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MAI - My Arcane Intelligence

Une fiction écrite par lnomsim.

Chapitre 2 - Follow Me Partie 3

Chapitre 2 - Follow Me. Partie 3


"Ce n'est pas votre ancienne chambre." M'explique Sapphire. "Nous n'avons aucune idée de ce qui vous attends une fois dehors. Dans le meilleur des cas, les princesses vous prendront sous leurs ailes, dans le pire, elle pourraient vous rechercher pour trahison." Comment peut-elle dire ça aussi calmement ? Je ne suis pas une traitresse, je n'ai aucune intention d'être traitée en tant que tel. "Si quelque chose venait à mal tourner pour vous, considérez cette pièce comme votre nouveau refuge."

"Je fais vraiment partie des Me, hein?" Je soupire.

"Jusqu'à ce que vous ayez effacé votre dette, à moins que vous ne vouliez rester avec nous après cela." Me répond-elle une trace d'espoir dans sa voix.

"Je vous serais plus reconnaissante si vous pouviez réactiver mon implant, je suis sérieuse quand je dis que je me sens vide sans lui." Je lui dis calmement.

"Ne vous inquiétez pas pour ça, la sensation de manque est normale au début. Vous finirez par vous y habituer. La plupart de nos nouveaux membres récupèrent assez rapidement."

"Ils s'y habituent car ils sont libérés de l'endoctrinement, ils ont plus à y gagner qu'à y perdre. Qu'est-ce que la connaissance à côté de la liberté ?" Dis-je sentant la colère revenir. "Mais je ne suis pas endoctrinée, je n'ai rien à gagner, cette sensation, c'est si mauvais, comme s'il me manquait une partie de mon âme, et je veux que vous me la rendiez. Maintenant !"

Elle prend un peu de recul l'air surprise, les oreilles plaquées sur la nuque. Je me rends compte que je suis haletante et que je viens juste de crier la fin de ma phrase. J'en ai encore les jambes qui tremblent, mais la fatigue et la douleur doivent y être pour autant que la colère.

"Désolé." Je m'excuse. "Mais c'est probablement la seule chose qui fait de moi quelqu'un de spécial, et je ne veux pas en être séparée, encore moins par vous. Vous pouvez comprendre ça ?"

Elle prend un ton compatissant alors que son regard semble me jauger. "Si nous désactivons les MAI, c'est principalement parce qu'ils sont responsables de l'endoctrinement, mais aussi à cause du partage d'expérience sur le Grand Réseau. Même si les chances sont faibles, nous ne voulons pas prendre le risque que des informations confidentielles soient partagées. Tous nos agents ont appris à maîtriser les données qu'ils transfèrent, mais c'est un entrainement qui prend plusieurs années. Nous n'avons pas le temps de vous former."

Elle prend une pause, le regard de biais, elle semble débattre avec elle même sur la suite de la conversation.

"Ecoutez, je dois avoir un kit d'activation dont je peux me séparer, néanmoins, il est assez difficile à utiliser. Généralement vous avez besoin d'un autre poney pour vous aider. Je suppose que je peux vous en fournir un, mais écoutez attentivement, je vous le dis en tant que votre supérieure, et c'est un ordre. Désactivez votre implant à chaque fois que vous serez sur une mission pour les Me, c'est bien clair ?"

Le ton de sa voix ne laisse pas de doute quant à la seule réponse possible. "Oui, mais de quel genre de missions parlez vous ?"

"Nous vous l'expliquerons plus en détail sur le chemin du retour." Répond-elle alors que nous arrivons enfin dans la chambre. "D'ailleurs nous devrions nous dépêcher, je doute que Scarlet apprécie de nous attendre bien longtemps. Mais avant ça, laissez moi examiner vos blessures, ne bougez pas."

Je reste immobile au milieu de la pièce tandis qu'elle commence à défaire mes bandages à l'aide de sa magie. Une odeur de viande faisandée commence à envahir la pièce, et quand je vois mes blessures, je comprends son origine. Attachée à la table de métal, je ne pouvais pas voir dans quel état je me trouvais, mais maintenant que je suis libre de mes mouvement, les parcelles de peau lacérée et les blessures fraichement refermées me sautent aux yeux. Le contact de l'air sur ma peau brûlée, absente de tout pelage m'arrache un cri de douleur.

"Ce n'est pas bon." Dit Sapphire en secouant la tête. "Vous devriez vous rendre à l'hôpital assez rapidement, je n'ai pas le matériel nécessaire pour soigner ce genre de blessures. Je vous suggère aussi de prendre une douche." Dit-elle avec un air de dégout, je ne sais pas comment je suis censée le prendre.

"Je pensais que nous étions pressés ?"

"Ca fait un certain temps que vous n'avez pas été lavée, et je doute que vous vouliez continuer à baigner dans cette substance. Si vous voulez sentir la viande putréfiée, c'est votre problème." Dit-elle en se pinçant le nez, je dois bien avouer que cette odeur est insupportable. "Je suis sure que Scarlet comprendra. Quand vous aurez finit, je changerai vos bandages."

Elle a parlé d'une substance ? En effet, en faisant plus attention, une sorte de fluide visqueux semble suinter de mon corps, curieuse je passe un sabot dedans et le porte à mes narines pour le sentir. Eew ! Mauvaise idée, très mauvaise idée, il n'y a plus aucun doute, c'est bien de ça que provient l'odeur de chair pourrie, c'est même pire que ça, il n'y a pas de mots pour décrire à quelle point cette odeur est horrible.

"Qu'est-ce que c'est que ça ?!" Je demande paniquée. "Pourquoi mon corps fait ça ?! C'est normal ?!"

"C'est probablement un mélange de sueur de sang et de baume." Explique Sapphire calmement. "C'est une de vos habitudes, sentir les fluides qui s'échappent de votre corps ?" Demande-t-elle en haussant un sourcil, un air de pitié dans ses yeux.

Je ne peux m'empêcher de rougir. "Je dois bien avouer que c'est une mauvaise habitude, mais c'est vrai que ça m'arrive, enfin, ce n'est pas comme si je laissais s'échapper beaucoup de fluides...." Je n'aurais peut être pas du dire ça...

C'est à son tour de rougir "Ce que vous faites avec vos 'fluides' ne me regarde pas." Répond-elle embarrassée. "Vous n'avez pas une douche à prendre ?"

Ah oui, la douche. Cette chambre ressemble beaucoup à celle chez moi, à la différence des meubles qui sont moins nombreux dans celle-ci, et du fait qu'elle soit rangée. Plus vide que rangée, mais forcément moins 'désordonnée' que la mienne. Le lit et la table de nuit sont en face de la porte contre le mur adjacent de cette dernière. Le mur opposé à la porte est occupé par un bureau en bois et un meuble à tiroir le séparant de la table de nuit. En face de ce dernier, le mur est vide de tout meuble ou décoration, seulement la bordure en bois et le papier peint que l'on retrouve dans tout le niveau.

Enfin, la salle d'eau est encastrée dans le denier mur, comprenant une cabine de douche, un lavabo et un sanitaire. J'entre dans la cabine et laisse couler l'eau. Les premières gouttes tombent sur mon dos et glissent le long de mes épaules et de ma poitrine. Ah, une bonne douche chaude et relaxante, la dernière me semble dater de plusieurs années. J'apprécie chaque mouvement des gouttes le long de mon corps détendant mes muscles stressés et épuisés, jusqu'à ce que...

"Whoa !" Je crie de douleur alors que l'eau commence à se répandre sur mes blessures et mes brûlures. "Ca brûle pire qu'en enfer !"

"A quoi vous attendiez vous ?" demande Sapphire. "Votre peau commence tout juste à guérir et vos blessures sont loin d'être cicatrisées. Je vous suggère de ne pas frotter trop fort, vous risqueriez de rouvrir vos plaies et de vous écorcher. Débarrassez vous seulement de cette substance et des peux mortes là où vous n'êtes pas brûlée." M'indique-t-elle depuis l'autre pièce.

"Vous ne pouviez pas me dire ça avant que j'ouvre l'eau ?"

"Où aurait été le plaisir ?" Répond-elle d'une voix légère et joyeuse.

"Vous n'êtes pas censée être un médecin ?" Bien que techniquement elle soit aussi la sœur de Scarlet, elles doivent partager ce côté sadique, dire que je me suis laissée avoir par son aspect sage et calme.

Après deux minutes de douleur intense, je sors la douche et trouve Sapphire m'attendant avec une serviette dans son aura magique.

"Préparez vous, ça va être douloureux, j'ai besoin que vous soyez totalement sèche." Dit-elle.

"Vous ne pouvez pas simplement utiliser un sort ?"

"Aucun qui n'ait pas besoin de chaleur, mais si vous insistez-"

"Je vais prendre la serviette..."

Elle n'a pas mentit, la douleur est à la limite du supportable, je regrette déjà la douche, au moins c'était agréable. Elle a besoin d'être aussi rude ? A chaque fois que le morceau de tissus passe sur l'une de mes brûlures, j'ai l'impression d'être fouettée par une centaine de torches enflammées. Et est-ce qu'elle a vraiment besoin de frotter partout ?

"Hum, vous savez, je peux faire cette partie moi même, je ne me sens vraiment pas à l'aise, et j'ai horreur qu'on me touche, même si c'est avec votre magie."

"Oh ?" Dit-elle en haussant un sourcil sans décoller son regard de la serviette. "Encore une chose que vous n'aimez pas ? Je l'ajoute à la liste, mais faites avec, je suis sérieuse quand je dis que vous devez être sèche." Dit-elle d'un ton professionnel.

Enfin, les frottements s'arrêtent et je sens la serviette me quitter. Je me retourne et me prépare à partir quand elle m'interrompt. "Maintenant, au lit !"

Je crois que j'ai mal entendu. Si c'est une plaisanterie, elle ne le montre pas, son visage est vraiment sérieux et elle a l'air insistante.

"Ecoutez, je suis flattée, mais je ne suis pas d'humeur et je ne pense pas que nous ayons le temps, même en faisant vite." Je lui réponds hésitante.

Elle soupire et roule des yeux, ennuyée. "Je n'ai pas le temps pour vos blagues salaces. Je vous laisse le choix, soit je vous mets les bandages sur la peau à nu - et vous pouvez me croire, la douleur ne sera rien comparée à la serviette - Soit vous vous allongez sur le lit et me laissez vous appliquer du baume avant les bandages. Qu'est-ce que vous choisissez ?"

"Je suis sérieuse quand je dis que je n'aime pas les contacts, est-ce que me mettre du baume n'implique pas beaucoup de contact ?"

"Donc vous choisissez la douleur ?"

"D'accord, d'accord." Je réponds vaincue.

Je m'approche du lit et m'allonge sur ce dernier. Je commence avec les pattes avant et saute avec le reste du corps afin de soulager la douleur sur mes blessures. Je trouve une bonne position pour répartir mon poids et tourne la tête vers Sapphire, lui faisant part de mon mécontentement. "Satisfaite ?" Je lui demande.

Elle n'en a pas l'air si je me fie au regard méchant qu'elle me lance. "Comment suis-je censée mettre du baume sur vos blessures si vous êtes allongée dessus ?" Elle demande, je la regarde avec hésitation. "Sur le dos." dit-elle froidement.

Je me balance de droite à gauche jusqu'à donner assez de force pour me retrouver sur le dos, gardant les jambes pliées le long du corps. Cette position est vraiment gênante.

"Ecartez les jambes."

"C'est pas vrai ! Quand est-ce que vous serez satisfaite ? Vous ne pensez pas que c'est assez embrassant comme ça ? Je dois déjà vous laisser me toucher, et en plus je dois vous montrer tout mon corps ?" Je lui demande indignée.

"Je serai satisfaite quand j'aurai passé le baume sur vos brûlures, ce qui ne peut pas être fait si vos jambes sont pliées dessus. Quant à voir votre corps, comment pensez-vous que j'ai traité vos blessures et mis les bandages la première fois ?"

Elle marque un point, cela dit pourquoi dois-je subir autant de situations désagréables en si peu de temps ? Qu'est-il arrivé à ma vie ennuyeuse et paisible, à ma dignité ? Je suppose qu'elles sont mortes dans l'explosion.

Elle ouvre le pot de baume à l'aide de sa télékinésie et y trempe ses sabots l'un après l'autre. La forte odeur d'herbes qui s'en échappe est agréable au moins; je me demande comment ça a pu se transformer en cette substance dégoutante. Elle pose ses sabots sur ma poitrine et commence à masser mes contusions. Si le frottement de ses sabot me fait mal à en pleurer, la douleur ne tarde pas à être remplacé par une sensation de fraicheur. J'en oublie presque que je viens de traverser le Tartare et me détend sous le traitement de la licorne.

Les sabots de Sapphire quittent ma poitrine pour mes épaules et redescendent vers mon abdomen en suivant mes côtes. Ce n'est pas si désagréable au final, je commence même à me sentir vraiment à l'aise, oubliant peu à peu mon embarras. Alors que ses sabots commencent à s'aventurer de plus en plus bas le long de mes flancs, je lève instinctivement ma queue entre mes jambes. Ca a beau être agréable, certains domaines restent hors limite.

"Ne vous inquiétez pas, je n'ai pas l'intention d'aller aussi loin." Dit-elle avec un petit rire. Elle donne quelques derniers mouvements et retire ses sabots, laissant enfin mon corps libre de tout contact. "Maintenant levez vous." Ordonne-t-elle. "Et essayez de ne pas trop salir les draps, avec le baume je veux dire." Je doute que cette précision soit vraiment utile, je suis déjà assez embarrassée comme ça.

C'est plus facile à dire qu'à faire cependant, je suis complètement recouverte à l'exception de mon dos sur lequel je suis allongée. Je me balance légèrement sur les côté et d'un grand coup, je saute faisant une vrille et atterrit parfaitement hors du lit sur mes sabots. Aha ! Regardez ce que je peux faire avec des années de pratique !

Sapphire est tout sauf impressionnée. Elle me tourne le dos et me fais face de nouveau, plusieurs rouleaux de bandage dans son aura magique. Momie time il semblerait, au moins, elle n'aura pas besoin de me toucher. Je me tiens immobile tandis que le premier rouleau commence à tourner inombrablement autour de moi.

"Puis-je vous poser une question ?" Demande Sapphire pendant qu'elle me panse.

"Eh bien, vous êtes déjà en train de le faire- Aïe !" Je serre les dents alors qu'elle tire soudainement sur le bandage.

"C'est une question personnelle, c'est pour ça que je vous demande." Répond-elle d'un ton détaché tandis qu'elle continue à se concentrer sur l'opération.

"Demandez toujours, je verrai."

"Pourquoi détestez vous autant de choses, d'où vous vient toute cette haine ?"

"Voyez le monde comme je l'ai vu aussi longtemps que moi, et dites moi si vous arrivez à ressentir autre chose que de la haine." Je réponds froidement. "Quand tout les poneys autour de vous sont soit conditionnés, soit des brutes soit des abrutis, il est difficile de fraterniser. Lorsque vous devez vivre en protégeant votre identité dans la peur d'être rejeté ou étiqueté comme différent, se socialiser est un défi. Feindre un intérêt pour les mêmes discussions stériles, jouer un rôle, faire bonne figure. A la longue je me suis lassée et tout ce qui restait était cette haine. Cela répond à votre question?"

"Je ne pense pas que ce puisse être la seule raison." Répond Sapphire calmement.

"Ah bon ? Vous ne pensez pas ?" Je réponds irritée. "Eh bien ajoutez ça à la liste, je n'aime pas quand un poney croit penser comme s'il était dans ma tête. Vous posez une question, je réponds. Comment pouvez-vous savoir ce que je ressens ? Vous êtes une Me, vous avez été endoctrinée. Combien de temps s'est écoulé depuis que vous avez été libéré ? Certainement pas autant que ce que j'ai vécu. Vous n'avez absolument aucune idée de ce que l'on ressent quand on voit ses 'amis' commencer à changer sous l'effet de l'endoctrinement. De se sentir différent tout au long de sa vie. Alors, qu'est-ce que vous pensez savoir maintenant ?!" Je crie la dernière phrase, ennuyée.

Cette fois-ci, elle ne recule pas, elle me regarde juste dans les yeux, avec colère et compassion. On se regarde comme ça pendant un moment puis elle reprend le bandage.

"Peut-être que je ne partage pas votre expérience." Commence-t-elle. "Mais je connais au moins un poney pour qui c'est le cas. Et si vous pensez que vivre libre toute votre vie est difficile, laissez moi vous dire que vivre avec l'endoctrinement, sentir ce mur incassable dans votre tête, l'est probablement tout autant." Elle prend une profonde respiration et continue.

"Nos parents ne pensaient pas avoir plus d'un enfant, ils ont donc économisé suffisamment pour faire de moi une upper. Ainsi à ma naissance j'ai été implantée avec un MAI supérieur. Quelques années plus tard, Scarlet est née, mais notre famille n'avait plus les moyens de payer un nouvel implant."

Lentement, les engrenages dans ma tête se mettent en place pour me mener vers la conclusion de son histoire, et celle-ci me fait l'effet d'une douche froide quand elle vient me frapper. Je n'avais jamais entendu parler d'une famille composée à la fois d'upper, de commoner et de lowcast. Généralement il est considéré comme honteux d'avoir un lowcast dans sa famille. Un lowcast signifie un manque d'argent, un manque d'argent mène à une diminution de la consommation, si vous ne consommez pas, vous ne contribuez pas à la société. C'est la raison pour laquelle nous les nommons lowcast.

"Scarlet est une lowcast ?" Je demande étonnée. "Ce n'est pas l'impression qu'elle m'a fait."

"Pourquoi ? Parce qu'elle n'est pas décérébrée comme la plupart d'entre eux ?" Demande Sapphire froidement. "Ce que le MAI ne pouvait lui apporter, je le faisais. Je l'ai aidée dans son apprentissage, je l'ai soutenue quand elle perdait espoir, je l'ai défendue quand elle était victime d'une injustice. Finalement elle a pu entrer dans une école normale, elle est même allé jusqu'au lycée." Raconte-t-elle avec ferveur. "Elle était comme vous, libre et intelligente, mais elle restait une lowcast, elle était traitée différemment, elle a du vivre avec la honte de sa caste. Cela ne l'a pas empêché d'avoir espoir et tout faire pour s'élever par elle même."

"Excusez-moi, mais pour ce que j'ai vu, Scarlet est loin d'être un poney équilibré." Je l'interromps. "Je déteste ce monde, ce n'est pas pour autant que je veux le mettre à feu et à sang. Je ne prends pas plaisir à causer la douleur à d'autres."

"Elle n'était pas comme ça avant, elle se préoccupait du bien être des autres, ce sont ses responsabilités qui l'ont changée. J'ai vu Scarlet grandir, mûrir, développer ses idées... commencer à perdre le contrôle." Dit-elle douloureusement.

"Et alors quoi ? Vous admettez vous même que sa liberté l'a changé en furie, je suis juste plus modérée dans mes actions, je garde ma haine pour moi plutôt que de faire souffrir les autres."

"Ce n'est pas ça qui l'a changée, tant que j'étais auprès d'elle, j'étais le soutient moral dont elle avait besoin, j'étais là pour la rappeler à l'ordre."

"Qu'est-ce qui l'a changée alors ?"

"Un lowcast au lycée est une chose très rare, mais ça ne change rien à leur condition. L'université était hors de sa portée, même avec mon aide. Les entreprises refusaient de l'embaucher à des postes qualifiés." Explique Sapphire avec dégoût. "Scarlet a commencé à faire entendre son mécontentement, à critiquer le système publiquement, et vous savez mieux que personne comment sont traités les activistes."

"Elle était ignorée et méprisée." Continue Sapphire. "Elle s'est faite renvoyer du lycée avant la fin de la première année. La honte de sa caste et son comportement n'ont rien fait pour arranger l'image de notre famille. Quand les autorités l'ont ramené un soir pour protestation publique, mes parent l'ont reniée et mise à la rue."

Elle finit de me mettre les bandages et reprends son récit. "Heureusement pour elle, ses actions ont attiré l'attention des Me et elle les a rejoint. Au début, elle était juste en charge de la coordination entre les cellules et des opérations de communication. Néanmoins, elle n'a pas tardé à se retrouver dans des opérations où elle a du se salir les sabots, c'est à ce moment là qu'elle a commencé à se faire un nom. Lorsque le dernier chef s'est fait capturer, elle a su s'imposer sans trop de difficulté et prendre la tête de la faction. Quand elle m'a recruté, il était trop tard pour que je la ramène à ce qu'elle était, tout ce que je peux faire aujourd'hui, c'est l'empêcher d'aller trop loin." Si faire sauter une bombe en présence des princesses n'est pas aller trop loin, je n'ose pas imaginer ce qui l'est vraiment.

"Ca ne change rien." Je lui réponds. "Ca prouve juste qu'elle est incapable de prendre des décisions morales sans se faire chaperonner, elle a dépassé le stade de la haine. Ca ne me donne aucunement tort, bien au contraire."

"Alors prenons mon exemple." Rétorque Sapphire. "Je n'étais pas libre, mais ça ne m'empêchais pas de voir le monde sous son plus mauvais angle. C'était probablement pire que ce que Scarlet ou vous avez pu vivre, je voyais ce qui n'allait pas, mais je ne pouvais rien faire pour le changer, dès que je sentais venir une idée, elle se heurtait contre ce mur dans ma tête. Là où vous pouviez parler et agir, je ne pouvais qu'observer impuissante." Dit-elle douloureusement. "La plupart des uppers apprennent à contourner l'endoctrinement dès leur plus jeune âge, mais je n'ai eu personne pour m'apprendre. La première fois que j'ai été libre de mes pensées, c'est quand les Me ont retiré mon implant."

Elle illustre son argument en me montrant la cicatrice sur sa nuque. Là où devrait se trouver le MAI, il n'y a plus qu'un trou recouvert d'une vertèbre synthétique. Cette vision horrifique me fait grincer des dents, je passe instinctivement un sabot sur ma nuque et soupire de soulagement à la sensation familière de mon implant. Je ne l'échangerai pour rien au monde, et surtout pas contre ça.

Elle range les derniers rouleaux de bandage dans sa sacoche avant de retourner son attention vers moi. "Je ne suis peut être pas dans votre tête, je n'ai peut être pas vécu votre vie, mais j'estime que c'était pire. Et pourtant je ne vis pas dans la haine, j'ai juste espoir d'un meilleur lendemain. Scarlet n'est peut être pas un exemple, mais elle a eu le courage d'agir, vous, vous n'êtes qu'une lâche, vous avez vécu cachée toute votre vie et vous blâmez le reste du monde pour ça."

"Je ne blâme personne pour mon choix de vie. J'ai ma façon de vivre, les autres ont la leur et j'en suis fatiguée. J'ai choisit différemment et j'espérais pouvoir vivre tranquillement jusqu'à ce que vous arriviez. Pourquoi la haine, je vais vous le dire. Vous vous préoccupez des autres et espérez un retour à la normale ? Moi pas, je veux juste être seule, dans mon coin, sans personne pour jouer avec ma vie. Je suis fatigué de ce monde déglingué, et ce n'est pas le pire. D'un côté y a l'abus des corporations, de l'autre, je ne peux pas ignorer la stabilité sociale, le progrès et la prospérité qu'a offert l'endoctrinement à notre espèce.

Vous êtes vous déjà demandé si l'endoctrinement n'était pas la solution et non le problème ? Et si le vrai problème venait de la liberté ?" Je lui demande. "Je me suis posé ces questions, un nombre incalculable de fois, et la seule réponse que j'ai trouvé, c'est que la seule anomalie, c'était moi, et que la meilleure solution, c'était de me soustraire de l'équation."

Encore un poids de moins sur mes épaules, je devrais faire ça plus souvent. Sapphire me regarde horrifiée comme si j'avais dit la pire des monstruosités. Elle s'apprête à dire quelque chose avant que je ne la coupe.

"Fin de la discussion, j'ai pris cette décision il y a longtemps, ça m'a même valu ma cutie mark. C'est ce que je suis, et je n'ai pas l'intention de changer." Je lui dis fermement. "Quoi qu'il en soit, je fais comment pour réactiver mon implant ?"

Elle baisse les yeux, la bouche bée et oreilles basses, la mine défaite. Il lui faut un certain temps pour comprendre ce que je viens de lui dire et demander. Elle retourne vers son sac et en sort un boîtier accompagné d'un câble. "Ce sont les outils dont je parlais." Me dit-elle en me les donnant. "Vous devez brancher le PDA à l'aide du cable sur votre implant, à l'arrière de votre cou. C'est pour ça que vous devriez avoir besoin de l'aide d'un autre poney. Ensuite, vous n'avez plus qu'à suivre les instructions à l'écran. Mais souvenez vous, désactivez votre implant pour chaque tache que vous ferez pour nous." Ajoute-t-elle d'un ton sérieux.

En plus du kit, elle me donne un pot de baume et quelques rouleaux de bandages. Je les mets dans mon sac avec le téléphone avant de l'enfiler et me préparer à partir. Alors que je m'apprête à franchir la porte je me rends compte que Sapphire ne me suit pas. Je me retourne et elle me dévisage.

"Qu'est-ce qu'il y a ?" Je lui demande.

Elle me regarde étonnée en haussant un sourcil. "Vous allez partir comme ça ? Vous pourriez au moins vous brosser."

Je passe rapidement un sabot dans ma crinière et ma queue. "C'est fait." Puis je passe la porte, Sapphire m'emboîte le pas après un roulement des yeux et un soupir exaspéré.

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