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La Chute de Vitranis

Une fiction écrite par Nova.

Assaut de choix

25 h 12, 4 Fala, an 2236, Ère V

Au fin fond d'une sombre structure positionnée en pleine mer, se trouva une cellule... au fond de cette dite cellule se trouvait un étalon de robe sombre à la crinière brune en bataille, une blouse rapiécée et des lunettes explosées. Il était retenu par les sabots antérieurs, suspendus par en haut, bien que ses sabots postérieurs touchaient le sol. Il n'était pas contre un mur, mais au milieu d'un rai de lumière envoyé par une source lumineuse de petite taille mais agressive, du sang bleu sombre lui coulant de la bouche, il semblait avoir été battu.

Une jument en uniforme militaire beige se tenait devant lui, avec une sorte de gant noir à l'un des sabots. Elle était de robe noire, tout comme sa crinière lisse, et arborant des yeux d'un rouge menaçant.

« Professeur... cela fait bien une heure que vous êtes mon invité, et vous n'avez toujours rien dit de satisfaisant... » déclara-t-elle sarcastiquement, faussement maniérée.

« Parce que vous connaissez déjà mes travaux passés, mon point de vue et ma déontologie... alors vous pouvez cordialement vous brosser. » répliqua-t-il en crachant un glaviot de son sang sur le sol.

« Continuez donc de résister poliment... il va bien falloir que la douleur finisse par changer ça, au bout du compte... on n'a pas peur de cogner les républicains, ici. »

« Et vous, continuez donc d'essayer de me faire parler... je n'ai plus rien à perdre que vous puissiez me retirer. »

« Oh que si... ces choses que vous prenez pour vos « filles ». On est plutôt bien renseignés... Pourquoi ne pas nous aider à leur faire... des « frères et sœurs » ? Chacun les siens, professeurs... histoire de se battre à armes égales. On a plein de documentation technique sur elles... « Vue du spectre lumineux/Radiocaptif », « Liste des tracas physionomiques », « Désagréments dysfonctionnels »... oulà, on a de quoi faire du beau dégât, si l'on veut... »

« Elles ne sont pas des armes, peu importe ce que vous dites ! »

« C'est là que vous vous trompez... tout peut servir d'arme. Du plus petit caillou jusqu'à l'outil le plus sophistiqué... même la Magie est devenue une arme, en des temps passés, n'en déplaise à tous ces fanatiques de l'époque que l'on appelait des « Mages ». Erreur sur toute la ligne... »

« De toute façon... si jamais vous deviez vous en prendre à elles... vous ne les arrêterez pas. Personne ne le pourrait. »

« Oh, tiens donc ? Et pourquoi ça, professeur ? Je suis très curieuse de l'entendre... »

« Parce qu'elles sont plus évoluées que de bêtes petits soldats bien obéissants et programmés comme vous espérez faire... elles ont ce qu'aucune machine ou personne endoctrinée n'aurait ici... le choix, « Générale »... le Choix, avec un grand C. »

« Quel bel utopiste vous faites, professeur... vraiment. Sauf qu'est utopie ce qui ne peut être atteint. Vos « filles » sont des êtres imparfaits que vous avez créées, un simulacre de vie. En cela, elles sont des machines, peu importe à quel point vous avez travaillé leur esprit... »

A ce même moment, une explosion sourde se fit entendre bien au-dessus de leurs têtes, accompagnée d'une petite secousse et suivie d'une sirène qui retentit dans le complexe.

« Hé hé hé... elles ont le choix, Générale... et elles en ont fait un... » ricana-t-il, devinant exactement ce que ça voulait dire.

« Qu'on mette en place les contre-mesures prévues ! Scellez les portes blindées et déployez les méchas de combat, tout le reste aux lignes de défense ! » aboya la jument gradée.

« On se rend compte de ses erreurs, peut-être... ? » déclara Tinsk, sûr de lui et des juments de nébuleuse.

« On va accueillir vos « filles » comme il se doit, professeur. On s'attendait plus ou moins à leur visite, vous savez... »

« Je pense bien que vous ne serez pas déçue de leur capacité à répondre à votre accueil... »

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Les juments de nébuleuse arrivèrent en début de nuit en vue de la fameuse base maritime, située en pleine mer, à une vitesse proche du son. L'eau était d'un calme, le ciel était relativement dégagé, chose rare, et cela permettait de pouvoir parfaitement voir les trois lunes, respectivement brune, beige et rouge, semi-noyées dans l'immense amas de nébuleuse violette qui colorait le ciel de Vitranis.

La base semblait être une énorme structure en acier noir, qui dépassait d'une cinquantaine de mètres de l'eau, et qui semblait s'enfoncer bien profondément sous les mers. La raison que la base soit autant découverte n'est qu'un des effets du changement climatique dont est victime la planète, les eaux du globe ayant baissé de plusieurs mètres.

Autour de la base se trouvaient plusieurs plate-formes d'appoint flottantes, pour les trois navires de guerre qui mouillaient aux alentours. Des bâtiments plutôt corrects pour un seul endroit, des croiseurs. Ces derniers commençaient à s'armer, alors que les juments entraient dans les radars.

« Sœurs, vous vous souvenez ce qu'on a convenu : pas de morts. Visez la neutralisation. Détruisons les appareils si cela ne risque pas de faire de victime, comme des pilotes ou des artilleurs. » déclara Alpha à Beta, Delta et Zeta en formation.

« Retenu, Alpha. Delta et moi allons nettoyer l'extraction pour Père. Zeta, pars-tu avec Alpha dans le complexe ou restes-tu avec nous ? » fit Beta, ayant Delta sur le dos car cette dernière n'avait pas d'ailes.

« Je reste avec Alpha ! Je veux voir papa, et je veux pas la laisser toute seule à l'intérieur ! »

« Très bien Zeta, alors reste bien près de moi, et sois forte. Nous sauverons Père. » déclara Alpha avant que le quatuor de juments se sépare en deux binômes tout en fonçant dans les airs.

Avant même qu'Alpha et Zeta se posent dans l'accès supérieur du complexe, Delta effectua un gros tir magique de sa corne ayant lui en vert, depuis le dos de Beta qui fonçait les cieux à toute vitesse, en direction du sommet afin de neutraliser et faire s'effondrer les antennes de communication, dans un bruit sourd. Ces dernières explosèrent dans l'eau une fois tombées.

« Communications neutralisées, Alpha. Ça nous laissera tranquilles. » déclara Delta malgré la distance qui séparait les binômes, grâce à un sort qui gardait Alpha et elle reliées.

Alors que Beta continuait à foncer autour de la base à grande vitesse, Alpha et Zeta se posèrent à une plate-forme d'accès, à quelques mètres au-dessus du niveau de la mer. Six soldats en uniforme de combat beige firent immédiatement feu avec leurs armes sur Alpha, Zeta se cachant derrière cette dernière. Mais au lieu de vulgaires balles, il semblait que les armes étaient chargées avec des projectiles électriques, ce qui avait nettement plus d'effet sur leur nébuleuse que la dernière fois dans la base républicaine. Cependant, Alpha les repoussa comme un rien dans l'eau, grâce à sa magie.

« Ils s'attendaient à notre visite, ils sont armés en conséquence. Delta, méfiez-vous de leurs tirs, Beta et toi. On a eu affaire à des fusils électro-chargés. On va rentrer dans le complexe, ils ont déjà blindé les accès, ne traînons pas. »

Une aura rouge entoura l'entièreté des portes, et cette fois, au lieu de violemment les écarter comme dans la base républicaine, Alpha... les arracha carrément, pour les jeter dans l'océan. Cependant, au vu de leur résistance, elle avait eu besoin de forcer un peu sa puissance.

En entrant s'offrait devant elles un très large puits, ceinturé par des escaliers et avec un monte-charge au centre pour le gros matériel. Cependant, vu la taille du puits, les deux alicornes choisirent aisément de sauter dedans et de se réceptionner avec fracas en bas dans le cas d'Alpha, et de manière plus maladroite et adoucie pour Zeta.

Une trentaines de soldats à couvert les tenaient en joue. La salle se trouvait être une grande réserve, avec nombre d'appareils électriques de haute tension. Il y avait également deux batteries de canon électriques... comme l'avait souligné l'alicorne, la base avait les moyens de leur résister farouchement.

« Je suis ici pour Père. Écartez-vous, ou je devrai vous défaire tous. » déclara-t-elle en haussant la voix afin d'être entendue.

Personne ne tilta, tous restaient en joue, certains prêts à faire feu au moindre geste.

« Réitération de l'exigence : rendez-nous Père. Immédiatement. »

Ne se faisant pas obéir, en même temps elle s'y attendait, le bout de sa corne crépita brièvement en rouge alors que tous les générateurs de la salle eurent un sursaut d'énergie et toutes les armes que tenaient les soldats dans leurs sabots leur échappa, allant tous se fixer sur les diverses machines sur-alimentées, et même les batteries penchèrent et se renversèrent sous la soudaine attirance électromagnétique. Suite à quoi, ils sautèrent tous, véritablement, plongeant le complexe dans une obscurité palpable à de nombreuses zones.

Seules les deux alicornes de nébuleuse luisaient dans l'obscurité, ce qui les rendaient facilement discernables... fort heureusement, contre une trentaine de soldats désarmés, elles n'avaient pas de risques. Si Alpha n'eut pas le moindre soupçon de difficulté à neutraliser les soldats qui venaient au close combat malgré leur nombre, ce fut beaucoup moins le cas de Zeta, qui, malgré quelques frayeurs inhérentes au fait qu'une enfant doive se défendre, le faisait avec courage. Deux soldats lui sautèrent dessus pour la coincer, mais leur poids fit se vaporiser le corps de la pouliche, qui se reforma naturellement tout près, alors qu'elle continuait de galoper dans toute la salle, tandis qu'Alpha finissait de rendre toute menace inopérante sans la moindre entrave. Cette dernière attrapa les deux militaires par les sabots postérieurs, grâce à sa télékinésie rouge, les tenant tête à l'envers devant elle.

« Un conseil si vous tenez à votre intégrité osseuse, na'sberiens : Ne. Touchez. Pas. A. Ma. Sœur. » lança-t-elle avec une meilleure fermeté que la dernière fois, avant de les jeter vers un pilier pour les assommer, comme de vulgaires sacs à patates.

Alpha transparaissait vraiment comme la figure de la grande sœur protectrice qui ne supporte pas qu'on touche aux siens, malgré son manque d'expressivité. En tant qu'êtres artificiellement crées, elle semblait pourtant bien plus dotée de « chaleur équine » que la plupart des soldats et politiques qu'elle avait rencontrés, et qu'elle commençait... à mépriser. Bien que leur existence effective soit encore très brève, elle et ses sœurs semblaient assimiler relativement vite ce qui faisait un être « vivant »... et surtout grâce à Zeta, qui était « naturellement » créée sur ce modèle de pensée, qui influençait la psyché de ses grandes sœurs par ses simples sentiments. Elles apprenaient et assimilaient les ressentiments de leur petite benjamine.

L’aînée de nébuleuse vint auprès d'elle tranquillement, d'un pas calme, avant de l'inviter à la suivre tout aussi calmement, tout en signifiant qu'elle fallait bien qu'elle reste auprès d'elle. Le complexe plongé dans le noir, elles n'eurent cependant aucun mal à se repérer, à cause de leur sens premier de radio-luminescence. Nul besoin de lumière pour évoluer ici-bas en ce qui les concernait.

Après qu'Alpha aie débloqué le prochain accès à l'aide de sa puissante magie, par la force, le binôme luisant s’enfonça toujours profondément, alors que les générateurs de secours prirent le relais, laissant juste de quoi laisser tourner la sirène du complexe ainsi que quelques gyrophares d'urgence. La résistance semblait maigrelette dans ce dédale de couloirs plongés dans la pénombre.

Alpha prenait régulièrement des dégâts électriques qui l'affectèrent, les rares adversaires lui tendant des embuscades. Sa nébuleuse s'affaiblissait progressivement, tandis qu'elle apprit relativement vite à déjouer leurs tactiques, et plus que tout, elle empêchait le moindre tir d'atteindre Zeta.

Une fois un instant de calme atteint au beau milieu des couloirs, le binôme s'arrêta pour reprendre de brèves forces, car même si Zeta ne se faisait pas toucher, elle faisait tout pour esquiver et se protéger, et elle était celle qui générait le moins d'énergie des quatre.

« Delta, comment ça se présente pour vous deux ? » demanda Alpha grâce à leur sort de communication.

« Des difficultés, mais l’extraction ne sera pas compromise. Actuellement un croiseur inopérant, un autre en naufrage, et on est sur le dernier. Les batteries de missiles ont déjà été détruites. Et vous ? »

« Ils sont très dispersés et attaquent par embuscades, ils profitent de leur connaissance des lieux. C'est un véritable dédale, nous essayons encore de trouver Père. Je soupçonne qu'ils se massent au lieu de sa détention. »

« Très bien. Soyez prudentes, Zeta et toi. On se revoit pour extraction de Père. »

Reprenant leur route, toutes les deux ne rencontrèrent plus de résistance, à part une énième porte blindée, davantage que les précédentes. Il y avait facilement trois couches de portes pour leur bloquer l'accès.

« Ça ne peut être qu'ici, Zeta. Recule... vu la profondeur où nous nous trouvons, je ne peux me permettre de purement détruire cette porte... la pression compresserait la base. »

Lentement elle approcha sa corne, qui luit fort en rouge, de la porte blindée. Une fois presque au contact, la lueur s'intensifia davantage, devenant aveuglante, alors que l'acier commençait littéralement... à chauffer et à fondre, rougeoyant. L'on pouvait entendre la panique de l'autre coté.

« Elles sont en train de faire fondre la porte ! C'est un cauchemar !! » s'écria une voix féminine de l'autre coté, certainement la Générale des lieux.

Alpha finit de faire fondre l'acier en fusion, écartant la flaque brûlante et luisante d'un simple coup télékinétique afin de pouvoir marcher de manière sûre avec Zeta planquée entre ses sabots pour la suivre maladroitement. S'offraient à elles une scène qui n'était pas très avantageuse... Tinsk était enchaîné sur une poutre en bois, la dite Générale juste à coté de lui, alors que tenaient en joue une trentaine de soldats retranchés, tenant leur arme en tremblant légèrement.

« Les filles... même si je suis soulagé de vous voir saines et sauves... vous n'auriez pas dû... » déclara Tinsk, entravé.

« Nous ne pouvons vous laisser ici, Père. Jamais. » déclara fermement Alpha.

« Cela ferait presque une belle histoire, digne des plus grands navets sur la robotique... « La Créature s'attache à son Créateur, et fait tout pour le sauver »... comme je l'ai souligné précédemment à votre cher « Père », vous n'êtes qu'une étincelle de vie animée et programmée, qui agit par conséquences logiques. Des logiques que vous ne pouvez comprendre ou défier. Ce bon professeur a tout perdu avant que vous soyez activées... il fallait bien que des gens se mettent à l'aimer à leur place. Vous, en l’occurrence. Et je vais le prouver. » expliqua la jument autoritaire.

D'une pression sur une télécommande, un bruit strident et désagréable retentit, ressemblant à d'aigus éclairs répétés très rapidement, un peu à la manière d'un réveil. Si pour la majorité de l'assemblée, le bruit était juste désagréable... pour les deux juments de nébuleuse, ce n'était pas la même chose : elles se tortillaient au sol, incapables de faire des gestes contrôlés. Leur expression faciale à elles deux ne semblaient laisser aucun doute, même sur Alpha : elles souffraient, intensément. Des amas de nébuleuse, en intense souffrance mentale et physique à cause d'un son très particulier... et Tinsk ne pouvait rien y faire, si ce n'est souffrir lui-même, intérieurement, de les voir ainsi.

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