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La façade de l'art

Une fiction écrite par LordAngelos.

Chapitre 10 : Les autres avant soi

Ce matin, en regardant à travers sa fenêtre, on pouvait constater que l’averse de cette nuit avait enfin cessé, laissant ses marques si particulières sur le paysage. De petites flaques étaient dispersées ça et là sur le sol encore humide, reflétant le soleil encore bas qui perçait au travers de reste de nuages, et des perles d’humidité tombaient encore des toits qui finissaient de s’égoutter. Mais ce que la ponette au crin fushia observant par la fenêtre préférait, c’était toutes ces petites bulles d’eau minuscules qui formaient la rosée, recouvrant sporadiquement toutes les pétales des fleurs qu’elle et ses amies avaient laissé dehors pour qu’ils puissent d’abreuver de l’eau de pluie. C’était assez féerique, comme plein de petites étincelles qui venaient sublimer le spectacle floral du matin.

Rose était la première levée, comme souvent les lendemains de pluie, justement parce qu’elle aimait toute cette magie de la nature qui suivait cette intempérie, c’était sa meilleur vitamine pour commencer la journée après une soirée maussade. Comme à chaque fois, elle ouvrit la boutique de fleurs pour que le soleil abreuve de ses rayons ses protégés gardés en magasin, et commencer à faire le tour des bouquets et pots demandant de l’entretien. Démarrant par ceux gardés à l’extérieur, elle s’intéressa ensuite à une étagère qui abondait de fleur de lys. Et c’est alors qu’elle s’apprêtait à déplacer l’un de ces pots que l’une des fleurs aux pétales immaculées disparue sous un sabot rose.

« Rose ! gémit Lily Valley en installant sa prise juste au dessus de son oreille gauche. Combien de fois il faut que je te dise que ce pot contient ma réserve personnelle.

-  Oh ça va Lily, si tu crois que c’est facile de les reconnaître, se justifia Rose sur un ton vexé peu dissimulé, tu ne pourrais pas les séparer des autres fleurs ?

-  Et les priver de la compagnie de leurs amies ? Surtout pas malheureuse, elles se sentiraient si seule.

-  Alors prend une fleur artificielle pour tes crins, ça t’éviterais de gaspiller comme tu le fais ! C’est que ça ne pousse pas aussi vite que tu les utilise ! »

Encore une fois, Rose avait démarré le sujet qui fâche, et le visage de son amie devint soudainement aussi rouge que les tulipes qu’elles côtoyaient, des vapeurs de colère s’échappant presque de ses naseaux. La jument se prépara à recevoir une bonne crise d’hystérie comme la ponette aux lys savait les faires.

« Dit donc les filles, c’est pas très gentil de me réveiller avec vos histoires de pouliche. Qu’est ce qu’il se passe encore ? demanda à moitié ensommeillée une ponette rose pâle au crin vert.

-  Mais c’est elle Daisy, lança puérilement Lily Valley en pointant furieusement Rose du sabot, elle allait encore mettre mes jolies petites lys chéries en vente avec le reste.

-  Et bien si tu mettais une inscription sur ton pot ? Ça éviterait ce genre d’incident. Et toi Rose, tu devrais savoir mieux que nous que ce pot n’est pas une grosse perte pour la boutique, non ? »

Les deux juments tout juste en froid ne purent que baisser la tête de honte devant la raison de leur amie, mais à peine croisèrent elle leur regard pour voir comment réagissait l’autre qu’elles se mirent à rire nerveusement, oubliant instantanément leur différent. C’était typique de Daisy, cette aisance à les réconcilier. En fait, des trois, c’était elle qui s’était naturellement donné la charge de régler les conflits, tout comme Lily était la plus douée pour soigner et entretenir la beauté des plantes, et enfin Rose qui avait un sens commercial plus aiguisé que ses collègues, A eux trois, elle tenait la meilleur boutique de fleurs de Ponyville, et ça n’allait pas être ses habitants qui diraient le contraire.

« Allez, finit de rire les filles, y’a une cliente qui s’amène, repris Daisy qui s’était prise dans le fou rire, Rose, tu t’en occupe ?

-  J’y suis déjà ! confirma la ponette paille avec un clin d’œil tandis que Lily prenait le relais de la gestion des stocks.

-  Bonjour Rose, salua une pégase sans s’avancer plus dans le stand, je ne dérange pas j’espère ? Je vous ai vu … discuter.

-  Tu es toujours la bienvenue Fluttershy, tu n’as pas à t’en faire. Qu’est ce que je peux pour toi ?

-  Et bien, il me faudrait des pétunias, j’en ai besoin pour des infusions.

-  Oui on a ça, je vais t’en chercher, acquiesça la ponette en pénétrant à nouveau dans la boutique.

-  Merci beaucoup.

-  Dis, t’es au courant pour cet étalon là, celui qui est à Ponyville depuis un petit moment déjà ? clama la ponette depuis l’intérieur, remplissant un panier d’osier des fleurs demandées.

-  Pardon ?

-  'rawlife che crois, tu t’es occu'é de lui au dé'ut ’ailleurs, non ? marmonna à travers la anse du panier.

-  Ah … oui en effet … bredouilla Fluttershy en prenant délicatement le panier des dents de Rose avec son aile.

-  C’est en te voyant que j’y ai pensé. A ce qu’il parait, il est allez à Canterlot pour ses tableaux. On m’as raconté qu’il avait fait pas mal de portraits des habitants de Ponyville avant d’être découvert … tu crois qu’il a put faire un tableau de moi ? J’ai pas osé lui demandé quand il à travailler ici. »

Mentionner ce détail rendit Rose toute émoustillée, ce qui mis mal à l’aise la pégase, cette dernière reculant lentement du comptoir après avoir payer la fleuriste, le regard particulièrement rougissant de gêne.

« Je … je ne sais pas, … merci pour les fleurs Rose, au revoir … débita la pégase en s’enfuyant.

-  Eh attend, j’ai dit quelque chose de mal ? » s’étonna soudainement la jument paille.

Aucune réponse de la pégase qui filait à présent grâce à ses ailes, laissant en plan la ponette qui trouvait cette attitude bien étrange de la part de Fluttershy. Elle avait assez vite remarqué que cette unicorne un peu soupe au lait et la pégase avait partagé quelque chose de pas forcément joyeux, comme beaucoup de poney en ville depuis la fête d’anniversaire de la sœur de Rarity, et depuis, juste de parler de lui en sa présence la faisait réagir au quart de tour, et la rendait aussi insaisissable qu’une brise.

« Dis Rose, tu la connais celle là ? »

La ponette à la rose détourna son regard du coin de rue où avait disparu Fluttershy pour regarder le duo de licorne que Lily pointait du sabot d’un air curieux. Elle ne peina pas à reconnaître la couturière de Ponyville, donc elle comprit vite que son amie parlait de la jument à la robe ocre et sommairement coiffée qui la suivait tout en regardant d’un air plein de curiosité tout ce qui défilait autour d’elle. Rose ne pouvait pas prétendre avoir la mémoire phénoménale de Pinkie Pie, mais d’aussi loin qu’elle s’en souvienne, elle n’avait jamais vue cette licorne à Ponyville.

Pourtant, elle lui trouvait quelque chose de très familier, sans parvenir à mettre le sabot dessus.

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Des gazouillis d’oiseaux retentirent à l’extérieur du Carrousel. Le genre de bruit matinal qui pouvais être très agréable si on appréciait les réveils en chanson, ce qui n’était évidement pas le cas de l’équidé à corne confortablement allongé sur la moquette de ce qui ressemblait à une chambre.

Drawlife avait beaucoup de mal à se réveiller, et il n’en avait pas vraiment la volonté non plus d’ailleurs. Il était bien trop à l’aise à même cette surface molletonné et légèrement parfumée, une béatitude telle que seul l’instant présent nageait dans son esprit. Mais ces chants étaient toujours là, de plus en plus forts et stridents à ses oreilles au fur et à mesure qu’il émergeait. Et plus il sortait de son sommeil, plus ses sens s’éveillaient sur ce qui l’entourait, jusqu’à en venir à une question : pourquoi dormait-il par terre ? Rien que cet état de fait le fit se lever d’un bond, son cerveau carburant bien plus vite que dans lors de son état léthargique pour récolter des informations.

Moquette, papier peint décoré tel un manège, fenêtre aux formes inhabituelles ; le Carrousel fut le premier endroit qui collait à ce qu’il voyait. Mais alors, pourquoi était-il chez Rarity ? Ses sens s'interrogeaient de plus en plus. Quelques efforts sur les événements de la veille lui mirent Canterlot en tête. L’exposition ! Mais alors quoi ? Lui et la licorne étaient certes rentrés tard, mais qu’est ce qui l’avait empêché de retourner chez Twilight ? Il se souvenait même que Rarity était plutôt contrariée lors du retour ; il faut dire qu’il l’avait un peu forcé la patte pour ramener Blow Passion, qui n’était pas un exemple de propreté. Pourquoi être resté chez elle dans ces cond … Attends ... Bon sang, Blow Passion !

Alarmé par ce retour soudain de mémoire, Drawlife se précipita vers le lit pour n’y découvrir qu’une couverture recouvrant entièrement et sans un pli le matelas, et rien entre les deux. Où était Blow Passion ? C’était pourtant bien là que Rarity et lui l’avaient installé pour cette nuit. Elle ne s’était quand même pas enfuie ? Non, pas dans son état, et sans moyen ... à moins que ?

Drawlife sortit de la chambre pour commencer à la chercher, lorsqu’une délicieuse odeur de chocolat titilla rapidement ses narines, rappelant aussitôt à l’étalon qu’il avait faim. Peut être que la licorne miel était tout simplement en train de prendre son petit déjeuné ? Rassuré par cette idée, il descendit les escaliers pour atteindre la salle principale, avant de se tourner et voir l’entrée de ce qui semblait être la cuisine. N’étant encore jamais entrée dans cette pièce, il n’y passa que la tête pour voir ce qui l’y attendait, et, hormis l’odeur de chocolat qui se fit plus fort, il vit une crinière violette, sa propriétaire de dos, des ustensiles de cuisine flottant autour d’elle. Drawife entra alors pour voir le reste de la pièce et peut être trouvé la jument qu’il recherchait. Elle n’était malheureusement pas présente. Cependant, la moquette omniprésente du Carrousel avait fait place à un carrelage à motif nacré, ce qui fit que ses sabots claquèrent légèrement à chacun de ses pas, alertant la licorne blanche de sa présence.

« Oh bonjour Drawlife, lança Rarity d’un regard sur le coté afin d’être capable de voir l’étalon tout en continuant sa cuisine, tu es enfin réveillé. Je ne te savais pas si gros dormeur, surtout à même le sol. Bien dormi malgré tout ?

-  Euh, bonjour Rarity. Oui, j’ai prit l’habitude de dormir comme ça, répondit l’unicorne la bouche pâteuse, mais où …

-  Ce n’est quand même pas Twilight qui te faisait dormir par terre ?

-  Oh non non, ce n’est pas à cause d’elle, c’est chez moi que … euh attend une minute, je peux juste …

-  Tu me rassures, je l’imaginais mal te faire subir ça. Mais je te l’ai dis, Sweetie Belle étant chez mes parents, tu pouvais très bien utiliser sa chambre. Je conçois que tu souhaitais rester au chevet de Blow Passion, mais tout de même …

-  Justement, où est-elle ? s’impatienta Drawlife, en se mettant juste à coté de la jument pour bien lui montrer qu’il était en train de demander quelque chose.

-  Au SPA bien sûr, répondit-elle naturellement sans tenir compte de l’attitude un peu vif de Drawlife, étant donné qu’elle s’était réveillé avant toi, tu penses bien que je n’allais pas la laisser vagabonder chez moi dans son état en attendant ton tour. Et malgré que je sois bien outillée, son état nécessitait vraiment des soins plus complets que ce que je pouvais lui apporter.

-  Merci de l’info, je vais la rejoindre alors.

-  Un instant ! somma la licorne en finissant du même coup sa préparation.

-  Quoi ? souffla-t-il quelque peu blasé.

-  On n’a pas vraiment eu le temps de discuter hier soir, vu la précipitation avec laquelle nous sommes revenus de Canterlot. De plus, j’imagine que tu as faim. »

L’estomac de Drawlife précéda sa tentative de parole par un grondement bien sonore. Celui ci se cala alors un sabot sur le ventre par réflexe, ce qui fit apparaître un sourire sur le visage de la licorne.

« C’est bien ce que je pensais, certaines choses ne changent pas » réfuta-t-elle fièrement en s’installant à coté de la place qu’elle laissait pour Drawlife, posant un bol de chocolat sur la table pour ce dernier.

Bien que réveillé et pleinement conscient de ses actes, les effets du sommeil ralentissaient encore les réflexes de l’étalon, ce qui ne lui permettait aucune répartie pour se défendre. Rarity semblait bien en profiter, gardant un sourire amical comme si elle était sûre que son interlocuteur serait d’accord avec tout ce qu’elle dirait. Pourtant, Drawlife sentait le sermon à des kilomètres. Il le sentait, mais il ne venait pas. Rarity gardait le silence, sirotant tranquillement une tasse de tisane. Ne sachant pas trop quoi faire, il fit ce que son estomac lui suppliait depuis plusieurs secondes. Il s’assit devant le bol et le saisi par magie pour en boire doucement le contenu, tout en surveillant du coin de l’œil son amie. Étrangement, bien qu’il se fût depuis un moment habitué à la compagnie de la licorne blanche, en ce moment même, elle le mettait vraiment mal à l’aise, ce qui le motivait encore plus à partir trouver Blow Passion.

« Alors ? Cette journée d’hier, comment s’est-elle passé ?  commença-t-elle calmement.

-  Heu … tu étais là, indiqua surpris Drawlife, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de détailler.

-  Enfin Drawlife, s’offusqua faussement la licorne, tu as souhaité être seul lorsque nous étions sur place, je voudrais juste savoir ce que tu as put voir après notre séparation.

-  C’est … c’est tout ?

-  Mmh-mmh, attesta du museau la jument, continuant de siroter sa boisson.

La requête de Rarity surpris un peu Drawlife, pensant qu’elle commencerait la discussion directement par son dérapage. Mais il ne perdit néanmoins pas de temps afin de ne pas la contrarier, pour peu qu’elle puisse l’être. Il décrivit un peu maladroitement son parcours dans les galeries, tentant de se remémorer les tableaux qu’il avait observé, de l’ambiance qui régnait à l’exposition, jusqu’à ce qu’il aborde sa rencontre avec la jument artiste avec qui il s’était à sa grande surprise lié d’amitié. Rarity l’écoutait avec une attention dissimulée, indiquant son intérêt par quelques murmures approbatifs, ce qui intrigua d’autant plus l’étalon sur le but de celle-ci. Lorsque son récit s’approcha du moment de l’arrivée de la Princesse sélène, l’étalon s’interrompit, hésitant. Rarity en profita pour reprendre la parole.

« De mon coté, j’ai rencontré une jeune fille charmante, très intéressante. Elle avait des goûts très simples et pourtant était capable de s’intéresser à beaucoup de choses. Une ponette du nom de Palette Swap. Cela te dit quelque chose ?

-  Euh, non, pas trop, refuta en toute franchise l’étalon.

-  Je vois … il est alors temps pour moi que je t’enseigne une première leçon : on ne laisse pas quelqu’un, et encore moins une demoiselle avec qui on a passé toute une après midi, sans au moins échanger ses noms, par respect de l’autre.

-  Oh, alors c’est d’elle dont tu parlais…

-  Bien évidement que je parlais d’elle, puisque c’est toi-même qui me l’a envoyé, rétorqua la jument sur un ton beaucoup moins amical, mais dans quelles conditions ! La pauvre s’est présentée à moi sans même savoir de la part de qui elle faisait une commission. Honnêtement, j’aimerais bien que tu m’expliques les raisons qui t’ont poussé à nous laisser en plan, elle et moi.

-  Je … je ne préfère pas en parler, trancha l’étalon en replongeant son museau dans le bol, prenant conscience que ce passage de la soirée était ce qu’il y avait de plus idiot et que le ressasser ne le motivait guère à continuer de parler.

-  Dans ce cas tu n’y verra pas d’inconvénient à me laisser deviner. Attends que je réfléchisse … ça n’aurais pas un rapport avec la Princesse Luna, à tout hasard ? »

Un bruit de régurgitation résonna dans le bol de Drawlife, mais celui-ci fit son possible pour faire comme si de rien était malgré les quelques gouttes marron qui s’écoulaient sur ses joues.

« Bien, maintenant que je sais ce qui t’as fait partir comme un voleur, manque à savoir pourquoi ? Subjugué par tant de beauté princière ? Timidité ? Il y a tellement de raisons tout aussi mignonne que je pourrais trouver …  énuméra Rarity sur un ton moqueur.

-  Elle m’a fait peur, d’accord ?  trancha sèchement l’étalon en claquant son bol sur la table.

-  Peur ?  s’étonna la jument, reprenant aussitôt son sérieux.

-  Oui je sais, c’est complètement crétin, confirma Drawlife en cédant à l’énervement, je m’en suis bien rendu compte quand je me suis égaré puis que j’ai prit conscience que je te posais une deuxième fois un lapin. Mais … bon sang c’était la première fois que j’étais en présence d’une Princesse ! Toi tu en as peut être l’habitude, donc forcément ça te parait complètement idiot, mais comprend moi, j’ai … j’ai encore mauvaise conscience pour ce que j’ai fais à toi et tes amies.

-  Et donc quoi ? Tu pensais qu’elle allait te bannir ? Je t’en pris ! Si tant est qu’elle en ait le pouvoir, tu penses vraiment que ton parcours mérite un tel châtiment ?

-  Je n’en sais rien, je sais juste que j’ai paniqué et que je n’ai pas voulu prendre le risque de tomber face à elle.

-  C’est un peu excessif comme réaction, tu ne pense pas ?

-  J’aimerais bien t’y voir à ma place …

-  Drawlife voyons, s’exaspéra à son tour la licorne, fait un effort. Tu avais bien commencé, et si j’en crois cette gentille Palette Swap, tu t’ouvrais plutôt bien aux autres. Ne va pas me faire croire que d’un coup tu t’es remis toute la misère d’Equestria sur le dos à la simple vue de la Princesse Luna ?!

-  Il faut croire que si. »

Le soupir que lâcha Rarity montrait parfaitement qu’elle était excédé par l’entêtement de Drawlife, ce que celui ci comprenais bien, mais ça ne changeait rien : il avait eu peur, et il n’avait vraiment pas envie d’épiloguer dessus. Quand à savoir si cela se reproduirais, il préférait ne pas y penser ; après tout, c’était un coup du hasard, il n’y avais aucune raison que ça se reproduise, n’est ce pas ? Rarity, elle, décida de se calmer en se réservant une tasse de tisane qu’elle vida plus vite que habituellement.

« Et si je te disait que cette même Princesse a acheté ton tableau ?

-  Oh, tu es sérieuse là ?  sursauta presque l’unicorne.

-  On ne peut plus sérieuse, je n’ai aucun intérêt à te mentir, assura la licorne en posant un sabot sur sa poitrine, donc tu vois ? Si elle t’aurait voulu du tord, tu penses qu’elle aurait pris la peine d’acheter une de tes œuvres ?

-  Oui, sans doute, mais … une Princesse ?! C’est … enfin … woah ! Pour mon premier tableau, ça fait beaucoup d’honneur. Elle n’a pas du faire ça sans raisons.

-  Tu m’en demande trop là, je ne lis pas dans sa tête. Pourquoi ne pas prendre son choix comme une simple preuve qu’elle apprécie ton travail ?

-  Oui, effectivement, j’ai peut être trop d’imagination.

-  Merci de t’en rendre compte » soupira Rarity en roulant des yeux.

La réaction extérieur de Drawlife ne reflétait pas réellement ses pensées, actuellement en plein émoi. Une Princesse, carrément ? C’était surréaliste … enfin non pas vraiment, elle n’était pas non plus des êtres imaginaires au-delà de tout ce qui existe, mais quand même ! Une Princesse ! Rarity voulait lui trouver une preuve qu’il était bon ? Voilà chose faite ! Pourtant, sa crainte persistante de la Princesse lui mettait toujours le doute sur les réelles intentions de cet achat. Une manière de lui laisser un message ? … Non, c’était ridicule. Il devait arrêter de penser négatif, ou d’envisager le pire, ça ne lui avait attiré que des ennuies jusque là, et à force, il risquait de décevoir pour de bon Rarity ; il avait enfin un ami, ça rendait l’étalon heureux, exactement ce que sa mère lui avait supplié de faire. Même si ça devait signifier d’affronter ses peurs et ses craintes les plus tenaces, il ferait tout pour garder cette amitié.

Et la première chose à faire, c’était de suivre la voie qu’avait commencé à lui tracer la jument : créer des œuvres, et les vendre à ceux qui sauraient les apprécier, et pouvoir enfin vivre une vie normale, sans être perpétuellement au crochet des autres pour se sustenter ou avoir un toit où dormir..

Toutefois, penser à cet avenir lui mis un nouveau doute. Pas quelque chose concernant lui-même cette fois, mais plutôt envers la jument assise à coté de lui, quelque chose qui risquait de compromettre leur relation qu’il voulais absolument conserver.

« Rarity, juste une question. Il va se passer quoi entre nous deux ?

-  Que … entre nous deux ? balbutia-t-elle en rougissant subitement.

-  Ben je ne sais pas, ce que l’on a fait hier n’était qu’un début j’imagine, mais quand ça aura aboutie, que je serais pleinement installé dans ce mode de vie, nous, ça va être différent ?

-  Je ne suis pas sûre de te suivre.

-  Rhaa, c’est pourtant pas difficile à comprendre ! Entre nous deux, ça colle bien non ? Mais si je parviens à devenir un artiste professionnel, on va vivre dans deux mondes différents, et on se verra sûrement beaucoup moins.

-  Drawlife, je …

-  Je tiens vraiment à notre amitié ! précisa l’étalon en posant un sabot sur le bout d’une patte de Raity pour lui communiquer son ressenti. A cause de mon tempérament, elle n’a failli jamais voir le jour. J’ai peur que, à cause de cet avenir, on la perde. »

La confusion de la licorne mettait vraiment Drawlife dans l’embarras, car il avait l’impression de lui révélé un secret intime, alors qu’il pensait affirmer une amitié déjà en place. Elle eu même une réaction étonnée lorsqu’il prononça sa dernière phrase, ce qui fit hésiter à son tour l’étalon.

« Rarity … j’ai dit quelque chose de mal ? demanda-t-il un peu effrayé en enlevant son sabot du pelage blanc de la styliste.

-  Non-non, du tout, au contraire, ça me fait chaud au cœur ce que tu me dis, rassura-t-elle en tournant son visage pour lui afficher un beau sourire.

-  Ah bon ?

-  Bien sûr ! J’avais peur que ce que je te proposais te rebute complètement, mais … si la seule chose qui t’inquiète à présent c’est que l’on se perde de vue, crois moi, je suis très heureuse de ça. Et ne t’en fait pas, même s’il est possible qu’on ce côtoie moins souvent, on restera ami. On ne se débarrasse pas de la fabuleuse Rarity aussi facilement !

-  Merci Rarity. »

Drawlife fut vraiment soulagé des paroles de Rarity. Les craintes qui faisaient pression sur sa poitrine s’étaient estompées d’un seul coup, ce qui lui provoqua un élan d’affection pour la licorne, et il la serra aussitôt dans ses pattes. Rarity fut surprise, Drawlife l’avait sentit lorsque son corps svelte émis un soubresaut contre le sien. L’étalon ne lâcha pas immédiatement la licorne, passant son soulagement dans cette embrassade, tandis que Rarity lui rendait affectueusement le geste. C’était pour ce genre de chose que Drawlife ne souhaitait vraiment pas perdre l’amitié de la jument, l’affection, la complicité, la confiance, autant d’élément qu’il avait rapidement perdu de vue et dont il n’était pas prêt à se séparer de nouveau.

« Du coup, tu as prévue quelque chose pour la suite ?  demanda l’unicorne en lâchant son amie.

-  Oh oui, bien sur ! Hum … et bien en effet, j’avais pensé te faire suivre plusieurs enchères similaires, voir par moment de simples expositions. Je ne m’y connais pas entièrement dans ce domaine de l’art, mais Fancy Pants pourrait t’y aider. D’ailleurs, il adorerait te rencontrer tu sais.

-  Tu ne dois pas y être pour rien, avoue, supposa-t-il un sourire en coin.

-  Ce n’est pas interdit de parler de ses amis que je sache chérie, afirma-t-elle avec un clin d’œil complice, et puis, tu ne m’as pas vraiment donné d’occasion de te présenter en personne.

-  Oui bon, ça va … j’éviterais de refaire ce genre d’idiotie, promis, bougonna l’étalon.

-  Tant que tu ne t’en rend pas fier, je peux pardonner, ne t’en fais pas. Mais il en reste que justement, une autre enchère se profile dans les jours à venir. Ce ne sera pas Fancy Pants le régent, mais il y sera. Une bonne occasion d’appliquer ce que tu as appris de tes erreurs, non ?

-  On va faire comme ça alors … hum, et pas de nouveaux costumes ?

-  Cela aurait put, mais les dégâts sur le tien sont rattrapable, donc tu pourra le réutiliser. A moins que tu en souhaites un nouveau ?

-  Plus tard peut être, celui là me va très bien merci. »

Supposant que la discussion parvenait à sa fin, Drawlife but d’une traite son bol qui commençait à refroidir, un peu pressé de discuter cette fois ci avec une autre licorne.

« Bon par contre je te laisse, je vais allez voir Blow Passion, annonça Drawlife en se redressant sur ses quatre pattes.

-  Tu es sûr ? En ce moment elle est entre de bons sabots, tu peux très bien l’attendre ici.

-  Ben en fait, c’est une bonne occasion pour moi allez au SPA justement. Depuis l’événement, j’ai dut y allez qu’une fois, et encore pas longtemps, alors que mon docteur m’avait spécifié d’y allez régulièrement. Autant que je m’y mette sérieusement, surtout après la journée d’hier.

-  Ah …, dans ce cas je ne te retiens pas plus longtemps. Je vais de mon coté m’occuper de ton prochain vernissage. Précise à Aloé et Lotus que tu viens de ma part, elles te feront une réduction.

-  Merci, mais je ne voudrais pas abuser.

-  Je t’en prit chérie, ça me fait plaisir, insista la styliste en accompagnant l’étalon jusqu’à l’entrée pour lui souhaiter une bonne matinée.

En sortant de la boutique Carrousel, Drawlife se sentait un peu plus léger. Lui qui avait crut que l’échange avec Rarity allait mal finir, elle s’était au contraire soldée par une perspective assez réjouissante et une certitude que leur amitié n’était pas qu’un sentiment circonstanciel. Il n’en demeurait pas moins qu’il s’en voulait encore d’avoir fait faux bond à la licorne, par deux fois qui plus est, mais elle ne semblait pas trop rancunière à ce sujet. En revanche, pour Palette Swap, c’était un peu différent. Déjà, il n’était pas certain de la recroiser, et si c’était le cas, leur petit début d’amitié pourrait peut être s’écrouler si le comportement de Drawlife avait fortement déplut à la jument. Rien n’était sûre, il ne la connaissait pas vraiment contrairement à Rarity, et encore, celle-ci gardait quelques secrets ; l’étalon ne s’était pas attendu à sa récente réaction quand il avait abordé l’avenir entre eux deux.

Cependant, l’étalon chassa rapidement cette pensée de la tête, pour se concentrer sur son chemin. Avec le temps, les Ponyvilliens paraissait s’habituer à sa présence. Il y avait beaucoup moins de regard en coin le visant, et certains lui souhaitaient même le bonjour avec le sourire, ce que l’unicorne rendait sans réfléchir. L’attitude joviale de cette ville et la confiance d’une de ces habitantes commençaient vraiment à déteindre sur son humeur d’habitude maussade, et du coup, ses idée noires se faisait largement moins pesantes. Même le ciel, pourtant issue d’une veille pluvieuse, s’accordait à sa nouvelle bonne humeur. Les pégases avaient cette fois ci laissé des nuages vagabonder, permettant ainsi de garder un peu de fraîcheur tout en laissant le soleil faire son office. Quoiqu’avec un peu de mal.

A mi chemin du SPA, Drawlife finit par se demander comment le soleil ne parvenait pas à faire profiter l’étalon de ses rayons, alors que le reste du paysage en était baigné. Une ombre était visiblement en train de le recouvrir, et ce depuis plusieurs minutes. Un simple coup d’œil en l’air lui fit constater qu’un petit nuage flottait au dessus de lui, bien plus bas que les autres, et avait l’air de mimer le moindre de ses déplacements. Du moins le semblait il, car à peine avait il posé son regard sur le nuage que celui-ci dériva dans une direction différente. Quand il retira son attention du nuage, il vit la même ombre assombrir à nouveau sa position. Drawlife n’était pas né de la dernière pluie, et il n’y avait qu’une seule possibilité de faire agir un nuage de la sorte. Il souffla même d’exaspération en imaginant le responsable de ce phénomène.

En continuant son chemin, il se concentra pour attraper par lévitation un caillou, pas trop gros au cas où, en faisant attention à paraître le plus naturel possible. Lancer un objet à grande vitesse était une des rares choses que son petit frère avait consentit à lui apprendre, et s’était l’occasion rêvé de mettre en application ses enseignements. Il figea le projectile juste sous son menton, puis commença à amasser de l’énergie du coté opposé au nuage. Lorsqu’il jugea la quantité de magie suffisante, il bascula sa tête pour libérer le champ de tir et relâcha la pression d’un coup. La pierre fila alors à toute allure vers le nuage suspect, et au lieu de le traverser comme il l’aurait du, il rebondit dessus. Un petit cri de douleur en sorti, ce qui confirma les doutes de l’étalon. Une tête coiffée d’une crinière arc-en-ciel passa au travers du nuage, avec un hématome sur le front qui tranchait avec son pelage cyan.

« Dit donc toi, ça t’arrive souvent de caillasser les pégases ?  grogna Rainbow Dash en dispersant le nuage qui lui servait de camouflage.

-  Que ceux qui jouent aux espions, informa Drawlife d’un air assez antipathique, je peux savoir ce que tu étais en train de faire ? »

Une fois sa cachette complètement évaporée, Rainbow Dash descendit rapidement de sa position pour rejoindre Drawlife, impactant fortement le sol de ses quatre sabots lors de son atterrissage, en accord avec le regard mauvais qu’elle lançait à l’étalon de ses yeux magenta. Drawlife l’avait déjà vu de mauvais poil, mais là, elle était bien plus furieuse que la dernière fois.

« Tu sais que je peux te demander la même chose ? lança la pégase tout en entamant une ronde autour de l’unicorne, tel un loup sylvestre attendant la bonne occasion pour sauter sur sa proie.

-  Qu’est ce que tu veux dire ?

-  Répond à ma question, gros malin.

-  Dit hé ! Tu ne vas pas m’agresser d’entrée de jeu non plus ! s’irrita Drawlife en pivotant en même temps que Rainbow pour lui faire face. Bon ok, te lancer un caillou n’était la meilleure des choses que je pouvais faire, et je m’en excuse. Mais moi tout ce que je faisais, là, c’était allez au SPA, rien de plus.

-  Ouais, donc t’allais prendre du bon temps quoi, conclue-t-elle dédaigneusement en stoppant son manège.

-  Heu … oui entre autre … mais en quoi ça te dérange ?

-  Bon sang mais j’y crois pas quoi ! T’as pas l’impression d’oublier un truc ?

-  Éclaire-moi si tu es si maligne, rétorqua l’étalon, très peu motivé à réfléchir alors qu’on le grondait sans raison apparente.

-  T’es vraiment un idiot en fait ! Je m’absente presque une semaine entière, et en revenant, je découvre que Pinkie est aussi à la ramasse qu’avant mon départ. T’as été capable d’oublier de lui présenter tes excuses en aussi peu de temps ?! »

Un silence s’installa aussitôt que Rainbow Dash eu finit sa phrase. Le retour de son oublie mis complètement Drawlife au dépourvue, l’empêchant de répondre aussitôt, mal à l’aise.

« Pff, j’en étais sûre, t’as carrément rien essayé je parie.

-  Hey ! Ne vas pas croire ça, c’est juste que … riposta-t-il pour tenter de se défendre, malgré les entorses qui lui prenait l’estomac tellement il avait honte de lui.

-  J’ai tord peut être ? demanda la pégase d’un œil suspicieux.

-  Heu … non … pas vraiment …

-  Je commence à comprendre Twilight, faut vraiment te tenir en laisse pour que tu fasses les choses dans le bon sens.

-  Je suis désolée, mais …

-  Meh, garde les pour Pinkie tes excuses. D’ailleurs, vu que t’allais pas faire quelque chose de très important apparemment, on va aller à la pâtisserie régler ça tout de suite, je te jure que ça va pas traîner plus longtemps cette histoire.

-  C’est bon, je te suis, inutile de me traîner comme un sac de foin … »

Drawlife n’appréciait pas la façon dont le traitait Rainbow Dash, mais dans un sens, il la comprenait.

Il n’arrivait pas à croire qu’il ait pu oublier aussi purement et simplement Pinkie Pie, il s’en trouvait totalement honteux. Il pouvait certes trouver une excuse comme le fait que son esprit c’était focalisé sur l’exposition, ou que rien n’avait pu lui rappeler la ponette rose, mais cela n’aurait servit à rien face à la pégase aux crins prismatique, qui était visiblement très remontée face à cette imposture. En témoignait d’ailleurs ses nombreuses plaintes sur sa vitesse, le forçant à adopter un trot rapide et épuisant.

Ainsi, ils arrivèrent rapidement devant le Sugar Cube Corner, et observant la façade du bâtiment, Drawlife ne put s’empêcher de trouver assez incongrue la différence entre l’aspect d’un gâteau alléchant de la pâtisserie, alors que seuls les reproches l’attendaient à l’intérieur. Qui plus est, Rainbow Dash invita assez sèchement l’étalon à entrer, rendant la pégase de plus en plus antipathique aux yeux de l’étalon. Il pouvait bien comprendre qu’elle lui en veuille, mais il n’avait vraiment pas besoin d’une deuxième Twilight qui lui souffle sans arrêt dans les naseaux, aussi entra-t-il sans se faire désirer, bien décidé à régler sa faute rapidement. Une fois à l’intérieur, Drawlife ne reconnaissait pas l’endroit ; il faut dire qu’il n’y était entrée qu’une seule fois, lors de l’anniversaire de Sweetie Belle, et voir l’endroit comme une vrai boutique de sucrerie et non comme une salle de fête changeait beaucoup la vision qu’on avait de l’endroit.

Sûrement alerté par la clochette qui lâchait ses dernières notes, une silhouette entra dans la pièce par un portillon à double battant, les sabots traînant la mine blasée de leur propriétaire. Drawlife avait beau identifier cette ponette intégralement rose, il avait beaucoup de mal à la reconnaître comme la Pinkie joyeuse et parfois agaçante qu’il avait vu auparavant. Là où il aurait assimilé la jument à une balle rebondissante, il avait devant lui quelque chose qui s’apparentait plus à un rocher : terne, peu réactive, ennuyeuse, même sa crinière semblait s’être aplatie, dégonflée de toute joie. En la voyant dans cet état, Drawlife prit pleinement conscience de ce que lui reprochait Rainbow Dash, et ne doutait pas que c’était effectivement de sa faute. Il n’avait jamais été gentil avec elle, et cette horrible fois où il avait tenté de l’étrangler sous la colère avait du l’achever ; rien que d’y repenser lui donnait des hauts le cœur. Elle aurait très bien pu être simplement en colère, ou même désireuse de ne plus jamais le voir tout en faisant comme si de rien n’était, mais ce n’était sûrement pas raccord avec le tempérament sur-social de la terrestre.

Tel un automate, la jument rose se plaça derrière le pupitre qui devait certainement servir à accueillir les clients, avant de lâcher d’une voix sans entrain le refrain d’accueil de la boutique ; elle ne prenait même pas la peine de relever la tête, ce qui incita Rainbow Dash à se poster juste devant elle.

« Salut Pinkie, je t’amène quelqu’un qui aimerait de dire quelque chose.

-  Oh c’est toi Dashie … c’est gentil d’être venue, murmura la ponette après avoir daigné lever les yeux vers son amie, ça fait longtemps que je t’ai pas vu …

-  Ben, je suis pas partie si longtemps que ça, même pas six jours le temps d’une course à Stalliongrad, se justifia la pégase avant de se reprendre, mais on s’en fiche de ça, je t’ai amené l’autre zigoto derrière moi pour qu’il fasse ce qu’il aurait du faire depuis une plombe.

-  Qui ça ? » s’étonna Pinkie en penchant la tête sur le coté pour voir le fameux zigoto.

Son regard ne mis pas très longtemps à croiser celui de Drawlife, dont les oreilles se baissèrent de gène sous l’appréhension de la tâche que lui réclamais Rainbow Dash. Mais aussi improbable que pouvait être les réactions de Pinkie Pie, l’étalon ne s’attendait vraiment pas à qu’elle se mette à hurler à plein poumon, le son résultant aussi assourdissant qu’un cri de banshee, et encore moins qu’elle s’envole littéralement vers l’étage de la boutique avant de claquer fortement une porte. Drawlife n’était visiblement pas le seul étonné, la pégase au crin arc en ciel avait fait un bond en arrière face à la réaction de son amie, voletant à présent avec un visage médusé.

« Wow, même moi je l’avais pas vue venir celle là. Tu t’es mis dans un sacré pétrin toi.

-  C’est sensé me rassurer ça ? demanda circonspect l’étalon en levant un sourcil.

-  Qu’est ce qu’il se passe ici ? vociféra une voix féminine, bientôt suivie de pleurs hystériques.

Aussitôt, une autre ponette sortie de la même pièce d’où était apparu Pinkie Pie, en claquant presque les portillons. Cette jument était plus âgée, plus rondouillette aussi, et arborai une crinière magenta coiffée de la même manière qu’une garniture de petit gâteau. Drawlife la reconnu comme étant la propriétaire de la pâtisserie, et constata aussi que les pleurs venait des deux très jeunes poulains qu’elle avait installé dans des harnais attachés sur chacun de ses flancs. Sans surprise à l’écoute de la tonalité de sa voix, elle était aussi furieuse que l’était Rainbow Dash quelques minutes plus tôt, et ne tarda pas à repérer le couple présent dans sa boutique, plus particulièrement l’étalon, lequel eu droit à des gros yeux de surprise de la part de madame Cake.

« Vous ? tonna-t-elle à l’encontre de Drawlife après s'être remis de son effarement. Que faites-vous ici, et que venez vous de faire à Pinkie Pie ?

-  Mais rien du tout ! se défendit promptement l’étalon, piqué au vif qu’on l’accuse au moindre problème rencontré. C’est elle qui a hurler à s’en déchirer la glotte avant même que je fasse quoique ce soi !

-  Voyez-vous ça ? J’imagine donc que pour vous, sa réaction est totalement injustifiée.

-  Vous insinuez quoi au juste ?

-  Hey, pas la peine de s’énerver ! intervint Rainbow avant que la pâtissière bleue ne réplique à nouveau, plaquant un sabot sur le museau de l’étalon pour le muter. Désolé Madame Cake, c’est moi qui ai amené Drawlife ici, mais je pensais pas que Pinkie réagirait comme ça en le voyant. »

Les mots de la pégase semblèrent suffire à calmer la pâtissière, qui soupira alors de lassitude tandis qu’elle cherchais à calmer ses enfants en les berçant. Drawlife quand à lui grogna en dégageant ses lèvres de la surface dur du sabot de la jument ailée.

« Très bien Rainbow Dash, mais qu’espérais tu en amenant ce personnage ici ?

-  Qu’il présente ses excuses, comme il aurait du le faire depuis longtemps.

-  Et tu pense que ça suffira à rendre notre Pinkie d’avant ? Elle est sérieusement atteinte, je ne me souviens pas l’avoir déjà vu dans un état pareil.

-  Ben je la connais plutôt bien, et je sais qu’il ne faut pas grand-chose pour qu’elle retombe du coté rose de la force. Si celui là commençait par lui expliquer qu’il regrette ce qu’il a fait, indiqua-t-elle d’un simple hochement de tête, il y a des chances pour qu’elle se reprenne assez vite.

-  Si tu le dis …, accorda la ponette outremer avant de reporter son regard sur Drawlife, dans ce cas, j’espère que vous n’irez pas empirer les choses.

-  Je pense avoir fait suffisamment de dégâts pour ne pas souhaiter en provoquer d’autre, indiqua froidement l’intéressé, mais merci de votre soutien. »

Sans même en avoir pris conscience, l’altercation avec la pâtissière avait remonté Drawlife, à un tel point qu’il avait dépassé la crainte de se retrouver face à Pinkie Pie ; Rainbow n’avait d’ailleurs même pas eu besoin de le traîner à l’étage étant donné qu’il l’avait devancé, pressé d’en finir. Seulement, la précipitation n’apportant pas grand-chose, c’est la pégase qui finit par le guider là où se terrait la jument rose. Rainbow Dash répéta à l’étalon ce qu’elle attendait de lui, en lui spécifiant qu’il ne sortira pas de cette chambre tant que son amie n’aurai pas retrouvé le sourire, ajouté à quelques menaces qui se voulait intimidante, mais dont Drawlife ne tint pas compte, agacé qu’on le traite comme le dernier des incapables.

L’étalon commença sa tâche par quelques appels à la jument rose, mais comme il pouvait s’y attendre, aucune réponse ne lui vint. D’un sabot décidé, il appuya alors sur la poignée qui loquait la porte avant de s’arrêter à mi chemin, ses oreilles ayant entendu une sorte de chuintement rapide venant de l’intérieur. Drawlife communiqua un regard inquiet à la pégase, qui ne lui répondit que par un haussement d’épaule indifférent et un mouvement de tête pour l’encourager à continuer ce qu’il était en train de faire. Légèrement refroidi par ce son étrange, l’étalon gris poussa plus prudemment la porte jusqu’à ce qu’elle soit complètement ouverte, la chambre de Pinkie Pie bien en vue.

Et, étrangement, l’endroit était presque vide, comme si Pinkie avait été cambriolé ; de ce que Drawlife pouvait voir, il n’y avait qu’un coffre à jouet destitué de son contenu, et une coiffeuse vierge de tout ses accessoires. La succession de faits étranges se mêla à l’attitude loufoque de Pinkie, et Drawlife se dit alors que rien de ce qui était inhabituel n’était vraiment à craindre de la part de la ponette, il se décida donc, à la satisfaction apparente de Rainbow Dash, de passer cette porte toute banale pour discuter avec Pinkie comme à une ponette tout ce qu’il y avait de plus normale.

C’était sans compter sur ce choc à la fois fulgurant et moelleux venu de nulle part qui le fit vaciller sur le coté, avant que d’autres ne se succèdent, toujours de la même direction et en plus grand nombre, forçant l’étalon à utiliser comme abri de fortune le coffre repéré plus tôt, et claquant violemment la porte au passage.

« Va-t-en méchant ! Tu n’as rien à faire dans ma chambre, c’est une zone privée ! hurla une voix de l’autre coté de la pièce, dont Drawlife reconnu tout de suite sa propriétaire.

-  Pinkie Pie ! Qu’est ce que tu fais !  beugla à son tour l’unicorne, toujours accroupi derrière le meuble creux pour se protéger d’une pluie de coussins, de peluches et de tout autre projectiles mous.

-  Moi ? Mais je sais pas ce que j’ai fait, c’est ça le problème !

-  Quoi ?!

-  Quoi quoi ?! C’est à toi de me dire quoi !

-  Pinkie, je ne comprend pas !

-  Mais moi non plus je comprends pas !! J’ai rien fait de différent, j’ai fait tout-tout comme d’habitude comme avec tout le monde, mais avec toi … ! »

Drawlife ressentit quelques secondes de calme, mais du abandonner très rapidement l’idée de quitter son abri lorsque cette fois ci, une tarte s’écrasa dans une explosion de fruit contre le mur derrière lui.

« Ça … veut … pas … mar … cher !! » brailla la ponette rose en accompagnant chaque syllabe d’une tarte tout aussi "meurtrière" que les précédentes.

Finalement, Pinkie semblait bien en colère contre lui, même si l’unicorne la trouvais sacrément perdu dans ses propos ; et c’est bien ce qui l’inquiétait. En l’état il ne savait pas du tout comment l’aborder pour qu’il puisse présenter ses excuses en bon et du forme, le brailler tout en restant cacher comme un lâche n’étant sûrement pas ce qui était de plus intelligent. Néanmoins, il fallait tout de même qu’il essaye quelque chose, n’importe quoi.

« Pinkie, s’il te plaît, on pourrait peut être discuté, je te jure que je ne te veux pas de mal, lança Drawlife en profitant d’une accalmie.

-  Nan ! couina-t-elle en réponse, t’es qu’un menteur, un méchant et un gros menteur !

-  Raah, ne me complique pas la … »

L’étalon gris voulu sortir la tête de derrière le coffre pour avoir la ponette en visuel, et tenter de la convaincre en montrant un visage sincère, mais ça ne lui permit que de voir un énorme orifice pointé sur lui, dont l’intérieur était remplis de toute sorte de jouets et de … confettis ? Le crépitement qui suivit sa découverte enclencha un réflexe salvateur de ses pattes antérieures, le propulsant derrière la coiffeuse, seul autre abri disponible à portée de sabot. De là où il se trouvait à présent, la vue du coffre à jouet renversé contre le mur, et recouvert de toute sorte d’objet de fête lui laissait voir la tragédie ridicule qu’il l’aurait attendu si ses réflexes de survit n’étaient pas intervenues. Un coup d’œil vers la position de Pinkie Pie lui révéla l’objet de ce massacre : un énorme canon bleu sur roue encore fumant, que Pinkie s’affairait avec peine à recharger derrière sa forteresse improvisé avec tout les autres meubles de sa chambre.

« Mais tu es complètement malade ! hurla à nouveau Drawlife, complètement furieux des méthodes extrêmes de Pinkie, même si elles n’étaient pas létales … pour l‘instant.

-  Oui je suis malade ! Absolument ! Ça se voit pas ?! C’est ce qu’arrête pas de me dire mes généraux Ursawar et Teddynamite ! Et ça c’est parce que t’es ici à me vouloir du mal alors que j’ai rien fait depuis la fête de Sweetie Belle ! » répliqua la ponette dont les cris de colère se révélait en fait être des pleurs de pouliche.

Drawlife sentait clairement la tension monter des deux cotés, la situation échappant complètement à son contrôle, et pourtant, il n’avait clairement pas l’intention d’abandonner. Cependant, le vacarme que la ponette rose et lui provoquait n’avait sûrement pas manqué d’alerter Rainbow Dash, qui pénétra brusquement dans la chambre tout en ayant violemment ouvert la porte, ses yeux cachant difficilement la panique.

« Wow-wow-wow, y se passe quoi ici ? Pourquoi vous criez comme ça tout les d … ?! »

Aussi fulgurante que son entrée, une tarte vint s’écraser contre le visage de la pégase, l’interrompant brutalement dans son élan. Sûrement par réflexe de survie, celle-ci s’envola vers le plafond et y resta en suspension, s’ébrouant pour enlever les quartiers de fraise qui lui collait au duvet du visage. De sa position, Drawlife pouvais l’observer se nettoyer furieusement la figure, et il s’était même risqué à se redresser pour constater que la jument rose en faisait de même. Le calme ne dura néanmoins qu’un court moment, car un simple coup d’œil de Pinkie dans sa direction lui remit la rage dans les pattes, reprenant ses lancers de jouets et de tartes.

« Pourquoi tu l’as amené dans ma chambre Rainbow Dash ? gémit-elle colériquement entre deux lancers, je croyais que t’étais ma meilleure amie ?

-  Évidement que je suis ta meilleur amie ! Mais je pensais pas que t’allais réagir comme si t’avais un énorme dragon furieux en face de toi.

-  Alors fait le sortir d’ici ! hurla la ponette au creux de l’oreille de la jument ailée après être apparue dans son dos. J’ai pas envie qu’il me fasse encore du mal !

-  Aaah !! Mais qu’est ce que … ! paniqua la pégase bleue qui failli s’écraser au sol sous la surprise. Pinkie ! Calme-toi ! J’essaie juste de t’aider !

-  NAN ! Tant qu’il sera là je me calmerais pas ! Et pourquoi je me calmerai d’abord ? Il s’est calmé lui à la fête de Sweetie Belle ? Et puis en plus je suis calme là ! TOUT CE QU’IL Y A DE PLUS CALME !!

-  PINKIE !

-  RAINBOW DASH ! Laisse-moi gérer ça ! » tonna Drawlife pour se faire entendre entre les cris grandissants des juments.

L’intervention de l’unicorne fut suffisamment surprenante pour calmer Pinkie et Rainbow, et lui-même n’en revenais pas de ce soudain gain d’autorité. La pégase, qui n’était évidement pas du genre à se laisser dicter ses actions protesta, mentionnant l’incapacité latent de l’étalon, mais celui-ci campa sur sa position, haussant le ton plus qu’elle, refusant catégoriquement de laisser deux amies s’entre-déchirer par sa faute. Il n’hésita même pas à la renvoyer à l’extérieur de force, via sa magie pour rester hors de portée des assauts repris par la ponette rose depuis sa forteresse improvisée. Cette dernière n’avait d’ailleurs pas l’air d’avoir été refroidis par la gaillardise nouvelle de Drawlife, mais l’intervention de Rainbow Dash l’avais réalité chamboulé : entre deux projectiles, Drawlife pouvait voir des larmes perler des yeux enragés de la ponette. Il était vraiment temps qu’il en finisse vite.

A la recherche d’une solution efficace, il repassa son regard sur le capharnaüm créer par le canon de la jument, et vit un chiffon blanc, objet qu’il attira à lui par télékinésie aussitôt ; vue que Pinkie Pie agissait comme si elle était en guerre, peut être qu’en employant la méthode de reddition du drapeau blanc, elle accepterait une trêve. Malheureusement, tout juste avait il agité bien en évidence son tissu de salut, qu’une volée de billes multicolore gicla juste devant lui, passant au travers du chiffon. Les trous résultant de cette attaque formèrent un faciès mécontent étrangement précis, tout autant que la réponse de la ponette en furie.

« Je ne suis pas venue ici pour subir tes gamineries Pinkie, clama Drawlife sur un ton de menace absolument pas dissimulé car fatigué de se retenir, alors tu va te calmer rapidement, sinon … !

-  Sinon quoi ? coupa-t-elle brutalement avec un ours en peluche passant près de la tête du poney cornu. Tu va me mettre une fessé ? Approche un peu si tu l’oses !

-  Tu l’aura voulu ! »

Les réponses aux provocations de chacun furent très rapides ; tandis que Pinkie avait changé d’armement pour un espèce de tube qu’elle enfourchait sur une de ses épaules, Drawlife se concentra sur tout les oreillers et coussins qu’avait jeté Pinkie jusqu’ici, et les assembla en rang serré afin de créer un mur robuste lévitant devant lui, ce qui allait lui permettre de lancer l’assaut sur la forteresse de la ponette.

L’idée lui était venue en repensant à Twilight Sparkle et sa méthode de classement des livres ; elle les faisait toujours léviter en ligne ordonnée, sur plusieurs niveaux, comme on étalerait des cartes pour lire l’avenir, afin d’avoir une vue d’ensemble des couvertures. Bien évidement, l’unicorne n’avait pas l’aisance magique de la bibliothécaire, ce qui l’obligea à maintenir l’essentiel de sa concentration sur sa construction pour ne pas qu’elle cède aux projectiles ravageur de Pinkie Pie, au détriment de sa vitesse de déplacement. Et malgré ses efforts, sa création bien structurée à ses débuts, par réflexe artistique, devint rapidement un amas grossier et sommairement solide.

Inexorablement, l’unicorne remonta la ligne de front jusqu’à ce qu’il ait les fondements de la forteresse de Pinkie à ses sabots. A ce moment là, la ponette hystérique avait arrêté son bombardement, ce qui laissait supposer qu’elle s’était cachée après son échec pour faire reculer Drawlife. Dans un dernier effort magique, il propulsa les restes de sa protection tel un bélier de siège, créant une ouverture entre un lit et une commode, et couvrant les derniers centimètres de son avance. Complètement essoufflé par sa performance, Drawlife profita de l’accalmie pour observer dans quoi s’était protégée la jument rose depuis le début. Le moins qu’il pouvait dire, c’est qu’elle avait un sens de la mise en scène hors norme ; sa fortification singeait les remparts d’un château, se servant astucieusement de tabouret afin de créer des tours de guet pour ses peluches. Sur le coté, il pouvait d’ailleurs voir ce qu’elle avait élu comme ses généraux, trônant au dessus de la masse des autres peluches ‘’soldats’’ ; Ursawar était certainement la représentation plus simplette d’un ursa minor, avec un chausson en guise de casque. Quand à son collègue, Teddynamite … l’étalon avait peur d’identifier ce qui lui servait de bâton de dynamite maintenu en bandoulière comme … des tampons.

Détournant brusquement son attention pour oublier cette vision dérangeante au plus vite, Drawlife focalisa sa recherche sur Pinkie, qui évidement s’était caché à la vue de l’étalon dans sa forteresse. Toutefois, les possibilités de se dissimuler dans la pièce étaient restreintes, si bien que l’étalon se demanda si elle ne s’était simplement pas enfuie de sa chambre. L’idée resta en suspens, avant d’être vite abandonné ; Rainbow Dash était encore certainement derrière la porte à les écouter, elle lui aurait fait remarquer si elle s’était enfuie. Il baissa donc son museau jusqu’au plancher de bois pour tenter de voir des sabots trépignant de nervosité, mais rien au premier coup d’œil. Il re-balaya alors un peu plus précisément du regard les environs, et distingua un mouvement sous une commode logée contre le mur droit. Sans se poser plus de questions, il alla inspecter ce logement très étroit, la tête toujours à ras du plancher. Était-ce raisonné de vérifier un refuge trop petit pour un poney adulte ? Avec Pinkie Pie, Drawlife s’était résout à envisager l’impossible. Non, ça c’était presque normal. Ce qui l’était moins, à présent qu’il se trouvait à proximité de la cachette, c’était les yeux étranges présents dans le petit bout de pénombre. Il les observa assez longtemps, intrigué … enfin il essaya, étant donné que les iris paraissaient rarement synchronisé. A quoi pouvait bien jouer Pinkie Pie cette fois ?

« Bon Pinkie, sort de là, ce n’est pas drô … »

La compréhension de ce qui l’attendait arriva aussi vite que la mâchoire gluante bondissant vers lui. Suivit rapidement un claquement, accompagné d’une douleur au museau, amplifiée par l’adrénaline bouillonnant dans le sang de Drawlife suite à l’effet de surprise. Il cria par réflexe primal, rebondit en arrière, trébucha sur un jouet de charrue, et finalement, culbuta une des tours de guet qui s’effondra aussitôt sur lui, ainsi que ses occupants, l'assommant sur le coup.

Quelques instants s’écoulèrent en silence, jusqu’à ce que de la pile de peluche en tout genre émerge une tête grise, et agrippée à cette tête, une petite créature verte. D’un mouvement de sabot, Drawlife le détacha en poussant un grognement de dégoût, puis observa s’étaler sur le sol et se relever maladroitement ce qu’il lui avait fichu une trouille bleue. Il s’agissait d’un petit saurien, à peine plus grand qu’une moitié de patte, et possédant un air hagard. Et à en juger par son absence de dent, il ne faisait aucun doute que ce n’était qu’un bébé, si bien que même s’il avait serré très fort, le petit reptile ne pouvais pas vraiment blesser. Sérieusement, il avait paniqué pour si peu ?

Toutefois, cette péripétie idiote l’avait vidé des dernières forces qu’il lui restait, le rendant trop las de se libérer de l’éboulis d’ourson, de fée des bois et de lapin qui le recouvrais.

Ainsi le terrible Drawlife était à la merci de la grande Pinkie Pie.

C’est du moins ce que l’étalon lisait dans les yeux de la ponette, apparue d’il ne savait où, avançant lentement parmi les débris de sa forteresse vers sa proie, son regard austère et triomphant rappelant furieusement l’alicorne lunaire lors de sa venue à l’exposition de la veille, ce qui n’était pas pour mettre Drawlife le plus à l’aise du monde. Pas plus quand la jument approcha d’un mouvement vif son museau rosâtre de celui de l’étalon, provoquant un petit sursaut de frayeur de ce dernier.

« J’ai gagné. Dit-le, annonça fermement la jument tout en fronçant les sourcils.

-  Hein ? »

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« Purée, mais ils font quoi là dedans ? »

C’est ce que se demandait Rainbow Dash depuis que Drawlife l’avait viré de la chambre de Pinkie. La pégase n’avait d’ailleurs pas vraiment apprécié le geste, ni qu’il lui donne limite des ordres, mais s’il s’était décidé à s’excuser auprès de Pinkie et qu’il obtenait des résultats, elle était prête à oublier. Le problème, c’est que ça n’avait pas l’air de bien se dérouler à l’intérieur. Cela avait passé du vacarme aux échanges verbaux, ponctué par des silences assez courts ; Rainbow avait eut plus l’impression qu’ils se battaient qu’autre chose.

Toutefois, depuis un cri de la part de Drawlife et un bruit qui s’apparentait à un effondrement, la jument cyan n’avait plus rien entendue. Et cela durait depuis un petit moment. Pour elle, il pouvait s’agir d’un des deux qui se serait assommé en tombant, et elle avait peur qu’il puisse s’agir de Pinkie. Et si cet idiot l’avait encore frappé très fort ? Il ne savait donc pas se maîtriser ? Le doute perlant en une grosse boule à sa gorge, Rainbow Dash décida d’ignorer « l’ordre » donné plus tôt par Drawlife et d’entrer voir ce qu’il se tramait.

« Rainbow Dash, t’es là ? » appela une voix féminine depuis la cage d’escalier

La diction de son nom interrompit la pégase, et elle poussa un juron étouffé en reconnaissant la voix de Raindrop ainsi qu’en craignant la possible raison de sa venue. Une pégase jaune vif apparue sur le dernier palier, observa de gauche à droite avant de repérer et de s’approcher de sa collègue, la mine semi satisfaite.

« Qu’est ce qu’il y a Raindrop ? Me dis pas qu’ils ont encore besoin de moi là haut ? »

-  Désolé Rainbow Dash, mais tu sais bien que Cloudsdale a besoin de tout les pégases disponibles pour rattraper le cycle pluvial, justifia la jument tout en remettant en place une de ses mèches bleu ciel, et comme la météo de l’Everfree est sacrément calme en ce moment, on est obligé de tout faire nous même.

-  Pff, tout ça à cause de ces prétentieux de Stalliongrad ! grogna de plus belle la pégase en battant les ailes de frustration. Y’a vraiment rien qui tourne rond en ce moment, ça me rend dingue.

-  Comment ça ? Quelque chose ne va pas ici ?

-  Ben y’a l’autre là, Drawlife, précisa Rainbow Dash en pointant la porte derrière elle avant de ramener son sabot vert le crane, je sais pas comment il tourne là haut, mais … »

Soudain, alors que l’agacement de la pégase était en phase de lui faire oublier son inquiétude gagné plus tôt, un énorme hurlement retentit dans la chambre, faisant se retourner net Rainbow Dash, ses yeux formant deux grands disques de stupeur. Raindrop demanda, tout aussi surpris qu’elle, ce que c’était, mais la jument ciel répondit par le négatif, tout en tendant l’oreille pour comprendre ce qu’il pouvait se passer : elle avait déjà eu assez d’une tarte au visage, hors de question d’en recevoir une autre, ou pire …

Le cri ne s’était toujours pas tut, mais plus il durait, et plus Rainbow Dash comprit que ce n’était pas un cri de douleur ou de frayeur, mais un rire particulièrement sonore et aiguë, cadencé par des tentatives de paroles inaudible. Drawlife aurait-il réussi à faire rire Pinkie ? Cette pensée fut plus forte que sa prudence, et l’excitation de voir de nouveau son amie joyeuse l'entraîna dans la chambre, ouvrant à tombeau ouvert la porte tout comme la première fois.

A ce moment là, elle était prête à sauter au cou de son amie sans réfléchir, trop heureuse de sa guérison ; elle avait d’ailleurs commencé à fléchir ses pattes et déployé ses ailes alors qu’elle la cherchait du regard. Mais ce qu’elle vit eu tôt fait de la bloquer dans son élan, son freinage manquant même de basculer le corps de la pégase par-dessus ses pattes avants.

Pinkie Pie était effectivement en train de rire, elle avait même retrouvé des couleurs et sa crinière sautait au rythme de ses éclats de rire. Mais ce qui avait complètement surpris Rainbow, c’était que Drawlife était aussi en train de s’esclaffer, se roulant même sur le dos parmi un tapis de jouets, en se tenant fortement les côtes. Son rire était plus aiguë que le laissait supposé sa voix habituelle plutôt grave, se confondant ainsi avec celui de la fêtarde. D’habitude si ronchon et antipathique, il était vraiment bizarre pour Rainbow Dash de voir l’unicorne dans cet état.

« La vache, tu nous avais pas habitué à ça toi, fit remarquer la pégase cyan après s’être remise du choc, tandis que les deux poney hilares se calmaient petit à petit.

-  Je-hé hé hé… c’est juste que-ouuuuh … c’est juste que … ho laisses tombé, ce n’est pas … ouf … pas important, lui répondit-il, se calmant presque instantanément comme si Rainbow avait dit quelque chose de mal.

-  Si va-y, j’aimerais bien savoir ce qu’il s’est passé, insista-t-elle avec un sourire narquois.

-  Il peux pas, c’est un secret entre nous, quelque chose qu’on peut pas dire maintenant. Oh, et coucou Raindrop !  réfuta tout sourire la ponette rose, posant amicalement un sabot sur l’épaule gauche de Drawlife.

-  Ça va Pinkie, ce n’est pas non plus … ! répliqua ce dernier avant de se taire d’effroi lorsque Pinkie pointa son museau contre celui de l’étalon, le regard menaçant.

-  Un se-cret ! répéta-t-elle plus fermement.

-  Ok-ok, je ne dirais rien, promis » céda l’unicorne en louchant sur les yeux de la jument bouclée.

Rainbow Dash lui sauva rapidement la mise, car elle avait finalement craqué pour un câlin amical avec son amie nouvellement rétablie, chose auquel elle désespérait depuis plusieurs jours. Pinkie lui rendit la pareille, jamais avare d’une embrassade. Rainbow garda la position, elle se sentait incapable de la lâcher tant que son cœur n’avait pas la garantie que sa meilleure amie allait bien. Il fallut qu’elle entende un raclement de gorge pour qu’elle se rende compte qu’elle devait paraître ridicule, toussant à son tour lorsqu’elle lâcha Pinkie Pie. Drawlife était en train de la regarder d’un air gêné, toujours étalé dans ses jouets, et Raindrop, qui les observait tout les trois un sourcil à demi levé, semblait ne pas comprendre ce qu’il se déroulait sous ses yeux.

« Dites, on peut me dire ce qu’il se passe ici ? Comment ça se fait que ce soit bordelique ici et que vous deux, demanda Raindrop en désignant Pinkie et Drawlife du sabot, vous rigoliez il y a à peine quelques secondes ?

-  Et bien en fait c’est plutôt simple, … commença Drawlife avant que Pinkie Pie l’interrompe en se plantant juste devant la pégase jaune.

-  Uuuuuun secret !  hulula la ponette rose sur une note étrange.

-  Euh … ouais, contente de te retrouver Pinkie en tout cas, continua Rainbow Dash, ça veut dire que Drawlife à fait ses excuses ?

-  Ça n’as pas été évident, tu peux me croire, confirma l’étalon en essayant de se relever sur son tapis de jouet.

Rainbow Dash voyait bien qu’en effet, Drawlife avait l’air extrêmement fatigué, il lui faisait penser à Twilight lorsqu’elle utilisait des sorts très puissants : une respiration saccadée, un début de cernes sous les yeux, et une difficulté à se tenir sur ses pattes. Elle cru même qu’à un moment il allait trébucher, et s’empressa de lui apporter une épaule sur laquelle s’appuyer, aider par Pinkie qui s’inquiéta soudainement de l’état de l’étalon, mais celui-ci refusa amicalement l’offre.

« Ça ira, ne vous inquiétez pas, mais là j’ai vraiment toutes les raisons d’Equestria d’aller au SPA.

-  C’est vrai que je t’ai empêché d’y aller tout à l’heure, tu veux que je t’accompagne ?

-  Ça ira je te dis, je peux encore marcher, répliqua-t-il en effectuant quelques pas pour lui prouver ses dires.

-  Tu t’améliores mon gars, s’offensa l’athlète après avoir claquer sa langue, mais t’es toujours en mode "je veux l’aide de personne" à ce que je vois.

-  En parlant d’aide, intervint Raindrop en s’approchant de la porte, il y a Cloudsdale qui demande la notre, n’oublie pas. Tu sais autant que moi ce qui se passerait si on ne rétablissait vite pas l’équilibre pluvial.

-  Oui, c’est bon, j’arrive, grommela la pégase cyan.

-  Qu’est ce qu’y se passe Dashie ? T’as pas l’air contente tout d’un coup, s’inquiéta Pinkie Pie.

-  Bah, c’est une longue histoire. Pour faire court, c’est les pégases de Stalliongrad qui n’ont pas été capable de fournir de l’eau à Cloudsdale dans les temps, et comme ils étaient trop fiers d’eux pour dire qu’ils étaient trop nul pour y arriver, ben Cloudsdale a puisé toute sa réserve d’eau. Et le temps de trouver les pégases pour régler le problème il était déjà trop tard.

-  Et du coup, ils en appellent à tout les pégases pour qu’on puissent donner une bonne douche à toute les villes d’Equestria le plus rapidement possible, termina Raindrops sur un ton tout aussi agacé que sa colègue.

-  Ça veut dire que tu vas encore t’en aller pendant longtemps ? s’enquérra de moins en moins enthousiaste la ponette rose.

-  C’est pas que ça me fait super plaisir, mais ouais, acquiesça la pégase cyan.

-  Alors revient vite, sinon tu va rater plein-plein de trucs géniaux ! D’ailleurs, qu’est ce que je fais encore là moi, y’a plein-plein de trucs géniaux qui m’attendent ! » s’exclama la fêtarde avant de filer comme un coup de vent hors de sa chambre.

La vélocité de Pinkie finit de rassurer la pégase : elle était à nouveau au meilleur de sa forme, et nul doute qu’elle allait les gratifier d’un événement festif sortie de son chapeau. Malgré que la corvée météo avenir ne l’enchantait guère, elle se sentait un peu plus serein dans sa tête, l’avenir lui paraissait moins gris. Néanmoins, il y avait un dernier détail dont elle voulait s’assurer. Elle était moins à l’aise avec ce sujet, surtout qu’elle se trouvait moche de l’avoir passé au second plan. Pour s’épargner des remarques, elle demanda à Raindrops de prendre les devants pour se retrouver en tête à tête avec Drawlife, qui prenait déjà le chemin de la sortie voyant qu’on ne s’occupait plus de lui.

« Hé, Drawlife, on peut parler encore quelques secondes.

-  Qu’est ce qu’il y a ? réagis-t-il en pivotant la tête.

-  C’est au sujet de Fluttershy. »

---

Le lac de Ponyville n’était pas très grand, mais il avait pour lui d’être plutôt isolé, ce qui en faisait un endroit particulièrement paisible, le coin idéal pour le poney qui rechercherait la tranquillité, avec pour seule compagnie le bruit du vent et le frémissement des roseaux. Près d’un de ses rivages flottaient trois petits objets, se dandinant au gré des remous causés par la brise. En leur sommet était attaché un fil, qui semblait tendu en direction de la terre ferme.

« Je m’ennuiiiie ! gémit une jeune pégase orange, laquelle tenait une canne à pêche du bout de ses sabots avants.

-  Personne n’t’as dit qu’c’était palpitant la pêche, Scootaloo, lui rétorqua sa voisine jaune paille en agitant son sabot de réprobation, faut savoir être patient.

-  Peut être, mais en attendant, on a toujours rien attrapé depuis une demi heure. C’est pas en rentrant bredouille qu’on pourra espérer avoir des marques de beauté de pêcheur.

-  Si t’arrêtait d’bouger et d’te plaindre aussi, tu fais peur aux poissons. Fait comme Sweetie Belle, elle n’bouge pas depuis tout à l’heure.

La pégase profita de l’invitation à quitter son attention du flotteur sans vie et pivota la tête afin observer son autre voisine, pour voir qu’en effet, la jeune licorne n’avait pas bouger d’un ongle depuis qu’elles avaient démarré leur séance de pêche, avec l’aide du père de la celle ci. Toutefois, Scootaloo la trouvait un peu étrange, Sweetie Belle n’avais pas l’air juste calme, elle paraissait aussi songeuse, à en juger par ses yeux jades qui ne fixait pas réellement son flotteur. Afin d’en avoir le cœur net, et aussi pour tromper l’ennuie qui la gagnait de plus en plus vite, la petite pégase agita son sabot devant le visage de son amie, ce qui eu pour effet immédiat de la faire sursauter, avant de regarder d’un air un peu perdu la pouliche orange.

« Ça va Sweetie Belle ? T’as pas l’air dans ton assiette, demanda la petite pouliche au crin violet.

-  C’est rien, je pensais à un truc, murmurra Sweetie Belle.

-  Ce truc, ça s’rait pas cet étalon qui traîne avec ta sœur par hasard ? demanda d’une façon presque moqueuse Applebloom après s’être penché pour voir la licorne.

-  Hey ! Comment tu as deviné ?

-  Sérieusement ? s’exclama la terrestre d’un air indigné. Fais pas ton innocente, depuis qu’t’as croisé cet étalon, t’arrêtes pas d’nous parler d’lui et d’Rarity comme s’ils allaient bientôt s’marier, et ça presque tout les jours … nan, vraiment tout les jours en fait, conclut-elle après un petit temps de réflexion.

-  Ouais, c’est vrai ça, approuva Scootaloo comme si c’était une révélation pour elle, et maintenant que j’y pense, aujourd’hui t’en a pas du tout parler. C’est pas vraiment que ça nous manque, mais ça fait bizarre que tu ne dis plus rien maintenant. »

La petite licorne rougit un peu de honte face aux aveux de ses deux amies. Il était vrai qu’elle n’avait pas montré beaucoup de réserve depuis qu’elle s’était mis en tête que Drawlife et sa grande sœur était tombé amoureux l’un de l’autre. Déjà que Rarity en faisait les frais, elle avait visiblement été aussi pénible avec Applebloom et Scootaloo. Mais comme l’avait fait remarquer cette dernière, ça n’avait pas été le cas aujourd’hui, étant donné qu’un événement de la veille avait bouleversé ses illusions.

« Laissez tomber les filles, je me suis trompé sur toute la ligne » soupira Sweetie Belle en reposant à nouveau son attention aux alentour du flotteur de sa canne à pêche.

A la façon dont les deux autres pouliches regardèrent la petite licorne, il était évident que sa réponse ne leurs convenaient pas vraiment. Pendant un instant, elles se fixèrent l’une l’autre, sans un mot, puis acquiescèrent finalement de concert, comme si elles avaient mentalement accordé leurs pensées.

« Tu sais Sweetie Belle, avec tout c’que tu nous a décrit concernant eux deux, j’ai un peu d’mal à croire qu’il y ai vraiment rien.

-  La même qu’Applebloom. Il s’est passé quoi pour que tu changes d’avis comme ça ?

-  Ben … ça s’est passé super vite, hésita un peu la jeune licorne en levant la tête pour fixer le ciel, hier après midi en fait. Rarity avait donné un rendez vous à Drawlife pour allez à Canterlot, pour ses tableaux apparemment. Ça faisait vachement chouette, avec un carrosse qui les amenait tout les deux, ma sœur qui avait fait une joli robe pour elle et un super costume pour Drawlife, en plus ils allaient bien ensemble.

-  Le costume et la robe ou Drawlife et Rarity ? demanda Applebloom, étrangement intéressée par ce détail.

-  Les deux ! Je vous jure, à ce moment là, je pensais vraiment que c’était "le" rendez vous romantique ! Et puis …

-  Et puis ? s’exclamèrent en chœur terrestre et pégase, les yeux dilatés par le désir d’en savoir plus.

-  Rarity lui a demandé ce qu’il pensait de sa robe, dévoila Sweetie Belle sur un ton de déception, et lui n’a fait aucun compliment, comme si il en avait rien à faire … »

L’étincelle d’envie qui pétillait dans les yeux des deux amies disparue aussi soudainement que leur bouche se referma, une déception non dissimulé désormais visible sur leur visage.

« Quoi … c’est tout ? s’étonna la pégase orange après un court silence.

-  Rarity était super déçu ! riposta la petite licorne. Je n’avais même pas eue besoin de la voir pour m’en rendre compte.

-  Venant d’ta sœur, c’est pas trop étonnant, annota Applebloom, mais ça fait un peu léger pour penser qu’y a rien. Tu les as revu depuis ?

-  Ben nan, papa et maman sont venue me chercher pas longtemps après que Rarity et Drawlife soient parties. Je sais même pas s’ils sont rentrés, et moi je sais pas si j’ai vraiment envie d’y aller, ma sœur avait vraiment l’air de m’en vouloir … j’ai pas envie de me faire gronder.

-  Dans c’cas, tu peux pas vraiment être sûre qu’ils sont pas fait pour être ensemble. Moi j’dis que si ça s’trouve, ils ont juste besoin d’un p’tit coup d’sabot. Et on pourrait très bien être ce p’tit coup, pas vrai Scootaloo ?

-  Heu, t’es sûre de toi ? répliqua cette dernière, peu convaincu de l’idée. T’as pas oublié ce qui s’est passé quand on a voulu "aider" ton frère et mademoiselle Cheerilee lors de la Saint Galopin ?

-  Nan, j’risque pas d’oublier ça … mais c’est pas pareil là, on n’a pas besoin de potion pour ces deux là, puisqu’il se connaissent déjà bien et sont déjà sortie ensemble.

-  Je sais pas trop. J’ai peur de tout faire rater » hésita Sweetie Belle.

Scootallo, qui n’était pas aussi experte en histoire de cœur qu’Applebloom, voyais bien que le défaitisme de Sweetie Belle gênait la jeune ponette, surtout avec la moue indignée que sa bouche formait. Elle semblait chercher une idée, jusqu’à ce qu’elle fixe quelque chose vers le lac.

« J’sais comment t’décider ! lâcha pleine d’enthousiasme la pouliche jaune en un petit bond. Si moi ou Scoot’ on est les premières à ferrer un poisson, on fait c’que j’ai dit, sinon, on laisse tomber. D’accord ? Ça laissera le hasard décider !

-  Mais c’est pas juste, vous avez plus de chance de gagnez à deux contre moi, se plaignit Sweetie Belle en levant les bras d’injustice.

-  Et qui c’est qui à un père qui lui a appris à pêcher ? Même à nous deux, Scoot et moi on n’est pas aussi doué qu’toi à c’jeu là.

-  Ah oui, c’est vrai ! D’accord alors.

-  Pff, t’as rien trouvé de mieux comme défi ? se plaignit la pouliche au crin volet en regardant de travers son amie terrestre.

Celle-ci ne répondit par rien d’autre que par un clin d’œil malicieux, forçant Scootaloo à la rejoindre elle et Sweetie Belle pour une nouvelle et longue période de silence, et ce sans vraiment comprendre le plan de la ponette paille.

Les minutes filèrent par dizaine, pendant lesquelles les seuls remous visibles sur la surface de l’eau étaient causés par la brise fraîche. La concentration pouvait se lire dans les yeux des trois pouliches, à l’exception d’une Scootaloo trépignant d’impatience, qui aurait préféré faire quelques figures sur sa trottinette plutôt que de se mouiller la croupe dans l‘herbe sans bouger, à attendre des poissons qui ne venaient jamais.

Quand soudainement, un des flotteurs s’enfonça sous l’eau dans une éclaboussure.

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Tout comme la dernière fois qu’il s’était rendu au SPA, c'est-à-dire l’unique fois, Drawlife fut accueilli dès son entrée par le léger son hypnotisant du carillon, ainsi que par les parfums orientaux de jasmin et d’ibiscus enrobant agréablement ses narines : les premiers pas suffisaient à donner le ton sur le degré de relaxation qui l’attendait. Avec un peu de recul, Drawlife se demandait ce qui avait bien pu le retenir de s’y rendre plus souvent, et même en y réfléchissant quelques instants, il ne trouvait pas de réponse. Ça n’était certainement pas dut à la ponette qui était venu l’accueillir ; une jument que Drawlife trouvait vraiment charmante, avec sa silhouette svelte et rosée, sa crinière turquoise rabattu en arrière par un ruban de soie blanc, et ses yeux en amande cerclant de joli iris d’un bleu profond et envoûtant.

« Bienvenue au SPA de Ponyville, salua-t-elle d’une voix chantante et cristalline, je m’appelle Aloé et je suis à la disposition de votre bien être. Que puis-je pour vous ? »

Pour mieux se présenter, Drawlife voulut se redresser, étant légèrement voûté par la fatigue, mais celle-ci étant trop forte, il ne parvint juste qu’à la montrer à la terrestre par des grognements de gêne. Il n’en fallut pas plus pour que la dénommée Aloé comprenne le besoin et prenne l’étalon en charge, non sans lâcher un commentaire accablé sur l’état de celui-ci. Drawlife tenta bien d’amoindrir la situation, mais la conscience professionnelle de la ponette rose ne tint pas compte de ses caprices.

« Vous n’êtes pas la première licorne qui vient nous voir après un gros effort magique, et je sais parfaitement ce qu’il vous faut. »

L’unicorne n’eut d’autre choix que de suivre docilement la jument, laquelle l’aida à parcourir le bâtiment malgré sa frêle personne. Lorsqu’ils eurent franchis le double battant les séparant de la salle de relaxation, Drawlife constata que l’endroit n’était pas très peuplé, seulement deux clients dont l’un était aidé par une employée pour un bain de boue ; aucun des deux ne correspondait à celle qu’il cherchait. Arrivée au milieu de la salle, Aloé fit le tour d’un banc de massage pour s’adresser à sa collègue.

« Dit Lotus, le bain d’eau chaude régénérant est prêt ?

-  Oui, j’ai changé l’eau juste après notre précédente cliente, elle doit être à bonne température maintenant. »

Quelque chose dans cette information mis la puce à l’oreille de Drawlife, il pensa immédiatement à Blow Passion. Même si prendre soin de lui-même avait prit l’ascendant sur son désir de discuter avec la licorne suite à son escapade à la pâtisserie, il n’avait pas oublié que c’était la vrai raison de sa venue ici. Et ne la voyant pas dans la nouvelle salle dans laquelle la ponette rose et lui avait pénétré, sa curiosité prit les devants.

« Dites moi, la cliente dont parlait votre collègue, ça n’était pas une licorne brune par hasard ?

-  Ce n’est pas moi qui m’en suis occupé, c’est Véra, communiqua la ponette en réfléchissant un sabot sous le menton, mais il me semble bien qu’elle était brune. Sa crinière était dans un de ces états quand j’y repense … .

-  Et elle ne s’appellerais pas Blow Passion part hasard ?

-  Oui, comment le savez vous ? Vous la connaissez ?

-  En effet. Elle est encore là ?

-  Navré, il me semble qu’elle est partie il y a environ une heure. »

Même s’il s’y attendait, Drawlife fut très contrarié par la nouvelle. Il s’en voulait déjà assez de s’être réveillé tard, il avait donc espéré pouvoir la voir ici, dans un lieu de détente, où il aurait été plus aisé de parler de ce en quoi il s’était engagé envers elle. Mais il fallait croire que le destin n’avait pas finit de lui jouer des tours ; il avait commis des erreurs qu’il se devait de rattraper, qu’il tardait à résoudre, il fallait évidement que ça choisisse le moins bon moment pour lui faire une piqûre de rappel sous la forme d’une pégase revancharde.

De son coté, la ponette dénommée Aloé l’avait finalement conduit vers le fameux bain chaud après qu’ils aient tout les deux changé de pièce. Ils se trouvaient à présent en face d’un grand bac en bois laqué, de quoi accueillir une bonne dizaine de poneys et assez profond pour s’immerger complètement, et dont une fine vapeur parfumée sortait de son contenu. Il était amusant de voir que l’eau n’en était pas vraiment, légèrement opaque et teinté de blanc par quelques produits de relaxation. La jument lui prit de se plonger dedans, en empruntant l’estrade qui surplombait le bac grâce à deux escaliers. Drawlife hésita un instant, plus habitué à prendre des douches pas nécessairement chaudes, comme pendant sa période fermière. Mais les mots rassurants de la ponette le décida à s’introduire dans le liquide.

A peine eu-t-il plongé une patte à sa moitié, que la sensation vivifiante de l’eau chaude s’imbibant dans son pelage afin d’effleurer son épiderme l’enivra aussitôt d’un frisson de plaisir. C’était la première fois qu’il expérimentait ce type de bain, n’ayant eu droit qu’aux massages jusqu’à présent, mais cet essai était tout ce qu’il y avait de plus satisfaisant. D’un geste, tout le reste de son corps plongea dans le liquide, créant un grand remous qui vint le bercer tandis qu’il prenait une position susceptible de le faire flotter sans effort. Un petit cri de surprise le fit se retourner, pour voir que dans son euphorie, il avait aspergé les pattes roses de la ponette.

« Désolé, je ne l’ai pas fais exprès, s’excusa aussitôt l’unicorne, s’immergeant plus profondément comme pour se cacher.

-  Inutile de vous excuser, ce n’est pas bien grave, rassura-t-elle d’un nouveau sourire, prenez vos aises pour profiter de ce bain, pendant ce temps, je vais préparer votre table de massage, puis je m’occuperais de vous. »

« Pas besoin de me le dire deux fois »

Tel un poulain qui jouait dans son bain, l’étalon se laissa allé à voguer de long en large dans le bac géant, créant des petits courants électriques de bien-être le long de son dos à chaque caresses des vaguelettes. Après quelques brasses, il s’immobilisa finalement contre la paroi, l’utilisant comme dossier, et s’enfonça jusqu’au menton, afin de profiter pleinement de l’exquise chaleur du bain, en total contraste avec le froid post pluvial de l’extérieur. Il ne lui fallut pas plus longtemps d’immobilité pour que l’étalon cède au bien-être et ferme les yeux afin d’apprécier ce moment. Invariablement, ce bain lui rappela un moment tout aussi agréable, et cette pensée ce précisa au fur et à mesure que les secondes passèrent. Loin de la douce chaleur des eaux thermales, il avait s’agit de la fraîcheur revigorante d’un lac en plein été. C’était un de ces moments agréables dont on ne désirait jamais la fin. Surtout que pour embellir ce moment, il y avait eu une pégase très spéciale, une pégase qui l’avait accueillis comme n’importe quel poney, qui avait pris soit de lui.

Une pégase dont il était tombé amoureux.

Etait-ce vraiment le cas ? A vrai dire, Drawlife n’en était pas certain. Lorsque Rainbow Dash lui avait remis son histoire avec Fluttershy sur le tapis, juste avant de partir pour sa mission météorologique, il avait subit comme un choc à l’estomac, un genre de retour à la réalité violente. C’était quelque chose qu’il n’avait ressentis qu’une fois, mais ça n’avait pas été pour un moment d’affection. Il se donnait plus l’impression d’avoir peur. Mais peur de quoi ? De la réaction de la pégase lorsqu’il irait lui rendre visite tout à l’heure, comme l’avait suggérer Rainbow Dash ? Probablement. Mais il n’y avait pas que ça, et il n’était pas sûr de savoir ce que cela pouvait être. Il n’était pas non plus sûr de vouloir le savoir.

Pourtant, il devait la voir, lui parler, s’excuser, n’importe quoi, il devait savoir s’il y avait vraiment quelque chose entre eux deux, où si c’était une simple lubie de sa part. Mais surtout, il ne devait pas laisser cette histoire en suspens. Si ça le rongeais comme maintenant, qui sais comment cela pouvait affecter Flutteshy ? Par respect pour elle et pour ses amies, il se devait de régler ça. Blow Passion attendrait.

Et pourtant, même avec toute ces bonnes raisons, il repoussait ce moment, encore et encore.

« Monsieur Drawlife ? »

Telle une bulle qu’on éclate, ses pensées s’interrompirent pour passer leur attention vers la jument qui était réapparu derrière lui sur la petite estrade. En se redressant à l’aide du rebord, il constata que la peau près de ses sabots avait bien fripé. Il avait sûrement dut rester immergé pendant un long moment.

« Pardon de vous déranger, s’excusa promptement Aloé, j'étais venue vous dire que tout est prêt pour votre massage. »

Ne tenant pas à ressembler à un vieux pruneau séché, Drawlife sortit aussitôt du bain, avant de se laisser goutter puis de se sécher autant qu’il le pouvait avec la serviette que lui tendait la ponette rose. Celle-ci le guida ensuite vers la première salle qu’ils avaient traversé, où l’attendait sa table de massage, une serviette blanche et brodé en guise de matelas. Une ponette couleur sable était d’ailleurs en train de recevoir les soins de la masseuse dénommée Lotus, et à en juger par le sourire béat et les ronronnements d’aisance qu’elle émettait, cela devait être très agréable ; et d’après ses souvenirs, ça l’était.

Toujours en se basant sur ses souvenirs, Drawlife s’installa sur sa propre table, à plat ventre, les pattes arrières tendues ainsi que les pattes avant. Cherchant ensuite à poser sa tête, il se rappela que le trou à l’extrémité de la table était conçu pour y passer son museau, pour ne pas qu’il s’écrase contre le plat de la table ou que son cou adopte une position inconfortable. Il était à présent prêt à ce que sa masseuse fasse agir ses sabots magiques. C’est à ce moment là que Drawlife se rendit compte des bienfaits que lui avait apporté le bain précédemment prit ; sans même que le massage commence, il sentait que ses douleurs articulaire s’étaient déjà atténuées à un stade où elles n’étaient plus qu’une simple gêne. Et lorsque la corne délicate des sabots d’Aloé démarra son parcours sur le dos de l’étalon, ce fut pratiquement l’extase immédiate.

Que ce soit sur ses pattes ou au niveau du dos, les sabots de la masseuse répétaient les mêmes et somptueux mouvements. Amadouant tout d’abord les points sensibles par des caresses en sillons et au toucher délicat, des pressions fermes étaient ensuite exercées pour forcer sur les nœuds et détendre le muscle. Ces enchaînements de frissons chauds et de pic de douleurs extrêmement brèves firent invariablement pousser des gémissements de plaisir à l’étalon, l’esprit de celui-ci faisant le vide au fur et à mesure que ses maux disparaissais, ne désirant plus que ce soin soit le plus long possible. Les minutes filaient, chaque partie de son corps était traité avec la même attention, à l’exception d’une de ses pattes avant et arrière, qui reçurent un soin plus poussé. Drawlife avait l’impression que ses membres se ramollissaient, et ne chercha même pas à retenir ses pattes avant de pendre hors de la table quand les sabots d’Aloé travaillaient ses épaules. Il était tellement détendu que ses paupières se fermèrent sans sa volonté.

« Hé toi ! Debout ! murmura une voix, tandis que son sabot droit se faisait tapoter énergiquement.

-  Hein ? Quoi ? Késkecé ? Blow Passion ? bredouilla Drawlife, émergeant brutalement de son début de sommeil improvisé.

-  Réveille toi, t’étais en train de ronfler là. »

Grâce à sa position stable et sa tête partiellement entravée, l’unicorne ne fut pas en mesure de tomber de la table malgré son réveil en sursaut. Sans s’en rendre compte, Drawlife avait piqué du museau, assommé par son bien être. Et ce n’est qu’à ce moment là qu’il réalisa que sa masseuse n’était plus là ; et aussi que sa voisine lui adressait la parole.

« Dis donc, tu devais être sacrément détendu pour t’endormir comme ça, se moqua gentiment la jument, elle aussi allongé sur le ventre, la tête sur le coté, laissant sa crinière courte rose fushia tomber en fine mèche sur son visage.

-  Et bien, oui c’est …, admit l’étalon en bayant avant de se redresser pour être en appui sur ses articulations avants, c’est sûr, il faut dire que je n’ai pas l’habitude des massages. Les masseuses sont où d’ailleurs ?

-  Parties chercher les onguents pour un massage parfumé, elles n’en ont pour pas pour longtemps, le temps qu’on se remette du précédent. »

Certainement pour se mettre aussi à l’aise, la ponette adopta la même position que l’étalon, et lorsque qu’elle remit sa crinière en place d’un mouvement de tête, elle prit soudainement un air étonné, dévisageant l’unicorne de ses yeux vert amande.

« Mince, je ne t’avais pas reconnu, c’est pourtant pas faute de t’avoir déjà côtoyé plusieurs fois.

-  Heu … oui, sûrement …  hésita Drawlife qui ne savait pas trop quoi répondre à la jument.

-  Quoi ? Tu ne me reconnais pas ? » s’étonna-t-elle en prenant un air tout à coup contrarié.

L’étalon tempêta intérieurement d’avoir une mémoire des visages aussi sélective, et chercha désespérément dans ses souvenirs quelque chose qui pourrais l’aider à se souvenir de la ponette. Ne trouvant pas et ne tenant pas à la vexer, il tenta quelque chose d’assez stupide après avoir remarqué la rose sur le flanc de sa voisine en guise de marque de beauté.

« … Rose ?

-  Ah, tu me rassure, après les semaines que tu as passé dans ma boutique pour les travaux que te réclamait Twilight Sparkle, ça m’aurait surpris que tu m’oublie.

-  Oui-oui, désolé, acquiesça vivement Drawlife tout en se souvenant effectivement avoir travaillé dans la boutique de fleur de la ponette paille et de ses deux amies, mais cette période n’est pas celle dont je souhaite le plus me souvenir.

-  Oui, je comprends, ça n’as pas dut être drôle j’imagine, compatis Rose en baissant les yeux avant de fixer à nouveau l’unicorne gris, même si j’ai encore du mal avec ce qui s’est passé à la fête de la sœur de Rarity. Surtout ce que tu as fait à Pinkie Pie et Fluttershy !

-  Hé, je n’en suis pas fier de ça loin de là, se défendit-il aussitôt d’un ton vif, et je compte bien me faire pardonner d’une manière ou d’une autre. D’ailleurs, j’ai eu l’occasion de présenter mes excuses à Pinkie tout à l’heure, et à moins qu’elle ne m’ait joué la comédie, elle m’a pardonné.

-  Et ben dit donc, t’as de la chance, je ne sais pas si j’aurais été capable d’en faire autant à sa place. Surtout après autant de temps ; ça fait un moment que tu t’es remis de ton truc non ?

-  Oui je sais, j’ai mis du temps. Mais ne vas pas croire que ça s’est fait comme ça … enfin si, en quelque sorte, mais j’y ai donné du …

-  UN SE-CRET ! » brailla Pinkie Pie museau à museau avec l’étalon après être apparue de sous la table.

Ce coup ci, la surprise manqua vraiment de faire tomber l’étalon de sa table, sa crinière noire s’était même presque entièrement dressée d’effroi. Démunie face à cette entrée en scène surprenante, Drawlife se contenant d’émettre un “d’accord” peu convaincant. Ce à quoi elle répondit par un sourire rayonnant avant de porté son attention sur la gauche de l’étalon.

« Ouh, des bonbons menthe eucalyptus, j’adore ça. » s’extasia-t-elle avant d’en enfourner un et de s’en allez gaiement en créant de la vapeur fraîche par sa bouche.

« Je n’ai rien compris »

C’était tout ce qu’était capable de penser Drawlife. Il était incapable de dire si ce qui s’était produit était réel ou non, et la mine de Rose nettement moins étonnée que lui ne l’aidait pas à trancher. Mais cette troisième intervention de Pinkie dès que l’étalon s’apprêtait à expliquer leur conflit prouvait qu’elle tenant visiblement beaucoup au concept des promesses. Drawlife préféra donc réellement la tenir et ne rien dévoilé sur ce qu’il s’était passé dans la chambre.

« Ok, je te crois, concéda la jument beige sans rien relever de plus, et pour Fluttershy ?

-  Je … je comptais y allez après le SPA, avoua timidement Drawlife, bien conscient qu’il était ce coup ci en faute.

-  Je me disait bien aussi.

-  Qu’est ce que tu veux dire par là ?

-  Elle est bizarre en ce moment. Enfin, pas vraiment bizarre, mais encore plus à l’écart que d’habitude. Encore ce matin, elle est venue acheter des pétunias, rien d’anormal, mais quand j’ai voulu lancer la discussion … ben sur toi justement, c’était presque si elle ne s’était pas enfui sans ses fleurs.

-  Je vois. Elle doit me détester après tout ce que je lui ai fait.

-  Détester, je ne crois pas, elle n’est pas le genre de ponette à détester un autre j’ai l’impression. Mais il y a dut avoir un truc entre vous deux bien avant la fameuse fête non ?

-  Je ne sais pas si j’ai le droit d’en parler. Si elle-même n’as rien dit jusque là, c’est qu’elle doit avoir ses raisons.

-  Promis je ne répéterais pas, insista la jument avant de voir les masseuses revenir avec des paniers de flacons entre les dents, si tu veux, on peut en discuter dans ma boutique, c’est moi qui suis de garde jusqu’en milieu d’après midi, il n’y aura pas d’oreille indiscrète. »

Ayant constaté aussi le retour d’Aloe et de Lotus, Drawlife se remis en position, mais cette fois en couchant normalement sa tête sur le coté, pour continuer de discuter avec la jument au crin rose sans gêner sa masseuse.

« Pourquoi tu veux absolument savoir ? C’est une amie à toi ?

-  Tout le monde est un peu l’ami de tout le monde à Ponyville tu sais, rétorqua-t-elle en s’allongeant à son tour, et puis je suis fleuriste avant tout. Si j’en savais un peu plus, je pourrais peut être t’aider à te faire pardonner. Avec un joli bouquet composé des bonnes fleurs, elle acceptera plus facilement ton pardon, je te le garantie. Qu’est ce que t’en dit ?

-  Tu es sûre de toi là ?

-  Sûre ! Les fleurs ne servent pas que de repas ou de décoration. Je te les ferais même gratuitement si tu veux. Mais décide toi vite, c’est une offre limité dans le temps que je te fais. »

Plus par désespoir de trouver quelque chose qui l’aiderais a appréhender la pégase que par réel intérêt pour cette science florale, Drawlife accepta la proposition de la fleuriste, en échange de son histoire houleuse. Le massage aux onguents, bien plus court que le précédent, lui permis tout de même de se relaxer une dernière fois, et de définitivement se remettre de sa journée de la veille. Avec ce qui l’attendait, c’était quelque chose dont il avait vraiment besoin.

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D’un geste fébrile, Granny Smith souleva la grande cuillère en bois dont elle se servait pour touiller son potage depuis de longues minutes, et l’apporta à ses lèvres. Elle sirota bruyamment le contenu de l’ustensile, fit tourner le liquide dans sa bouche, avant de l’avaler goulûment, satisfaite de son travail.

« La soupe est prête mes p’tits chéries, à table ! »

Stronghoof, qui était en train de finir d’installer la table, s’approcha de la chaudière devant lequel cuisinait la vielle jument verte pomme pour humer l’odeur qui avait attisé son appétit depuis qu’elle avait commencer à mijoter le plat.

« Ça sent rudement bon votre soupe m’dam’ Granny, hâte d’y goûter.

-  Merci grand gaillard, remercia-t-elle en gratifiant gentiment d’un coup de cuillère bien senti le sabot gourmand de l’étalon rouge, mais tu attendras ton tour comm’ tout l’monde. Va plutôt chercher ma p’tit’ fille s’il te plaît, j’crois qu’elle est montée dans sa chambre tout à l’heure.

Un peu déçu de ne pas avoir eu l’honneur de goûter à la soupe en avant première, Stronghoof se dirigea à l’étage pour aller chercher Applejack.

Le musculeux étalon s’était plutôt bien intégré à sa nouvelle vie de fermier de pomme, et ce même si cultiver ces fruits n’avait strictement rien à voir avec la culture du blé. L’entretien, le ramassage, la gestion du stock, beaucoup de choses changeaient. Et plus que tout, lui qui avait l’habitude d’adopter des gestes franco, sans réelles mesures, les pommes demandaient un certain doigté pour être récolté et manipulé.

La famille Apple lui avait été d’une grande aide pour s’adapter à ce milieu, et s’ils avait encore beaucoup à lui apprendre, ils étaient très contents de l’aide de l’étalon.

Arrivé en haut des escaliers, Stronghoof longea le couloir pour trouver la chambre de la jument orange, dont la porte arborait le dessin d’une grande pomme rouge. Il colla son oreille contre le bois de porte pour s’assurer qu’elle était bien là, bien que tout ce qu’il entendit, c’était un bruissement rauque. Haussant les épaules, il toqua fortement, et une voix presque féminine lui répondit aussitôt.

« Applejack, le repas est prêt, on attends plus que toi.

-  Ouep, minute Strong’, j’arrive. »

L’étalon, la tête toujours à proximité de la porte, se demandait bien ce que la ponette trafiquait dans sa chambre, car il pouvait entendre à présent des raclements de tiroir et de porte de placard, comme si elle procédait à tout un rangement. Il est vrai que Stronghoof l’avait vu se rendre à sa chambre il y a une bonne demi-heure, mais il avait pensé qu’elle était simplement en train de faire une sieste.

Soudain, la porte s’ouvrit en grand, laissant apparaître Applejack qui sortait tout aussi vivement, obligeant Stronghoof à reculer pour la laisser passer. Lorsqu’elle passa juste devant lui, l’étalon sentit un picotement dans ses naseaux, une odeur assez forte qui semblait venir de la jument.

« Hey, tu sent vachement plus fort que d’habitude, fit remarquer le grand poney en se frottant le museau.

-  Qu’est ce qu’t’insinue ? Que j’sens l’purin ? rétorqua-t-elle durement en lançant un regard mauvais en direction de Stronghoof.

-  Wow, pas de malaise ! J’ai pas dit que tu puais. Tu sens même plutôt bon. Je disais juste que c’est moins discret que d’habitude.

-  Ouep, p’t’être, concéda la jument plus calmement en reniflant sa patte avant droite.

Sans rien ajouter, Applejack continua son chemin vers les escaliers, laissant Stronghoof un peu pantois. D’ordinaire, la fermière n’était pas aussi susceptible ; avec la participation de Big Macintosh, ils lui envoyaient souvent des petites piques, qu’elle leur renvoyait sans sourciller, toujours sur le ton de l’humour.

Là, elle n’avait rien répondu. Il avait même cru la voir rougir.

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L’odeur qui atteignait les naseaux de Drawlife était vraiment agréable. En sécurité sur son harnais dorsal, l’étalon pouvait observer le bouquet de fleur quand le doute le saisissant en chemin, et le parfum qu’ils dégageaient ainsi que leur vue magnifique lui donnais même un certains courage pour la confrontation à venir. Finalement, sa rencontre avec Rose n’avait pas été une perte de temps.

Une fois dans sa boutique, qui était aussi en partie sa maison, il avait commencé à lui raconter son séjour avec Fluttershy en tant que malade, ses petits soins, ses chants, son dévouement. La jument paille avait été étonnement attentive, écoutant chaque détail cité par l’étalon. Sans vraiment le vouloir, Drawlife s’était beaucoup plus étendu sur cette période, si bien que ce qui devait n’être qu’une anecdote s’était transformé en long récit, s’étalant sur plusieurs heures. L’étalon avait d’ailleurs profité d’un excellent repas offert par la fleuriste. Il avait eu un peu de mal à aborder le passage délicat qui avait tout chamboulé, mais ce frein s’était très vite dissipé : Drawlife avait vécu ça comme une confession, en parler à quelqu’un était un luxe qu’il ne s’était jamais offert, et une fois son récit terminé, il s’était sentis beaucoup plus serein.

Grâce à Rose, il avait put prendre le chemin du cottage de la pégase le cœur plus léger, équipé de ce bouquet composé par les soins de la fleuriste. Avec son histoire, elle avait été en mesure de lui confectionner le bouquet parfait. Il était composé de sept roses, cinq blanches et trois jaunes, le tout entouré de géranium mettant en valeur les fleurs centrales. Pour Rose, le message était clair : tout dans le pardon, et le désir de vouloir le bien de la destinataire.

Néanmoins, la ponette lui avait réclamé une dernière question, dont Drawlife ne s’y était pas attendue, juste avant qu’ils ne se quittent.

« Au fait, c’est qui cette Blow Passion dont tu as marmonné le nom quand je t’ai réveillé au SPA ?

- «Oh, heu … c’est une amie, c’était elle que j'étais venu trouver à la base.

-  Elle est à Ponyville depuis longtemps ? avait-elle encore questionné.

-  Non, depuis hier … pourquoi ?

-  Oh rien, juste pour savoir. Bonne chance avec Fluttershy ! »

Cet intérêt étrange pour la licorne avait quelque peu perturbé l’étalon gris pendant son trajet, mais il passa rapidement ce détail au second plan lorsqu’il fut devant la porte de la maisonnette de Fluttershy. Il constata d’ailleurs que Rose avait exagéré ses propos concernant la pégase ; elle lui avait décrit le comportement récent de Fluttershy comme celui d’une recluse, et pourtant, sa maison était toujours aussi accueillante que d’habitude, les volets étaient ouverts et les animaux gambadaient toujours joyeusement dans le jardin et les fourrées. Rassuré par ce fait, il toqua nonchalamment la porte, qui s’ouvrit légèrement quelques secondes plus tard. Drawlife s’étonna de ne voir personne dans l’entrebâillement, avant d’avoir l’idée de baisser la tête et de remarquer que c’était le petit lapin de compagnie de la pégase qui l’accueillait.

Enfin, accueillir était un bien grand mot, ce n’était pas le regard noir que lui lançait Angel qui faisait se sentir la bienvenue à l’unicorne. Pas plus que la porte claquée violemment au museau lorsque l’unicorne demanda si la maîtresse de maison était présente. Pour un début, c’était plutôt mal partit. Néanmoins, une voix familière résonna derrière la porte close, lui redonnant un peu d’espoir.

« Angel, je t’ai déjà dit que c’était malpoli de fermer la porte aux gens comme ça. » entendit l’unicorne avant que la porte s’ouvre à nouveau sur un faciès jaune pâle encadré d’une crinière rose tombante.

A peine avait-elle posé ses yeux sur Drawlife que Fluttershy se raidit aussitôt, lâchant un “Oh” surpris avant de rester muette de malaise, tandis qu’Angel tentais vainement de ramener sa maîtresse vers l’intérieur en tirant de toutes ses forces sur la patte arrière de la jument. L’étalon aussi perdit sa voix, soudainement tétanisé par sa simple présence devant la pégase. S’il avait gagné de la confiance pendant son trajet vers le cottage, il en disposait de beaucoup moins une fois face à la propriétaire.

« Hum … bonjour Drawlife, lâcha timidement la pégase, à demi camouflée derrière sa crinière.

-  Bonjour Fluttershy » répondit à son tour l’unicorne après avoir déglutit pour s’éclaircir la gorge.

Ça avait l’air simple quand on préparait un moment important, mais Drawlife n’avait en fait aucune idée de comment aborder le problème. Sa gorge se serrait dès qu’il essayait de dire quelque chose, même la plus basique. Il repensa tout de même à son bouquet, et pour débloquer la situation embarrassante, il s’en saisie par magie pour le présenter à la pégase, espérant que comme l’avait dit Rose, le message passerait plus facilement.

« Je … je suis venue t’offrir ça. Je ne sais pas trop si c’est ce que tu aimes mais ...

-  Ooooh, elles sont vraiment magnifiques ! Merci beaucoup, s’extasia d’admiration la pégase en les saisissant avec ses sabot avant, se maintenant à la verticale grâce à ses ailes.

-  Content qu’elle te plaise alors. » répliqua l’étalon en souriant, soulagé que le cadeau n’ai pas été inutile.

Toutefois, et ce malgré que Fluttershy humait avec plaisir le bouquet, Drawlife n’était pas sûre qu’elle ait compris le sens du bouquet. A trop en attendre de celui ci, l’étalon craignait de ne pas parvenir à son but premier. Ainsi, plutôt que d’attendre que les choses se fassent d’elles même, il décida d’être un peu plus offensif, de la même manière qu’au Sugar Cube Corner.

« Dis, je peux entrer ? Je pense qu’on a des choses à se dire, demanda Drawlife sur un ton grave malgré lui.

-  Oh … heu, oui bien sûr, je t’en pris. »

Précédent l’étalon, Fluttershy posa le bouquet prêt d’une fenêtre, cherchant ensuite de quoi les mettre en pot. L’unicorne gris profita qu’elle n’avait pas toute son attention sur lui, et donc ne pas avoir à subir l’attendrissement de ses magnifiques yeux cyan, pour tenter une approche.

« Pfou … bon, par où je commence ? amorça Drawlife en se grattant la nuque d’anxiété. Ben déjà … je n’ai pas souvenir de t’avoir remercié pour tout ce que tu as fait pour moi lorsque j’étais sur mon fauteuil.

-  C’était normal, tu avait besoin de soutien. Tu veux du thé ? demanda-t-elle après avoir empoté les fleurs, pour ensuite se diriger vers la cuisine.

-  Non merci, réfuta-t-il du sabot en élevant la voix pour que la pégase l’entende, je suis bien conscient que j’avais besoin d’aide, mais tu t’es portée volontaire alors que l’on ne se connaissait pas, et rien que pour ça, je te dois beaucoup.

-  Ce n’était rien …  dit-elle en revenant avec une tasse de thé.

-  Du coup … et bien … je ne sais pas ce qui m’as prit.

-  Heu … de quoi parle tu ? demanda elle le museau dans sa tasse, regardant en coin l’étalon platine.

-  Et bien, de mon comportement à l’anniversaire de Sweetie Belle ! J’ai été odieux avec tout le monde, et surtout envers toi et Pinkie Pie, je vous ai rejeté toute les deux alors que vous tentiez de me réconforter.

-  Tu n’étais pas toi-même.

-  J’aimerais bien pouvoir le dire aussi, mais ça serait me mentir. Du coup, je tiens vraiment à présenter mes excuses pour ce qui s’est passé. »

Fluttershy ne répondit pas tout de suite, se posant sur le canapé avant de regarder longuement le thé d’une mine neutre. L’étalon se doutait bien qu’elle ne lui répondrais pas au feeling, mais la voir ainsi se questionner créait une impatience qu’il avait du mal à contenir.

« Je te pardonne Drawlife. » annonça-t-elle doucement, sans lever la tête.

Un blanc suivit la réponse de la pégase, provoqué par la stupéfaction de l’unicorne. Il s’attendait à recevoir un reproche, ou qu’elle hésite plus longtemps. Sa confrontation avec Pinkie avait peut être altéré le scénario qu’il imaginait avec la pégase.

« Tu … tu me pardonne ? répéta Drawlife un peu penaud.

-  Oui …

- D’accord ... très bien … ben dans ce cas, j’y vais, je … je crois que Rarity doit se demander où je suis. »

Encore sous le choc de la facilité avec laquelle il avait obtenu le pardon de Fluttershy, Drawlife rebroussa chemin, ne sachant pas trop comment prendre la chose. Tenu par Angel, la porte lui était déjà ouverte. Ça y est, il s’était excusé auprès de Fluttershy et de Pinkie Pie, quelque chose qu’il aurait du faire dès son ‘’réveil’’, mais qu’il avait repoussé jusqu’à maintenant.

Pourtant, alors qu’il s’apprêtait à franchir le seuil de la porte, l’étalon sentait que quelque chose n’allait pas. Fluttershy lui avait dit qu’elle le pardonnait, malgré cela, il sentait que ça s’était fait trop facilement. Non pas qu’il désirait un autre affrontement comme contre Pinkie Pie, loin de là. Mais en la regardant mieux, la pégase semblait toujours sombre, comme si quelque chose la tracassait. Au plus profond de lui, Drawlife savait de quoi il s’agissait, et ça le tracassait tout autant. Il essayait de se dire que c’était du passé, que si Fluttershy ne lui avait pas fait de remarque là-dessus, tout allait bien. Mais cette pensée ne fit que lui donner des frissons de dégoût. Lui et la jument s’étaient ignorés trop longtemps, et il était peu probable que cette gêne entre eux deux passes indéfiniment inaperçus.

Toujours sur le pas de la porte, avec Angel qui tapait de la patte d’impatience, l’étalon prit une grande inspiration, et refit fasse à la jument ailée, toujours assise sur son canapé, à faire remuer consciencieusement le contenu de sa tasse.

« Fluttershy, je … je voudrais juste être sûr d’une chose, au sujet de ce qui s’est passé …

-  J’ai accepté tes excuses, inutile de revenir là-dessus, rétorqua-t-elle de façon étrangement ferme sans porter son attention sur l’unicorne.

-  N-non, je ne parle pas de la fête là, insista l’unicorne qui avait pris la remarque de la pégase comme un coup de poignard, mais de bien avant, quand … quand je t’ai peint ….

-  S’il te plaît Drawlife, je n’ai pas envie que l’on parle de ça. C’est trop tard maintenant.

-  Trop tard, ça je ne dirais pas le contraire, et c’est de ma faute. Pourtant, il faudra bien que ça sorte à un moment ou à un autre. Ils sont plusieurs à Ponyville, dont tes amies, à me dire que tu es différente.

-  Alors elles t’ont mentit, je vais très bien, affirma-t-elle en dissimulant difficilement des signes de malaise.

-  Rarity m’aurais donc mentit quand elle m’affirmait que tu venais tous les jours à mon chevet pendant mon coma ? s’agaça finalement l’étalon devant le dénie de la pégase.

-  Non, c’est vrai, culpabilisa-t-elle aussitôt en se recroquevillant un peu plus, mais … je … je n’aurais pas dut … j’étais …

-  Écoutes, comprend moi ! Comment veux-tu que je réagisse à tout ça ? Que je l'interprète ? J’ai ressentis quelque chose à ce moment là, je pensais … je pensais que je t’aimais. Non, je t’aimais vraiment … plus que comme une simple amie ! Mais … Il y a eu ce moment, et Twilight est arrivé … ça s’est passé trop vite, ça m’a complètement chamboulé. »

Drawlife commençait à trembler sous la pression de ses sentiments. Repenser à cette scène lui était très difficile, car en ce moment même, chez la pégase et en face de celle-ci, il avait l’impression de la revivre complètement ; la chaleur qui s’était infusé en lui, le contact délicieux de ses lèvres contre ceux de Fluttershy, l’horreur de la vision de Twilight. La confusion le gagnait, alimentant une sensation de colère qu’il ne pensait pas ressentir. Il fut heureusement interrompu par le bruit d’un verre se brisant au sol, et le visage en colère de la pégase le remis tout de suite à sa place, presque apeuré de la scène qu’elle lui donnait.

« Et tu crois que ça ne m’a pas chamboulé peut être ? Que c’était facile pour moi ? s’emporta à son tour Fluttershy. Tu crois qu’il n’y avait que tes sentiments en jeu ? Moi, je pensais faire ce qui était juste, malgré que beaucoup de mes amies me disait que je faisais une énorme erreur. Twilight n’arrêtait pas de me dire de me méfier de toi, que tu attendais ton heure pour … pour … »

Elle s’interrompit aussitôt pour trembler d’horreur, comme si l’événement qu’elle s’apprêtait à dire se déroulais à l’instant sous ses yeux, avant de reprendre de plus belle.

« Pour me sauter dessus ! … Je ne voulais pas la croire. Mais Twilight est mon amie, elle m’a toujours soutenue dans les moments difficiles, elle a toujours cru en moi. Que crois-tu que ça me faisait de la prendre pour une menteuse ? Ça me faisait mal, j’avais l’impression de la trahir, de la renier. J’en ai même pleuré de dégoût ! »

Plus la pégase s’exclamait sur sa relation avec la licorne mauve, et plus ses larmes s’intensifiaient. Drawlife, lui, n’arrivait plus à soutenir son regard, il se sentait sale, très sale d’avoir été l’origine d’un conflit entre ces deux amis. Il serrait les dents pour ne pas craquer et s’enfuir à son tour, il se persuadait que Fluttershy était dans son droit le plus pur de lui en vouloir et de lui hurler dessus, donc il ne bougea pas, encaissant les reproches qu’il s’était étonné de ne pas avoir reçut plus tôt.

« Mais je voulais lui prouver qu’elle se trompait, je voulais qu’elle te voit sous ton vrai visage, celui que tu m’avais montré tout les jours ! Que j’appréciais ! Mais, quand tu m’as embrassé, je ne savais pas quoi faire. Je me demandais où est ce que j’avais pu me tromper … j’étais perdu … je …

-  Fluttershy …

-  Tu m’as fait peur ! Je me suis fait peur, à penser que Twilight aurait pu avoir raison alors que je m’efforçais de lui prouver le contraire. Je me sentais idiote, j’avais l’impression de m’être trompée sur tout. »

Se calmant progressivement, Fluttershy s’assis à nouveau sur le canapé, séchant ses larmes avec les plumes de ses ailes en regardant le sol.

« Et encore maintenant, je ne suis pas sûr de savoir quoi penser. »

Au fond de lui, Drawlife était dans le même état que la pégase ; lui aussi était dans le flou. Après s’être remis de sa déprime, il avait pensé que si Fluttershy ne lui avait plus parlé depuis ce jour, c’était parce qu’elle s’était affolé des sentiments de l’étalon, et qu’elle ne savait pas comment l’appréhender. Mais ça semblait beaucoup plus profond que ça. L’étalon n’avait aucune idée de l’intensité de l’amitié qui la reliait avec ses autres amies, et était du coup incapable d’imaginer ce qu’elle pouvait ressentir. Sa relation avec Rarity devait être insignifiante à coté de ça.

Néanmoins, rien dans les propos de la pégase n’indiquait qu’elle ne ressentait définitivement rien pour lui. Malgré qu’il tentait par tout les moyens de se persuader que l’espoir était trop mince, qu’il prenait le risque d’empirer les choses, voir de rompre réellement les liens de la pégase jaune avec ses amies, il ne pouvais pas s’empêcher de s’accrocher désespérément à cette toute petite possibilité que Fluttershy ressentait plus qu’une petite affection amicale a son encontre. Sa mère lui avait demandé d’être heureux, s’était sa dernière volonté ; il ne pouvait pas se permettre de laisser passer cette possibilité sans en être sûr, au risque d’être ronger par le remord par la suite.

Fluttershy s’était plongé dans un silence triste, séchant péniblement ses larmes alors que d’autres continuaient de suinter de ses yeux de biche. Drawlife se dit que c’était l’occasion de la réconforter. Doucement, il s’installa prêt d’elle, sans l’effrayer. Puis, d’un geste doux, il passa sa patte par-dessus les ailes de la jument, pour la reposer sur son épaule opposée. L’étalon se racla plusieurs fois la gorge, n’ayant encore jamais réconforté quiconque de la sorte, et espérait que le geste ne soit pas mal interprété. Tout ce qu’il souhaitait, c’était offrir une poitrine sur laquelle Fluttershy pourrait finir d’empêcher ses larmes.

Ne faisant rien de plus, Drawlife attendit la réaction de la pégase. Elle ne s’était pas rebiffer, ce qui était bon signe, toutefois, elle ne faisait rien de plus que lancer des regards fuyant à l’étalon, comme si elle réfléchissait à grande vitesse. L’espoir et la déception menait un combat sans merci dans le subconscient de l’unicorne, le crispant fortement d’angoisse à l’attente de la réponse de Fluttershy.

Finalement, elle posa son sabot sur celui de l’unicorne, mais au lieu de l’approcher un peu plus pour se blottir dessus, elle le repoussa, gentiment mais indubitablement, puis se glissa sur le coté pour s’éloigner légèrement. Fluttershy y avait mise vraiment peu de force, et pourtant, ce simple contact avait été très douloureux, et s’était étendu jusque dans la poitrine de Drawlife. Il sentait à présent son cœur se fendre encore, comme pour le punir de son désir de bonheur, comme s’il s’agissait d’un message que ses espérances ne pouvaient n’être qu’illusion.

« Je t’apprécie beaucoup Drawlife, mais … pas à ce point là, affirma-t-elle en tentant de regarder l’étalon droit dans les yeux, je suis vraiment désolée que tu ais pensé ça, mais je voulais juste te redonné un peu de joie de vivre, c’est tout. Et si j’ai effectivement pleuré à ton chevet, c’est seulement parce que je me croyais responsable de ce qui t’arrivais, et que je m’en voulais. »

Sans un mot, et sous le regard soudainement inquiet de la pégase, Drawlife se leva, s’étira un peu en soufflant doucement, et pris une nouvelle fois la direction de la sortie. Son ventre le brûlait, son esprit le torturait, tel une nuée de changelins mettant à bas tout ses espoirs. L’unicorne pestait intérieurement, s’insultait de tout un tas de nom d’oiseau, pour tenter de dissiper sa colère montante. Il en avait assez d’être trompé par ses sentiments, à plus forte raison parce qu’il pensait s’être résolu à ce que Fluttershy ne ressente rien pour lui. Mais il était visiblement un idiot affectif compulsif, ça avait été plus fort que lui, tellement qu’il s’en dégoûtait presque. A peine avait-il reposé son regard sur elle, que son cœur avait chaviré de nouveau, le replongeant dans un espoir qui n’avait pas lieu d’être. Pourquoi avait-il fallut qu’il croit éprouver encore quelque chose pour cette pégase ? Aimait-il s’infliger du mal ? Et si Twilight Sparkle avait raison ?

« Tout vas bien Drawlife ? demanda soucieuse Fluttershy après s’être relevée pour se rapprocher de l’étalon. Je n’ai encore jamais eu à repousser un garçon …

-  Un garçon ou un pervers ?  lâcha l’étalon sur un ton cinglant.

-  Non, s’il te plaît, ne me fait pas dire ce que je n’ai pas dit ! s’affola presque la jument ailée. Tu es un garçon gentil, c’est juste que … enfin si ça peut te rassurer, je ne pense pas du tout que tu sois … comme le décrit Twilight. »

Drawlife soupira un grand coup en basculant la tête en arrière avant de s’immobiliser. A quoi cela lui servirait de s’énerver, ou même de se ronger à sang de regret ? Il avait bien vécu ce que ça apportait, il avait même faillit y rester. Fluttershy ne l’aimait pas ? Tant pis, il allait bien devoir s’en remettre ; après tout, ce n’était comme s’il était complètement seul, il avait Rarity ; et dans une certaine mesure, Blow Passion.

Seulement, même s’il était enfin certain que la pégase n’était pas amoureuse de lui, Drawlife se demandait tout de même une chose concernant leur relation future.

« Je voudrais juste savoir, s’enquerra l’unicorne sur le seuil de la porte, est-ce que … est ce que l’on peut au moins rester ami ? Je veux dire, pouvoir un minimum se parler sans qu’il y ait une gêne entre nous.

-  Je … je ne sais pas, c’est la première fois que je subit ça. On peut rester ami, mais je préférerais qu’on ne se revoie pas encore un peu … que je réfléchisse.

-  Je comprends … Si jamais tu veux que l’on reparle, tu n’as qu’à venir me voir. Dans tout les cas, tu as tes amies. Elles s’inquiètent vraiment pour toi tu sais.

-  Merci.

-  Et en parlant d’amies, Twilight Sparkle, tu penses qu’elle va comprendre ? demanda Drawlife, pris d’inquiétude au sujet de la licorne mauve.

-  J’irais lui parler pour lui dire que tu est venu me voir, promis.

-  D’accord, souffla l’étalon rassuré, j’y vais cette fois. Encore désolé de ne pas être venu te voir plus tôt, tout ça aurait put se passer autrement.

-  Ce n’est pas grave. Au revoir Drawlife. »

Cette fois ci, ce fut la pégase qui l’accompagna à l’extérieur, même si Angel ne manqua pas de communiquer son mépris à l’étalon ; quelque chose disait à Drawlife qu’il faudrait sûrement beaucoup de temps et d’effort pour que le petit rongeur l’accepte un jour.

Et en parlant de temps, le soleil avait déjà entamé sa descente vers l’horizon, signifiant qu’il devait être une heure assez tardive. Le temps que l’unicorne retourne à la boutique Carrousel pour espérer retrouver Blow Passion, la nuit serait déjà tomber.

Drawlife soupira de fatigue une nouvelle fois. Malgré un grand sentiment de soulagement, celui ci restait parasité par une frustration tenace. Il se demandait toujours quand il aurait enfin finit de payer sa dette avec ses erreurs du passé.

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Des escaliers de la tour menant au plus haut balcon du château de Canterlot, on pouvait entendre un claquement résonnant à un rythme lent et régulier. Quelqu’un les descendait doucement, et semblait visiblement fatigué. Elle avait beau le faire depuis plusieurs siècles, manipuler le soleil restait une épreuve demandant une grande quantité d’énergie. Celestia le ressentait en particulier le soir, lors du coucher de soleil, après une rude journée. Aujourd’hui n’était pas différent, après de nombreux déplacement pour rassurer les poneys agriculteurs du retard sur les périodes pluviales, elle se sentait bien incapable de la moindre apparition en ville. Son bâillement appuyé mais silencieux lorsque qu’elle arriva au bas des marches en était une preuve. L’alicorne n’avait qu’une envie : prendre un bon repas, et tomber comme le ferait n’importe quelle pouliche dans les bras de Marephée.

Avant d’atteindre la salle à manger, elle devait passer par la galerie d’art du château, là où sont entreposées les différentes œuvres qu’elle et sa sœur s’étaient procurées aux cours des siècles. La pièce n’était pas excessivement grande, en comparaison des standards du château, mais avait le mérite de pouvoir accueillir une trentaine d’objets en tout genre, de la toile à la sculpture, qui formaient à eux seuls toute la décoration de l’endroit. Par simple goût des belles choses, Celestia retarda un peu son repas pour flâner et admirer les différentes œuvres. Il y avait tout de même quelque chose dont elle ne pouvait pas ignorer le constat, c’était que l’essentiel des pièces, pour ne pas dire la totalité, étaient des acquisitions en son nom. Les poneys qui entretenaient la galerie avaient pour rôle d’enlever les éléments devenus trop ancien et trop fragile, afin de laisser place à une nouvelle génération artistique. Après mille ans d’absence, il ne restait pratiquement rien des goûts de la Princesse Luna. Celestia avait systématiquement un pincement au cœur à la raison de cette abscence ; à cause de son bannissement, sa sœur avait manqué tellement de chose magnifique. Elle n’était pas autant amatrice d’art comme l’était l’alicorne blanche, mais elle savait apprécier une belle toile quand elle en voyait une.

Toutefois, une des toiles qu'elle put observer n’entrait pas dans les souvenirs de l’alicorne, ce qui lui donna un sourire satisfait : Luna avait visiblement entamé une nouvelle collection. Celestia prit alors soin de l’admirer, afin de voir si les goûts de sa sœur étaient resté les mêmes. C’était effectivement le cas, la simplicité et la puissance qui se dégageait de cette toile était typiquement ce qui plaisait à Luna. Il y avait tout de même quelque chose qui intrigua l’alicorne solaire, c’était la pégase représenté. Elle n’eut aucun mal à reconnaître Fluttershy, l’amie timide de sa protégée Twilight Sparkle, et la Gardienne de l’élément de la Gentillesse. D’ordinaire, il n’y avait pas d’œuvre sur les Gardiennes de l’Harmonie, hormis les impressionnants vitraux de la salle du trône. Curieuse, elle chercha alors à connaître le nom de l’artiste, et elle leva un sourcil d’étonnement en le lisant sur le cadre.

C’est avec cette petite découverte en tête qu’elle se rendit à la salle à manger royale. Comme souvent, l’immense table n’était que pauvrement recouverte, seulement deux sets d’assiettes et de couverts pour les deux Princesses, et ce n’était pas la vingtaine de plats mêmes biens garnies qui allait combler le vide. La Princesse solaire soupira légèrement en se remémorant le nombre incalculable de fois où elle avait réclamé moins d’extravagance lors de ses repas solitaires : le statut royal était vraiment quelque chose que ses chers petits poneys prenaient trop à coeur, même après plusieurs génération. Celestia s’installa à sa place habituelle, et commença à se servir dans un plat de salade exotique lorsque la Princesse lunaire fit son entrée, une attitude toujours digne malgré la fatigue que l’alicorne blanche ressentait dans ses mouvements.

« Tu as donné beaucoup du tien ce soir ma sœur, complimenta Celestia en observant le ciel claire et vivement étoilé par le dôme vitrée qui surplombait la salle à manger, un événement particulier ?

-  Pas nécessairement, nous souhaitions juste rattraper la nuit d’hier, qui à été obscurcit par cette pluie battante, annonça calmement l’alicorne sombre en se servant sur un service à chocolat chaud ouvragé par lévitation.

-  Oui, c'était fâcheux mais nécessaire. Le ciel est magnifique en tout cas, il se pourrait que je retarde la levée du jour pour que je puisse profiter de ton œuvre en me levant. J'imagine que nos petits poneys ne m'en voudront pas lorsqu’ils lèveront leur museau au ciel.

-  Merci Tia » murmura Luna derrière sa tasse pour cacher son faciès rougissant.

Celestia sourit devant la réaction de sa sœur. Ça lui faisait vraiment plaisir de la voir abandonner le dialecte protocolaire de temps en temps, elle était persuadée qu’elle s’intégrerait beaucoup mieux à cette époque ainsi. Néanmoins, elle profita de ce petit relâchement pour interroger Luna sur le tableau qu’elle avait remarqué plus tôt.

« En parlant d’œuvre Lu, c’est une bien belle toile que tu nous a trouvé.

-  C’est ce que je me suis dit aussi en décidant de l’acheter.

-  Mais je me disais, l’aurais-tu prit pour une autre raison ? questionna Celestia sur un petit ton espiègle.

-  Que veux-tu dire ma sœur ? demanda l’alicorne bleu, un soupçon de méfiance dans ses paroles.

-  J’entends par là qu’il me semble que son auteur, Drawlife, est le poney dont mon élève Twilight Sparkle m’a envoyé quelques rapports.

-  J’ai lus ses lettres oui, j’en ai même reçu une personnellement il y a peu si c’est cela qui t’intrigue. J'ai aussi cru comprendre que tu n’avais pas répondu à la demande de ta protégée concernant ce Drawlife justement.

-  Pour être honnête, la colère que j'ai ressentie au travers de sa première lettre m'as inquiété. Toutefois, je pense que Twilight a quelque chose à apprendre avec cet étalon. Et toi, qu’en penses-tu ?

-  J’ai mon propre avis là-dessus » affirma la Princesse de la nuit en fermant les yeux pour replonger ses lèvres dans sa boisson chaude.

Le ton auguste qu’avais soudain prise Luna sans reprendre le “nous” royal surpris un peu plus la Princesse du jour, notamment parce qu’elle n’avait pas l’habitude de la voir aussi mystérieuse. Bien que curieuse, Celestia n'essaya pas d'en savoir plus, jugeant avoir assez taquiné sa sœur. Pas un mot ne fut prononcé tandis que l’alicorne bleue de minuit finissait sa tasse pour ensuite rouvrir doucement les yeux et observer le ciel qu’elle avait illuminé, l’air pensive.

« J’ai fait une promesse, et je tiens à la tenir. »

---

La nuit était belle, le ciel parfaitement dégagé, et la lune plus lumineuse que jamais. Mais si une licorne blanche regardait aussi souvent par la fenêtre de sa salle à manger, ce n'était pas pour admirer le spectacle céleste ; son regard préoccupé en témoignait. Elle n'était d'ailleurs pas la seule, une autre licorne couleur miel observait quand à elle par dessus l'épaule de l'autre jument, assise devant son assiette de foin à la vapeur.

« J'imagine que tu t'inquiètes pour Drawlife ? supposa la seconde licorne avant de reprendre une bouchée.

-  C'est peu dire, confirma Rarity d'un ton irrité en abandonnant son poste d'observation, je conçois bien que vous deux ne soyez pas parvenus à vous croiser au SPA, mais à cette heure ci, le bâtiment est fermée. Je me demande ce qui peut le retarder à ce point. »

La bouilloire présente sur le feu se mis tout d'un coup à siffler, interrompant et précipitant la couturière à le récupérer. Elle sortit ensuite de ses armoires son set de tisane personnel, les fit léviter jusqu’à elle et commença à préparer soigneusement deux tasses.

« Dis moi Blow Passion, est ce que Drawlife a toujours eu cette tendance à disparaître ? demanda Rarity pour essayer de faire passer le temps, et accessoirement en savoir plus sur l’étalon.

-  Je ne préfère pas le discréditer, ça remonte à assez loin. Il faut dire aussi que même si nous étions dans la même classe, nous ne nous sommes pas côtoyé comme toi et lui aujourd’hui. Enfin, du peu que je m’en souvienne, il n’était pas du genre à arriver en retard aux cours.

-  Alors je ne sais pas où il a prit cette habitude … conclut-t-elle en posant une tasse devant la licorne miel avant de se reposter devant la fenêtre. Et je ne pense pas qu'il l'ait prit avec Twilight.

-  Twilight, ton amie bibliothécaire ? questionna Blow Passion en commença à siroter sa tisane.

-  Oui. Je ne te l’ai peut être pas dit, mais en temps normal, c’est elle qui héberge Drawlife, et ça depuis son accident.

-  Quel accident ? s’exclama la licorne en écarquillant les yeux de surprise.

-  C’est un peu compliqué, je ne sais pas si je peux vraiment en parler, expliqua gravement la jument blanche, Drawlife sera mieux placé pour te le raconter. S’il en a envie bien sûr, il n’est pas très fier de cette période.

-  Oh, désolé, je suis peut être trop curieuse, s’excusa Blow Passion en replongeant son museau dans la tasse que lui avait préparé Rarity.

-  Non-non-non-non, tu as toute tes raisons de te poser des questions sur celui qui t’a sortie de la misère, c’est légitime. C’est juste que … même si j’aimerais me persuader du contraire, je ne le connais pas complètement, donc je ne serais pas ta meilleure source d’information.

-  Mmh mmh, mais est ce que, par hasard, il ne t’aurait pas au moins dit pourquoi il est venu à Ponyville ? s’enquerra une nouvelle fois la licorne en se dirigeant vers l’évier pour nettoyer son assiette. Je te demande ça parce que, à Canterlot, il m'a dit avoir faillit être comme moi.

-  Il t’as dit ça ? s’étonna la couturière. Et bien, il ne me l'a jamais expliqué, ni à moi ni à personne d'autre ici. Nous lui avions bien posé la question au début, mais disons que ... »

Suite à un coup d'œil qu'elle jetait régulièrement par la fenêtre, Rarity s'interrompit en voyant une silhouette équine se diriger vers sa boutique, marchant dans la pénombre de la nuit. En y regardant mieux, elle sut tout de suite de qui il s'agissait.

« Tiens, quand on parle du loup. »

Malgré la tisane qu'elle avait bue en quantité durant toute l’après midi, l'angoisse qui lui avait rongé l'esprit tout ce temps s'était finalement transformée en colère contre l’unicorne. Elle était d'autant plus furieuse qu'elle avait pensé lui avoir explicitement reproché cette manie de disparaître sans avertir personne. Toutefois, elle ne tenait pas à enguirlander l’étalon, juste lui remettre les pendules à l’heure ; après leur échange de ce matin, elle ne se voyais pas hausser le ton pour un simple retard. Tout en inspirant pour se maîtriser, elle se posta devant la porte, afin d’accueillir comme il se doit son ami.

« Oh, bonsoir Rarity, salua un peu surpris Drawlife après être entré dans la boutique.

-  Bonsoir ? Ah oui en effet, taquina la licorne en faisant mine d’observer le ciel derrière lui, excuse moi, je ne me doutais pas que le SPA faisait des horaires d’ouverture aussi tardives.

-  S’il te plaît Rarity, supplia l’étalon d’un ton las, si je pouvais éviter de me disputer avec toi, ça serais sympa. Blow Passion est là ?

-  Mais on ne se dispute pas voyons ! Ah, et oui elle est là, elle a été ici tout le reste de la journée après sa séance au SPA. Sachant que tu voulais lui parler, je pensais que toi tu serais revenu bien plus tôt.

-  Je suis là maintenant non ?

-  En me laissant tout une journée sans nouvelles ? s’emporta malgré elle la licorne blanche. Non, c’est trop facile. Après ce que tu m’a dis ce matin, j’espérais que tu ferais un peu plus attention, que tu prendrais tes responsabilités.

-  Et bien je les ai pris mes responsabilités si tu veux tout savoir ! Si je ne suis pas revenue tout de suite après ma séance au SPA, c’est tout simplement parce que je suis successivement allé voir Pinkie Pie puis Fluttershy, pour, entre autre, leur présenter mes excuses. »

La révélation choqua Rarity, qui perdit alors tout son sang froid.

-  Tu ne les avais toujours pas faites ?!

-  Non en effet, admit l’étalon sans pour autant se dégonfler, mais ça, tu n’as pas dut trop t’en soucier, vu qu’en y repensant, tu n’as jamais pris la peine de me le rappeler. Tu devais être trop occupé à faire tes robes.

-  Co-comment peux-tu dire une chose pareille ?! s’offusqua la jument en posant un sabot outrée sur sa poitrine. Bien sûr que je m’en souciais, mais tu m’avais promis d’aller les voir au plus tôt ! Je te faisais confiance.

-  Et bien tu vois, tu n’aurais pas due, lâcha placidement l’unicorne en détournant le regard de Rarity.

-  Hmmf, dis tout de suite que je suis idiote, répondit la jument, sa voix commençant à trembler devant l'offense qu’elle subissait.

Ce n’est pas la première fois que Drawlife énervait la couturière, mais jamais à ce point, jamais en attaquant directement l’amitié qui la reliait avec ses autres amies. Elle se sentait outrée et lui en voulais beaucoup de son accusation. Mais au fond d’elle, au-delà de sa colère, elle voulait comprendre. Elle voulais savoir comment l’étalon avait pu passer de l’ami affectif qu’elle avait agréablement découverte ce matin au ronchon agaçant qu’elle espérait ne plus revoir ; ce revirement de comportement n’était pas normal. Elle essaya de prendre sur elle pour le lui demander, mais celui-ci, au lieu de continuer leur querelle, fit volte face et commença à sortir.

« Mais qu’est ce que tu …

-  On va arrêter là, lança épuisé l’unicorne après avoir franchis le seuil de la porte, te connaissant, je me doutais que ça allait arriver. Mais je ne veux pas prendre le risque qu’on se dise des choses qu’on regrettera par la suite … si ce n’est pas déjà fait. Tu souhaiteras bonne nuit à Blow Passion de ma part.

-  Drawlife, où vas-tu encore ? s’agaça Rarity en le suivant dehors.

-  Ne t’affole pas, je vais juste au parc, j’ai besoin d’être un peu seul là.

-  Mais …

-  Bonne nuit Rarity » murmura Drawlife d’un air peiné avant de s’enfoncer dans l’obscurité du soir.

La licorne resta coite pendant quelques secondes, seule, piteusement éclairée par le spot d’entrée, comme ces juments fraîchement larguées par leur étalon dans les films à l’eau de rose que, paradoxalement, Rarity affectionnait. Elle était médusée par la réaction de Drawlife, et sa colère se mua progressivement en remord, la culpabilisant d’avoir houspillé l’étalon alors qu’elle s’était promise de ne pas le faire, surtout qu’il avait visiblement passé une journée éprouvante. Mais elle était aussi surprise du comportement dont avait fait preuve l’étalon ; il ne s’était pas mis en colère comme il l’aurait fait avant, il avait l’air plutôt affligé. Elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que c’était parce qu’il tenait à elle, et que cette altercation l’avait déçu. Cela ajouta un poids en plus à la conscience de la licorne, qui rentra dans le Carrousel la tête basse.

Elle était tellement prise par le remord qu’elle faillit ne pas voir la licorne miel et manqua de lui rentrer dedans, alors que celle-ci s’était posté à l’entrée de la cuisine pour suivre sa dispute avec Drawlife.

« Désolé pour cette scène de ménage, s’excusa Rarity en la contournant pour se servir une sempiternelle tasse de tisane afin de calmer ses émotions, je ne sais pas ce qui m’a prise.

-  Tu t’inquiétais pour lui, c’est normal. Je commençais à m’inquiéter aussi, rassura la jument miel en posant un sabot rassurant sur l’épaule de Rarity quand celle ci la dépassa.

-  C’est juste qu’après la journée d’hier …

-  Je vais peut être allé lui parler. »

N’étant pas sûre d’avoir bien entendu, Rarity fit volte face pour voir Blow Passion prendre le chemin de la sortie.

« Mais il a dit vouloir être seul ! Il est un peu susceptible tu sais, il pourrait mal le prendre, avisa-t-elle en trottant précipitamment vers la licorne pour la retenir.

-  Il voulais aussi me parler, non ? argumenta Blow Passion en arrêtant Rarity du sabot. Même si ce n’est peut être pas comme ça qu’il l’envisageait, je pense que ça pourrais le soulager.

-  Je ne sais pas si c’est une bonne idée ... douta Rarity en observant impuissante la licorne ocre franchir la porte de sa boutique.

-  Ça sera à lui de me le dire. »

---

Allongé dans l’herbe, sur le dos, au milieu de buissons qui le cachait partiellement, Drawlife pouvait tranquillement observer le ciel étoilé. Ou plutôt il comptait ; le nombre de cratère visible sur la surface de la lune, le nombre d’étoiles qui composait telle ou telle constellation, combien de sabot, à l’œil, séparait ces deux étoiles plus lumineuses que les autres … il n’y avait qu’en procédant ainsi, en s’occupant de faits et de détails dont il n’en avait que faire dans le fond, qu’il pouvait se libérer l’esprit. Néanmoins, cela marchait relativement mal, car contempler la nuit lui mettait invariablement la créatrice de cette voûte étoilée en tête, ce qui créait une cascade de souvenirs qui finissait invariablement sur Rarity. Même son lieu de songe, qu’il pensait avoir pris totalement au hasard, était en définitive ce même endroit où il avait peint le tableau de la licorne.

Il avait tenté alors de se concentrer sur les bruits ambiants. Clapotis de l’eau du ruisseau, grillons chantant leur mélopée, bruissement des arbres sous le vent ; cela avait suffit à le calmer, mais toujours pas à extraire le visage de la licorne immaculée de ses pensées. Drawlife ne comprenais vraiment pas. Malgré la journée très mouvementé qu’il avait subie, la seule chose qui lui restait dans l’estomac et le faisait se sentir mal, c’était sa toute récente altercation avec Rarity. Même sa discussion avec Fluttershy et le fait qu’elle ne désirait plus le voir pendant un moment indéterminé ne parvenait pas à surpasser cette déception qu’il avait ressentie envers son amie, et aussi envers lui-même. Il savait avoir découvert l’attachement qu’il éprouvait envers la licorne, et était même certains de la réciproque depuis ce matin. Mais ce dont il ne se doutait pas, c’était que cette amitié allait autant le marquer. Il se rendait compte qu’il désirait vraiment le bonheur de la jument, qu’elle soit fier de lui, qu’elle puisse compter sur lui. C’était vraiment très fort, quelque chose qu’il n’avait pas ressentie depuis un long moment.

Un très long moment.

En y réfléchissant, il pensait même se souvenir de cette sensation qui agissait comme un manque, quelque chose qui vous détournait tellement l’esprit que cela pouvait vous rendre fou. Drawlife força sur sa mémoire, cherchant qui aurait bien put avoir droit à autant d’attachement de sa part. Mais quelque chose bloquait, une douleur qui le freinait, de la même manière que ces portes fermées qui scellaient certains de ses souvenirs. Aucun indice pour l’aider, aucun événement qui s’y raccordait.

Drawlife poussa un grondement d’exaspération pour lâcher cette frustration que lui causait cette amnésie. A chaque fois qu’il essayait de se souvenir d’un événement positif, son esprit faisait un blocage.

Fatigué de sa journée et de ses pensées qui le tourmentait, il resta allongé, et repris son “passionnant” comptage des étoiles. Il aurait été incapable de dire depuis combien de temps il s’était installé ici, mais ce dont il était sûr, c’est qu’il préférait attendre que la nuit passe pour retourner voir Rarity, et pouvoir discuter plus calmement avec elle.

A un moment, il sentit de petites vibrations qui n’étaient pas causé par le vent dans l’herbe. Sans se lever, il bascula sa tête, une fois à gauche, une fois à droite, sans rien voir d’autre que le parc, vide de poney ou même de petits animaux profitant de la nuit pour vagabonder en ville.

Puis une toux légère survint, venant de derrière lui. En redressant son cou, il bascula sa tête en arrière, et put apercevoir l’intrus, debout entre deux buissons. Ou plutôt l’intruse, qui l’observait au travers de ses deux longues mèches qui cerclaient son visage, une attitude prudente qui l’empêchait de s’approcher et de se distinguer des ombres. L’étalon la reconnu toutefois, les rayons de lune se reflétant sur l’iris rubis de ses yeux.

« Bonsoir Blow Passion, salua Drawlife sans aucune surprise dans la voix, posant à nouveau son attention sur le ciel.

-  Bonsoir Drawlife, répondit doucement la licorne miel, je ne dérange pas ?

-  Pfff, va savoir, je n’en sais trop rien. Peut être que je commence à en avoir marre d’être seul. »

L’étalon étira ses quatre pattes vers le haut jusqu’à les entendre craquer, puis roula sur le coté pour se mettre en position assise, afin de parler avec la licorne sans se tordre le cou.

« Comment m’as tu trouvé ?

-  Je t’ai entendu dire que tu te rendais dans ce parc, expliqua-t-elle en désignant l’endroit d’un large mouvement du museau, et heureusement, je suis déjà passé devant, donc je savait à peu près où chercher. Par contre, précisa-t-elle avec un sourire amusé, tu n’aurais pas grogné, je ne t’aurais pas trouvé aussi vite.

-  Ah, ça veut dire que tu as entendu notre dispute ? conclu l’unicorne tout en se frottant anxieusement le canon.

-  J’étais dans la boutique, je pouvais difficilement faire ma sourde oreille. Par contre, tu ne m’as toujours pas dit si je dérangeais ?

-  Non, non, tu peux rester, confirma précipitamment l’étalon d’un geste vif du sabot, je crois que j’ai suffisamment réfléchis dans mon coin. »

Avec l’autorisation de l’unicorne platine, la jument s’approcha de lui à pas feutré, sûrement pour ne pas rompre le silence de la nuit. Elle fit ensuite le tour de l’étalon pour finalement s'asseoir tranquillement à ses cotés, se collant presque à lui. Drawlife ne put s’empêcher d’admirer à quel point le séjour au SPA de la licorne l’avait métamorphosé , jusqu’à lui rendre la beauté de ses souvenirs. Son pelage jaune d’or était à présent propre et parfaitement brossé, et contrastait à merveille avec sa longue crinière brune. Elle s’était de plus faite une queue de cheval qui lui tombait directement sur l’échine, maintenue par un chignon rouge. Mais il y avait quelque chose dans sa façon d’être qui fascinait Drawlife plus que son apparence, c’était la souplesse et l’élégance qui guidait ses mouvements ; en la voyant ainsi, il avait un peu de mal à se dire qu’il avait s’agit d’une ponette miteuse à la rue pas plus tard qu’hier.

Drawlife resta un moment silencieux, ne sachant pas quoi dire, à continuer d’admirer discrètement la jument. Il se trouvait un peu coupable que sa langue se taise au profit de ses yeux, cela lui donnais une méchante impression d’avoir ardemment désiré toute la journée de lui parler pour rien. A l’évidence, son regard ne passa pas inaperçu, car il vit Blow Passion rougir.

« Je ne pensais pas te laisser sans voix, minauda la licorne avec un sourire en coin.

-  Heu … et ben, oui, mais ça me fait tout drôle, balbutia d’embarras l’unicorne, ça change tellement, on dirait presque une autre licorne. Une superbe licorne.

-  C’est gentil, mais c’est Rarity qui m’a bien aidé à me refaire une beauté. C’est incroyable le nombre d’accessoires qu’elle possède, je n’ai pas souvenir d’en avoir possédé autant. »

L’étalon ne sut pas trop quoi répondre. Il est vrai que Rarity et son goût de la beauté avait dut être d’une grande aide pour illuminer autant le teint de Blow Passion. Cependant, reparler de son amie ne fit que lui remettre en tête sa récente dispute, et lui donner le bourdon.

« Si tu veux tout savoir, elle s’en veux pour tout à l’heure » indiqua la licorne comme si elle devinait les pensées de l’unicorne.

-  Je n’ai pas été tendre non plus. Et puis, elle n’avait pas tout à fait tord, j’aurai put au moins la prévenir après le déjeuné.

-  Vous avez l’air proche tout les deux, je me trompe ?

-  C’est vrai qu’on est devenue de très bons amis, confirma l’étalon avant de grimacer d’étonnement après une petite prise de recul sur son amitié avec Rarity, même si honnêtement, je me demande encore comment ça a put se faire.

-  Tu en as de la chance, j’aurais beaucoup aimé avoir quelqu’un comme elle dans le milieu où j’évoluais à Canterlot.

-  De quelle milieu il s’agissait ?

-  Le monde merveilleux et pailleté du mannequinat, présenta théâtralement Blow Passion en roulant en rythme des yeux.

-  Étrange, ça ne m’étonne même pas, s’amusa Drawlife d’un sourire amical.

-  Tu es mignon. Mais même si je pensais aussi avoir tout ce qu’il fallait, je me suis rapidement rendu compte que la beauté seule ne comptait pas.

-  Tu n’avais pas d’amis pour t’aider ?

-  Pour être franche … commença elle avant de s’interrompre pour soupirer de dépit, je n’avais plus vraiment la volonté de m’en faire. Dans ce milieu, c’était un combat constant pour rester au sommet, et souvent, il ne fallait pas hésiter à galoper sur les autres pour survivre. Ça m’a même obligé à quitter les seuls amis que j’avais avant de me lancer.

-  Je vois, ça n’as pas dut être drôle tout les jours. Mais ce que je ne comprends pas, c’est comment tu as put finir à la rue ? Que tu ais perdu du succès ou autre, je veux bien, mais je ne vois pas comment tu as put te retrouver avec rien, comme ça.

-  J’ai … tenta d’expliquer la licorne avant de baisser la tête la mine beaucoup plus sombre, disons que j’ai fait confiance à la mauvaise personne …

-  Oh … je vois, ça peux expliquer ... »

En cherchant à en apprendre plus sur elle, Drawlife n’avait pas pensé faire remonter un souvenir difficile pour la licorne, et du coup se sentit un peu mal de lui avoir extirpé cette information juste par curiosité. Il préféra du coup se taire pendant un instant, le temps de laisser le malaise passer. Toutefois, alors qu’il regardait la pénombre du parc pour éviter les échanges de regard gênant, il entendit des sanglots étouffés provenant de sa voisine. Entendre ces pleurs donna un frisson de culpabilité à Drawlife, et tandis que la peur de mal faire prenait de l’ampleur, il se força tout de même à parler, ne serais ce que pour communiquer un peu de compassion.

« Je suis désolé, je ne voulais pas …

-  Non, non, ce n’est pas de ta faute. J’y songe sans arrêt malgré que j’essaye d’oublier … après tout ce que j’ai enduré, tu ne peux pas savoir à quel point simplement y repenser me fait mal ! J’avais réalisé mon rêve malgré les difficultés, je pensais mon chemin tout tracé ! Et … et puis, tout à basculé tellement vite, les problèmes se sont succédés à une vitesse folle ! … Jusqu’à ce que je me retrouve au fond. J’espérais trouver une solution pour m’en sortir … mais cette solution, elle ne venait jamais ! »

Alors que ses larmes se déversaient de plus en plus abondamment sur son visage, Blow passion donna furieusement un grand coup sur la terre ferme, rageant de colère à la mention de ses souvenirs de paradis perdu. Drawlife sursauta de peur, surpris par ce changement soudain de comportement de la part de la licorne.

« C’était injuste ! J’en voulais au monde ! cracha-t-elle entre ses dents. J’étais incapable de m’en sortir seule, et les rares personnes qui me croisait ne faisait que m’enfoncer encore plus ! Ils profitaient de moi et me laissaient ensuite pourrir au fond de ma ruelle ! Tous des salopards, je les détestais !

-  Hé, calme toi, c’est finis tout ça, pria l’étalon en haussant un peu le ton.

-  Je n’avais plus nulle part où me réfugier, j’étais au bord du gouffre, tu comprends ? poursuivit la jument, s’effondrant dans un nouveau sanglot. J’avais du mal à rester derrière cette barrière qui m’empêchait d’y tomber, chaque jour je me demandais s’il n’était pas plus simple de la franchir. Je n’avais plus rien à quoi me raccrocher, plus rien en quoi espérer, absolument plus rien ! »

Le poids des souvenirs devenant trop douloureux pour elle, les lèvres tremblantes de colère et de chagrin de Blow Passion ne lui autorisèrent bientôt plus que des balbutiements, jusqu’à être incapable de prononcer le moindre mot, pour finalement enfouir son museau entre ses pattes, camouflant difficilement ses pleurs. A ses cotés, Drawlife était sujet au même mutisme ; cela lui faisait un point au cœur et à la gorge que la licorne lui confit tout ses malheurs, car ils lui rappelaient que trop bien ses propres épreuves douloureuses dont les cicatrices ne s’étaient pas entièrement refermés.

Et parce qu’il avait dut endurer plus ou moins le même cauchemar, Drawlife parvenait en partie à comprendre la réaction de la licorne lorsqu’il l’avait trouvé à Canterlot. Elle avait dut subir quantité de coup fourré et d’escroquerie, allant apparemment même jusqu’à la trahison : de quoi perdre toute confiance en son prochain. Il n’était alors pas étonnant qu’elle se soit autant méfiée de lui à leur première rencontre. Après tout, qui accorderait du crédit à un inconnu après que notre confiance ait été bafoué ? Il pouvait s’estimer chanceux d’avoir réussi à obtenir sa confiance.

Cette idée lui trotta dans la tête jusqu’à ce qu’une brise chaude traversant le parc et agitant les feuilles des arbres lui fasse lever spontanément la tête vers les étoiles. Et quelque chose à leur sujet lui fit faire un mouvement de tête dubitatif. Il les avait observé, compter, étudier sous tout les angles pendant une bonne heure, et pourtant, il n’aurait sut dire pourquoi ni comment, mais la voûte céleste lui semblait différente, plus lumineuse, plus … joyeuse. Ce détail le troubla, mais pas dans le mauvais sens du terme, non, mais plutôt comme s’il elles lui envoyaient un message. Il n’aurait su dire exactement lequel, mais en baissant les yeux vers la licorne en pleurs à ses cotés, il sut d’instinct que cela la concernait.

Remis en confiance à cette pensée, Drawlife passa doucement une patte par-dessus la jument avachi, et la logea précautionneusement contre lui, afin qu’elle puisse continuer ses pleurs sur quelque chose de moins inerte que l’herbe. C’était la deuxième fois qu’il servait d’épaule sur laquelle se consoler, mais malgré son expérience précédente, Drawlife n’eut aucune hésitation à le faire, car il savait très bien que dans l’état où se trouvait Blow Passion, sentir la chaleur amicale de quelqu’un contre soi était la chose la plus réconfortante que l’on puisse trouver. Mais cette fois ci, celle qu’il souhaitait réconforter accepta son geste sans protester, s’approchant encore un peu plus de l’étalon pour profiter de son contact et pouvoir prendre appui sur lui.

Drawlife continua son silence, se disant que ce rapprochement suffisait comme message de réconfort, et continua de la serrer tranquillement contre lui, laissant par moment une de ses pattes parcourir la longue crinière de la jument. A la contempler docilement loger son museau contre son poitrail, il ne put réprimer une bouffée d’attendrissement, pensant du même coup à lui-même se cajolant entre les pattes de sa mère. Lentement, les pleurs de Blow Passion s’étouffèrent en sanglots, avant de mourir complètement, lui permettant ainsi de s’exprimer distinctement.

« Excuse moi, je dois être ridicule, souffla-t-elle la voix encore tremblante, je suis là à te cracher mes malheurs alors que tu as sûrement d’autre soucie à gérer avec ton amie.

-  Ne dis pas ça, semonça gentiment l’unicorne, bien sûr que ça me préoccupe de m’être disputé avec Rarity, mais ça reste une petite divergence d’opinion, une broutille à coté de ton cas.

-   Drawlife, s’il te plaît … riposta sèchement la jument, Rarity est ton amie, tandis que moi je ne suis qu’une ancienne camarade de classe que tu as trouvé dans une ruelle sombre…

-  Holà-holà ! Qu’est ce que tu vas t’imaginer ? »

Lentement mais fermement, Drawlife saisit le menton de la jument afin de pouvoir la regarder droit dans les yeux, qu’il puisse lui montrer qu’il ne disait rien de façon gratuite. Celle-ci fut presque apeurée de la dureté du geste de l’étalon.

« Avant de te trouver, j’avais fait quelque chose qu’encore maintenant je trouve stupide d’avoir fait. J’avais entre autre laissé en plan Rarity à cause d’une peur idiote. Et tu sais quoi ? Si on m’offrait une seconde chance, je referais la même stupidité, simplement parce que ça m’as permis de te sortir de ton calvaire.

-  Drawlife …

-  Tu vas encore me dire qu’on ne se connaît pas assez, ou je ne sais quelle excuse encore, mais honnêtement, le peu que j’ai put faire pour toi jusqu’à présent ne te suffit pas comme preuve que je te considère comme une amie ? »

En disant cela, il se fit naturellement une revue de ce qu’il avait effectivement fait pour Blow Passion jusque là … pas grand-chose en fait, a son plus grand regret.

« Pour tout te dire, si aujourd’hui je ne suis pas venue te voir, se reprit aussitôt Drawlife, c’est parce que plusieurs obligations que j’avais trop longtemps négligé me sont tombées dessus. Et si j’ai craqué tout à l’heure avec Rarity et que je me suis à moitié enfuie, c’est parce que j’avais l’impression de j’allais tout faire de travers. J’avais peur à ce moment là de faire les mêmes gaffes avec toi. »

Blow Passion n’essayait même plus de répondre. A la place, elle se libéra du sabot de Drawlife et fixa à nouveau le sol. L’étalon n’arrivait pas vraiment à la comprendre ; il avait pensé qu’elle serait plus encline à accepter son aide, et pourtant, elle avait l’air de s’obstiner à rester seule, comme si elle se punissait de quelque chose. Çà n’empêcha cependant pas Drawlife de continuer à essayer de la convaincre.

« A Canterlot, quand je t’ai dit avoir failli finir comme toi, c’était encore plus vrai que je ne le pensais. Sans le soutien que j’ai eu de Rarity et de certaines de ses amies, j’aurais franchis cette même barrière … définitivement. Et parce que j’ai failli sombrer, je veux pouvoir à mon tour aider quelqu’un à ne pas subir ce sort. C’est vrai que j’aurais put faire ça pour n’importe qui dans ce quartier, mais je n’avais pas réalisé ce désir avant de t’avoir trouvé. Et encore jusqu’à maintenant, je n’étais pas certains de ce dans quoi je me lançais. Mais à présent j’en suis convaincu. Laisse-moi être ton ami Blow Passion, laisse-moi t’aider ! »

En prononçant ces derniers mots, l’étalon se sentant un peu décontenancé. Il avait pensé chaque phrase, chaque idée, mais elles n’étaient pas sorties d’entre ses lèvres de la même manière qu’elles s’étaient formées dans son esprit, comme si il avait été aidé par une force extérieure. Mais malgré cette impression étrange, il supposait avoir été clair dans son message.

Cependant, la licorne n’eut pas une réaction immédiate, continuant de fixer ses sabots avec une expression étrangement neutre sur le visage. Alors qu’il avait pris de l’assurance, l’attitude qu’elle maintenait le mis quelque peu mal à l’aise, lui donnant l’impression qu’il avait dis quelque chose de mal placé envers la jument. Puis, quand celle-ci se leva calmement, il commença sérieusement à se demander où il avait bien put gaffer ; avait-il été trop direct, ou alors, avait-il été insultant dans ses propos ?

« Comme je te le disais, expliqua-t-elle en regardant droit devant elle d’un air sévère, j’ai dut pendant longtemps abandonner l’idée de me faire des amis, parce que rien ni personne me le permettait. Je m’y étais fait en je pensais pouvoir vivre avec. »

Intrigué par ce soudain ton affirmé, Drawlife la laissa continuer, restant assis pour ne pas l’interrompre d’une quelconque manière.

« Mais … jusque là, continua-elle sur un ton plus doux en fermant les yeux, je n’avais plus rencontré un garçon comme toi. Quand je te vois, quand tu me parle, je n'ai pas la sensation d’être prise pour un simple objet au service du premier profiteur venu. Tu ne peux pas savoir à quel point ça me fait du bien d’être considéré tel que je suis, et non pour ce que je représente. C’était un sentiment que j’avais peur de ne plus jamais connaître. »

A ce moment là, Blow Passion se pencha de nouveau vers l’étalon, et lui attrapa une patte pour l’intimer de se lever. Celui ci le fit sans hésitation, le sourire aux lèvres à l’idée d’avoir enfin eut la confiance de la licorne. Tout les deux se regardèrent pendant quelques secondes, Drawlife surplombant de sa hauteur la jument, comme si chacun essayait de savoir à quoi l’autre pensait. Puis, tout en penchant affectueusement la tête sur le coté, la jument approcha un peu plus son visage de celui de l’unicorne.

« Alors oui Drawlife, chuchota -t-elle à quelque centimètre du museau de l’étalon, je serais ravie que l’on devienne ... amis. »

Si un coeur était vraiment capable d’exploser, celui de Drawlife aurait subit ce sort tellement celui ci s’emballait à cet instant présent. Il sentait cette chaleur de bonheur qui lui prenait la poitrine, de la même façon qu’avec Rarity, et simplement pour ça, il pensait sa journée finalement réussi. Ça lui semblait étrange, mais il avait soudainement l’impression que c’était de cette manière là que lui et Rarity s’était lié d’amitié. Il n’avait plus qu’à tout faire pour que celle entre lui et Blow Passion dure aussi longtemps.

La licorne resta un petit moment à fixer tendrement Drawlife, comme si elle attendait quelque chose de sa part. Cela décontenança un peu, ne sachant pas comment réagir à présent face à sa nouvelle amie, mais il n'eut pas à réfléchir trop longtemps, car elle fit gracieusement volte face, entamant une marche dans la même direction que sa venue.

« Hey, Blow Passion, où tu vas ? s’étonna quelque peu Drawlife.

-  Et bien, je ne sais pas toi, mais j’ai personnellement eut mon compte en nuit passé à la belle étoile » rappela-t-elle d’un regard en coin.

L’étalon se trouva un peu bête. C’est vrai qu’il était lancé à la base pour dormir dans ce parc, seulement il n’avais pas prévu que la licorne le rejoigne. Aussi, comprenant bien qu’elle n’était certainement pas très enthousiaste à dormir ici alors qu’un lit douillet l’attendait, l’étalon se dit que s’il tenait vraiment à Rarity, ce ne serait pas un mal de régler leur petit différent tout de suite.

Et puis, être à proximité de poney qu’il appréciait lui accorderait sûrement une meilleur nuit. Il ne savait pour pourquoi, mais il avait soudainement la furieuse impression d’être observé dans ce parc.

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shuryt
shuryt : #6805
L'espoir...enfin j'ai de l'espoir pour drawlife.
Sa fait plaisir de voir les choses s'amélioré :)
Je suis encore un peu inquiet avec twi mais la paranoïa instauré précedement c'est calmé :P
Il y a 3 ans · Répondre

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