Chapitre 3

Vinyl était couverte de sueur mais elle n’y faisait pas attention. Son téléphone flottait devant ses yeux, entouré d'un halo blanc. Une lumière rouge clignota au coin de son œil, plongeant la nuit dans l'ombre.

Son lit était confortable mais petit, et l'appartement pas beaucoup plus grand. Mais la DJ ne pensait pas à ça pour le moment.

{[À OCTAVIA]}

>Hey

Elle grinça des dents en le relisant, et finit par tapoter l'écran en soupirant

[BROUILLON EFFACÉ]

Elle se roula sur le ventre en grognant et s'enfonça la tête dans l'oreiller. Son téléphone attendait patiemment qu'elle se retourne pour réessayer.

{[À OCTAVIA]}

>Quoi d'neuf ?

"Il est trois heures du matin, je dors Vinyl. Tu es stupide." La licorne murmura en imitant ridiculement la voix d'Octavia. Une pulsion de magie appuya sur le bouton supprimer.

{[MESSAGE ENVOYÉ]}

Son cœur lui remonta dans la gorge alors qu'elle se redressait d'horreur. "Non non non non non non" murmura-t-elle. "Pas maintenant, pas à cette heure !" Pendant ce qu'il sembla être une éternité, Vinyl espéra que, peut-être, Octavia ne dormait pas à côté de son téléphone et qu'elle ne l'entendrait pas. La sueur coulait le long de son corps alors que les secondes passaient. Alors qu'elle commençait à se calmer, une petite sonnerie se fit entendre.

"Oh non."

{[APPEL DE OCTAVIA]}

"Oh non !"

Elle n’avait aucune échappatoire. Octavia savait que Vinyl était sur son téléphone. Elle devait répondre. Le manque de sommeil lui conseilla de ne pas répondre et de quitter la ville pour ne plus jamais revoir la violoncelliste. Heureusement, des pensées plus saines lui revinrent.

‘Click’

« Hey. » Dit nerveusement Vinyl.

« Pourquoi, dans tout Equestria, m’appelles-tu à trois heures moins le quart du matin ? » Répondu une voix amusée mais toujours aussi sophistiquée.

« Heu… Je n’arrivais pas à dormir. »

« Donc tu as décidé de m’infliger ta misère ? »

Elle gémit. « Désolée. »

« Ne t’inquiètes pas, je plaisante. Je n’arrive pas à dormir moi non plus. »

« Pourquoi ? » Vinyl roula sur le flanc et se pelotonna dans sa couette, un petit sourire remplaçant la peur.

« Mon cerveau refuse de se taire. »

« Ouais je connais ça. Tu penses à quoi ? »

« Des trucs stupides. Je ne vais pas t’ennuyer avec ça ou tu t’endormiras immédiatement. »

« Ca à l’air pas mal comme plan. » Elles pouffèrent. « Aller, raconte. »

« Je… Je pensais à toi Vinyl. »

Son cœur battit un peu plus vite. « Ah ouais ? » Demanda-t-elle, espérant que sa voix n’était pas trop rauque.

« Je…Tu sais ce que je t’ai dis au bar ? A propos de mon manque d’amis ? »

« Ouais ? »

« Et bien je me dit que j’ai eu de la chance d’être forcée de mieux te connaitre. C’est très étrange comme sentiment… Avoir… » Un reniflement silencieux venant de l’autre bout de ligne fit souffrir Vinyl. « Désolé, être réveillée aussi tard me rend plus… ouverte. »

« Je comprends, ça me fait pareil » répondit la DJ gentiment, suivit par un presque inaudible : « Ne pleure pas s’il-te-plait. »

« Je vais bien, je ne devrai même pas être en train de pleurer, parce-que c’est bien tout ça. Je pense que ce que je veux dire c’est… merci. »

« Tu sais, je devrai te remercier aussi, aucun de mes amis ne sont très proches de moi, alors c’est cool de savoir que t’es là. »

Octavia pouffa. « Je ne vais nulle part. Mon diplôme va m’occuper un moment. »

« Ouais, le mien aussi. Mais on va casser des flancs et se faire un nom avant ça.             Toi et moi, ensembles, compris ? » Elle ne voulait pas avoir l’air aussi  violente mais la perspective de passer plus de temps avec sa nouvelle amie l’excitait vraiment.

« Carrément. Amies pour toujours ! » Octavia avait l’air aussi excitée.

Grognant, Vinyl sourit dans la pénombre. « Oh, c’était vraiment ridicule. »

« Oh chut toi. J’ai toujours voulu dire ça. Maintenant dis le aussi, comme ça c’est officiel. »

Après un long silence, la licorne ravala sa fierté. « Amies pour toujours. »

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« Tu ne saurai pas mixer le plus simple des morceaux, même si ta vie en dépendait ! » cria la licorne.

« Et tu ne saurai même pas accorder un violoncelle aux normes d’un orchestre ! » répliqua Octavia.

Psych se passa un sabot dans le cou. « Vous savez, je pensais vraiment que vous deviendrez rapidement amies. Peut-être que je vieilli. » Pendant un moment les deux juments se sentirent coupables de faire douter de lui-même leur professeur. « Ou peut-être que vous devez juste passer plus de temps ensembles ! » La culpabilité disparue immédiatement.

« Je pense que cela viole mes droits en tant que citoyenne d’Equestria. Vous savez, l’interdiction des punitions cruelles et inutiles. »

Vinyl nota mentalement de la féliciter sur cette réplique après le cours. « Ah ouais ? Tu parlais tellement de toi au bar que j’aurai pu partir sans que tu ne le remarques. » C’était un retour plutôt classique mais Vinyl avait préféré ne pas y mettre trop de cœur.

Heureusement, Psych décida d’y mettre un terme lui-même. « Ok, asseyez-vous toutes les deux. » Un chœur de plaintes s’éleva de la classe. « Retournons à nos moutons. On a déjà fini le cours d’aujourd’hui mais il nous reste une demi-heure. Alors ? Des propositions d’activités pour notre duo favori ? »

Bonbon leva un sabot en l’air avec un sourire narquois. « Pourquoi pas un dîner aux chandelles ? » Elle pouffa avec la licorne verte devant elle, qui avait une lyre sur le flanc. Quelques autres poneys rirent, comprenant apparemment quelque chose qui échappait à Vinyl.

Octavia dévisagea Bonbon, espérant que le rouge sur ses joues passerait pour de la colère. Beaucoup la pensaient prude mais elle savait parfaitement ce qui était impliqué.

« Peut-être quelque chose pouvant ne pas se terminer en double homicide ? » Proposa Psych, mais son expression indiquait qu’il était dans la confidence. « Pourquoi ne pas aller au cinéma ? Comme ça vous n’aurez pas à vous parler. »

Vinyl fit attention à ne pas répondre trop vite et le regarda avec une mine énervée. « Peu importe. Au moins je n’aurai pas à la regarder. »

« Parfait ! Et toi Octavia ? »

La violoncelliste soupira comme si la moindre pensée en rapport avec Vinyl l’épuisait. « Très bien, si vous tenez vraiment à continuer cet exercice ridicule. Mais Vinyl paye. »

Ravalant un éclat de rire, la licorne verte devant Bonbon chuchota le plus fort possible « Normal, c’est souvent à l’étalon de payer pour sa jument. » Il y eu un moment de flottement avant que tout les autres élèves éclatent de rire en sifflant les deux juments, rouges comme des tomates.

Cette fois, Psych ne rit pas. « C’était déplacé Lyra. J’aime des bonnes répliques autant que n’importe qui, mais on va essayer de se calmer un peu. »

« Désolé patron » Dit-elle, en imitant un salut militaire, ce qui fit exploser de rire Bonbon.

« Ok les enfants, le cours est techniquement fini. Je suis sûr que vous avez tous des choses à faire donc ne soyez pas en retard. »

Alors qu’ils se dispersaient tous dans lumière du soleil, la DJ résista à l’envie urgente de courir vers Octavia, se débrouillant pour avoir l’air énervée envers la jument grise, tandis que cette dernière faisait la même chose mais toujours avec un air toujours plus digne. Uniquement après avoir atteint la sécurité de la foule dans la cour de récréation, elles se permirent de se rapprocher lentement. Leurs camarades de classe étaient trop loin et ne leur prêtaient aucune attention.

« J’ai vraiment aimé la partie sur tes droits de citoyenne. » remarqua la DJ avec un sourire en coin.

« Oui, je suis assez fière de ça. J’y ai pensé pendant un cours d’histoire en étudiant un traité sur les règles de la guerre. » Octavia se passa le sabot dans la crinière et regarda Vinyl. La licorne faisait le tour de la cour du regard et ne remarqua pas la violoncelliste. Sa crinière bleue électrique aux reflets cyans semblait tellement décoiffée qu’elle correspondait parfaitement à la DJ, comme un mélange de beauté et de fun. Octavia l’enviait presque.

« Ca à l’air pas mal. Je devrai peut-être laisser tomber l’un de mes cours pour prendre celui là. »

« Pour chaque document de guerre intéressant, il y a mille déclarations politiques ennuyantes. Tu n’as pas idée à quel point tu t’ennuierais mon sucre. »

Vinyl s’arrêta de marcher et regarda la jument grise. « Mon sucre. » répéta-t-elle en levant un sourcil.

« On n’a pas encore le droit de se donner des surnoms ? Désolée, je ne suis pas très douée pour tout ça » dit-elle en agitant le sabot nerveusement.

« Heu… et bien…’mon sucre’ n’est pas vraiment un surnom, c’est plus… » Elle toussota et continua plus bas. « …un nom de chien. »

« Oh. » La vue des joues d’Octavia se couvrant de rouge fit glousser Vinyl.

Pour essayer de ne pas prolonger l’embarras de son amie, elle se remit à marcher et agita la queue pour inciter la violoncelliste à la suivre. « On va dire qu’il ne s’est rien passé. »

« Oui, s’il te plait. »

« T’inquiètes. En plus, les surnoms ne sont jamais choisis, ils sont faits. Appelle-moi Vinyl pour le moment, ok ? »

« Ok.» Elle s’éclaircit la voix pour retourner sur le sujet. « Pourquoi tu ne laisse pas réellement tomber une de tes matières ? Ta compagnie pourrait peut-être réussir à rendre mes cours intéressants. »

« Bah, y’a aucune matière que je veux vraiment arrêter. La musique je ne peux évidemment pas, et pour le moment j’aime vraiment le dessin. » Le fait qu’elle ne parle pas du troisième cours ne fit qu’attirer l’attention dessus.

« Pourquoi la psychologie ? Je t’ai vue en cours, quand on ne se dispute pas tu as toujours l’air ennuyée. »

« Parce que ça… » La fin de la phrase fut complètement inaudible.

« Pardon ? »

« Parce-que ça nous donne une raison d’être ensemble. » répéta-t-elle rapidement, rougissant tandis qu’elle vérifiait si personne n’avait entendu.

« Moi aussi j’aime passer du temps avec toi Vinyl. »Un sourire se dessina sur leur visage quand la DJ se retourna vers elle.

Elles se rendirent vite compte qu’elles ne se dirigeaient pas dans la même direction.

« Heu, Octavia ? Tu ne veux pas aller manger ? »

« J’ai cours d’histoire dans quelques minutes… Je pensais que tu m’accompagnais. »

Vinyl toussota. « Oh oui, c’est vrai. C’est où déjà ? »

Soupirant, Octavia repartit en direction de sa salle.

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Vinyl avait deux raisons de ne pas attendre Octavia devant la salle.

Premièrement, ça serait gênant si la jument grise regardait par la fenêtre et la voyait attendre.

Deuxièmement, elle avait plein de trucs à faire. Elle n’était pas seule au point d’attendre une amie en cours. La DJ avait d’autres amis et activités. Yop.

Une demie-heure plus tard, ses amis et activités la regardaient du fond d’une choppe. Le bar de l’université n’était pas aussi délabré que les bars habituels de la licorne mais il montrait son âge. Une plaque devant la porte indiquait que c’était le premier bâtiment construit de toute l’université. Aussi amusant fut le fait que la priorité dans la construction d’une école était un endroit pour servir de l’alcool, il ne l’était pas suffisamment pour la distraire de ses pensées.

« Allez Vinyl, remets-en toi. » murmura-t-elle avant de lécher les dernières gouttes sur le bord de sa choppe. « Tu as plein d’amis avec qui trainer, ne t’attache pas autant à l’une d’entre eux. »

Les mots résonnèrent dans sa tête. Une petite voix se leva :

Mais elle est tellement intéressante.

« Non, je suis juste ennuyée et elle m’aide à faire passer le temps. »

C’est pour ça que je bois chacune de ses paroles ?

« Laisse-moi tranquille. » Repoussant la choppe, elle s’enfouit la tête dans les pattes.

Un ronchonnement se fit entendre derrière elle. « Mais je n’ai même pas encore parlé. » dit Psych, s’asseyant à la table à coté de Vinyl.

Elle se retourna vivement, regardant son professeur avec des yeux grands ouverts. « Heu… hey… »

« Calme-toi. Je ne suis pas ici pour te torturer. J’aime venir ici pour décompresser après les cours. »

« Cool. » C’était tellement bizarre de retrouver un des ses professeurs ici, comme si deux morceaux de sa vie se rentraient violemment dedans.

Psych soupira et sembla perdre de son entrain. « Tu sais que je m’amuse beaucoup en cours, en ce moment ? Je ne pensais pas que ça t’énervait au point de passer ton après-midi à boire. »

Réalisant l’image qu’elle devait renvoyer, Vinyl se redressa et s’éclaircit la gorge. « Je ne bois pas pour ça… Mais vous devriez quand même vous sentir mal de faire ça. »

Psych gloussa en levant innocemment les sabots. « Hey, enseigner peut être vraiment ennuyeux parfois. Je pense que c’est une chance qu'Octavia et toi se retrouvent dans la même classe. Peut importe combien de copies se trouvent sur mon bureau, je peux toujours compter sur vous pour me changer les idées. Je pense qu’elle a gagné aujourd’hui. »

« Ouais, moquez-vous en plus. » Vinyl regretta soudainement d’avoir repoussé la choppe aussi loin,  car elle eu une envie pressante de jeter les quelques gouttes restantes au visage de Psych.

« Bah, ne t’inquiète pas, tu l’aura la prochaine fois. Tu devrais peut-être essayer quelque chose sur ses cheveux, elle semble assez sensible pour ça. » suggéra l’étalon, envieux d’aider.

Elle souleva un sourcil. « Vraiment ? »

« Evidemment. Ou, si tu veux l’avoir par fausse-gentillesse, essaye de la complimenter. »

« Pourquoi je serai gentille avec elle ? » demanda Vinyl par reflexe.

Le professeur rit. « Pas mal. Aucune chance pour que vous deveniez amies alors ? »

« Le moindre espoir d’amitié a disparu lorsque qu’elle a dit qu’être DJ ne demandait aucun talent. » Sa voix était plus ferme et convaincante qu’elle ne le serait si elle ne jouait pas la comédie.

« Ouais, c’est ce que je pensais. Bah, j’imagine que rien ne peut changer vos avis respectifs. »

La licorne glissa de sa chaise et s’étira les pattes. « Merci pour la discussion, mais j’ai à faire. Fêtes à organiser, musiques à composer. A plus. »

Psych hocha la tête, puis leva un sabot pour dire au revoir et en profita pour faire signe au serveur.

A la seconde Vinyl fut dehors, son téléphone flottait déjà devant ses lunettes violettes. Après avoir rapidement écrit quelque chose, elle le remit en sûreté dans son sac. Alors qu’elle s’éloignait en marchant, elle commença à siffler.

Octavia entendit une sonnerie étouffée dans son sac. Le professeur débitait son cours sur un ton monotone, elle en profita pour sortir discrètement son téléphone, et lire le message qu’elle venait de recevoir.

{[VINYL]}

>J’adore ta crinière :)