Chapitre 1: FM (No Static At All)

Give her some funked up music, she treats you nice
      Feed her some hungry reggae, she'll love you twice 
      The girls don't seem to care tonight
      As long as the mood is right

No static at all (No static, no static at all)
      F.M. (No static at all)

Steely Dan- F.M (No Static at All)

Après avoir inventé des choses aussi incroyables que le télégraphe, le gramophone ou le thermos qui garde le chaud chaud et le froid froid, Equestria voyait naître sous les sabots de Thomas Hoofison une nouvelle invention qui allait changer la vie du Royaume : la radio. Au départ marginal, le système radiophonique s’était généralisé dans tout Equestria, jusqu’à atteindre Poneyville, où presque tous les habitants s’étaient dotés du boîtier plus ou moins grand qui faisait entrer la bande FM dans leur salon, chambre ou salle de bains.

Peu à peu, les ondes se voyaient prises d’assaut par des citoyens qui se chargeaient d’animer les studios radios dont s’était dotée la ville. Les balbutiements du système faisaient que seule une tranche horaire était définie pour faire fonctionner les postes : entre 20 heures et 23 heures du dimanche au vendredi. Les gens se fichaient bien que cela ne marche pas en journée, puisqu’ils travaillaient ou vaquaient à leurs occupations, et les pégases ne pouvaient pas l’écouter en faisant la météo, tout en haut dans le ciel. Mais sitôt la nuit tombée, tous se précipitaient pour tourner le bouton « ON » de la radio afin de profiter de leurs émissions préférées.

Deux musiciennes bien connues se partageaient les auditeurs : Vinyl Scratch sur Pony Rock et Octavia Melody sur Radio Poneyville. Venues de Canterlot, chacune animait sa station avec leurs émissions phares de la soirée. Musique, actualité et invités créaient un cocktail gagnant pour les deux radios, qui partageaient le même bâtiment. Dans Poneyville, tout le monde avait sa radio favorite, parfois différente au sein d’une même famille, et on ne comptait plus les disputes au sein des foyers entre parents et enfants pour prendre le contrôle du poste. Octavia pour les uns, Vinyl pour les autres, le style posé de la première pour certains, le style cool et rock’n’roll de la seconde pour d’autres… La guerre des ondes ne faisait que commencer.

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« Attention ! Antenne dans 3…2…1…. », le compte à rebours venait de la régie. L’étalon descendit le sabot pour indiquer le top signalant l’heure fatidique, l’heure à laquelle une jument pouvait faire son show.

« Il est 20 heures et vous êtes sur Pony Rock. Amis du soir et de la guitare, bonsoir », commença Vinyl pour démarrer ses trois heures d’antenne quotidiennes de la semaine. « Vous êtes prêts à bouger ? »

« OUAIS ! » s’écriaient des centaines de poneys derrière leur poste de radio, tous en effet prêts à ne pas perdre une miette de l’émission de leur DJ favori.

« Je vous entends tous d’ici, c’est bon de vous savoir tous avec nous ! », reprit Vinyl. « Vous connaissez notre devise : ce soir, on se bouge la croupe ! Alors on ne perd pas de temps, j’attends vos demandes de dédicaces et on vous balance le son numéro un du moment : The Equine League ! »

A son tour, un sabot blanc se leva pour faire signe à la régie que le disque devait partir, et un étalon au pelage brun et à la crinière noire surnommé Plug se chargeait de lancer chansons et jingles durant l’émission. Et l’énergie de Vinyl ne retomberait que trois heures plus tard, lorsque l’heure du coucher sonnerait.

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« On démarre dans 3..2…1…Top ! »

« Bonjour à tous, chers auditeurs. Il est 20 heures et je suis une fois de plus heureuse de venir vous retrouver pour mon émission. Je suis Octavia Melody, fidèle au rendez-vous sur Radio Poneyville», commença la jument, au ton de voix plus calme et au rituel immuable depuis sa prise d’antenne. Les fiches bien organisées devant elle, avec le conducteur de l’émission, la bouteille d’eau à proximité pour les gorges sèches et son assistant, et aussi patron, Mixtape, en régie, tout était parfaitement en place.

« Avant de laisser place à la musique, voici tout d’abord le programme de l’émission : pour commencer, les informations toutes les heures, puis nous passerons les disques que vous avez choisis avant de recevoir Lyra Heartstrings, qui viendra nous jouer des morceaux avec sa lyre. Bonne soirée à tous. »

Le son d’un piano de Frederic Horseshoepin entra dans son casque avant qu’elle ne le retire le temps de la chanson. Si les musiques diffusées étaient moins ‘dansantes’ que celle de Vinyl, Octavia ne disait pas non aux succès du moment dans son émission, tout en essayant d’insuffler un peu de classique venu de Canterlot dans les oreilles de ses auditeurs. Il n’y avait alors rien de bizarre à voir du Horseshoepin côtoyer du Neightallica dans son show. Après tout, elle n’était pas du genre à dire non à un peu de bougeotte dans sa playlist, surtout après l’incident avec Pinkie Pie lors du Grand Gala Equestre.

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3 heures plus tard

« WOOOHOOHH ! C’était Bits for Nothing pour finir notre émission. Avant qu’on se quitte, je vous rappelle mon set de DJ samedi prochain au bar de Berry Punch. Venez nombreux ! On se dit à demain les copains et…..restez classe, Poneyville. » A peine les mots prononcés que la radio cessait d’émettre, permettant à Vinyl d’enfin retirer son casque et d’arrêter de se tortiller sur son siège, avant, pendant et après les morceaux.

« Génial Vinyl ! T’as été parfaite, comme d’hab ! » lui dit Plug depuis la régie en parlant dans son micro dédié.

« Ouais, mais franchement, tu m’as déjà vu faire une émission naze ? » lui demanda la jument en arrivant en cabine pour lui donner un hoof five traditionnel après chaque soirée réussie.

« Tu as oublié la fois où tu as mangé les muffins d’Applejack ? » sourit Plug, qui ne manquait pas une occasion de ressortir cette histoire.

Derrière ses lunettes, il ne pouvait pas voir les yeux froncés de Vinyl qui se rappelait avec horreur de cette funeste journée, où son estomac avait failli ne pas survivre. « Ouais, ouais…Mais j’ai quand même fait l’émission ! » rétorqua celle qui était plus connue sous le nom de DJ Pon-3 dans les clubs.

« Je me souviens encore des gens qui venaient nous dire que les bruitages de vomi était ultra-réalistes le lendemain ! » rit Plug, en se souvenant de la suite, quand tout le monde pensait que c’était une blague du 1er avril faite en avance.

« Bon, assez de bla-bla. On se voit demain, mec ? » le coupa Vinyl.

« Ouaip. Comme d’hab, mais essaye d’arriver un peu en avance cette fois. »

« J’étais là à 19h59 ! C’était mieux que la dernière fois, non ? » s’offusqua-t-elle en levant les sabots en l’air.

« C’est clair que tu ne pourras jamais battre ton record après être arrivée à 22h59…. », Plug leva les yeux au ciel. La jument blanche n’était pas très connue pour sa ponctualité, ni pour son hygiène de vie très saine.

« Que veux-tu ? J’aime pas les lundis », conclut Vinyl avant de le prendre dans ses sabots pour l’habituel cri de guerre. « Pony Rock, on déchire…. »

« UN MAX ! » finit Plug avant de lui faire un salut dont eux seuls avaient le secret. « Bon, à demain Vinyl. »

« Ouais c’est ça. A demain mon pote. » Elle quitta le studio avant de se diriger vers sa maison, afin de travailler sur ses prochains mix, au plus grand désespoir de ses voisins qui n’en dormirait pas de la nuit. Une fois de plus.

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Dans un studio tout proche, une licorne couleur menthe finissait sa chanson à la lyre, juste à temps pour qu’Octavia puisse terminer son émission à l’heure.

« Merci beaucoup, Lyra Heartstrings, pour nous avoir offert cette magnifique démonstration sonore de ton instrument », entama Octavia dans le micro en face d’elle tout en souriant à la licorne. « Il est presque l’heure de nous quitter et avant de rendre l’antenne, une dernière chose pour vous mes amis auditeurs. Je serais comme d’habitude en concert samedi au théâtre de Poneyville et je vous y attends nombreux. Il ne me reste qu’à vous souhaiter une bonne soirée et faites de beaux rêves en compagnie de Luna. »

« Et….top ! » lui dit Mixtape en régie en appuyant sur le bouton amenant le silence dans les foyers branchés sur Radio Poneyville. « Bravo Octavia, parfaite comme d’hab. »

« Eh, tu sais que sans toi, ça ne serait pas pareil », le complimenta la musicienne en enlevant son casque. « Lyra, t’as été super aussi », dit-elle en tournant les yeux vers son amie. « J’adore quand tu viens jouer ici et les auditeurs aussi. »

« Hahaha, de rien. De toute façon, Bon-Bon dit que je joue trop fort pour elle quand je pratique chez nous », expliqua Lyra. « Tu te rends compte ? Je joue trop fort pour elle ! Tu devrais plutôt l’entendre hurler quand je lui fais ce truc avec ma corne au lit, tu sais celui avec- » Octavia l’empêcha d’aller plus loin en lui mettant un sabot sur la bouche.

« Euh Lyra, c’est gentil de vouloir me faire partager ta vie conjugale mais c’est pas l’endroit pour ça », la coupa Octavia, avant de se pencher vers elle. « Mais garde moi ça pour la prochaine fois qu’on se fait une soirée entre copines », murmura-t-elle en accompagnant ses mots d’un sourire.

« Pas de souci, Octy », lui sourit Lyra avec la même intensité.

A l’évocation de ce surnom, elle fronça immédiatement les yeux mais reprit vite ses esprits devant son amie. « Pas de ‘Octy’ ici. Je suis ta copine mais il y a des limites », répliqua gentiment la musicienne au pelage gris.

« Pourquoi tu détestes que je t’appelle comme ça ? C’est mignon pourtant ! » s’exclama Lyra.

« C’est comme ça que Vinyl m’appelle chaque fois que je la croise », répondit Octavia.

« Oh, elle est cool tu sais. Vous feriez un sacré couple vous deux ! »

« Ne me parle pas de malheur… », rétorqua plus sèchement son amie. « Je te raccompagne ? »

« Ouais si tu veux », dit Lyra avant de s’écarter pour laisser Octavia passer en régie afin de saluer Mixtape, un poney terrestre au pelage bleu pâle et à la longue crinière blonde.

Le régisseur la prit dans ses sabots affectueusement pour lui faire le câlin rituel de fin d’émission. Un lien d’amitié très fort les unissait depuis qu’ils avaient découvert leur passion commune pour la radio. « Demain c’est le jour des audiences. Les toutes premières de l’histoire de la station. J’espère que tu seras là tôt pour les découvrir », lui dit Mixtape.

« Oh, t’inquiète pas, je serais là à l’heure. On devrait être quoi ? Numéro 3, 4, 5 ? » s’enquit Octavia.

Mixtape cligna des yeux. « Tu rigoles ? Vu la puissance requise demandé par les postes de radio, on doit être numéro un ou deux. Ça se jouera entre nous et Pony Rock », l’informa l’étalon.

« Encore et toujours Vinyl », soupira Octavia. « Déjà à Canterlot, on se tirait la bourre pour les contrats… », poursuivit-elle, en se remémorant la période où toutes deux vivaient dans la ville de Celestia. Octavia jouait dans les plus grandes salles de concerts au sein de l’orchestre Royal et Vinyl jouait dans les plus grandes boîtes de nuit, acquérant chacun une popularité jamais démentie avec leurs publics respectifs : les nobles pour Octavia et les fêtards pour Vinyl. La perspective d’une carrière en radio leur offrait la possibilité de faire ce dont elle rêvait tout en continuant à profiter de leur passion sitôt le poste coupé. Et Poneyville était bien plus accueillant que Canterlot. Surtout au niveau des loyers.

« On sera premier. Tu verras », la rassura Mixtape avant d’éteindre le studio. « A demain, Octavia. »

« A demain Mix », lui répondit sur le même ton chaleureux la jument avant de sortir du studio en compagnie de Lyra.