Les choses auraient pu être mieux. Je pensais à ça quand j'étais dans mon canapé, à regarder Applejack qui était pratiquement arrivée à sa taille adulte avec son 1,10m.
Désormais, elle ressemblait trait pour trait au personnage de la série car en plus d'avoir obtenu sa cutie mark, un matin lorsqu'elle fit pousser ses premières pommes dans le potager, ma copine trouvait qu'il lui manquait quelque chose. Après son travail elle avait achetés des élastiques rouges pour cheveux, puis elle invita la jeune ponette à refaire sa crinière un peu ébouriffée. Ce jour-là, j'ai vraiment compris que c'était Applejack, la crinière et la queue attachées de la même façon que dans la série, Clara avait fait du très bon boulot. Quant à sa cutie mark, c'était 3 petites pommes rouges semblables au show également. J'avoue avoir appréhendé obtenir autre chose mais quand elle apparut je ne fus pas surpris, au fond de moi je savais que c'était elle.
Je me souviendrais toujours de sa réaction. J'ai vu un petit flash apparaître sur son flanc alors qu'elle regardait ses premières pommes. J'étais vraiment heureux qu'elle ait enfin obtenu son talent, par contre elle m'a inondé de question.
« P’pa ! Mais c'est quoi ça ?
-Ça Applejack vois-tu c'est ce que l'on appelle une cutie mark.
-Et pourquoi j'en ai une qui r’ssemble à trois pommes ?
-Cette marque représente ce que tu sais faire de mieux dans la vie, elle signifie beaucoup de chose. C'est ce qui montre ta meilleure qualité, et si tu en as une avec trois pommes c'est justement parce que tu es très douée pour en faire pousser.
-Alors j’ferais pousser plein de pomme ? Beaucoup ? »
Et là j'ai regardé la cour, nous n'allions pas nous contenter de quelques arbustes supportant à peine le poids de ces fruits. Quand Clara vit qu'elle l'avait obtenu, elle aussi savait que nous ne pouvions pas rester longtemps dans ce petit appartement. Elle grandissait, sa cutie mark l'appellerait à son devoir quoi qu'il arrive, sa vie dans cet appartement ne serait qu'un triste échec. Ma compagne et moi nous sommes refusés de lui infliger ça, alors nous cherchâmes une maison avec un jardin assez grand pour faire pousser des arbres.
En parlant de Clara, elle était encore là, toujours à mes cotés. Elle avait obtenu un poste des plus prestigieux à la mairie : adjoint au maire. Presque tout le monde la connaissait dans le coin, je ne sais pas si c'était sa beauté ou sa facilité à parler au gens qui l'avait rendue aussi influente mais en tous cas elle avait un certain succès. Elle faisait partie de ma vie, comme celle d'Applejack qui un soir l'appela « maman » alors qu'elle lui recoiffait sa crinière. Je rit de sa réaction : le visage tout rouge et gêné à ne plus savoir quoi dire. Elle n'y avait pas échappé, sous le charme de cette petite jument qui ne demandait que de l'affection parentale, elle ne pouvait que rester vivre avec nous. Il y avait de l’affection pour moi aussi, plus que ce que je n’aurais jamais espéré d’ailleurs.
Là. J'étais dans cette maison, assez vaste, sur mon canapé à regarder le jardin sur lequel j’avais une belle vue à travers la grande véranda que j’avais installée. J'ai réaménagé chaque mur et chaque porte ; repeint les murs extérieurs en jaune afin de la rendre moins terne ; refaites quelques pièces et rénové les fondations. Sans me vanter, avec ce que j'avais appris de mon travail, je fis du bon boulot. Ma Clara avait finalisé la décoration et ma petite Applejack refait le jardin avec un superbe potager qui pouvait rendre jaloux n'importe quel jardinier.
J’avais abandonné mon appartement pour cette demeure, y vivre à trois devenait assez compliqué et maintenant que nous avions deux bon salaires nous pouvions nous permettre pas mal de choses. Applejack n'avait plus d'endroit à elle pour dormir dans mon vieil appartement quand moi et Clara voulions un peu d'intimité, il n’étais pas question de vivre plus longtemps dans un endroit aussi petit avec la ponette qui grandissait de jour en jour, cela devenait de plus en plus difficile pour elle de sortir car elle devenait beaucoup trop grande pour encore se faire passer pour un chien.
C'est alors que je revins sur ce que j'avais dit, tout aurait pu être beaucoup mieux. Dans ce jardin il y avait plusieurs petits pommiers faisant de belles pommes que je fis importer et planter. Ils m'avaient coûté un bras, mais parmi ces pommiers il y en avait un de différenciable des autres. Un tronc large et des branches fortes s'étendant vers le haut et loin largement envers son centre, ressemblant beaucoup à celui qu'avait mon oncle et ma tante.
Malgré le nombre de changement que j'avais apporté à cette maison, elle lui ressemblait encore un peu.
Quatre ans avant d’être sur ce canapé, on m'avait appelé en urgence pour que je vienne voir ma tante. Elle vivait ses derniers instants sur son lit. L'absence de son défunt mari l'avait beaucoup affaiblie malgré de nombreuses visites. Et même si elle me légua sa maison sur son lit de mort, je fus une fois de plus très affecté par sa disparition. Je ne savais pas si j'avais le mérite de reprendre cette demeure, j'ai longtemps hésité mais grâce aux douces paroles de Clara et au réconfort de ma petite Applejack qui m'ont aidé une fois de plus à surmonter cette épreuve, je me suis dit que je devais lui redonner une nouvelle vie. La laisser s’écrouler aurait été du gâchis, voir même, une insulte au seul proche familiale que j’avais. Pendant plus de deux ans, j'ai consacré des jours à rebâtir la maison qui avait tenu bon malgré le temps capricieux du Texas. Elle était seulement un peu fatiguée par les tempêtes et tornades qui avaient balayé la région en laissant des petites empreintes. J'y ai utilisé toutes les économies que moi et Clara devions utiliser pour normalement acheter une autre maison. Avec ce qu'il restait je me suis permis de faire livrer des pommiers prêts à être exploités.
Applejack ne s'est jamais sentie aussi heureuse parmi tous ces arbres, et moi je ne me suis jamais senti aussi ruiné. Mais tant pis, elle avait son propre domaine de pommiers, pas aussi vaste que dans la série mais ça commençait à y ressembler. Autant d’argent pour un simple sourire, c’était idiot mais ça valait le coup. Elle gambadait constamment entre ces arbres, comme si elle se sentait vraiment chez elle, l’appel de sa cutie mark avait vraiment un sens. Je dus faire des heures supplémentaires au point de ne pas voir Clara et la petite ponette durant plus de trois jours parfois. Cela me fit voir à quel point j'étais prêt à faire de tels sacrifices juste pour un petit poney, censé ne pas exister, comme l’aurait fait un père pour sa fille.
Je devais sans doute exagérer en disant que ça aurait pu être mieux, parce que si on regarde bien, je devais être l'homme le plus chanceux du monde. En arriver là avec un être imaginaire me paraissait impossible et pourtant... j'avais tout : une grande maison avec tout ce dont une famille pouvait rêver ; une femme des plus merveilleuses et ; malgré sa différence ; une fille. Je la considérait désormais tout à fait comme ma fille, même si je connaissais sa nature. L'idée qu'un jour elle reparte pour Equestria devenait de moins en moins envisageable car en plus de ne pas avoir trouvé de solution, ses amies n'auraient-elles pas fait en sorte de la ramener chez elle plus tôt ? Ça faisait maintenant presque dix ans qu'Applejack avait débarqué dans ma vie et toujours aucun signe venant d'ailleurs, j'avais cessé de me poser la question, parce que maintenant que j'y repense je vivais les meilleurs instants de cette vie.
Il y a une journée en particulier que je n'oublierai jamais, quoi qu'il arrive. Le soleil resplendissait et il faisait une chaleur assez douce pour se balader dehors avec un T-shirt sans avoir trop chaud et ne pas frissonner sous cette petite brise tiède. Qui n'avait pas envie de faire quelque chose en ce dimanche après-midi sous ce ciel sans aucun nuage pour y faire tâche ? Nous en tout cas, nous avions décidé d’immortaliser ce moment banal pour tout le monde mais pour moi inoubliable. Clara venait de s'offrir un appareil photo numérique professionnel avec un trépied pour que nous soyions tous les trois sur cette photo. Une photo de famille, c'est tout ce que nous avons fait ce jour-là, tous les trois assis contre ce large pommier dont le bois parvenait bien à faire ressortir nos couleur de vêtement ainsi que la robe orange d'Applejack. En fait, il n'y a pas eu une photo de famille, mais quatre que je ne céderais pour rien au monde. Elles étaient imparfaites, c'est tout sauf ce que nous voulions faire à l'origine.
En effet, la première était une photo de moi et Applejack assis contre l'arbre regardant d'un air surpris sur le côté droit où l'on voit une main floue, celle de Clara qui n'a pas eu le temps de venir poser avec nous. La deuxième prise : je souris en fixant l'objectif mais pas Applejack la bouche entrouverte regardant de nouveau Clara et un bout de son visage remplit de colère parce qu'elle s’aperçut encore que le minuteur étais réglé trop court. La troisième photo est une catastrophe totale, Clara s'était dépêchée de venir s'asseoir avec nous au point de trébucher pour tomber, prenant au passage un sabot d'Applejack directement dans l’œil droit, tout cela figé sur la photo. On a fait ce que l'on a pu pour la quatrième prise. On me voit une deuxième fois sourire normalement, assis derrière Applejack qui elle aussi parvient à sourire enfin mais avec un regard légèrement inquiet, dirigé furtivement vers Clara qui avait le visage empli de bonheur si on oubliait la trace de sabot marquant son œil droit. On la voit également tenir un dispositif « bricolé » avec du ruban adhésif pour prendre la photo à distance.
J'avais commencé à faire un album photo depuis un certain temps, pas celui qui reste au font d'un disque dur ou sur un réseau social dont j'avais totalement oublié l'existence. C’était bel et bien un album sous forme de livre avec des vraies photos sur papier. Il commençait par moi tenant un petit poney souriant pas plus grand qu'un chat prise avec la webcam de mon ordinateur, ensuite des photos en compagnie de Polycop jouant avec la ponette, puis d’elle et encore moi barbouillés de farine posant devant une tarte, de moi et Clara uniquement, et ce jour-là complété par ces quatre photos.
Polycop, qui nous rendait encore visite de temps en temps, s'était royalement fichu de notre tête en cette belle journée. L'appareil photo avait une commande vocale. C'est ce genre de moment que j'aimais, imparfait, mais qui me rappelle à quel point j'avais une chance incroyable. On ne s'ennuyait pas lorsque nous étions tous les quatre, chaque journée était exceptionnelle et immortalisée dans cet album. Il y avait des anniversaires, des après-midi de nous en costume de cowboy ou de nous en train de jouer.
Ce n'est pas grand chose pourtant, et même pour certains un calvaire qu'ils n'aimeraient jamais vivre, mais avoir une famille est tout ce qui comptait pour moi. Si c'était ce poney qui m'en avait encore plus donné l'impression ? Peut-être, au moins j'étais heureux, et plus que tout j'aimais chacun de ces membres, aussi bien Clara qu’Applejack.
Deux ans après cette petite photo de famille rien n’avait changé, ça faisait maintenant douze ans que ma petite ponette avait débarqué dans ma vie, à sa façon de parler, à sa voix plus aigu que dans la série, j'en avais déduis qu'elle devait avoir vers quatorze/quinze ans. Même à cet âge là je dus encore apprendre beaucoup de choses à Applejack. Son bouquin de notes prouvait qu'elle savait écrire, je me devait donc de lui apprendre. La pégasister avec laquelle je vivais m'a alors rappelé que les poneys terrestres d'Equestria utilisaient leur bouche pour écrire. Lorsque j'ai essayé avec elle, le résultat était hilarant. Je devais écrire son nom, j’ai fait un vulgaire gribouillis. Elle réussit à faire cela avant moi au bout de seulement quelques heures, et chaque jour elle apprenait plus de mots pour arriver à faire des phrases complètes puis enfin des petits textes.
Je dus aussi lui apprendre à récolter des pommes de cette façon unique dont elle avait le secret, taper avec ses sabots arrières pour faire tomber les pommes mûres. Malgré mes 31 ans je bougeais encore bien, j’avais une pêche d'enfer, Clara prit un malin plaisir à me prendre en photo en train d'imiter le geste devant Applejack me regardant avec un air étrange. Il n'a fallu que quelques essais avant qu'elle ne comprenne vraiment comment faire, c'était impressionnant ! Elle possédait une telle force dans ses pattes arrière que le bruit sourd et dur que produisaient ses sabot sur les tronc d'arbres s'entendait même dans la maison. Toutes les branches bougeaient d'un coup sec faisant tomber quelques pommes, une année elle avait réussi à faire tomber tous les fruits d'un arbre en un seul coup. Elle avait vraiment un don, plus j'en découvrais sur elle et ses talents, plus j'étais fier. Elle ressemblait de plus en plus à l'Applejack de la série. En temps normal j'aurais dit que si elle repartait chez elle on l'aurait retrouvée telle qu'elle avait disparu et cela même après douze ans d'absence, mais après toutes ces années il n'y eu aucun signe d’une quelconque activité anormale ressemblant à ce qui s'était passé avec la tornade, pas même un OVNI ou quoi que ce soit n’avait été observé. Cette idée de la voir partir pour Equestria disparaissait de jour en jour...
Un soir, j'étais allongé sur mon canapé à regarder la télévision en compagnie de Clara. Applejack elle, dormait dans sa chambre. Je regardais un programme documentaire sur la culture des oranges en Espagne. Je m'en fichais totalement, j'étais plus captivé par Clara qu'autre chose ; elle lisait un livre. Ce n'était pas n'importe quel ouvrage mais bien les notes de la jeune jument, elle le connaissait mais comme moi elle n’avait pas décrypté le tout en détail, c'était assez difficile avec tous ces croquis de pommes et mots écris à la va-vite, ainsi que toute cette terre dispersée sur les pages. Elle devait écrire ces notes au milieu de son verger en tenant le bouquin avec les sabots pleins de terre.
« Tu lis encore ce truc ? lui demandais-je.
-J’essaie de comprendre quelques phrases, si ça se trouve on arrivera à trouver comment elle a pu atterrir ici.
-J'ai déjà regardé plein de fois, avec toute cette terre sur les pages on voit rien.
-Attend regarde ! s’exclama-t-elle en montrant du doigt un paragraphe recouvert de marron. »
Elle avait des yeux de lynx, malgré la terre qui recouvrait certaines lettres, de la terre venant d'Equestria, elle était parvenue à faire ce que j'ai tenté pendant plus de dix ans. Je lui ai demandé de lire à voix haute, tout en me disant que j'avais peut-être besoin de lunette.
« Applebloom va avoir son premier diplôme à l'école et je ne voudrais manquer ça pour rien au monde, mais les Pommes Zap vont mûrir au même moment et si je ne suis pas là pour les cueillir elles disparaîtront. Les Pommes Zap représentent la moitié de notre chiffre d'affaire et Big Macintosh ne pourra pas toutes les ramasser à lui seul. J'ai donc dans l'idée d'aller demander de l'aide a Rainbow afin qu'elle me fasse un Sonic Rainboom, l'arc-en-ciel généré provoquera peut-être la dernière étape faisant ainsi mûrir les pommes avant l'heure. J'ai peu d'espoir que ça marche, mais qui ne tente rien n'a rien... »
Clara et moi nous sommes regardés de la même façon : stupéfaits. La raison était là, je me souviens encore de cet épisode où les étapes de floraison et de récolte de ces pommes étaient assez spéciales. Il était impossible de les récolter avant l'heure sous risque d'avoir de mauvaises surprises de la part de ces arbres magiques. Le Sonic Rainboom était quelque chose de très puissant, ce qui aurait pu provoquer une réaction en chaîne assez violente capable de faire disparaître Applejack si elle se tenait au milieu, assez puissant pour non seulement la ramener ici mais aussi pour la rajeunir au passage.
Le bouquin n'en disait pas plus, après ces notes il n'y avait que des pages blanches et sales, ce qui confirmait mon hypothèse. Je ne savais pas si je devais lui dire au risque de la troubler, j'ai donc laissé ça de côté pour qu'un jour peut-être je puisse me servir de ça à des fins utiles. C'était assez débile de dire ça quand on n'a rien de magique dans ce monde. Qu’aurais-je du faire ? Trouver des pommes naturellement multicolore qui poussent en cinq jour avec un engin capable de passer la vitesse du son en produisant un arc-en-ciel magique ? On gagnait bien notre vie, mais tout de même! Construire une machine a voyager dans le temps reviendrait moins chère. De plus Applejack ne parlait pas de ses origines même si elle avait vue la série en entier. Et si on lui en parlait elle s'en contrefichait, ce qui était assez dérangeant. Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi et ça me tracassait, je n’osais pas aborder le sujet avec elle car j’étais trop craintif vis-à-vis de sa réaction, j'avais peur de créer une discorde entre nous. De plus nous étions heureux, et l'idée de briser cette harmonie me faisait trembler, je voulais que les choses restent comme elles étaient pour toujours.
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