Chapitre 11 – Ils grandissent si vite

Le claquement des petits sabots sur le parquet se diffusait dans toute la maison lorsque Pinkie plongea derrière la pouliche pour essayer de l’attraper, lui faisant émettre de petits rires aigus. Une semaine s’était écoulée depuis l’incident à Canterlot, Pinkie l’avait déjà oublié, préférant consacrer son temps et son énergie à la téméraire Comedy. Bien qu’elle fût plutôt jeune, elle savait déjà marcher, courir, sauter et torturer ses parents de différentes façons. Elle ne cessait de les surprendre.

Ses cornes, qui n’étaient autrefois que de petites bosses, avaient désormais suffisamment poussé pour dépasser de son indomptable crinière blanche. Mais ce n’était pas la plus grosse surprise.

Ils l’avaient remarqué la première fois que Pinkie avait obligé Discord à changer une couche. Elle l’avait traîné jusqu’à la pouliche qui gigotait avant de se pincer le nez et d’observer l’esprit avec amusement. Il fit apparaître un grand morceau de tissu muni d’une épingle et la fusilla du regard. Comedy se mit à gazouiller.

Elle ferma les yeux, concentrée, et replia ses sabots en tirant sa petite langue bleue. Une faible étincelle apparut au bout de ses cornes et Discord fit un pas en arrière, les yeux écarquillés.

« Euh, Diz ? Je crois qu’elle est en train de remplir la nouvelle couche. »

Il lui mit un doigt sur les lèvres et continua de regarder sa fille avec curiosité. En poussant un petit cri, elle fit apparaître une pince semblable à celle que Discord portait sur le museau. Elle lui fit un sourire.

Pinkie ne put se retenir de pépier de joie et Discord laissa un rire s’échapper. La pouliche était capable d’utiliser sa magie. Il tendit les pattes pour lui retirer la pince et l’embrassa sur le museau avant de faire une grimace et de se débarrasser de la couche souillée.

À présent, elle copiait la manière de se déplacer de Pinkie et sautillait partout dans la maison en renversant les bibelots qui se trouvaient sur les étagères. Il fallut attendre qu’elle trébuche sur les sabots de Pinkie pour que cette dernière pût l’attraper et la tirer contre sa poitrine en gloussant. Comedy se débattit avec hargne et parvint à s’enfuir de l’étreinte, mais ce fut sans compter sur la patte de son père. La pouliche ne faisait pas le poids face à la poigne de son père, et Pinkie soupira en signe de soulagement.

« Louée soit Celestia, tu l’as rattrapée. Quelle flèche, celle-là. »

Comedy cligna des yeux en direction de ses parents, comme si elle tentait de plaider son innocence par la pensée, et Pinkie leva un sabot pour lui ébouriffer la crinière.

« Il serait peut-être temps qu’elle fasse sa sieste.

— Elle va s’enfuir dès qu’on va la coucher.

— On devrait réussir à la tenir à l’œil. »

Il acquiesça, puis ils se dirigèrent ensemble vers le berceau qui se trouvait dans leur chambre. Il était modeste, entièrement blanc et ne contenait qu’une couverture de peluche rouge débordée. Lorsqu’ils mirent leur fille à l’intérieur, elle fronça les sourcils et tourna un peu en rond avant de s’installer et de fixer sa mère dans les yeux à travers les barreaux.

Pinkie donna un petit coup de coude à Discord.

« Fais quelque chose.

— Hein ?

— Tu connais ce visage. Ça veut dire qu’elle s’ennuie ! »

Comme en réponse à cette affirmation, Comedy se mit à tirer la langue, un signe insignifiant qu’elle allait avoir recours à la magie. Les pattes de Discord s’agitèrent un peu, puis sa tête se tordit dans tous les sens avant que ses yeux ne se posassent sur ce qu’il cherchait. Il attrapa Floyd qui se trouvait à côté du lit et le posa avec Comedy. Elle ouvrit des yeux emplis de curiosité et lécha la boule de poils après quelques secondes d’hésitation. Floyd se contenta de ronronner.

Un autre rire mélodieux se fit entendre. Elle attrapa Floyd pour s’enrouler autour de lui et plonger le visage dans sa fourrure arc-en-ciel au point que l’on ne distinguait presque plus sa propre crinière.

Pinkie se leva lentement, faisant signe à Discord de rester silencieux, puis elle se faufila à travers la pièce en traînant l’esprit dans son sillage. Une fois la porte fermée, il ne put se retenir plus longtemps de pouffer de rire.

« On dirait que Floyd est un bon coussin.

— Pourquoi ça ne m’étonne pas ? Bon, avance. »

Elle le tira jusqu’aux escaliers et il ne lâcha qu’un soupir au moment où ils atteignirent la cuisine.

« Ne me dis pas que…

— Je dois encore t’apprendre à cuisiner, mon cher. »

***

« Luna. »

Celestia trotta vers sa sœur, au cœur de l’ambiance paisible des jardins qu’elles occupaient. La plus jeune ne prit même pas la peine de se retourner à l’appel de sa sœur et préféra garder les yeux fixés sur la statue qui se trouvait devant elle.

« Luna, regarde ce que tu es devenue. »

Les ailes de Luna se contractèrent légèrement, trahissant son visage d’apparence imperturbable. Celestia décida de ne plus parler et s’avança pour s’asseoir à ses côtés, déployant une aile pour lui couvrir le corps. Luna semblait différente, sa crinière d’habitude scintillante était terne, plate.

« Luna, je comprends que toi et Nightlock étiez proches.

— Il n’y avait rien entre nous.

— Refouler ne fera qu’empirer les choses.

— Tu as raison. Y penser ne pourra que me faire du bien. »

Luna repoussa sa sœur et baissa la tête vers le sol, laissant l’ombre voiler ses paupières.

« Désolé de te contredire, Tia, mais je dois tout oublier à présent. »

Elle se releva avant de déployer ses ailes et de s’envoler pour la forêt. Celestia redressa la tête, tournant son regard vers la lune, et remarqua la vacuité des cieux. Elle réalisa soudain quelque chose.

Aucune étoile ne parsemait le ciel ou ne venait compléter la douce lueur de la lune. Celestia écarquilla les yeux.

Est-ce que Luna avait refusé de lever les étoiles ?