Wright Quill s’éveilla soudainement, pris d’un pressentiment. Cela faisait bien trois semaines qu’il avait publié l’article de Geek Writer, et comme chacun des deux craignaient, cela avait causé un grand chaos dehors. Il n’était plus rare de tomber sur un groupe de poulains délirants s’étant échappés d’une maison ou d’un immeuble faute d’hôpitaux ou de médecin digne de confiance. Dans ces moment-là, les poneys les plus responsables prenaient le temps d’essayer d’immobiliser le malade avant d’appeler la Garde… Mais le plus souvent, les poneys préféraient changer de trottoir. Que ce soit par peur, égoïsme, manque de temps ou autre, il était difficile d’en vouloir aux fautifs à cause du manque de compréhensions de la plupart des entreprises ne faisant aucun effort. Pas de repos pour les parents, renvoi des poneys démotivés ou surchargés de fatigue, refus de réaménager les heures de travail pour concorder avec les droits de visite ou les heures de consultations…
Le DailyMane a bien entendu relayé les conditions terribles que subissaient les pauvres parents, mais les poneys ne réagissaient à peine. Pire, les ventes du journal ont diminué au profit des tabloïdes relayant des infos indispensables comme le gâteau préféré de Celestia et les dernières glissades de Photo Finish. Alors que les temps s’assombrissaient, le peuple rejetait la Vérité au profit de la Moquerie, du mensonge amusant et des futilités. Le directeur du quotidien local ne pouvait être en colère contre les Manehattaniens. D’un côté il les comprenait. Il sortit du lit conjugal et de la chambre et entrouvrit la porte de son poulain. Oui il les comprenait, lui-même était père et savait qu’il perdrait l’esprit si son poulain était touché par la terreur diurne.
Le père de famille soupira et se retira dans la salle de bain pour commencer à se préparer. Il peigna sa crinière pour se donner un style traditionnel et un minimum conservateur. Quelque chose se préparait : son instinct de journaliste et son flanc le démangeait. C’est ça qui l’avait réveillé. Il ouvrit ce qu’il appelle "Le placard des occasions" et observa les cravates à l’intérieur ainsi que les vestes. Aussi étrange et effrayant que ça puisse être, pour la première fois de sa vie, il ne sentait pas si l’occasion était bonne ou mauvaise, positive ou négative. Chaque mot avait son importance et était souvent la première chose qui lui venait à l’esprit lors de ces démangeaisons. Mais cette fois ci, rien. Il déglutit alors que la question suivante lui venait en tête : Et si c’était à cause de ce qui se passait en ville ? Tout semble se détraquer, et maintenant, son vieil instinct qui ne lui avait jamais fait défaut aussi.
Il décida de mettre des vêtements de couleur neutre : vert bouteille pour la chemise et jaune dorée pour la cravate. C’est à ce moment précis que sa femme, réveillée par son absence lors de son sommeil passa sa tête dans la salle de bain.
« Oh ! Toi, tu as senti qu’il allait se passer de bonnes choses aujourd’hui ! Tu as mis des couleurs festives. »
On repassera pour la capacité de s’habiller convenablement selon les circonstances, pensa aussitôt le vieux directeur.
« Et bien en fait, je voulais mettre quelque chose de neutre… » commença Wright Quill avant qu’un petit pouffement de sa femme ne le coupe.
« Ahhh… mais que ferais tu sans moi dis donc ?
-Je serais habillé comme un clown ou un préparateur de fête alors que je voudrais être sérieux ?
-Un jour, peut être que tu sortiras un peu de tes longs articles pour voir un peu le monde qui t’entoure amour. »
Jamais Queen Dresser n’a montré d’inquiétude, et jamais elle ne le fera. C’est une ponette simple qui ne sait pas coudre ou confectionner de vêtement, mais qui saura toujours habiller un poney de la meilleure façon possible selon la situation. Donnez-lui les informations et un dressing complet et elle fera toujours des miracles. Elle était l’une des rares ponettes à avoir un physique extrêmement fin en plus d’avoir quelques centimètres de plus que la plupart des poneys. Cette anomalie physique serait due au fait qu’elle soit l’une des quelques arrières petits enfant de l’une des deux princesses, ou en tout cas, un des membres de sa famille. Sa robe était d’une soyeuse couleur rose et sa crinière était d’un blanc marbré.
Elle lui confectionna rapidement un petit déjeuner avant de le laisser partir non sans lui avoir volé un baiser, deux câlins, quelques dizaines de chatouilles et la promesse de faire les courses en échange d’une trêve de chatouille. Ces lâches attaques ne survenant que lorsque Wright Quill allait mal, aucune rancœur ne s’éveilla et ne s’est jamais éveillée. Le trajet fut tranquille et sans trop d’histoire pour la première fois cette semaine.
Ce n’est que lorsqu’il arrive à son bureau qu’il se rendit compte que quelque chose n’allait pas. Quelqu’un était déjà dans son bureau. Il observa calmement les alentours et dans l’ombre, il reconnut la silhouette d’un chapeau.
« Geek Writer ? »
Mais aucune réponse ne vint. Il se dirigea lentement vers son bureau, au fond des locaux. La journaliste lui aurait déjà répondu. Il sursauta alors : des poneys se cachaient dans les ombres ! Ceux-ci s’avancèrent à sa venue et lui barrèrent la route, l’encerclant par la même occasion. La plupart semblait être des terrestres, mais il était difficile d’en être sûr, l’obscurité et le fait qu’ils portaient chapeaux et écharpes empêchent de distinguer genre et espèce. Ils portaient aussi d’épais manteaux couvrant leur marque de beauté et Wright compris alors qu’il était au plus mal.
« Monsieur Wright Quill ? »
Une licorne mâle de carrure moyenne s’avança. L’individu était blanc à crinière rouge et était le seul à ne rien porter pour couvrir son identité. Et pour cause, il s’agissait de Truth Walker, l’avocat des Easy Money, capable de les innocenter en exploitant la moindre faille judiciaire. Il releva ses épaisses lunettes d’un agile mouvement de sabot avant de prendre sa voix la plus solennelle : celle qui réserve un sort terrifiant et hélas tout à fait légal et donc inévitable à sa victime :
« Votre société vient d’être rachetée par plusieurs particuliers. Ces particuliers forment donc les nouveaux actionnaires et dirigeants de votre journal et leur première décision est de vous évincer de votre place de directeur du journal au profit de la nouvelle : Money Maker…
-Money Maker ? Mais seul l’argent l’intéresse, elle va faire couler le DailyMane !
-Ce n’est plus votre problème et d’ailleurs, vous en avez un nouveau. Vos voisins se sont plaints de nuisances sonores perpétuelles et vous avez été expropriés…
-Des nuisances son… mais, c’est mon enfant, il joue enfin !
-Certes, vos voisins doivent être particulièrement imbuvables… C’est incroyable. »
L’insuffisance et l’ironie palpable de l’avocat faisait bouillir de rage le vieux journaliste qui aurait aimé lui bondir dessus et lui refaire le museau à coup de sabots. Mais autant inviter ses copains à le mettre aussitôt en pièce…
« Voici votre prime de licenciement. En vous dépêchant, vous pourrez vous trouver une maison pour vous et votre famille dans un petit village dans l’ouest d’Equestria, vous ne trouverez pas mieux ailleurs… ou bien ce sera pour un taudis. Je vous le déconseille, les services sociaux n’apprécient guère ce genre d’environnement pour les poulains… »
La menace était claire, mais Wright Quill abaissa la tête, vaincu et abattu. Truth Walker lui donna une bourse afin qu’un carton avec ses affaires et lui flanqua deux de ses gars pour officiellement l’aider à déménager. Officieusement, c’est pour le surveiller et l’empêcher de faire une bêtise.
***
Soft Driver, le cheval chauffeur, passa sa grosse tête par la fenêtre, tenant entre ses dents un sachet qui émanait une douce odeur de viennoiseries généreuses en chocolat et en carottes. Il posa le sachet aux côtés de Geek Writer qui était absorbée par l’observation minutieuse d’une pizzéria à travers des jumelles. Ces mêmes jumelles posées discrètement juste en dessous du rideau à la fenêtre de la diligence. L’intérieur était des plus confortables pour une ponette. Il y avait visiblement eu quantité d’aménagements effectués pour transformer l’intérieur du véhicule en planque mobile avec tout le nécessaire : étagère pour stocker quelques vivres, une petite couche pour se reposer et différents équipements de reconnaissances et d’observations.
« C’est l’heure de la relève. Va te reposer.
-Très bien. Je sens que c’est le bon coin, même à l’heure de fermeture, il y a plein de poneys qui vont et viennent, l’air bien parano. Certains montent visiblement la garde… Je pense vraiment que je vais pouvoir infiltrer l’endroit pour trouver des infos. »
Soft Driver préféra poser son sabot sur le museau de la jeune reporter pour la faire taire et l’obliger à se coucher. Elle se restaura un peu d’abord en mangeant deux croissants et se coucha en consultant ses notes.
Pendant ce temps, Soft Driver tira sa petite charrette contenant quantité de journaux et magazines et se grima en vendeur à l’aide une charmante casquette. Il ne souriait toujours pas et mesurait toujours deux ou trois têtes de plus que les poneys, mais au moins, il avait une casquette engageante. Ainsi, il pouvait continuer la surveillance, mine de rien, discrètement et essayer de rentabiliser un peu les éventuelles dépenses.
Une heure puis deux passèrent. Alors que la ponette à la robe grise était profondément endormie, un pigeon s’engouffra en piaillant gaiement, la réveillant en sursaut. D’un petit éclat magique, elle entreprit de retirer le message qu’il avait à la patte pour pouvoir le lire. Elle eut alors un petit hoquet de frayeur en s’extrayant de la diligence trafiquée avant de galoper vers une ruelle pour aller vers sa destination incognito. Soft Driver la laissa partir, ses oreilles de cheval ayant entendu les moindres exclamations de la ponette. Il se rendit juste à la diligence et observa le mot sur le plancher de celui-ci.
« Pour cause de changement de directeur et de rédacteur en chef, réunion obligatoire à 10h30 »
Il observa sa montre à son sabot. Ne restait plus que 20 minutes… Heureusement qu’ils n’étaient pas si loin que ça des bureaux du DailyMane, mais pour un message aussi important, le chauffeur nota qu’il a été envoyé au tout dernier moment, comme pour mettre en difficulté la jument reporter. Il nota dans un recoin de son esprit le nom figurant en bas de la note, la signant : Money Maker.
***
C’était l’effervescence au bureau et comme elle le redoutait, Geek Writer arriva la dernière, mais pas en retard. Heureusement que sa connaissance de la ville lui avait permis d’arriver rapidement au local. Elle prit place à son bureau et attendit, la gorge serrée.
Peu après, la nouvelle directrice fit son apparition. Il s’agissait d’une licorne d’âge mûr, mais pas encore grabataire. Elle porte un somptueux collier de perles dorées, une veste taillant sa silhouette gracile sur sa robe de couleur cerise. Sa crinière était rose pâle avec des reflets dorées, coiffée avec élégance, raffinement et sur lequel trônait un chapeau certainement cousu museau[1] par l’un des plus grand couturier d’Equestria. Elle parada un peu, jaugeant du regard les différents journalistes, examinant un papier ou deux, regardant dans son carnet qu’elle portait dans la poche de son tailleur… Puis enfin, pris la parole :
« Bien le bonjour, je vois que tout le monde est présent. Tant mieux, avec les temps qui courent, embaucher d’autres poneys aurait été difficile. Ce qui est difficile coûte de l’argent, et c’est très mauvais pour notre entreprise… » Elle se rapprocha de l’un des journalistes chargé des sports, lui adressant un sourire maternel. « Et ce qui est mauvais pour notre entreprise, est mauvais pour la famille que nous composons. Car oui, nous sommes une famille, voir un troupeau. Presque plus que la famille ou le troupeau que nous composons autre part… Nous mangeons ensemble, nous passons ensemble l’ensemble de nos journée, quand l’un de nous réussit, tout le monde est content, parce que cela profite à tous. »
Elle s’arrêta alors au bureau de Geek Writer, toujours le même sourire au visage.
« Mais quand l’un de nous échoue, cela risque de détruire cette famille. Mademoiselle Writer, est cela que vous voulez ? »
La journaliste sentit aussitôt sur elle les regards de tous ses collègues sur sa personne. Elle garda cependant son calme et soutint aussitôt le regard de la nouvelle directrice, lui répondant aussitôt d’une voix neutre.
« Bien sûr que non. J’ai toujours fait de mon mieux pour ce journal. »
Money Maker fixa un moment la ponette aux cheveux mauves avant de se détourner d’elle, passant à un autre poney à côté d’elle.
« Effectivement mademoiselle Writer, mais je trouve que vous pouvez faire encore mieux. Prenons Pen Hyper, notre chroniqueur de l’évènementiel. Vous avez parlé de votre passion pour le saxophone dans vos articles et mis en avant vos capacités à vous mêler aux différentes fêtes de presque tout Equestria. Mais si vous jouiez moins et que vous vous concentriez plus sur votre travail, vos papiers gagneraient en qualité ! On ne sait même pas qui a participé à ces fêtes. Regardez, pour l’un des galas de charité, on avait noté la présence de la Princesse Celestia et étrangement, on a noté un manque de pâtisserie pour l’ensemble des convives de la soirée. On aurait pu faire les gros titres avec ça. »
Geeky cessa d’écouter. Le pauvre allait se prendre toute les remontrances possible en passif-agressif devant tout le monde. L’humiliation allait être terrible. Et l’écrivaine savait pourquoi il ne l’avait pas fait : à quoi bon faire un papier humiliant sur la princesse quand on peut faire un papier positif sur cette soirée fructueuse qui a permis de financer des équipements plus sûrs. Mais tout cela n’intéressait pas Money Maker visiblement. La directrice s’adressa de nouveau à tous :
« Vous devez comprendre mes chers collègues. Nous allons vivre des temps de plus en plus durs. Nous ne pouvons pas nous permettre de nous planter, ou sinon nous perdrons cette famille. Je vais vous demander un investissement complet de votre personne. Pour chacun de vous. Et je comprendrai si certains ne peuvent se permettre de mettre de côté leur petite vie. Mais qu’il sache alors qu’il met en péril ce journal et qu’il risque de mettre au chômage tout le monde pour une durée prolongée - à cause de l’épidémie actuelle – en tout connaissance de cause… De toute manière, votre travail doit devenir votre véritable passion. Après tout, nous sommes une famille. »
Elle termina son discours pour se saisir d’un verre d’eau avec sa magie pour se rafraîchir le gosier. Elle observa de nouveau l’assemblée avec le même sourire.
« Comme je ne peux pas tous vous gérer et que je dois aussi m’occuper de mes autres entreprises, j’ai décidé de nommer un rédacteur en chef. J’ai choisi en considérant la demande des habitants de Manehattan, notre cœur de cible. Et là, ce qu’ils demandent, c’est de se détendre, de penser à autre chose qu’à toutes ces histoires de terreurs diurnes… En particulier si c’est pour les inciter à ne plus fréquenter les hôpitaux.
Donc, j’ai décidé de nommer Hard Mouth pour son pragmatisme et son attachement pour les petites histoires. Je suis sûre qu’il sera en pleine mesure de comprendre mon raisonnement et de vous diriger en conséquence. En attendant, tous les autres reportages ne seront plus financer un jour de plus. Vous laissez tout tomber et vous redémarrerez sur les consignes de votre supérieur. Ce sera tout pour aujourd’hui. »
Et elle s’en alla élégamment dans son bureau. Presque tout le monde applaudit tièdement le nouveau rédacteur en chef et la majorité se repencha sur son travail ou commença à partir pour chasser les nouvelles fraîches. Hard Mouth, le râleur de service, toujours à critiquer presque méchamment, quant à lui, avait toujours du mal à croire à sa nouvelle promotion. Et pour cause, l’ancien directeur trouvait son travail passable et c’est comme ça qu’il s’est retrouvé aux faits divers.
Geek Writer soupira lentement et adressa juste un signe de tête au nouveau rédacteur en chef, puis se leva. Il lui adressa un léger signe de tête en retour et jeta ses quelques lignes à la poubelle et repris une feuille et un crayon en bouche pour commencer à tout planifier.
***
Soft Driver jeta un coup d’œil inquiet vers la diligence. Il avait aperçu Geek Writer s’y glisser, l’air abattu. Il avait tout de même maintenu son poste tout en prenant des notes de temps à autre. Bientôt le soir arriva. Il remballa tout son attirail et partit garer sa charrette à journaux dans un box privé qui lui servait plus ou moins de maison avant qu’il ne puisse se payer un appartement. Le cheval noir glissa alors sa tête dans l’habitacle et observa la ponette. Celle-ci était en train de se préparer, enfilant sa tenue de cambrioleuse composé d’une combinaison en spandex intégrale, des sabots jusqu’au museau, et d’un bonnet noir cachant sa crinière mais pas sa corne. Elle termina par enfiler à l’aide de sa magie ses lunettes de soleil.
« Euh… Tu es sûre que tu es prête à y aller ? » demanda un Soft Driver plutôt inquiet. « D’habitude, tu attends pas d’être sûre de ce que tu fais avant de prendre ce genre de décision ?
-Oui Soft… Mais là, je n’ai plus le choix. Ils vont nous couper les fonds. Si je n’ai pas mon papier ce soir, je ne pourrai plus le publier nulle part. J’ai un truc à te demander de faire d’ailleurs. »
Sa corne luisit encore de sa douce lumière violette, entourant une enveloppe de la même aura. L’enveloppe se glissa dans le sac à selle du conducteur noir.
« J’ai besoin que tu me poste ça pendant que je serai à l’intérieur. Je sais que tu seras assez rapide. Vas-y tout de suite, je vais me débrouiller. »
Le destrier sombre hocha de la tête et s’en alla promptement. Il devait encore atteler la diligence pour être prêt à partir au moment où elle reviendra. Ce besoin se fera d’autant plus pressant si hélas, elle était poursuivie. Alors qu’il partait, Geek Writer observa la rue. Aucun membre de la Garde à l’horizon. Elle sortit alors de la diligence un drôle de petit canon avec un harpon à l’intérieur. Sa cousine s’est inspirée du canon à fête de Pinkie Pie pour que son propre lance grappin soit à la fois un instrument d’effraction à grand rayon d’action et relativement discret quand il n’est pas en utilisation. Elle visa avec précaution et actionna la lourde détente. Un petit ‘’bang’’ discret retentit et le harpon partit vers les étages supérieurs.
***
Il se réveilla en crachant des naseaux. UN BRUIT !
Tout de suite, son cœur s’accéléra alors qu’il étendit ses ailes. Ses chaînes le retinrent, mais il entendit que l’on forçait des serrures dans les étages extérieurs et son sang sembla s’embrasser alors qu’il bandait ses muscles en gémissant de rage.
CA EST LA !
Il revenait faire le mal et détruire l’innocence. Il devait réagir. Maintenant. Il se débattit violemment, entendant le mur gémir de souffrance à son tour. Dans un dernier râle d’agonie, ses chaînes se brisèrent soudainement. Il sentit sa bave couler le long de son menton et ses dents qui luttaient les unes contre les autres. Il renâcla avant de se diriger vers la source originelle de bruit.
***
Geek Writer se concentra légèrement pour régler l’intensité de lumière émise par sa corne et commença à farfouiller les bureaux. Normalement, vu qu’elle avait repris la corde et caché le tout dans un vieux placard, elle doit avoir un peu de temps avant que la sécurité ne prenne conscience d’une présence étrangère dans l’établissement.
Au début, elle ne trouva pas grand-chose d’intéressant. Des bons de commandes pour des ingrédients, divers ajustements managériales ou techniques… Quelques notes destinées aux employés et aux communications entre les autres pizzerias de la même chaîne retinrent cependant son attention :
« Est-ce qu’il est possible de dire au grand patron que nos clients commencent à de moins en moins aimer les pizzas de notre chaîne ? Depuis qu’il a retiré les épices (Même l’origan, bon sang ! On ne retire pas un ingrédient aussi essentiel !) et qu’on ne peut même plus se fournir ailleurs, on a beaucoup de mauvais retour.
Les notes de satisfactions baissent, si ça continue comme ça on va se faire dépasser par la concurrence. »
Elle étudia la réponse reçue le jour même.
« J’ai les sabots liés mon pote.
Le patron a décidé de couper tout approvisionnement de types herbes et épices à toute la cité quelques jours après le début de ces histoires de poulains qui délirent. La raison est simple, avec tout ce foin, les clients vont de moins en moins venir. Alors on commence par les épices, puis ensuite on retirera des recettes utilisant des ingrédients que le public aime le moins. Là en ce moment, c’est le céleri et le roquefort. Soit pas étonné s’ils disparaissent. »
La ponette était dubitative. Ne plus s’approvisionner en quelque chose, d’accord… mais pourquoi en priver toute la cité ? Cependant, elle avait bien raison de penser que les pizzérias du bien nommé Pizza Slice était bien une des entreprises écran des Easy Money. Ce genre d’endroit était destiné à bien des choses. Ca pouvait devenir des planques, des lieux de recrutements…
Elle observa les alentours et s’aventura dans les couloirs, espérant trouver quelque chose de mieux. Mais aucun bureau n’avait quelque chose de particulier. Pas de truc plus riche, pas de coffre-fort secret, pas vraiment plus de patrouille de la sécurité… Pas de plus de trucs mieux qu’ailleurs. Qu’est-ce que peuvent bien garder ces poneys de la sécurité alors ?
***
Ca est proche… Dans l’étage au-dessus. Il a dû assommer tous ses amis qui lui tenaient compagnie au sous-sol pour leur propre sécurité et leur propre bien. Ca est maléfique et puissant, il s’est entraîné pour devenir encore plus puissant que Ca. Ca est multiple et peut ressembler à beaucoup de chose. Une rose avec trop d’épine, un poney au regard trop arqué, un rat avec des gros yeux…
Il monta les escaliers quatre à quatre, déterminé à détruire le mal.
***
La journaliste faisait le point. Elle avait fait tout l’étage et n’avait rien trouvé. Ce bâtiment était certes l’un des points névralgiques de la chaîne Pizza Slice et des Easy Money, mais ce n’était certainement pas la maison mère de la pizzéria. Elle ne savait pas ce que ce bâtiment avait d’important, mais elle pensait avoir trouvé tout de dont elle avait besoin pour faire un papier dessus et pouvoir rebondir en indépendante quelque part. Avec un excellent papier, même si elle n’était pas une bourgeoise, elle pourra toujours se faire engager à Canterlot. Même si elle ne s’y plaira nullement…
Elle soupira et ouvrit la porte.
Ah.
C’était donc ça la raison de tous ces gardes.
Bouche bée, elle sentit le temps s’arrêter, lui laissant le loisir et la terreur d’observer l’immense pégase derrière la porte. Il était noir aux yeux rouges sang et il avait déployé ses ailes. La lueur de la lune leur donnait l’éclat de l’acier bien qu’il s’agissait bien de plume. Normalement, les rares pégases pratiquant le bodybuilding voyaient leurs ailes s’atrophier. Mais ce n’était pas le cas d’une certaine légende : celui du Jack Steel Wings. Un coup d’œil à ses flancs confirma les craintes de la jument : une multitude d’épée entourant une aile.
Elle sentit l’adrénaline lui faire battre son cœur alors que le pégase fou furieux et bavant de rage s’avança lentement vers elle.
[1] En français dans le texte.
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