à donner.

Le contacte froid et acéré d’une dague piqua le museau de la licorne perlée qui tremblait de peur.

-Il y a bien une chose qu’un étalon donnerait toute sa fortune jusqu’à sa santé pour pouvoir la posséder.

Rarity venait de comprendre avec horreur la raison en entendant les rires moqueurs des bandits. La jument masquée saisit Rarity par le coup tout en plaçant un sabot sur sa bouche, mais celle-ci loin de se laisser faire se battit en essayant de hurler de toute ses forces, mais hélas elle senti une vive douleur sur son flanc droit et un liquide chaud ruisselait sur sa fourrure blanche jusque dans l’herbe comme une offrande à la statue portant l’inscription de « Discord ».

Le souffle coupé par la douleur, elle regarda la ponette au sombre mentaux lui susurrer à l’oreille :

-Recommence et je te donnerai un autre baiser ma jolie, dit elle en montrant la lame rouge du sang de Rarity.