Chapitre 7 - Devenir une espionne (pour les nuls) Partie 1
"Pour la dernière fois, DEBOUT !"
D'un sursaut j'ouvre les yeux et bondi de mon lit de camps, m'affalant sur le sol en ratant ma tentative d'atterrissage. Peut être qu'un jour je réussirai à me lever correctement. Je me frotte les oreilles, encore bourdonnantes après l'assaut verbal qu'elles viennent de subir. J'ai encore les yeux voilés par la fatigue, mais la faible lueur provenant des appliques murales et de la lampe sur le bureau m'indique que le soleil n'est pas encore levé.
J'ai encore les muscles douloureux des exercices de la veille, je crois que Night Stalker n'a pas vraiment compris le principe de la récupération. D'un grognement je me remets sur pattes en lançant un regard assassin à la jument noire, regard qu'elle ne tarde pas à me renvoyer.
"Il est déjà cinq heure et demi, on a perdu assez de temps, dépêches toi de te préparer et rejoins moi dans la cour à l'endroit habituel." Me dit-elle sévèrement avant de quitter la pièce.
De toute évidence, j'ai plus besoin de préparation mentale que d'autre chose, je cherche rapidement où elle a posé mon plateau pour voir qu'il n'y en a pas. Je m'approche de son lit, déjà fait au carré et regarde son réveil, seule source du temps dans la chambre. Je laisse échapper un nouveau grognement en voyant l'heure, il n'est que cinq heure vingt-sept ! Ne sait-elle pas que mon pauvre corps tout juste restauré a besoin d'être ménagé ?
Bien sûr que non. Ma rencontre avec les princesses remonte à quatre jours, depuis ma vie est devenue pire que l'enfer. Oubliée la bombe, oubliée la torture, oubliée la mort, tout les matins, forcée de me lever à des heures dont j'ignorais même l'existence. Sa générosité n'a pas duré longtemps, peut être m'a-t-elle sacrifié son lit le premier jour, mais désormais je dois me contenter d'un lit de camps en toile, posté à proximité de sa couche bien confortable. La torture physique est une chose, mais la torture mentale est bien plus dévastatrice, je serais bien tentée par son absence pour infiltrer ce havre de confort. Je suis sûre que quelques minutes suffiraient à faire disparaître mes courbatures.
Mon corps doit fonctionner plus vite que mon cerveau, je ne suis pas encore sortie de mes pensées et de la tentation que m'offre cette merveille, quand je me rends compte que je suis déjà en train de défaire les couvertures et de grimper dans le lit. Je n'ai pas le temps de réfléchir aux conséquences que pourrait entraîner cet acte que je suis coupée net dans mon élan.
"FREE WILL !!!!"
Je croyais que Loud Wind pouvait être bruyant sans le faire exprès, mais Night Stalker peut rivaliser avec Princesse Luna quand elle y met l'effort. Je jurerais d'avoir sentit les murs trembler, et elle n'est même pas dans la pièce.
D'un pas pressé, je quitte la chambre et traverse le couloir au galop en direction de l'escalier qui m'amènera à la cour. Sur mon passage je peux noter les regards amusés et les rires moqueurs de la garde de nuit quand je les croise, tandis que les curieux qui passent leur tête par leur porte après avoir été réveillé me jettent un regard meurtrier.
Night Stalker n'a pas mentit quand elle disait que j'aurai tout le temps pour admirer les jardins du palais. Toutes mes journées commencent par un trot suivit d'un galop le long des sentiers qui traversent les différents parcs et cours. Admirer est loin d'être la bonne expression, la plupart du peu d'énergie que je possède après le réveil se concentre pour éviter que je ne crache mes poumons. En plus de la course, nous faisons des séries de monté et descente d'escalier le long des remparts et des tours, puis nous enchaînons chacun de ces exercices jusqu'au levé du soleil.
Je ne tarde jamais à être à bout de souffle, mais les brûlures de l'air frais sur ma peau ou quand je respire, les battements douloureux de mon cœur, l'engourdissement de mes abots et les points de côtés me rappellent à quel point je suis vivante. Il y a encore quelques jours tous ces signes menaient à mort, aujourd'hui ils me font sentir plus vigoureuse que jamais.
"Tu as l'air en forme aujourd'hui !" Me dit Night Stalker en souriant alors que nous entamons notre troisième série d'escaliers.
"Ah... Bon..?" Je lui demande essoufflée. "Je... ne... sais pas... comment vous faites.... pour ne pas être... épuisée ?"
"Ca demande des années d'entraînement." Dit-elle en bandant ses muscles, ce que j'aime quand elle fait ça, j'en oublie presque la vue des jardins ou du panorama depuis les chemins de rondes sur la vallée. Ou en l'occurrence les marches que nous sommes en train de descendre à vive allure. Je termine le trajet en roulé boulé pour me ramasser sur le visage en bas de l'escalier.
En un battement d'ailes, Night Stalker me rejoint en se posant à côté de moi, me gratifiant d'un rire sonore. Elle me tend la patte pour m'aider à me relever. "Voilà ce qui arrive quand on manque d'attention. Tu n'as rien de cassé ?"
Mon corps n'est que douleurs depuis que nous avons commencé mon 'apprentissage', je ne saurais même pas faire la différence entre une foulure et une courbature. Néanmoins la douleur palpitante et le liquide s'échappant de mon museau ne laisse pas de doute quant à une véritable blessure. Je me passe rapidement un sabot sur le visage et le saignement semble s'arrêter.
"Rien de grave." Je lui réponds "J'essaierai de faire plus attention."
"Non." Répond-elle en prenant un visage grave et un ton sérieux. "Tu ne vas pas essayer, ça fait partie de ta formation, tu dois faire plus attention. Ta mission consistera essentiellement à observer ce qui se passe et faire attention aux détails. Tu ne dois pas te laisser distraire. Aussi drôle que puisse être d'assister à la chute de quelqu'un d'autre, je ne veux plus voir ce genre d'incident."
Cette dernière phrase ressemble plus à un reproche qu'autre chose. J'essaie de prendre le ton le plus sérieux pour lui répondre par l'affirmative.
Au lieu de reprendre immédiatement les séries de marches, elle regarde vers le ciel pendant un moment, l'air songeur. Ce dernier est encore sombre et remplit d'étoiles. La lune a déjà disparu dans la brume matinale à l'Ouest mais ne touche pas encore l'horizon, je suppose que le soleil ne se lèvera pas avant encore une bonne heure. Les premiers jardiniers commencent à sortir et débutent leur besogne tandis que la plupart des gardes ont encore les caractéristiques de la garde de nuit.
Au dessus de nos têtes, les projections patriotiques éclairent le palais et les jardins, tandis qu'en dessous de nous, dans la vallée, les lumières de la banlieue rejoignent la lune dans la brume et les premières apparitions du smog.
"Qu'est-ce qu'on attend ?" Je demande à Night Stalker qui est toujours perdue dans ses pensées.
"Ca suffira pour ce matin." Me répond-elle calmement en se retournant vers moi. "Retourne te coucher et essaie de récupérer, je viendrai te lever dans la matinée, on a rendez vous important."
Waouh, je devrais me casser la figure plus souvent. "Vraiment ?" Je lui demande étonnée. Pour le coup je ne peux même pas retenir un bâillement.
Elle me jauge un instant avant de me répondre. "Oui, je crois que tu en a besoin, quand ton corps ou ton esprit ne peuvent plus suivre, les exercices n'ont plus rien de bénéfiques, on reprendra demain."
Elle ne dit plus rien et je prends ça comme un signe m'autorisant à y aller. "Bonne nuit." Je lui dis en lâchant un deuxième bâillement plus sonore. Je commence à m'éloigner quand je l'entends m'appeler.
"Et tu penseras à refaire mon lit quand tu auras fini de l'utiliser !"
Humm, je me demande ce qui est le plus douloureux, des exercices physiques à pas d'heure en continu ou dégringoler des escaliers ? Si c'est le prix à payer pour avoir de nouveau le privilège de dormir dans un vrai lit, c'est un sacrifice que je suis prête à faire.
A bout de souffle j'atteins enfin la chambre et m'apprête à profiter de l'objet de ma convoitise quand je me rends compte à quel point c'est absurde. Comment est-il possible que je sois obsédée à ce point par un simple meuble ? Et maintenant que j'y réfléchis, c'est assez gênant de dormir dans le lit d'un autre, il doit encore avoir sa chaleur et son odeur... Non ! Vilaines pensées, c'est un argument contre, définitivement contre... N'est-ce pas ? En jetant un dernier regard vers cette terre promise, je me dirige vers le simple lit de toile qui m'a fait office de compagnon ces dernières nuits. Ma bonté me perdra, dans un dernier soupir, je laisse le sommeil m'emporter.
*****
Même en gardant mes yeux aussi fermés que les rideaux de la grande fenêtre, les rayons du soleil ne semblent pas vouloir me laisser profiter de mon repos. Il n'y a rien à faire, je ne pourrais pas me rendormir. J'ouvre les yeux et me retrouve nez à nez avec ma gardienne, ça faisait longtemps. Surprise je me relève et me frappe la tête contre son menton l'envoyant s'écraser derrière le lit.
"Aouch ! Tu ne peux pas faire attention ?" Me demande-t-elle en se relevant, elle se frotte la mâchoire et je peux lire la douleur sur son visage.
Je peux la comprendre, j'ai vraiment dû cogner fort, moi même je sens les pulsations au sommet de mon crâne. "Vous savez, il va falloir perdre cette habitude de coller votre visage au mien quand je dors, j'aimerais pouvoir me réveiller sans risquer la crise cardiaque."
"Je suis juste venue te réveiller, on est attendu, tu te souviens, on a un rendez vous."
"Quelle heure est-il ?" Je lui demande en regardant vers la fenêtre, le soleil semble déjà haut dans le ciel.
"Nous ne sommes plus très loin de la mi-journée." Répond-elle en commençant à se diriger vers la sortie.
Je quitte le lit et m'étire en laissant s'échapper un dernier bâillement avant de lui emboîter le pas. "Je croyais que le rendez vous étais prévu dans la matinée ?"
"Il y a eu changement, le duc nous invite à déjeuner." Répond-elle alors que nous longeons le couloir des baraquements.
"Le duc ?" Je demande perplexe.
"Duc Morgan, tu l'as déjà vu, quand nous sommes allées voir les princesses."
"Pourquoi le duc nous inviterait à sa table ?"
Elle soupire avant de me répondre. "Le duc Morgan est le ministre de l'intérieur, il n'est pas rare qu'il invite les agents de mon importance entre les missions, et vu que tu m'as rejoins, je suis étonnée qu'il ne nous ai pas contacté plus tôt." Au son de sa voix je peux sentir qu'elle n'a pas vraiment l'air enchantée par cette visite.
"Il y a quelque chose que je devrais savoir ?" Je lui demande après un certain temps de silence.
Elle se stoppe dans ses pas me forçant à faire de même. Elle se retourne vers moi et me lance un regard que j'ai du mal à déchiffrer. "Le duc est... spécial." Grogne-t-elle.
"Comme tous les uppers, je ne vois pas ce qui peut lui valoir une telle animosité, il m'a semblé plutôt sympathique." Je réponds simplement en essayant d'ignorer le comportement étrange de Night Stalker.
"Tu es bien naïve pour te laisser influencer par le sourire d'un politicien." Me dit-elle avec dédain. "L'opinion que je me fais de Morgan est réciproque, nous avons une certaine histoire tout les deux. Au passage, le duc n'est pas un upper."
Je ne sais pas laquelle de ses deux révélations me choque le plus. Il est vrai qu'il avait l'air de porter un certain intérêt à la jument lorsque nous nous sommes croisés la dernière fois, mais ils ne m'ont pas vraiment donné l'impression qu'il y avait quelque chose entre eux... Mais à quoi je pense ? Leur relation ne me regarde absolument pas, plus important, qu'est-ce qu'elle veut dire par le duc n'est pas un upper ? Je vois mal un membre du gouvernement être un commoner, et encore moins un lowcast. Je fais part de mon observation à Night Stalker quand nous reprenons la marche.
"C'était un commoner quand il est entré dans l'armée régulière, il a refusé de changer d'implant quand il a intégré la garde royale puis les services spéciaux. La rumeur dit qu'il a réussi à transcender l'endoctrinement." Explique-t-elle d'un ton monotone, mais il n'y a pas de doute quant à son scepticisme sur cette version de l'histoire. Scepticisme que je partage.
"C'est impossible, même si un commoner venait à prendre conscience de l'endoctrinement, celui-ci continuerai à l'empêcher de penser à s'en débarrasser."
"Je sais bien, mais rien ne le lie aux Me et il est toujours implanté, donc pour le moment tout le monde se contente de cette version, néanmoins je me méfie de lui, et tu devrais faire pareil, surtout toi."
"Comment ça ?"
"Il y a une raison pour qu'il ait quitté les services spéciaux en se faisant anoblir et propulser au rang de ministre." En effet, ça semble être une sacrée promotion pour quelqu'un d'aussi suspicieux. "Avant de finir son service, il était mon prédécesseur, à la recherche de l'esprit. Mais c'est devenu une obsession au point où ça en devenait préoccupant. Les princesses craignaient qu'il devienne un renégat, le seul moyen qu'elles ont trouvé pour l'éloigner de sa mission était son goût pour le pouvoir. Heureusement, il est doué dans ce qu'il fait, même irréprochable."
Elle marque une pause alors que nous longeons les terrasses surplombant les jardins menant à la grande tour. "Toujours est-il qu'après avoir été démis de ses fonction, j'ai été nommée capitaine à sa place et je t'ai trouvée. Même s'il refuse de l'admettre, je sais qu'il m'en veut pour ça, ne te laisse pas abuser par les apparences, nous sommes à couteaux tirés. Je doute aussi que son obsession soit loin d'être terminée, ne t'étonne pas s'il te porte un peu trop d'intérêt."
Elle m'a trouvé après qu'il soit nommé ministre ? Je n'ai pas souvenir d'un changement dans le gouvernement depuis bien longtemps. Depuis combien de temps me surveille-t-elle au juste ?
"Au fait." Dit-elle sans me laisser plus de temps pour réfléchir à la question. "Quand est-ce que tu vas te décider à me tutoyer ?"
D'où sort cette question ? Maintenant que j'y pense, ça ne m'a jamais traversé l'esprit, je ne me rappelle même plus quand est-ce qu'elle a commencé à le faire. Je dirais que c'est venu naturellement du fait qu'elle m'entrainait et que je commence à la voir comme un mentor. "Je ne suis pas vraiment à l'aise avec le tutoiement." Je lui réponds embarrassée. "Je peux compter sur chacun de mes sabots les personnes que j'ai tutoyé dans ma vie, ça prendra du temps, j'ai besoin de mieux te... Vous connaître." Je me corrige instinctivement sentant le sang me monter au visage. "Je trouve déjà assez gênant que vous me tutoyez."
Elle laisse échapper un rire avant de me répondre. "Tu n'as pas idée à quel point je te connais, si je m'en tiens à tes critères, ça ne devrait pas te gêner si je te tutoie."
Oui, et c'est justement ce qui me tracasse, depuis combien temps est-ce qu'elle me connait, depuis combien de temps me suit-elle comme mon ombre, que sait-elle de moi, et surtout comment ? A chaque fois que j'essaie de lui poser la question, elle me rit au visage et me fait redoubler d'effort dans les exercices, j'ai appris à ne plus chercher de réponses venant d'elle.
Au lieu de ça, j'ai fouillé son bureau sur lequel se trouvait la carte de Ponyville, pour me rendre compte que chacun des croix et cercles sur cette dernière étaient les lieux que j'ai l'habitude de côtoyer. J'ai même trouvé un journal décrivant précisément ce que je faisais dans une journée. Rien que d'y penser j'en ai de nouveau des frissons dans le dos. On dit que les noms ne mentent pas, pour son cas, je le confirme, j'ai aussi renoncé à trouver mes réponses de cette façon.
Night Stalker tourne la tête dans ma direction, l'esprit toujours perdu dans ces pensées dérangeantes, je ne peux pas m'empêcher de rougir en croisant son regard. Ca a pour seul effet de faire apparaître un sourire narquois sur son visage, c'est rarement bon signe venant d'elle.
"Oh, je vois que tu as fouillé mon bureau." Dit-elle d'un air vicieux, comment elle sait ça juste en me regardant ?! Non, pire que ça, qu'est-ce qu'elle va me faire maintenant qu'elle le sait ?
Rire, d'un rire moqueur. Non, je ne rêve pas, elle est en train de se moquer de moi, et bien comme il faut, elle en a les larmes aux yeux. "AHahahaha ! J'espère que tu as découvert quelque chose d'intéressant !" Dit-elle en se tenant les côtes.
"Mis à part que je suis entourée de poneys psychopathes ayant un réel problème avec l'espace vital et la vie privée, non pas grand chose." Je réponds en grognant. "Que ce soit ma concierge, mon chef, les Me ou vous, il faut tous que vous me colliez sans relâche, j'ai parfois l'impression que vous en savez plus sur ma vie que moi." Je dis en soupirant.
"Ton chef ?" Me demande Night Stalker en haussant un sourcil.
"Apparemment il m'avait à l'œil dès mon entrée chez Apple Tech, il croyait que j'étais une Me. Au final j'en suis devenue une à cause de lui."
"Et qu'est-ce que tu a appris de cette expérience ?" Me demande-t-elle en reprenant un ton sérieux, celui qu'elle utilise quand elle me donne des instructions.
"Pardon ?"
"Tu as passé cinq jours dans leur base, tu as forcément pu récolter des informations, je t'écoute, qu'est-ce que tu as appris ?"
J'hésite un instant avant de lui répondre. "Ce que ce chemin est long, on arrive bientôt ?" On a dépassé la grande la tour depuis cinq bonnes minutes et continuons à progresser à travers les jardins et terrasses. Ma tentative de diversion en revanche me vaut un regard désapprobateur de Night Stalker.
"Sa maison est à l'autre bout de la cité et nous n'avons toujours pas quitté le palais, crois moi, nous avons tout le temps de discuter, n'essaie pas de changer de sujet."
"Il y avait beaucoup de civils là bas, je ne veux pas que ce que je vais dire se retourne contre eux." Je rétorque pour me justifier. Son regard s'adoucit, mais elle garde son ton d'instructrice.
"C'est noble de ta part, mais les Me ne sont pas tous considérés comme des criminels, s'ils n'ont commis aucune infraction, ces civils n'ont rien à craindre. Alors, qu'est-ce que tu as appris pendant ces cinq jours ?"
"Déjà, correction, je me suis d'abord fait enlever puis torturer, ensuite on a trifouillé mon cerveau, ce qui m'a envoyé dans le coma pendant quatre jours. En tout je n'ai du passer que quelques heures consciente là bas."
"C'est déjà bien plus que pourrait se vanter n'importe quel agent des opérations spéciales." Répond-elle, et je peux entendre qu'elle commence à perdre patience.
"Ils ont de très longs couloirs et je n'ai vu absolument aucune fenêtre, c'est probablement un complexe souterrain. C'est assez grand pour loger une centaine de civils et des dizaines d'agents, pour ce que j'ai pu voir. L'ascenseur que j'ai emprunté se déplaçait sur cinq niveaux, le niveau opérationnel est au troisième sous-sol. Le niveau principal s'étend sur trois étages et communique avec la surface, puisque nous sommes partis en autocart."
"Mh-mh" Dit-elle en hochant la tête. Nous approchons enfin de l'enceinte du palais et je peux voir les premiers bâtiments de la cité derrière la palissade. "Qu'est-ce que tu as pu apprendre d'autre ?" Me demande-t-elle lorsque nous passons le portail en laissant le palais derrière nous.
"C'est à peu près tout ce que j'ai pu voir ou apprendre sur les lieux."
"Je ne parle pas que des lieux, tu as aussi été en contact avec d'autres poneys, qu'est-ce que tu as découvert d'eux ?"
"Scarlet Day est une lowcast très intelligente, elle a commencé à se rebeller contre le système assez tôt, c'est comme ça qu'elle a intégré les ME. Aujourd'hui elle coordonne les opérations entre les différentes cellules et est considérée comme leur chef. Elle s'emporte assez facilement et peut avoir un comportement puéril. Néanmoins elle dégage littéralement une aura qui impose le respect, elle n'hésite pas à recourir à la violence pour obtenir ce qu'elle veut." Ou peut être qu'elle aime simplement ça, mais je préfère garder cette observation pour moi.
Il n'y a pas beaucoup de monde dans les rues de la ville, les rares poneys que nous croisons sont chargés comme des mules et portent leur implant de manière apparente. Ce sont probablement tous des servants, ramenant les commissions et la nourriture pour le déjeuner de leurs maîtres. Je me demande s'ils sont logés où ils travaillent ou s'ils vivent dans la banlieue au pied de la montagne.
"Ca correspond bien au profil que l'on a d'elle." Me dit Night Stalker. "Et j'ai cru comprendre que tu avais aussi été en contact avec sa sœur, qu'est-ce que tu peux me dire d'elle ?"
"Sapphire Night ? Elle est la sœur aînée de Scarlet de quelques années, c'était une upper jusqu'à ce qu'elle rejoigne les Me. Même si elle est du genre calme et posée, je l'ai sentie légèrement instable, elle change facilement de comportement et essaie un peu trop de cacher ses sentiments, sans trop de succès." Night Stalker hoche la tête au fur et à mesure que je parle et que nous continuons à avancer. "C'est aussi une fanatique, elle s'emporte assez facilement quand on remet en cause sa conception de la liberté, et surtout, elle est allée jusqu'à faire retirer son implant." Je dis la dernière phrase en grinçant des dents, la vision de cette prothèse sur sa nuque me donne encore des frissons.
"Excellent." Me félicite la jument noire. "C'est ça que je veux te voir faire en permanence, faire attention aux détails, obtenir des informations, lire les gens. En seulement quelques heures, tu en a plus appris sur les deux leaders des Me que nos services en plusieurs mois." Elle se tourne vers moi un sourire sur le visage. "C'est une chose de moins que j'aurais à t'apprendre." Puis elle reprend un air sérieux. "Mais j'aimerais que tu aies cette capacité d'attention et d'observation en permanence. Je ne veux plus que tu sois prise au dépourvu comme le jour de l'attentat, ou qu'un incident comme ce matin se reproduise, prends toujours le temps de bien observer ton environnement."
Nous continuons de marcher le long de Mane Street quand le clocher sonne les douze coups de midi. Toutes les devantures de boutiques sont fermées à l'exception des terrasses de restaurant et quelques bistrots, le peu de servant qui constituaient le léger glot de poney dans les rues s'est tarit et il ne reste plus que nous, marchant lentement le long du trottoir à l'ombre des arbres qui bordent l'avenue. Seuls le son des cloches qui continuent de résonner et le bruit de nos sabot contre le pavé vient troubler le silence de la ville.
C'en est presque oppressant, à Ponyville il y a en permanence du bruit, que ce soit le son des moteurs ou des carrosses roulant sur l'asphalte, le roues claquant contre les pavés, les marchandises que l'on charge ou décharge des chariots... Que ce soit dans les districts résidentiels ou non, le silence n'est jamais maître.
Ici, si les tables sur les terrasses n'étaient pas occupées, je pourrais croire que la ville est morte, je n'entends pas le son d'un insecte ni le chant d'un oiseau. J'ai l'impression qu'aucune de nous deux ne souhaite parler de peur de briser quelque chose.
Finalement, nous arrivons devant un bâtiment de quatre étages faisant la jonction entre Mane Street et une autre petite rue. La seule chose le différenciant d'un autre est le balcon richement décoré qui trône sur la façade coupant le coin de l'immeuble. Sur la chaussée, le coin est marqué par un jardin clôturé par une barrière en fer forgé accommodée de décorations. La porte d'entrée consiste en deux battants en bois massifs chacun portant une poignée couverte de plaque d'or ainsi qu'une fenêtre en verre fumé.
Rien que par son apparence externe, le bâtiment transpire le luxe et c'est sans trop de surprise que Night Stalker ouvre le portillon avant de m'inviter à la suivre. Elle tire une cordelette à côté de la porte et le son d'une clochette nous parvient. Par bonne mesure, elle frappe aussi à la porte. En attendant que l'on vienne nous ouvrir, elle se tourne vers moi, de nouveau avec son ton d'instructrice.
"Considère ce repas comme un exercice, le duc sait cacher son jeu, essaie de mettre de côté ce que je t'ai dis pour te faire ta propre opinion. Peu importe que ce que tu penses soit faux, je ne m'attends pas à ce que tu puisses le déchiffrer à ta seconde rencontre, mais je veux savoir ce que tu penses de lui. Ce sera aussi l'occasion pour moi de savoir comment il est perçu par les autres.
"Oh, et une dernière chose-" Elle n'a pas le temps de finir ça phrase que la porte s'ouvre laissant apparaître une licorne habillée d'une robe noire, le regard neutre et son implant bien visible, encore une servante.
Elle nous fait signe de la suivre à travers le hall de pierre. Celui-ci est ouvert sur le premier étage en mezzanine, relié par un large escalier en 'L' occupant le coin opposé à l'entrée. Posé contre lui au rez-de-chaussée se trouve une pendule, probablement aussi vieille que le bâtiment mais dont le balancier continue à rythmer les secondes sans relâche, tandis que pendant du plafond, un lustre en Crystal éclaire la grande pièce.
Nous suivons la servante qui nous amène directement sur le balcon où une petite table assez suffisante pour quatre nous attend déjà dressée. Malgré que midi ait déjà sonné, en plus des garnitures de la table, c'est l'absence de notre hôte qui se fait remarquer. La licorne nous invite à nous assoir et revient avec des hors d'œuvre en nous faisans patienter.
Night Stalker et moi sommes chacune assise au milieu d'un côté de la table tandis que nous laissons le dernier couvert au Duc qui se fait toujours attendre. En parlant de couverts, je viens de me rendre compte que je ne connais absolument rien à l'étiquette et à l'art de la table. Néanmoins, cela ne semble pas déranger la jument noire qui croque à pleine dent dans les tartinettes qui nous ont étés servies. Je n'ai pas eu le temps de goûter à ma première qu'elle a déjà finit son assiette, des miettes collées tout autour du museau et sur son buste.
Je crois que c'est la première fois que je nous sommes toutes les deux assises ensemble, et encore une fois, je suis impressionnée par sa taille, elle doit bien faire une ou deux têtes de plus que moi. Sa carrure aussi est imposante, bien que ses courbes soient fines, sa musculature et sa posture imposent sa présence. C'est à se demander comment elle fait pour être aussi agile et savoir se faire discrète. Néanmoins, ce n'est pas la seule chose qui retient mon regard, elle se sert un verre d'eau qu'elle vide aussitôt, me faisant profiter au passage du contenu à moitié mâché de sa bouche avant de déglutir bruyamment. J'ai du mal à retenir un recul de dégoût.
"Quoi ?" Me demande-t-elle la bouche encore à moitié pleine.
Je me passe un sabot sur le visage, pourquoi faut-il que chaque instant qui passe soit marqué d'une nouvelle déception ? Je la croyais sérieuse et raffinée, mais ce n'est qu'une goinfre qui n'a aucune tenue à table. "Rien" Je souffle dépite.
J'attends encore que notre hôte daigne nous honorer de sa présence avant de commencer à toucher à mon assiette. Mais lorsque l'horloge sonne la demie, mon estomac me rappelle que j'ai déjà jeuné dans la matinée. Je m'apprête à gouter à la première tartine quand j'entends un *pof* sur ma gauche et la voix joyeuse et forte du duc. "Bienvenue !"
Surprise, j'avale ma première bouchée de travers et commence à étouffer. Je sens des sabots frapper fort dans mon dos tandis que la voix de l'étalon vient de derrière moi.
"Ahaha, veuillez m'excuser, je ne pensais pas vous surprendre !"
Un dernier coup et je peux enfin respirer à nouveau. Je ne trouve pas ça amusant du tout, ça me rappelle de trop mauvais souvenirs. Je ne suis pas la seule à trouver la situation dérangeante, si le regard de Night Stalker pouvait tuer, les princesses devraient trouver un nouveau duc.
Ce dernier après s'être assuré qu'il n'y avait plus aucun risque prend sa place à table et fait sonner la petite clochette à côté de son assiette.
"Excusez moi encore pour ce petit incident et mon retard, j'avais des affaires importantes à régler." Dit-il d'un ton léger, j'ai du mal à savoir s'il s'excuse vraiment ou se contente de suivre les bonnes manières.
Deux servants dont la jument qui est venue nous ouvrir viennent à ma déception récupérer nos assiettes de hors d'œuvre, je n'ai même pas eu le temps d'en manger, et on ne peut pas dire que j'ai profité du premier. Une fois fait, ils reviennent avec le repas, une salade garnie - de la laitue et des fleurs - et des sandwiches aux légumes et au fromage, pour ce que je peux en voir, des carottes, de la salade, des oignons et du concombre.
SI les plats sont bien présentés et semblent appétissants, je doute de pouvoir tenir la journée avec ça. Le duc semble satisfait du menu tandis que Night Stalker a plutôt l'air.... D'une prédatrice affamée qui va faire souffrir sa proie avant de la dévorer sauvagement. Elle a les yeux écarquillés et ne peux s'empêcher de saliver en passant sa langue sur ses lèvres pour éviter de baver sur la table. Si cela ne semble pas inquiéter le duc, je ne peux m'empêcher de me sentir gênée.
Au palais elle me laisse généralement un plateau avant que je la rejoigne pour l'entraînement, je prends mes déjeuners au mess avec le reste de la garde royale et il arrive que nous partagions le dîner du soir. Mais je ne l'ai jamais vu aussi excitée devant de la nourriture. Il faut bien admettre que la nourriture du palais n'a rien d'excitante....
"Il n'y a rien de plus succulent qu'un repas préparé avec autant de ferveur." Dit Night Stalker en continuant de fixer son assiette avec une attention inappropriée. "Vous pourrez féliciter votre chef de ma part." Dit-elle à l'attention du duc.
"Je n'y manquerai pas." Lui répond-il en se servant une assiette de salade pour accompagner son sandwich. Il me tend ensuite le saladier pour que je puisse faire de même. "C'est donc vous la nouvelle recrue ?" Demande-t-il à mon égard. "Je n'ai pas eu l'occasion de me présenter correctement la dernière fois que nous nous sommes croisés. Je suis le Duc Morgan, Ministre de l'intérieur du royaume d'Equestria, et conseiller en sécurité auprès des princesses. Mais vous pouvez m'appeler Morgan, seuls les commoners m'appellent Duc."
"Je suis une commoner." Je lui réponds platement en lui rendant le saladier, gagnant ainsi un couinement de détresse de Night Stalker alors qu'elle fixe le contenant des yeux.
"Ah." Dit-il d'un air absent. Il ne réfléchit qu'un instant à sa bourde avant reprendre la parole, le sourire aux lèvres. "Quel mauvais hôte je fais." Dit-il en se frottant la tête. "Je suis tellement habitué au ton supérieur et aux manières extravagantes des uppers que ça finit par déteindre sur moi. Ne prenez pas mal ce que je disais, je suis moi même un commoner."
"C'est ce que j'ai entendu dire." Je dis d'un ton détaché en commençant à mélanger ma salade. "Je serais curieuse de savoir comment vous avez réussi à surpasser l'endoctrinement." Je me pince les lèvres en retenant un cri de douleur. En face de moi Night Stalker me lance un regard mauvais, il n'y a pas de doute à savoir d'où venait ce coup de sabot.
"Tout va bien ?" Me demande le duc.
"C'est quelque chose que j'ai du mal à appréhender. Je fabrique les implants, j'aimerai vraiment savoir comment vous avez réalisé cette prouesse." Un deuxième coup sous la table, ce coup ci c'est moi qui envoie un regard mauvais ma camarade.
"Je suis étonné que vous me posiez cette question." Me répond le duc. "Après tout n'êtes vous pas la mieux placée pour connaître la réponse ?"
"Je n'ai pas 'transcendé' l'endoctrinement, il n'a jamais eu d'effet sur moi, ce n'est pas la même chose. Je ne vois que quelques moyens de s'en débarrasser, et la simple volonté n'eb fait pas partie."
Son sourire et son air amical disparaissent le temps d'un infime instant. "Vous seriez étonnée de ce que l'esprit est capable de faire quand on sait le maîtriser." Répond-il chaleureusement. "Sur ceux, je vous souhaite un bon appétit." Et il croque dans son sandwich.
Night Stalker ne se le fait pas dire deux fois, en trois bouchées le sien à déjà disparu, laissant derrière lui des restes éparpillés sur son museau et la table, avant qu'elle ne plonge ce dernier dans sa salade qu'elle finit tout aussi vite. Je n'en suis qu'à ma première bouchée, mais ce spectacle m'a coupé l'appétit. Par simple volonté de satisfaire la complainte de mon estomac, je me force à terminer mon repas en essayant d'effacer ces horribles images. Sans résultat.
Duc Morgan quant à lui n'a aucun problème pour manger, la magie offre un certain avantage lorsqu'il s'agit de léviter des couverts ou soulever un sandwich. Moi, j'en suis réduite à me salir les abots et brouter dans mon assiette. S'il existe quelqu'un qui sache comment un poney terrestre peut utiliser des couverts, j'espère qu'il acceptera de partager ce secret avec moi. C'est probablement le repas le plus humiliant de toute ma vie. Le pire, c'est que cela semble amuser notre hôte.
Une fois nos assiettes vides et le saladier terminé, il fait de nouveau sonner la clochette et les deux servant ne tardent pas arriver. L'un d'eux amène une bouteille d'alcool qu'il dépose sur la table avant de la débarrasser.
"Mesdemoiselles, je vous sert ?" Demande le duc en débouchant la bouteille d'un coup de magie. "C'est un cidre de 128, Ponyville, première année de collaboration entre Sweet Apple Acres et Golden Harvest. L'un des meilleurs de ma collection, bien plus goûteux que cet alcool industriel qu'ils font de nos jours...."
Il tend la bouteille pour me verser un verre avant que je ne l'interromps. "Non merci, je ne bois jamais d'alcool." Il prend un air déçu mais n'insiste pas avant de se tourner vers Night Stalker. J'espère qu'elle ne va pas boire jusqu'à se rendre saoule, ce serait le dernier ingrédient pour faire de ce repas le déjeuner parfait.
A ma surprise, elle décline le breuvage son tour. "Duc Morgan, vous savez que je ne bois jamais en service."
"Voyons," répond-il. "C'est moi qui vous invite considérez que vous n'êtes pas en service, c'est seulement une visite de courtoisie." Dit-il avec le ton chaleureux et le sourire qui le caractérisent.
"Je suis en service tant que les Princesses ne me disent pas le contraire." répond elle tout aussi chaleureusement mais en instant sur les princesses.
"Vous ne savez pas ce que vous manquez." Dit-il en se servant un verre. Il glisse un mot à l'oreille de l'un des servants qui revient avec une autre bouteille. Cette fois il la débouche et remplit mon verre avant que je n'ai le temps de protester. "Ne vous en faites pas, ce n'est que du jus de fruit. Bien évidemment, il est nettement moins vieux, et de qualité moindre, mais quel hôte ferais-je si je ne vous servais que de l'eau ?"
J'attends que le verre de Night Stalker, et nous trinquons à notre future collaboration à la demande du duc. Je prends une gorgée, et en effet, ce jus n'a rien d'extraordinaire, c'est le banal jus de pomme aromatisé à la carotte, signature de la coopérative Orange & Seed de Ponyville. Je le dis toujours, il suffirait de rajouter de la tomate et de la banane et ce serait parfait.
Enfin, on nous apporte le dessert, un gâteau nappé de chocolat blanc et couvert de coulis de framboise, lui même recouvert de copeaux de trois chocolats. Voilà qui pourra finalement remplir mon estomac, estomac qui gargouille bruyamment à la vue de ce paradis gustatif. Je dois probablement être en train de baver comme ma camarade d'en face.
"Je suis ravi qu'il vous plaise." Dit le duc en coupant plusieurs tranches qu'il dépose dans chacune de nos assiettes. L'intérieur est un mélange de pâte de chocolat et de coulis de fruit rouges, rien que l'odeur suffit à me faire saliver deux fois plus. Je ne peux plus attendre pour commencer, et apparemment Night Stalker non plus, je m'apprête à me protéger le visage de l'éventuelle projection de chocolat et de coulis quand la question de notre hôte la coupe net dans sa lancée.
"J'ai cru comprendre que vous deux n'alliez pas tarder à partir en mission pour les princesses, elles ne m'ont pas tenu au courant des détails, j'espérais que vous pourriez m'en apprendre plus."
La requête n'est pas adressée à l'une de nous deux en particulier, mais Night Stalker laisse tomber son masque sympathique pour clairement montrer son mécontentement.
"Si les princesses ne vous ont pas mis au courant, c'est très probablement qu'il y a une raison." Dit-elle en se redressant et prenant une posture plus professionnelle. "Je ne pense pas que ce soit à nous de vous donner ce genre d'information." Elle regarde dans ma direction d'un air sévère et je hoche la tête pour lui faire savoir que j'ai compris le message. De toute façon, je ne pense pas vouloir être mêlée à l'échange qui va suivre.
"Eh bien," dit-il en coupant calmement un morceau de sa part avant de la porter à sa bouche. "J'espérais ne pas avoir à recourir à ce genre d'argument, mais dois-je vous rappeler que je suis votre supérieur, et lorsque je vous demande des informations relative à votre mission, j'exige de les obtenir." Finit-il aussi calmement.
Night Stalker pour sa part n'a pas le même contrôle et ça s'entend dans sa voix. "Et dois-je vous rappeler que je ne réponds qu'aux princesses ? En dehors de mes rapports officiels, je n'ai aucun compte à vous rendre, pas plus que Free Will."
"Vous êtes toujours aussi dure en affaires Night Stalker, que faut il que je fasse pour pouvoir obtenir ce que je veux, ce qui me revient de droit ?" Son visage est toujours aussi neutre et il mange son dessert comme si de rien étais. J'hésite à manger le mien, même si je suis affamé et qu'il semble, non, qu'il est forcément plus que délicieux, la tension grimpante entre les deux autres occupants de la table ne me semble pas être des meilleures conditions pour manger. Tant pis estomac, tu devras attendre encore un peu.
"Il ne s'agit pas d' 'affaires', Morgan." Rétorque-t-elle en abandonnant son titre. "Il s'agit de la volonté des princesses, si tu savais de quoi il en retourne, peut être que tu aurais atteint tes objectifs et que je n'aurais pas prit ta place. Dis mois, comment est-ce de faire toute cette paperasse ? Mieux que les opérations de terrain ? Mieux que de trouver et travailler avec l'esprit ?" Je n'aime pas ça, voilà que maintenant je sers d'argument à cette dispute à laquelle je ne comprends rien.
Le duc n'apprécie pas plus ces arguments que moi. Son sourire quitte définitivement son visage et son regard se durcit. Il tourne sa tête vers moi et me fixe pendant un long moment, le souffle court et profond. Ce n'est pas de la colère que je vois dans ces yeux, en fait je ne sais pas très bien ce que je vois, toujours est-il que ça me met très mal à l'aise.
Finalement il respire un grand coup et reprend une expression neutre en se tournant vers Night Stalker. "Parce que tu crois que je t'en veux encore pour ça ?" Dit-il en me montrant du sabot. Ce que j'apprécie d'être traitée comme un vulgaire objet. "Il y a bien longtemps que j'ai passé l'éponge. Aujourd'hui j'ai du pouvoir, je peux contribuer au pays bien plus que tu n'en seras jamais capable, j'ai atteint mes objectifs et m'en suis fixé de nouveaux. Il faut savoir laisser ses erreurs au passé, aller de l'avant. Quand tu auras autant d'années de service que moi, tu comprendras."
La jument ne répond pas mais je la sens qui ronge son frein. Lorsque le duc finit sa part de gâteau et repose sa cuillère, elle se lève et annonce notre départ. Je m'apprête à protester, après tout je n'ai pas touché au mien et mon ventre crie toujours famine, mais son regard m'indique que sa décision est sans appel.
Le duc ne prend même pas la peine de nous raccompagner jusqu'à la sortie et laisse cette tâche au soin de la servante. Alors que nous nous apprêtons à quitter le jardin, Night Stalker se frappe le front du sabot et me demande de l'attendre. D'un puissant battement d'ailes, elle saute sur le balcon et un instant plus tard saute pour atterrir à mes côtés, le visage souriant et fier, le museau barbouillé de chocolat et de coulis.
Je la regarde d'un air dépit, et moi ? Elle semble comprendre le message et ré-atterrit quelques secondes plus tard avec ma part et le reste du gâteau. Nous descendons Mane Street en direction du palais au pas de course le son de nos rires faisant échos sur les murs vides de la ville.
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