Site archivé par Silou. Le site officiel ayant disparu, toutes les fonctionnalités de recherche et de compte également. Ce site est une copie en lecture seule

Souillure

Une fiction écrite par Brocco.

Prologue

La pluie tinte doucement sur les vitres de la pièce. Le soleil peine à traverser l’imposante couche nuageuse trop souvent présente ces derniers temps, donnant une atmosphère sombre et désagréable. Spike a bien allumé des bougies le long des murs mais il semblerait bien que les ténèbres ont cessés de fuir face à la lumière. A moins que cette morosité ambiante ne soit que le reflet des tourments de mon esprit depuis ces évènements maudits.

La jument est là elle aussi, toujours présente dans un coin de la pièce, toujours désespérément silencieuse. Depuis combien de temps n’a-t-elle pas bougée, je ne saurais le dire. Mais la fenêtre à laquelle elle fait face est le meilleur point de vue qu’elle puisse trouver ici vers la terre désolée qui n’est aujourd’hui plus que roche à nue et qui était auparavant sa maison. Chaque jour, ses yeux vides et vitreux sont tournés vers cet endroit maudit que tous désormais évitent, ressentant encore l’écho de l’abominable malignité qui s’y était terrée durant des mois sans être cependant capables de l’expliquer avec des mots.

Comme son regard, son pelage auparavant coloré et rayonnant de vie est maintenant terne, horriblement grisâtre. Et lorsque la lumière vient à manquer, comme c’est le cas au moment où j’écris ces lignes, je pourrais jurer qu’il se dégage d’elle une discrète phosphorescence d’une indicible couleur, ce même rayonnement hideux qui marquait, tel une morbide signature, la dégénérescence de tout ce qu’il touchait.

Non, je ne dois pas penser ainsi. Même si les séquelles de l’effroyable expérience qu’elle a vécue peuvent paraître définitives, elle reste et restera à jamais mon amie et c’est mon devoir de mettre tout ce qui est en mon pouvoir pour la sauver, pour la ramener parmi nous. Ne serait-ce que pour ceux qui n’ont pas eu cette chance.

Mon assistant passe en ce moment le balai autour d’elle sans qu’elle ne réagisse, nettoyant les cotillons et autres serpentins témoignant de la visite quotidienne de Pinkie Pie. Cela fait des mois qu’elle vient jour après jour essayer de refaire paraître la vie dans ce regard mort avec des cabrioles et des pitreries que je n’avais jamais vu auparavant. Et aujourd’hui comme à chaque fois, ce fut sans succès, de la même manière que mes recherches ne donnent aucuns résultats. Sans doute parce que je suis trop occupés par Eux.

Si la vue journalière du spectacle désolant de la figure morne et immuable qui fut auparavant mon amie est la motivation principale qui me pousse à écrire ces terribles lignes, Ils sont pourtant la raison profonde qui rend mon témoignage nécessaire. J’ai bien conscience que remuer ces souvenirs douloureux sera malaisé et je ne peux prévoir le temps qu’il me faudra pour les coucher sur parchemin ni les nouvelles séquelles qui en découleront mais cela doit être écrit. Que d’autres soient prévenus et ne restent pas perdus dans l’obscurité comme nous l’avons été.

Depuis l’apogée de ces infortunés évènements, alors que nous plongions au plus profond de cet abîme de démence et de ruine, je n’ai plus réussi à trouver de vrai sommeil. Dès que mes yeux se ferment, je sens ces effroyables sons tourner à la limite de ma conscience, l’immonde couleur d’outre-monde semble se fixer sur mes paupières en de fantomatiques persistances rétiniennes. Et alors que je glisse doucement vers l’inconscience réparatrice, je finis invariablement par voir ce morceau de tissu rose tout en sachant que dans les ombres voisines se cache l’indescriptible horreur qui en avait été jadis propriétaire. Alors je me réveille, glacée et haletante, sachant que je n’aurais jamais le courage de me glisser à nouveau dans mon lit pour cette nuit.

Et s’il y a un prix que nous payons aujourd’hui, c’est celui de notre ignorance. Nous nous sommes retrouvés désarmés face à ces horreurs venues de dimensions innommables, sans aucune connaissance, sans aucune information, sans aucun soutien face à elle. Et bien que nous soyons encore présents en ce monde, certains plus que d’autres, en réalité nous avons perdu. Ma survivance n’est en rien une victoire si elle doit avoir un goût aussi amer et pour cette raison je dois raconter mon histoire. Je refuse que d’autres aient un jour à vivre la même expérience que nous.

Qu’importe le sentiment d’horreur viscéral que provoqueront les révélations sur ces démoniaques entités guettant le moindre interstice dans les voiles séparant les mondes, aussi pénible soient ces découvertes, elles n’égaleront jamais le fardeau que doit endurer celui ou celle qui a dû ployer devant Eux.

Parce que je suis certaine que mon histoire finira invariablement par se répéter, pour vous prévenir et en espérant qu’elle soit entendue, il m’est nécessaire de la narrer.

Vous avez aimé ?

Coup de cœur
S'abonner à l'auteur

N’hésitez pas à donner une vraie critique au texte, tant sur le fond que sur la forme ! Cela ne peut qu’aider l’auteur à améliorer et à travailler son style.

Note de l'auteur

Cette fanfic est un hommage à peine déguisé à la nouvelle "La couleur tombée du ciel" de H.P. Lovecraft.

Si le bougre voyait que son œuvre allait être une source d'inspiration pour des histoires se déroulant dans le monde de My Little Pony, il aurait sans doute moyennement apprécié mais bon il est mort et moi non. Les vivants gagnent.

Chapitre suivant

Pour donner votre avis, connectez-vous ou inscrivez-vous.

constantoine
constantoine : #10948
Tellement magnifiquement bien écrit.
Je m'en vais lire la suite dés maintenant
Il y a 3 ans · Répondre
Jycrow
Jycrow : #7831
Oh oui, on le sent bien l'influence lovecraftienne dans ce texte ! Autant dans le vocabulaire que dans la syntaxe... Je sens que je vais très bien apprécier cette histoire !
Il y a 3 ans · Répondre

Nouveau message privé