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Pommes & Plumes

Une fiction écrite par BroNie.

Chapitre 3

Pommes et Plumes

 

Troisième Chapitre

 

Auteur : Bro-Nie




Spitfire posa un sabot sur son articulation et accompagna le mouvement de la patte. Elle sentit ses ligaments tirer et accueillit la très légère douleur avec un grognement de satisfaction. Elle n’était pas masochiste, c’était juste qu’elle avait fini par apprécier ce signal du corps, cette petite pique dans les nerfs qui indiquait qu’on était toujours vivant, et prêt à se déchaîner. C’était une règle qu’on lui avait inculqué depuis le cirque, et qui s’était toujours vérifiée, celle qui disait qu’il valait mieux avoir un peu mal à l’échauffement, que très mal en pleine représentation, parce que le corps claquait.

 

Autour d’elle, quelques poneys faisaient comme elle quelques exercices, de la course surplace, au saut à la corde pour les plus équipés. Mais il n’y avait pas à y regarder par deux fois : eux étaient des amateurs. Leurs mouvements étaient perfectibles, certains très mal exécutés. Spitfire pouvait même prédire que si cet étalon crème continuait de plier la patte en forçant comme ça, à chaque fois qu’il faisait du sport, il se réduirait le genou en bouillie dans les dix ans.

 

Enfin, après tout, voir des amateurs à une course amateur, c’était plutôt logique. Dans les grandes collines verdoyantes qui jouxtaient Ponyville, on comptait plusieurs dizaines de ces aficionados de sport, venus défendre leurs couleurs à la première édition de la Course des Fleurs.

D’après ce que Spitfire avait compris, l’événement était organisé par la fleuristerie du village, bien qu’elle ne comprenait absolument pas ce que les fleurs pouvaient avoir en lien avec le sport. Bon d’accord, il était de coutume que le gagnant d’une course remporte un bouquet - et Spitfire était bien placée pour savoir que certains étaient délicieux - mais ça n’allait pas au delà. Enfin, ça ne serait pas la première fois qu’un commerce se piquerait d’organiser une compétition sportive. Et en fin de compte, ça importait assez peu. L’important, c’était la course en elle-même.

 

Elle reposa sa patte à terre, et fit quelques amples mouvement des ailes. Les grands appendices jaunes brassèrent l’air autour d’elle, dispersant brins d’herbe coupés et pétales de fleurs dans les alentours. Le mélange du tout donnait une odeur assez agréable. Spitfire ne pouvait pas vraiment dire que les courses étaient réputées pour leur qualité olfactive, mais pour une fois...

 

Tout en faisant quelques étirements du cou, elle sentit quelqu’un se poser juste à côté d’elle.



Elle n’avait même pas à y porter son attention pour reconnaître Soarin : l’affreuse chemise à fleurs qu’il refusait d’ôter depuis qu’ils étaient en vacances était plus reconnaissable que n’importe laquelle cutie mark.

 

_Y a du monde quand même pour une course amateur, fit remarquer le pégase en désignant du museau la foule qui se rassemblait petit à petit, sur le parcours.

 

_La boutique de fleurs à bien fait son boulot, répondit Spitfire. La preuve, on a été mis au courant, jusqu’à Cloudsdale.

 

_Ouais...c’est pas du tout parce que t’as envoyé nos groupies surveiller Ponyville H24, histoire de découvrir quelque chose qui t’aiderait avec Applejack, hein ?

 

_Soarin, la dernière fois, toi tu as utilisé les groupies pour te faire cuisiner une tarte géante...

 

Le pégase baissa la tête et marmonna dans sa barbe “que ça n’avait strictement rien à voir”.

 

_Au lieu de dire n’importe quoi, reprit Spitfire, aide-moi plutôt à enfiler ma tenue, tu veux ?

 

Ah, la fameuse combinaison de vol des Wonderbolts, le légendaire costume bleu et or. Une merveille de technologie, un concentré de génie à l’état pur. Résistant, élastique, conçu pour améliorer l’aérodynamisme. Non, il n’y avait rien à redire sur cette tenue. Si ce n’était qu’elle était quasiment impossible à mettre.

Ce n’était pas une plaisanterie si une des épreuves des cadets à l’académie de vol, consistait à enfiler sa tenue le plus vite possible. Même Spitfire, qui avait pourtant l’habitude de la combinaison, n’était pas contre un sabot amical pour l’aider à l’enfiler.

 

Elle passa les pattes antérieures en premier, validant une vielle plaisanterie qu’elle aimait ressortir quand on lui demandait comment est-ce qu’au nom du Tartare, elle faisait pour revêtir la tenue : une jambe après l’autre, tout simplement.

 

C’était tout à fait le cas. Pattes antérieures, un peu de gymnastique pour aider le tissu à se mouler autour de la croupe, un coup de sabot de Soarin pour dégager sa queue. Le reste, c’était une question d’habitude : tendre les pattes postérieures en avant, comme pour un étirement, et les glisser dans les jambes de la combinaison. Plus qu’à cabrer le dos, laisser passer les ailes, et ça serait bon.

 

_J’ai jeté un oeil au terrain, dit Soarin alors qu’il aidait l’aile droite de son amie à passer par le trou adéquat. J’ai remarqué qu’il y avait une bande d’une centaine de mètres en terre fraîche, que les organisateurs ont trempé toute la nuit avant l’épreuve.

 

_Et alors ? demanda Spitfire, qui se saisit de la fermeture éclair de sa tenue, la remontant lentement.

 

_Ben du coup...est-ce que ça veut dire que toi et Applejack vous allez devoir traverser une mare de boue, et tout ça ?

 

Spitfire leva les yeux au ciel alors que Soarin retenait à peine son gloussement. C’était un compagnon agréable, mais qui des fois, manquait réellement de finesse.

 

_Remballe tes fantasmes mon vieux, le tempéra t-elle, en finissant de s’habiller. Ça existe que dans les magazines, les juments qui se vautrent dans la bouillasse.

 

La fermeture éclair remonta jusqu’à son cou.

 

_Et de toute façon, le faire dans la gadoue c’est pas top : t’as aucune prise.

 

Le Wonderbolt écarquilla les yeux. Est-ce que le capitaine venait de suggérer que...

 

Spitfire se pencha à l’oreille de Soarin pour porter le coup de grâce.

 

_Par contre, ça donne une super excuse pour passer à la douche, après. Et ça, c’est assez génial dans son genre.

 

La mâchoire du pégase s’ouvrit en grand, laissant une Spitfire ricanante tapoter gentiment la joue de Soarin, avant de déployer ses ailes, et de rejoindre la ligne de départ.

Elle aimait bien taquiner son ami quand il dépassait un peu les limites. Spitfire était pourtant du genre à rire de tout avec tout le monde, mais il ne fallait pas trop la chercher sur le terrain de ses petites amies. Même si techniquement, Applejack ne l’était pas encore. C’était en bonne voie, cela dit : elles s’étaient embrassées à la soirée, et la cowpony avait accepté un vrai rendez vous, en bonne et due forme. C’était pas encore gagné, mais pour prendre une métaphore sportive, l'évolution du jeu lui semblait plutôt favorable.

 

Et pour filer la métaphore, voilà que sa partenaire entrait sur le terrain : Applejack trottait sur le petit chemin de terre qui serpentait au travers des collines, regardant autour d’elle avec intérêt, saluant de la patte quelques connaissances.

Spitfire la regarda venir vers elle, le sourire aux lèvres. Elle ne s’en lasserait jamais. Peu importait le nombre de fois où elle y avait songé, le nombre de fois où elle s’était posé la question. Il y avait juste quelque chose avec les juments...quelque chose qui l’attirait plus sûrement que la flamme d’une bougie pour un papillon.

 

_Y a plein d’poneys, constata Applejack en arrivant au niveau de Spitfire. Rose et les filles vont être contentes.

 

La terrestre fit un ample signe de la patte en direction de trois ponettes, aux crinières chargées de fleurs, qui s’affairaient sur une petite estrade en bois.

Spitfire en déduisit qu’il devait s’agir des organisatrices.

Une d’entre elle, terrestre rose à la crinière blonde dans laquelle était glissé des lys, vint jusqu’au couple, un sourcil levé en signe d’interrogation.

 

_Là je comprends plus trop, annonça la ponette à l’attention d’Applejack. La semaine dernière, je croise Pinkie, c’est limite si elle m’annonce votre mariage dans la journée, et me demande si je veux être la marraine des petits. Cinq minutes après, elle s’excuse, dit qu’il n’y a rien entre vous, mais me propose quand même d’être la marraine des futurs poulains, “quand ils seront là, parce que c'est mieux de s'y prendre tôt, c'est toujours ce que dit Twilight”. Et après, elle s'est mise à jouer de la musique, et à m'inviter à un récital de jazz donné par son crocodile. Bon, j’y avais pas trop fait attention, Pinkie, c’est Pinkie, tu la connais. Mais maintenant, vous venez toutes les deux à la Course des Fleurs ? Alors, vous êtes ensemble, ou quoi ?

 

_C’est compliqué Lily, marmonna Applejack en se grattant la crinière du sabot, visiblement embarrassée. Tu vois...

 

_C’est très simple, plutôt, corrigea Spitfire d’un ton un peu sec, s’avançant devant la cowpony, foudroyant la fleuriste du regard. On est deux juments adultes et vaccinées, on est libres de faire ce qu’on veut. Aujourd’hui, on fait la course, c’est tout.

 

La dénommée Lily marqua un temps de pause, surprise de la réaction de la pégase avant de mettre sa patte devant elle pour la calmer, et lui fit un large sourire.

 

_Désolée, s’excusa t-elle. Tu as raison, j’ai pas à m’en mêler, vous faites ce que vous voulez, bien sûr. Je vous souhaite bonne chance pour la course, les filles.

 

Elle s’éloigna rapidement, sans doute désireuse de ne pas envenimer la situation. Spitfire la regarda s'éloigner, une moue pincée sur les lèvres. Encore une fois, elle était coulante sur bien des sujets, mais détestait qu'on remette en cause ou en question, ses relations amoureuses. La seconde d'après, elle se rendit compte que se montrer aussi mordante devant Applejack n'avait peut-être pas été la meilleure des choses à faire. Mais quand elle se tourna vers la terrestre blonde, c'était la surprise, plus que tout autre sentiment qui dominait son visage constellé de taches de rousseur.

 

_Comment ça, “on fait la course” ? dit doucement Applejack, répétant les mots de la pégase. J’croyais qu’on v’nait regarder les autres courir, pas participer nous-mêmes !

 

_J’avais promis un rendez-vous sans alcool, rappela Spitfire, en faisant un geste de l’aile pour désigner le stand des rafraîchissements. Y a que de l’eau, et des jus de fruits. Et désolée si tu t’attendais à ce qu’on pose nos fesses sur le coussin d’un café de Canterlot, mais c’est pas trop mon truc. Je suis le genre de jument qui aime bien quand ça bouge.

 

Applejack mordilla sa lèvre inférieure. Elle semblait visiblement gênée par quelque chose.

 

_Un problème ? questionna la voltigeuse.

 

_Ben quand même...on est à une course d'amateurs, t'vois ? Les poneys qui sont là l'font pour la beauté du sport. J'comprends qu't'aies envie de courir aussi, hein, mais c'est juste que toi, t'es pas fr'chement une bleue. T'es même plutôt une experte, dans ton genre.

 

Spitfire se retint in extremis de céder à ses vieux démons, et de rebondir sur la fin de la phrase de la terrestre, sujette à tellement d'interprétation. Au contraire, elle se força à se calmer, allant jusqu'à replier ses ailes dans une attitude volontairement sereine, et baissa le ton de sa voix.

 

_Applejack, dit-elle doucement, je sais bien que je suis au dessus de nos adversaires aujourd'hui. C'est pour ça que je te promets, que si je gagne le premier prix, je garderais pas un bit pour moi. Je reverserais tout à une œuvre de charité.

 

_Tu f 'rais ça ? S'étonna la fermière.

 

_C'est ce que je fais à chaque fois que je gagne une course amateur. Je touche assez avec mes cachets dans les Wonderbolts pour pas avoir à m'inquiéter de ce que je mangerais demain. Alors si à côté de ça, je peux filer un coup de sabot à ceux qui ont moins de chance que moi...

 

_T'es une vraie Rarity en jaune, gloussa la cowpony.

 

L'image de la licorne aux ailes de papillon, et l'incident de la compétition des Jeunes Voltigeurs se rappelèrent à Spitfire, la vieille douleur de son menton se ravivant à ce souvenir.

 

_Si on veut, dit Spitfire, passant mécaniquement le sabot sur l'arrête de sa mâchoire. Sauf que moi, j'évite de mettre ma patte dans le museau des autres juments. A moins qu'elles le demandent, bien sûr.

 

Applejack eut un sourire en coin, le genre de moue qui voulait dire qu'elle avait très bien compris le sous-entendu, mais ne le relèverait pas. Ou du moins, ferait semblant de ne pas le relever.

 

_C'est drôle, constata Applejack en trottant doucement vers la ligne de départ, efflanquée de Spitfire. T'as dit « si je gagne ». A force de fréquenter Rainbow, j'm'attendais à c'que tous les Wonderbolts disent pl'tôt « quand je vais gagner ».

 

_Dash a confiance en elle, répondit Spitfire, d'un ton un peu professoral, alors que les ponettes rejoignaient le gros des concurrents, à côté de l'estrade. Peut-être un peu trop. Mais c'est un bon élément. Elle fera une bonne Wonderbolt.

 

Applejack allait acquiescer quand une jument à la robe beurre clair, presque blanche – une des trois organisatrices, debout sur l'estrade – leva la patte pour réclamer le silence.

 

_Bonjour à toutes et à tous, annonça t-elle, le sourire aux lèvres. Daisy, Lily et moi-même sommes ravies de voir autant de monde pour cette première édition de la Course des Fleurs. Pour la petite histoire, on a voulu organiser cette petite compétition quand une nuit, on a toutes fait le même rêve bizarre.

 

_Pas ce rêve idiot là, intervint une autre ponette rose à la crinière blonde, où le magasin était rempli de gens qu'on connaissait pas pour y travailler, même la Princesse, mais celui où on mettait sur sabot cette course.

 

_Alors on s'est dit qu'on allait le faire pour de vrai, intervint à son tour Lily, qui luttait pour ne pas perdre les fleurs dans sa crinière. Les règles sont très simples, Nous avons semé des pétales de rose, de marguerite et d'iris, tout le long de la piste. En fait, c'est la piste.

 

_De qualité, puisque les fleurs viennent directement du magasin, rit la première jument, visiblement satisfaite de sa plaisanterie.

 

_Le premier poney qui passe la ligne d'arrivée, gagne un an de bouquets gratuits à la boutique, et le droit de choisir le nom de la fleur que nous avons créée pour l'évènement.

 

Les ponettes pointèrent de la patte une jolie plante en pot, qui trônait sur l'estrade, aux couleurs chamarrées. Spitfire n'y connaissait strictement rien en plantes, mais elle la trouvait plutôt jolie.

 

_Si vous sortez de la piste, vous êtes éliminés, lança la seconde terrestre rose. Pareil si vous vous comportez de façon anti-sportive, ou si vous utilisez quoique ce soit d'autre que vos sabots pour vous déplacer. On est ici pour s'amuser, ne l'oubliez pas.

 

_Dernier truc marrant, rajouta la jument blanche, vous remarquerez qu'à plusieurs reprises, la piste se rétrécit pour ne laisser passer qu'un seul poney. Comme dans la zone boueuse finale, juste avant le finish. Faudra être le plus rapide, les amis !

 

Les poneys applaudirent à leur façon, tapant de leurs sabots sur le sol. Ils semblaient prêts.

 

_A vos marques, annonça Lily, alors que les participants se mettaient en place. Trois...

 

Spitfire tendit ses muscles, prête à bondir.

 

_Deux...

 

D'un geste vif du sabot, elle rabattit sa cagoule, dernier élément qui manquait à sa combinaison.

 

_Un...

 

Tout aussi promptement, elle donna un rapide coup de museau sur celui d'Applejack qui la regarda avec des yeux ronds.

 

_Pour la chance, ma belle, lui souffla Spitfire dans un sourire.

 

_GO !

 

L'air n'avait pas fini d'être expulsé des poumons de Lily, que la voltigeuse était déjà dans le peloton de tête.

Mais pas en première position. Spitfire aurait largement pu le faire si elle l'avait voulu. Mais elle l'avait l'expérience de la course, même si elle était plus accoutumée à la faire directement dans les airs.

Se placer directement en tête du cortège, c'était un coup de poker risqué. Si on tenait l'allure, ça permettait de gagner d'entrée de jeu, effectivement. Et si on avait assez d'avance, on pouvait même se permettre de ralentir un peu, et de garder des forces pour le sprint final. C'était la technique préférée de Rainbow Dash, et de quelques autres cadets à l'académie. Donner tout, tout de suite. Ce qui était sûr, c'est que si c'était bien maîtrisé, l'effet psychologique était dévastateur sur les adversaires. Ils finissaient par se persuader qu'ils ne pourraient jamais revenir en tête, et finissaient battus.

 

Oui, Spitfire aurait pu courir ainsi. Mais encore une fois, elle était une vieille briscarde de la compétition. Elle savait d'expérience qu'il valait mieux garder quelques cartes dans le paturon, plutôt que tout griller dès le départ.

La pégase préférait se placer en seconde, ou en troisième position, et attendre, tout simplement. Le temps jouait pour elle. Le capitaine des Wonderbolts savait comment respirer, comment placer son sabot, comment se projeter en avant pour s'aider du souffle du vent. Tous ces petits détails qui la faisaient presque avancer d'elle-même, et qui lui permettaient de s'économiser. En réalité, Spitfire ne courrait pas pour l'instant présent. Elle se préservait pour la fin. Sur les derniers mètres, quand le peloton serait à bout de forces, épuisé à force d'avoir tiré sur ses pattes. Elle, elle aurait encore de l'énergie à revendre. Et à quelques mètres de l'arrivée, elle donnerait tout ce qu'elle avait. Son sprint final la ferait caracoler en tête. Et elle gagnerait.

Comme elle le faisait presque à chaque fois.

 

Oh, il lui était arrivé de perdre, bien sûr. Des fois, elle n'avait pas réagi assez vite, des fois, elle était tombée sur meilleur qu'elle. Des fois, elle perdait même volontairement, lors des journées juniors des Wonderbolts, quand les jeunes poulains et pouliches pégases venaient rencontrer et “affronter” leurs idoles. Spitfire adorait voir leurs yeux briller comme des étoiles quand ils se précipitaient dans les pattes de leurs parents, criant qu'ils étaient plus forts que Soarin, Fleetfoot ou elle-même.

 

Quelquefois, elle se demandait ce que ça faisait d'être parent, d'avoir son petit bout de chou à soi, qui cavalait dans les nuages. Pas qu'elle avait un désir irrépressible de maternité, mais bon...

 

Spitfire chassa ses pensées de son esprit. Elle avait failli faire une erreur de débutante : laisser son cerveau vagabonder. Dans une course, le mental était peut-être encore plus essentiel que le corps. Il fallait rester concentré. Même si la pégase devait reconnaître que la croupe de la terrestre devant elle était charmante, elle ne devait pas...une minute. Robe orange, queue blonde, l'extrémité de cette dernière retenue par un chouchou rouge. Ca voulait dire qu'elle était derrière...

 

Comme pour répondre à son hypothèse, Applejack tourna légèrement la tête vers l'arrière en direction de Spitfire et fit un clin d'oeil, avant de cavaler de plus belle.

La pégase accéléra à son tour, avant de se rendre compte que ça devait faire partie du plan de la fermière. Au mess de l'académie, Rainbow Dash avait parlé des dizaines de fois de la compétition du poney d'acier et de la Course des Feuilles, qui avait vu sa course avec Applejack soldée par un ex aequo. Elle avait aussi longuement parlé de toutes les astuces utilisées par l'une et l'autre. Ca voulait dire qu'Applejak ne faisait pas la course qu'avec ses jambes. Elle courait aussi avec sa tête. Spitfire sourit, et ralentit légèrement la cadence, évitant de tomber dans le piège de la cowpony.

 

Une jument selon son coeur, cette Applejack.

 

Courir sur des pétales de fleur était plus complexe que ne l'aurait imaginé Spitfire. Les plantes dérapaient, rendant les choses compliquées avec la vitesse. Plusieurs poneys trop pressés étaient déjà sortis de la piste à cause d'elles.

La pégase devait faire attention. Ce n'était pas le moment de se faire éliminer pour une stupidité pareille.

 

Les premières douleurs commençaient à se faire sentir dans les pattes antérieures. Elle serra les dents et tenta de mieux répartir son poids sur ses sabots, pour éviter que ses jambes ne souffrent trop.

 

Les pétales commençaient à diminuer en nombre, et la piste, à rétrécir. On devait arriver sur la dernière zone de la course, là où on ne passait plus qu'à un poney. Et effectivement, la piste devenait un véritable goulot d'étranglement floral, dans lequel les poneys devant Spitfire, d'instincts, commençaient à former une file indienne. La voltigeuse se laissa aller à sourire. C'était le moment de leur montrer ce que c'était d'avoir appris l'agilité dans un cirque.

 

La pégase accéléra, jusqu'à se retrouver juste derrière son concurrent, un étalon prune, à la crinière empoissée de sueur. Sans qu'il puisse faire quelque chose, elle pris appui sur ses pattes arrière et sauta droit devant elle, lui passant par dessus, et atterrissant à quelques centimètres de son museau, reprenant sa course au moment où elle touchait le sol.

Elle entendit l'étalon hennir de surprise, et vaciller sur le côté. Un d'hors jeu. Plus que deux, d'après ce qu'elle voyait.

 

Son prochain adversaire était une licorne assez famélique, mais avec de longues pattes, qui faisait des sauts plus qu'elle ne galopait. Passer par au dessus sans se servir de ses ailes aurait été impossible, même pour elle. Elle le heurterait à coup sûr.

Alors elle passerait par en bas : elle plongea la tête en avant, alors que la jument était en extension. Roulée en boule, Spitfire parvint à se rétablir juste avant de se faire écraser par les sabots de la ponette, et se retrouva devant elle. Là encore, il lui sembla l'entendre partir hors-piste.

Les acrobaties auxquelles le capitaine des Wonderbolts se livrait pouvaient sembler tape-à-l'oeil, mais c'était une enfant de la balle. Elle avait le spectacle dans le sang.

Sans compter que techniquement, elle était toujours restée sur la piste, et n'utilisait que ses sabots. Elle se permettait même de jouer dans les règles.

Et bien il ne restait plus qu'une personne. Et bien sûr, c'était Applejack.

 

La crinière blonde de la fermière volait librement derrière elle. Elle avait du perdre son chapeau dans le feu de l'action. Spitfire s'accorda un court instant de déconcentration en se demandant de quoi elle devait avoir l'air avec la crinière totalement détachée. Elle devait sûrement être très migno...

 

La réalité rattrapa brusquement Spitfire quand elle se rendit compte que la piste florale bifurquait brusquement, presque à 90°. Elle avait failli se mettre toute seule hors-piste. La pégase se passa la langue sur les lèvres, et donna un coup de fouet, talonnant la fermière.

 

La piste s'arrêta brusquement, devenant le passage boueux qui avait tant été fantasmé par Soarin. Là, les choses devenaient délicates. Spitfire ne pouvait plus aussi bien négocier ses acrobaties qu'elle l'avait fait plus tôt, à cause du terrain, et aussi parce qu'Applejack allait très vite. Si la Wonderbolt faisait la moindre erreur, elle perdrait tout.

Spitfire était une jument prudente. Mais c'était aussi une joueuse de poker occasionnelle.

Et elle savait reconnaître les moments où il fallait faire tapis.

 

Elle s'élança, tentant de doubler Applejack par la gauche. Au même moment, la fermière tourna la tête sur le côté, peut-être dans l'espoir de voir où en était sa concurrente.

Le museau des deux ponettes se rencontrèrent violemment, dans un bruit mat. Par pur réflexe animal, elles s'éloignèrent l'une de l'autre, et continuèrent à galoper quelques secondes, avant de sentir que la terre était redevenue bien ferme sous leurs sabots.

 

Elles étaient toutes les deux sorties de piste. Le sifflet strident des arbitres confirmèrent leur élimination.

 

Ruisselantes de sueur, elles virent un des rares concurrents qui n'avait pas été éliminé, un étalon blanc à la crinière blonde nouée en catogan, remporter l'épreuve.

 

Le plus étonnant, constatèrent-elles alors qu'on le portait en triomphe jusque sur l'estrade, c'était qu'il ne semblait pas spécialement heureux d'avoir gagné, arborant un air des plus blasés.

 

On vint auprès des deux ponettes, leur apportant des serviettes et de l'eau, pour boire et éponger leur sueur. Les deux juments se turent quelques longues secondes, le temps de récupérer. Etouffant sous son masque, Spitfire l'enleva, laissant sa crinière cascader sur ses épaules. Elle s'éventa à même les sabots, cherchant Applejack du regard.

 

La cowpony était debout sur la colline la plus proche, regardant les fleurs autour d'elle. Spitfire vola jusqu'à elle.

 

_Une acrobate et une fermière qui font la course, sourit Applejack. On dirait le début d'une blague nulle de Pinkie.

 

_Tu sais c'est quoi l'avantage des blagues, mêmes nulles sur les histoires normales qu'on se raconte ? demanda Spitfire, restant en vol stationnaire au dessus de la fermière.

 

Applejack secoua la tête.

 

_C'est que les blagues, finissent toujours bien, elles.

 

_Tu trouves qu'ça s'est bien fini, toi ? demanda la terrestre. On a perdu toutes les deux, j'te rappelle.

 

_Ca veut donc dire qu'on va devoir remettre ça, ma jolie, sourit Spitfire.

 

_T'srais pas en train d'me poser un aut' rencard, toi ? questionna la fermière, le sourcil levé.

 

_Ca se pourrait bien. T'es partante ?

 

En guise de réponse, Applejack tendit la tête vers le haut, et captura les lèvres de Spitfire. Un coup de vent un peu brusque fit voltiger des pétales bleus et rouges tout autour du couple.

Après un long moment, Spitfire rompit leur baiser, regardant Applejack avec un sourire en coin.

 

_J'le suis, répondit la fermière en amenant doucement la Wonderbolt à terre, avant de nicher son museau au creux de son cou.

 

Spitfire ferma les yeux sous cette agréable sensation. Elle avait le sentiment que cette relation tiendrait finalement peut-être un peu plus que les autres.

 

_Spit ? demanda Applejack à l'oreille de sa nouvelle compagne. Tu veux bien me rendre un service ?

 

_Bien sûr, lui répondit aimablement la voltigeuse. T'as besoin de quoi ?

 

_J'ai perdu mon stetson pendant qu'on courait toutes les deux. C'est un souvenir de Pa, et ça m'ferait mal de plus l'avoir. Tu peux v'nir m'aider à r'mettre la patte dessus ?

 

Spitfire resta interdite quelques secondes devant une proposition à laquelle elle ne s'attendait absolument pas. Puis elle se mit à glousser et à donner un petit coup de museau à Applejack.

 

_Bien sûr que je vais t'aider. Allez, viens.

 

La pégase donna la patte à la terrestre qui la glissa sous la sienne.

Ce fut ainsi que sous un beau soleil d'été, l'on vit deux juments parcourir les collines fleuries, bras dessus, bras dessous à la recherche d'un chapeau brun.

 

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BroNie
BroNie : #35182
justabrony02 mars 2016 - #35172
franchement c'est une très belle fic en plus c'est un couple que l'on vois pas souvent j'espère qu'il y aura une suite...


C'était un oneshot (dans le sens d'histoire unique même s'il y a trois chapitres) faite en coécriture, à partir d'une image.

Y aura pas de suite. Du moins de ma part, je n'interdis à personne d'en faire une si il ou elle se sent inspiré(e)
Il y a 2 ans · Répondre
justabrony
justabrony : #35172
franchement c'est une très belle fic en plus c'est un couple que l'on vois pas souvent j'espère qu'il y aura une suite...
Il y a 2 ans · Répondre
CazillaAD
CazillaAD : #31997
J'ai jamais vu ce couple, et j'adore la manière dont tu l'interprète *-* Chapeau ! ( Oui, enfin, stetson en l'occurrence ).
Il y a 2 ans · Répondre
rainbownuit
rainbownuit : #24054
Sa me l'aise des faim
Il y a 3 ans · Répondre
GhostPonyRider
GhostPonyRider : #6557
J'applaudis. Bravo.
Il y a 3 ans · Répondre
BroNie
BroNie : #2483
Pour la petite histoire, c'est l'image de couverture qui nous a inspirés à penser à ce qui pouvait conduire à ce baiser au milieu des fleurs.

Et pour une fois qu'on faisait dans le fleur bleue :)
Il y a 4 ans · Répondre
La Furry
La Furry : #2479
mignon tout plein, j'ai apprécier lire ......je recomande a tous
Il y a 4 ans · Répondre

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