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Pony War Chronicles

Une fiction écrite par ironponymaiden.

Chapitre II : Rebelles

Luna ouvrit brusquement les yeux. Rapidement, son corps se mit à récupérer le plus d’informations possibles sur son environnement, extirpant son esprit embrumé du cauchemar pour le ramener dans la réalité. Son cœur ralentit son rythme, sa respiration se fit moins forte, et l’alicorne soupira de soulagement en se laissant retomber sur le matelas.

Elle était dans une chambre, sur un lit confortable, protégée par ses amis. Pas seule dans cette salle dévastée, avec pour unique compagnie la demi-déesse blanche tentant de la détruire de toutes les forces de sa magie.

Elle était seule dans la chambre. Elle fit lentement glisser les draps de façon à dégager son corps, posa ses pattes avant à terre et, prise d’une soudaine pulsion envoyée par ses muscles endoloris par la tension accumulée pendant cette mauvaise nuit, elle s’étira de tout son long, jusqu’à faire craquer ses épaules. C’était un délice. Un des rares qu’elle pouvait encore s’offrir. Une fois cette sensation passée, elle s’ébroua, et descendit les pattes arrière avant de commencer à se diriger vers la porte de la chambre.

En descendant les escaliers, Luna repensait à cette période lointaine, trop lointaine, où elle s’éveillait doucement d’un rêve toujours étrange, glissait ses sabots dans ses petits chaussons, et se dirigeait vers la salle à manger la tête toujours dans les vapeurs oniriques, alors qu’autour d’elle tout n’était qu’agitation de fin de journée, qu’elle prenait son petit déjeuner au même moment où des amoureux transis partageaient un diner aux chandelles, et levait la lune avant même de se laver les dents, avec derrière sa sœur qui s’amusait toujours de l’aspect lève-très-tard de la pouliche en descendant l’astre solaire.

La belle vie, même si assombris par cet effort qu’elle mettait toujours à agencer les étoiles de façon harmonieuse alors que son lit la rappelait avec force, à parfois organiser des pluies de comètes ou des aurores boréales quand elle était en forme, qui était complètement gâché par le parfait désintérêt qu’y portaient les poneys de l’époque, alors que sa sœur, en soulevant une unique étoile, mais avec une petite mise en scène, et surtout quand les poneys étaient réveillés, récoltait la plupart des honneurs.

Une belle vie gâchée par sa jalousie maladive qui l’avait changée en être de cauchemar.

Drôle d’ironie de penser qu’à cette époque, Luna était jalouse du succès de sa sœur, qui tentait pourtant de la rassurer en lui disant que ses magnifiques nuits n’étaient pas gâchées, et qu’aujourd’hui, « Tia » mettait le pays à feu et à sang pour qu’on s’intéresse à elle. Une véritable injustice. Luna sourit tristement. Mais s’il n’y avait eu que ça… Celestia avait peur. Peur de l’échec. Peur d’être trop faible. Peur de ne pouvoir assumer son rôle de déesse protectrice, se croyant toujours seule à remplir ce poste.

Les alicornes sont-elles immortelles ? Presque. Elles ne peuvent mourir que de maladies ou de morts violentes.

Où sont les autres alicornes ? Mortes de maladies ou de morts violentes. Il ne pouvait y avoir trop de « Dieux », ceux-ci étaient voués à s’entre-déchirer. Mais cela, le monde n’en saurait jamais rien.

Il n’y avait plus aucun mâle alicorne. Quoi qu’il arrive, Celestia, Luna et Cadence étaient les dernières de leur race. Et si on continuait sur cette voie, bientôt, il n’y aurait plus que deux d’entre elles. Voire une. Voire zéro.

Le pays arriverait-il à se maintenir sans alicornes ? Pourrait-il reprendre sur le même schéma qu’à sa création ?

J’ai vraiment besoin de me poser ces questions avant le café ?

Luna arriva devant la porte de la cuisine, d’où sortait un délicieux fumet de café en train de chauffer, d’œuf aux herbes, de tartines de foin, et de tout ce qui constituait une solide attaque culinaire de la journée, préparés par la meilleure cuisinière qu’ils aient sous le sabot, et une très bonne dans l’absolu. La jument bleue ouvrit la porte avec sa télékinésie, révélant la petite pièce dans laquelle prenait leur petit-déjeuner trois poneys, ainsi que Sick Worm en face de la plaque chauffante, touillant les herbes grillées dans les poêles et humant les plats. Soudain, les oreilles de l’aveugle pivotèrent, et Sick se tourna vers Luna, un grand sourire aux lèvres.

Cet implacable, insubmersible, invincible sourire.

Depuis que les Lunaires l’avaient rencontré et recruté à Fillydelphia, elle n’avait pas cessé de voir son monde s’écrouler et sa vie tomber en ruine : elle avait dû quitter sa vie, son bar avait été brûlé, sa famille avait été assassinée, ses amies était régulièrement blessées, mutilée, tuée ou envoyée dans un hôpital psychiatrique, où Pretty Leave avait sûrement été victime d’un « accident médical » lorsque les Solaires en avaient repris le contrôle, et elle avait été obligée de fuir, encore et encore…

Et pourtant, elle avait toujours ce sourire, comme si rien ne pouvait l’ébranler. Au point de convaincre, alors qu’elle avait un moyen de s’écarter de tout cela, son amie Berry Punch qui l’avait recueilli dans cette maison bon marché de Mexicolt, dans les régions désertiques du sud, d’héberger Luna et ses gardes du corps, au risque de se compromettre, encore.

Les gardes du corps de Luna, mais aussi son état-major, et le dernier reste de commandement des restants de l’armée Lunaire. A table se trouvait Black Jack regardant fixement sa tasse de café, Moonface le Night-Ops, qui grignotait une tartine de beurre, et Painless le Fantôme qui avait une mine sombre en tripotant le journal. D’autres dormaient encore, ou devaient rôder dans la maison, tel Derpy, Flesh, Coffee Crime et en général tous les poneys importants qui restaient à l’alicorne.

Sick Worm profita de cet instant pour servir une tasse de café bien noir et sans sucre, qu’elle tendit à la jument de la Nuit.

-Tenez, Princesse.

-C’est juste… Oh, et puis merde.

Il y eu un bruit de couvert lâché sur une assiette, et Luna se sentit immédiatement détaillée sous toutes les coutures. Elle soupira.

-Désolée. J’ai passé une assez mauvaise nuit.

-Comme la plupart des poneys, j’imagine, dit Moonface. Ces nuits noires sont… pas rassurantes du tout.

-Je ne peux pas juger, dit l’alicorne. Je n’ai jamais dormi la nuit avant ces deux dernières semaines. Je ne sais pas ce que l’on ressent en temps normal.

-Vous ne pensez pas que vous pourriez au moins organiser un petit ciel nocturne ? demanda Sick Worm. Cela mettrait du baume au cœur des poneys, et il y aurait toujours un espoir pour ceux qui vous soutiennent de vous savoir vivante…

-Non, trancha Black Jack sans lever les yeux de sa tasse. Il faut maintenir le doute jusqu’au déclenchement des opérations.

Luna soupira. Elle entendait « le déclenchement de la Deuxième Guerre » à chaque fois. Mais cela était nécessaire. Depuis deux semaines qu’ils étaient en fuite, elle avait vu ce que l’Empire faisait à ses citoyens en temps de paix. L’armée n’avait plus à se concentrer sur les Lunaires, alors elle pouvait se remettre à ce qu’elle faisait auparavant : s’en prendre aux civils. L’armée faisait la loi, les soldats étaient tout-puissants, c’était la règle de l’après-guerre, et les Licornes du Soleil s’étaient lancées dans une gigantesque chasse aux sorcières pour traquer ceux qui résistaient encore à l’Empire. Peut-être que d’ici une année ou plus, les choses reviendraient à la normale. Ou peut-être pas.

Car la contestation resterait toujours, et les répressions de même. Et lorsqu’il n’y aurait plus de contestation, la répression resterait, au cas où, par habitude.

Alors il fallait profiter de l’existence de cette contestation. Monter la résistance pour se préparer à la révolte qui ne tarderait pas à venir. La guerre était finie, les poneys qui n’avaient connu l’Empire que par le prisme des combats découvriraient désormais son vrai visage. Depuis deux semaines, les poneys défilaient pour demander la réduction de la présence de l’armée, la dissolution des Licornes du Soleil, une véritable police, bref, une vie qui se débarrasse des poussières de la lutte.

Ce que l’Empire ne leur donnait pas, et ne comptait pas leur donner, ils s’en rendraient rapidement compte.

Des réseaux de résistance, fidèles aux idées des Lunaires, étaient montés dans les principales villes du monde, et les restes de l’armée Lunaires avaient eu pour mission de se séparer pour prendre contact avec eux. Le but était de préparer la révolution, non plus une nouvelle force, mais directement faire agir le peuple. Jusqu’ici, les poneys étaient assez écartés de cette guerre entre deux factions qu’ils ne comprenaient pas vraiment, encore engoncés dans leurs habitudes qui avaient régis leurs vies pendant des siècles. Mais à présent, ils allaient comprendre que l’Empire Solaire, c’était eux. Ils vivaient sous le régime de Celestia. Et ils n’allaient pas aimer.

Le tout était de les préparer à se révolter, ce que faisaient les Lunaires en synchronisant les différents réseaux. Black Jack avait mis au point un nouveau système de communication, reprenant le principe du courrier draconique et utilisant le principe des portails, intraçable car nouveau et instantané.

Luna et son « état-major » s’occupaient de mettre le plan global en place. Le plan se déroulait en trois parties : d’abord, rassembler les différents réseaux sous une même bannière pour les coordonner, ce qui était déjà presque fait. Ensuite, les Lunaires devraient se préparer, la centaine de soldat s’entrainant selon les standards des Night-Ops et des Fantômes pour devenir une force de frappe implacable. Enfin, profiter d’une erreur de l’Empire, peut-être déjà faite, pour lancer la révolution populaire, et profiter de l’agitation pour frapper directement au cœur.

Plus de tergiversation, plus d’avance pas à pas. Pour limiter la casse, il fallait aller vite dès le « déclenchement des opérations », et confronter Celestia directement.

Cependant, cela ressemblait trop au déclenchement d’une seconde guerre civile aux oreilles de Luna. Mais il faudrait bien cela pour éviter d’être juste plantés devant un mur dès leur arrivée à Canterlot. Et puis, tout avait été planifié pour que lors de la révolte, les infrastructures Solaires soient rapidement maîtrisées. Le temps que les renforts réagissent, Luna aurait peut-être le temps de mettre fin à toute cette folie. Après tout, c’était un plan concocté par tous les cerveaux disponibles, dont Black Jack et « l’apprentie » de Stalker.

-Où est Windvision ?

Painless fit un geste de la tête vers dehors.

-Partie faire des courses, je crois. Flesh est allé la rejoindre quand on vous a entendu vous réveiller.

Puis il jeta le journal en face de l’alicorne qui s’était mise à table, pendant que Sick lui servait son repas.

-Et on a un énorme problème, dit-il simplement.

Luna haussa un sourcil, et jeta un coup d’œil au quotidien. Ses yeux s’écarquillèrent d’horreur.

-Par…

600 morts dans un attentat à la gare de Hoofington

Le premier crime signé par les terroristes qui sèment la panique à travers le pays.

C’est dans l’horreur généralisée que l’on a appris hier l’attentat le plus meurtrier perpétré par les terroristes qui sévissent depuis la fin de la guerre. Hier dans l’après-midi, à l'heure de pointe alors que des centaines de voyageurs attendaient patiemment leurs trains dans la gare centrale de Hoofington, gare qui, rappelons-le, est la plus fréquentée du pays, une explosion s’est faite entendre dans les couloirs, et des témoins racontent avoir vu « des pans entiers du toit » tomber sur eux, et écraser les premières victimes.

Quelques secondes plus tard, alors que la panique poussait les poneys à courir vers les sorties, à se marcher dessus et se piétiner, tombant dans une tentative désespérer de sauver leur vie, toutes les sorties explosèrent en même temps, tuant les fuyards et bloquant les survivants à l’intérieur.

Ensuite, selon les témoins, des explosions retentirent de partout dans la gare, écroulant les murs, faisant s’effondrer le plafond, détruisant les wagons pleins de voyageurs, accumulant les victimes paniquées.

Le cauchemar a duré moins de cinq minutes, mais le bilan était déjà très lourd. Ensuite, dans la poussière et la fumée, les survivants ont vu apparaitre une cinquantaines de poneys en treillis, qui marchèrent dans les ruines, tirant sur certains citoyens à terre, et se dirigeant vers le célèbre Mur de l’Honneur de la gare, mur sur lequel sont inscrits les noms des plus illustres poneys à avoir foulé le sol de la gare et seul structure épargnée (délibérément ?) par le désastre. Là, les terroristes ont hissés les corps de la trentaine de soldats en faction dans la gare au-dessus du mur, les attachant têtes en bas, et les ont décapité sans autre forme de procès, les morts comme les vivants. Ensuite, ils se seraient servis du sang de ces victimes pour signer leur acte, comme le montre la photo suivante. (Attention, cette image peut choquer les âmes sensibles par sa violence).

Il s’agirait d’un acte commis par les même terroristes qui ont ensanglanté Stalliongrad mardi dernier lors de la fusillade de la Place Blanche, renommée Place Rouge en mémoire des victimes, et ont provoqué le désastre de Manehattan, dans lequel la Banque Centrale avait été incendié, et toutes ses richesses réduites en cendre ou en flaque de métal, en plus sûrement d’autres actions moins spectaculaires mais tout aussi meurtrière.

Le Général Crimson Brush, dans un communiqué, réfute toute hypothèse qu’il s’agisse de pro-lunaires, par le fait que ces attentats non seulement ne font aucune distinction d’affiliation, mais surtout semblent viser, horreur suprême, les civils en priorité.

Il va sans dire que d’importantes mesures ont été mises en place pour arrêter ces criminelles sans foi ni loi.

Sur cette photo, vous pouvez voir le fameux symbole, signature du groupuscule, représentant apparemment un crâne menaçant, aux formes rappelant une pomme, gravé de ce qui semble être un « I » gothique sur le front. Ce symbolisme nous fait poser une question : l’héroïne Applejack est-elle liée à ces atrocités ?

En dessous du symbole sanglant était écrit le message qui suit :

« Nous avons été bafoués. Les Alicornes nous ont trahis. Lunaires ou Solaires ne sont que promesses non tenues et despotisme camouflé. Nous avons versé notre sueur, notre sang et nos larmes pour cette contrée, mais elle nous a été volée, et en retour, nous avons tous perdu, tout ce qui nous était cher et pour quoi nous croyions nous battre.

Un instant de laxisme entraine une éternité de tyrannie.

N’oublie jamais.

Ne pardonne jamais.

Nous sommes les Impardonneurs, et nous réclamons vengeance. »

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Poussée en avant, Blind Love s’écrasa à terre la tête la première, les pattes avant attachées dans son dos. Incapable de se relever, elle se débattit pour regagner un semblant de dignité, qui était mise en défaut par sa croupe relevée. Soudain, une ombre couvrit son visage. La pégase leva les yeux vers l’origine de cette obscurité, et également de tout ce qui lui arrivait depuis dix minutes, depuis qu’elle avait dû écourter sa pause-café pour être trainée par des poneys en arme au-dehors pendant que d’autres se faisaient tirer dessus dans la caserne.

Le poney s’accroupit près d’elle. C’était un personnage singulier, une licorne brune à la crinière noire et mèches brunes, en costume négligé, portant un chapeau haut-de-forme, affublé d’une barbichette, et un regard qui semblait rêveur.

Et un revolver pointé sur le front de la pégase. Love sentit les larmes lui monter aux yeux. Elle croyait que le cauchemar était fini. Elle avait survécu à un monceau d’horreur qu’elle n’aurait jamais cru possible, elle avait vu la capitulation des Lunaires, elle pensait pouvoir prendre du repos dans la caserne paisible de Trottingham, et reprendre une vie normale.

Mais ça, Swift Quill s’en foutait éperdument quand il pressa la détente.

Le sang gicla sur le sol, et le reste du corps s’effondra sans résistance. Quill ferma les yeux de la ponette, et se releva. Juste à côté, un terrestre, menotté lui aussi, les yeux braqués sur la pégase, hurlait :

-Putain ! Pourquoi vous l’avez tué ? Mais putain, qui vous êtes ?

Swift Quill s’approcha de lui, le regardant dans les yeux.

-Nous sommes ceux qui ne pardonnent pas à ceux qui fautent. Vous vous êtes engagés dans la voie des armes, avez arraché des vies à leurs familles, et celles-ci réclament vengeance.

-Mais vous êtes allumés ou quoi ? continuait d’hurler le soldat.

-Illuminés, répond simplement la licorne. Nous avons reçu l’illumination. La seule vraie valeur sur cette terre, ce n’est pas le pouvoir ou la liberté. C’est l’esprit de revanche.

-Ça vous apporte quoi tout ça ? Bordel, pourquoi vous vous en prenez à nous ?

-Pourquoi pas ? dit Quill en pointant son arme vers le poney. Après tout, vous servez Celestia. Et tout ce qui peut nuire à Celestia nous est utile.

Le Solaire regarda le canon de l’arme, la sueur collant à ses poils, serrant les dents en attendant le coup de feu qui l’arracherait à sa vie. Mais Quill se ravisa, et rangea son arme, puis il s’approcha du poney, et s’accroupit. Le soldat détourna le regard.

-Nous n’avons aucune importance pour l’Empire. Ce que vous faites ne sert à rien…

-Détrompez-vous. Trottingham est certes très faible au niveau stratégique, mais elle possède une chose qui rend cette ville unique.

Il fit un signe de tête vers l’horizon, et le soldat, récalcitrant, fini par tourner la sienne. Et il vit les hautes tours de…

-La bibliothèque de Trottingham rivalise avec celle de Canterlot en termes de contenu. Pour être franc, j’adorais y aller, quand nous étions encore en paix. Mais ce qui fait son intérêt dans le cas présent, c’est ce qui n’est pas accessible au public.

Swift Quill posa son arrière-train au sol, pour s’assoir plus confortablement.

-Car, voyez-vous, cette bibliothèque, malgré sa taille, est très peu connue. Peu arpentée, et pleine de paperasse. Très pratique pour cacher des documents, les trafiquants et autres personnes peu scrupuleuses l’avaient bien comprit. Les Licornes du Soleils, elles, ont opté pour une remise secrète, dans cette bâtisse où personne ne cherche, pour y placer tout ce qui se rapportait à un sujet sensible.

Un des terroristes sortit du bâtiment en traînant un autre garde, qu’il jeta à terre, et l’abattit d’une rafale. Quill tourna les yeux vers l’attroupement de poney qui commençait à se former pour regarder, dans une fascination morbide, les événements qui se passait.

-Les armes.

Le terrestre le regarda, interloqué.

-Et oui. Tous les plans, brevets, concepts, lieux de stockage, mais surtout nom des créateurs de tous ces objets qui nous servent à nous entre-tuer depuis leur apparition se trouve là-bas. Et nous sommes très intéressés par les coupables qui ont été à l’origine de la perte de nos proches. Sans armes, il n’y aurait pas eu de guerre.

-Alors, l’attaque de la caserne…

-N’est qu’une diversion.

Le soldat détourna les yeux. Soudain, il y eu une explosion derrière lui. Il dévissa la tête pour voir. La caserne était en flamme. On entendait les hurlements des survivants en train de brûler à l’intérieur. Autour de lui, une demi-douzaine de gardes se trouvait également attachée par terre, entourée par la vingtaine de terroristes qui leur tournait autour, sans apparemment éprouver la moindre gêne à faire cela devant témoins.

-En ce moment même, les gardiens de la bibliothèque font route vers nous. Mais nous serons partis bien avant.

-Pourquoi vous me racontez tout ça ?

-Pour ça.

Swift Quill dégaina son revolver et tira dans le crâne du prisonnier, et ferma les yeux.

-Je vois les fantômes de nos soldats, mais ils sont perdus.

Alors qu’ils voyagent vers leur fin, ils ne savent plus.

Alors que leurs os accusateurs émergent de l’éther.

Les sirènes de la mort, me supplièrent.

Il se releva, et se dirigea vers les autres prisonniers alignés.

-Il n’y pas de meilleure muse que la vengeance.

-Vous êtes malade !

L’artiste se tourna vers le soldat qui l’avait interpellé, et pointa son arme vers lui. Celui-ci ferma les yeux, entamant une petite prière en remuant les lèvres.

-Attendez !

Swift Quill releva son arme, et tourna sa tête vers la petite assemblée qui observait les événements. Une jeune jument, une licorne au pelage jaune clair et aux yeux azurs, sortit des rangs, et se dirigea vers l’artiste.

-C’est la vengeance votre truc ?

Quill acquiesça.

-Contre qui ?

-Contre cette guerre. Contre ceux qui l’ont créé, ceux qui nous ont fait du mal, ceux qui en profite pendant que d’autre souffre.

-Il a raison, fit la jument en désignant le soldat transit par la panique. Vous êtes malade.

Puis elle sourit.

-On s’inscrit où ?

Swift sourit à son tour.

-Vous étiez déjà parmi nous dès que le goût de la revanche s’est répandu dans votre bouche.

-J’ai une condition, le coupa la licorne.

L’étalon pencha la tête.

-Laquelle ?

-Lui, dit-elle en montrant le Solaire à terre. Je veux lui faire la peau moi-même.

Swift considéra le soldat, qui regardait la jument avec des yeux terrorisés, probablement en train de réfléchir à ce qu’il avait bien pu faire pour mériter tout ça.

-Ne souhaitez-vous pas lui pardonner ? demanda Quill.

-Vous déconnez ?

L’artiste sourit, lança son arme pour la faire pivoter et la tenir par le canon, et présenta la crosse à la jument.

-N’oubliez jamais. Ne pardonnez jamais.

-J’y compte bien, dit-elle en prenant l’arme.

Elle pointa le revolver vers le soldat, qui louchait sur le canon menaçant.

-La prochaine fois, tu demandes avant d’emballer une fille.

Et elle appuya sur la détente. L’arrière du crâne du Solaire éclata, et il retomba lourdement sur le sol. La licorne rendit son arme à Swift Quill, qui affichait son sourire le plus charmeur.

-Bienvenue parmi les Impardonneurs.

-Ce n’est que le début. J’ai un frère à venger, et je compte pas laisser traîner ça plus longtemps. Et laissez tomber le vouvoiement.

-Toi de même. Je peux te demander ton nom ?

La jument regarda le cadavre à ses pattes, alors que les autres Impardonneurs exécutaient les derniers rescapés du carnage.

-Cake, dit-elle. Pumpkin Cake.

---

Mexicolt était une ville sympathique, ce qui tenait beaucoup au caractère de ses habitants : les mexicoltiens formaient en effet une grande famille, et même si la ville était légèrement trop grande pour que tout le monde connaisse tout le monde, on se faisait confiance sans arrière-pensées, et on se protégeait mutuellement. Ce qui expliquait entre autre la prolifération des cartels de trafics dans la région d’ailleurs, protégés par la ville entière.

Pour les Lunaires, ça représentait aussi la chance de pouvoir être là sans qu’on leur pose de question. Du moment qu’on ne faisait pas de mal à la ville, ses habitants vous accueillait à pattes ouvertes.

Et la ville en elle-même avait son charme. Dans les régions désertiques du sud, il faisait chaud, peu humide, et la végétation se cantonnait généralement aux cactus et autres buissons épineux qui avaient la fâcheuse tendance à traverser les rues quand elles étaient désertes, mais les maisons colorées, souvent très clairs pour renvoyer les rayons du soleil et donc la chaleur, l’odeur de la cuisine épicée locale, et l’agencement même des commerces, tout respirait la joie de vivre.

En fait, la seule chose qui faisait tâche, c’était les uniformes Solaires. Mais là encore, les natifs avaient mis cet uniforme à la mode du coin : manches relevées, col bien ouvert, casque troqués contre de larges sombreros cachant du soleil, et attitudes avachis sur des chaises à faire semblant de surveiller.

Les mexicoltiens aimaient faire la sieste, c’était dans leur sang.

Windvision aimait bien cette ville. On s’y sentait normal, comme si les rivières de sang et les hangars de cadavres qu’elle avait derrière elle n’avaient aucune importance. Elle était une ponette dans une ville de poneys, et dans une certaine mesure, ça lui faisait du bien de se retirer de son costume de guerrière pour retrouver la sensation d’une vie normale.

Ils étaient ici depuis un peu moins de deux semaines, et la terrestre ne pouvait pas passer une journée sans mettre le museau dehors. Voir des gens, quitter cette atmosphère cloîtrée où tout tournait autour de la sécurité de Luna et de la suite des événements, annonçant la reprise des combats.

Et en même temps, elle savait qu’elle ne pourrait jamais laisser les Lunaires en plan. Elle ne pourrait jamais avoir sa vie en tant que ponette sous l’Empire, fusse-t-elle à Mexicolt. Et sa vie de soldate n’avait jamais été un calvaire. Mieux, cela lui avait donné un but, alors qu’elle s’apprêtait à perdre tout objectif de vie.

Stalker lui avait donné un but. Et elle lui devait la liberté pour laquelle il avait donné sa vie. En réalité, tout ce qu’elle était, elle le tenait du sniper. Soldate, commando, mais aussi la plus ponette des Night-Ops. Elle n’était pas aveugle, bien au contraire. Se sentir aussi bien dans une ville pleine de civils n’était pas donné à tous ses camarades. La preuve en était avec Flesh, qui la suivait plus ou moins discrètement depuis le début de sa ballade. Il avait du mal à se fondre dans le décor, trop militaire, trop combattant.

Détail qui pourrait sembler dérisoire, Windvision était sûrement la seule à savoir décemment faire la cuisine parmi l’équipe de tueurs. C'était comme si Stalker avait tenu à ce qu'elle soit autre chose qu'une Night-Ops. Elle était son assistante, et devait pour le suivre atteindre leur niveau, mais au final, elle savait aussi bien se servir d’une arme que gérer tout ce qui concernait le quotidien d’un poney.

Elle pouvait se réinsérer, et ça aussi, elle le devait à l’étalon.

Et il y avait bien plus, mais tout avait disparu dans un écroulement, et une arme pointée sur le front du poney.

-Vous allez bien, señora ? demanda une voix accentuée à côté d’elle, la tirant de ses réflexions.

-Oui, oui, répondit-elle en tournant son regard vers le commerçant qui la regardait d’un air inquiet. Désolée.

-Vous n’avez pas bouyé dépuis dé minoutes, y’étais inquiet.

-Il ne fallait pas, dit la ponette en souriant.

Elle s’approcha de l’étal, exposant des fruits et des légumes de toutes sortes, venant parfois de la région, parfois d’autre part, comme pour ces pommes, qui semblaient bien résister à la chaleur ambiante. Windvision huma les fruits, appréciant l’odeur sucrée. Elle pourrait peut-être en apporter quelque-unes à Sick, ça changerais du cactus et du maïs.

Le commerçant la regarda, amusé, tout en jetant de discrets coups d’œil à la patrouille solaire qui passait derrière. Une fois celle-ci passée, il déplaça quelques cagettes, et réaligna quelques fruits qui étaient partis à l’aventure pendant la journée.

-Vous n’avez pas dé problèmes, chez vous ? demanda-t-il à la ponette.

-Pas particulièrement. On est un peu serrés, c’est tout.

-Vous savez qué vous pouvez démaneder à d’autres poneys dé vous héberger. Chez moi, par exemple. Dé toute façon, c’est vide dépouis lé départ dé mon fils.

-C’est gentil, répondit Windvision en souriant. Mais nous ne voulons pas vous causer de problèmes.

-Comment va votre grande amie ?

Windvision soupira.

-Evitez de poser ces questions, s’il vous plait. Nous ne voulons vraiment pas causer d’ennuis.

-Mais c’est moi qui les pose, les problèmes, dit l’autre en souriant.

Les lèvres de Windvision formèrent un timide sourire.

-Elle va bien. Elle n’a pas l’habitude de dormir la nuit, c’est tout.

-Nous avons un peu tous perdou cette habitoude, commenta le commerçant. J’espère au moins que la Princesa del Sol récommenecéra rapidément à léver la luna. Lé ciel noir, c’est pas cé qué yé préfère, sourtout avec les nouits qué l’on a par ici.

A Mexicolt, comme dans toute la région désertique, plus la journée était chaude, plus la nuit était glaciale.

-Espérons-le, dit Windvision.

Elle continua d’observer les fruits, et fini par choisir une douzaine de pommes, que le commerçant mis dans un sac avant de lui donner, tandis que la ponette lui tendait les quelques piécettes en retour. Alors qu’elle partait, le commerçant la retint.

-Espera !

Il prit dans une de ses cagettes un magnifique fruit de couleur rouge.

-Ténez. Cadeau dé la maison.

Windvision prit la pomme avec un sourire, et salua le poney.

-Hasta luego !

-Nos vemos !

Elle continua sa promenade, dépassant le quartier marchant, se retrouvant parmi les habitations, jetant de temps à autre un coup d’œil perçant vers l’arrière pour voir Flesh toujours à bonne distance. Finalement, elle atteignit l’un des Temples Solaires de la périphérie de la ville, et entra à l’intérieur.

Elle se figea à peine les portes passées. Le prêtre était en grande discussion avec une licorne en uniforme.

-…peu de monde.

-Yé n’y peut rien si les fidèles préfèrent prier chez eux ploutot qué vénir ici sans arrêt.

Le prêtre en robe frappa du sabot au sol.

-Dé plous, yé vous férait rémarquer qué l’office est pleine lors des célébrations hébdomadaires. Mais les habitants ont autre chose à faire qué vénir tout les yours ici.

-Je comprends bien, mon frère, seulement, je me pose la question sur l’utilité de ce temple, c’est tout.

-Yé né comprend pas. Cé n’est pas les vôtres qui voulaient mettre des temples à chaque coin dé roue ?

-A vrai dire, je trouve que c’est beaucoup de dépense pour pas grand-chose. Je suis d’accord avec vous, le Culte du Soleil peut très bien se faire chez soi. De toute façon…

Un temps passa, et le prêtre demanda :

-Dé toute façon ?

-Pardonnez-moi, j’allais blasphémer. Enfin bref, c’est Sparkle qui commande, et elle veut qu’il y ait plus de fidèle dans les temples.

-Et qu’est-ce qué y’y peux ?

-Pas grand-chose, c’est vrai. Peut-être vous balader dans les rues en gueulant « venez au temple », j’en sais rien…

La Licorne tourna ses yeux vers Windvision, dont les pattes refusaient obstinément de bouger.

Ce fut le moment que choisi Flesh pour entrer. Il s’arrêta à l’entrée, intrigué par l’attitude de la ponette, et leva les yeux vers le fond de la salle. Et déglutit.

Finalement, la Licorne se tourna vers le prêtre.

-Bon, on dirait qu’il y a quelques personnes, finalement. Je vous avouerais que faire un rapport sur ce temple me parait complètement inutile. Il n’est pas vide, c’est tout ce qui importe.

Mue par une intuition, Windvision s’installa lentement sur un banc, et pencha la tête en avant comme si elle priait. Flesh la rejoignit, et fit de même.

-Les habitants du quartier sont fidèles à leur Déesse ? continua la Licorne.

-Autant qu’ils lé peuvent.

-Alors c’est le principal. Je vous laisse, j’ai encore quatre temples à visiter, et je dois avouer que toute cette histoire me pompe généreusement l’air.

La Licorne traversa la salle, dépassant les bancs, et se servit de sa magie pour ouvrir les portes. Au moment où elle allait sortir, le prêtre lança :

-Yé n’aurais jamais crou voir oune Licorne dou Soleil si peu conecernée par la dévotion.

-Mon travail consiste à maintenir l’ordre et la foi. Cette ville est l’une des plus tranquilles du pays, et ses habitants rendent grâce à leur Déesse avec une ferveur que j’ai rarement vue. Que puis-je faire de plus ? Hurler dans la rue d’aller à l’église ou je tue leurs enfants ?

La Licorne baissa les yeux et soupira.

-Ces méthodes font partie d’un passé où la terreur était nécessaire pour instiller le respect envers Celestia dans le cœur des poneys.

Elle se détourna et franchit le pallier.

-Si nous voulons pouvoir regarder nos enfants grandir dans un monde meilleur, il faut laisser au passé ce qui appartient au passé. Licornes du Soleil comprises.

Et la porte se referma. Flesh releva la tête encore sous le choc.

-C’était une vraie Licorne, ça ?

-Tout le monde ne peut pas être complètement dénué de morale, commenta Windvision.

-Les Licornes sont l’exception qui confirme la règle. Enfin, je croyais.

-Je crois que les Licornes n’ont pas fini de nous surprendre.

Le vieux prêtre les rejoignit.

-Très improudent dé vénir ces temps-ci.

-On ne pouvait pas savoir, dit Windvision.

-Yé né vous en veux pas. Allez-y, vous connaissez lé chémin.

Les deux poneys se levèrent, et se dirigèrent vers le fond de la salle, tandis que le prêtre arrangeait les cierges et s’accordait un petit temps de prière. Les Lunaires franchirent la porte de la tour, et montèrent les escaliers. Enfin, ils arrivèrent au sommet du clocher, et contournèrent la cloche. Windvision s’installa sur le petit balcon, et regarda au loin, dans le désert. Flesh, lui restait en arrière.

Ils restèrent silencieux quelques minutes, la ponette se perdant dans ses pensées et dans la contemplation du paysage, et Flesh, lui, assis derrière elle, sans expression.

-Pourquoi tu me suivais, au fait ? demanda la jument.

-J’aime pas te savoir seule dehors.

-Je suis une grande fille, tu sais. Je sais me défendre.

-C’est pas de ça que je parle.

Il se releva, et se mit à côté de la ponette, lui prit le dessous du menton pour qu’elle lui fait face, et récupéra une des larmes qui coulaient sur les joues de la terrestre.

-Mais de ça, dit-il en montrant la goutte.

Windvision s’essuya les yeux en reniflant.

-Désolée.

-T’as pas à l’être. Mais vas pas croire qu'on sais pas.

Il tourna son regard vers le désert. Une minute passa avec pour seul son la respiration des poneys et les bruits de la ville, et Windvision demanda :

-Est-ce qu’il te manque, à toi aussi ?

Flesh prit son temps pour répondre.

-Non. Il m’a entraîné pour éviter ça. C’était un ami –sûrement le seul, même. On a fait la guerre ensemble, on s’est sauvé la vie mutuellement… Mais franchement, je ressens pas vraiment sa perte. Comme s’il n’avait pas disparu, en fait.

Il renifla.

-Mais ça fait bizarre de ne plus se sentir couvert par sa lunette.

Windvision acquiesça, et regarda ses pattes avant, encore humides des larmes séchées.

-Alors pourquoi moi, j’en arrive là ?

-C’est à moi que tu poses des questions sentimentales ? ironisa Flesh. Je suis pas vraiment le grand expert. ‘faut demander à Jack.

-Au fait, j’ai toujours voulu savoir… Entre toi et Polished, il y avait quoi ?

Flesh se frotta la nuque, mal à l’aise.

-C’était une partenaire. On a fait pas mal de mission ensemble, on s’entendait bien… Rien de bien passionnant.

-Vraiment ?

Flesh croisa le regard de Windvision, qui avait visiblement du mal à y croire. Il roula des yeux.

-On s’entendait très bien. Mais ça restait au niveau du partenariat pour les missions et des parties de pattes en l’air quand on s’ennuyait. On est des soldats, des Night-Ops. Y’avait que toi et Shadow pour aller plus loin.

Il tourna son regard une fois de plus vers le désert.

-En plus, cette cinglée a trouvé le moyen de crever…

Les deux poneys restèrent quelques minutes dans le clocher, à profiter de leur solitude, du paysage, de la tranquillité de l’endroit, et à ruminer leurs pensées, qu’ils avaient mises de côté pendant la guerre, et qui revenaient désormais pour remettre leurs perspectives en question.

Finalement, Flesh se releva.

-On va peut-être y aller. Luna a l’air de vouloir passer à la suite le plus vite possible, ils vont avoir besoin de ton avis.

-Mais pourquoi ? C’est pas parce que je suis restée avec Shadow tout ce temps que je suis capable de faire ce qu’il faisait. Black Jack est bien meilleur.

-Tu veux que je te dise ? Si. Il a déteint sur toi comme un T-shirt rouge sur une chemise blanche. T’es pas complètement rouge, mais d’un rose assez violent pour qu’on croit que c’est ta couleur naturelle.

-Tu te mets à la métaphore ?

-Je suis même pas sûr de savoir écrire ce mot.

Windvision sourit, et se releva. Elle jeta un dernier coup d’œil en bas, et ses yeux s’arrondirent de surprise.

-Nom de…

---

Des livres par milliers se trouvaient là, dans cette bibliothèque qui faisait passer l’ancienne habitation de Twilight pour une vulgaire étagère taille XXL, rangés par thème, auteur, type, taille et on-ne-savait trop quels autres critères farfelus passant par la tête des bibliothécaires qui avaient organisé cet endroit.

Puis on atteignait les réserves, et alors là, il n’y avait plus aucun rangement qui tenait. C’était l’anarchie la plus complète, le chaos de papier, où livre, rouleaux et notes s’enchevêtraient entre les moutons de poussières et les toiles d’araignées. Twilight en aurait été malade, avec sa manie de réarranger les étagères tous les mois. Pire encore que la description qu’avait fait la surdoué de l’aile Starswirl le Barbu.

On traversait ces pièces, et on arrivait devant une porte lourdement cadenassé, en bronze ou autre espèce d’alliage de métal, et scellé par un sortilège pour que seules les Licornes du Soleil soient capables de l’ouvrir.

Ce qu’avait gentiment accepté de faire l’une d’entre elle après un sévère tabassage et l’exécution sans procès, lente et douloureuse, de ses congénères moins coopératives devant ses yeux. Pour récompense, sa propre mort avait été rapide et sans souffrance.

On pénétrait donc dans les archives secrètes des Licornes du Soleil. Et là, il y avait un peu de la bibliothèque principale dans le rangement, avec une pièce assez propre et bien entretenue, et sans un papier par terre, et de la réserve dans la méthode d’indexation, c’est-à-dire absolument aucune. Si il avait un nouvel élément à entreposer, on trouvait une place libre ou on poussait les rouleaux à côté, et on le posait.

De toute façon, personne ne s’intéressait à ce qui se trouvait là.

Personne, sauf une ponette portant un stetson sur la tête, et mâchouillant un brin de paille en observant tout ce ramassis de paperasse qu’il fallait pourtant fouiller pour trouver ce qu’ils cherchaient. Une sérieuse envie d’abandonner et de foutre le feu à ce merdier prenait Applejack en voyant les six poneys avec elle lire en diagonale les documents et les jeter par terre. Elle aurait préféré qu’ils soient plus nombreux. Mais Quill s’occupait de la caserne de soldats, et les autres étaient en train de causer la panique un peu partout en ville, histoire que personne ne s’occupe d’un petit casse dans une bibliothèque oubliée de tous.

Un petit casse, pour de grands projets. Applejack approcha une étagère, et déblaya quelques documents. Des liasses de papiers montrant des photos de tanks, d’armes de divers calibres, des canons comme ceux qui hérissaient la muraille de Canterlot, avec leurs descriptifs, les améliorations disponibles et projetés par l’ingénieur au moment de la publication du document, et plus loin, on trouvait une feuille montrant ladite amélioration, le coût de fabrication et les manufactures assignées.

Manufactures qui étaient indiquées sur un plan accroché au fond de la salle, que les Impardonneurs avaient décroché pour une action future. Il y avait même les plans des bâtiments si on cherchait bien, les moyens d’approvisionnement, trajets en train et ravitaillement par bateaux-dirigeables, et par extension les localisations des bases. Les informations utiles pour la croisade des vengeurs étaient récupérées, les autres laissés en plan par terre, en couvrant le plus de surface au sol possible.

Lorsque le feu prendrait, ça ferait une bonne mèche.

Cependant, il manquait l’information principale, la raison pour laquelle la cow-pony et ses acolytes étaient ici. En effet, la grande majorité des plans et brevets d’armes étaient signés d’une espèce de « T » stylisé, doté d’une barre au milieu du trait vertical, un même ingénieur qui cachait son identité sur la plupart des documents. Si le vieux Science avait inventé l’électromagie, son utilisation guerrière, et le développement des armes à feu, les engins de guerre tels que les tanks et les bombes, tous les concepts de base provenaient d’un même cerveau maléfiquement génial. Reprit ensuite par d’autres poneys inventifs et motivés par l’appât de l’énorme gain à se faire dans cette industrie, mais « T » gardait le monopole des idées les plus novatrices.

Et son véritable nom se trouvait forcément quelque part par ici.

-Applejack, venez voir ça.

La ponette se dirigea vers la provenance de la voix, et trouva une licorne bleue glace, qui lisait avec attention un document en plusieurs pages.

-Je pense que ça pourra vous intéresser, dit-elle en faisant voler la liasse de papier vers la terrestre.

Applejack prit l’objet volant, et commença à lire. Dès la photo de l’engin, son intérêt fut acquis, et elle parcouru les lignes.

Nouveau principe énergétique… Utilisation du phénomène de surcharge pour provoquer l’explosion… Puissance supérieur à…

Elle continua jusqu’à la fin du document, où se trouvait un gros tampon rouge « UTILISATION REFUSEE », suivit de petites annotations de la même couleur :

Arme trop puissante pour utilisation en combat. Risque trop élevé de dégâts collatéraux chez les civils à proximité, pour un intérêt stratégique nul. Prototype mis en quarantaine dans la zone 721 en attendant démantèlement. Projet de développement annulé, et arrêt du projet « Destruction Massive ».

-On dirait que même les Solaires avaient peur de ce projet.

-J’vais montrer ça à Swift, commenta Applejack. Ça l’intéressera. Des nouvelles de « T » ?

-Je crois que Sky a trouvé les étagères datant de l’époque où il y avait encore une classification. On devrait le trouver là.

-Okay.

La cow-pony rangea les documents dans son sac, et commença à s’éloigner, mais l’autre l’interpela :

-Dites, je voulais vous poser une question.

-Ouais ? fit Applejack en se retournant.

-Hoofington. Vous ne pensez pas qu’on y est allé un peu fort ?

Applejack baissa le regard, puis regarda la ponette dans les yeux.

-On y est allé trop doucement avant, plutôt.

Et elle s’éloigna, laissant la licorne continuer de farfouiller dans les rayons. Elle se déplaça parmi le dédale des étagères de rangement, marchant sur un tapis de papier, esquivant des poneys qui lisaient rapidement les papiers avant de les jeter par terre ou les mettre dans leurs sacoches. Les rayons se vidaient, la recherche touchait à sa fin.

La jument avait presque atteint le fond de la réserve où Stormy Sky pataugeait dans une montagne de paperasse, lorsqu’une patte se posa sur son épaule. Elle se retourna, pour voir le visage calme et rêveur de Swift Quill.

-D’jà de retour ? demanda-t-elle.

-Les Solaires n’ont pas posé beaucoup de problème. Sun et Window ne devraient pas tarder. Ça avance ?

-On a un paquet d’fabriques et d’voie ferrées à exploser si on veut paralyser l’approvisionn’ment d’armes.

-Hum… fit Swift, penseur. Ça reste secondaire. Si nous commençons à nous embarquer là-dedans, on en aura pour des années avant de véritablement avancer.

-Pas faux. Par contre, on a trouvé que’ques caches d’prototypes qui peuvent être pas mal.

Elle fouilla dans son sac, et en tira le document, qu’elle présenta à la licorne.

-Ch’uis chûre qu’cha va t’plaire.

Quill prit la liasse de papier par télékinésie, et commença à lire. Un sourire malicieux se dessina sur ses lèvres.

-Intéressant… Les travaux de Brain ne sont pas tombés dans l’oubli, on dirait.

Il leva les yeux, pour croiser le regard interloqué de la terrestre. Il haussa les épaules.

-Je m’étais intéressé à un moment aux nouvelles énergies. La dualité entre la perspective des avancées technologique et le potentiel de destruction en cas d’accident est très inspirante.

Applejack se retourna, pour continuer sa route première.

-Et sinon, ça peut nous servir ?

-Oh que oui. J’ai même ma petite idée. Où est cette « zone 721 » ?

Applejack héla un des poneys dans la réserve, qui accourut.

-Oui, A.J. ?

-T’as les plans des zones ?

-Tiens, attends…

Le poney fouilla dans son sac et en tira une carte d’Equestria, dotée d’une ribambelle de points colorés. Applejack la prit, et la parcouru rapidement du regard, puis finit par pointer un endroit du sabot.

-Là.

Swift Quill regarda la carte, et fronça des sourcils.

-Hum… On va avoir un problème.

-Ah ?

-C’est un des entrepôts d’armes attaqués par Stalker et les pégases. Il a été détruit.

-Ah… Comment tu sais ça ?

-Une discussion arrosée avec un des Experts qui a participé à l’opération.

-Ah.

Applejack regarda la carte.

-Donc elle a été détruite ?

-Je ne pense pas. Si les Nops l’avait faite sauté, on l’aurait rapidement su. Le problème, c’est qu’à ma connaissance, ils n’en n’ont jamais parlé.

Quill réfléchit quelques instants, et conclu :

-Connaissant ce tordu de Stalker, si personne n’en a parlé, c’est qu’ils l’ont trouvé, mais l’ont planquée.

-Et tous les Nops et les volants sont hors-jeu… ‘Tain, même morts, ils nous emmerdent, ceux-là.

-Reste à trouver qui l’a fabriqué… C’est quoi ce « T » bizarre ?

-Si je l’savais, on s’rait plus là.

-Donc c’est vrai cette histoire d’un seul type derrière toutes les armes ?

Applejack regarda Quill d’un air surprit.

-C’toi qui m’en avait parlé ! T’en doutais ?

-Disons que c’est assez difficile à imaginer. C’est peut-être un collectif d’ingénieurs.

-Stormy devrait trouver ça sous peu.

-Allons l’aider. Oh ! Attends !

Applejack s’arrêta en pleine marche, et se retourna.

-Quoi ?

-En fait, si je suis revenu plus tôt, c’était parce que je voulais te présenter une nouvelle recrue.

-Ben quand même ! fit une voix derrière Quill.

Applejack regarda par-dessus l’épaule de l’étalon, pour voir une licorne qui se dirigeait vers eux.

-Je pensais que j’allais moisir derrière toute la journée.

-Désolé, fit Swift Quill un peu gêné. Mais ces infos étaient un peu trop captivantes.

-Y’a pas de mal.

-A.J., fit l’étalon, je te présente…

-On se connait, le coupa la licorne.

Swift prit un air surprit, alors qu’Applejack était perplexe.

-Euh… dit la cow-pony. En fait…

-En treize ans, on a le temps de changer… Je suis Pumpkin. Pumpkin Cake.

Les yeux d’Applejack s’arrondirent, et un sourire se plaqua sur son visage.

-Par Tarnation ! T’as bien grandi, sugarcube, dit-elle en lui frottant vigoureusement la tête. J’t’avais pas reconnu.

-Vaut mieux. J’ai vingt ans, maintenant.

-Eeyup. Mais qu’est-ce que tu fais ici ?

La mine de Pumpkin s’assombrit.

-En fait… J’essaie de fuir mes parents.

La terrestre eut l’air surprise. Pumpkin serra les dents.

-Ils sont toujours à Canterlot. Ils refusent d’en partir, ils n’arrêtent pas de dire que tout va s’arranger, que Celestia nous protège, toutes ces conneries… Ils refusent de voir la vérité en face, et j’en pouvais plus.

Elle ferma les yeux.

-Pound est mort.

Les yeux de la cow-pony s’ouvrirent sous le choc.

-Mais… Com…

-Les bombardements. Tout le monde –même mes parents- considèrent Nicholaus comme un héros, parce qu’il a sauvé la ville…

Elle frappa du sabot à terre.

-Ce que tout le monde oublie, c’est qu’il a tiré sur les habitations, et que des tas de civils sont morts à cause d’un « tir loupé » ou deux. Personne n’en parle, tout le monde s’en fout…

Les flammes de la haine dansaient dans les yeux de la licorne, alors qu’elle racontait son histoire.

-Mais moi, j’ai perdu un frère. Et j’ai décidé de me barrer quand j’ai vu à quel point le cerveau de papa et maman s’était fait lessivé. Ça fait une semaine que je cherche cet enfoiré pour lui faire la peau.

Elle regarda tour à tour Swift et Applejack.

-A lui, Celestia, Luna et ses enfoirés qui ont attaqué la ville, et tout ce putain de système qui nous a pourri la vie quasiment depuis qu’on est nés.

Elle se tue, les pattes tremblantes de colère, alors que les poneys avaient cessé leurs activités pour écouter la tirade de haine de la licorne. Soudain, avant qu’elle ne puisse comprendre, Pumpkin se retrouva enlacée dans les pattes d’Applejack, qui la serrait contre elle.

-Tu n’es plus seule, lui murmura la terrestre. Nous sommes là pour toi.

Pumpkin regarda les autres poneys autour par-dessus l’épaule de la cow-pony, qui acquiesçaient les paroles de leur leader. Elle serra également Applejack, et leur étreinte dura plus d’une minute, pendant laquelle les Impardonneurs continuaient de fouiller la réserve de la bibliothèque.

-Bienvenue dans la famille, dit Applejack en se séparant de la licorne.

Pumpkin sourit, et remercia la terrestre en silence. Swift Quill tourna la tête vers le pégase qui se trouvait désormais à côté de lui, arrivé pendant ces évènements.

-Oui ?

-Je pense que ça va intéresser A.J., dit-il en montrant un carnet de note.

-C’est quoi ?

-La transcription des codes utilisés dans les rapports. Et il y a la signification du sigle de « T ».

Swift Quill prit le carnet par télékinésie et l’ouvrit, alors qu’Applejack se plaçait à côté de lui.

-En fait, dit Stormy Sky, c’est pas un T.

Les deux leaders des Impardonneurs ouvrirent des yeux ronds devant le document.

-C’est deux « F » dos à dos.

---

Sick Worm était installée sur son fauteuil, et regardait la réunion de poneys qui s’y trouvait. Les Lunaires avaient décidé de commencer leur débat sans attendre les deux retardataires, et autour de la carte posée sur la table au centre, c’était une ribambelle d’équidés qui se prenaient la tête pour trouver un endroit calme, isolé, apte à fournir un terrain d’entrainement adéquat pour former les restants de l’armée Lunaire à devenir de véritables commandos.

Et ce n’était pas évident.

-Et Stalliongrad ? proposa Coffee Crime. La ville a toujours un noyau de résistance très solide, et les montagnes pourraient nous planquer.

-Non, fit Black Jack. L’armée est très présente là-bas, sans parler des Licornes qui font sans arrête des descentes. C’est pas loin de la loi martiale, il y a un couvre-feu, les chars se baladent dans les rues... Ils sont à deux crins de la guerre civile, et les Solaires réprime le moindre poney qui tousse de façon « rebelle ».

-Pourquoi pas s’installer dans une ville ? dit Moonface. On pourrait trouver une cache à Ponylem, ça doit pas être ce qui manque. On pourrait même se faire passer pour un simple gang.

-Mauvaise idée, fit Luna en lisant une lettre. D’après notre cellule à Manehattan, la situation est pire que jamais. Depuis la Révolte de Pipsqueak, les impériaux n’ont cessé d’augmenter leur présence, et la fin de la guerre a accentué tout cela.

Elle reposa la feuille.

-Tout ce qui a trait à moi n’est pas en odeur de sainteté par là-bas.

-On pourrait réutiliser la cache de Fillydelphia, proposa Derpy. Avec un peu de ménage…

-Evitons les grandes villes, trancha Luna. Il y a trop de risques, trop de logistique à mettre en place. Nous sommes des hors-la-loi, il faut que l’on reste cachés.

-On a toujours le désert autour de nous, dit Moonface en haussant les épaules. La zone d’Appleloosa est assez accidentée pour nous planquer, et on aura pas de problème pour le ravitaillement.

-Le problème du désert, répondit Black Jack, c’est l’aspect découvert au niveau du ciel. Tout le sud est sous haute surveillance aérienne, pour éviter l’invasion zèbre.

-Ils y croient vraiment ?

-Qu’est-ce que Celestia ne craint plus, de nos jour ? dit la licorne noire renâclant. Mais le fait est qu’on sera trop repérables, sans compter le bruit. Il ne faut pas oublier qu’on va apprendre à une centaine de poneys à mettre au centre à tous les coups.

-Y’as toujours la région de Ponyville, dit Coffee Crime en regardant la carte. Elle est toujours désertée, à ce qu’on sait.

-Nous avons déjà statué sur le sort de la ville, fit sèchement Luna.

Le cercle de poney fit silence, observant la carte pour trouver une solution.

-Pourquoi pas l’étranger ? proposa Sick Worm.

-Raison diplomatique, répondit Luna. Si ma sœur apprend qu’un pays limitrophe a hébergé des rebelles, elle pourrait déclencher une nouvelle guerre.

-Mais les zèbres recueillent bien des milliers d’exilés, continua l’aveugle.

-Il y a un accord entre les pays. Les zèbres peuvent accueillir les réfugiés à condition qu’aucune action contre l’Empire soit entreprise.

-Et vous y croyez ?

Luna soupira.

-Avec Cadence et Shining Armor à leur tête, oui, j’y crois.

-On pourrait peut-être convaincre les zèbres de…

-Non ! coupa Luna en frappant du sabot sur la table. Nous ne voulons pas une nouvelle guerre, point final. Votre idée de provoquer une révolution m’est déjà difficilement supportable, ce n’est pas la peine de placer une nouvelle contrée dans l’équation !

Les poneys se turent, baissant la tête. Luna inspira profondément afin de se libérer de la tension qui commençait à la prendre. Cette histoire commençait à lui peser. Pour elle, la meilleure idée restait de s’introduire directement à Canterlot pour affronter sa sœur face-à-face. Mais sans la logistique nécessaire, elle ne pourrait même pas passer les murailles sans être capturée.

Il lui fallait une diversion, des combattants, et même là, elle se demandait si elle arriverait à battre sa sœur. Le cauchemar de cette nuit restait vivace dans son esprit, notamment parce que c’était plus un souvenir qu’une projection. Un souvenir de cette fameuse journée où elle avait jeté ses opinions sur sa politique à la figure de sa sœur. Et qu’elle l’avait regardé avec cet air de suffisance qui s’était plaqué sur son visage depuis le début de sa folie, avant de…

Luna serra les dents. Elle avait passé une très mauvaise nuit.

Soudain, on toqua à la porte, selon le code prévu pour reconnaître les partisans, et ils entendirent des bruits de sabots sur le sol de l’entrée. Windvision et Flesh étaient rentrés. Un autre bruit se fit entendre par-dessus les claquements des sabots. Une espèce de raclement. La porte du salon s’ouvrit, révélant un Flesh au sourire radieux.

-On a deux surprises !

Il s’écarta, révélant un être reptilien qui devait se baisser pour entrer dans la maison bas de plafond de Berry Punch, aux écailles violettes sous lesquelles transparaissaient des muscles saillants, les griffes vertes aiguisés, et la crête qui touchait le plafond.

Luna mit quelques secondes à reconnaître le dragonnet.

-S…Spike ?

L’ancien assistant de Twilight regarda la Princesse, courba légèrement la tête, et parcouru l’assistance du regard, un troupeau de poneys impressionnés par la tête du dragon.

-Ben quoi ?

-C'est-à-dire… fit Black Jack. Disons que ça faisait longtemps que l’on ne t’avait pas vu.

-Il a pris un sacré paquet de soupe, dit Flesh. Et c’est tant mieux, parce que c’est notre nouvelle recrue.

-Mais… Dame Rarity ne vous avait-elle pas interdit de… protesta Luna

-Rarity n’est plus là, fit Spike d’un air sombre. Et si vous ne voulez pas que je rejoigne ces gars-là, dit-il en jetant le journal ouvert sur la photo du symbole des Impardonneurs, vous feriez mieux de ne pas en parler.

Les poneys hochèrent la tête imperceptiblement, et Coffee demanda :

-Qu’est-ce que tu fais ici ? Comment tu nous as retrouvés ?

-C’est pas bien compliqué. Suffisait de suivre les chars.

-Les… ?

-C’est la deuxième surprise, dit Flesh.

-Les Solaires qui étaient sur nos traces nous ont retrouvés, acheva Windvision. Ils sont à la sortie de la ville, et négocient avec les autorités locales pour nous mettre le grappin dessus.

La nouvelle tomba sur les Lunaires comme un couperet.

-Comment pouvons-nous nous échapper ? demanda Luna.

-Les habitants vont avancer la Fête des Morts pour faire diversion, dit la terrestre. Il faudra juste attendre la nuit avant d’agir. D’ici-là, c’est trop dangereux de rester tous ensemble. J'ai discuté avec certains Mexicoltiens, ils acceptent de nous cacher une journée.

-Pourquoi partir ? demanda Sick Worm. Vous êtes très bien cachés ici !

-Désolé Sick, fit Flesh, mais va falloir en plus que toi et Berry veniez avec nous. On vous lâchera sur la route, mais là, vous êtes des anciennes Lunaires, et ça va finir par se savoir. Surtout toi, Sick.

-Ouais… fit l’aveugle en tripotant son bandeau.

-C’est quoi le plan, alors ? demanda Black Jack. On ne sait toujours pas où nous rassembler.

Windvision s’approcha de la carte, et la parcouru du regard.

-Il nous faut un terrain d’entrainement géant pour le combat urbain, éloigné de toute présence militaire trop importante. Y’a pas une ville abandonnée dans un coin qui puisse faire l’affaire ?

-Y’a bien Ponyville, mais…

Les yeux de Derpy s’ouvrirent en grand.

-Je sais !

Elle posa le sabot violemment sur un point de la carte. Puis elle souleva son sabot pour voir ce qu’il y avait en dessous, et le déplaça légèrement, pour désigner sa véritable cible en rougissant de son manque de précision. Coffee tendit le cou pour voir l’endroit.

-Euh… Sérieux ?

-C’est pas forcément con, dit Flesh. Y’a personne là-bas depuis des lustres. Pourquoi vous n’y avez pas pensé avant ?

-C’est pas vraiment un camp de vacance, dit Black Jack. On ne sait pas…

-Et tu voulais vraiment aller dans un camp de vacance, tête d’œuf ? cracha le commando en toisant la licorne. Faudrait peut-être vous retirer les cornes du cul si vous voulez avancer.

-On parle d’une zone sinistrée par la pire des armes utilisée pendant la guerre, là ! s’énerva le surdoué. On ne sait même pas si…

-Stalker et moi, on avait une planque là-bas, coupa Derpy.

Les poneys se retournèrent vers la pégase, qui prit un air gêné.

-Quand on était en opération d’assassinat, on se servait de cette planque pour tout organiser et nous reposer. Ça nous servait de QG pour couvrir le sud.

-Et pourquoi tu n’y as pas pensé avant ? demanda Windvision.

-J’ai pas tilté sur le coup. Et si vous craignez Ponyville parce qu’elle est lugubre…

Elle soupira.

-… vous n’allez pas aimer Las Pegasus.

---

Nicholaus inspira profondément. Devant lui, la Licorne lui donnait une sérieuse envie de baffes, suivies de membres brisés, avant un pur et simple démembrement et une balle dans le crâne s’il était de meilleure humeur. Ou plus probablement prendre sa tête et la tirer lentement jusqu’à ce que toutes ses cervicales se détachent les unes après les autres.

Mais il ne ferait rien de cela, pour plusieurs raisons, la première étant qu’il n’avait pas de raison véritable de le faire. Il était aux ordres des Licornes, et si elles lui demandaient de rester hors de la ville avec ses chars pendant que leurs soldats traquaient les dissidents à l’intérieur de la ville, il devait rester dehors. Même si la motivation de cette Licorne n’arrivait pas à l’ergot d’un poulet famélique. Cette ville devait pomper toute la combativité de ceux qui s’y trouvait, il suffisait de voir l’état de l’uniforme du commandant des forces de défenses de la ville pour s’en convaincre.

Mais au final, la raison principale pour laquelle Nicholaus laissa son sabot à terre et son flingue dans son étui, c’était surtout que l’autre pouvait lui arracher les yeux avant qu’il n’ait pu faire un geste. La broche sur son uniforme noir indiquait clairement que même s’il n’était pas à fond dans le trip de l’Empire, ses capacités magiques avaient impressionné Sparkle. Nicholaus, lui, devait faire avec une corne brisée qui lui permettait à peine de soulever sa tasse de café le matin.

Le soir tombait, et les recherches étaient infructueuses. Ils avait été repérés, ça ne faisait pas un pli. Et le commandant refusait obstinément de mettre en place un blocus autour de la ville. Dans la ville, on entendait des bruits de joies, comme si une fête avait lieu. Bientôt, des feux d’artifices partirent. Comme par hasard, au moment même où les traîtres étaient repérés, une jolie fête rendant les recherches impossible débutait.

Et dire qu’en entrant en force avec ses blindés, il pourrait mettre fin à cette connerie…

Mais pourquoi je leur obéis, au fait ? Je pourrais très bien faire ce que je veux, au pire, ils se démerdent avec l’alicorne.

Ouais, mais quand je les aurais attrapé, je fais quoi ? On va encore me foutre dans une zone complètement paumée où je devrais faire le planton pendant des lustres, jusqu’à ce que quelqu’un décide que je suis trop dangereux pour continuer à servir.

Alors que la Licorne s’éloignait, il jeta un coup d’œil au journal local, el pais, qui présentait la nouvelle action des terroristes à la pomme.

Je pourrais peut-être embrayer là-dessus...

En plus, il fallait attendre Dash. Elle faisait la liaison entre leur groupe et le gouvernement, et ses pégases étaient très pratiques pour repérer les traces des fugitifs vues du ciel. Le seul problème, c’était qu’on n’avait pas de nouvelles d’elle depuis une semaine. Et elle avait été claire : « vous les choppez pas sans moi ».

Bref, il fallait glander en attendant que ces fourbes leur tombe sur le coin de la gueule, et le poney monochrome n’aimait pas ça du tout.

Il entendit le bruit d’une cavalcade derrière lui, et tourna légèrement la tête pour voir arriver Doublesight, qui esquivait les poneys qui s’occupaient des tanks, et finit par se poster derrière le général.

-Chef, on a une réponse !

-Alors ?

-Dash reste à Canterlot. Il y a apparemment un problème en ville, et Sparkle et elle sont sur les dents. Ça a l’air d’être de la folie, là-bas. On a l’autorisation d’agir sans les pégases.

-Ils se font pas encore attaquer, j’espère ?

-Je pense pas. Tenez, y’a un autre pli, dit-il en montrant le message à Nicholaus.

Il déglutit et ajouta :

-C’est du code SS.

Le regard de Nicholaus s’alluma, et il déchira l’enveloppe d’un coup de magie. Le récipient tomba à terre pendant que la licorne parcourait les quelques lignes du message.

Il y eu un instant de silence, pendant lequel Doublesight se sentit un peu mal alors qu’il voyait le sourire de son commandant s’élargir au fur et à mesure que ses yeux descendaient le papier.

Nicholaus finit de lire la lettre, et laissa tomber le papier.

-La folie à Canterlot…

Puis il éclata de rire. Un rire inquiétant, révélateur de l’esprit dérangé de celui qui le poussait. La licorne renversa la tête en arrière en continuant de rire, et se posa une patte sur la tempe. Son rire commença à se calmer au bout de deux minutes, et il essuya une larme au coin de son œil.

-Il s’est enfui…

-Euh… Chef ? essaya Doublesight.

Et avant que le pauvre second puisse réagir, il se retrouva avec le canon d’un pistolet sur le front.

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