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I'm just a pony

Une fiction écrite par Flovecteur.

L’assistante

Assise à une table en chocolat gigantesque, je contemple avidement les montagnes de pâtisseries que mes Macarons à la cerise m’apportent. Des éclairs, des tropéziennes, des forêts noires, des framboisiers et même des cerisiers, sans parler des nougats et autres sucreries ! J’avale difficilement ma salive devant cette profusion de douceurs qui n’attendent que moi. Cette envie qui pulse en moi est enivrante, je les désire et elles le savent, faisant durer leur arrivée pour exciter mes pulsions sauvages.

« Plus vite Macarons ! Plus vite, ma patience a des limites. »

Je trépigne sur ma chaise en sucre d’orge que j’ai déjà entamée. Après une éternité d'attente où je rongeais la table, les mets furent enfin disposés devant moi.

« Enfin ! Me voilà mon paradis ! »

Je saute de mon siège, sur ces graals de la pâtisserie, la bouche ouverte prête à tout dévorer…

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...Alors qu’une autre se refermait gentiment sur mon oreille. Me réveillant de mon rêve d'opulence en sursaut, je lâchai un léger couinement de surprise.

« Qu’elle est mignonne quand elle parle dans son sommeil. » Je crus entendre au-dessus de moi, mais c'était plutôt vague et je ne voulais pas ouvrir les yeux, de peur de perdre les dernières images de mon rêve.

Un second assaut à la base de mon oreille acheva de me réveiller. Me retournant pour voir le coupable, mon museau heurta le dossier du canapé

« Presque, essaie encore. »

« Quelle est cette voix familière qui m'agresse dès le matin ? Grrrrrrr »

Ronchonnant intérieurement je me frottais mollement le museau puis les yeux afin de les réveiller. Levant la tête, je me retrouvais à quelques centimètres du sourire le plus grand d’Equestria, remontant encore un peu je vis les yeux de ma colocataire pétiller de malice. Je ne m'attardais pas trop longuement dessus, sa corne brillait d’une couleur bleue-violette et maintenait…oooh...

« Vinyl espèce de… »

Un torrent d’eau froide se déversa brutalement sur mon visage alors que j'essayais d’y échapper, un peu tard, en tombant du canapé.

M'essuyant le visage, je maudissais mon amie pour ces blagues matinales.

« Tu n'étais pas obligée ni de m’asperger ni de me… mordre l’oreille… tu sais que c’est sensible et … intime ! » Râlai-je, les joues en feu, fusillant du regard une Vinyl hilare qui se roulait par terre.

« Désolée, j’ai tout essayé… » La jument haletante s’en remettait doucement. « Je n'avais plus que ça en stock pour te réveiller. »

« Tu aurais pu y aller directement avec le verre d’eau. »

« Tu es vraiment sure~ ? Tu semblais apprécier ton rêve je me suis dit qu’il valait mieux être douce… “Oooooh mes macarons vous êtes tellement excit…“ »

Elle ne finit pas sa phrase, la tranche d’une assiette se fichant dans son crâne, la renvoyant rouler par terre, de douleur cette fois.

« Aaaaaaaaaaaaaah ! Ça va pas la tête ! C’est hyper douloureux. Je suis sure d’avoir entendu un truc craquer ! » beugla la jument blessée en se relevant, une magnifique marque rouge sur son museau et son front, signe de victoire. « Je voulais juste te réveiller avant qu’on soit en retard. »

Ce simple mot me fit reprendre mon sérieux. “ Retard ” n'était pas dans mon vocabulaire.

« Comment ça ? On a rendez-vous où ? Avec qui ? Pourquoi ? »

« Je commence mon boulot à 8h et tu viens avec moi. »

« Ça veut dire que… »

« Oui c'est ça, tu as quinze minutes pour te préparer moins le temps du trajet ce qui te laisse… » Vinyl fit mine de compter. « Moins cinq minutes. »

« Comment est-ce possible d'avoir un temps négatif ! » Je me jetai vers la porte en faisant signe à mon amie de se dépêcher.

« Calme-toi, tu es mon excuse pour mon retard, c'est le manque de thé dès le matin qui te stresse autant ? Je t'en ai préparé un en plus. »

« Tu crois que ça va me calmer de savoir que je suis ton excuse ! » Dis-je en buvant la tasse d'une traite.

Mauvaise idée ! L’eau était brûlante, mais je n'avais pas le temps de me plaindre. Je pris le sabot de Vinyl et la poussa dehors. Dans mon empressement je ratais les deux premières marches, la chute de quatre étages aurait pu être désastreuse si mon amie ne m'avait pas retenue avec sa magie.

« Qu'est-ce que je disais, un coup de thé et c'est reparti. »

« Ahah, très drôle, bon dépêche-toi de m'aider à me remettre sur mes quatre pattes on a autre chose à faire que de plaisanter. » lui rétorquai-je la voix râpeuse à cause du thé.

Mon amie s'arrêta dans son mouvement et me regarda inquiète.

« Rassure-moi, c'est juste passager ton problème à la voix, hein ? »

« Oui, allez bouge-toi ! »

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Arrivée à l'extérieur je regardais déjà à gauche et à droite dans l'espoir de trouver un taxi. La jument blanche me tapota l'épaule, elle levait les yeux au ciel et secouait la tête.

« Quand je disais vingt minutes de trajet, c'était vingt minutes à pied. On va pas payer un taxi la peau du flanc juste pour faire deux pas. »

Elle faillit rire mais je pense que mon regard l'en dissuada, à la place elle se tut et m'indiqua le chemin.

Après dix minutes de marche silencieuse dans les innombrables rues de Manehattan que le soleil commençait à illuminer, Vinyl se décida à ouvrir de nouveau la bouche.

« Tu me fais encore la tête pour le coup de speed de ce matin ? A la base c'est pas ma faute, c'est toi qui ne voulais pas te réveiller. » essaya-t-elle de se justifier.

« C'est pas grave Vinyl, c'est juste que j'ai... beaucoup de mal avec le Retard. Bon si tu m'expliquais en quoi je vais pouvoir t'aider ? »

« Tu sauras tout dans dix minutes, quand on sera arrivées quoi. Si on parlait de la pluie et du beau temps en attendant ? »

« Ou on pourrait continuer à marcher en profitant de ce silence reposant. »

« Brrr ! J’ai horreur du silence, c’est si… vide, ça va à l’encontre de ma nature de DJ. »

« Oh parce que les DJ ne font pas que du mixage ? » dis-je innocemment.

« C’est genre heu… une déformation professionnelle. » Vinyl eut un rire gêné. « On est là pour éviter les blancs, le silence et donner du peps à chaque minute qui passe. Du coup, même en dehors des soirées je le fais aussi. » Elle ajouta plus bas. « Je déteste le silence. »

« Ça doit être difficile pour toi de vivre seule dans ton appartement. » la taquinais-je en lui donnant un coup de flanc.

« Tu peux pas savoir à quel point ça me fait du bien d'avoir une colocataire. Je n'ai plus besoin de laisser parler ma schizophrénie. »

« Faudrait que tu me les présentes. »

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Nous arrivions sans nous en rendre compte à l’imposant bâtiment où travaillait Vinyl. Celle-ci était en train de parler de son amour pour les chaussettes rayées et s’interrompit au milieu de sa phrase.

« De toute façon ça ne s'explique pas ça se vit, je te ferai essayer un jour… Ah te laisse pas avoir par la taille, on doit aller au septième. J'espère que tu n'as pas été fatiguée par cette marche parce que c'est pas encore fini. »

« Il y a pas d'ascenseur dans cette ville ou quoi ? »

« Ah, peut-être, si on a de la chance il devrait marcher… »

En entrant je remarquais que nous étions seules dans le hall, l’heure n'était pourtant pas si matinale. Je m’étais attendue à une foule de poneys occupés, vaquant à leurs occupations, et à un fort brouhaha ambiant témoignant de leurs activités. Mais là… rien… un silence presque oppressant planait dans ce grand hall d’entrée. Je ne vais pas me mentir, je m'attendais à plus d’animation dans un lieu comme celui-ci.

Le son de nos pas sur le carrelage usé résonnait sur les murs et le plafond haut. Il était au niveau du premier étage, et avait donc des fenêtres donnant sur ce dernier. C’était un drôle de choix architectural, comme de faire un ascenseur entouré par un escalier, c’était joli, mais lorsqu’il disparaissait dans le plafond, la structure ressemblait plus à une mèche de perceuse dans un trou.

« C’est normal que tout soit silencieux et vide? » chuchotais-je pour une raison qui m'échappait.

« Ouais, ils sont en pleine restructuration du bâtiment, les premiers étages ont été déplacés ailleurs le temps que ça se fasse. » La voix de Vinyl résonna fortement dans la salle, me faisant comprendre pourquoi je chuchotais. « Apparemment on devra faire pareil dans trois ou quatre semaines, mais on a le temps d’ici là. »

Arrivée devant l'ascenseur, la jument blanche appuya sur le bouton d'appel, après moins d'une minute d'attente celui-ci s'ouvrit grand sur un espace adapté pour quatre poneys, vu la taille des locaux, je le trouvais sous dimensionné. Mon amie me fit signe de passer devant puis me suivit à l’intérieur, appuyant sur le cadran des étages.

« Direction le septième ciel. » déclara elle alors que les portes se refermaient.

L'élévateur prit rapidement de la hauteur, nous emportant, moi et la jument blanche, fière de sa blague. A la voir comme ça, je ne pouvais pas m'empêcher de la taquiner.

« Dommage pour toi, c’est raté. » fis-je, mine de rien.

« Chuuuuuut, tu vas casser ce moment magique. »

L’ascenseur ralentit et s'arrêta, Vinyl anticipant l’ouverture de la porte s'avançait déjà… Pour s'écraser le museau dessus. Grommelant, elle se recula pour regarder à quel étage nous étions.

« Je crois qu’on a un léger problème. » dis-je, un frisson parcourant mon échine. « On est bloquées entre le 5ème et le 6ème étage. »

« Je déteste être en retard ! Retard… retard…? »

Mon cœur accéléra excessivement vite, je sentis mon sang frapper à mes tempes, et d'intenses bouffés de chaleur me firent suffoquer. Inconsciemment, je me mis à frapper frénétiquement le sol de mes sabots avant, cherchant désespérément dans cette pièce exiguë, un endroit par où m'échapper. Ma respiration était saccadée, j’hyper-ventilais beaucoup trop, ma vue se brouilla rapidement. Ma croupe heurta le coin du minuscule cagibi. Je m’en aperçu à peine, je ne sentis plus mes membres et un sifflement assourdissant me perça les tympans.

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Après un moment, mes nerfs se remirent à fonctionner légèrement, suffisamment pour que je sente des picotements autour de mon cou. Je supposais que c’était mon cou car j'étais toujours dans cet enfer qui me privait de mes sens, j’ignorais où était mon corps… Peu à peu, à mesure que l’ensemble se réactivait, je ressentis les picotements de plus en plus forts et chauds, autour de mon cou, toujours, mais aussi vers ma patte, j'avais l'impression qu’elle était levée. La vue me revint avant l'ouïe. Malgré le voile qui obscurcissait ma vision, je distinguais la tête de Vinyl. Je voulais râler comme quoi il était trop tôt pour se lever, mais je ne pouvais pas faire grand-chose pour le moment.

Tous mes autres sens me revinrent brutalement, me noyant sous les informations. J'étais au sol sur le dos, dans les sabots de mon amie apparemment. Celle-ci me secouait sans ménagement.

« Je suis où ? »

« Tu vas bien ?! Combien j’ai de sabot ? » me dit-elle. Sans se préoccuper de ma question, elle lâcha ma patte et présenta la sienne devant moi.

« Vinyl, c’est quoi cette question à deux bits ? »

La voir aussi sérieuse m’incita à coopérer :

« Un. »

« Tu as des crises d'épilepsie ? De l’hypoglycémie ? Ça va ta tête? »

« Non, rien du tout. » Je tentais de me relever mais mon amie m’en empêcha du sabot.

« Je ne comprends pas ce qu'il vient de se passer. Quand l’ascenseur s’est bloqué, j’ai stressé, j’avais peur d’être en retard… »

« Tu te moques de moi là ?! » me coupa la licorne en me secouant de plus belle. « On fait pas un malaise juste parce qu’on a peur d’arriver à la bourre ! Il y a forcément autre chose. T'es claustrophobe ? »

« C’est la première fois qu’il m’arrive un truc comme ça, et non j’ai déjà pris des ascenseurs, certains bien plus petits que lui. » Cette fois-ci, je me remis sur mes sabots, malgré mes efforts, j'étais incapable de me souvenir de ce qui s’était passé après avoir vu que nous étions bloquées. « On est sor… »

Me coupant dans la phrase je regardais autour de moi, nous étions devant la porte de l’ascenseur, au 7ème étage.

« Dès que le truc s’est bloqué, j’ai appelé les techs de maintenance. Ils étaient au second, du coup ça a été rapide à réparer, en cinq minutes le problème était réglé. Juste après avoir raccroché, j'ai voulu te parler mais tu étais effondrée dans le coin de l’ascenseur. Je me suis vachement inquiétée, on devrait aller à l’hôpital voir si tout va bien. »

« Je vais très bien, ne t’en fais pas, c’est comme si rien ne s’était passé, regarde. »

Après un petit spectacle de claquettes improvisé pour détendre l’atmosphère, je me tournais vers Vinyl qui semblait rassurée mais ses oreilles étaient toujours rabattues.

« Coloratura, s’il te plaît, après le boulot, on va voir un médecin, histoire d'être sures, ok ? »

« Pffff. » soupirais-je « on verra à ce moment-là, ça te va ? »

« De toute façon, si tu ne veux pas y aller, je t’y traîne. »

Jugeant la conversation terminée, Vinyl prit les devants.

Je la suivis dans le couloir sans rien ajouter. Après quelques mètres, le blanc des murs laissa sa place à du marron et commençait à avoir une texture étrange. C'était vraiment moche… on aurait dit du carton qui avait pris l'eau. Ils étaient légèrement plus épais que le mur de l'entrée, ce volume supplémentaire permettait de discerner la taille des pièces derrière lui.

Il y avait quatre portes très épaisses de chaque côté, une petite fenêtre carrée permettait de voir l'intérieur. Le couloir se terminait par une énorme baie vitrée donnant une vue sur la rue. Cette vitre était, avec l'ascenseur, la seule source de lumière du couloir mais était suffisamment bien exposée pour l’illuminer dans toute sa longueur.

Vinyl nous arrêta devant la porte de droite au fond. Celle-ci était flanquée d’un huit peint en turquoise, et surchargée d'autocollants et autres stickers, me rappelant beaucoup la “tapisserie” de l'appartement de mon amie.

« Voici mon lieu de travail. J’y suis enfermée jusqu'à 8h du soir, cinq jours sur sept, et maintenant que tu es là tu vas avoir la joie de partager mon quotidien. »

« A tes yeux, mon plus grand don c'est la compassion c'est ça ? »la charriais-je

« Ahahah ! Madame a mangé un clown aujourd'hui. Ça c'est le thé j'en suis sûre. Aujourd'hui et pour les cinq jours à venir, tu seras mon assistante. Bien entendu, tu ne toucheras pas un seul bit mais je pense que tu vas aimer passer du temps avec moi. »

« Mais j'aime passer du temps avec toi. » lui fis-je remarquer.

Vinyl s’étouffa, elle tentait de cacher ses joues rouges mais c'était peine perdue quand on avait la robe aussi blanche qu’elle. Elle se tourna vers moi, pendant quelques secondes. Elle semblait analyser mon visage. Quand elle eut fini elle soupira, ouvrit la porte par magie et rentra à l'intérieur de la pièce. Elle murmura quelque chose d'inaudible puis me fit signe de la suivre.

Je ne m'attendais pas du tout à ça, qui aurait cru que Vinyl… J'en avais vu beaucoup en photo mais je n'avais jamais pu en visiter un en vrai !

Les murs et le plafond de la salle dans laquelle nous étions étaient couverts de moquette bordeaux et le plancher en bois suffisamment bien ciré pour que l'on puisse voir les lampes au-dessus de nos tête se refléter dessus. Sur ma droite, il y avait quelques chaises stockées un peu n’importe comment, mais le plus intéressant était sur ma gauche.

Contre le mur se trouvaient fixées d’énormes enceintes encadrant un immense tableau de bord bien trop grand pour un poney… ou même deux. Il était assez similaire à celui que Vinyl avait chez elle mais en bien plus imposant. D'innombrables rangées de petits boutons le recouvraient, bien trop fins et rapprochés pour être manipulés par un terrestre ou un pégase, et même pour une licorne cela demandait une grande précision.

Dans le mur était enchâssée une vitre de même dimension que le tableau de bord. Au travers je pouvais voir la chambre insonorisée située de l’autre côté. Elle avait les mêmes dimensions que celle dans laquelle nous étions mais était presque vide, seuls quelques fils se baladaient sur la moquette et au centre de la pièce, sur son pied en aluminium, le mettant à hauteur de museau, se tenait fièrement un…

« Colton UH 20 ! » hurlais-je de stupéfaction en me collant au plus près de la vitre pour mieux voir, perdant mon souffle sur le plan de travail que j’avais oublié.

« Et ben, on peut dire que tu as l’œil. » me taquina Vinyl en se rapprochant.

« Et comment ?! C’est un micro presque légendaire, aussi cher que rare, qui est connu pour avoir permis d'enregistrer les deux albums les plus mythiques des Horses Stings ! Ceux qui ont été vendus à plus de 10 millions d’exemplaires en un temps record sur toute la planète et qui sont, maintenant encore, les disques les plus acclamés pour leur qualité audio impeccable ! »

« Wow, calme toi et reprends ton souffle tranquillement. »

La jument à la crinière bleue me coupa dans mon exposé et posa une patte sur mon épaule, sans doute pour m’empêcher de me couper en deux sur le bureau.

« Qu’est-ce que tu fais avec un micro aussi... » dis-je, à peine calmée que je reprenais de plus belle.

« C’est pas à moi, on est à mon boulot, tu te rappelles ? »

« Justement, pourquoi m’as-tu caché que tu faisais un travail aussi génial ?! »

« Pour pouvoir dormir tranquille sans me faire harceler par ma colocataire ? »

Elle avait touché juste, c’était douloureux, je me tus et baissai la tête. Si j’avais su que Vinyl était ingénieur son chez un Major capable de se payer des micros comme ceux-là, évidement que je ne l’aurais pas laissée dormir.

C’était un don du destin, j’en étais sure, comme si tout avait été écrit par une entité supérieure. Mon rêve se tenait juste devant moi, derrière un mur insonorisé, je pouvais presque entendre le micro m’appeler, désirant que je l’utilise et c'était réciproque. Mon amie me tira de nouveau hors du plan de travail que j’essayais de traverser.

Elle me força à m'asseoir sur le sol et se plaça devant moi. Après une courte minute de silence, Vinyl jugea que j'étais suffisamment calmée pour parler sans être interrompue par mon enthousiasme. Elle prit une longue inspiration.

« Comme tu l’as compris, je suis ingé son et bienvenue dans mon petit coin de travaillerie ! »

« C’est un néologisme… »

« Pardon ? »

« C’est pas un vrai mot ça. »

« C’est pas un dico qui va m’apprendre à parler. T’es pas là pour me faire un cours je pense, il y a autre chose qui te réclame, n’est-ce pas ? Juste derrière la vitre, un micro renommé attend une voix mélodieuse…. Quoi ? » Vinyl fit mine de tendre l'oreille vers celui-ci puis hocha la tête. « Je suis d’accord. »

« Il t’a dit que je pouvais l'utiliser ? » Mes oreilles étaient dressées au-dessus de ma tête et mes yeux brillaient d’excitation.

« Vinyl veut me demander de chanter pour elle j’en suis sure ! Sinon elle ne jouerait pas autant avec moi »

J'étais suspendue à ses lèvres, dans l'attente de ces quelques mots qui me faisaient défaut, et m’interdisaient l’accès à ce Saint Graal.

« Non pas avant la fin de la semainwooooooo! »

Elle saisit in extremis la chaise, que je lui avais jeté sous le coup de ma déception. La reposant doucement, elle entreprit de se justifier, et elle faisait bien.

« Écoute, je fais pas ça pour t'embêter... enfin si un peu mais là n’est pas la question. Je suis chez un gros Major et sans l’accord de mon chef, même si je le voulais, je pourrais pas te laisser utiliser notre matos, sinon c’est la porte direct. »

En voyant ma mine abattue elle tenta de me rassurer.

« Mais ne t’en fais pas, dans la semaine je vais me débrouiller pour que ça se fasse. »

« Du coup, je dois faire quoi ? » dis-je en essayant de paraître intéressée.

« Tu me dis ce que tu penses de ce que je fais, y a pas plus simple. Bon essaie de m’aider en me disant ce qui va pas tout ça. Heu, je dis ce qui va pas mais je pourrais dire autre chose hein, mon boulot est toujours parfait. »

« Ça va les sabots ? Ils n’enflent pas trop ? »

Retrouvant le sourire, j'installais ma chaise assassine à côté de Vinyl.

Mon amie était déjà en position et tripotait des boutons. Elle fit sortir de sous la table une pochette à vinyle, extirpa le disque, et le plaça sur la platine.

« Je dois peaufiner cet enregistrement pour mardi, il est bon mais il doit être parfait. »

« Je croyais qu’on ne pouvait pas les regraver ? »

« Je me sers de ce disque comme base, une fois modifié, c’est envoyé au graveur qui se débrouille pour nous faire le vinyle en 24h et ainsi de suite.

« Ça vous coûte beaucoup de travailler de cette façon ? »

« Si tu n’en fais pas plus de quatre c’est bon d’après les gars de la compta. »

Sous mon regard interrogateur, la jument précisa :

« On est dans les clous si on fait ça moins de quatre fois par morceaux. Le vinyle est assez cher pour ne pas être trop gaspillé. Bon au boulot ! C’est pas en discutant que je me ferais payer mes heures. »

La jument blanche lança l’enregistrement sans plus attendre mais aucun son ne sortit des amplis. Ronchonnant sur le fait que j’avais tout détraqué, elle fit briller sa corne et sélectionna une vingtaine de boutons, qu’elle se mit à faire tourner dans plein de sens différents, ce qui demandait une concentration à toute épreuve et une connaissance approfondie de l’utilité de tous ces… trucs.

Au bout de quelques minutes de réglage, le son se fit de nouveau entendre. Des hauts parleurs sortit une cacophonie sans nom devenant de plus en plus audible à mesure que Vinyl trifouillait son barda.

C’était du rock expérimental aux sonorités familières. Au début je cru à un plagiat mais ça n’était pas du tout le cas.

« On dirait du… »

« Pink Foal ! » Me coupai-je, Vinyl était tellement concentrée qu’elle ne réagit même pas.

La suite de la musique acheva de me persuader. La voix calme mais forte du chanteur, les textes engagés, tout y était et pourtant, impossible de reconnaître la composition…je connaissais pourtant leur discographie sur le bout des sabots.

« La seule raison à peu près logique serait que ce soit un nouveau morceau. Mais Pink Foal ne se produit que chez un seul label, ça n’a pas de sens. Comment Vinyl se l’est procuré ?...

Pas elle! Sa boite… »

Me tournant vers mon amie toujours affairée, je saisis sa tête entre les deux sabots pour la centrer sur moi.

« Vinyl ! Ton employeur c’est qui ? »

Alors que je parlais, je secouais sa tête sans ménagement afin de faire sortir la réponse plus vite.

« ’est ‘om ‘ewho’se. »

« Elle se fiche de moi ? c’est pas le moment, c’est très important pour moi. Crache le morceau tu m’as déjà fait assez de cachotteries comme ça »

« ’ache ‘oi. ‘es ‘a’os m’en’eche ‘e ‘arlé. »

« Oh pardon. »

En la lâchant, mon amie fut déséquilibrée et s'écrasa lamentablement par terre. J’aurais du lui demander si tout allait bien mais ma réponse était bien plus importante. Posant de nouveau mes yeux sur une Vinyl aterrée, je m'aperçus qu’elle me regardait aussi, les yeux au bord des larmes et une moue au visage.

« Celestia, comme elle est mignonne ! J’ai presque envie de lui tirer les joues pour la faire chougner. »

Imaginer Vinyl comme une pauvre petite pouliche qui a besoin d’un câlin anti-bobo… je m’interdis d’aller plus loin dans ces drôles de réflexion. J’avais quelque chose de bien plus important à savoir.

Mon amie venait juste de se redresser que je l’assaillais de nouveau. Elle me snoba, retournant à ces affaires. Mauvaise idée. Après dix minutes de harcèlement copieux, Vinyl arrivait enfin à bout.

« Ça te coûte rien de repéter, allez, au moins son nom alors ? Juste son nom et je me tais. »

Cette proposition sembla intéresser la jument blanche qui se tourna vers moi un sourire aux lèvres.

« Tu me promets que tu vas te taire jusqu’à ce que je t’autorise à ouvrir de nouveau la bouche? »

« Promis ! Dépêche-toi, je veux son nom ! »

« Newhorse. »

« Celestia ! »

Vinyl lut dans mon regard et plaqua son sabot sur ma bouche avant qu’il ne soit trop tard.

« Chuuuuuut ! Dans ta tête tout ça, je ne veux plus un son. »

Bouillonnante de frustration, je me tus malgré tout. Mais ne m'arrêta pas pour autant de penser.

« Newhorse… comme Tom Newhorse ? Le directeur du label Hoovesin Record ?

Ça se tient, Pink Foal ne se produit que chez eux…

Et ça expliquerait comment leur maquette avait fini entre les sabots de Vinyl.

Oui mais ça n’a pas de sens, j’aurais reconnu le logo extérieur cependant la façade était vierge »

La matinée passa ainsi tranquillement, bercée par le rythme calme de la composition. J’arrivais à deux hypothèses, la première disant que mon amie travaillait chez un sous-traitant, la seconde voulait que le logo ait été enlevé pour les travaux. Je ne pus aller plus loin, mon ventre se mit à gronder.

« J’allais le dire. » répondit Vinyl en éteignant son installation. « Et vu que je suis bien lunée et que de toute façon t’as pas un rond, c’est moi qui paye. Je connais un petit resto au coin de la rue à pas piquer des parasprites... »

« C’est aimable de ta part, mais tu n’avais pas dit que tu restais enfermée TOUTE la journée? » lui fis-je remarquer pour la taquiner.

« Dehors. Tout de suite. Si tu veux manger. »

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Note de l'auteur

Voila voila! Je vous ai manqué? non? pas grave ^^
J’espère que vous avez aimé!

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Inobi
Inobi : #33969
Très bon chapitre, j'ai vraiment hâte de lire la suite.
Il y a 2 ans · Répondre
BroNie
BroNie : #33722
La scène de l'ascenseur, digne des plus grands films de la nuit sur NT1. En plus, la musique était très bien choisie.
GG frèr.
Il y a 2 ans · Répondre

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