Né dans une famille exclusivement composée de licornes, Homes n’avait dans sa jeunesse jamais fréquenté de pégases. Ses parents, peu enclins à déblatérer sur ces poneys ailés qu’ils méprisaient presque autant que les terrestres, les avaient simplement décrits comme des athlètes rustres et arrogants, incapables de comprendre leur raffinement artistique. Ne s’y intéressant pas outre mesure car trop concentré sur ses études de magie, l’étalon lilas s’était contenté de ce portrait peu flatteur, passablement subjectif. Mais après tout, Earth Warming Eve les présentait depuis toujours comme des soldats assoiffés de gloire ou de conquêtes, cela devait bien se baser sur un fond de vérité, non ?
Un quart d’heure était passé depuis son arrivée à Cloudsdale, et la licorne érudite qu’il était voyait déjà l’intégralité de ses préjugés sur cette ville remis en cause. Homes pensait effectivement avoir à traverser une cité ouvrière, composée uniquement d’usines et de quartiers résidentiels ; or les boutiques et autres activités tertiaires foisonnaient dans les rues du centre, lui prouvant de manière indéniable que la météo n’était pas la seule occupation des pégases, contrairement à ce qu’il pensait.
Un groupe de jeunes poneys passa devant lui, particulièrement amusés par son habillement qui, peu approprié à des températures estivales, lui collait à la peau et accentuait son ridicule. Une fois encore, l’intéressé s’empressa de serrer les dents pour ne pas lâcher une remarque désobligeante avant de poursuivre péniblement son chemin vers l’hypercentre.
Le soleil, déjà haut dans le ciel, n’avait aucune pitié pour son corps en phase avancée de déshydratation, ses rayons ardents rebondissant sur les habitations immaculées pour ne lui laisser aucun répit. Les seules ombres de la ville étaient celles des hautes tours nuageuses, mais elles étaient encore trop loin, impossible pour lui d’en profiter. Seul restait le contact humide du cumulus sur ses sabots, un réconfort bien maigre dont il devait se contenter pour l’instant.
Faisant travailler sa mémoire afin de ne pas avoir à sortir sa carte, Homes commença à chercher le bâtiment où se trouvait la préfecture de la ville. Son choix se porta rapidement sur un édifice plus haut et large que les autres, accessible grâce à une volée de marches cotonneuses, indice trahissant l’existence d’une institution officielle.
Ses doutes devinrent certitudes lorsque en s’approchant, il vit un pégase portant l’uniforme des forces de l’ordre en sortir. Ce dernier fut d’abord très surpris par cette étrange apparition que l’étalon au crin bleu lui offrait. Le détaillant d’un œil acerbe et critique, il finit par lancer sans aucune retenue un avertissement brutal : « Barre toi de là tout de suite espèce de cinglé, sans quoi je te balance au trou pour le restant de la journée !
-Et en quel honneur, je vous prie ? rétorqua l’intéressé, n’ayant cette fois-ci pas pu se retenir. Je ne fais que flâner dans les rues au gré de mes envies, est-ce un crime ?
-Tu fais le mariole, c’est ça ? répliqua l’autre, rouge de colère derrière son pelage saumon. Quand je t’aurais molesté tu feras moins le malin, crois-moi ! » Il commença à descendre les marches, bien décidé à mettre ses menaces à exécution. Nullement impressionné par ce poney à peine plus grand que lui, Homes ne chercha même pas à fuir et le regarda s’arrêter, indécis, au pied de l’escalier. À en croire son regard, il venait de se souvenir qu’une tâche urgente l’attendait.
« Tu as de la chance pour cette fois-ci, dit enfin l’étalon ailé après s’être résigné. Néanmoins sache qu’à notre prochaine rencontre je ne te raterai pas ! » Alors que son opposant passait à ses côtés, la licorne grimée entendit distinctement l’injure particulièrement insultante envers sa nature amoureuse qui avait été depuis longtemps bannie d’Equestria. Si Homes portait ses vêtements colorés par choix, peut-être aurait-il pu se sentir profondément blessé en entendant cette appellation. Par chance ce n’était et ne sera sans doute jamais le cas pour lui.
Débarrassé du gêneur, l’étalon cornu songea tout d’abord à rentrer directement dans le bâtiment ; puis se souvenant que son entrée était certainement observée, il s’éloigna avec nonchalance, à la recherche d’un accès plus discret.
La chance sembla enfin lui accorder un sourire car il trouva rapidement une ruelle étroite qui longeait la préfecture. Déserte, le risque d’y être surpris par un badaud ou un observateur en planque était minime, voir même nul. Faisant un virage calculé pour paraitre aussi naturel que possible, Homes s’engouffra à l’intérieur dans l’espoir de surprendre le gardien d’otages grâce à ce cheminement original. Peut-être était-il exagérément prudent, mais l’enjeu restait d’une trop grande importance pour omettre ce genre de précaution.
Après s’être assuré une dernière fois que personne ne l’observait, l’étalon parme reporta son attention sur le flanc de la bâtisse nuageuse. Comme il pouvait s’y attendre, aucune ouverture ne perçait cet épais mur d’une blancheur aveuglante, seule une petite porte cachée entre deux containers et verrouillée de l’intérieur était susceptible de le laisser d’entrer. Une chance, les sortilèges de crochetage pouvaient avoir raison de n’importe quelle serrure pour peu que leur lanceur soit suffisamment doué en magie. Or justement, Homes l’était indéniablement.
Il y eut un léger cliquetis au moment même où sa corne s’illumina, puis la porte s’ouvrit en grinçant. C’était pour l’instant très facile… Trop facile même. Comment pouvait-on laisser une administration de cette importance aussi peu sécurisée ? Homes allait devoir le signaler sitôt sa mission achevée, même si cela n’appartenait pas du tout à son champ de compétences.
Jetant un rapide coup d’œil à l’intérieur, l’intrus comprit qu’il venait d’ouvrir l’accès extérieur d’un placard à balais. Une fois les sceaux et serpillères écartés magiquement de son chemin, le poney lilas put enfin pénétrer -par effraction certes- dans le quartier général de son homologue ailé. « Espérons qu’il ait un peu plus de jugeote que son subalterne ! » Songea-t-il en pénétrant dans un couloir qui attenait au cagibi.
À sa grande surprise, ce dernier était aussi désert qu’une salle de classe durant cette période de l’année. Seuls des éclats de voix se répercutant faiblement sur les murs signalaient au nouvel arrivant la présence d’autres poneys dans le bâtiment. Pris d’une brusque inspiration, Homes commença à marcher furtivement vers la pièce où la réunion semblait se tenir. Ce n’était pas très prudent ni approprié de jouer ainsi les espions envers ceux avec qui il était supposé collaborer, mais la licorne au crin bleu ne souhaitait pas accorder sa confiance à des pégases dont elle ne connaissait rien.
« … Je vous l’assure Chef Light, celui qui nous a envoyé cette lettre agit seul ! L’utilisation de la première personne du singulier, les tournures personnelles et la signature sont autant de signes qui ne trompent pas !
-Madame Balmes, vous êtes une psychologue comportementaliste compétente, je n’en doute pas une seconde, répondit-une voix masculine d’un ton ferme. Néanmoins, je ne peux pas prendre ce risque en me basant simplement sur votre analyse. Il m’en faut plus, vous comprenez ?
-Ce que je comprends, ce que si vous ne prévenez pas les Wonderbolts dans les plus courts délais, attendez-vous à la pire hécatombe de notre histoire ! cria la jument en proie à une colère sourde. Ce poney est prêt à tuer, et si vous pensez une seconde que Canterlot acceptera de se plier à ses exigences, vous vous mettez le sabot dans l’œil ! » Homes entendit un bruit de chaise et la porte entrebâillée qui lui faisait face s’ouvrit brusquement. Sans prendre la peine de lui accorder ne serait-ce qu’un regard malgré sa présence importune, une pégase au crin blond quitta en trombe la pièce avant de se diriger vers la sortie, un air profondément contrarié sur le visage.
« Elle a raison, chef, finit par s’exclamer une autre voix appartenant vraisemblablement à un étalon. Nous ne pouvons ni reconnaître les terrestres déguisés dans la foule, ni tenter de les approcher sans risquer d’être vus. Si ce terroriste met ses menaces à exécution et que les Wonderbolts sont sur place, ils pourront au moins sauver quelques vies. C’est un risque à prendre, mais il faut essayer de les contacter, il n’y a de toute façon rien d’autre à faire.
-Oui, je crois que tu as raison, finit par répondre son supérieur après un long silence trahissant son hésitation. Attendons quand même midi pour en avoir le cœur net. » Homes sut alors qu’il était temps pour lui d’intervenir.
Après avoir enlevé tour à tour son chapeau, sa sacoche, puis son costume, l’étalon au crin bleu entra dans la pièce avant de claquer la porte derrière lui, faisant sursauter ses quatre occupants. Il y eut un moment de flottement durant lequel les pégases qui lui faisaient face semblèrent très surpris par sa présence en ces lieux. Profitant de ce court répit, la licorne étudia la cellule de crise qu’avait créée le responsable de la sécurité de Cloudsdale, son regard étant tout de suite attiré par une carte en trois dimensions qui représentait justement la cité céleste.
« Qui… Qui êtes-vous ? demanda enfin le dénommé Light, un étalon au pelage bleu givré et à la crinière blanche. Comment avez-vous fait pour entrer ici ? » Sans prendre la peine de lui répondre, son interlocuteur traversa le bureau et s’arrêta devant la maquette sertie par endroits de petites tâches colorées. Obéissant un peu tardivement à une procédure de sécurité, l’un des trois officiers pégase s’interposa devant celle-ci, désireux de protéger ses informations assurément confidentielles. « Vous ne savez pas qui je suis ? le questionna Homes d’un ton surpris.
-Non justement. Tout ce que je sais, c’est que cette entrée par effraction risque de te coûter très cher, licorne ! le poney baraqué voulu empoigner l’importun qui se déroba en contournant la fragile miniature, une certaine contrariété sur le visage. -Rappelez tout de suite votre chien de garde, dit-il au préfet qui le toisait comme s’il n’était qu’un vulgaire détraqué. Je suis le chef de l’Agence Royal contre la Délinquance Magique et votre hostilité envers ma personne est abusivement explicite ! »
À peine l’étalon parme eut il mentionné la responsabilité qu’il exerçait que le pégase bleu s’empressa de donner un ordre sec à son exécutant, celui-ci étant sur le point de commettre une faute procédurière grave.
Bien loin d’être enchanté par la présence de ce « collègue » venu de Canterlot, Light échangea tout de même une poignée de sabot avec lui. Après quelques formules de banalité énoncées froidement, le poney ailé alla droit au but en requérant l’objet de sa venue. « Une prise d’otage a lieu à cet instant même dans votre ville, répondit Homes, un œil discrètement posé sur l’horloge murale. J’estime donc que ma place se trouve au cœur de l’action, pas vous ?
-Comment… Comment avez-vous su pour cet incident ? » Homes poussa un léger soupir, puis montra de la patte un épais bureau dans un coin de la pièce. Une lettre en tout point semblable à celle qu’il avait reçue y était posée.
« Ah, il vous aussi contacté… comprit son interlocuteur avant de soupirer à son tour. Cela risque de compliquer sérieusement les choses. Bon sang, comme si la situation n’était pas déjà suffisamment ardue !
-Chef, il ne reste plus que cinq minutes avant le sauvetage, l’interrompit un de ses lieutenants en regardant soucieusement l’horloge.
-OK, je veux que vous prépariez la salle pour pouvoir interroger aussi vite que possible l’otage dès qu’il arrivera. On envisage toutes les possibilités : Blessure, traumatisme ou évanouissement, il faut que tout le matériel susceptible de nous aider soit à portée de sabot. Exécution ! » Dociles, les trois pégases commencèrent avec une efficacité remarquable à aménager le bureau en véritable hôpital de fortune, utilisant toute leur astuce et leur adresse pour transformer n’importe quel objet en un moyen de guérison potentiel. Homes avait beau se dire qu’une véritable clinique aurait mieux convenu, il n’en demeurait pas moins impressionné en voyant ces poneys fabriquer un brancard avec de simples rideaux et une paire de tringle, ou bien des bandages à partir de vieilles chemises d’apparats. À coup sûr, ce n’était pas les jeunes recrues de son bureau qui seraient capables de faire ça !
Profitant du fait que personne ne s’occupait réellement d’elle, la licorne au poil lilas s’approcha de Light, décidée à se faire entendre malgré l’urgence. « Préfet Light ? l’interpella-t-elle fermement. Vraiment navré de vous décevoir, mais je ne suis pas venu ici pour jouer les représentants de ma race au sein de votre bureau. Je me trouve en ces lieux depuis quelques minutes seulement, et ce que j’ai vu me suffit à comprendre que la situation vous dépasse totalement. Il est par conséquent de mon devoir d’intervenir…
-Je vous arrête tout de suite chef Homes. Vous êtes venu de votre propre initiative sur mon territoire sans aucun mandat, je suis par conséquent la seule autorité de Cloudsdale en matière d’intervention. N’ayant aucune envie de vous accorder ma confiance ou de requérir votre aide, je vous somme donc de rester à votre place, c’est-à-dire hors de nos pattes. »
Homes accusa le coup. Voir ce pégase rejeter ainsi son aide alors qu’il en avait assurément besoin avait quelque chose de choquant, surtout si l’on savait que des vies étaient en jeu. Une colère sourde commença à envahir l’étalon cornu, l’obligeant à reprendre l’offensive avec un tact quelque peu émoussé. « Je ne suis pas certain que vous ayez conscience de la situation : Il y a un fou en liberté, certainement surdoué en magie, qui menace la vie d’une cinquantaine de poneys grâce à un sortilège saboté ! Comment pensez-vous une seconde pouvoir arrêter un cerveau pareil si votre équipe ne possède pas un seul magicien ? Et d’ailleurs, où se trouve la licorne que vous devez obligatoirement intégrer dans vos rangs ?
-Partie en vacance, je n’ai pas réussi à la rejoindre, répondit l’autre en soutenant son regard. D’un autre côté, je pourrais vous retourner la question pour votre agent pégase…
-Je lui ai assigné une mission, elle sera là dans très peu de temps, mais ne changez pas de sujet : Vous êtes responsable de la sécurité de Cloudsdale, chaque mort vous sera donc reprochée si les opérations se passent mal. Or il faudra vous attendre à bien pire lorsque les familles, les proches et la princesse apprendront que par pure orgueil, vous avez refusé mon aide ! » Voyant que son confrère restait de marbre face à cette menace à peine voilée, Homes décida de changer d’approche. Il avait beau être assurément dans son droit, un refus de collaboration allait lui retirer toute liberté d’agir. Aussi dur que cela puisse être, convaincre ce pégase restait une étape essentielle.
« Ne soyez pas borné, reprit-il plus calmement. Il y a de nombreuses vies en jeu, et c’est votre devoir tout autant que le mien de les sauver. Oublions les procédures, ce qui arrive les dépasse. Laissons de côté notre fierté, elle n’a pas sa place dans une cellule de crise. Seul un unique objectif doit nous importer : La sûreté de nos semblables terrestres.
-Vous… Vous êtes un bien bel hypocrite, Homes, finit par répondre Light. Si vous tenez tant à sauver ces poneys, pourquoi ne pas l’avoir fait à Canterlot, en brûlant vos précieux monuments ? Il vous aurait suffi d’allumer une torche, de la jeter dans un rayonnage, et les otages seraient tous rentrés chez eux indemnes. Alors, pourquoi ne pas l’avoir fait ? »
L’étalon au crin bleu savait que ce n’était que pure provocation, il n’avait pas à y répondre d’autant que la situation interdisait ce genre de dispute puérile. Pourtant, cela ne l’empêcha pas d’empoigner violemment le pégase bleu qui ne fit aucun geste pour se défendre. « Écoute-moi bien, petit emplumé arrogant. La princesse Célestia est à l’heure actuelle en pleine négociation avec les zèbres. Quelle légitimité penses-tu qu’elle aurait auprès d’eux si ses propres sujets incendiaient dans son dos le symbole même de son pouvoir ? Aucune. Et rien que pour avoir envisagé cette hypothèse, tu mériterais d’être jugé pour crime de lèse-majesté ! »
Ayant rapidement remarqué l’escalade de violence entre les deux poneys, un des lieutenants au pelage vert s’empressa de les séparer avec une certaine facilité, Homes disposant malgré sa rage d’une carrure insuffisante pour lui résister. « Vous avez fait une belle erreur, commenta le préfet une fois son costume réajusté. Estimez-vous donc heureux que je ne vous enferme pas jusqu’à la fin de la journée, car votre attaque m’en donne désormais le droit. » La licorne parme voulut riposter, mais un brusque claquement de porte venant de l’entrée l’obligea à ajourner cette altercation.
Quelques secondes passèrent, puis un groupe de trois pégases émergea du couloir, deux d’entre eux soutenant un quatrième poney visiblement blessé et en état de choc. « Vite, dépêchez-vous de la coucher, vous ne voyez pas qu’elle a une épaule démise ? s’écria la jument ocre au crin gris qui soutenait le flanc droit de la blessée.
-Sa chute était trop importante, nous n’avons pas pu la rattraper sans casse ! poursuivit l’autre porteur au poil saumon, celui-là même qu’Homes avait croisé un peu plus tôt à l’entrée du bâtiment.
-Chef Homes ? Chef Homes ? J’ai fait ce que vous m’avez demandé, mais ils sont arrivés avant moi. Je suis désolée ! S’écria la dernière pégase nommée Derpy dès qu’elle aperçut son supérieur.
-Ahhh… » Cria de douleur la terrestre mauve quand on la posa sur le lit de fortune tout juste installé.
La fièvre envahit alors ce bureau devenu tout à coup étroit, ses travailleurs criant, gesticulant dans tous les sens afin de gérer au mieux l’urgence qui venait de débarquer. Seul Homes resta immobile dans un angle du mur, comprenant avec douleur que l’arrivée de ce poney blessé confirmait la menace qui planait sur la vie d’une demi-centaine d’Equestriens. Certes, son instinct l’avait incité à prendre cette prise d’otage très au sérieux dès la première seconde, mais voir de ses propres yeux une telle barbarie de la part d’un de ses semblables l’écœurait, l’effrayait même. Comment un être aussi infâme, capable de jeter sans remords une terrestre innocente dans le vide avait-il pu voir le jour ? Qu’importe après tout, il allait le retrouver et lui appliquer sans aucune pitié la sentence qu’il méritait !
Se souvenant subitement de la présence de Derpy en ces lieux, l’étalon au crin bleu s’empressa d’héler cette dernière alors qu’elle tournoyait sans but autour de ses congénères, telle une abeille solitaire honteuse d’être retournée dans sa ruche. Elle avait retiré son déguisement d’ouvrière, sans doute afin d’être le plus agile possible lors de l’opération de sauvetage qu’elle n’avait heureusement pas eu à effectuer. Au premier abord, cela pouvait paraître idiot de lui avoir confié une mission dépassant allègrement son champ de compétences, pourtant Homes n’avait pas fait cela par hasard.
Étant en effet presque certain que le terroriste avait également prévenu les responsables de la sécurité à Cloudsdale, il avait parié sur le fait qu’ils enverraient eux aussi des agents pour récupérer l’otage témoin. La véritable mission de la jument grise était donc non pas de sauver, mais d’affirmer la présence de son agence au cœur même de l’action. Ceci n’avait rien de glorieux, mais permettait néanmoins à son supérieur de conserver sa légitimité dans cette affaire.
La ponette aux yeux baladeurs ayant finalement réussi à le rejoindre malgré l’agitation qui régnait, Homes l’emmena sans un mot voir le préfet, pressé de la lui présenter. « Préfet Light, annonça-t-il presque solennellement. Je vous présente la responsable des affaires pégases de mon bureau, elle se nomme…
-Oh, mais je la connais déjà très bien ! L’interrompit l’autre d’un ton acide avant de se tourner vers les membres de son équipe. D’ailleurs tout le monde dans ce bureau la connais, n’est-ce pas ?
-Ça c’est bien vrai ! répondit le pégase vert qui l’avait protégé un peu plus tôt. Derpy la gaffeuse qu’on l’appelle par chez nous. Si je devais compter le nombre d’accident dont elle est à l’origine, je deviendrai sans doute fou ! Content qu’elle ait quitté Cloudsdale, elle faisait honte à notre race. »
En entendant ces brimades, l’intéressée baissa instinctivement le regard pour montrer qu’elle les assumait entièrement, même si ses traits trahissaient une certaine lassitude à leur égard. Alors que rien ne l’obligeait à réagir, l’étalon lilas se décida brusquement à prendre sa défense : « Pardonnez ma rudesse cher pégase, mais la jument dont vous vous moquez allègrement m’a fait traverser la moitié d’Equestria pendant que vous bailliez aux corneilles dans ce bureau. J’estime qu’elle mérite un peu plus de respect de votre part, car après tout son engagement est à l’heure actuelle bien plus grand que le vôtre. »
Sa remarque désobligeante eut un impact remarquable sur le visage de l’étalon qui s’emplissait de colère à mesure que Derpy retrouvait le sourire. Pendant un instant, la licorne s’attendit à ce qu’un des deux pégases cède à sa rage ou à son allégresse et lui saute au cou. Par chance, aucun d’entre eux ne fut assez idiot pour le faire.
Comme son interlocuteur ne trouvait rien à lui rétorquer malgré sa fureur, Homes adressa un petit sourire conciliant à sa secrétaire, puis s’approcha du préfet qui avait assisté silencieusement à la scène. « Votre équipe est composée de très mauvais pégases, lui chuchota-t-il sur le ton du reproche. Vous avez intérêt à les calmer, car si l’un d’entre eux émet le moindre commentaire désobligeant envers mon assistante, ou bien refuse de collaborer avec elle, je requerrais moi-même auprès de Célestia des sanctions exemplaires, entendu ? » Light ne répondit rien, se contentant d’afficher un masque neutre afin de ne pas extérioriser son mépris.
L’étalon au crin bleu marine voulut insister, lui arracher de ses lèvres une réponse claire et précise, mais un cri strident envahit brusquement la pièce, la pégase jaune venant de remboîter l’épaule de la ponette blessée. Quelques secondes passèrent, puis le lieutenant au poil saumon s’approcha de son chef et affirma sans aucune réserve qu’elle était prête pour l’interrogatoire. Apparemment il n’avait pas encore fait le lien entre l’individu costumé rencontré un peu plus tôt et la licorne parme qui se trouvait juste devant lui, même si une légère suspicion traînait dans son regard.
Passant devant lui avec un mépris non feint, Homes rejoignit son confrère ailé auprès de la terrestre mauve qui tentait d’atténuer sa douleur à grandes gorgées d’alcool fort. « Mademoiselle, vous êtes ici dans la préfecture de Cloudsdale, je suis son dirigeant et je me porte garant de votre sécurité, commença-t-il en lui retirant doucement sa bouteille. Je sais que votre venez de vivre une expérience particulièrement éprouvante, mais je dois absolument recueillir votre témoignage. Vous vous sentez capable de répondre à mes questions ?
-A… Allez y, répondit péniblement la jeune terrestre en retirant avec précaution ses ailes postiches réduites à l’état de lambeaux.
-Tout d’abord, que s’est-il passé juste avant que vous ne chutiez ?
-Je… Je me baladais toute seule dans une petite rue tranquille non loin du centre-ville, il n’y avait personne autour de moi. Puis j’ai senti un petit frémissement à l’arrière de mon dos et j’ai subitement perdu pied comme si… Comme si mon enchantement venait de se volatiliser ! » N’y tenant plus, la jument au pelage violet fondit en larme juste devant Light qui secoua tristement la tête avant de se relever. « Elle ne sait rien et elle n’a rien vu, résuma-t-il au reste de son équipe. Nous n’avons plus le choix, il faut prévenir les Wonderbolts et sauver ce qui peut encore l’être. Qui se dévoue ? »
Il y eut un silence gêné dans la salle, interrompu de temps à autre par les sanglots de la blessée. À en croire le visage des candidats pégases, la tâche demandée était trop ardue pour l’accepter sur un coup de tête. Quand enfin un volontaire sembla se démarquer des autres, Homes leva brusquement un sabot avant de se rapprocher de l’unique témoin qu’ils possédaient. Là, il lui demanda avec douceur si elle se souvenait de l’endroit précis où sa chute avait eu lieu. L’interrogée renifla, réfléchi, puis détailla avec précision un des bâtiments devant lequel elle était tombée.
L’étalon se précipita alors vers la maquette de Cloudsdale sous les regards étonnés de ses collaborateurs ailés, et y chercha fiévreusement la maison décrite. « Les tâches de couleur, ce sont bien les endroits où un poney peut s’embusquer tout en ayant une vue sur l’ensemble de la ville, n’est-ce pas ? » Demanda-t-il au préfet qui hocha la tête en signe de confirmation. Fort de cette réponse, Homes tira de sa queue un crin particulièrement long qu’il utilisa pour relier le sommet des tours peintes au point de chute estimé de l’otage.
« Chers pégases, je peux désormais vous affirmer l’endroit précis où le contre-enchantement a été lancé ! finit-il par annoncer fièrement en montrant du sabot une haute tour munie d’un clocher. C’est là que se trouve le fomenteur de cette prise d’otage.
-Attendez, attendez, protesta Light qui venait de comprendre l’analyse balistique effectuée par son homologue. Comment pouvez-vous affirmer qu’un sortilège est la cause de cette chute ? D’ailleurs s’il avait été jeté d’aussi loin, quelqu’un l’aurait forcément vu, non ?
-Non, pas forcément. Sous de très fortes luminosités, les rayons de magie peuvent facilement passer inaperçus aux yeux de n’importe quel poney. Seule la cible du lanceur reste capable de sentir ses vibrations, et c’est exactement ce qui s’est passé. Faites-moi confiance, je sais de quoi je parle.
-J’avoue que je ne vous suis pas, avoua sans aucune honte un des pégases. Vous savez, la magie ça ne nous parle pas vraiment…
-Dans ce cas, vous irez voir mon assistante Derpy. Ce n’est pas une licorne, mais elle travaille depuis suffisamment de temps à Canterlot pour connaître les bases de notre art… Et je suis certain qu’elle se fera un plaisir de répondre à vos questions pour peu que vous le lui demandiez gentiment ! »
Voyant que son auditoire s’était tu, époustouflée par sa répartie et son assurance, l’étalon lilas attrapa un petit pinceau à pointe fine, puis posa une légère touche de bleue sur l’horloge de Cloudsdale, la tour dans laquelle leur ennemi se terrait. Du coin de l’œil, il surveillait anxieusement le comportement du pégase au crin blanc, ce dernier représentant pour le moment la principale menace au plan qui commençait à se dessiner dans son esprit. « Vous… Vous m’avez impressionné, chef Homes, finit-il par admettre sans pour autant abandonner sa sévérité. Néanmoins, je ne vois pas en quoi cette information serait susceptible de nous aider. Si c’est un assaut que vous envisagiez, renoncez-y tout de suite : Ce serait prendre d’énormes risques sans pour autant garantir la survie des otages…
-Tenter un contact avec les Wonderbolts alors qu’ils sont certainement surveillés est aussi risqué ! » Protesta Homes par désespoir, comprenant qu’il lui manquait encore trop d’éléments pour pouvoir le convaincre. Non, c’était trop bête ! Après tout ce chemin parcouru, cela ne pouvait pas se finir ainsi !
Secouant la tête pour montrer à quel point cette décision lui pesait, le pégase bleu griffonna un court message qu’il tendit à son premier lieutenant. Alors que celui-ci était sur le point de quitter la pièce, un petit bruit de grattement vint chatouiller les oreilles de la licorne impuissante. Elle se retourna vers le mur d’où provenait le bruit et vit à sa grande surprise qu’un petit trou y était apparu. « Passered ! » Ne put-elle s’empêcher de crier lorsqu’elle vit l’oiseau s’en extraire, trainant derrière lui un épais rouleau de papier.
L’intéressé déploya ses ailes et commença à voleter au-dessus de leurs têtes, la précieuse missive toujours dans son bec. Après s’être assuré à plusieurs reprises qu’aucun danger ne puisse le surprendre, il finit par atterrir gracieusement devant Homes qui attrapa fébrilement la lettre de Sweetie Drops. « Comment ce piaf a-t-il fait pour rentrer ? s’interrogea un pégase dans le lointain. Il faut atteindre la température d’un four pour rendre ces murs friables ! » L’étalon au crin bleu ne répondit pas, trop occupé à déchiffrer le rapport de son agent. À mesure que sa lecture avançait, un sourire victorieux commença à se dessiner sur son visage, sourire qu’il n’essaya même pas de cacher à ses collaborateurs. En l’espace de quelques lignes, le responsable des délits magiques avait en effet récupéré l’essentiel des clés manquantes pour contrer cette prise d’otage !
« Monsieur Homes ? Navré de vous interrompre, mais si ce rapport contient des informations pouvant nous aider à gérer la crise dans laquelle nous sommes, ne serait-il pas judicieux de nous en faire part ? demanda Light avec une exagérée courtoisie, comme s’il anticipait déjà le tournoiement de la roue.
-Bien entendu, répondit l’intéressé en accentuant d’avantage encore son sourire. Mais avant cela, je tiens à corriger un léger oubli de ma part… » Illuminant sa corne d’un aura bleu, le poney lilas fit flotter jusqu’à lui son déguisement qui traînait en boule dans un coin. Il l’attrapa, le défroissa, puis le tendit gentiment au pégase saumon venant tout juste de le reconnaître. « Tenez, enfilez-le et partez-vous balader dans les rues commerçantes. Avec ce costume, j’ai assurément attiré l’attention du terroriste en venant ici, et je ne voudrais pas qu’une disparition trop longue ne vienne porter soupçons. Nous avons la même carrure et un pelage semblable, il se laissera certainement leurrer. »
L’étalon voulut protester, mais un regard sévère de son supérieur l’obligea à obtempérer pour le plus grand bonheur de Homes. Impossible de l’ignorer, ce consentement était le signe qu’il menait désormais la danse.
Une fois que l’agent des forces de l’ordre eut revêtu l’habit grotesque et quitté la pièce en serrant les dents, le poney au pelage lilas reprit. « Une de mes agents a retrouvé et interpellé les licornes qui ont organisé la venue des otages à Cloudsdale. Il s’agit de deux frères bien connus de nos services pour leurs innombrables tentatives d’escroqueries magiques, vous ne les connaissez donc sans doute pas. Toujours est-il qu’ils sont très rapidement passés aux aveux, nous fournissant trois révélations importantes. La première, c’est qu’aucun d’entre eux n’était au courant pour la prise d’otages, son fomenteur ayant réussi à les manipuler sans se trahir. Ceci étaye donc encore un peu plus la possibilité d’être face à un individu seul, même si on ne peut encore en être certain. »
« Le deuxième renseignement pour sa part une certitude. La fratrie de magicien a effectivement lancé dans les règles de l’art un sortilège en tout point semblable à celui que j’ai reçu. L’enchantement prendra donc fin vers les onze heures du soir et le moindre choc psychologique de son porteur est susceptible de le rompre. C’est de la magie, ne cherchez pas à comprendre, ajouta-t-il en voyant une grande partie de son auditoire lever un sourcil interrogateur. Bref, je termine enfin par le plus important : Une de deux licornes a juré avoir vu le poney chargé du transport noter l’identité de ses passagers juste avant l’embarquement. À l’heure actuelle mon agent est encore à sa recherche, mais si elle parvient à mettre le sabot sur cette liste, l’évacuation des otages ne deviendra qu’une formalité… Pour peu que nous ayons neutralisé le terroriste. »
Laissant aux six pégases les temps d’appréhender ces multiples révélations, Homes se tourna vers le bureau sur lequel son messager picorait allègrement une pomme extraite sans gêne d’un tiroir. Passées ses humbles remerciements, la licorne lui demanda de retourner au plus vite auprès de Bonbon avec un message griffonné à la va-vite. Le rouge-gorge tenta de faire la sourde oreille mais, son maître faisant preuve d’insistance, il finit par abandonner de mauvaise grâce son repas après l’avoir au préalablement incendié.
Le poney parme attendit qu’il ait pénétré une nouvelle fois dans son trou pour éteindre le départ de feu. Pas que l’idée de faire disparaître ce meuble hideux lui soit désagréable, mais laisser au regard de tous un fruit juteux brûler de cette façon n’allait pas de pair avec le principe de discrétion. Cela, il était grand temps que Passered le comprenne…
« Homes ? l’interpella Light après une rapide délibération avec son équipe. Je viens de discuter avec mes collègues, et en vue des nombreux éléments que vous venez d’apporter, nous pensons qu’il serait plus sage d’accepter votre aide. Avez-vous un plan, une idée pour nous permettre d’évacuer sans risques ces poneys ?
-Sans risques non, admit l’autre étalon qui jubilait intérieurement. Mais si tout se passe bien il n’y aura aucun autre blessé et le coupable se retrouva derrière les barreaux d’ici ce soir ! »
Homes commença alors à détailler l’opération qu’il avait imaginé dès son arrivée à Cloudsdale, n’hésitant pas à créer des cheminements complexes -voir même tordus- pour assurer au mieux sa discrétion. Silencieux et attentifs, les pégases commencèrent les uns après les autres à hocher la tête en signe de consentement, preuve que cette collaboration leur plaisait malgré l’hostilité survenue lors du premier contact.
Ce n’est qu’au moment où la licorne lilas dévoila la répartition très inégale des rôles que les protestations commencèrent. « Pour qui vous nous prenez ? s’indigna le pégase au poil vert. Nous sommes des agents de terrain, bon sang !
-Il a raison, ne comptez sur nous pour rester ici pendant que vous faites tout le travail ! renchérit un de ses comparses.
-Je veux une discrétion absolue durant cet assaut, expliqua calmement le nouveau cerveau de la cellule de crise. Le terroriste doit assurément vous connaître et il a bien signalé que les forces de l’ordre ne devaient effectuer aucuns mouvements suspects. Vous restez donc ici, un point c’est tout.
-Mais…
-Peut être avez-vous une meilleure idée à proposer ? » Le poney baraqué ne répondant pas, Homes s’empressa d’achever son briefing, celui-ci ayant duré déjà trop longtemps.
« Aucun poney hors de ce bureau ne devant être au courant de cette intervention, vous seuls pouvez préparer l’évacuation qui se déroulera dès que j’aurais neutralisé le preneur d’otage. Soyez suffisamment astucieux pour qu’elle puisse se faire en toute sécurité dans les plus courts délais. Cela peut ne pas plaire à certains d’entre vous, mais il s’agit d’une étape primordiale qui ne doit pas être négligé. »
Ne trouvant rien d’autre à dire, l’étalon chargé de la délinquance magique regarda son semblable ailé dans l’attente d’une approbation qui, étrangement, ne vint pas. Alors qu’il était sur le point de requérir verbalement son accord pour débuter les opérations, le préfet au pelage bleu s’approcha de lui, souhaitant sans doute que leur échange demeure secret. « J’accepte de vous faire confiance à deux conditions non négociables, chuchota-t-il froidement. Un, mon meilleur élément vous accompagnera lors de votre assaut. Et deux, vous assumez toutes les conséquences en cas de problèmes, est-ce clair ?
-Vous devez avoir le sommeil difficile pour faire preuve d’une telle lâcheté envers votre travail, l’invectiva haineusement Homes.
-Vous devez avoir une vie particulièrement ennuyeuse pour sauter sur cette affaire comme s’il s’agissait d’un jeu. » Répondit Light sur le même ton.
Un instant passa durant lequel les deux poneys s’observèrent durement. Puis, comme s’il venait d’avoir une révélation, le cornu se mit brusquement à sourire. « Un jeu » disait-il ? Oui, on pouvait parfaitement interpréter cette crise de cette façon, mais contrairement à ce que son rival pensait, Homes n’était pas venu ici pour s’amuser. Il prenait en effet ce « jeu » très au sérieux et n’avait réellement qu’un seul objectif en tête : Celui de gagner, qu’importe la manière. « D’accord, j’accepte. Qui m’accompagnera ? » Demanda-t-il sur un ton volontairement détaché.
Passé sa surprise, Light héla la jument au pelage doré qui se maintenait jusqu’alors à l’écart de ses supposés collègues. D’abord réfractaire à toute forme de collaboration, la dénommée Yearling finit par céder face à l’insistance du préfet, ce dernier ne semblant détenir qu’une autorité relative à son égard. Homes n’était pas non plus particulièrement emballé à prendre comme équipière cette pégase qu’il trouvait un peu trop jeune, mais il n’avait honnêtement plus le choix.
« Je suppose que vous avez une issue à l’arrière du bâtiment nous permettant sortir en toute discrétion ? S’enquit la licorne auprès sa nouvelle partenaire de circonstance qui hocha affirmativement la tête. Dans ce cas il n’y a pas une seconde à perdre, allons-y !
-Chef Homes ? l’arrêta brusquement Derpy qui, emportée par les évènements, n’avait pas réussi à se manifester plus tôt. Que… Quels sont vos instructions pour moi ?
-Venez ma chère, je vais vous expliquer en chemin. » Ouvrant l’épaisse porte du bureau grâce à sa magie, l’interrogée se dépêcha de la refermer après un dernier regard entendu échangé avec le maître des lieux. Ils avaient conclu un marché, et Homes comptait bien l’honorer qu’importe ce qui lui en coûtait.
Se trouvant désormais seul avec les deux juments ailées, le poney au crin océan s’empressa de donner ses instructions à sa secrétaire : « Je veux que tu surveilles ces poneys. Participe comme tu peux aux tâches qu’ils effectueront histoire de ne pas te faire remarquer, mais ne laisse aucun d’entre eux quitter ce bureau, compris ?
-Mais… Mais pourquoi cela ? Vous ne leur faites pas confiance ? répliqua la pégase grise en observant anxieusement la réaction de l’agent Yearling.
-Non. J’ai peur qu’ils ne tentent quelque chose dans mon dos, comme prévenir les Wonderbolts par exemple. Or cela ne doit arriver pour rien au monde. Maintenant retourne y et essaye de paraitre naturelle. » Hochant doucement la tête, la jeune Derpy se dirigea un peu à contrecœur vers le bureau du préfet.
Alors qu’elle était sur le point de tirer l’épaisse poignée avec une habitude trahie par son aisance, son chef l’arrêta une nouvelle fois. « Derpy ! Jusqu’à maintenant vous avez fait de l’excellent travail, ne les laissez surtout pas vous humilier. » Touchée ces louanges, la ponette au crin blond s’empressa de passer la porte, un sourire déterminé sur les lèvres.
« Vous êtes conscient que je peux encore prévenir le préfet de l’échange qui vient d’avoir lieu ? l’interrogea la pégase dorée, sa voix quelque peu vibrante sous la colère.
-Oui, mais je pense que vous avez suffisamment le sens des priorités pour remettre à plus tard cette divulgation. » Yearling émit un long soupir en signe d’approbation, puis intima à son interlocuteur de la suivre jusqu’à la sortie.
Alors qu’il était sur le point d’obtempérer, Homes aperçu sur le sol juste à ses pieds une petite plume de couleur cyan. Pris d’une brusque intuition, il ouvrit le placard attenant à l’entrée du bureau, et tel ne fut pas sa surprise d’y trouver une minuscule pouliche au pelage bleue et à la crinière arc-en-ciel. « Qu’est-ce que tu fais là ? lui demanda-t-il durement en la sortant de sa cachette. Tu nous espionnais, c’est ça !
-Mon… Mon papa travaille ici, bredouilla la jeune pégase toute penaude. Je… Je voulais lui apporter comme cadeau la citronnade que j’ai faite moi-même. » Comme preuve de son innocence, elle brandit une petite bouteille remplie d’un liquide jaunâtre dans lequel l’étalon ne se serait jamais risqué à tremper les lèvres malgré la chaleur.
« Pourquoi te cachais-tu alors ? reprit-il, un air toujours sévère sur le visage.
-D’habitude il sort toujours à midi pile pour manger, je voulais le prendre par surprise à ce moment-là. Il était tout triste en ce moment, je souhaitais juste lui faire plaisir ! » Des larmes commencèrent à couler sur les joues de la pouliche au poil cyan, ce qui eut pour effet immédiat d’étouffer la colère de son tourmenteur. La situation avait beau être en effet tendue, rien ne justifiait son emportement envers cette gamine au flanc encore vierge. D’ailleurs rien au monde ne devait justifier les pleurs d’une enfant !
Désireux de ne pas aggraver les choses, il lui demanda avec une infinie douceur de quitter le bâtiment par l’endroit même où elle était venue et de ne pas revenir avant la fin de la journée, ce qu’elle s’empressa aussitôt de faire aussi vite que se courtes pattes le lui permettaient.
« Pendant un instant j’ai cru que vous alliez par prudence l’enfermer dans une cellule pour le restant de la journée, commenta cyniquement sa coéquipière.
-Voyons, si je mettais derrière les barreaux tous ceux en qui je n’ai pas confiance, il n’y aurait pas beaucoup de poneys libres à Equestria !
-J’espère que ce n’est que de l’humour… » Souffla-t-elle en se dirigeant vers la sortie secondaire.
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