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La maladie venue d'ailleurs

Une fiction écrite par GeekWriter.

Chapitre 5

Soft Driver grogna doucement en ouvrant ses yeux. Il secoua doucement sa tête en tentant de se redresser, mais une vive douleur ainsi qu’un petit sabot doré se posa sur son visage, le repoussant doucement dans le lit trop petit où il était allongé sur le flanc. Malgré le flou, il reconnut le crin noir aux reflets argentés de Dungeon Maker, cousine de sa protégée. Il soupira alors.

« Je suis dans quel état ?

-Dans un très mauvais état. Ca fait plus de trois jours que tu dors. Tu t’es fâché avec un dragon ? »

Bien que le ton de la ponette était à la plaisanterie, elle gardait une mine des plus sérieuse. Dungeon Maker était une ponette incroyablement dégourdie et touche à tout. Elle avait ouvert un bar à jeu malgré son total manque d’expérience et avait réussi à faire tourner son affaire. Elle avait aussi inventé et créer des équipements de cambriolage pour sa cousine lors de ses investigations. Et visiblement, elle connaissait aussi l’art de recoudre et de bander une blessure.

« C’est comment ? souffla-t-il comme si ces deux mots lui arrachaient un effort conséquent.

- Et bien… Ca donnerait de l’appétit aux créatures qui mangent notre race. Elle utilisa alors sa magie pour lui porter une potion à sa bouche. Tient, c’est un alchimiste zèbre qui a fait ça. Ca va t’aider à cicatriser plus vite. »

Il l’a remercia alors et but lentement.

« C’était quoi le truc qui vous poursuivait ? demanda Dungeon très sérieuse en déglutissant.

- Un poney.

- Avec cette carrure ? Ne me fait pas rire. Boit tout aller. »

Le destrier noir grimaça en tentant de repousser la bouteille du museau, mais la licorne tint la bouteille à l’intérieur de la gueule du malade, l’obligeant à engloutir le contenu.

« Bwah, le goût est ignoble. râla-t-il en tirant la langue.

- Oui, il doit l’être. susurra-t-elle avec douceur en esquissant un sourire sadique. Il y a du vers de terre et de la fiente de mouette dedans après tout. »

La meneuse de jeu observa son patient prendre une teinte légèrement verdâtre, la bouche bée avant d’éclater de rire.

« Non je plaisante ! Rend moi la tâche difficile et là, tu y auras droit. déclara-t-elle en rangeant la bouteille à présent vide dans un tiroir, reprenant un air sérieux. Bon alors c’est quoi ce truc ? Je vous ai vu passer à toute vitesse devant chez moi et le temps que j’arrive, je te trouve toi et un autre truc énorme effondré pas loin, dans les ténèbres. »

Le cheval grogna doucement de douleur, reprenant son souffle et ses esprits. La ponette elle, patientait tranquillement, son attention rivé sur son hôte. Soft Driver pouvait de nouveau sentir les odeurs alors que sa cervelle se remettait en route. Des flashs de son combat reprenaient place dans ses souvenirs, le faisant grimacer à nouveau alors qu’il se reposa contre l’oreiller, tâchant de se détendre.

« C’était Jack Steel Wings.

- La légende urbaine ? s’exclama aussitôt la ponette en s’étranglant.

- Ouaip. Où est Geeky ? »

La licorne à crin noir déglutit de nouveau, une teinte d’angoisse recouvrit son visage.

« Justement… c’est ce que je voulais te demander ensuite. Où est ma cousine ? »

Un long silence s’installa. Dungeon Maker porta alors un de ses sabots à sa bouche et commença à le ronger comme elle le faisait à chaque angoisse. Le destrier rassembla alors ses pensées, sentant sa fièvre prendre le dessus petit à petit.

« J’ai affronté Jack pour couvrir sa fuite vers le journal. Pour que Geeky puisse atteindre les bureaux. »

L’infirmière improvisée se rendit alors compte que sa cousine aurait pu disparaître n’importe où. Entre le coin où elle avait trouvé Soft ainsi que la diligence et le Dailymane, il y avait quelques centaines de mètres. Alors qu’elle s’interrogeait sur la marche à suivre, elle aperçut le destrier qui changeait d’avis et qui essaya de se lever. Elle lança un sort et aussitôt, les draps attachèrent les sabots de l’énorme patient qui grogna de douleur.

« Tss Tss ! Pas bouger le cheval. Ou je te fourre vraiment un verre remplit de fientes de rats volants dans le gosier. »

Elle avait fait sa voix la plus menaçante, celle qu’elle réservait à ses plus mauvais payeurs. Ou à Geeky quand elle insistait pour avoir un bloc de sel. Le destinataire lança un regard noir mais préféra ne pas prendre de risque. Sentant que le grand blessé avait autre chose à dire, la tenancière de bar lui apporta un verre d’eau avec sa magie, puis recommença à se ronger le bout du sabot.

« Je me suis fait des amis récemment… Laisse-moi les contacter... lâcha le destrier à bout de force avant que ses yeux ne se ferme. Ils sont dans un entrepôt au port de commerce… 137. » Quelques secondes plus tard, il émit un faible ronflement. Du bout du museau, elle vérifia sa température, attendrie, mais surtout heureuse de voir une telle créature vouloir se pousser à bout, rien que pour un membre de sa famille.

« Ne t’inquiètes pas Soft… Je prends cela en sabot. » Dit-elle avec douceur mais aussi avec une pointe d’inquiétude. Elle regarda par la fenêtre. Elle allait devoir aller dehors. Là où y’a plein de poneys qu’elle ne connait pas dans un environnement qu’elle ne peut contrôler. Elle mordilla plus fort dans son sabot mais prit tout de même sa décision.

Elle descendit au sous-sol et farfouilla dans ses tiroirs. Elle se saisit d’un drôle de dispositif qu’elle plaça dans sa bouche ainsi qu’une écharpe fait d’une matière transparente semblable à la soie mais en beaucoup plus vaporeux. La bande d’étoffe est très longue, assez en tout cas pour envelopper le cou de la ponette trois fois, traîner le long de son dos en deux autres bandes et avoir un peu de longueur traînant à terre. D’un mouvement de sabot, elle rehaussa l’étoffe autour de sa bouche avant de prendre son sac de selle et remonter dans son bar. Elle observa la porte avec appréhension, puis ce qui se trouvait derrière la vitre avec peur.

Elle poussa la porte du bout du sabot et verrouilla derrière elle. Elle se retrouva en pleine ville. D’habitude, elle se faisait livrer et s’arrangeait pour rester chez elle, tranquillement. Là elle se retrouva complètement submergée de sons et d’odeurs. Sa tension et son rythme cardiaque grimpèrent aussitôt et elle eut un réflexe : celui de se retourner pour remettre la clef dans la serrure. Mais elle tint bon : sa cousine était en jeu. Sa seule famille qui l’aimait et qu’elle aimait. Sa seule amie avec Soft Driver. Elle prit son courage en sabot et commença à se diriger vers le port.

Elle rasait les murs et sursautait à chaque son un peu trop fort pour elle. A chaque début de panique, elle pensa à l’être qu’elle devait aider, qui devait être quelque part, en danger. Et cela lui donna la force de continuer.

***

Hard Mouth entra dans le bureau. Il se sentait encore faible, mais pouvait arriver à le cacher avec suffisamment de sang-froid. Il avait l’expérience des coups de pressions et des situations explosives, voir dérangeantes. Il avait, enfin, l’habitude d’avoir des rapports plus ou moins houleux avec des supérieurs. Quoi que, là, c’est bien la première fois qu’il avait un patron, avec des envies meurtrières sur les employés ne lui plaisant pas.

Il s’avança dans le bureau qui était plein de poneys en train d’écrire. Ce qui, à neuf heures au matin, était plutôt inquiétant : soit il y a beaucoup de retard, soit personne n’est en train de faire d’investigations. Il poussa la porte du bureau de Money Maker et la trouva tranquillement en train de relire différents articles.

Il tapota du sabot sur le sol pour attirer l’attention et l’intéressée ne passa qu’un œil par-dessus les feuilles qu’elle tenait par magie. Elle baissa alors complètement les feuilles, laissant apparaître sa crinière rosée dont les reflets dorées, accentués par les reflets du soleil, agressaient les yeux de l’étalon sans vergogne. Cependant, la jument mature couleur cerise émit un sourire alors que sa corne cessa de luire.

« Je vous ai compté deux jours de salaire en moins. Que s’est-il passé pour que vous soyez absent ? demanda-t-elle aussitôt, remplaçant sa façade maternelle par un ton un crin plus menaçant.

- Le genre de travail que vous m’aviez demandé avant mon départ… Etait le premier du genre. répondit aussitôt le terrestre de manière abrupte. J’ai senti le besoin de prendre un peu de repos. »

La gérante plissa ses yeux de suspicion, comme pour transpercer l’âme de l’étalon de son regard et fouillé dedans. Elle haussa finalement des épaules et l’invita à s’assoir en face d’elle d’un petit mouvement de sabot.

« J’ai racheté les autres journaux de la ville. Nous avons donc le monopole. Suite… elle hésita un instant, les yeux perdus dans le vague. A la dissonance imprévue de Pizza Slice. Je n’ai pas envie qu’une enquête indépendante voit soudainement le jour dans une publication diffusée en dehors de Manehattan. Surtout si ça peut attirer l’attention des princesses en ces lieux.

-Et… Que comptez-vous faire du Dailymane ?

-Ici c’est simple. On prépare plein d’articles en avances sur des sujets précis et en fonction de la conjoncture, on met le bon article au bon moment. On profite d’un éventuel buzz en choquant les poneys et on organise une pseudo rivalité à travers des articles peu élogieux pour d’autres journaux. »

Durant toutes ses explications, elle était restée calme et calculatrice bien que l’on pouvait entendre un soupçon de plaisir dans la voix. L’ancien médecin prit place en face de sa patronne. Celle-ci lui tendit aussitôt un papier qu’elle semblait garder de côté avant de reprendre d’une voix douçâtre :

« J’ai préparé le papier pour Geek Writer. Prêt à être publié dès que le corps sera retrouvé. Ce sera votre récompense. »

L’étalon leva un sourcil de surprise, ce qui provoqua un sourire de la licorne couleur cerise.

« Pourquoi ne pas m’avoir laissé l’écrire ? finit-il par demander.

- Parce que vous n’êtes pas le meilleur pour ça. plaça-t-elle aussitôt.

- Alors pourquoi m’avoir demandé d’être le rédacteur en chef ? répondit-il avec un accent qu’il voulut vexer. Pourquoi ne pas avoir donné ce poste à un autre poney bien meilleur écrivain que moi ?

- Et bien. soupira-t-elle avec lassitude. Parce que tu as une écriture sans aucune passion. Tu as une méthode mécanique. J’ai compris que tu avais cette méthode pour chaque aspect de ta vie. Et tous ceux n’ayant pas de méthode pour quoi que ce soit ne vous inspire aucun respect. Voir vous inspire de la méfiance, de l’incompréhension et de la haine. Donc je vous ai placé là, parce que, c’est tout ce dont j’ai besoin à l’avenir. »

Hard Mouth sentit une douce colère lui monter au creux de la gorge et irradier sa poitrine d’une brûlante souffrance. Pour la première fois de sa vie cependant, il tint sa langue et serra les dents. Sa patronne le congédia d’un mouvement de sabot et il se leva pour débuter sa journée de travail.

***

Quelques heures plus tard, Dungeon Maker finit par arriver à l’entrepôt. Elle observa la porte et se rendit compte qu’il était gardé par des griffons portant des vestes de cuirs noirs. Elle ressentit aussitôt la panique ainsi qu’une certaine colère contre Soft Driver. Elle ne se sentait pas du tout prête à se jeter dans le bec des Wings & Talon. Elle caressa du bout du sabot son écharpe et se demanda ce que Geek Writer ferait pour se préparer mentalement à de telles choses.

Très régulièrement durant sa vie, sa cousine lui disait qu’elle devait avoir confiance en elle, car ses capacités lui permettraient toujours de surmonter tous les obstacles qui se présenteront à elle. Mais aussi et surtout parce que sa pire épreuve, elle l’avait déjà remporté. En y repensant, elle en couina de terreur tout en se recroquevillant. Oui, le pire était passé. Elle pouvait bien gérer une relation sociale impréparée dans un endroit où elle n’aurait aucun contrôle, et ce, sans aucun plan.

Enfin, après dix nouveaux mètres et surtout, après que les griffons l’aient vu, elle dû se redonner de nouveau du courage. Au bout de dix minutes, c’est avec exaspération que les griffons accueillirent la ponette à robe dorée d’un regard froid.

« Qu’est-ce tu veux la mignonne ? » Lancèrent ils avec agressivité et à l’unisson.

La tenancière de bar ne répondit rien dans un premier temps, ce qui énervèrent encore plus les griffons qui prirent une posture menaçante :

« Oh ! Tu nous as écoutés ? Si t’as rien à faire ici, tu dégages ! »

Elle ne bougea, ni ne répondit. Elle garda le silence, complètement paralysée, ne sachant que répondre et quel plan appliquer. Elle se contenta de fixer les deux gardes dans les yeux. Les deux se concertèrent, circonspect. Ils finirent par hausser des épaules et s’avancèrent vers la jument à crin noir pour la faire déguerpir. C’est donc avec une certaine surprise que celle-ci dégagea soudainement son écharpe pour révéler sa bouche. Ils eurent tout juste le temps apercevoir un drôle de dispositif en forme de mors avant d’entendre un léger son. L’instant d’après, un aiguillon apparu sur la gorge de l’un des gardes qui s’effondra aussitôt en ronflant. Le second griffon se jeta aussitôt sur la ponette alors que celle-ci fit illuminer sa corne. Son écharpe prit aussitôt vie et immobilisa l’adversaire à demi-félin. La licorne en profita pour se retourner et l’assommer d’une ruade bien placée.

Puis, Dungeon Maker se rendit compte des dix dernières secondes et en lâcha son mors trafiqué en sarbacane de stupeur. Elle se mit alors à trembler violemment, se tenant sa tête à travers ses sabots, répétant en boucle qu’elle regrettait et qu’elle ne voulait pas en arriver là. Une serre ouvrit alors la porte de l’entrepôt et bientôt une petite griffonne passa doucement sa tête pour observer ce qui venait de faire crier l’un des deux gardes.

Dungeon Maker nota aussitôt son observatrice et tendit un sabot tremblant vers elle, les larmes aux yeux. Elle se mit alors à crier désespérée :

« Non ! Je ne voulais pas ! J’ai eu peur, j’ai paniqué ! »

Elles restèrent toutes les deux sans bouger pendant quelques instants, puis le griffon femelle ouvrit complètement la porte. La ponette eue aussitôt des sentiments étranges et paradoxaux. La cause était ce nœud rouge que la petite emplumée portait sur le dessus de son crâne alors qu’elle portait aussi la veste de gang. Elle resta ébahit alors que la griffonne émit un tendre sourire ainsi qu’un geste de serre apaisant. Elle lui adressa alors avec une voix très douce mais ferme :

« C’est normal, on les a choisi pour ça. Ils connaissent les risques, on ne t’en voudra pas. »

Elle continua de s’approcher alors et utilisa l’une de ses ailes pour entourer la ponette, encore tremblante, pour l’apaiser.

« Je m’appelle Jess. commença-t-elle tout en s’autorisant à approcher son visage juvénile de la grande effrayée. Allez, tant qu’à faire, on va entrer à l’intérieur. Ne t’inquiètes pas, je reste avec toi. »

Elle passa alors une serre autour de l’encolure pour entraîner avec douceur la tenancière du bar avec elle. Dungeon ferma alors les yeux et sentit son corps se détendre. Petit à petit, elle reposa son sabot à terre et remonta son écharpe sur son museau.

L’intérieur de l’entrepôt était aménagé comme un quartier général. Les deux créatures quadrupèdes passèrent dans ce qui semblait être une sorte de dortoir pour les griffons de gardes, puis dans une cuisine improvisée ainsi que qu’un mess tout aussi improvisée. Le tout sembla très rigide et très militaire. Chaque pièce était plus ou moins cloisonnée par des immenses caisses et des rideaux installés à la va vite. Elles traversèrent ainsi l’entrepôt qui était aussi vide qu’un bol à biscuit après le passage d’un enfant, montèrent un escalier pour arriver dans un bureau. La ponette s’arrêta à l’embrasure de la porte, voyant d’autres griffons qui se tournèrent aussitôt vers les nouvelles arrivantes, l’air soupçonneux. Ils étaient quatre. Au fond, se trouvait le plus ancien, occupé à préparer divers produits alchimique avec l’aide d’un livret et de lunette sur son bec. Dans un coin, assis sur une chaise, une autre griffonne au plumage et pelage parfait, était en train de s’aiguiser les serres en lui adressant un mince sourire. Enfin, à une table, près de l’entrée où se trouvait la touche-à-tout, deux griffons mâles disputaient une partie de cartes. Le premier était costaud et immense, le second, de taille normale avait un corps à la dynamique parfaite pour les concours de voltige et de vitesse. Jess prit la parole en première, toute joyeuse :

« Hey camarades ! Elle voulait nous voir, alors je l’ai amené ici. »

Si la seconde femelle adressa un signe de tête à la nouvelle arrivante, les trois autres replongèrent aussitôt dans leurs affaires sans un bruit. Celle-ci s’approcha alors et tendit sa serre droite vers la jument à robe dorée :

« Moi c’est Aurora. Tu as réussi à passer les grosses brutes à l’entrée ?

-Elle les a mis KO sans que je sache comment ! ricana Jess en portant une serre à son bec pour pouffer avec douceur. Ca devait être la première fois qu’elle fait ça, elle était toute terrorisée entre les deux gorilles. »

Avec prudence, Dungeon Maker tendit son sabot droit pour échanger les civilités. L’attention des mâles étaient cependant revenus et les trois l’observèrent avec curiosité à présent. Les deux emplumées emmenèrent l’équidé dans la pièce et lui offrirent le thé. Prenant ses marques, la tenancière de bar se sentit de plus en plus détendue. Elle renifla le thé, et reconnaissant l’odeur des agrumes, elle en aspira un peu avant de finalement en boire une gorgée.

« Merci » Souffla simplement la ponette.

Jess tapota gentiment l’encolure de l’invité alors que le griffon le plus ancien demanda aussitôt de sa voix docte :

« Vous êtes venue pour quoi ?

- J’ai besoin d’aide. » Déclara simplement la ponette en replongeant son museau dans le thé.

Le griffon le plus effilé émit alors un grand sourire :

« Ca dépend, tu as des bits ? »

Lui et son compagnon rirent aussitôt à l’évocation de ce vieux cliché raciale sous le regard exaspéré des trois autres. Le vieux griffon reprit alors la parole d’un ton sec :

« On ne peut pas. Au revoir.

- Matthew !

- On ne peut pas aider tout le monde Jess. On a déjà beaucoup à faire. » Trancha le dénommé Matthew qui se désintéressa totalement du cas de la ponette. La licorne qui commença à trembler de nouveau leva cependant la tête, un visage déterminé prenant peu à peu la place de la peur. Sa voix se fit forte et presque autoritaire, comme lorsqu’elle doit virer un malandrin de son établissement :

« Je viens de la part de Soft Driver. Il est blessé gravement et dans l’incapacité de chercher ma cousine qui vient de disparaître ! Alors remuez vos croupes ou je m’assure de vous humilier moi-même !

- L’arrangement avec Soft Driver ne concerne que Dagan et Jess. coupa aussitôt le vieux griffon qui continua de manipuler ses fioles. Et moi, quand j’aurai terminé, je vais avoir besoin de ces quatre-là. On a un problème majeur, je ne peux pas faire mieux pour l’instant. »

Le ton était sans appel. La maîtresse de jeu, complétement abattue, se rabattit dans son mutisme, la tête basse. La pénombre s’associa à l’une de ses mèches, ce qui couvrit les deux yeux.

N’ayant pas ordonné de mettre leur invité dehors, Matthew décida de revenir sur sa demande de congé et de lui laisser le temps de se remettre. Les quatre autres griffons comprirent d’instinct la décision de leur chef et laissèrent l’équidé tranquille.

Aurora se pencha doucement auprès du plus costaud pour lui murmurer :

« Dagan… on pourrait lui donner assez de bits pour qu’elle engage un privé.

- Moui… susurra-t-il. On peut faire ça. Mais là… j’ai une autre idée peut être. Va chercher tes cartes. »

Il se leva alors et s’approcha de la licorne. Jess était en train de lui essuyer les yeux avec un mouchoir, la mine triste.

« Tu aimes Friendship Duel ? le questionna l’immense griffon sans détour. On va faire une partie avec Aurora et Flitze. Duo contre duo. Les gros becs contre les douces et fragiles femelles.

- La douce femelle va te broyer gros naze. » Challengea la griffonne qui s’empara de son paquet de carte dans l’une de ses serre.

Dungeon se contenta de secouer négativement la tête mais le griffon avait une idée derrière la tête. Il voulait qu’elle se mette à jouer un peu afin qu’elle puisse se vider la tête. Il lui adressa un sourire goguenard et lui envoya avec un ton de défi :

« Si ton équipe gagne, on t’aide. Une objection Matthew ?

- Moui moui… »

Les quatre griffons sourirent en observant la ponette se relever soudainement, poser sa tasse sur la soucoupe avec bruit et sortir de son sac avec sa magie, un deck visiblement personnel. Elle se débarrassa de son écharpe et posa son sabot sur la table. Se remettant à la table, Dagan observa attentivement la ponette. Il pouvait voir dans son regard le feu qui lui brûlait son âme. Il trouvait aussi qu’elle avait un air un peu gothique avec cette mèche lui recouvrant l’œil gauche. A moins qu’elle ne soit que très timide. Mais elle ne gagnera pas. Dagan était champion de Friendship Duel et avait représenté les griffons à de nombreuses reprises. Elle connaissait le jeu, mais ce ne sera pas suffisant. Tous les participants mélangèrent leurs cartes, se regardant les uns les autres. C’était l’heure du duel et chacun allait dégainer pour descendre l’opposant.

***

Elle ouvrit les yeux et très faiblement, elle écarta une mèche violette à reflet vert. Sa poitrine lui faisait encore un mal terrible et elle ressentit le besoin de se mettre sur le flanc. Le lit où elle se trouvait était plus doux et confortable que le sien à son appartement. Elle en déduisit donc qu’elle n’y était pas. Et la douleur lui indiquait aussi qu’elle était vivante. Se souvenant de la décision de son propre sang la concernant, elle se demanda alors si c’était réellement une bonne chose.

« Ah, vous êtes réveillé. » Fit une voix à ses côtés. Elle ronchonna quelque peu, car elle devait se retourner, mais y parvint tout de même. Elle fût alors confrontée à une licorne mâle blanche au crin rouge. Il était en train de lire un roman dont la journaliste reconnue venir de sa plume. Elle se contenta alors de lui sourire. D’autres souvenirs lui vinrent en tête : Hard Mouth lui faisait une injection et sa mère demandant aux mafieux de jeter son futur cadavre dans un coin.

« Je ne suis pas dans une ruelle et encore moins décédée. commença-t-elle malicieusement. ---- Vous me choyez ?

- En quelque sorte, mademoiselle Writer.

- Ahh, j’en suis très heureuse. Mais on sera mieux chez moi je pense. » Enchaîna la ponette en tentant de se lever. L’avocat la repoussa gentiment du bout du sabot, la forçant à se rallonger même si ce ne fût pas une tâche des plus éprouvantes. Il n’en perdit pas son sourire, et au regard qu’il avait, l’écrivaine comprit qu’il n’était pas surpris de sa pathétique tentative d’échappatoire.

« Je me disais bien que je serai certainement prisonnière. Je vous préviens, je suis très pénible quand je m’ennuie.

-Je n’en doute pas. » Gaussa son geôlier en fermant le livre qu’il tenait entre les sabots. « C’est pour ça que l’on a pris quelques affaires à vous. »

Il se leva alors et alluma la lumière. La pièce se trouvait à l’intérieur d’un tout bien plus vaste, du moins, c’est ce qu’en pensa Geeky en regardant les fenêtres qui ne montrait que l’intérieur d’un autre bâtiment. On avait effectivement rapporté divers jeux vidéo et la moitié de sa bibliothèque.

« Où est mon matériel d’écriture ? demanda-t-elle aussitôt.

- On ne peut pas prendre le risque. Il paraît que vous êtes des plus surprenantes. répondit fermement le poney au crin rouge. Oh, et c’est ici aussi que nous conservons des biens des plus précieux.

- Il ne faudrait donc pas que j’abîme quoi que ce soit n’est-ce pas ?

- Non, Geek Writer. Nous serons tolérants, mais si vous faites n’importe quoi, sachez qu’il y a aussi Jack dans le bâtiment. »

La journaliste à robe grise blêmit aussitôt, la bouche bée. Il ne la menaçait pas de la jeter au pégase le plus dingue de la ville, il venait juste de l’informer qu’elle était enfermée avec lui. Donc, ses meilleures chances de survies étaient dans cette pièce. Pour l’instant.

***

Dungeon Maker soupira de frustration. Malgré le fait que son deck ait été construit pour qu’elle puisse contrôler un maximum de choses, jusqu’au hasard même, il semble que l’adversaire ait de biens meilleures cartes et de bien meilleurs stratégies. A moins qu’il n’y ait sabotage du côté de sa partenaire, Aurora, afin de ne pas perturber le plan initial des griffons.

***

Geek Writer plongea son regard dans celui de l’avocat.

« Combien de temps allez-vous me garder ? demanda-t-elle.

« Une semaine. Après, on vous transférera en secret à Ponyville, en faisant bien comprendre que vous devez être ‘’morte’’. Du moins, jusqu’à ce que l’on trouve une solution pour votre mère. »

***

Dagan joua une combinaison qui fit grimacer Aurora et fermer les yeux de la licorne.

« Je sais ce que tu te dis petite ponette. lança-t-il d’un air sournois. Tu penses qu’Aurora ne veux pas t’aider, pour respecter notre parole envers Matthew. Mais tu as tort. On est bien trop fier, pour s’abaisser à pareil stratégie. C’est juste que… tu n’as pas confiance en toi, alors tu veux contrôler chaque once de ton existence. »

Les deux opposants s’affrontèrent du regard alors qu’il asséna :

« Je n’ai qu’une parole, et tu as gâché ta chance en la jouant trop perso’. »

***

« Qu’avez-vous à cacher à propos des terreurs diurnes ? questionna soudainement la journaliste, soudainement très sérieuse. L’étalon perdit à son tour son sourire.

- Je n’ai aucune information là-dessus. Pour ça, il faudrait questionner le grand patron. Je vais te laisser te reposer. »

L’avocat se leva alors de sa chaine, emportant avec sa magie le livre qu’il était en train de lire. Un lourd et épais terrestre prit sa place alors. La jument affaiblie sourit, rougissante :

« Ah ben, au moins je suis en belle compagnie. »

***

Dungeon Maker rassembla son jeu en un seul petit tas et termina son tour en posant ses cartes face cachée devant elle. Malgré sa glorieuse résistance, ce ne fût pas suffisant, et elle se savait battue.

Aurora la regarda du coin de l’œil alors que le tour de l’épais griffon débuta. Il soupira d’aise en plaçant une carte et s’apprêta à lancer ses cartes combattantes l’assaut.

« On dirait que la partie est terminé pour toi ma chère.

-Non elle n’est pas fini Dagan. » Coupa Aurora en plaçant la carte nommé ‘’Don de soi’’. Les deux mâles et la jument en furent bouche bée : cette carte permettait à un joueur de se sacrifier pour regonfler le total de points de vie de son équipier à son total de départ. De plus, le sacrifié donne son deck au survivant. Celui-ci doit remélanger la conjonction des deux jeux. Personne ne jouait une carte pareille, car le survivant avait alors bien trop de carte et il y avait alors peu de chance pour qu’il gagne de toute manière. C’était même la contrepartie de ce sacrifice, car il représentait le poid d’une telle action.

« Je ne sais pas ton nom, mais j’ai vu que Dagan avait raison. Mais j’ai compris aussi que c’est un problème pour toi. Je te donne mon jeu… et je suis sûre qu’avec tes capacités de contrôle de la chance… Je suis sûre que tu vas gagner. Et on aidera ta cousine. »

La ponette avait mélangé les deux paquets de cartes ensemble. Un élan de générosité, calculé certes pour convenir à la situation, mais généreux tout de même. La baffe que lui avait infligée Dagan… Le fait que Flitze se place devant quasiment toutes les attaques du duo féminin… Il y avait quelque chose que Dungeon semblait connaître dans tout ceci. Mais elle n’arrivait pas à mettre le sabot dessus.

Elle se sentait aussi revigorée, à la fois par la situation mais aussi par le jeu. Les cartes venaient d’être redistribuées. D’un côté, elle était désormais seule, mais avec toutes ses cartes et tous ses points de vies. De l’autre côté, ils étaient certes diminués et affaiblis, mais toujours deux.

La partie redoubla alors d’ardeur. Les cartes s’enchaînaient, les coups bas pleuvaient mais la stratégie initiale de la maîtresse de jeu portait ses fruits. Même si elle était alourdie par un jeu du double de la taille habituelle, son propre jeu lui permettant au départ de manipuler les statistiques palliait ce défaut. Rapidement, la ponette comprit que le jeu d’Aurora était spécialement conçu pour vaincre celui de Flitze, ce qu’elle mit à profit. Rapidement, Dagan puis le griffon effilé s’inclinèrent sous les applaudissements de Jess qui avait assistée à toute la partie.

« Vous n’auriez pas réussi sans Aurora. annonça implacablement Matthew impassible. Vous pouvez compter sur nous. Je me suis trompé sur le produit. Aurora, viens faut que l’on parle. »

Il entraîna alors la griffonne au plumage sophistiquée avec lui, dehors, par la fenêtre pour discuter en privé. Dungeon Maker sépara ses cartes de celle de sa partenaire, les larmes aux yeux. Visiblement, elle ne croyait pas en sa chance. Les adversaires se serrèrent les pattes.

« Je m’appelle Dungeon Maker. Retrouvez-moi à mon bar : Le Gaming Hoof Palace, moi et Soft Driver, on vous exposera la situation. »

***

Le duo de griffon s’éleva dans les airs et atteignit rapidement le toit de l’entrepôt. Matthew posa aussitôt sa serre sur l’épaule d’Aurora :

« Ce que l’on a balancé à Jester, ton frère… Ce n’est pas la Terreur Diurne. Même s’il en est atteint maintenant. C’est un produit qui l’a rendu réceptif à la maladie. »

La jeune fille porta aussitôt ses serres à son bec, la rage et l’émotion prenant soudain le dessus. Matthew ressentait un profond respect pour sa comparse : même avec la possible perte de l’un des membres de sa propre famille, elle ne jetait pas ses valeurs.

« Mais… hésita-t-elle. Ca ne peut toucher que les plus jeunes non ?

- Justement. Ce doit être la fonction du produit avec lequel on l’a attaqué : provoquer un rajeunissement de l’esprit… Donc je ne sais pas si c’est les Easy Money qui provoquent ça, mais quelqu’un provoque cette maladie. C’est une attaque. »

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