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La maladie venue d'ailleurs

Une fiction écrite par GeekWriter.

Chapitre 9

Octavia et Vinyl, à bord de leur charrette de transport, s'approchaient lentement des limites de la ville. Pour l'instant, c'était la violoncelliste qui tirait le transport, mais si elle pouvait maintenir son lourd instrument et qu'elle était une terrestre, elle restait très peu sportive. Les efforts de longue haleine, ce n'était pas pour elle. C'est donc au bout d'un kilomètre de chemin qu'elle arriva à la douane, la langue pendante, sur le point de s'effondrer.

"Vous n'étiez pas censé repartir en train ? questionna le douanier avec prudence.

- Il était plein, on a pu y mettre que quelques unes de nos affaires, expliqua une violoncelliste haletante.

- Étrange, répliqua le douanier. Je vais vérifier vos affaires dans votre carriole, d'accord ?"

Les deux artistes échangèrent un regard paniqué, mais ne pouvaient rien faire de plus. Que pouvaient elles faire après tout ? Provoquer une bagarre avec la Garde ? Même avec toute la bienveillance et l'appréciation de Célestia, elles n'échapperaient pas au cachot. Vinyl jeta un regard noir au défenseur de la loi, mais celui ci ne s'en soucia guère.

"Oh là, mon vieux, ce ne sera pas la peine, lança un grand étalon vert portant un stetson.

- Ouaip, ajouta un terrestre de taille plus modeste portant borsalino et cravate noire. Pizza Slice vous remercie de votre zèle, mais on prend le relai."

Les deux poneys s'approchèrent du véhicule et descellèrent la musicienne. Puis, ils l'aidèrent à monter dans la carriole.

"Vous exagérez mesdemoiselles, reprocha avec douceur le terrestre chevaleresque. On vous a pas dit que l'on venait s'occuper du transport ?"

La DJ secoua négativement la tête, son visage s'éclairant d'un très grand sourire. La violoncelliste, quant à elle, en profita pour disparaître sous la bâche recouvrant les quelques affaires du duo, histoire de se reposer à l'arrière.

S'attachant aux rênes en cuir, les deux solides mafiosos tirèrent l'attelage qui sortit de la ville. La licorne au crin bleu électrique resta pour sa part sur le bord. Elle voulait profiter de la vue, qui, à cette heure des plus matinales, était magnifique.

***

Sketchy Paw, dessinatrice à Ponyville, prenait son thé du matin. C'était une terrestre à la robe noire et au crin jaune. Sa marque de beauté représentait une empreinte animale sur laquelle reposait une plume à dessin. Tenant sa tasse entre ses deux sabots, la jument buvait à petites gorgées. Elle se tenait à sa fenêtre, observant le soleil se lever. Une fois la lueur rougeoyante de l'aurore dissipée, elle rendit honneur au soleil en lui présentant sa tasse.

Un grand fracas retentit au moment même où elle termina son amer breuvage. Le courrier était arrivé ! Elle se leva sans précipitation, ouvrit sa porte et accorda un sourire à la pégase grise s'étant écrasé contre sa demeure.

"Bonjour Derpy, j'ai du courrier aujourd'hui ?" demanda d'une voix calme et claire l'artiste.

L'équidée ailée reprit ses esprits, remit sa casquette de facteur en place, et tira une enveloppe de son sac de selle. Elle tendit la lettre à la destinataire et chercha à la regarder malgré son strabisme divergeant.

"Oui, une lettre de Geek Writer, Manehattan, annonça la factrice.

- Ah oui ? demanda la terrestre avec joie. Donne moi donc cela, je te fais un thé."

L'équidée au crin blond remit alors de l'eau à chauffer, prépara diverses feuilles et proposa quelques muffins. La factrice les accepta avec joie, ses yeux non symétriques brillèrent d'exultation et c'est avec grand peine qu'elle se retint pour ne pas passer pour une sauvage. Après avoir servit le thé, la dessinatrice ouvrit l'enveloppe et la parcourut rapidement. Sa joie descendit aussi vite que le nombre de muffins à la lecture du bout de papier. Au fond d'elle même, elle sentit une véritable bouffée d'angoisse grandir. Normalement, elle aurait tout laissé sur place pour foncer à Manehattan, mais son amie était formelle, le risque était bien trop grand. Vérifiant la date sur la lettre, elle se rendit compte qu'elle datait d'il y a plus d'une semaine, bientôt deux. Elle replia la lettre avec douceur et la rangea dans l'enveloppe, oubliant un instant la présence de Derpy Hooves, elle prit l'un de ses crayons et traça une croix noire deux semaines après la date actuelle. A la grande course d'automne, elle devra considérer son amie comme perdue.

***

Bien des kilomètres séparaient maintenant les voyageurs de la mégalopole. Les deux terrestres étaient bien plus efficaces pour tirer la charrette que les juments et c'est d'un bon pas que le groupe progressait. Les routes se firent de plus en plus champêtres. Le convoi traversait les collines aux alentours de Fillydelphia, les champs de céréales couvraient tous les horizons à perte de vue. Les deux conducteurs firent halte pour prendre du repos et se dirigèrent vers l'intérieur de la bâche couvrant les bagages. Une initiative aussitôt contrée par les deux artistes :

"Que faites vous donc, messieurs ? questionna une Octavia soutenue par le regard désapprobateur de la DJ.

- Non mais, vous inquiètez pas, on sait qu'elle est là, rigola Ranger Walker avec un geste de mouvement apaisant.

- C'pour ça qu'on est venu vous aider d'ailleurs, continua Gate Keeper. Oh ! Geeky !

- On ne voit pas du tout de quoi vous voulez parler, tenta désespérément Octavia qui sentit une sueur froide lui envahir la nuque.

- Elle est dans l'étui de votre violoncelle n'est ce pas ? devina le terrestre vert. Il n'y a que là dedans qu'elle peut se dissimuler."

Derrière les deux juments, le couvercle du lourd instrument se souleva seul, laissant une ponette grise s'extirper avec difficulté, les membres engourdis par son immobilité prolongée et les bandages un peu sales.

"Pfoua, j'en pouvais plus, ronchonna la journaliste avec soulagement avant d'inspirer un grand coup. Bon sang, par Célestia, ça fait du bien de respirer l'air pur et non vicié de la ville. Ce mélange d'arômes venant de multiples plantes. Ces parfums non dissimulés derrière celui du béton et de la pollution."

Cette soudaine envolée lyrique fit sourire les deux mâles, presque attendris. Les deux amies observèrent l'écrivaine à leur tour, abasourdies par la confiance qu'elle plaçait sans aucune justification sur les deux étalons.

"C'est comme ça qu'il vous met en sécurité tous les deux ? ironisa l'artiste qui plaça son chapeau sur sa tête. Il ne s'est pas dit que ce serait bien plus dangereux pour vous de me suivre ?"

Vinyl tapota doucement sur l'épaule de Geek Writer avant de désigner les deux mafieux, l'air interrogatif.

"Celui à cravate, c'est Gate Keeper, le grand au chapeau, c'est Ranger Walker, répondit la jument au crin mauve. Je ne sais pas encore si ce sont des amis, mais visiblement, leur boss leur a demandé de me suivre.

- Ah non, intervint aussitôt le terrestre vert. Sur ça, tu as tort très chère.

- Ranger a été remercié, expliqua Gate avec un sourire. Moi non, mais le boss m'a conseillé de partir de la ville. On s'est retrouvé par hasard dans la nuit, on a partagé nos infos, et on en a déduit que tu partirais avec ces deux là.

- Vous avez bien failli nous avoir d'ailleurs, ajouta l'étalon chevaleresque avec un clin d'oeil. On pensait que vous partiriez en train. Pourquoi vouloir partir à sabot mesdemoiselles ?

- Pour cela, il faudrait demander à votre copine journaliste, se contenta de déclarer Octavia en haussant des épaules. D'ailleurs, c'est elle qui a établit l'itinéraire."

La jument distinguée prit alors une carte d'Equestria sur laquelle, effectivement, un fin tracé rouge descendait jusqu'à Baltimare, puis remontait tout le fleuve jusqu'à Ponyville. Les deux anciens voyous hochèrent la tête avant de se tourner vers l'écrivaine qui s'était emparée de parchemins et de plumes, écrivant lentement, le regard serein. Le chemin choisi n'était pas le plus court, mais il avait l'avantage de ne pas être évident pour d'éventuels poursuivants. Une fois sur le fleuve, il sera encore plus ardu de les pister. Cependant, une fois arrivés aux horizons des ruines du premier château des soeurs royales, les poursuivants pourraient bien être le cadet de leur soucis. En effet, cela signifiait aussi traverser l'Everfree Forest, qui, en cette saison, grouillait de créatures peu amicales.

"Ben heureusement qu'on est là, commenta Gate Keeper avec amusement. Sinon ce serait votre DJ qui tirerait votre charrette tout du long."

Si Vinyl était douée de parole, elle aurait certainement rejoint les rires des deux mâles sous le regard vexée de la musicienne. Elle se contenta de soubresauts nerveux, la bouche ouverte en un rire moqueur parfaitement silencieux.

La route reprit et les trois juments se serrèrent à l'arrière. Vinyl, silencieusement, posa sa tête sur l'épaule de Geek, lisant ce qu'elle écrivait sans que l'artiste n'en soit nullement perturbée. N'ayant rien d'autre à faire que d'observer les champs et le ciel, la violoncelliste décida elle aussi de s'intéresser à la poussée créative de sa compagne de voyage.

"Une nouvelle histoire ?

- La dernière en réalité, précisa rapidement la ponette grise. Je prépare une fin à l'histoire de mon personnage au cas où il m'arrive quelque chose."

Les deux musiciennes s'échangèrent un regard inquiet, plus que surprises de ce genre de réponse venant plus souvent d'un vieux poney en fin de course qu'une jeune artiste en pleine santé, et ayant tout l'avenir devant elle.

Les deux tracteurs n'avaient pas perdu une miette de cet échange et ils croisèrent leurs regards. A voix basse, Ranger s'adressa à son camarade mafiosi :

"Je crains bien que l'on ait raison, avança le terrestre à cravate.

- Oui, acquiesça le grand vert. Lorsqu'elle s'est battu contre mon frère, j'avais l'impression qu'elle ne se défendait qu'au minimum, comme si elle souhaitait abandonner sa vie.

- Elle était prête à ne plus bouger alors que Jack lui fonçait dessus, renchérit Gate Keeper. Il faudra la surveiller au plus près jusqu'à Ponyville. Une fois là bas, on tâchera de prévenir les éléments de l'Harmonie de son cas. Le Rire est une solution viable.

- Espérons, conclut Ranger."

Le voyage vers Baltimare se termina sans histoire. Le groupe se trouva un petit hôtel bon marché dans lequel ils posèrent leurs affaires. Malgré la désapprobation des deux mafieux, les trois juments proposèrent une petite balade en ville, histoire de se trouver un bon restaurant et peut être, faire un peu de shopping.

"Tu vois Ranger, débuta Gate Keeper. C'est pour ça que j'évite d'avoir une ponette très spéciale. Pour éviter ce genre de souffrance.

- Ha ha, rit alors le terrestre à stetson. Tu devrais essayer les arts martiaux, tu verras que tes craintes peuvent être contournées par bien des façons."

Fort heureusement pour ces étalons, seule Octavia semblait intéressée par la mode, et après avoir acheté une robe, ils passèrent aux boutiques d'instruments de musique, d'électromagique et enfin, la journaliste insista pour aller dans une librairie. A l'intérieur, Vinyl qui n'avait pas trouvé son bonheur dans les boutiques précédentes, acheta discrètement quelques ouvrages de Geek Writer. Elle n'avait jamais lu son amie, trop occupée entre son étude personnelle de la musique, les concerts, les événements, son travail l'obligeant régulièrement à voyager... Elle espérait pouvoir enfin profiter de la plume de son amie, autrement qu'à travers un journal l'obligeant à remplir un cahier de charge littéraire. Octavia, elle, aidait la journaliste à parcourir le rayon "Culture étrangère".

" T'es certaine que c'est ici que tu trouveras ce qu'il faut ? demanda la musicienne qui ressentait la faim arriver petit à petit.

- Les bibliothèques sont fermées à cette heure, répondit l'écrivaine. Mais j'ai bien peur que l'on ne trouve rien ici, il n'y en a que pour les dragons et les autres royaumes poneys.

- Le continent des zèbres serait atroce il paraît, argumenta la terrestre au crin noir. Tout ne serait que désert, jungle et autre marais inhospitaliers. Les créatures non magiques de là bas seraient bien plus féroces qu'ici.

- Ça, hélas, on n'en sait rien, ce ne sont que des propos de poneys recueillis auprès d'un immigré, et certainement exagérés ensuite pour dire que : chez nous, c'est mieux que là bas. Mais en vérité, on a environ que quinze à vingt zèbres immigrant chez nous par an, et souvent, ce n'est pas par choix."

Octavia n'osa pousser la curiosité plus loin, son interlocutrice avait le regard des gens s'apprêtant à vous assommer avec une avalanche de connaissances, dont vous n'êtes pas sûr d'en vouloir de peur qu'une indigestion pointe le bout de son museau. Mais le malaise que ressentait la musicienne vis à vis de la littéraire était bien plus profond : Vinyl la collait un peu trop à son goût. Peut être parce qu'elle l'avait toujours refusé, mais Octavia n'avait jamais laissé la DJ se poser sur son épaule comme elle l'avait fait durant le voyage. A vrai dire, lorsque la violoncelliste composait, elle préférait se couper de tout et de tout le monde, y compris sa meilleure amie. La moindre perturbation la déconcentrait, et parfois, dans la frustration que provoquait le manque d'inspiration, elle pouvait devenir soupe au lait. Serait-elle jalouse ? Alors qu'elle y pensait, elle se mit à rougir lentement. Non, ça ne pouvait pas être cela. Octavia vivait pour son art et n'avait que peu de place pour ce genre de futilité. Mais si Vinyl et Geek Writer pouvaient prendre un peu de distance l'une de l'autre, ce serait pas mal. Ce serait même très bien, elle pourrait retrouver un peu de sa sérénité.

Le petit groupe se retrouva dehors et la violoncelliste décida d'inviter tout le monde à l'un de ses restaurants favoris de Baltimare. Cela allait lui faire du bien et elle voulait absolument faire découvrir à tous une cuisine un peu spéciale. La jument beige entraîna tout le monde dans le quartier du port, fourmillant de restaurants, de bars et de clubs de danses. C'était à la fois le ventre et le coeur de Baltimare. C'était ici que les restaurants se réapprovisionnaient de denrées étrangères avant de les proposer à leurs clients.

Octavia mena ses compagnons de route à l'un des restaurants les plus atypiques que les poneys connaissaient : rien que l'architecture du bâtiment donnait aussitôt un sentiment d'exotisme avec sa façade d'or, ses petits piliers extérieurs soutenant un toit à la fois courbé et triangulaire, et ses portes coulissantes en papier très fin.

Les cinq camarades eurent le souffle coupé une fois passé le seuil, submergés de tous les côtés par des dessins d'un style inconnu, une douce musique venant d'instruments inconnus et des employées portant des sortes de tuniques de soie légère ressemblant aux kimonos que l'on se devait de porter au dojo. L'une d'elle, le visage couvert d'un maquillage blanc et les lèvres peintes en rouge s'inclina devant les nouveaux clients et les conduisit à leur table, où une fois installés, la violoncelliste se chargea de commander un assortiment de mets divers.

"Je vois, ils viennent de l'état du Sabre Clair, expliqua Geek Writer.

- Comment le sais-tu ? ! s'exclama Octavia qui sentait son effet de surprise s'envoler.

- J'ai une très bonne amie qui vient de là bas, indiqua calmement la journaliste."

Au grand désespoir de la violoncelliste, l'écrivaine commença à déballer ce qu'elle savait sur le Sabre Clair. Elle sursauta légèrement quand elle ressentit sur son sabot celui de Vinyl, qui lui adressa un regard à la fois moqueur et attendri. Un regard qui disait : "Je sais ce que tu ressens, et crois moi, tu ne risques rien grande bêta."
Un regard qui fit rougir la terrestre distinguée tout en lui faisant baisser la tête.

***

La lune était bien haute dans le ciel et Sketchy Paw éternua. Tiens, on parlait d'elle !

Elle installa l'un de ses derniers tableaux au mur et l'observa. Sa patrie ne lui manquait aucunement, mais elle aimait dessiner dessus. Ici, la représentation de la peine capitale : l'ingestion de fugu. Un poney sur un million seulement y survit et ce miracle est sacralisé sur tout l'empire. Il y avait eu deux rescapé sur l'histoire entière de l'état, son père était le deuxième, et c'est ainsi qu'il était devenu l'empereur. Pour remercier le Soleil de ce miracle, il avait perpétué à la lettre le code qu'il contestait autrefois.

Le pays était toujours aussi militarisé.
Les dragons étaient toujours les véritables maîtres.
Les licornes et les pégases étaient toujours mutilés pour effacer les différences.

Il était obligatoire d'ingérer de la viande au moins une fois par mois afin de "garder un esprit guerrier".

Elle ouvrit un coffre au pied de son lit et en sortit un petit objet courbe : son sabre personnel. Au Shinai no Gekkou, chacun avait son sabre personnel, ainsi en avait décidé la loi. Le sien était un modèle court que l'on accrochait au sabot et qui épousait le bras de celui qui le maniait, mais il y avait des modèles de bouche, de crinière et de queue.

Au delà de la South Luna Ocean, à l'ouest d'Equestria, se trouvait son archipel natal que les locaux, par manque de connaissance, appelé Sabre Clair. On y vénérait la Lune tout en respectant le soleil. Le concept le plus important n'y était pas l'Amitié, mais l'Honneur. L'Honneur était un code incroyablement strict qui régissait la moindre vie de toutes les couches de la société, aussi étouffant qu'un collier d'acier trop serré. Fort heureusement, il y a une décennie, le pays s'était ouvert au commerce. Ce qui avait permis à certains poneys de s'enfuir.

Mais tout cela, c'était le passé. Aujourd'hui, Sketchy était heureuse de sa situation. C'est avec bonheur qu'elle ne consommait plus aucune protéine animale. Elle gardera toujours une parcelle de son ancien code dans son âme, mais l'Amitié et l'Harmonie étaient des préceptes qu'elle préférait, de très loin. Les seules choses qu'elle gardait de sa patrie d'origine, étaient son sabre et son style de dessin.

***

Alors que l'on servait leurs plats, Octavia avait blêmit et Ranger Walker avait un regard très sombre. L'ambiance était tombée dans la gravité. Les serveuses, pourtant attentives à ce qui se disait, restaient stoïque. L'oeil expert de garde du corps de Gate Keeper remarqua des détails donnant raison à ce que racontait Geek Writer : L'une des employée avait d'étranges et minuscules bosses au niveau de son dos, presque imperceptibles à travers le tissu du kimono. Certains employées portaient un masque ou un bandana solidement noué au front.

Vinyl frissonna un instant et porta un sabot à sa corne, la mine épouvantée. Octavia, sensible au stress de son amie, lui frotta timidement l'épaule du paturon. En réponse, la licorne blanche lui adressa un sourire chaleureux.

Les serveuses installèrent alors différents plats sur la table qu'Octavia s'empressa de présenter :

" Alors, ici, vous avez ce que l'on appelle des makis. C'est fait avec du riz, quelque chose que l'on ne voit pas à Equestria. A l'intérieur, on peut trouver de la carotte, de l'avocat et d'autres mets qu'ils cuisinent je ne sais comment, c'est tout bonnement délicieux. A côté, de la soupe faite en partie avec des algues, très digeste et juste divin pour se réchauffer. Oui Vinyl, c'est pour ça que je fais mes concerts d'hiver ici. Arrête de me regarder comme cela maintenant."

Alors que la ponette beige termina de présenter les autres plats, la licorne grise s'empara d'un maki par la magie et goûta avec précaution. L'explosion de saveurs à l'intérieur de sa bouche la prit par surprise et les deux étalons rirent grassement en observant sa frimousse.

"C'est sûr que ça change des haricots en boîte, rit l'écrivaine de bon coeur avant de terminer sa dégustation.

- C'est très bon ouaip, acquiesça le mafieux chevaleresque."

Les cinq compagnons continuèrent de manger un moment, un sourire de plus en plus visible sur leurs visages. On discutait de tout et de rien, on parlait d'avenir, de gloire et bien entendu, d'art. Alors que les deux musiciennes et Gate Keeper partaient dans la philosophie de comptoir, aidé par l'alcool de riz bien traître, le terrestre vert en profita pour prendre à part l'écrivaine :

"Je suis désolé pour ce que t'a dit mon frère à la tour. Le matin même, il me disait tout le contraire.

- Ce n'est rien, assura la jument qui dégusta une brochette de fromage entouré d'un mince filet d'aubergine. Tout ça, c'est la Terreur Diurne. Ce n'est pas qu'une maladie... enfin, quelque chose me dit que ce n'est pas qu'une simple maladie. Et de toute manière, ton frère avait raison en partie.

- Par rapport à quoi ?

- A mon père.

- Lyric Writer ? Le patron m'en a parlé. Sale histoire avec ta mère. Et c'est pour le retrouver que tu fais tout ça ?

- Disons, plutôt pour l'attirer, pour qu'il entende parler de moi et qu'il vienne me retrouver, répondit la jument d'une voix qui commença à se faire tremblante. Ca fait des années, mais je n'arrive pas à avancer. J'ai l'impression d'être une pouliche."

Ranger Walker hocha la tête en signe d'écoute. Le son de la voix de la jument avait quelque chose de discordant, comme si elle cachait quelque chose de beaucoup plus profond.

"Il s'est passé quoi pour que ton père s'en aille ? demanda sans détour le poney au stetson.

- C'est suite à mon premier livre, Le chaos, un élément dont nous pourrions avoir besoin ?

- Je vois."

Un livre pareil, il y avait de quoi déchirer une famille. Mais là encore, le mafieux ressentit une discordance dans la voix de son interlocutrice. Elle ne disait pas tout, mais cela ne semblait pas conscient, elle refoulait quelque chose. Il était inutile de poursuivre l'interrogatoire, ce qui lui fallait, c'était une thérapeute.

***

Les affaires étaient calmes pour Dungeon Maker. Au Gaming Hoof Palace, il y avait ses habitués et un petit groupe s'ébattant dans un petit tournoi qu'ils venaient d'improviser. Accoudée à son bar, la licorne au pelage or observait ses clients. Un soir comme les autres, hormis Soft Driver qui s'imbibait de cidre bien corsé avec sa tête de malheureux, celle qu'il faisait à chaque fois que Geeky s'absentait de la ville.

"Encore une choppe st'plait, quémanda le destrier d'une voix faible.

- Nope, contredit aussitôt la barmaid avec un fin sourire. Je sens à ton haleine que tu es à ton maximum.

- Mais là, je risque de ne plus la revoir pour de bon, se plaignit lamentablement le cheval qui avait l'alcool mauvais.

- C'est ce que tu dis à chaque fois, et à chaque fois, tu la retrouves. Et bon sang, tu n'auras qu'à la rejoindre si elle part vraiment là bas."

Elle se retourna alors vers le bar et tomba museau à museau avec un minotaure sans cornes à l'air patibulaire, ce qui la fit sursauter. En y regardant de plus près, c'était un minotaure relativement étrange : en plus d'avoir ses cornes cassées, il était aussi plus petit et moins musclé que le commun des minotaures qu'elle avait vu dans sa vie. Il portait un costume bien chic et taillé avec une cravate rouge ainsi que des lunettes de soleil. Il ne portait pas d'anneau aux naseaux, ce qui était aussi atypique chez les minotaures.

"Je vous sers quoi mon vieux ? se reprit aussitôt la bricoleuse avec un grand sourire.

- Ce que vous avez de plus fort sera pas mal, répondit poliment le bipède qui émit à son tour un sourire.

- C'est parti !" acquiesça la barmaid.

Elle se pencha, prit une choppe taille maximale et la remplit du même breuvage qu'elle donnait habituellement à Soft Driver. Elle servit son nouveau client et le dévisagea un instant. Il avait de bonnes manières, ne vida pas sa choppe d'un trait, en résumé : il avait parfaitement assimilé les coutumes poneys. Il y avait quelque chose de très doux chez lui.

"Il paraît que l'écrivaine phare du Dailymane vient souvent ici, avança timidement la grande créature bovine. Elle arrive bientôt ? Je voudrai faire dédicacer l'un de mes ouvrages.

- Ah ça, mon vieux, vous l'avez loupé pour un moment, elle est repartie pour Ponyville, ricana la tenancière. Revenez dans une semaine ou deux."

Le reste de la soirée se passa sans mal, la compagnie du minotaure était plus agréable que celle de Soft Driver actuellement. Près de l'heure de fermeture, celui ci partit simplement, emportant avec lui un grand sac cylindrique.

***

Vinyl, à présent dessoûlée, admirait la lune sur la terrasse de l'hôtel. Pour elle, il était bien trop tôt pour dormir. Elle était habituée à se coucher à l'aurore, et non quand la lune était au plus haut. Octavia avait bon goût en hôtel, mais elle ne choisissait que les plus chers. Au moins, ceux ci avaient des espaces extérieurs de qualité, où elle pouvait traîner jusqu'à l'arrivée de Marephée.

Une ombre enveloppa peu à peu celle de la ponette crème, une ombre qu'elle reconnut entre mille : son daddy long leg.

"Ne te retourne pas s'il te plaît, demanda avec douceur la voix qu'elle ne connaissait que trop bien. J'en ai pas pour longtemps."

Malheureusement pour elle, il était apparu peu de temps après qu'elle eut perdu la parole, et elle n'avait jamais pu lui répondre. Il démarrait toujours ainsi, et pour la peine, elle n'avait jamais connu son visage. Elle avait tellement de choses à lui dire pourtant, si ce n’était que des remerciements.

"J'ai entendu dire que vous avez joué la chanson que je t'ai donné lors de votre dernier concert. Et ce, en l'honneur de ma fille."

La licorne au crin bleu électrique hocha lentement de la tête.

"C'est admirable de ta part, compte tenu de ce qui s'est passé."

Vinyl se contenta d'hausser les épaules pour démontrer la neutralité de ses sentiments actuels.

"Je sens qu'elle arrive à un carrefour. Si je ne me trompe pas, sa prochaine décision risque de lui causer de graves désagréments. Assure toi qu'elle reste avec vous jusqu'à Ponyville, veux-tu ?"

Toujours assise, la jument leva le sabot droit tout en posant le gauche contre son coeur : Le signe de la promesse. L'ombre se retira alors et juste quelques bruits de pas se firent entendre en guise d'au revoir. Encore une fois, la DJ ne put remercier celui qui l'avait mise sur les rails.

***

Money Maker prenait un verre de whisky dans son loft. La liqueur issue de la fermentation de pomme de terre l'aidait à garder son calme, juste en lui brûlant un peu la gorge et l’estomac en échange. La lune était au plus haut, mais avec la lumière éclatante du quartier le plus riche de Manehattan, aucune étoile n'était visible dans le ciel d'encre.

La licorne cerise avait mit son plus beau tailleur et avait coiffé sa crinière rose pâle avec soin, pour donner encore plus d'importance à ses reflets dorés. Vers deux heures du matin, on sonna à sa porte, et elle ne tarda pas à ouvrir, laissant entrer un minotaure aux cornes cassées et au costard impeccable.

"Asseyez vous Death Wishes." ordonna calmement la puissante cheffe d'entreprise.

Avec douceur, le lourd bipède s'installa sur un pouf, ce qui ne l'empêcha nullement de prendre une pose travaillée et distinguée. La licorne lui servit un shot de whisky qu'il refusa poliment d'un geste de main :

"J'ai dû boire un peu pour obtenir des informations, déclara t-il pour sa défense.

- Dois je comprendre que vous revenez vers moi sans avoir accompli votre travail ? accusa frontalement la richissime licorne.

- Vous connaissez les termes de mon contrat : je ne paye pas les frais de déplacement de ma poche, ni les frais de bouche. Vous m'avez fourni le matériel, mais si votre fille se trouve à Ponyville, vous devez me financer le voyage."

Une fois son argumentation calmement exposée il s'autorisa un mince sourire et joignit ses puissantes mains ensemble. En fait, si la cible ne s’était déplacée dans un coin avec des Princesses, il y serait déjà pour préparer un accident tragique et parfaitement fortuit. Mais là où il y avait des alicornes, il préférait tenter de décourager sa patronne. Avec un soupir, la jument ouvrit un coffre mural par la magie et remplit une bourse avec quelques dizaines de pièces.

"Ce petit village insignifiant n'a pas un coût de vie élevé, cela devrait suffire pour deux semaines, indiqua la commanditaire de mission. Il y aura un train dans quelques heures. Cherchez cette dessinatrice à la manque, Sketchy Paw. Vous ne la raterez pas, son style de dessin, en sus d'être exotique, ne ressemble à rien. A tous les coups, elle sera chez cette parasite qui rapporte rien à personne.

- A Ponyville ? s'inquiéta le minotaure qui sentit sa cravate lui comprimer la gorge sous le stress.

- Un problème ? Vous n'aimez pas la campagne ?

- Je n'aime pas travailler là où il y a des princesses alicornes, répondit dans un grognement le minotaure.

- Ce que je vous ai fourni a servi à neutraliser 80% des effectifs d'un gang entier, minauda Money Maker. Même Celestia ne résisterait pas à un engin pareil.

- J'espère que vous avez raison, moi, les éléments de l'Harmonie, je préfère ne pas avoir à leur tenir tête. Elles ont vaincu des trucs plus costauds que moi. Et plus dangereux que vous."

Si elle n'était pas en train de parler business, elle éclaterait de rire. Ce minotaure ne connaissait visiblement pas le pouvoir de l'argent. Si Money Maker le voulait, elle pourrait acheter les terres de Ponyville et y mettre ce qu'elle y voudrait à la place. Mais obtenir les terres d'une princesse, ça ne coûtait pas que de l'argent, mais également des ressources et du travail illégale, très coûteux et difficile à obtenir. Et puis, pour y mettre quoi ? Les vergers de ce petit village pouvaient rapporter pas mal d'argent, mais si on expropriait la princesse, on perdait la loyauté de l'élément de l'Harmonie ayant tout le savoir faire. Remplacer ce savoir faire était trop long et trop coûteux là aussi. En vérité, tous les éléments créateurs de richesses étaient plus ou moins reliés aux éléments de l'Harmonie, donc pour l'instant, la conjoncture n'était en rien propice pour une externalisation à Ponyville.

Même problème à Canterlot, mais à un niveau national concernant la capitale poney. Les dirigeantes étaient bien trop appréciées, même Luna, anciennement Nightmare Moon, était plébiscitée par une grande majorité d'équestrian, et encore plus depuis l'affaire des incendies de Fillydelphia où elle s'était mise la communauté dragon dans la poche. L'Empire de Cristal pourrait présenter de bonnes opportunités, mais il était encore trop tôt. Pour l'instant, elle contrôlait presque tous les marchés de Manehattan, et lorsqu'il y aura un appel d'air quelque part, elle y sera. Elle avait déjà des vues sur Baltimare, et avait engagé des études de marchés sur Fillydelphia.

Le pouvoir de l'argent était grand, et pouvait être bien plus grand que les quatre alicornes réunies. Mais il fallait l'utiliser intelligemment.

Elle donna congé à son invité et vérifia l'article qu'elle avait écrit dans le but de se débarrasser de ces traîtres, de ces rats, des Easy Money. Dans quelques heures, les kiosques déborderont de poneys, elle les entendait déjà scander...

***

"Grande révélation ! Slice Hut et les Easy Money responsables de la Terreur Diurne, cria un vendeur de journaux brandissant le DailyMane du jour. Les émanations de leurs cuisines un peu partout seraient le premier facteur de l'infection, le second étant leurs produits. En exclusivité, une interview de Heal Search, directeur de St Snowdrop !"

***

Trois jours plus tard, une foule s'était amassée devant le siège social de Slice Hut, menant un véritable siège pour obliger le parrain et chef d'entreprise à se montrer. Plus aucun employé, honnête ou non, ne venait travailler. Certains avaient même rejoint le rang des coléreux, hurlant à la traîtrise et à la corruption.

Comment cet étalon les ayant représenté à la conférence de l'Amitié à Canterlot avait pu leur faire cela ?

Rapidement, quelques parents se jetèrent sur les portes et les brisèrent à grands coups de ruades. Quelques belligérants pénétrèrent dans l'immeuble et en ressortirent quelques minutes plus tard, traînant un gros poney à l'allure impeccable et au stoïcisme héroïque compte tenu de la situation. On oublia rapidement l'existence de tribunal ou de loi, mais on invoqua la justice à corps et à cris. Un énorme terrestre, un gourdin entre les dents, décida de prendre les devants et porta le premier coup au condamné. Le choc mêlé à la fissuration des os retentit jusqu'au fin fond du quartier. Un silence de quelques secondes précéda une véritable clameur et cris de joie bestiaux alors que la foule se jeta sur l'accusé.

A proximité, Hard Mouth qui était venu chroniquer sentit une grande peur l'envahir. Il se sentit en danger, là, tout de suite, bien que personne ne le regardait ou ne faisait attention à lui. Il sentit que pour un pas de travers, ce sera certainement lui que la population lynchera. Ne pouvant tenir ce spectacle, il s'éloigna, nauséeux, alors que la Garde débarqua pour remettre de l'ordre là où il était bien trop tard.

***

Flitze ralentit et amorça sa trajectoire de descente vers le Talon of Fear : le paquebot qui servait d'hôpital de fortune pour les griffons, destiné à prendre la mer bientôt pour rejoindre Griffonstone plus rapidement que par voie de terre. Une fois sur le métal, il ne lambina aucunement et galopa, ventre à terre, retrouver ses camarades, leur hurlant aussitôt trouvé :

"Pizza Slice se fait lyncher par la population !"

Bien que le gang ne portait pas la mafia équestre dans leur coeur, cette nouvelle leur était glaçante pour tous. Jess fondit en larmes, aussitôt réconfortée par Aurora et Dagan.

"Il faut partir dans les plus brefs délais, ordonna Matthew qui suait à grosses gouttes. On est sûr d'avoir tous les malades cette fois ?

- Tu veux que l'on refasse un dernier tour ? proposa le fin griffon sur les charbons ardents.

- Vu que cela vous a pris trois jours la dernière fois, on risque de se retrouver au bout d'une corde avant de pouvoir partir pour de bon."

Matthew soupira, mais ordonna finalement, la mort dans l'âme, de larguer les amarres et de préparer tout le monde au départ. Chacun se précipita à son poste et on prépara l'immense vaisseau à voguer sur les eaux. Mais le grand et majestueux hôpital marin ambulant n'avait pas d'yeux pour voir les petites silhouettes encapuchonnées se glisser à son bord.

Les êtres visiblement équins, remontèrent le long des chaînes, des câbles et des cordes. Leur vitesse était surnaturelle, leur déploiement précis et leur présence insoupçonnable. Ils étaient comme les parasites enfouis dans les fourmis : ils attendaient la bonne heure pour frapper.

Ce ne fut qu'une fois en pleine mer qu'ils passèrent à l'attaque. Tel un virus des plus farceur, ils neutralisèrent très rapidement les griffons aux postes clefs du navire, dans un quasi silence seulement étouffé par les exclamations de surprise des victimes.

Jess, en train de chantonner un poème aux malades, sursauta quand elle entendit des bruits de lutte derrière une porte. Rapidement elle sauta dans un lit vide et ferma les yeux. Rapidement, la porte s'ouvrit et elle entendit des pas de sabot se rapprocher des lits où les petits emplumés marmonnaient de terreur. Elle joignit à son tour les plaintes, n'ayant pas besoin de simuler pour que des larmes de peur coulées sur les joues. L'intrus se contenta cependant de couper la lumière et de partir en claquant la porte. La petite griffonne ne prit aucun risque et se glissa dans le conduit d'aération. D'instinct, elle se dirigea vers le poste de commande, observant la débâcle de ses camarades qui se faisaient assommer un par un. Lorsqu'elle atteignit la salle de commande, elle surgit de la grille de ventilation et verrouilla juste à temps la porte. Elle fit signe à ses camarades de se tenir prêt et se retourna vers ses quatre amis.

"On est attaqué, indiqua la benjamine toute tremblante. Ils sont en train d'avoir tout le gang."

Alors qu'Aurora s'avança pour apaiser l'infirmière ailée, les mâles se réunirent aussitôt pour un conseil de guerre express.

"Il faut contre-attaquer immédiatement, proposa Flitze en tapant ses serres l'une contre l'autre.

- On peut rester ici et tenir la salle le temps d'arriver à la côte de Griffonstone, intervint Dagan qui maîtrisait parfaitement ses émotions.

- On ne sait ni qui ils sont, ni combien, contredit Matthew avec un geste de serre appelant au calme. On sait cependant qu'ils ont mit tout notre clan en déroute. Donc, il se peut très bien qu'à nous cinq, ce ne soit pas suffisant pour les combattre. Il faut au contraire préparer notre contre-attaque sur la terre ferme avec ce qu'il nous reste du gang.

- On ne vas pas abandonner les enfants ici, vérocifia Aurora avec hargne.

- Ils ne leur feront rien, sinon ce serait un massacre depuis bien avant notre tentative de fuite, argumenta le vieux griffon qui réunissait ses fioles en cartouchière. Ecoutez, vous quatre, vous retournez à Manehattan. Voyez ce que vous pouvez faire là bas.

- On va pas te laisser ici, commença Dagan en posant une serre sur l'épaule de leur chef.

- Il faut quelqu'un pour couvrir votre fuite. Et un capitaine reste à bord de son navire jusqu'à la fin."

Le groupe ne pût continuer plus avant leur débat, les attaquants passant à travers les vitres pour les prendre par surprise. A coup de sarbacane, ils criblèrent Dagan de fléchettes anesthésiantes, qui s'effondra en moins de deux secondes. Flitze, Aurora et Jess, n'ayant pas le temps de réfléchir décidèrent de suivre les ordres. Ils repoussèrent leurs assaillants directs et s'envolèrent par les fenêtres brisées. L'un des agresseur, portant un lourd masque de bois coloré, s'empara de sa propre arme à propulsion, visa et souffla un bon coup vers la benjamine qui était la plus lente. La griffonne au plumage parfait s'interposa pour recevoir le tir à sa place. Sentant aussitôt ses forces l'abandonner, elle fit du surplace, regarda celle qu'elle avait protégé s'éloigner vers la lumière qui se faisait de plus en plus aveuglante, et chuta vers le pont, trois mètres plus bas.

A l'intérieur, Matthew ne chôma nullement. Il brisa une ampoule de brouillard concentré et profita que les belligérants le cherchaient pour en assommer trois. Il sortit en trombe dans le couloir et pénétra dans une pièce regroupant le faible arsenal du gang : deux gourdins, quatre lances volées à la garde et l'arme personnelle du vieux griffon : un bâton défensif rétractable en or. Il lança une autre ampoule de verre vers deux de ses poursuivants qui s'enflammèrent aussitôt et matraqua le museau d'un troisième. Il vit l'équidé au masque de bois entrer dans la pièce, et lui lancer une boule transparente contenant une fumée rouge.

Le vétéran ne broncha pas, brisant tout simplement une autre de ses ampoule à sa cartouchière au moment où un nuage rouge sang envahit totalement la pièce. Quelques instants plus tard, la fumée se dissipa, laissant apparaître Matthew recouvert d'une fine couche d'air protectrice. Il répliqua par le jet d'un projectile qui enflamma la porte en acier, obligeant l'équidé à battre en retraite.

Petit à petit, l'affrontement se poursuivit jusqu'au pont, chacun des adversaires ne voulant plus laisser à l'autre la possibilité d'utiliser ses gazs. Le vieux griffon et le masqué échangeaient le fer à coup de bâton militaire et de sarbacane en bronze polie.

Matthew se souvint alors, il y a des décennies, quand le peuple griffon avait retrouvé de sa superbe. Quand il avait rejoint le corps des alchimistes de combat. Quand il avait prêté serment à toujours mettre ses talents au service de son peuple et de l'honneur.

Mais c'était il y a des décennies. Aujourd'hui, ses muscles le faisaient souffrir, les mouvements lourds faisaient craquer ses os et il n'avait plus les réflexes d'antan. Lorsque son dos hurla de douleur, le figeant sur place, son adversaire n'hésita aucunement et le renversa.

"Valeureux tu as été

Pour nous donner beaucoup de peine

Ce navire maintenant est raflé

Gloire à notre Reine"

***

"Ahhh, Vinyl, t'es vraiment une brute, se plaignit la journaliste dans un gémissement.

- Vous faites quoi ? intervint aussitôt Octavia qui passa sa tête dans la cabine du petit navire affrété par le groupe.

- Elle me bande, répondit tacitement la jument grise.

- PARDON ?

- Elle change mes bandages, rectifia Geek Writer avec un grand sourire.

- Oh, regretta Octavia.

- Il ne faut pas être jalouse comme ça Octavia, ce n'est pas bon pour toi et Vinyl, ricana la licorne grise.

- Nous ne sommes pas en couple !" asséna la violoncelliste en refermant la porte.

Vinyl termina les soins à son amie tout en se mettant à rougir.

"Tu vois Vinyl, je te l'avais dit qu'elle t'adore. Tu devrais tenter ta chance."

La DJ blanche tira la langue et appuya sur le museau de sa camarade avec son sabot, mettant fin à la conversation. Les deux licornes sortirent à leur tour de la cabine pour rejoindre le reste des voyageurs sur le pont. Malgré la débrouillardise de Gate Keeper, le groupe voguait très lentement sur le fleuve, certainement à cause de leur manque d'expérience. Heureusement, les catastrophes navales avaient été évitées grâce aux deux licornes et à leur magie. Et depuis leur entrée dans l'Everfree Forest, c'est Ranger Walker qui s'occupait des différents monstres et dangers pouvant nuire au groupe. Sa prise de judo sur une manticore avait été appréciée par les juments l'ayant applaudi pour l'exploit.

Mais pour le moment, la nuit tombait et on amarra le bateau pour la nuit. Et comme chaque nuit depuis le début du voyage, Geek Writer faisait bande à part. Sous la tente venant d'être montée, les quatre autres voyageurs prirent un toast.

"Et demain, nous serons à Ponyville ! engagea Gate Keeper en levant une choppe de cidre au plus haut.

- Pas trop tôt !" entonna Octavia avec tout autant de joie.

Vinyl et Ranger trinquèrent silencieusement à leur tour et on commença à discuter un peu de tout et de rien.

"C'est dingue, elle n'est pas asociale, mais une fois que l'on est en pleine nuit, elle ne supporte plus la compagnie de qui que ce soit, commenta Ranger Walker.

- Je pense que c'est parce qu'elle aime dormir seule, expliqua Octavia. Et avec sa blessure, ce ne doit pas être facile de tenir toute la journée."

Chacun acquiesça et on se prépara à aller se coucher. On vida les choppes, souffla les bougies et on s'enroula dans les duvets.

Geek Writer observait la tente de la fenêtre. Cela semblait bon. Ils semblaient tous dormir. Elle revérifia une énième fois leur position sur la carte, et ils étaient bien à proximité du Bogg. L'un des endroits les plus mystérieux d'Equestria, une fine parcelle de légendes et de mythes. Il y a mille ans, tout pouvait arriver en ce lieu : les animaux mutaient, les plantes semblaient s'animer d'une vie propre...

On disait que ce lieu était la source du mal de l'Everfree Forest.

Elle lança un sort de leurre sur la lampe plafonnière, ce qui eut pour effet de placer un reflet d'elle même en train d'écrire sur le lit. Crédible de loin, mais de près, l'écran de fumée sera aussi efficace. Elle ouvrit la porte silencieusement et se glissa sur le sol humide et boueux dans un petit clapotis. Elle contourna la tente et longea la berge, sa corne s'illuminant en un infime faisceau dont elle s'en servit pour trouver un indice ou deux. Elle s'engouffra dans la forêt, toujours en train de fouiner, quand elle sentit une pression puis un étirement sur sa queue. La jument gémit de douleur et se retourna pour découvrir Vinyl. Et mince, elle s'y était prise trop tôt encore. Celle ci avait abandonné ses lunettes mauves, ce qui permettait à ses yeux rubis de l'enflammer du regard.

"J'ai une excellente raison de faire ça." tenta d'expliquer l'écrivaine avant que la DJ ne lui saute dessus. Elles roulèrent toutes deux dans un fossé, se cognant de multiples fois à des arbres, traversant des ronces qui perçaient leur pelage et s'écrasèrent l'une sur l'autre au milieu de la boue.

"Tu peux faire ce que tu voudras, je finirai par trouver un moyen de faire ce que j'ai à faire, et sans que j'ai à me battre contre toi." prophétisa Geeky qui était solidement aplatie au sol par la jument blanche. Celle ci leva alors la tête et lança un sort de feu d'artifice, illuminant le ciel et signalant sa position à leurs compagnons. Elle plongea alors de nouveau un regard furibond mais interrogatif à sa prisonnière qui ne se débattait aucunement, sachant pertinemment que cela allait aggraver ses blessures.

"Je sais, je n'aurai pas dû vous le cacher. Mais vous ne m'auriez pas laissé faire. Je n'ai pas le temps d'attendre ma guérison ou des circonstances convenables pour... mes projets."

Vinyl approcha son visage de celui de son interlocutrice, toujours en colère.

"Oui. J'abuse. J'en suis désolée. Mais il le faut... Faut que j'aide ma ville."

La jument en position dominante se radoucit quelque peu, sa colère laissant la place à une grande tristesse. La licorne était en plein dilemme entre son amitié et la promesse faite envers son daddy long leg. Son regard se fit alors de nouveau interrogatif, comme pour insister. Geek Writer se contenta alors de chercher du regard quelque chose et pointa une direction du sabot. De surprise, la DJ en fut bouche bée et secoua vivement la jument.

"Oui bon sang, je sais ce que je fais ! Arrête tu vas me rendre malade."

Les artistes se relevèrent doucement et Vinyl étreignit son amie aussi fort qu'elle le pouvait.

"Moi aussi ça ne me rassure pas. Et j'ai peur oui."

Elles entendirent à ce moment les bruits de sabots qui se rapprochaient.

"Prends soin de toi Vinyl. Et n'allez plus à Manehattan surtout, pour aucun motif que ce soit."

Et la jument galopa parmi les fourrés. Les deux étalons mafieux arrivèrent peu après et s'arrêtèrent net devant un panneau indiquant : "CHAOS DROIT DEVANT"

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GeekWriter
GeekWriter : #43505
AuRon27 octobre 2016 - #43503
«mafiosi» au pluriel
«mafioso» au singulier
«chef» ne s'accorde pas au féminin il me semble

Reste plus qu'à attendre la suite. ^^ bonne chance d'ici là.

La suite est presque prête ^^
Merci pour les indications, mais je garde chef au féminin, je sais que c'est pas bien, mais c'est pas plus gênant que ça je pense.
Il y a 1 an · Répondre
AuRon
AuRon : #43503
«mafiosi» au pluriel
«mafioso» au singulier
«chef» ne s'accorde pas au féminin il me semble

Reste plus qu'à attendre la suite. ^^ bonne chance d'ici là.
Il y a 1 an · Répondre

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