Cela faisait déjà un bon quart-d'heure que la pièce était baignée par la clarté d'une lampe alimentée par un cristal, et cela ne semblait pas le moins du monde incommoder le poulain terrestre dormant blotti contre sa couette. Certes, la lumière n'était pas suffisamment puissante pour dissimuler totalement l'obscurité apparaissant au-delà de la fenêtre et de ses rideaux, mais l'hiver s'était déjà bien installé en Equestria et la durée des journées raccourcissait en conséquence. Or, il était quand même huit heures du matin, et dans une soixantaine de minutes, l'école débuterait.
Des bruits de sabots se firent entendre à proximité de la chambre, laissant place au silence, puis au soupir, tandis qu'une silhouette équine regardait d'un air un peu consterné l'enfant. Sa forme étant éclairée par le cristal, il était possible de distinguer précisément ses traits, ceux d'une jument cornue à la robe bleu marine arborant une longue crinière blonde platine pendant des deux côtés de sa tête légèrement marquée par l'âge. Ses flancs étaient ornés d'une cutie mark représentant un luth. Ses yeux opales dévisagèrent quelques instants le petit emmitouflé avant de se décider à entrer dans la pièce. Elle s'approcha de ce dernier avant d'employer sa magie pour retirer brusquement le drap tout en annonçant d'une voix forte, néanmoins empreinte d'amusement :
« On se lève, petit paresseux ! »
N'ayant désormais plus sa protection, le poulain était totalement exposé à la lumière, et l'on pouvait à présent discerner son corps légèrement jaune, sa crinière en bataille noire comme l'ébène, et sa cutie mark représentant une partition musicale. Seuls ses yeux vermillions demeuraient désespérément clos. Le poney en devenir se tourna par réflexe pour ne pas se sentir agressé par l'éclairage soudain. La jument secoua la tête, décidée à ne pas se laisser faire par un simple poulain. Elle secoua du sabot le petit en lui rappelant qu'il avait cours aujourd'hui.
Cette phrase finit par avoir le résultat escompté : le terrestre ouvrit lentement ses paupières, puis jeta un œil à l'empêcheuse de dormir en paix. Il répondit ensuite d'un ton encore un peu ensommeillé :
« B'jour, M'man. C'est bon, j'me lève.
-Dépêche-toi, Score, le temps passe, rappela sa mère. »
Sur ces paroles, elle s'en alla, laissant s'étirer son fils. Une fois sur ses sabots, Score afficha un regard vague sur la pièce dans laquelle il vivait. Elle contenait une armoire pour ses affaires, un bureau lui permettant de travailler et de s'adonner à sa passion : retranscrire sous forme de partitions les morceaux de musique instrumentale qu'il écoutait. S'il pouvait faire cela, ce n'était pas tant parce qu'il baignait depuis sa naissance dans le milieu musical à cause de sa famille, mais plutôt parce qu'il avait une faculté qui n'était pas si répandue que ça dans le pays : une oreille absolue dite active, la capacité d'identifier chaque note à l'écoute.
Dans l'espace restant de sa chambre on pouvait trouver un écran en cristal et à son pied, une petite machine grise dans laquelle on insérait des disques pour jouer. En fait, en dépit de ce que l'on pouvait penser en voyant la pile de boîtes en plastique et en entendant son nom, Score n'aimait pas beaucoup jouer. La vérité était qu'il aimait beaucoup écouter la musique de ces jeux, qu'il trouvait la plupart du temps bien composée et beaucoup plus agréable à écouter que ce qui était à la mode parmi les jeunes de son âge.
On pourrait lui dire dans ce cas : « pourquoi ne pas chercher les bandes-originales ? » Il aurait préféré, à vrai dire. Mais dans la ville, où il vivait, Hoofington, les disquaires ne les proposaient jamais en rayon, faute de demande, et de toute façon, la commande était impossible, puisque les rares exemplaires disponibles étaient réservés pour la capitale. Ne restait alors plus comme option de commander via le réseau magique, mais ses parents refusaient qu'il se livre à des achats en ligne pour l'instant, considérant qu'il fallait d'abord qu'il intègre bien la valeur des Bits dans sa tête.
Equestria avait beaucoup progressé du point de vue technologique au cours du siècle ayant suivi la résurgence de l'empire de cristal et le couronnement de la princesse de l'amitié, Twilight Sparkle. La plus importante de ces avancées étant l'utilisation de cristaux recueillis au niveau de l'empire, découverte ayant permis très rapidement à ce dernier de se réinsérer dans l'économie et la politique du pays, avec l'accueil des jeux équestriens moins d'un an après son retour. Ces cristaux avaient la propriété de pouvoir servir de vecteurs à la magie des licornes. Plus il y en avaient, plus il était possible de répandre la magie elle-même sur le territoire. A terme, Equestria a pu se doter d'un réseau magique couvrant toute sa superficie, capable de distribuer les informations aussi rapidement qu'un dragon était en mesure de transmettre les missives manuscrites grâce à son souffle. Ce système était maintenu par des cristaux plus massifs, disposés dans chaque ville, par des licornes. Cela constituait leur métier, et quand la fatigue commençait à poindre, elles étaient relayées par d'autres représentants de leur espèce. Cela fut la plus grosse révolution équine depuis l'invention de la machine à vapeur.
Quand Score reprit enfin ses esprits, il se dirigea vers la salle de bain pour faire sa toilette. L'eau chaude eut le don de le réveiller totalement, au point qu'il remarqua aussitôt l'heure qu'il était sur la pendule fixée au-dessus de l'armoire à glace tandis qu'il se brossait les dents et s'empressa de se diriger vers la salle à manger prendre son petit-déjeuner.
En arrivant dans la pièce qui ne différait pas vraiment de ses équivalents des siècles passés, le poulain jaune s'assied à table où siégeait déjà son père, un grand terrestre à la crinière blanche broussailleuse et à la robe brune, arborant une moustache et doté d'une cutie mark symbolisant son métier, celui de chef d'orchestre. Il regardait les informations disposées sur l'écran de cristal au fond de la salle. Le thème de cette matinée était le renforcement des frontières à l'est d'Equestria pour prévenir les incursions de changelins sur le territoire. En effet, si la reine Chrysalis, à l'origine d'un des plus grands bouleversements dans l'Histoire de la contrée, n'était plus, son peuple subsistait et restait menaçant.
Tandis que son paternel était absorbé dans le journal, le fils prenait son bol de chicorée accompagné de tartines beurrées qu'il s'efforçait de prendre aussi rapidement que possible sous le regard malicieux de sa mère qui semblait penser au fond d'elle même que ça lui apprendrait à traîner au lit. Quand il en eut terminé, il retourna dans ses quartiers pour récupérer sa sacoche de cours, ainsi que prendre des vêtements chauds : un imperméable écarlate avec un foulard en laine couleur cyan. Quand il eut enfilé cela, il tâtonna ses poches et se sentit rassuré en sentant la présence d'un objet dedans.
Il repassa devant la salle à manger et salua ses parents qui le lui rendirent, même si ce n'était qu'un léger hochement de tête dans le cas de son père. Avec un léger sourire sur le visage, Score sortit de l'appartement et descendit les escalier de l'immeuble dont la construction datait d'il y a un demi-siècle. Il saisit la poignée de la porte d'entrées, la tourna et se retrouva dehors.
Les rues d'Hoofington étaient submergées par la brume. Le regard du poulain n'y voyait pas au-delà de trois mètres. Le froid commençait à s'insinuer dans ses membres, aussi décida-t-il de se mettre en route une fois qu'il eut mis son foulard autour du cou et de sa bouche et qu'il eut récupéré ce qu'il avait dans la poche droite de son imper, à savoir son baladeur audio alimenté par un cristal miniature. Dedans, il avait mis quelques pistes qu'il avait extrait des jeux auxquels il jouait, non sans mal, pour son usage personnel.
Il enfila ses écouteurs après avoir allumé l'appareil, qu'il mit en mode aléatoire. Cela faisait un moment qu'il n'avait pas cherché à ajouter d'autres morceaux, aussi connaissait-il par cœur la cinquantaine de thèmes qui défilait dans l'engin. Ce dernier avait cette fois décrété de lui faire écouter « Hope Given/ Dance of the Dog's Howl », extrait d'un jeu qui ne s'était pas bien écoulé en son temps, sans aucun doute trop particulier pour plaire à tous. Il s'agissait plus précisément de la musique jouée lors des combats au départ, qu'il était possible de remplacer, ce qui constituait un élément important du système de jeu.
Ce fut donc au son mélangé du violon et du piano que Score s'élança énergétiquement sur le chemin le menant à son école. Le rythme des cordes lui donnait des forces, le réchauffant tandis qu'il marchait. Il n'y avait pas à dire, c'est ce genre de musiques qui le motivait. Pour beaucoup des jeunes de son âge, ce serait la dernière chanson pop du moment, lui non. Il considérait de son point de vue que la parole entravait les sonorités des instruments, provoquant un décalage malvenu selon lui. Ce n'est pas qu'il cherchait à se différencier des autres, loin de là, simplement, il n'arrivait pas à apprécier ce que tout le monde écoutait, qu'importe les efforts qu'il y investissait.
Sur la route, il croisa quelques autres élèves de son école, la plupart étant en groupe et discutant de ce qu'ils avaient fait la veille ou alors pour se plaindre du froid tout en grelottant. Score de son côté regardait droit devant lui et profitait de ce que lui daignait lui octroyer son baladeur. Quatre pistes eurent l'occasion de succéder à la première : « Primal Eyes », « Puella in Somnio », « Will » et « Lost my Pieces ». Ce dernier morceau était arrivé à la moitié quand il vit enfin se dessiner dans l'épais brouillard les contours de son école.
Cette dernière était de taille moyenne et privée. Ses parents l'avaient choisi pour la qualité de son enseignement, en particulier musical. C'était une tradition dans leur famille de bercer dans ce domaine et celle-ci pouvait se permettre de payer les frais d'inscription. Le père de Score travaillait en tant que chef d'orchestre à l'Opéra métropolitain d'Hoofington, tandis que sa mère était sous ses injonctions. Si sa cutie mark représentait un luth, elle avait également des affinités avec d'autres instruments à corde comme le violon.
Leur enfant franchit alors le portail en fer ouvert, précédé et suivi d'autres élèves. Il traversa la cour pavée et les jardins situés des deux côtés, recouvert de plusieurs bosquets dépérissant à cette période de l'année. Il monta l'escalier en pierre puis entra dans le bâtiment principal. Il se dirigea vers le premier étage où se situait sa salle de classe au fond du couloir de l'aile droite. Il entra dans la pièce.
Contrairement à ce que l'on aurait pu penser, le système éducatif n'avait pas vraiment bénéficié des avancées technologiques liées aux cristaux. Il s'agissait d'un désir de la princesse Twilight Sparkle, qui souhaitait maintenir un apprentissage proche de celui de son temps. Quand les poulains entraient à l'école, il y avait bien les deux premières années un cours centré sur l'emploi des cristaux, basé à la fois sur leur utilisation, mais également sur des avertissements au sujet de ses abus. Les leçons rentraient mieux chez les plus jeunes.
En conséquence, la salle de classe était identique à ses équivalents des siècles passés : un tableau noir, un bureau pour le professeur, cinq rangées de tables et de chaises pour les poulains et des casiers au fond où ranger les affaires. Pour l'instant, elle était vierge de toute présence. Score avait certes eu moins d'une heure pour se préparer, mais il avait été suffisamment rapide pour être le premier à arriver. Ça lui convenait parfaitement et il s'assied à sa place au fond de la salle, puis retira ses affaires : manteau et foulard sur la chaise, livres et cahiers non-nécessaires pour l'instant au casier.
Il posa sa tête contre le bois froid de sa table et regarda en silence la nuit s'éclaircir peu à peu, la brume commençant à s'évanouir. Score appréciait ces moments de calme, quand aucun de ses camarades n'étaient là. S'il trouvait parfois ce silence angoissant, il lui accordait également un moment de répit bienvenue avant le brouhaha des élèves. Cette sérénité matinale n'était troublée que de temps à autres par des poulains discutant dans le couloir. Le terrestre en profitait donc autant que possible, puisqu'il savait que dans cinq à dix minutes, les bruits submergeraient la salle.
La journée débuta par un cours d'Histoire. Ces derniers temps, le vieux professeur dégarni de sa crinière traitait le retour de l'empire de cristal, et la victoire du groupe de la princesse Twilight Sparkle et de Cadence sur le roi Sombra. Score aimait beaucoup étudier cela, mais malheureusement, le pégase à quelques années de la retraite ne savait pas vendre son cours et le poulain, ainsi que bon nombre de ses voisins, ne purent réprimer à plusieurs reprises des bâillements.
La matinée se conclut avec un cours de mathématiques, qui n'était pas du goût de Score. Ce genre de logique le laissait de marbre, hermétique. C'était sans conteste son plus gros point faible et celui lui plombait littéralement sa moyenne. Qu'il écoutait attentivement, qu'il s'efforçait de travailler chez lui, rien ne changeait. Aussi avait-il baissé les sabots et faisait mine d'écouter, l'esprit ailleurs.
La pause déjeuner finit par arriver. Deux heures entières dédiées pour manger et pour se détendre. Score se leva, imité par les autres, avant de sortir les uns après les autres pour partir au réfectoire. Personne ne s'occupait du poulain, conversant avec d'autres camarades. Quand il arriva à la cantine, cette dernière était déjà plongée dans le brouhaha le plus total. Le terrestre en avait mal au crâne au point qu'il eut du mal à choisir ses plats et aussi à se faire entendre de la serveuse ailée. Malgré tout, il finit par se trouver une table tranquille dans un coin pour savourer sa soupe de foin, son riz à la crème et sa compote de pommes.
Tandis qu'il entamait son repas, il réfléchissait à ce qu'il allait écouter ce midi avant de reprendre les cours. Pourtant, son attention fut très vite détournée par un groupe enthousiaste constitué de trois poulains et une pouliche, tous cornus, à sa gauche.
« Dis, Sweetheart, tu peux venir après les cours sur HO ? demanda l'un des garçons à la pouliche.
-Normalement, oui. Pourquoi ?
-On en parlait avant les cours, mais on voudrait explorer le parc de Nara.
-Paraît que le boss peut « dropper » (1) un katana empoisonné surpuissant ! Poursuivit l'un des autres poulains.
-Je sais pas trop... hésita-t-elle. Les donjons de l'archipel sont quand même vachement durs. Vous êtes sûrs qu'à quatre on pourra le faire ?
-On pourra facilement trouver d'autres joueurs, t'inquiète, rétorqua le dernier. Normalement, un groupe de dix bien « stuffé » (2) fera l'affaire.
-Ok, je viendrai quand j'aurai été faire les courses, fit-elle avec un sourire. »
HO. L'abréviation pour Humanity Online, le jeu le plus populaire parmi les jeunes poneys actuellement. Il s'agit d'un titre qui a bénéficié d'une autre avancée liée aux cristaux : la réalité virtuelle. A présent, on commercialisait des casques ayant plusieurs micro-cristaux dans lesquels étaient gravés un sortilège d'illusion malléable et connectés au réseau magique. Cela a permis aux développeurs de concevoir de nombreux mondes parallèles dans lesquels les joueurs pouvaient se retrouver. Cependant, cette initiative n'avait pas rencontré de succès au départ. En effet, les casques étaient hors de prix et surtout les jeux proposés n'étaient pas aguicheurs : des jeux se passant dans l'ancienne Equestria, d'autres se passant dans un lointain futur. On revenait toujours aux mêmes idées et elles ne plaisaient pas à tous. L'argument majeur de ces réalités virtuelles, c'était de pouvoir incarner un tout autre soi, de changer de vie. Tout ce que trouvait les développeurs, c'était de faire jouer d'autres types de poneys. Jusqu'à ce qu'arriva il y a deux ans avec ses gros sabots Humanity Online, qui a balayé la concurrence.
Le jeu est basé sur un épais roman datant d'il y a cinquante ans écrit par un certain Featherweight, qui exerçait à l'origine la profession de reporter-photographe. Il décrit un monde alternatif peuplé majoritairement par une espèce imaginaire, les humains. Dotés de deux jambes, de deux bras, de deux mains, ces êtres ne bénéficient pas de l'aide de la magie et se sont investis corps et âme dans la recherche technologique. Mais en l'an 1930 de leur calendrier, d'étranges créatures apparurent, sortant de déchirures dans le ciel. Elles détruisirent la civilisation de ce monde, et les humains durent s'adapter pour survivre, s'alliant et se trahissant au fil des années.
Cet ouvrage reçut un accueil mitigé de la part du public. Si certains avaient salué l'originalité et la cohérence de ce monde, beaucoup trouvaient le récit beaucoup trop sombre, tranchant avec le reste de la littérature équestrienne. Featherweight avait défendu son œuvre, considérant qu'il voulait montrer à quoi pouvait conduire le manque de confiance entre les personnes de façon à resserrer les liens dans la société d'Equestria. Toujours était-il que Humanity était peu à peu tombé dans l'oubli. Mais le studio Moon Circle l'avait fait renaître de ses cendres sous la forme d'un jeu de rôle virtuel massivement multijoueur. Et ce fut un succès immédiat, au point qu'une nouvelle édition du texte d'origine avait également vu le jour.
Les joueurs aimaient le dépaysement offert par cet univers : incarner un membre d'une autre race dans un monde en ruine décoloré, exact opposé de leur Equestria chatoyant. Dans HO, ils pouvaient laisser libre cours à un tempérament destructeur qui était proscrit dans la réalité. Et le mot d'ordre d'Humanity Online était : « ce qu'il se passe dans ce monde reste là-bas ». Quel meilleur slogan afin d'attirer des poneys en manque d'évasion ?
Score n'avait pas le jeu. Il ne l'intéressait pas vraiment, tout comme les autres titres du catalogue « réalité virtuelle ». Il n'avait pas envie de jouer avec d'autres personnes, puisque de toute manière, c'était seulement la bande-son qui motivait ses achats. Il notait néanmoins l'atmosphère joyeuse qui régnait à côté et ne put s'empêcher d'éprouver une pointe de jalousie en les voyant si bien ensemble.
Il acheva son repas, laissant le groupe planifier les détails de leur expédition virtuelle, rangea dans le coin approprié son plat, puis s'en alla. C'était l'un des premiers à quitter la salle. Il partit en direction de la salle de musique, située au rez-de-chaussée dans l'aile gauche. Score n'avait pas d'amis dans cet établissement. La vérité était qu'il ne savait pas comment approcher les autres. Il était d'avis que le premier contact idéal était de dénicher une attirance commune, une passion le rapprochant d'autrui. Mais au cours de ses quatorze années d'existence, il avait compris que quasiment personne, si ce n'est même aucune, ne partageait son amour pour la musique instrumentale et de la bande-originale. Il ne se définissait lui-même que par rapport à ça, et s'il essayait de trouver autre chose en lui, il avait sentiment qu'un vide infini lui faisait face. Aussi se laissait-il submerger par la musique.
Score pénétra dans la salle, vide à cette heure de la journée. Un piano était disposé près du bureau des professeurs et au fond de la pièce se trouvait des étagères où étaient classifiés de nombreux disques allant de l'opéra jusqu'à de la techno. Le poulain commença à chercher dans la section « musique classique » et finit par en extirper un morceau de Frederic Horsechopin, l'ouverture 28 n°15 : « La goutte d'eau ».
Il inséra le disque dans le lecteur sur le bureau, régla le volume de telle manière à ce que seul lui l'entende, puis alla se posa devant le piano, rabaissant son couvercle, avant de prendre dans sa sacoche des feuilles de partitions, une plume et un encrier. Lorsque l'ouverture débuta, il commença à restituer les notes sur la partition. Il s'agissait là de son occupation habituelle. Il aurait bien préféré interpréter la musique de Horsechopin sur le piano, mais il n'était pas suffisamment habile pour en jouer.
Quid de la composition alors ? Il n'avait aucune inspiration en la matière, contrairement à ce que laissait penser sa cutie mark. Il l'avait eu très tôt, à l'âge de cinq ans, lorsqu'il eut retranscrit sa première partition. Galvanisé par cet exploit, il s'était essayé à la composition, mais aucun de ses morceaux n'étaient de qualité. Depuis plusieurs années, il en était venu à penser qu'il était juste bon à faire les partitions de musique existant déjà. Et cela le pesait, il commençait à croire qu'il était la honte de la famille, quand bien même personne ne le lui avait reproché.
Les premières notes eurent l'effet immédiat de le détendre. Il avançait paisiblement sa partition, un léger sourire aux lèvres. Mais quand retentit la suite, beaucoup plus grave, il s'immobilisa, l'encre de sa plume laissant une bavure sur la partition. Ce passage de l'ouverture avait enlevé d'un seul coup sa tranquillité et il eut le sentiment d'être confronté au vide de son être.
La piste se poursuivit inlassablement, jusqu'à sa conclusion et Score n'avait pas esquissé un mouvement. Cette goutte d'eau l'avait frappé en plein cœur, comme une révélation : s'il persistait dans cette voie, il n'arriverait à rien et il ne ferait que s'autodétruire. Cette vérité assimilée, il se demanda comment changer, où était l'erreur qu'il avait commise jusqu'à présent. Il comprit peu de temps après : il avait cherché des poulains et pouliches partageant ses centres d'intérêts, mais il n'avait jamais tenté de se pencher sur ce que les autres aimaient.
Il se demanda ensuite quel était le moyen le plus sûr et rapide de trouver une passion partagée par de nombreuses personnes. L'image du groupe dans le réfectoire s'imposa dans son esprit. A cet instant, il rompit enfin le silence laissé depuis la fin de la musique :
« Je devrais peut-être essayer de jouer à Humanity Online. »
Sur ces paroles, il rangea ses affaires dans la sacoche et en sortit son porte-feuille. Il compta attentivement ses sous en songeant qu'il devrait y avoir le compte pour le jeu et le casque, vu le temps passé sans rien dépenser. Quand il eut terminé cela, il hocha avec gravité la tête. Après les cours, il passerait à la boutique de jeux du quartier et s'achèterait ce jeu au bord de toutes les lèvres de la jeunesse.
Ne voyant plus rien à faire dans la salle de musique, Score s'en alla et retourna dans la salle de classe. Il attendit avec une certaine impatience, qu'il n'avait pas ressenti depuis longtemps, le début des cours de l'après-midi. Quand ces derniers reprirent, le poulain avait la tête dans les nuages. Il ne prenait quasiment pas de notes dans ses cahiers. Il imaginait déjà trouver la solution à ses problèmes dans le tant renommé HO. Sa jambe arrière droite tremblait de façon frénétique, trahissant son impatience. Comme s'il prenait un malin plaisir à le tourmenter, le temps paraissait s'écouler lentement. Pourtant, le cours de sciences était intéressant, mais le fil des pensées du terrestre convergeait en un seul point : que l'école se termine.
Il commençait à envisager la possibilité que jamais cela ne prenne fin, qu'il était piégé dans une boucle infinie. Mais finalement la cloche retentit. Il mit un certain temps à assimiler le son, tant et si bien que contrairement à ce que l'on aurait pu croire, il ne fut pas le premier à sortir, loin de là. Lorsqu'il reprit le contrôle de son corps, une bonne moité de ses camarades avaient déjà quitté les lieux. Il se retourna pour récupérer ses affaires dans le casier, enfila ensuite son imper, son foulard et sa sacoche, avant de s'en aller à son tour. Sa démarche était un peu étrange : son corps avait l'air de souhaiter qu'il galope jusqu'à la boutique, mais son esprit désirait qu'il se comporte comme il le ferait normalement. En résultat une marche qui paraissait totalement mécanique, à l'opposé de ce qu'il souhaitait au départ.
Score laissa derrière lui jusqu'au lendemain son établissement et était tellement absorbé dans ce qu'il s'apprêtait à faire qu'il n'avait même pas songer à se mettre de la musique. Pour se rendre en direction du magasin de jeux vidéos du quartier, il lui fallait prendre un autre itinéraire. Le brouillard du début de la journée s'était complètement évaporé, au profit de rayons de soleil perçant à travers les nuages. Cela lui prit une bonne dizaines de minutes pour atteindre la boutique.
Celle-ci, nommée « Tous vos jeux » était petite, en raison de sa proximité avec le centre-ville. L'enseigne était colorée d'un bleu métallique aux accents futuristes. Score poussa doucement la porte en verre et vit les rayons remplis de jeux de tous côtés et au centre. On était encore en semaine, aussi il n'y avait pas grand monde, juste un couple paraissant avoir la vingtaine qui fouillait du côté des occasions et le vendeur, une licorne à la robe brune devant avoir une trentaine d'années à la barbe rousse opulente, comme sa crinière qui couvrait tout son cou. De là où était le poulain, il ne pouvait discerner la cutie mark en forme de disque du gérant.
Score s'avança et rendit son salut au vendeur qui venait de l'accueillir. Il regarda partout, à la recherche du rayon des jeux en réalité virtuelle. Celui-ci se trouvait au centre de la boutique. Le petit terrestre jaune fouilla du sabot, examinant chacune des tranches. Il tomba assez vite sur Humanity Online, la boutique disposant d'encore de près d'une dizaine d'exemplaires. Il n'y avait rien de surprenant à cela : en dépit de sa grande popularité, cela faisait presque deux ans que le titre de Moon Circle était disponible à la vente. On trouvait par conséquent beaucoup plus facilement le jeu à l'époque.
Quant au casque, Score n'eut pas à chercher bien loin, il était juste en dessous avec ses congénères. Il n'en existait qu'un seul type, ressemblant aux casques de la garde royale, de couleur grise et percé d'un trou assez large à son sommet pour faire passer la corne pour les utilisateurs de magie. S'il n'y avait qu'une taille, c'était parce que la matière le composant était flexible, comme s'en aperçut le poulain en le prenant entre ses sabots. Il pouvait donc s'adapter sans problèmes aux différentes morphologies du crâne.
Le poulain de quatorze ans, alla payer ses achats. Il lui restait encore après cela un peu de Bits, preuve que cela faisait un moment qu'il économisait sans réelle raison. Le vendeur le remercia et au moment où Score s'apprêtait à lui sortir, il lui annonça :
« Vu que tu seras débutant à HO, il y a des sessions d'entraînements réalisées par des anciens au niveau de la ville de départ, tous les jours vers 18 heures. Tu risques d'en avoir besoin, le jeu est devenu assez impitoyable ces derniers mois.
-Euh... merci du conseil, fit-il, un brin déconcerté. »
En retournant dans les rues d'Hoofington, plus chargé que précédemment, Score déglutit, se demandant s'il avait bien fait au final. Il souhaitait jouer pour voir s'il pouvait dépasser ses problèmes du monde réel. Et si HO était pire que ce dernier ? Ce fut cette question qui le travailla sur le chemin du retour. Mais il avait également conscience que ce n'était qu'en essayant le jeu qu'il connaîtrait la réponse.
De retour chez lui, le terrestre constata que ses parents n'étaient pas encore rentrés de leur travail. Rien d'étonnant à cela, ils préparaient un opéra depuis plus d'un mois et la date de la représentation approchait. Score entra dans la cuisine et posa le casque sur la table, ainsi que le boîtier de HO. Il se prépara une tasse de thé à la menthe et deux tartines de confiture, puis s'assied et commença à lire la notice tout en prenant son goûter. La lecture de cette dernière ne fut pas très intéressante, vu qu'elle ne faisait que détailler la façon dont l'on branchait le casque pour ensuite se connecter au réseau. Auparavant, les manuels d'instructions détaillaient beaucoup de de chose sur l'univers, les personnages ainsi que la façon dont le jeu se déroulait. Aussi, la notice ne tint pas longtemps face au regard vermillion de Score, au point qu'il n'avait pas encore avalé le contenu de sa tasse. Faute de mieux, il fixa le casque d'un air songeur tout en buvant gorgée par gorgée son thé.
Lorsqu'il en eut fini, il nettoya sa tasse, récupéra ses affaires avant d'entrer dans sa chambre. Il rangea ses vêtements, posa sa sacoche sur le bureau, le casque sur son lit... puis il alluma sa console et son écran en cristal. Il prit entre ses sabots sa manette et fouina dans les paramètres de la machine jusqu'à atteindre l'option « périphérique ». Dedans, il relia son casque tout neuf à la console, puis il ouvrit son couvercle et inséra la galette de HO avant de refermer le capot. Satisfait en voyant que le jeu était reconnu, Score s'allongea sur le lit, enfila le casque, puis regarda le plafond tout en respirant un bon coup, puis d'une voix mal-assurée, il bredouilla :
« Co...connexion ! »
Le dernier son qu'il entendit fut la jolie mélodie signalant le lancement du jeu. Un signal émis par le casque ferma ses paupières et les maintint de la sorte. Puis pendant plus d'une quinzaine de secondes, plus rien, le noir absolu. Score pouvait encore penser, et il se demandait si cela était normal, il espérait que le jeu n'avait pas de bug. Puis soudainement, une voix féminine et éthérée résonna dans son crâne :
« Bienvenue dans Humanity Online !»
Immédiatement après cette phrase, le noir s'effaça pour laisser place à un ciel étoilé, du moins c'est ce que pensait Score. En effet, au centre de son champ de vision apparu une gigantesque forme sphérique coloré de vert, de gris de bleu recouvert de nuage. Elle lui semblait de toute beauté et la voix sibylline poursuivit :
« Voici la Terre. Une planète peuplée de nombreuses espèces animales, vivant au sol, dans les airs et dans l'eau. L'une d'entre elle se nomme humain. Au cours de ses millénaires d'existence, ses différents peuples se sont développés sur toute la superficie de ce monde, au point d'élaborer de nombreuses sociétés, coutumes et technologiques. »
Score se sentit alors pousser en direction de la Terre par un brusque effet d'accélération. Il se mit à hurler de peur tant cela fut soudain. Il fut immobilisé à nouveau et découvrit un nouveau paysage, celui de ce qu'il considérait comme étant une grande métropole humaine, aux nombreux immeubles s'approchant autant que possible du ciel. Au sol, les rues grouillaient de vie. Il fut émerveillé devant cette cité et ses habitants menant leur vie comme si de rien n'était. Cependant, quand son regard s'attarda à nouveau au-dessus de lui, la couleur bleue des cieux avait laissé place à une teinte écarlate :
« Mais en 1930, tout cela pris fin. Des démons et créatures jamais découvertes auparavant sortirent de nulle part. Belliqueuses, elles ravagèrent cette planète, avant de disparaître comme elles étaient venus. La surprise de cet assaut n'avait laissé que peu de survivants. Ces derniers décidèrent de reprendre malgré tout leur vie dans leur univers en ruine, mais les monstres reviennent parfois, en plus petit nombre, mais toujours aussi violents. »
Tandis qu'elle expliquait, le nouveau joueur regardait avec terreur les tragiques événements se jouer sous ses yeux. Au départ, il ne voyait que des formes indistinctes ravager la ville, et puis de façon précise, d'immenses créatures comparables aux dragons vivant en Equestria. Il s'aperçut alors qu'il chutait à vive allure, et petit à petit, il discernait de mieux en mieux les monstres décharnés détruisant méticuleusement les immeubles et tuant les habitants. Cette introduction le bluffait et le paniquait au point qu'il était prêt à crier « déconnexion ». Mais finalement, alors que le sol d'une route s'approchait de lui, l'obscurité reprit place et la voix posa cette question à son attention :
« Qui serez-vous dans ce monde ? »
Score ne sentit plus son corps bouger et contempla les ténèbres. Il avait la sinistre impression d'observer en face de lui le vide qu'il ressentait au fond de lui. Mais cette fois, il fut secouru par la narratrice de cette introduction :
« Veuillez choisir un pseudonyme pour votre avatar »
C'est vrai, dans les jeux en réalité virtuelle, il ne fallait pas utiliser son nom équestrien. Même s'il ne s'intéressait pas à cette pratique au début, Score s'était un peu renseigné sur le sujet. Le souci, c'est qu'il n'avait pas d'idée de nom à employer. Il resta immobile dans le silence de mort qui s'était installé à la disparition de la voix et se mit à réfléchir profondément. Il aimait la musique. S'il avait changé d'avis sur la réalité virtuelle, c'était après avoir écouté « la goutte d'eau » d'Horsechopin. Il commençait à ressentir l'envie de lui rendre hommage, mais il pensa qu'il fallait mieux ne pas prendre ce nom. Tout du moins son intégralité. Sa décision fut prise :
« Chopin. »
A cet instant, des lettres blanches apparurent dans le vide, transcrivant son pseudonyme parfaitement. La reconnaissance vocale était au point visiblement. La voix retentit à nouveau :
« Est-ce bien cela ?
-Oui.
-Chopin, je vais désormais vous poser quelques questions pour établir votre avatar humain. Quel est votre sexe ?
-Masculin.
-Quel est votre passion ? »
Ce fut la première question qui perturba le désormais nommé Chopin. Il avait déjà essayé quelques jeux de rôle pour leur musique et avait déjà créé des personnages. Et jamais une question comme ça n'avait surgi dans ce genre de phases. Il se demanda alors s'il devait être honnête avec la voix ou s'il devait inventer quelque chose. Il hésita longtemps avant de donner sa réponse :
« La musique.
-Donnez maintenant quelques mots définissant le mieux votre personnalité. Notez que vous devez donner au moins deux défauts pour continuer la création de l'avatar. »
« Mais c'est quoi cette création de personnage ? » se demanda Chopin, qui avait le sentiment effrayant d'être passé au crible. Le même dilemme se présenta à lui : être franc ou mentir ? Vu qu'il avait été honnête au départ, autant qu'il reste sur sa lancée. Il chercha soigneusement les termes adéquats à offrir en pâture à l'intelligence artificielle :
« Intelligent, honnête, calme, solitaire, timide, maladroit.
-Très bien. Votre avatar est finalisé. »
Chopin fut surpris d'apprendre que c'était déjà terminé. Il se sentit alors partir, tout du moins, le système le forçait à éprouver cela. Quelques instants plus tard, il put ouvrir à nouveau les yeux et la première chose que distingua son regard fut le ciel grisâtre. Lorsqu'il fut capable de davantage d'attention, il remarqua en haut à gauche de son champ de vision deux jauges, l'une verte et l'autre rouge, et en dessous d'elle ce qu'il devina être un schéma du corps humain. La voix fit son retour :
« Essayez de bouger votre corps »
Chopin obéit et essaya de bouger ses membres avant. Ce fut le droit qui répondit en premier et il l'approcha de son visage et le découvrit beaucoup plus long que celui de son apparence originelle, mais surtout, son sabot s'était vu remplacé par une extension : la fameuse main. D'après ce qu'il savait, il était possible de bouger indépendamment des autres les cinq extrémités nommées doigts, mais quand il tenta la chose, il n'arrivait qu'à refermer sa main et la rouvrir. Cela lui viendrait certainement avec le temps. Il entendit ensuite :
« Bien. Levez-vous à présent. »
Cette fois, il fit appel à ses jambes. Ce fut déjà plus dur pour lui, mais après quelques essais il se trouvait sur ses pieds, bien que titubant. C'était vraiment différent pour lui de la démarche équine, au point qu'il ne tint que quelques secondes avant de se retrouver à quatre pattes. Il regarda ce sur quoi il se tenait et se rendit compte que le sol était constitué d'un métal verdâtre. Il sentit sur lui le souffle glacial du vent. C'est en entendant cela qu'il s'aperçut qu'il n'y avait pas de musique dans ce jeu. Il n'eut pas le temps de s’appesantir sur cette déception puisque la voix reprit ses explications de son ton monocorde :
« Vous vous trouvez actuellement au sommet d'un des vestiges les plus mémorables de l'humanité : la statue de la liberté. Il s'agissait d'un monument, cadeau d'un autre pays, souhaitant la bienvenue aux nouveaux arrivants du territoire s'étendant sous vos yeux, les États-Unis. Votre premier objectif consistera à en descendre et rejoindre la ville que vous voyez, New York. Il y a un creux à votre droite, glissez-vous dedans. »
Chopin tourna la tête à l'endroit indiqué et vit le trou. Il se releva sur ses jambes et en approcha laborieusement en les bougeant à tour de rôle. Il jeta un regard et vit sol à environ deux mètres plus bas. Il se laissa glisser et employa ses mains pour saisir le rebord. Il vit à cet instant la jauge rouge commencer à décroître, puis il enleva ses mains avant d’atterrir abruptement sur le dos. L'intelligence artificielle continua alors le didacticiel :
« Dans Humanity Online, il n'y a pas de niveau global. Seuls vos compétences et statistiques peuvent augmenter. La jauge verte constitue votre santé, la rouge votre endurance. Cette dernière diminue selon l'effort fourni, et peut être également affecté par la faim ou le recul des armes à feu. Le schéma du corps humain de son côté permet de voir les membres affectés. Il va s'illuminer en rouge pour vous montrer ses points faibles, regardez attentivement. »
Le joueur débutant observa attentivement celui-ci et vit rougir successivement la tête, le cou, le cœur et ce qui semblait être pour lui les poumons. Il comprit qu'il serait très difficile de les protéger. La voix ordonna par la suite :
« Pour faire apparaître le menu, posez la main gauche sur votre cœur. »
Le nouveau venu intima à l'injonction et vit apparaître devant lui le menu comprenant les options de jeu, telles que l'inventaire, vide pour l'instant. On lui demanda alors de se servir de sa main droite pour naviguer parmi les possibilités. Il fit un tour complet de ses compétences et réalisa que celles consacrées à la musique étaient plus hautes que les autres. Néanmoins, elles avaient un malus et il ne lui fallut que quelques secondes pour s'apercevoir que c'était parce qu'il avait dit qu'il était maladroit au cours des questions. En dehors de ça, il vit que les compétences liées à l'intelligence telles que la lecture, les stratégies ou l'artisanat étaient plutôt bonne, contrairement à ses interactions sociales qui étaient au même point que tout ce qui touchait au maniement des armes.
« Vos compétences augmenteront au fur et à mesure que vous en servirez. Pour votre santé, il vous faudra prendre des risques. Plus vous endurerez de coups, plus elle sera élevée. A présent, récupérez le sac dans la pièce avant d'inspecter son contenu. »
Il regarda tout autour de lui avant de remarquer l'objet au fond de la salle délabré. Il s'approcha de lui, toujours maladroitement, mais au moment de s'en saisir, son attention fut absorbé par un miroir brisé à sa gauche. Ce fut pour lui le premier contact direct avec l'avatar qu'il incarnait. Il était assez grand, en tout cas, il faisait plus du double de son équivalent poney. Il était fin, avait la peau blanche, n'avait pas l'air d'avoir beaucoup de muscles dans les bras, portait un haut blanc à manches courtes partiellement déchiré, une montre attachée à son bras droit, un pantalon poussiéreux de couleur noire et des chaussures brunes. En ce qui concernait son visage, il arborait d'épais cheveux auburn lui tombant jusqu'au cou, sa bouche était entourée par une moustache se terminant par un bouc. Quant à la couleur de ses yeux, passée la surprise qu'ils étaient chaussés de lunettes (il n'y avait absolument pas fait attention), il nota leur couleur verte.
Il s'examina dans la glace fissurée tout une bonne minute avant d'ouvrir finalement le sac. A l'intérieur, il y trouva une fine dague en fer, deux sandwichs au fromage, une bouteille d'eau, des bandages ainsi qu'un objet lui étant inconnu. Il s'agissait d'une forme en métal allongée, avec une crosse, avec une forme en virgule à l'intérieur et un rondin, lui aussi un métal. Quand il le toucha, il vit une fenêtre apparaître indiquant que c'était une arme à feu nommé « revolver », contenant six balles dans son barillet. Chopin pensa que ce barillet était le rondin. Un autre message apparut ensuite à la suite de la présentation : « Pour l'utiliser, tenez la crosse. L'un de vos doigts doit être sur la gâchette. Appuyez dessus, puis sur l'extrémité au fond avec votre pouce pour insérer une nouvelle balle. »
Le joueur reposa l'arme, un peu décontenancé, vu qu'il n'arrivait toujours pas à bouger distinctement ces doigts, avant de mettre le sac sur son dos et en accrochant l'unique lanière sur son épaule gauche.
« Votre sac à une place limitée. Plus vous portez d'objets, plus il sera lourd. Vous pouvez vous équiper d'une arme de contact et d'une arme à feu en même temps, mais il existe d'autres possibilités. A vous de les trouver. Sachez aussi qu'il est possible de vous séparer de votre sac pour gagner en mobilité, mais prenez soin à le cacher. Un monstre pourrait le déchirer ou un joueur le voler. Au sujet des objets, la nourriture et l'eau serviront à rétablir votre endurance lorsque vous serez fatigué. Si vous ne le faites pas, la jauge sera réduite de moitié. Les bandages vous seront utiles pour empêcher les saignements. Quant à votre revolver, c'est votre arme la plus puissante, mais vous n'avez que six balles, et les munitions sont rares. Ne les gaspillez pas. »
L'explication achevée, Chopin rouvrit son sac et récupéra le revolver, qu'il mit dans sa poche droite et garda la dague dans la main droite. Il marcha péniblement en direction de l'escalier quand la voix se fit à nouveau attendre de façon plus inattendue :
« Une des créatures issues des déchirures se terre quelque part dans la statue. Éliminez-la ou vous ne pourrez pas atteindre la terre. »
Il tressaillit en entendant cela, tombant presque à la renverse. Mais il fallait bien se douter que le didacticiel allait le confronter à l'un de ces fameux monstres. Il reprit son calme et commença à descendre les nombreuses marches de la statue, tout en s'interrogeant avec appréhension sur la nature de l'abomination à laquelle il devrait faire face. Il s'arrêta à de nombreuses reprises afin de s'assurer qu'il était bel et bien seul. Comme il n'entendait aucun bruit suspect, il poursuivait son avancée. Il commençait à penser que son premier adversaire l'attendait au rez-de-chaussée du monument. Il estimait le temps qui lui restait à parcourir en regardant à travers les parties détruites de l'édifice. Plus il voyait la terre au large de l'île se rapprocher, plus il se savait proche du pied. Au fil de la descente, il apprenait à maîtriser son corps bipède. Tout se passait pour le moment bien. Enfin, jusqu'à ce qu'à quelques mètres de l'entrée de la statue de la liberté, il sentit qu'on le frappait dans le dos et fut propulsé en avant.
Chopin atterrit en bas de l'escalier, roulant sur le sol dur. Lorsqu'il fut immobile, son regard était tourné vers l'extérieur. Un bref coup d’œil à sa jauge de santé entamée d'un bon quart lui fit réaliser qu'il avait subi une blessure. L'ennemi s'était posté derrière lui. Comme il avait bien regardé au cours de sa descente, il en avait conclu qu'il s'était posté au plafond. Néanmoins, il lui fallait réagir et vite. Une chance pour lui, il avait maintenu son étreinte sur sa dague. Il roula encore un peu sur le côté, espérant par là allonger la distance qui le séparait de la créature inconnue. Ce ne fut qu'après qu'il se redressa et aperçut le monstre qui avait profité de son inattention.
Celui-ci était encore sur les marches et poussait des hurlement stridents en tapant sur son torse, avant de s'élancer sur ses quatre pattes. Chopin trouvait qu'il ressemblait à un singe tel qu'il en avait déjà vu dans ses cours se penchant sur les autres territoires de son monde d'origine. Mais celui-ci n'avait pas de fourrure, il ne pouvait voir que ses muscles rouges vifs. Lorsqu'une fenêtre d'information apparut, il put constater qu'il ne s'était pas trompé. L'horrible simien était nommé « babouin écorché ». Puisque Chopin débutait, il ne put avoir aucune autre information sur son adversaire.
Ce dernier exécutait de grands bonds dans la pièce, à une vitesse considérable qui faisait que le joueur avait du mal à le suivre. Une erreur importante puisque le babouin sans fourrure se jeta sur lui, la gueule grande ouverte. Si Chopin, par réflexe défensif, présenta son bras gauche au monstre, il en laissa échapper sa dague dans la confusion. Le babouin décharné mordit profondément le bras qu'on lui avait offert. Heureusement, dans HO, la sensation de douleur était supprimé. Cela permit à Chopin de rester concentré sur le combat, même s'il commençait à stresser en voyant sa jauge entrer dans le jaune. De plus l'animal commençait à se servir de ses griffes pour lui lacérer le bras.
Il fallait qu'il réagisse, et vu le poids de la bestiole, il aurait du mal à reprendre sa dague. Sa seule issue était le revolver, quand bien même la voix lui avait déconseillé l'usage. Puisque sa main droite était libre, il récupéra l'arme dans sa poche et se concentra de toutes ses forces sur la façon adéquate de la tenir dans sa main. Son bras tremblait énormément, mais il finit par réussir à empoigner l'arme. Ne restait plus qu'à viser. Mais son bras gauche et la tête du babouin obstruait quelque peu son champ de vision. Toutefois, vu la proximité de la créature, il n'avait pas besoin de viser. Un seul tir devrait suffire à lui faire lâcher prise. Il ferma les yeux, croyant dur comme fer que c'était quitte et double, avant que son index ne presse la détente. Un son percutant résonna dans la pièce dévastée.
Sentant la force du babouin diminuer, Chopin rouvrit ses yeux et vit la créature éloignée de plus d'un mètre de lui. Avant même qu'il ne remarqua l'orifice qu'il avait infligé au monstre dans le lobe frontal, il vit inscrit dans la fenêtre d'information du babouin les mots « coup critique ». Puis son corps inerte fondit dans le sol dans une substance écarlate évoquant les déchirures de l'introduction.
Le joueur reprit son souffle et vit dans son interface apparaître les textes suivants : résistance augmentée, maîtrise des armes de poing augmentée. Il resta immobile un moment, puis alla récupérer sa dague plus loin, tout en rangeant le revolver. Pendant ce temps, la voix apparut à nouveau :
“Félicitations ! Ce premier combat était difficile, n'est-ce pas ? Il vous faut savoir que les monstres des déchirures seront toujours plus forts physiquement que les humains. Pour les vaincre en privilégiant la moindre prise de risque, il vous faudra user de votre tête ou agir en groupe. Souvenez-vous en bien. Si vous avez été blessé au cours de ce combat, il est recommandé de vous servir de votre bandage. »
Vu comment sa jauge avait été bien vidé par le babouin écorché, Chopin récupéra immédiatement le bandage. Cependant, il comprit qu'il ne pourrait en mettre qu'à son bras gauche. Pour sa blessure au dos, il lui faudrait de l'aide. Néanmoins, il enlaça son membre dans le tissu et le serra avec force. Le didacticiel reprit son cours :
“En arrêtant le saignement, votre vie remontera progressivement tandis que la blessure cicatrisera. Dans votre cas spécifique, votre régénération aura un taux de 50%, puisque votre griffure dans le dos n'a pas été soigné. Un bateau à vapeur cherchant d'éventuels survivants vous attend. Partez à sa rencontre. »
Comme d'habitude, Chopin obéit à la voix désincarnée et sortit de la statue. Désormais, il n'avait plus le moindre problème à déplacer son avatar. Il pouvait enfin profiter des paysages extérieurs. Il avait certes pu voir la beauté macabre des décors quand il est apparu au sommet de la statue, mais c'était autre chose de les voir depuis le sol. Il sentit à nouveau la brise du vent souffler derrière lui tandis qu'il faisait ses premiers pas en extérieur. Il parcourut plusieurs centaines de mètres avant d'arriver au niveau du bateau à aubes. Plus il en approchait, plus il discernait les détails rouillés sur sa coque. Un ponton de bois était affrété pour monter dedans, et devant lui se tenait un homme assez âgé, à la longue barbe blanche, fumant la pipe et vêtu d'un polo rayé, d'un pantalon bleu marine et de bottes en caoutchouc noir. C'était clairement selon lui un stéréotype de marin, et ce ne fut pas la voix qui lui donna tort :
« Voici un personnage non-joueur. Son rôle est d'emmener les débutants en survie comme vous dans le véritable monde de Humanity Online. Demandez-lui de monter à bord. »
Chopin avança près de l'homme et fit ce que lui avait intimé la voix immatérielle. Un sourire pré-programmé apparut sur le visage du marin qui le pria de monter à bord du navire. Le joueur monta sur le pont briqué, suivi par le PNJ (3) qui retira la planche en bois avant d'aller dans sa cabine. Une minute plus tard, le bateau quitta la zone de tutoriel nommée Liberty Island, faisant route vers la métropole de New York. Chopin resta sur le pont et fit abstraction du bruit de la vapeur, contemplant l'édifice où il avait débuté son aventure. La statue de la liberté n'était sans doute plus désormais que l'ombre d'elle-même, pensa-t-il, il n'avait même pas remarqué que cette dame emmitouflée dans une toge portait une couronne. Ce fut à cet instant là qu'il réalisa qu'il s'était vraiment immergé dans un autre monde, et si celui-ci l'effrayait quelque peu, il lui paraissait également enthousiasmant. Mais il fut interrompu dans ses pensées par la voix, alors même qu'il pensait en avoir terminé avec l'entraînement :
« Si vous ne pouvez pas diriger spécifiquement ce navire, vous pourrez par la suite conduire d'autres véhicules, tant que vous avez les connaissances, la maîtrise et surtout l'essence. »
« Toujours bon à prendre, se dit Chopin. »
Il fallut un moment pour que le navire n'approche des côtes de New-York. Quand il accosta, le capitaine remit le ponton avant de confier une carte de la ville au nouvel arrivant en lui expliquant qu'ils se trouvaient actuellement dans le quartier de Brooklyn. Chopin déplia la carte et mit quelques temps avant de repérer les lieux. Il remercia le marin, même en sachant que cela ne servait à rien vu sa condition, mais il fut un peu étonné quand celui-ci lui souhaita bonne chance. Mine de rien, cela facilitait grandement son immersion.
Mais à peine eut-il posé les pieds à terre que la voix s'immisça encore, mais elle avait cette fois quelque chose de différent :
« Alerte événement! Un autre joueur a terminé ou va terminer le didacticiel. Il vous est possible de l'affronter au cours d'un combat joueur contre joueur ! Il n'y aura pas de conséquences néfastes à ce duel, vous serez libre d'avancer comme vous le souhaitez et serez récompensé si vous l'emporter. Tenterez-vous votre chance ? »
Chopin fut très surpris en entendant cette annonce. Cela faisait longtemps que HO était sorti, et cela lui paraissait peu probable de croiser un nouveau inscrit en même temps que lui. Toutefois, cela pourrait être intéressant selon lui, et l'appât du gain était très alléchant. Ainsi, ce fut sans regret qu'il prononça ces quelques mots :
« J'accepte.
-Très bien. L'autre joueur a accepté aussi. Le quartier de Brooklyn sera pour cette occasion séparée du restant du monde de Humanity Online. Le combat aura lieu dans toute cette zone et il est impossible de la quitter tant que le vainqueur n'aura pas été désigné. L'objectif de l'affrontement sera de tuer votre adversaire... mais aussi de localiser la récompense qui disparaîtra si elle n'a pas été découverte au terme du face à face. Il s'agit d'un sac comportant de la nourriture, de l'eau, deux barillets pour le revolver, et une carte des États-Unis dans son ensemble. Pendant tout le duel, le sac sera verrouillé, mais il sera possible de le transporter. Aussi, si vous restez immobile pendant trente secondes, votre position sera inscrite sur la carte. Dernière chose à savoir : vous avez cinq minutes avant que le combat commence. Profitez-en pour explorer les lieux et dénicher les meilleures cachettes. Bon courage ! »
Le débutant vit alors apparaître un compte à rebours de cinq minutes dans le coin supérieur droit de l'écran. Il n'y avait pas de temps à perdre, elles allaient vite s'égrener. Aussi, Chopin se mit à courir de toutes ses forces les bras tendus droits devant lui, le regard allant de la carte à l'environnement. Il fallait qu'il reconnaisse les lieux pour deux raisons : ne pas tourner en rond quand le sac apparaîtra, et pour connaître les lieux et ses spécificités.
Car oui, les deux joueurs auraient le même équipement, mais plusieurs facteurs entraient en jeu. Les réponses que son concurrent avaient donné en créant son perso. En effet, il était possible que son perso soit largement plus endurant et adroit que le sien. Ensuite, le résultat de son combat contre le monstre. Chopin s'en était difficilement sorti en gaspillant une balle alors que la dague aurait fait l'affaire et en se servant de son seul bandage. De plus, il n'avait pas encore totalement récupéré avec la griffure dans le dos.
Il n'eut pas le temps d'admirer les décors dévastés, les carcasses de voiture brûlées, les routes lézardées. Il réfléchissait à la meilleure stratégie possible pour éliminer en un seul assaut son adversaire, et sans utiliser de balle. D'une part, parce qu'elles étaient précieuses, et d'autre part, parce que son adresse était vraiment basse. Même en étant à la portée de l'arme, il risquait fortement de rater son coup tant son bras tremblait. Il ne lui restait que la dague. Ne restait plus qu'à savoir l'exploiter.
Une sonnerie retentit alors dans son crâne, les cinq minutes étaient écoulées. Sa jauge d'endurance était vide, et il se trouvait selon la carte dans la zone nommée « Red Hook ». Il ne bougea pas le temps que sa jauge rouge remonte, son attention fixée sur l'éventuelle apparition de point sur la carte. Une fois la barre pleine, il reprit sa course et commença à fouiller les rues délabrée qu'il avait franchi dans l'espoir d'y trouver le sac. Il courut de toutes ses forces, profitant d'une épave de voiture pour se dissimuler. Dix minutes passèrent ainsi et il en vint à la conclusion que « Red Hook » n'abritait pas le sac, ni le joueur. Il regardait très souvent la carte, et ne vit jamais le joueur adverse, mais remarqua que le marqueur de ce dernier apparaissait très souvent.
Résultat de ses observations : l'adversaire était physiquement plus fort que lui. La confrontation faciale ne servirait à rien et il perdrait presque obligatoirement. Seule la ruse permettrait une victoire sûre. Il continua de progresser avant de se retrouver dans une rue qu'il n'avait pas visité, « Prospect Heights ». Il avança accroupi, ce qui vidait également l'endurance, et juste avant de tourner au coin de la rue...
Le bruit d'une détonation, suivi d'un bris d'éclat de verre. L'autre joueur l'avait repéré, mais lui non. Le pire des scénarios envisageables. Enfin, presque : est-ce que l'autre avait récupéré le sac ? De plus, s'il était effectivement plus doué que lui en dextérité, pourquoi avait-il manqué son coup ? Chopin ne voyait qu'une explication : il essayait de lui faire peur, lui faire abandonner la recherche de la précieuse récompense. Et bien que le tir avait réussi son but, le joueur sauta par la fenêtre dans l'immeuble abandonné, avant de monter à son premier étage pour observer la rue.
Il s'adossa contre une fenêtre brisée et examina les alentours. Une silhouette plus grande que la sienne se faufilait dans l'immeuble, tenant quelque chose dans la main ressemblant à une arme à feu. Visiblement, il n'essayait pas que de lui faire peur. On dirait même qu'il souhaitait le coincer dans cet immeuble en particulier. Chopin rentra la tête avant de grimper à l'étage supérieur, se demandant ce que cela signifiait. Si on le tuait dès maintenant, sans que la récompense soit découverte, celle-ci disparaîtrait. Ce joueur l'avait bloqué intentionnellement dans l'immeuble et à vue d’œil, il ne portait qu'un sac. Ce fut cette constatation qui le poussa à monter d'étages en étages, y restant juste le temps d'en faire le tour.
Son adversaire avait trouvé le sac dans l'immeuble, mais l'avait délibérément laissé à la fois pour ne pas être ralenti, mais aussi pour l'appâter. Il existait une contre-attaque possible, mais cela allait dépendre d'un élément.
Lorsqu'il parvint à l'avant-dernier des dix étages, Chopin découvrit le sac posé en évidence, on n'avait même pas cherché à le dissimuler. Il eut un large sourire sur le visage quand il vit que son sac était identique au deuxième. Il prit alors le nouveau sac, ce qui l'alourdit, mais remplaça l'espace vide par son propre sac. Puis il partit se cacher dans un coin où la lumière n'apparaissait pas. Il essaya de couper le moindre bruit de son corps.
Il lui fallut patienter une bonne minute avant de voir surgir son concurrent. Ce dernier avançait tranquillement, comme pour économiser ses forces. Maintenant qu'il le voyait de plus près, Chopin notait qu'il était plus musclé que lui, arborait des tatouages proches de ceux des zèbres, que son crâne était dégarni et qu'il portait un bouc noir de jais. C'était maintenant qu'on allait voir si son plan allait marcher. Il fallait à tout prix que le joueur adverse aille d'abord en direction du sac.
Cependant, il jeta d'abord un rapide coup d’œil autour. Haussant les épaules, il se tourna vers le sac. C'était le signal qu'attendait Chopin. Il sortit de l'ombre, dague en main et avançait tout doucement en même temps que celui qu'il affrontait. Cet effort de dissimulation pompait également sur son endurance, même si cela était moins conséquent que la position accroupie. Le joueur se pencha sur le sac, et lorsqu'il s'aperçut qu'il pouvait l'ouvrir, c'était déjà trop tard.
Appuyant de toutes ses forces son bras gauche sur le cou du joueur, Chopin trancha sa gorge tout en déclarant : « Désolé, c'est le jeu. ». Lorsqu'il relâcha son étreinte, l'avatar disparut dans une gerbe de lumière et son interface fut remplie de quatre notes : Endurance augmentée, ruse augmentée, dissimulation augmentée, arme blanche à une main augmentée.
« Bravo pour votre victoire, l'accès au sac vous ait offert, vous pouvez mettre son contenu dans le vôtre. Le quartier de Brooklyn retourne dans le restant du monde. Vous pouvez dès à présent explorer le monde de Humanity Online. »
Chopin récupéra les objets en récompense, avant de se demander l'heure qu'il était. Il se rappela alors qu'il avait une montre sur son avatar. Sans doute l'horaire était calqué sur celui d'Equestria. Il n'avait pas tort : il était 18 heures dans le monde réel. Il réfléchit un moment avant de se dire :
« J'ai encore une petite heure devant moi. Je vais essayer de monter un peu quelques compétences. Il faut que je sois assez fort pour que d'autres joueurs s'intéressent à moi, ou l'inverse, qui sait ? »
Le dénommé Chopin, en l'espace d'un didacticiel, s'apercevait du caractère addictif de Humanity Online. Ce fut au cours de cette soirée qu'il entama une longue, très longue aventure...
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Beau travail et vivement la suite !
Okay une remarque sur la forme :
"...le poulain jaune s'asseya à table où siégeait déjà son père"
La narration essaie d'être soutenue et "grave", mais on parle d'un(e) gosse qui se lève, se lave la frimousse, mange ses céréales et va à l'école. Alors on arrête avec les "s'asseya", les "paternel" et les "siégeait", merci...
Et maintenant une remarque sur le fond :
"Score sortit de l'appartement et descendit les escaliers de l'immeuble..."
"Il enfila ses écouteurs après avoir allumé l'appareil..."
"Il se dirigea vers le premier étage où se situait sa salle de classe au fond du couloir de l'aile droite."
C'est quoi le rapport avec les poneys. Sérieux. C'est quoi l'intérêt de dire que c'est Equestria si on s'efforce de tout rendre le plus humain possible ? C'est quoi cette logique de-
J'ai souvent voulu écrire l'histoire d'humains jouant à "Equestria Online" et contrôlant les poneys, donc l'inverse, des poneys jouant à "Humanity Online" avec peu importe quel terrible secret derrière, j'étais partant.
Mais là la narration est lourde et les poneys sont même plus des poneys, j'ai pas du tout envie de me farcir encore des pages de ça.
Et oui c'est juste mon avis personnel, oui ça reste bien écrit et l'histoire est sans doute fantastique, mais là moi je décroche. Nope. Sans moi.
Score est un personnage bien amené et intéressant. Mais personnellement je m'attendais pas à ce qu'il tranche la gorge du joueur, même si ce n'est qu'un jeu. Je l'imaginais plus fragile pour tout dire. Enfin ce n'est que le premier chap donc wait and see.
Concernant le fameux MMO, l'idée de le faire dérouler chez nous est une excellent manière d'intégrer l'espèce humaine dans du MLP.
Et moi qui aime pas tellement les MMO, je peux voir que les éléments (interface, tout ça) sont très bien repris.
J'ai donc hâte de voir la suite et te souhaite bonne chance pour ce projet