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Pony War Chronicles

Une fiction écrite par ironponymaiden.

Phase V : Adieux

Le sol tremblait sous ses sabots. Minor Impact regarda passer les chars devant sa maison, leurs chenilles écrasant les cadavres étalés au milieu de la rue. Le bruit donna la nausée au pégase, qui détourna les yeux, le sabot sur la bouche. Son estomac lui faisait encore mal, et il se sentait sur le point de vomir de nouveau.

Quand les bruits de combats s'étaient suffisamment éloigné, il était sorti de la cave, lentement, et avait traversé sa maison. Le sol était jonché de débris, des éclats de verre crissaient sous ses pas, les murs étaient constellés de petits trous, divers objets étaient tombés à terre. La poussière tournoyait dans la pâle lumière accordée par les fenêtres. Puis son regard s'était focalisé sur les petites tâches rougeâtres qui se trouvaient sur le mur, autour des impacts de balles, et qui se regroupaient petit à petit au fur et à mesure qu'on se rapprochait de la fenêtre. Alors qu'il marchait, il sentait le sol devenir poisseux sous ses sabots. Il avait baissé les yeux, et s'était aperçu qu'il marchait dans des flaques de sang.

Puis il avait vu les corps. Quatre cadavres dans son salon, à côté des fenêtres. Il s'était approché doucement, les pensées s'enchainant dans sa tête. Ils étaient morts. C'était la première fois que Minor voyait des cadavres, et ceux-là étaient en mauvais état, défigurés, transpercés, dans des positions peu naturelles. À ce moment, il avait eu besoin d'air, et s'était dirigé d'un pas vacillant vers la porte. Une fois dehors, son état ne s'était pas amélioré. Ses yeux avaient commencé à se remplir de larmes, et il avait mis son sabot devant sa bouche d'horreur. Son estomac avait rendu les armes, et il avait vomi.

Au-dehors, c'était des centaines de corps qui s'entassaient dans la rue, devant chez lui. Les murs des maisons avaient été ravagés par les projectiles et la rue était réduite en miette sur de gigantesques portions. C'était le chaos, comme si une tempête avait frappé cet endroit, une tempête qui faisait toujours rage, plus loin, vers le château. Prenant appui sur le mur, il avait voulu rentrer dans sa demeure, retrouver ses chéries et les serrer contre lui, sentir qu'elles étaient vivantes après avoir vu ce charnier, alors que des corbeaux commençaient déjà leur descente pour se repaitre des corps.

Il avait entendu sa femme crier, et ordonner à sa fille de ne pas sortir. Il était rentré, ses pensées incapables de se focaliser sur quoi que ce soit. Il avait vu sa femme, et s'était dirigé vers elle. Elle était horrifiée, et commençait à pleurer. Il l'avait rejoint, et l'avait serré contre lui, la caressant et lui chuchotant des paroles apaisantes. Puis il l'avait emmené à la cave et lui avait conseillé de rester avec leur fille.

Il était revenu vers les corps qui salissaient sa maison, et, maîtrisant sa répulsion, avait commencé à les tirer au-dehors. Les corps étaient lourds, masses de muscles dues à l'entrainement des militaires, et aussi un équipement plus que conséquent. Tentant de ne pas respirer la puanteur des cadavres, il avait pris leurs cols entre ses dents et les avait tiré à travers le salon, vers la porte, laissant une longue traînée pourpre derrière lui.

Quand il eut terminé, il s'était adossé contre le mur de sa maison, évitant de regarder plus loin dans la rue pour éviter d'apercevoir le carnage.

Puis il avait entendu la détonation venant de la porte de la ville, le long sifflement qui passait au-dessus de lui, et l'explosion venant du château. D'autres sons assourdissants s'étaient fait entendre, suivis par autant de sifflements, et se terminant par les mêmes bruits de destruction. Le sol avait légèrement tremblé, un bruit de moteur et de grincement qui s'amplifiait, le même qui avait accompagné les chars lunaires. Il s'était relevé rapidement et s'était caché derrière ses fenêtres détruites,osant à peine jeter un coup d'oeil au-dehors pour savoir ce qui lui tombait encore dessus.

Il avait vu arriver les lourds véhicules blindés, portant le symbole flamboyant de l'Empire, un poney noir et blanc à la corne brisée dressé au-dessus de la tourelle du premier d'entre eux, un masque inexpressif sur le visage. Rassuré quant au camp auquel appartenaient les véhicules, il s'était redressé pour les regarder passer.

Mais ce n'était pas un sentiment patriotique qui l'animait. Juste une lassitude. L'arrivée de ces chars augurait la reprise de la violence, et les rebelles viendraient sûrement les combattre en pleine ville, plutôt qu'au château. Leur belle cité allait encore s'illuminer par le feu des combats. Au milieu de ces pensées, il eut une réflexion sur les préposés au nettoyage de ce merdier. Les services publics auraient du boulot.

Le sol tremblait sous ses sabots. Minor Impact regarda passer les chars devant sa maison, sinistre présage signalant que les rues allaient encore se remplir de sang et de cadavres.

---

Crimson Brush regardait avec satisfaction la panique se répandre dans les rangs des hérétiques. Lorsque les premiers obus étaient tombés au milieu de leurs lignes, il avait eu du mal à en croire ses yeux. Mais les faits étaient là, renforcés par l'appel radio que les Licornes lui avaient transmis : les renforts étaient arrivés, et ce n'était pas la petite escouade passant dans le coin.

Mieux encore, c'était ce parano de Nicholaus, qui dans un grand "je vous emmerde" lancé à l'Etat-Major, avait ramené ses blindés, qui avaient le plus grand taux de réussite de l'armée, outrepassant tous les ordres qui lui avait été donné.

Un sourire s'afficha sur les lèvres du colonel. Deux jours plus tôt, ce déséquilibré serait passé devant la cour martiale pour désertion. Aujourd'hui, il serait traité en héros national, pour peu que son arrivée permette de faire pencher la balance vers le côté de l'Empire. Les explosions continuaient d'illuminer les positions retranchées des rebelles, mais malgré la panique, certains continuaient de tenter de faire une percée. C'était leur dernière chance. Crimson regarda en l'air. Le champ de force commençait à fissurer, à cause des tirs imprécis de l'artillerie qui retombaient parfois sur le bouclier, ou sur les habitations toutes proches.

Le colonel était toutefois beaucoup plus préoccupé par le bouclier que par les civils.

Le bouclier avait déjà accusé de certaines faiblesses, quand les tirs étaient concentré à un endroit particulier, mais laisser passer quelques projectiles n'intéressait pas les rebelles. Ils voulaient faire tomber le bouclier pour lancer l'assaut, et l'artillerie de Nicholaus avait une sale tendance à les y aider. C'était une sorte de course contre la montre. Si les forces lunaires parvenaient à entrer et prendre la Princesse en otage avant que les blindés de renforts ne leur tombe sur l'arrière-train, ils arracheraient quand même la victoire.

Le spectacle était si intense que Brush hésitait presque à juste s'accouder au balcon et regarder qui gagnerait.

Puis une explosion retentit dans le ciel. Le colonel leva les yeux, et vit le bouclier se désagréger. Un tir raté de trop, qui avait achevé la protection magique. Le champ se brisa en petits éclat qui disparaissaient avant de toucher le sol, depuis le point d'impact et se répandant sur toute la surface du globe magique. Crimson désengagea le chargeur de son pistolet, en prit un autre et rechargea son arme. En face, il entendit des cris de guerre, et il vit les soldats ennemis charger à travers les jardins, en redoublant leur cadence de tir.

Brush pointa son arme vers l'ennemi, et fit feu à plusieurs reprises, imités par ses soldats, délivrant un véritable déluge de projectiles de métal. De nombreux ennemis tombèrent au milieu de la pelouse du château, mais les impériaux n'étaient pas mieux lotis. Le bâtiment n'avait jamais été pensé pour résister à une attaque, et les fragiles murets derrières lesquels s'étaient retranchés les fidèles à Celestia volaient en éclat sous les tirs des partisans. Et il y avait toujours ces foutus blindés, qui faisaient feu à l'intérieur du bâtiment, chacune des explosions arrachant son tribut parmi les forces de défenses.

Une balle éclata près de Brush, et il se mit à couvert. Il regarda les quelques soldats qui défendaient l'enceinte de la salle où il se trouvait, aidés par les Licornes du Soleil. Ils tombaient les uns après les autres, rejetés en arrière par un tir précis, ou se vidant de leur sang en restant à couvert. Crimson rechargea à nouveau son arme. Ils étaient passés proche du retournement de situation, mais il semblait que les rebelles allaient réussir à pénétrer dans le château avant l'arrivée des blindés alliés. S'ils atteignaient la Princesse, la guerre était finie.

Mais Crimson Brush n'abandonnerait pas sans combattre. Il se releva et ouvrit le feu contre les ennemis qui s’approchaient trop. Brush visait et tirait, abattant un ennemi à chaque pression sur la détente, mais il entendait les balles siffler autours de lui. Une balle l'atteignit à l'épaule, lui faisant lâcher son arme dans un hurlement de rage, et il se remit à couvert, cherchant autours de lui quelque chose pour se défendre. Les soldats solaires continuaient de mourir dans la salle, donnant leur vie pour gagner du temps.

Brush vit son pistolet juste en face de lui. Il se jeta dessus, et se releva prestement. Les traîtres étaient juste là, et un tank se trouvait à moins d'une dizaine de mètres. Brush ne pouvait pas tirer. C'était terminé.

Puis il y eut une décharge d'énergie, et, venant des étages supérieurs du château, une sphère magique jaunâtre se gonfla à travers les murs, pareille à celle violette qui venait d'être réduite en miettes. Quand la barrière atteignit les partisans de Luna, ceux-ci furent rejetés en arrière, et le tank qui se trouvait juste là fut propulsé dans les airs. Il vola quelques secondes, avant de s'écraser et d'exploser lorsque le mélange de carburant s'enflamma, prélevant un lourd prix parmi les lignes ennemies.

Crimson s'affala sur le carrelage de la salle, haletant, en sueur, et éclata de rire. Ça n'était pas passé loin. Vraiment pas loin. Mais ils étaient protégés. Celestia veillait sur ses fidèles. Crimson entendit par-dessus les bruits d'explosions des coups de sifflets répétés. Son rire redoubla.

La retraite. Les rebelles sonnaient la retraite. Une lueur s'illumina dans les yeux du colonel. Il se releva, gardant ses yeux fixés sur les ennemis qui tentaient d'organiser leur fuite. Il rechargea une nouvelle fois son arme, et prit sa radio, la passant sur le canal général. L'heure du massacre avait commencé. Les hérétiques allaient maintenant déguster à leur propre recette.

-Colonel Brush à toutes les unités. Engager la poursuite avec les traîtres. Ne les laissez pas s'échapper.

Il se passa un temps. Brush jeta un regard aux quelques survivants qui se trouvaient avec lui. Ils étaient couchés au sol, goûtant à un court moment d'accalmie dans tout ce qu'ils avaient subi au cours des dernières heures. Quand le colonel avait fait son annonce, ils avaient levé la tête vers lui. Puis il en avait vu un secouer la tête et retomber par terre. Crimson tendit l'oreille. Les soldats de l'Empire avaient cessé le feu.

Ils refusaient de poursuivre le combat ? Les rebelles étaient au plus mal, c'était le parfait moment pour les prendre en étau, et ses soldats préféraient rester à terre ?

Sa radio grésilla :

-Colonel, fit une voix non identifiée. Je suis désolé, mais je pense qu'on devrait laisser ce bordel aux renforts.

Il y eut un silence, puis la voix reprit :

-Je pense parler au nom de tous mes camarades en disant que nous trouvons en avoir assez fait. Les rebelles sont trop peu nombreux pour poser des problèmes à...

La radio siffla, obligeant Brush à l'écarter de son oreille, puis une voix féminine en sortit :

-Ici Twilight Sparkle. Tout soldat n'ayant pas quitté l'enceinte du château dans cinq minutes sera considéré comme déserteur et exécuté. Terminé.

Crimson n'en finissait plus de rire, alors que les soldats qui étaient encore à terre il y avait quelques secondes se relevaient et enjambaient les rebords des fenêtres en tirant sur les fuyards. Un appel radio fut lancé, indiquant aux renforts que les partisans de la Lune fuyaient et leur demandant d'arrêter les bombardements. La radio grésilla :

-Sergent Caramel ? fit Sparkle.

-Oui ? répondit la voix inconnue de plus tôt.

-Restez où vous êtes, je vous prie.

-Que...

Une détonation se fit entendre dans l’engin de communication. Crimson secoua la tête. Le tuer en transmettant par radio revenait à une exécution publique, tout à fait dans son style. Le discours était clair : on avançait, ou on mourrait.

Ce plan convenait parfaitement à Crimson. Le massacre pouvait enfin aller dans le bon sens.

---

Platinum Armor prit Luna dans ses pattes et la plaqua à terre, juste à temps pour éviter que les projectiles des soldats qui les suivaient ne l'atteignent. Il se releva, et ouvrit le feu dans la direction des ennemis, puis ordonna à l'unité de continuer à avancer. Pendant un instant, il s'était dit que les forces de défenses de la ville, épuisées par les combats, allaient rester à l'abri dans l'enceinte du château, ce qui aurait permis aux partisans de mieux manœuvrer dans la ville pour éviter les renforts ennemis à l'entrée, et sortir sain et sauf. Mais la prise en étau rendait cette perspective impossible.

Comment sortir Luna de ce bourbier ? Comment en sortir un maximum de personnes vivantes ? Pour le moment, le seul véritable danger était les soldats qui se rapprochaient à l'arrière, les renforts étant trop loin pour les menacer. Il fallait se disperser, continuer d'avancer dans la ville par des rues plus petites, mais il restait encore quelques tanks à évacuer, trop imposants pour cette option. Trois, exactement, et les rebelles pourraient en avoir besoin pour passer en force.

Armor posa sa patte sur l'épaule de Luna, pour la relever. La pauvre avait un air halluciné. Ils étaient passés tout proche de la victoire, au prix d'un nombre incalculable de sacrifices. Soarin avait donné sa vie pour vaincre les Faucons de Dash, les Night-Ops avaient été décimés pour avoir le temps d'ouvrir les portes, sans parler des nombreux morts des deux camps qu'ils avaient laissé lors de leur avancé.

Mais le coup le plus dur, ça a été de voir ses troupes, fatigués, blessées mais que l'espoir tenait toujours debout devant le champ de force se faire massacrer par des projectiles venant d'on-ne-savait-où, alors même qu'elle avait vu sa sœur se présenter au balcon.

Celestia avait dû être sur le point de capituler.

Mais alors que la guerre était sur le point de finir, c’était l'hécatombe. Une fenêtre d'espoir s'était ouverte lorsque le champ de force était tombé, et que les troupes partisanes avaient tenté le tout pour le tout en chargeant à travers la pluie de feu. Mais cette fenêtre s'est refermée violemment dans une décharge d'énergie jaunâtre. L'alicorne du jour était sortie de sa retraite, et avait redéployé un bouclier de son cru, condamnant les rebelles à la mort s'ils restaient. Platinum avait alors fait le plus logique : ordonner la retraite.

La guerre n'était pas encore finie, mais pour avoir une chance de continuer le combat, Luna devait sortir de là en vie. Platinum continua de guider la Princesse à travers les rues, les échos des tirs se répercutant sur les murs. L'escouade de gardes qui les accompagnaient vérifiaient chaque coins de rue, chaque intersections, et lâchait sporadiquement quelques balles, le temps de passer l'endroit ou de trouver un autre passage.

Platinum avait du mal à réfléchir. Il s'inquiétait pour Luna, pour les autres soldats, pour l'avenir de la République. Les pensées se bousculaient dans sa tête. Il chercha autours de lui, et conduit son escouade dans des ruelles écartées, puis défonça la porte d'une maison et pénétra à l'intérieur. Un civil surpris les regarda passer, tandis que Platinum renversait tout ce qui se trouvait sur une table et posait une carte de Canterlot dessus. Les soldats se postèrent aux fenêtres, surveillant les environs. L'un d'entre eux s'approcha de lui et dit :

-Général, je ne pense pas que...

-La ferme. Soldat Pound, venez par ici !

Une licorne s'approcha de lui. Static Pound était la licorne de liaison de l'escouade, et Platinum avait besoin de la position de ses unités. Le général avait du mal à réfléchir quand c'était le bordel comme présentement, et il devait poser les choses, organiser la retraite pour éviter que les restants de l'armée ne se fasse massacrer. Il prit sa radio et la bascula sur le canal général :

-Général Armor à toutes les unités. Transmettez vos effectifs et positions au soldat Static Pound immédiatement, ainsi que les positions ennemies identifiées.

Dans la seconde, la corne de la licorne se mit à briller, et sur la carte apparurent des petites images de poneys bleues nuit, accompagnées de chiffres et d'un nom, correspondant aux chefs d'unités. Une image de char apparut de même, tout près de leur position, ainsi que des zones rouges, où les ennemis étaient aperçus, avec des mentions en cas de véhicule.

La situation était très mauvaise. La radio du général grésilla :

-*Platinum ! C'est Clerical. Comment va la Princesse ?*

Armor tourna sa tête vers Luna qui semblait toujours ailleurs, muette.

-Etat de choc. Clerical, tu es près de notre position, viens nous rejoindre. Pound va vous transmettre les coordonnées.

-*Quel est la situation ?*

-Mauvaise. Les unités sont peu nombreuses, réduites et dispersées, et les renforts ennemis sont composés principalement de blindés.

-*Combien ?*

-Trop.

Un silence passa. Sur la carte, une unité bleue s'était approchée des portes, et immédiatement, une dizaine de chars rouges apparurent, ainsi que d'autres véhicules à l'extérieur. Puis le poney bleu disparu.

Ils étaient coincés. La radio grésilla de nouveau :

-*Ici les Night-Ops et les Fantômes. Platinum, quelle est la situation ?*

-Nous sommes coincés, les blindés ennemis gardent la porte, et d'autres traversent la ville. La colonne à bientôt fait la jonction avec les Forces de Défense.

Il y eu un temps mort, puis Stalker reprit :

-*Encore combien de soldats à évacuer ?*

Platinum parcouru la carte du regard. Le calcul fut désespérant de facilité.

-Moins de deux cents.

-*Transmets tes données à la licorne Dirt Fly des Fantômes.*

Platinum regarda sa propre licorne de liaison, et hocha la tête. La corne de Static Pound brilla plus fort. Le garde du corps réfléchit sur la manière d'évacuer la ville. Les issues étaient bloquées, à moins de sauter depuis la falaise. La licorne se tourna vers Luna, toujours assise à même le sol dans un coin de la pièce. Le civil s'était enfuit pendant que Platinum mettait en place son quartier général improvisé. Il s'assit en face d'elle et lui mit le sabot sous le menton pour l'obliger à le regarder.

-Princesse...

Luna le fixait, luttant pour ne pas se faire submerger par le désespoir. C'était plus qu'elle ne pouvait le supporter. Et la licorne connaissait suffisamment la Princesse pour savoir que ce n'était pas la défaite qui l'affligeait en ce moment. C'était de voir un tel massacre, d'être au milieu d'une mer de sang et de cadavre, et de ne pouvoir rien faire pour l'endiguer. Elle était en état de panique, et la dernière chose dont avaient besoin les rebelles survivants, c'était un leader tétanisé.

-Princesse...

-C'est fini... dit la jument de la nuit. C'est fini...

-Luna !

L'alicorne releva la tête vers Platinum, qui venait de se relever. Le soldat la regardait d'un air sévère. Son visage s'adoucit quand il capta l'attention de la Princesse.

-Rien n'est terminé tant que vous êtes en vie, et que vous vous battez. Ne les laissez pas gagner parce que vous vous êtes laissé submerger par le désespoir.

-Morts... Ils sont tous morts...

-Non, ils ne sont pas tous morts. Certain survivent et continuent de se battre sans relâche parce qu'ils croient toujours en vous. Vous êtes en vie, et tant que vous serez en vie, il y aura des poneys qui croiront en vous.

Il la releva.

-Vous nous avez donné l'espoir de sortir de la folie dans laquelle s'est engagée votre sœur. Ne cessez jamais de nous donner cet espoir.

-Tia... Si je ne m'étais pas dressée contre elle...

-... Il n'y aurait pas eu de guerre...

Luna baissa la tête.

-... Et nous serions devenus des monstres tels que Sparkle, des gens sans remords tels que ceux qui pullulent dans l'Etat-Major impérial, Equestria serait sûrement entrée en guerre contre d'autres peuples, les zèbres, les griffons ou que sais-je encore, les fanatiques perpétreraient des horreurs tels que le massacre de Ponyville, sans aucun espoir que quelqu'un se dresse contre cela.

Il laissa passer un temps, puis reprit :

-Vous nous donnez une porte de sortie devant ce que ce pays pourrait devenir, un espoir d'un avenir meilleur. Ne claquez pas cette porte devant notre museau.

Il sourit en lui passant le sabot sur le visage, séchant une larme au passage.

-Continuez de vous battre, Princesse.

Luna inspira fortement, puis se redressa, tenta de prendre un air plus sûre d'elle, et se dirigea vers la carte. Les deux tâches rouges s'étaient jointes, et se répandaient désormais dans la ville. Cependant, il y avait désormais des longues lignes fléchées vertes partant des unités lunaires, se dirigeant vers un endroit isolé de la ville. La radio d'Armor grésilla :

-*C’était très émouvant, mais la prochaine fois que tu veux faire une tirade pareille, Armor, évite de garder le sabot crispé sur le bouton de la radio. Ça fait deux minutes que j'essaie de vous joindre.*

-Stalker ?

Platinum baissa les yeux vers sa radio, qu'il avait effectivement gardé au sabot. Un diffus sentiment de honte se répandit dans son esprit.

-*J'ai établi des itinéraires de retraites pour les unités encore opérationnelles. Dépêchez-vous de tirer la Princesse de là.*

Platinum Armor regarda la carte. Effectivement, les lignes vertes évitaient les troupes ennemies, et les poneys bleus les suivaient rigoureusement. Le général nota qu'elles étaient toutes d'une même côté de la ville. Mais il y avait quelque chose qui clochait.

-Stalker, votre itinéraire conduit où, exactement ?

-*A mes petits passages secrets. Les égoûts.*
-Les... égouts ?
-*Vous allez pouvoir goûter à la vie souterraine merveilleuse des Night-Ops.*

Platinum ne sut quoi dire. Il y avait toujours quelque chose d'impressionnant dans le talent de Stalker en ce concernait ce genre de chose.

-*Dépêchez-vous, vous avez du ret... CONTACT ! CONTACT !*

La communication se coupa. Sur la carte, un poney rouge représentant les forces impériales était apparu proche de celui montrant les forces spéciales. Et partout sur la carte, des points rouges apparaissaient en dehors des tâches pourpres signalant la position globale de l'ennemi. Ils s'étaient dispersés, et se dirigeaient vers les lignes de retraite des rebelles.

Comme s'ils savaient où elles étaient. Platinum tressailli. Il entendit des bruits de chenilles toutes proches, et la voix de Clerical sortit de la radio :

-*Platinum, nous sommes arrivés. Sors de là.*

Le général fit un signe de tête, et quatre soldats sortirent du bâtiment en couvrant la rue, puis la licorne pénétra dans l'avenue, accompagné du reste de l'escouade, trois soldats flanquant la Princesse, et ils se dirigèrent vers les chars postés au milieu de la rue. La trappe du véhicule du milieu s'ouvrit, montrant le général des forces blindées, qui se tourna, l'air inquiet, vers la Princesse.

-Il faut se dépêcher, les troupes ennemis ap...

-CONTACT !

Les balles éclatèrent autour d'eux, ricochant sur le blindage des véhicules, et l'un des gardes s'écroula à terre, mortellement touché. Les autres se mirent en position de tir et ouvrirent le feu vers les forces solaires qui venaient d'apparaître quelques rues plus loin. Platinum Armor épaula son fusil et lâcha quelques rafales, accompagné de la Princesse qui affichait désormais un regard haineux envers l'ennemi, et qui lâchait quelques rayon vers ces derniers. Les tourelles des chars pivotèrent, et les chefs des véhicules se postèrent aux mitrailleuses, assurant un tir de suppression pour obliger les impériaux à se remettre à couvert. Soudain, un mur à côté d'eux explosa, et Platinum se retourna. A l'autre bout de la rue, cinq chars solaires venaient d'apparaitre, et un autre des blindés ouvrit le feu, explosant le sol à quelques mètres des véhicules rebelles.

Platinum secoua la tête, lâcha son arme qui se mit à pendre à son cou, retenue par la sangle, et souleva la Princesse, qu'il déposa sur l'un des tanks. Puis il dit à Clerical :

-Fonce ! Mets la Princesse en sécurité !

Le chef de char le considéra quelques instants, puis acquiesça et s'enferma dans son engin. Luna, déboussolée par ce qui venait de se passer, croisa les yeux de Platinum, le questionnant du regard.

Puis une douleur fulgurante surgit dans le bas du dos du général. Celui-ci serra les dents en étouffant un cri de douleur, et tomba à terre. Luna hurla, alors que les véhicules commençaient à s'éloigner, gagnant de la vitesse, et les deux chars qui ne transportaient pas la Princesse défoncèrent les murs pour élargir la voie. Luna porta un dernier regard sur le corps à terre de son protecteur, puis il disparut derrière un mur lorsque les blindés prirent un virage.

A terre, Platinum tenta de se relever, mais retomba lourdement. Deux de ses soldats le portèrent à couvert derrière des débris, cherchant à panser ses blessures.

-Vous allez bien, général ?

-Je... Mes pattes arrières...

Platinum observa ses pattes, leur ordonnant mentalement de bouger. Mais il savait que cela ne servait à rien. De toute façon, cela n'aurait bientôt plus aucune espèce d’importance. L'un des chars ennemis tournait son canon vers eux...

Platinum revu brièvement la petite pouliche bleue qu'il avait connu il y avait plus de vingt ans, quand Nightmare Moon venait d'être vaincue. Le jour où on lui avait confié cet ordre de mission tout simple : protéger la Princesse, à n'importe quel prix.

Mission à laquelle il n'avait pas failli jusqu'à aujourd'hui. Alors que le froid envahissait son corps, un léger sourire se dessina sur ses lèvres.

Ne cessez jamais le combat, Princesse...

Le char ennemi tira.

---

-A.J., recule !

-Jamais !

Big Macintosh sauta sur sa sœur et la plaqua à terre avant qu'un obus ne défonce le bâtiment près duquel elle se tenait. La jument orange se dégagea et se releva promptement, puis reprit son arme et ouvrit le feu sur les ennemis qui s'approchaient en hurlant de rage. Du rouge maculait son champ de vision sur le côté gauche, là où son œil était couvert du sang s'écoulant de la blessure qu'elle avait au front, mais elle n'en avait cure. Elle voulait tuer, même si elle devait y passer.

Ils reculaient ! Ils avaient été sur le point de faire payer ce monstre de Celestia, et maintenant ils reculaient ! Si Big Mac ne l'avaient tiré lorsqu'il avait fallu battre en retraite, elle serait allée seule dans ce château, quitte à massacrer tout le monde pour atteindre cette cinglée, et lui faire payer le meurtre de sa famille. Mais au lieu de ça, ils se faisaient canarder comme à la parade, perdant un soldat par pas fait vers leur point d'évacuation, sur ce foutu itinéraire soi-disant sûr que leur avait donné ce con de Stalker. Plus le temps passait, plus elle se demandait si ce type n'était pas dans le camp ennemi.

Le crâne d'Applejack pulsait. Elle voulait se passer les nerfs sur quelque chose, et presser une détente ne l'aidait pas. Elle voulait de la chair sous ses sabots !

Elle se cabra, hurlant sa colère et sa frustration, et chargea tête baissée vers les ennemis. Big Macintosh lui hurla de s'arrêter, mais elle n'en avait rien à foutre. Le sol éclatait autour de ses pattes, tandis que les ennemis surpris tentaient de l'aligner.

Puis une balle la percuta dans le torse, arrêtée par son gilet, elle perdit l'équilibre et tomba. C'était fini. Ainsi finirait la valeureuse Applejack. Elle hurla une volée d'insulte. Et qu'il soit écrit dans les livres que les mères des impériaux avaient une vertu monnayable !

Soudain, une explosion colorée eut lieu dans le ciel, suivie d'un arc-en-ciel qui se dirigea vers eux, accompagné d'un hurlement :

-...oooooooOOOOOOP !

Rainbow Dash atterrit dans une onde de choc qui  souleva un immense nuage de poussière et craquela le sol sous ses sabots, juste entre Applejack et les soldats qui s'apprêtaient à l'achever. Son regard fixait ses derniers, et son visage affichait une rage non contenue.

-PERSONNE n'a le droit de battre Applejack hormis MOI !

Dans la rue, les combattants ébahis restaient sans réactions. Applejack se releva péniblement, et se posta devant Rainbow Dash, jaugeant la pégase d'un regard mauvais.

Un sourire goguenard apparu sur les lèvres de la cow-pony.

-T'as peur de m'perdre, Sugarcube ? dit-elle d'une voix mielleuse.

Le même sourire de défi s'afficha sur le visage de la pégase.

-T'as peur de mourir, A.J. ?

Rainbow tourna la tête vers la sacoche qu'elle transportait, et l'envoya à terre, devant les pattes de la fermière. Une corde en dépassait. Rainbow Dash ricana.

-Il me semble qu’on n’a jamais réglé une question.

Les deux ponettes se regardèrent dans les yeux.

-T'as jamais voulu concéder que j'étais le Poney de Fer, dit-elle.

La pégase tapa du sabot au sol.

-Réglons ça aujourd'hui, maintenant, tout de suite. Ça te fera moins mal que partir la queue entre les pattes. À moins que ce ne soit ce que tu préfères, bien sûr, ajouta-t-elle sur un ton moqueur.

Applejack tiqua.

-Pour qui tu t'prends, l'emplumée ? J'vais t'faire bouffer la poussière jusqu'à c'que t'en étouffe ! hurla la terrestre.

Les deux restèrent ainsi à se regarder, alors que les spectateurs n'osaient pas tirer, trop fascinés par la présence des deux héroïnes désormais ennemies et la perspective du duel qui se préparait. Applejack montra la corde de la tête.

-C'quoi ça ?

Rainbow Dash battit des ailes.

-"Pas d'ailes".

Sans dire un mot, Applejack prit la corde, et se dirigea vers la pégase. Elle lui passa la corde autour du corps, enserrant les ailes, et fit un solide nœud.

Un léger contact avec les plumes de la pégase déclencha une foule de souvenirs dans l'esprit de la ponette. Des moments passés ensemble il y avait des années de cela, la complicité qui unissait ces deux garçons manqués, les défis lancés tout le temps et pour toutes les raisons.

Mais les yeux d'Applejack descendirent vers les pattes de la pégase, presque intégralement couvertes de sang. Elle leva les yeux vers le visage de son ancienne amie, qui la regardait dans les yeux. Dans leur regard, chacune des ponettes pu voir que l'autre regrettait le temps passé. Mais leurs visages fermés et leurs postures étaient sans équivoque : elles se battraient, jusqu’à la mort. Applejack s'écarta de la pégase en lui tournant le dos, et dit :

-Que personne ne s'en mêle.

Rainbow se tourna vers ses propres soldats :

-Compris ?

Dans les rangs, tout le monde comprenait. De toute façon, connaissant la réputation des deux combattantes, personne ne voudrait y être mêlé de près ou de loin. Big Macintosh était cependant inquiet. Applejack avait jusqu'ici eut beaucoup de chance, mais un duel à mort avec sa rivale était une autre paire de manche. Et il ne pouvait pas s'interposer sinon sa sœur le tuerait, sans hésiter. Elle était déjà trop loin.

La fermière se retourna vers la pégase, et les deux juments se toisèrent, longtemps, les muscles tendus, chacune analysant les moindres tremblements de son adversaire. Finalement, ce fut Rainbow Dash qui parla en premier :

-Alors ? J'avais entendu dire que tu es une furie sur le champ de bataille. T'as peur ?

-Peur ? Non, j'attends qu'tu bouges ton cul d'emplumée par ici pour qu'j'te l'botte en règle.

-J'ai pas envie que ça finisse trop vite. Ça serait t'insulter.

-Tu crois pas m'avoir assez insulté en n'foutant rien pour empêcher Celestia de massacrer ma ferme ?

Rainbow eu l'air choqué par l'accusation. Applejack, elle, avait la mine qui s'assombrissait de seconde en seconde.

-T'étais la seule à avoir un peu d'jugeote dans l'crâne, mais tu t'es juste planquée comme la lâche que t'as toujours été.

-Ça te va bien de dire ça, toi qui a refusé de choisir un camp jusqu'à ce qu'on choisisse pour toi !

-Et je s'rais encore à Sweet Apple Acre avec ma famille si vous ne n'l'aviez pas massacré !

-Viens pas faire ta prêcheuse, parce que t'as buté beaucoup plus de poney qu'Heartless, Twi' et moi réunies ! hurla Rainbow Dash.

-La faute à qui ? Si t'étais intervenue...

-Me met pas la faute dessus ! C'est TOI qui a planqué les traîtres ! C'est TOI qui a refusé de lâcher prise quand on t'a demandé de dégager ! Moi, j'ai choisi un camp, et j'y reste fidèle, au moins !

-Et t'as tué combien de poney, avec ta fidélité ?

-Moins que toi, dans ta prétendue quête de vengeance !

Rainbow Dash fit un pas en avant, toujours hurlant de rage :

-Si tu voulais vraiment venger Applebloom, tu serais venue ici directement, au lieu de te planquer dans les tranchées en massacrant des centaines soldats qui n'avaient rien demandé ! Tu t'es toujours planquée pendant treize ans !

-Et toi t'as massacré la moitié de ta race avec tes explosions colorée ! T'as trahi les pégases, t'as perverti ton Rainboom, t'as pourri tout ce qui était bon chez toi !

-Tu veux qu'on parle de ça ? Dis-moi ce que tu ressens quand tu as le sabot sur le crâne d'un de ces types ! fit-elle en montrant les solaires qui regardaient. Oses dire que t'aimes pas ça, assassin !

Applejack sentait la rage bouillonner dans ses entrailles. Rainbow Dash l'énervait à l'accuser ainsi. Et ce qui l'énervait encore plus, c'est que c'était vrai.

Elles hurlèrent simultanément :

-ASSASSIN !

-TRAÎTRE !

Les deux juments se jetèrent l'une sur l'autre, et se rencontrèrent dans un choc violent entre leurs deux crânes. Elles reculèrent, mais reprirent immédiatement leurs appuis pour repartir à la charge. Applejack pivota au dernier moment dans le but de décocher une ruade dans le visage de Rainbow, mais celle-ci se baissa juste à temps pour éviter le coup de la fermière. Profitant de l'ouverture qui lui était offerte, la pégase décocha un coup de sabot dans le ventre de la terrestre, qui l'envoya à terre sur le flanc.

La jument ailée se rua sur la ponette orange à terre, mais Applejack se ramassa sur elle-même et décocha ses pattes arrière dans celles de la pégase qui tomba. La fermière se releva promptement, puis frappa du sabot de toutes ses forces vers le visage de Rainbow Dash. La vive pégase roula sur elle-même pour éviter le coup meurtrier, mais la ponette orange ne renonça pas et continua de marteler le sol, visant à chaque fois la tête de la pégase bleue, qui continuait de rouler pour échapper à la furie de son ancienne amie.

Puis Rainbow s'enroula sur elle-même, et d'une puissante poussée de ses pattes avant fit un rétablissement, et profita de l'inertie pour effectuer un balayage avec une de ses pattes arrière, qui faucha celles d'Applejack. La terrestre roula rapidement hors de portée, et se releva. Les deux ponettes au souffle accéléré se regardèrent quelques secondes. Rainbow regarda quelque chose juste derrière Applejack, au sol, et eut un sourire inquiétant.

-C'est trop lent.

Elle désigna ce qu'elle regardait, et Applejack osa un rapide coup d'œil. Au sol, elle vit une lame briller. Un couteau. Elle revint à Rainbow, qui sortait un couteau de sa veste et se postait sur ses pattes arrière, en position de combat, la patte armée en retrait, l'autre plus en avant pour les parades. Cette patte libre fit un petit geste demandant à la fermière de la rejoindre.

Relevant le défi, Applejack prit l'arme au sol, et se mis également en position de combat. Les deux juments commencèrent à tourner l'une autour de l'autre, resserrant le cercle à chaque tour et diminuant la distance entre elles. Lorsqu’elles furent assez proche, elles cessèrent de tourner, et il y eu un instant de flottement pendant lequel les deux combattantes ne se lâchaient pas des yeux.

Puis Rainbow pivota sur elle-même en se baissant, tentant de balayer une nouvelle fois les pattes de la fermière, mais Applejack réagit et se décala vers l'arrière, puis chargea pour profiter de la posture de la pégase, le couteau retourné dans le sabot, et elle tenta de le planter vers son cou. Mais l'experte des duels aériens pivota son torse pour éviter le coup et lança le coude de sa patte armée dans le plexus d'Applejack, qui recracha l'air de ses poumons.

Rainbow fit pivoter le couteau dans son sabot et tenta de planter sa lame dans le torse de la terrestre. Applejack parvint à éviter le coup mortel, mais l'acier aiguisé pénétra son gilet et le déchira sur la largeur du torse, arrachant une plainte étouffée à la guerrière. Elle se recula de quelques pas, la patte sur sa poitrine, et regarda son sabot, rougit par son sang qui s'écoulait de la blessure. Un sourire satisfait s'afficha sur le visage de Dash. La rage brûlant dans ses veines, Applejack mit son arme dans sa bouche et se posta sur ses quatre pattes, puis chargea la pégase.

Celle-ci se posta bien en appui sur ses pattes arrière, le couteau près à intercepter l'infortunée terrestre, mais au dernier moment, Applejack balança ses pattes arrière vers l'avant, frappant la combattante au niveau du bassin et la fit se plier en deux. Profitant de la surprise de la pégase, elle envoya le couteau vers son visage, et sentit qu'elle taillait quelque chose. Rainbow poussa un cri de douleur, et donna un formidable uppercut à la cow-pony, qui s'écroula à terre. La pégase s'écarta, les sabots sur le visage. Groggy, Applejack se releva péniblement, et regarda sa vieille amie.

Rainbow Dash écarta doucement les sabot de son visage, dévoilant une large balafre débutant sous son œil droit et poursuivant son chemin vers l'arcade gauche. Le sang s'écoulait, couvrant son visage de rouge. Ses pupilles se rétrécirent, elle hurla et se jeta sur Applejack encore sonnée.

Elle la plaqua au sol, et commença à lui frapper de façon répétée le visage en hurlant de toute ses forces. Puis elle se redressa sur la ponette terrestre, et sortit son couteau, une lueur folle dans le regard. Mais Applejack profita de ce redressement pour contracter ses muscles abdominaux et attraper la tête de la pégase avec ses pattes arrières. Bloquée, étouffée, Rainbow planta son couteau dans la cuisse d'Applejack, qui cria de douleur et relâcha son étreinte.

Les deux juments s'écartèrent, vacillantes, Applejack trainant sa patte blessée. L'adrénaline commençait à s'épuiser dans ses veines, et elle ne parvenait plus à lutter contre la douleur sur son torse, son museau probablement cassé, et la blessure qui pissait le sang de sa cuisse. De son côté, Rainbow n'était guère mieux lotie, la balafre continuant de faire couler du liquide rouge sur son visage et elle se tenait le bassin, serrant les dents.

Puis Applejack sentit une patte sur son épaule. Elle se retourna pour voir Big Mac et les autres rebelles. Elle s'était reculée jusqu'à leurs lignes. Elle croisa le regard de son frère, qui fit « non » de la tête. Puis brusquement, il planta une seringue dans son dos, et la douleur disparue, puis il la jeta violemment vers les autres soldats derrière qui la chargèrent sur leur dos, et ils partirent au galop avant que les autres ne réagissent. Mais Rainbow Dash, de rage sorti son pistolet et hurla :

-TRICHEURS !

Elle tira trois coups, et Applejack vit Big Mac s'écrouler avant d'atteindre la protection d'une ruelle transversale. Elle voulut hurler, mais la surcharge d’émotion associée à le perte de sang la fit sombrer dans l’inconscience.

Rainbow Dash continua de tirer vers l'endroit où les rebelles avaient disparus, tentant de déployer ses ailes, mais une fulgurante douleur lui rappela qu'elles étaient toujours attachée, et que forcer était une mauvaise idée. Elle se tourna vivement vers ses troupes :

-Qu'est-ce que vous attendez, bande de couilles molles ? RATTRAPEZ-LES !

Les soldats paniqués s'armèrent et partirent au galop à la poursuite des fuyards, suivis par le tank qui défonça les murs pour se créer un passage. Dash coupa ses cordes et déploya ses ailes, mais elles étaient toujours douloureuses du fait qu'elle avait voulu les ouvrir violemment quand elles étaient toujours attachées. Elle marmonna, l'air meurtrier :

-Rainbow Dash gagne toujours, A.J..

Puis elle s'élança à la suite de ses soldats.

---

A terre, Big Mac pressa sur ses blessures. Il avait mal, et sentait le liquide poisseux s'écouler sous lui. Touché une fois au ventre. Il tourna la tête, et vit une bouche d'égout. S'il arrivait à se traîner jusque-là...

---

-Par où ?

-A droite, des ennemis, à gauche, des ennemis, tout droit, des ennemis...

-Et derrière, tant que t'y es Windy ? demanda Flesh d'un ton narquois.

-Des ennemis aussi, fit Stalker d'un ton sec. On avance.

-Oui, mais par où ?

Stalker prit son pistolet, sur lequel il avait fixé un silencieux, et s'approcha du groupe de cinq soldats qui se trouvaient en face, Night Shine, Rocket Storm et Moonface sur les talons. Puis une fois assez près, les quatre soldats firent feu rapidement et tuèrent les gardes en silence.

-Tout droit, fit le commandant.

Les commandos survivants s'engagèrent dans la rue, vérifiant tous les côtés pour éviter de tomber sur d'autres soldats patrouillant dans les rues. Régulièrement, Stalker consultait sa carte, dépourvue de tout signal. Il avait fait couper les transmissions magiques qui lui avaient permis de tracer les itinéraires de retraites quand il s'était aperçu que ceux qui les empruntaient se retrouvaient systématiquement interceptés par des unités ennemies. Les Licornes avaient dû trouver un moyen d'intercepter ces transmissions. Désormais, il fallait espérer que les survivants se rappellent du point de sortie, et comprennent qu'il fallait aller dans les souterrains. Une fois sous terre, les combats seraient plus avantageux pour les fuyards, sans les chars de combat de l'ennemi.

Mais il fallait y arriver. Les autres unités ne pourraient pas emprunter n'importe quelle bouche, sous peine de se perdre dans le labyrinthe des souterrains de Canterlot. Pour ce qui concernait les Night-Ops et les Fantômes, malgré le fait qu'ils avaient une carte, ils n'avaient pas encore eu l'occasion de descendre sous terre sans se faire remarquer par des unités ennemies, et il était primordial que l'armée de l'Empire ignore la manière dont ils allaient sortir de la ville. Il ne manquerait plus que les issues souterraines soient aussi bloquées.

L'équipe arriva en vue d'une nouvelle rue dégagée. Les soldats se plaquèrent sur les murs, et ceux qui étaient en tête vérifièrent les environs, pointant leurs armes dans les deux sens de la rue. D'un signe de patte, ils signifièrent que la voie était libre. Il leur restait à traverser quelques blocs pour atteindre le point de rencontre prévu. Les commandos s'engagèrent dans la rue, laissant un certain intervalle entre chacun d'entre eux. Night Shine passa derrière Painless, et trotta dans l'espace découvert. Au loin, il entendait les bruits des chars et des tirs qui éclataient ailleurs dans la ville. Le plus impressionnant avait été l'explosion colorée dans le ciel qui avait retentit il y avait quelques minutes. Tout le monde avait pensé à un Rainnuke, ce qui aurait signé la fin immédiate de la bataille.

Mais de toute façon, celle-ci était déjà terminée. Restait juste à y survivre.

Soudain, alors que le pégase allait rejoindre l'autre côté de la rue, un bâtiment explosa une centaine de mètres plus loin, et un char arborant un soleil sur le flanc émergea des décombres, le canon pivotant vers eux. Les commandos, qui s'étaient jetés à terre lors de l'écroulement, se relevèrent le plus rapidement possible. Night Shine galopa désespérément pour rejoindre l'abri en face de lui.

Le char tira au milieu de la rue, et le souffle de l'explosion le projeta contre un mur, proche de son objectif de fuite. Sonné, le pégase se traina à l'abri, tiré sur les deux derniers mètres par ses camarades. Sa vision se rétablit alors que les acouphènes disparaissaient, et il regarda dans la rue. Quatre cadavres gisaient au milieu du passage, et trois commandos étaient repartis en arrière. Le char ouvrit une nouvelle fois le feu, explosant le coin du bâtiment derrière lequel les retardataires s'étaient réfugiés, et immédiatement un second coup de canon frappa la rue, proche de sa propre position. Il y avait plusieurs blindés.

Night Shine tenta de se relever, mais une fulgurante douleur explosa dans son ventre. Il baissa les yeux, pour voir une énorme tache rouge se répandre sur son abdomen, et une tige de fer en dépasser. Le soldat serra les dents, gémissant de douleur. Il avait dû se planter lorsqu'il avait été projeté. Il vit Coffee Crime se pencher sur lui, l'air inquiet.

-Et merde. Tu m'entends ?

Night Shine fit un vague signe de tête affirmatif. Stalker passa derrière, pour observer la situation.

-Mind, Fly et Strike sont resté là-bas...

-Hey ! Tu peux te lever ? demanda le médecin au pégase.

Night Shine tenta de se redresser, mais la souffrance l'empêcha de faire le moindre mouvement. Crime secoua la tête et se tourna vers Stalker :

-Il ne peut plus bouger.

-Donne-lui un coup de Booster, on ne peut pas rester.

-On fait quoi pour les autres ? demanda Black Jack.

Stalker resta silencieux, regardant les soldats de l'autre côté de la rue. Les tanks tiraient désormais à la mitrailleuse, et l'angle de tir indiquait qu'ils se rapprochaient.

-Tu vas pas les abandonner, quand même ? demanda la licorne noire.

Stalker ouvrit la bouche, mais Coffee le coupa :

-Même avec un Booster, il ne tiendra pas, dit-elle d'un ton fataliste.

Night Shine regarda successivement le médecin, son leader, et enfin sa blessure. Puis il prit une seringue dans son équipement, et se piqua la cuisse. La douleur disparut immédiatement, et il commença à se relever. Coffee lui plaqua le sabot contre le torse pour le maintenir à terre.

-Si tu bouges, tu es mort !

-Si on bouge pas, on est tous mort...

L'oreille de Stalker tiqua, et il se tourna vers le pégase qui s'était remis debout. Une petite pluie de sang s'écoulait de son ventre. Le commandant secoua la tête.

-Shine, je p...

-Laissez tomber, chef. Je suis mort. Je peux m'occuper des chars, au moins faire diversion…

Shine sorti les explosifs qu'il transportait de sa veste, et les accrocha à sa ceinture. Stalker secoua la tête, puis sortit ses propres explosifs.

-Va t'en falloir plus, dit-il en lui lançant le paquet.

Flesh, Moonface et Rocket Storm lui donnèrent aussi leurs engins, le gratifiant d'une bourrade à l'épaule. Night Shine prit Storm, son ami inséparable, dans ses pattes, et lui confia discrètement une lettre.

Puis il tourna le dos à ses camarades et galopa vers la rue, une étrange sensation d'étirement dans le ventre. Sa vision se troubla légèrement. Enfin, il parvint dans l'allée, et tourna rapidement en direction des trois chars qui se trouvaient là. Ils n'étaient plus qu'a une quinzaine de mètres. Le pégase posa le sabot sur le détonateur, galopant sous les tirs des mitrailleuses.

Il n'eut pas le temps d'appuyer. Une rafale lui traversa le torse, faisant fi de ses protections à cette distance, et les tirs remontèrent jusqu'à son crâne, explosant ses lunettes fumées dans une gerbe de sang et de verre, puis le pégase s'écroula, le sabot toujours sur le détonateur. Les chars stoppèrent leurs tirs, et un des chefs de char, une licorne blanche à la corne brisée sortit la tête par la trappe de son véhicule pour vérifier que le suicidaire était mort.

Rocket Storm avait vu tout cela depuis son abri, et il ne parvenait pas à l'accepter. Night Shine avait toujours été comme un frère pour lui, et le pégase adepte du déguisement refusait qu'il ne meure pour rien, abattu comme un chien alors qu'il s'apprêtait à donner sa vie pour ses camarades.

Le chef de char ennemi rentra dans son véhicule, et les blindés reprirent leur marche lente, tournant les canons de chaque côté de la rue. Storm regardait le corps. Les chars étaient tout proches, et il suffirait d'allumer les détonateurs pour les mettre hors d'état.

Le pégase déploya ses ailes. Il faudrait être rapide, mais Storm comptait sur l'effet de surprise. Il banda ses muscles.

Stalker nota le manège du soldat trop tard.

-Storm ! N...

Trop tard, le pégase partit comme une trombe, et le commandant voulant l'empêcher de se sacrifier inutilement le suivit hors du couvert de la ruelle, mais pas assez rapidement.

Les mitrailleuses des chars ouvrirent le feu sur le pégase qui s'approchait, et une balle lui déchira l'aile, ce qui lui fit perdre le contrôle de son vol et s'écraser juste à côté du corps de son ami. Il tendit un sabot vers le cadavre, tentant d’atteindre le détonateur, mais il lui manquait quelques centimètres.

Merde...

Stalker vit les mitrailleuses des chars pivoter vers lui. Il aperçut le corps bardé d'explosif, qui était juste devant le nez des véhicules. Il sorti son pistolet, au même moment où les tanks faisaient feu, les projectiles sifflant autours de lui. Une balle lui traversa l'épaule au moment où il tira, le faisait reculer, toutefois le projectile atteignit son but et pénétra les charges.

La bombe équine explosa dans un tremblement de terre, et le souffle projeta Stalker contre un mur à l'intérieur de la ruelle. Le commandant s'écroula, sonné. Non loin, le char central, le plus proche, avait été soulevé et rejeté vers arrière, retombant lourdement sur ses chenilles qui se brisèrent sous le choc. Les deux autres véhicules avaient glissés, détruisant eux aussi leur bande roulante, et le canon de l’un d’entre eux était tordu, tandis que la tourelle de l’autre faisait un grand bruit de moteur à vide, le système de pivot était détruit.

Nicholaus, qui se trouvait dans le char de tête désormais immobilisé, ouvrit la trappe et sortit le haut de son corps pour observer les dégâts sur ses véhicule, mais il vit trois soldats venus du point de départ de la traversée des rebelles se diriger vers là où les autres avaient disparus. Il sortit son pistolet et tira quelques coups dans leur direction, en hurlant à son artilleur de les tuer. La tourelle pivota, suivant les trois soldats, qui parvinrent tout de même à finir leur traversée. Nicholaus ordonna de faire feu.

---

Windvision était en train de soulever Shadow, encore sonné par le choc, et le portait difficilement pour rejoindre les autres plus loin dans la ruelle. Puis elle entendit le tir de canon du tank ennemi encore fonctionnel, et au-dessus d'elle, le mur explosa et s'écroula sur eux, les débris tombant de tous les côtés et manquant à chaque seconde de les écraser.

Soudain, Windvision sentit une poussée dans son dos, et elle fut violemment projetée en avant, au moment où un gros bloc s'écrasa là où elle se tenait une seconde auparavant. Elle tomba à terre, tandis que l'éboulement se terminait, et se retourna prestement vers les décombres, inquiète. Elle vit avec soulagement le commandant qui était toujours à terre, gémissant, juste devant le bloc qui avait failli les écraser. La ponette se précipita sur lui, et commença à le tirer, mais un hurlement du la stoppa, et elle le lâcha. Shadow semblait mal en point, il serrait des dents, comme en proie à une grande souffrance. Windvision releva légèrement les yeux, et comprit.

La patte arrière gauche du commandant était sous le pan de mur qui l'avait manqué. Elle entendait des cris venant de la rue, des injonctions leur demandant de se dépêcher. Windvision se pencha vers Stalker, un léger sentiment de panique l'envahissant.

-Shadow, qu...

L'étalon leva les yeux vers elle, serrant les dents en poussant un gémissement étouffé, et se redressa sur ses pattes avants.

Puis il l'embrassa, tout en lui déposant son chapeau sur la tête.

-Pas de regrets, lui chuchota-t-il.

Il se laissa retomber lourdement. Des coups de feu éclatèrent derrière le blessé, et Windvision resta un instant immobile. Puis elle fit quelques pas en arrière.

-Putain... Pas comme ça...

-J'ai... pas mieux à proposer...

La jument eut un sourire triste, et baissa la tête.

-Adieu.

-Adieu.

Elle se retourna, et s'élança au galop avant de disparaître plus loin. A ce moment, Stalker entendit des pas résonner derrière lui. Le poney rouge tourna la tête pour voir quatre soldats trébucher parmi les décombres, ainsi qu'une licorne blanche, un pistolet encore fumant au sabot. Ce dernier se tourna vers lui, et pointa son arme vers sa tête en se rapprochant, jusqu'à ce que le canon de l'arme lui touche la tempe. Stalker ferma les yeux. Mais le coup ne vint pas.

-Où sont tes insignes ?

Le commando rouvrit les yeux, voyant que le poney, sûrement le chef de l'unité, le détaillait, l'air songeur.

-Quel est ton grade ? Ton unité ? Pourquoi tu n'as pas de marquage ? Réponds !

Stalker se contenta de le fixer d'un air neutre. Soudain, l'air de l'autre changea du tout au tout, un sourire malsain se dessinant sur ses lèvres. Il le frappa lourdement à la tempe avec la crosse de son arme, et le commandant s'écroula à terre. Nicholaus rangea son arme.

-Désarmez-le. Je crois qu'on a trouvé quelque chose d'intéressant...

Puis il se pencha sur le poney rouge sonné, et le prit par la crinière pour porter son oreille à sa bouche.

-Je vais te faire cracher tout ce que tu sais, saloperie de fantôme, chuchota-t-il.

Stalker ne put se retenir de pouffer de rire. Légèrement sonné, il marmonna :

-Pas les bons...

Pour tout commentaire, Nicholaus le frappa une nouvelle fois, et il tomba dans l'inconscience.

---

Iron Gear pouvait sentir l'inquiétude monter chez le général. Les tanks n'étaient pas la façon la plus discrète de traverser la ville, et ils devaient veiller sur la Princesse après avoir laissé ses gardes du corps en arrière pour gagner en vitesse et disperser l'ennemi. Heureusement, ils étaient presque arrivés au point de rendez-vous. Encore quelques pâtés de maisons, mais l'endroit devenait difficile d'accès, cette partie de la ville éloignée du centre regroupant plus de petites ruelles, trop étroites pour les véhicules, et le général avait encore des réticences à faire défoncer les murs. En partie par éthique, mais aussi parce que c'était un processus qui les ralentissait, et mettait en danger la Princesse, toujours couchée sur la partie moteur à l'arrière du tank.

Clerical regardait sans arrêt sa carte. Ils allaient finir par devoir abandonner les véhicules, mais c'était alors se désarmer totalement s’ils tombaient sur des unités adverses, et le général ne pouvait pas se permettre de mettre la Princesse dans un tel état de faiblesse. Avec des tanks, ils pouvaient se défendre. Soudain, sa radio grésilla :

-*Général Clerical, ici Windvision des Night-Ops. Je ne reçois plus Armor, vous avez des nouvelles de la Princesse ?*

-Armor est tombé, répondit le général. La Princesse est avec nous.

-*Oh... Votre position ?*

Le général hésita.

-Le canal est sécurisé ?

-*C'est notre canal perso.*

-Zone G7, au carrefour rue du Roi Aurum et rue des Wendigos.

-*On arrive sur votre position.*

-Quand ?

-*Maintenant. À cinq heures.*

Le général ouvrit la trappe, et sorti le haut de son corps, puis se tourna dans la direction indiquée. Une quinzaine de soldat sortirent d'une intersection et se dirigèrent vers eux. La Princesse releva la tête, tandis que les forces spéciales, la terrestre verte en tête, les rejoignaient. Luna observa les personnes présentes, et demanda :

-Où est Stalker ?

Puis elle nota le chapeau d'éclaireur que portait la ponette. Un couvre-chef qui tombait généralement sur la nuque du commandant. Windvision ne sembla cependant pas affectée quand elle répondit :

-Porté disparu. Il ne reste plus que vous ?

Clerical et Luna se regardèrent, puis repassèrent à la ponette.

-Comment ça, « que nous » ?

-Nous sommes arrivés au point de rencontre il y a dix minutes, et l'endroit était blindé d'ennemis. Nous essayons d'appeler les autres, mais nous n'avons aucune réponse.

Luna était choquée par cette révélation. L'armée entière avait été décimée ? Clerical secoua la tête.

-Un vrai traquenard...

Windvision hocha la tête.

-L'important, c'est que la Princesse soit en vie. Clerical, nous ne pouvons pas allez plus loin avec les tanks, ils ne sont pas assez discret, et il faut extraire la Princesse.

Luna, elle, avait envie de leur hurler de s'enfuir, et de la laisser affronter seule son destin. S'ils s'enfuyaient sans elle, ils pourraient peut-être s'en sortir, et se fondre dans la population de l'Empire, pour éviter les représailles. Une fois que Celestia aurait mis le sabot sur l’alicorne de nuit, ils seraient tranquilles.

Continuez de vous battre... Non, même si elle se rendait, les derniers partisans continueraient de se battre, ne serait-ce que pour la venger. Particulièrement des soldats aussi fidèles que les Night-Ops. Non, se rendre ne servirait à rien. Elle sauta à terre et planta son regard dans celui de la terrestre.

-Windvision, savez-vous comment sortir d'ici ?

-Oui, mais il faut se dép...

Une explosion retentit plus loin, et cinq tanks ennemis surgirent d'un carrefour à un peu plus d'une centaine de mètre, les canons pointés vers eux. Les blindés ouvrirent le feu, et le sol explosa sous les impacts d'obus. Clerical se jeta dans son véhicule et referma la trappe.

-Putain, ils savaient !

Le général ordonna d'ouvrir le feu à volonté, et Iron Gear sentit le char secouer lorsque l'artilleur tira. Immédiatement, le pégase actionna le mécanisme ouvrant l'accès au canon pour y glisser un nouvel obus. Il y eut un temps de visée, puis de nouveau le tremblement. Il entendit le général hurler dans sa radio :

-Ils nous entendent ! Windvision, emmenez la Princesse en sécurité, nous nous chargeons de les arrêter.

Une expression de surprise se peint sur son visage, qui se décomposa tout de suite après.

-... De les ralentir.

Iron Gear jeta un coup d'œil par l'ouverture devant le pilote. Derrière les cinq chars, dont l'un était devenu une épave fumante, d'autres encore arrivaient, portant leur nombre à quatorze, en état de combat, contre les trois tanks rebelles ayant déjà subit une bataille. Les impériaux ouvrirent le feu, et le tank fut secoué. Une explosion retentit à leur droite, accompagnée d'un flash incandescent et de fumée. Deux chars.

Clerical se laissa retomber sur son siège, puis il tourna son regard fatigué vers les membres de son équipage.

-Messieurs, ce fut un honneur de combattre à vos côtés. Je suis désolé de vous avoir embarqué là-dedans, Iron Gear, ajouta-t-il en se tournant vers le pégase.

Le mécanicien avait peur, et la terreur de mourir lui tordait le ventre. Cependant, face à l'attitude du général, tandis que les obus frappaient la coque de blindé, il s'efforça de chasser ces sentiments.

-De toutes façons, dit-il en engageant une nouvelle munition, je ne pouvais rêver mieux que de disparaître avec mes bébés.

Le général sourit, puis regarda par l'ouverture. Le char à leur gauche explosa, et tous les canons ennemis se tournèrent vers eux.

Iron Gear caressa la paroi du véhicule. Il avait passé tant de temps à les modifier et les améliorer qu'ils en étaient devenus ses créations à part entière. Ses enfants, en quelque sorte. Il ferma les yeux, tentant de se concentrer sur ce contact avec le métal froid pour ne pas céder à la panique.

Il aimait bien cette sensation sous son sabot.

---

Twilight entendit une autre explosion non loin, puis les tirs d'obus se turent. Le radio proche d'elle reçut une communication, et leva le museau vers la Licorne.

-Tous les blindés ennemis sont hors-combat, Madame. Mais la Princesse s'est échappée.

-Ce n'est pas important. D'après nos informations, c'est ici qu'ils doivent se regrouper. Ils vont forcément se jeter dans nos sabots.

Elle triomphait. La victoire était écrasante, personne n'avait pu s'échapper de la ville. En ce moment même, les chars du capitaine Nicholaus ratissaient la ville pour trouver les dernier hérétiques qui, ayant une once de jugeote, avaient compris que les "itinéraires sûrs" jetaient droit dans la gueule du loup.

C'en était fini de la soi-disante République Lunaire. Leur armée avait été réduite en cendre à Canterlot, celle à la frontière ne pourrait pas tenir indéfiniment aussi diminuée, et bientôt, le pathétique territoire qu'avaient volé les traîtres retournerait là où il devait être, dans le giron de l'Empire. Restait un détail, sous la forme d'une alicorne bleue nuit qui tardait à se montrer. Le radio se pencha sur son engin, et dit :

-L'informateur dit que nous devrions nous bouger au lieu de rester ici.

-Pourquoi donc ? demanda la licorne.

-Parce que ceux qui protègent la Princesse ne tomberont pas dans un piège aussi évident, a-t-elle dit, et qu'ils ont d'autres points pour s'exfiltrer.

Twilight frappa du sabot au sol, l'air mauvais.

-Pardon ? Où comptent-t-ils aller ? Où sont-ils ?

Le radio haussa des épaules, et la licorne se tourna vers les bâtiments aux alentours. Il n’était peut-être pas trop tard. Elle ferma les yeux, et concentra sa magie dans sa corne, puis relâcha le flux. Sa vision s'obscurcit, et le monde autour d'elle devint noir.

Puis une vague d'énergie explosa à partir de son corps, balayant l'espace, et des silhouettes blanches apparurent, là où Twilight savait que se trouvaient des Licornes du Soleil. Satisfaite par son test, elle se concentra et relâcha une plus grande vague, qui balaya trois pâtés de maisons. Soudain, au loin, elle vit deux puissantes taches blanches, plus quelques autres moins fortes. Elle coupa le flux, et un sourire s'afficha sur son visage.

-Licornes, suivez-moi ! Les autres, restez ici au cas où d'autres hérétiques viendraient !

Twilight se mit à galoper le plus vite qu'elle pouvait vers l'endroit où elle avait détecté l'ennemi. Un sortilège bien pratique, qu'elle avait mis au point pour les Licornes envoyées dans des combats dans des environnements denses, comme lors du soulèvement de Manehattan, et qu'elle avait appelé MADAR, ou détection et estimation de distance par magie. Plus la taches étaient puissantes, plus le corps en question était saturé de magie. Et là-bas, il y avait la Princesse. Et Black Jack.

Arrivée proche du lieu détecté, elle relança son sort, et vit que l'unité ennemie s'était déplacée, et son équipe reprit sa course, slalomant dans les rues étroites de cette partie de la ville pour les intercepter. Enfin, elle bifurqua à une intersection, et se posta solidement sur ses pattes.

En face d'elle, à une vingtaine de mètres, se tenaient les derniers lunaires pouvant poser problèmes, qui stoppèrent net de surprise. Immédiatement, les Licornes du Soleil lancèrent de puissants rayons magiques, mais la corne de Luna s'illumina, et un bouclier bleu nuit se dressa sur le chemin des projectiles. Twilight ordonna qu'on cesse le tir, et lança aux ennemis :

-C'est fini, Luna. Rendez-vous, et vous serez traitée comme il se doit !

Mais avant que la Princesse ne puisse répondre, une licorne noire à la crinière d'or fit quelques pas pour se mettre entre les partisans et les Licornes. Black Jack se tourna vers Windvision.

-Je les retiens. Ne perdez plus de temps, tirez-vous dès que possible.

Windvision hocha la tête, mais Coffee Crime s'avança :

-Ça va la grosse tête ? Tu te crois capable de stopper tous ces types à toi tout seul ?

-Non.

Il tourna son regard vers les Licornes de l'autre côté du bouclier.

-Juste Twilight. Désolé, mais pour les autres, vous devrez vous débrouiller.

-Jack, fit Flesh. C'est de Sparkle dont tu...

-La ferme, Flesh, sinon je te grille ce qu'il te reste de neurones. Maintenant, dégagez.

Sa corne brilla, et un bouclier doré se déploya par-dessus celui de Luna. Il fit quelques pas en avant, ne détachant pas ses yeux de la licorne violette. Celle-ci soutint son regard.

-Maintenant ! hurla Black Jack.

A ce signal, le bouclier de l'alicorne se désactiva, et toute l'équipe hormis la licorne noire se précipita en arrière pour disparaître dans les chemins tortueux de la ville. Les fanatiques de Celestia ouvrirent le feu de toutes leurs cornes, mais le champ protecteur non seulement encaissait tous les rayons, mais les renvoyait vers eux. Trois Licornes s'écroulèrent avant que Twilight ne hurle :

-Stop ! Stoppez le feu ! Poursuivez la Déchue !

Puis elle regarda Black Jack avec un air de défi.

-Je m'occupe de celui-là !

Les Licornes hochèrent la tête, et repartirent. Black Jack désactiva son bouclier, laissant l'espace libre entre les deux surdoués de la magie. Twilight secoua la tête.

-Tu aurais fait une Licorne du Soleil si puissante... Pourquoi nous as-tu trahis, Black Jack ?

Elle pencha la tête, avec un sourire terriblement faux.

-Ne représentais-je donc plus rien pour toi ?

-Au contraire, Twilight, répondit l'étalon. Je n'ai jamais cessé de songer à toi. Je n'ai jamais pu m'enlever ces sentiments que j'avais pour toi du crâne.

-Alors pourquoi avoir rejoint un camp où tu savais devoir m'affronter un jour ? Si tu t'étais enfui, j'aurai compris, et aurais respecté ton choix. Mais tu t'es aligné avec Luna. Pourquoi ?

-Parce que je t'aime, Twilight Sparkle, et que Celestia t'as rendue complètement f...

Il dressa en urgence une protection pour parer le rayon que venait de lui envoyer Twilight, qui éclata à quelques centimètres de son visage. La licorne violette le regarda avec un regard sévère :

-Ne prononce pas son nom avec ce ton ! Et ne vas surtout pas lui mettre quoi que ce soit sur le dos. C'est moi qui ai choisi mon camp, et Luna a toujours été une traîtresse et une lâche !

-Comment tu peux dire ça, alors que tu sais pertinemment qu'elle a toujours été aux premières lignes, quand Celestia se pl...

Nouveau rayon bloqué. Twilight était tendue sur ses sabots :

-Où était-elle quand des malheurs tombaient sur le monde ? C’était elle qui s'est pervertie en se laissant posséder par l'esprit de Nightmare Moon ! Et où était-elle quand Discord a brisé sa statue ? Elle travaillait son retour dans son royaume, peut-être ? Où était-elle quand les Changelins ont attaqués Canterlot ? En train d'apprendre à danser ?

Elle frappa du sabot, tandis que la colère l'envahissait et la chargeait d'énergie. Le coup défonça légèrement le sol.

-Elle nous a toujours délaissés, quand Celestia se mettait en danger pour nous sauver !

Black Jack se mit en position de combat.

-Et pendant treize ans, que s'est-il passé, dis-le moi ! Où était Celestia quand son peuple se faisait malmener par ses armées, parce qu'untel avait dit du mal de Celestia et tout son village payait les représailles ? Où était-elle quand ses armées se faisaient détruire à la frontière, pendant que sa sœur montait sur le front ?

La colère montait chez lui aussi, augmentant ses réserves magiques.

-Que faisait-elle le jour du Massacre de Sweet Apple Acre ? Que faisait-elle le jour où ses fanatiques ont réduit Ponyville en cendre ? Bordel, tu étais là, Twilight ! Tu sais ce que sa folie a amené !

-Ne rejettes pas la faute sur elle ! C'est MOI qui ai ordonné le massacre des traîtres à Ponyville il y a treize ans !

Black Jack ouvrit des yeux ronds. Puis il poussa un hurlement de rage, et un puissant rayon d'énergie doré fusa vers Twilight. La ponette para le coup, qui explosa contre un mur.

-Regarde-toi, bordel ! hurla-t-il. Regarde ce qu'elle a fait de toi !

Ses yeux blanchirent sous l'effet de la magie amplifié par la colère.

-Elle a tué la Twilight que j'aimais !

Twilight aussi ressentit la poussée de magie pulser dans ses veines, et ses yeux s'illuminèrent de même.

-Cette Twilight a ouvert les yeux, quand toi tu restais aveugle !

Les deux licornes se toisèrent, leur niveau de magie augmentant de seconde en seconde, leurs cornes brillants d’un feu soit orange, soit violet, tandis que la colère des treize dernières qu’ils n’avaient pas pu évacuer s’accumulait dans leurs corps.

Puis Black Jack poussa un hurlement, et pointa sa corne vers Twilight pour déverser un torrent de flammes jaunes vers la licorne, et le brasier empli la ruelle, cachant la vue aux deux mages, et augmentant la température de façon drastique. La jument dressa un bouclier juste avant que les flammes ne l’atteignent, créant une bulle sécurisée dans la rivière embrasée qui l’entourait.

Cependant, elle commençait déjà à avoir du mal à respirer, l’oxygène étant rapidement consumé par la magie de son adversaire. Elle se concentra, et disparu dans un "plop" caractéristique.

Black Jack entendit le son de la téléportation derrière lui, et dressa une protection en même temps qu’il coupait son torrent de feu. Il ressentit un énorme choc sur son bouclier, qui le fit tomber à genoux. Puis d’autres chocs qui mettaient à mal sa concentration. Il se retourna, pour voir la jument qui lui envoyait d’énormes rayons violacés contre le champ de force, qui commençait déjà à se fissurer. Le magicien concentra sa magie, et fit exploser son bouclier dans une onde de choc qui balaya la rue, puis se téléporta en bout de rue, plus éloigné de la jument. Celle-ci lui dit sur un ton moqueur :

-Toujours à jouer avec des allumettes, n’est-ce pas ? As-tu au moins appris des nouveaux tours, avec Luna ?

-Quelques-uns, répondit-il.

De la corne de l’étalon noir surgit une énorme boule de flamme, qui commença à rétrécir. Au fur et à mesure que la sphère réduisait son diamètre, sa couleur changeait, passant du jaune au violet, puis au bleu qui fonçait, et enfin la boule fut réduite à la taille d’une petite bille translucide.

-Goûtes ça !

Il tira la bille vers l’autre licorne, et sur le trajet du projectile, le sol et les murs s’enflammèrent et commencèrent à fondre sous la chaleur extrême concentrée par la magie. Twilight vit cela avec horreur, et sa corne brilla de mille feux tandis qu’elle enveloppait la bille d’une couche violette, et le projectile s’arrêta à quelques centimètres d’elle.

Les deux licornes serraient les dents, tout à leur duel de volonté alors que la sphère de chaleur restait flottante entre eux deux, et que chacun essayait de la renvoyer vers l’autre. Twilight employait de plus une partie de son énergie à éviter que cette micro-bombe n’explose, ce qui aurait des conséquences catastrophiques.

Les membres des deux mages tremblaient, les flammes dans la sphère translucide tournaient, et Twilight commençait à avoir mal à cause de la chaleur de cette maudite magie qui lui brûlait la peau. Puis elle poussa un cri, et la résistance qui contrait Black Jack se relâcha.

La bombe explosa, libérant une cascade enflammée dans l’espace réduit. La pierre commença à fondre sous la chaleur, et l’intérieur des habitations prit feu. L’onde de flamme se répandit dans les ruelles proches, et Black Jack employa sa magie à diviser le flot de flammes pour ne pas finir immolé. Enfin, la chaleur baissa, et la licorne put voir les dégâts occasionnés par son attaque. La zone était en feu, et un énorme cratère de roche en fusion se trouvait là où était la jument quelques secondes auparavant, et les murs étaient percés comme si une immense sphère avait tout emporté. Mais il n’y avait aucune trace de Twilight.

Black Jack resta sur ses gardes, la corne toujours prête à relâcher une attaque. Il s’avança, pas par pas, dans la rue, observant le moindre signe qui trahirait la présence de la licorne. La température était très élevée, mais l’étalon y était habitué. Il s’approcha du bord du cratère.

Il vit un corps calciné au milieu de la roche brûlée. Un cadavre avec une corne. Il vit quelques signes, tels que la Marque, successions d’étoiles, des brins de crinières violacés, témoignant a priori de l’appartenance du corps. Mais trop de choses n’allaient pas. La forme du corps, pour commencer, trop dodu.

Il se retourna d’un bond, et bloqua par télékinésie la lame qui pointait vers lui. Derrière l’arme, il voyait la jument, en pleine forme, au crin légèrement brûlés, dont la corne brillait pour tenir l’arme qu’elle avait sûrement invoquée. Black Jack eut un sourire moqueur.

-C’est parce que tu n’as pas eu le temps de faire mieux ou parce que tu étais fatiguée ?

-C’est dur de réfléchir quand la température dépasse les mille degrés.

-J’y arrive pourtant très bien.

Les deux mages se toisèrent, tout à leur duel mental pour le contrôle de l’arme.

-Tu as toujours eu cette tendance à en faire trop quand tu utilises de la magie, Jack. Avais-tu besoin de brûler autant d’espace ?

-Face à toi, je préfère ne pas me retenir.

-Quoi qu’il en coûte ?

Black Jack ne comprenait pas, et Twilight eut un sourire mauvais.

-Sais-tu combien de personne sont morte, parce que tu préfères "ne pas te retenir" ?

Black Jack se sentait mal à l’aise. Qui était mort ?

-Le corps sur lequel est basée la transformation, là-bas, c’est la vieille dame qui habitait dans cette maison, dit-elle en montrant le bâtiment à droite. Et celui-ci, c’est le jeune homme qui vivait de l’autre côté.

Sur ces paroles, une partie du visage de Twilight tomba par terre et se brisa comme un masque de porcelaine. Derrière le masque se trouvait un visage squelettique carbonisé, grimaçant dans un sourire éternel, une orbite vide et l’autre fourré d’un œil qui observait l’étalon avec insistance. Le souffle de Black Jack s’accéléra à cette vision.

Il avait tué des innocents.

Il ressentit quelque chose glisser dans son abdomen, et une douleur lancinante lui déchira le ventre. Il se retourna lentement tandis que le corps carbonisé débarrassé de son enveloppe de jument violette tomba à terre, et vis que le deuxième corps s’était relevé, et sa corne brillait. La cendre tomba du cadavre, révélant la Licorne Suprême, un immense sourire aux lèvres.

L’étalon baissa les yeux vers son ventre, et vit un sabre enveloppé d’une aura violette fiché là où il ressentait la douleur. Le sang s’écoulait de la blessure et commençait à goutter par terre. Twilight retira d’un coup la lame du corps de Black Jack, et l’étalon s’écroula à genoux, haletant de douleur.

-Pauvre Black Jack. Et dire que c’est toi qui m’a appris à faire ces coups de bluff.

Black Jack la regarda, luttant toujours contre la douleur.

-Tu as... l’air d’avoir... beaucoup appris toute seule...

-Je m’attendais à mieux de ta part...

La lame lévita vers le visage de l’étalon, et lui érafla le cou.

-Par respect pour notre petite amourette d’étudiants, je t’accorde le choix : ou tu m’accompagne dans le donjon du château et tu me livre tout ce que tu sais sur où se dirige Luna, soit tu meurs de suite, et je me débrouillerais toute seule.

Black Jack la regarda s’un œil noir.

-Amourettes d’étudiants ?

Un éclair passa dans son regard, et une boule de feu jaillit de sa corne vers le visage de la jument. Twilight se rejeta en arrière en hurlant, le visage en feu, et lutta magiquement pour éteindre les flammes qui lui consumaient le visage. La lame toujours sous son contrôle entailla la joue de l’étalon lorsqu’elle la ramena vers elle par réflexe.

Elle réussit enfin à étouffer le brasier, et braqua un regard empli de haine vers le magicien à terre, la moitié de sa face fumante.

-CREVE !

Elle brandit le sabre pour le transpercer, mais un tintement la retint. Intriguée, elle baissa les yeux, pour voir une forme ovoïde à ses pattes. Et quelqu'un hurla :

-JACK ! PORTAIL ! MAINTENANT !

Sans réfléchir, l'étalon mobilisa ce qui lui restait d'énergie pour créer l'entrée d'un portail sous lui, et rejeta la tête en arrière sans regarder où il visait pour matérialiser la sortie. Et il bascula à l'intérieur, au même moment où la grenade explosait.

La chaleur lui brûla le dos, mais il avait été tiré juste hors du rayon d'explosion, par une forme qu'il reconnut comme celle de...

-Coffee ?

-Parler plus tard, portail maintenant !

Et elle jeta un nouvel explosif par l'ouverture créé dans le mur proche d'elle. Black Jack secoua la tête, et visa l'endroit le plus éloigné qu'il pouvait voir depuis là où il était. Coffee le hissa sur son dos, et elle sauta dans le nouveau portail.

Au loin dans la ville, il y eut une explosion, suivie d'un puissant rayon magique tiré vers le ciel. Sparkle était toujours vivante, et elle avait les nerfs.

Elle se pencha sur Black Jack, dont le ventre se vidait de son sang. Elle prit des bandages et des compresses, et les apposa sur la blessure, pansant comme elle le pouvait la licorne.

-Je pensais... dit faiblement l'étalon noir. Que tu pouvais pas soigner ce genre de blessure...

Coffee tourna son museau vers la licorne, puis serra violemment les bandages.

-De une, ta blessure est moins grave que pour Night Shine, tu t'en sortiras si t'es soigné rapidement.

Puis elle prit une seringue et la planta dans la cuisse de la licorne.

-Et de deux, il ne s'appelait pas Black Jack.

Elle lui prit la tête dans les sabots.

-Alors tu vas bouger ton cul et tenir bon, parce que je me suis pas tapé tout le chemin en sens inverse, en évitant ces connasses de Licornes, et sauvé ta croupe pour que tu me clamse entre les sabots.

Black Jack regarda le médecin, puis se releva, la douleur ayant disparue.

-Ça va tenir ? dit-il en désignant le pansement.

-On va éviter de te faire faire des cabrioles.

-Pourquoi t'es revenue ?

-Sans Armor, Clerical, Stalker et les autres, on va manquer de stratèges de qualité. Donc pour répondre à ta question planquée, non, j'ai pas fait ça pour tes beaux yeux.

Elle fit une moue.

-Pas que.

Black Jack sourit et continua :

-C'est quoi le plan ?

-Wind' se souvient de la route pour ressortir, alors elle m'a passé un plan des égouts pour qu'on puisse rejoindre les Catacombes. De là, on devrait pouvoir s'en sortir.

-Pas trop d'ennuis avec les L.d.S. ?

-Ils ont pas été foutus de nous retrouver.

Ils traversèrent quelques rues, puis trouvèrent un endroit désert, avec une bouche d'égout au milieu de la rue. Un vrai miracle. Crime regarda la plaque se soulever sous la magie de la licorne.

-Traînons pas, ta blessure va s'infecter si on reste trop longtemps.

Elle descendit la première, pendant que Black Jack surveillait les environs. Il vit une porte entrouverte, avec une petite paire d'yeux le regardant. Quand il vit que la licorne le voyait, le poulain claqua la porte. Black Jack secoua la tête, et descendit en refermant le passage.

---

Four Eyes était posté au deuxième étage du bâtiment, et surveillait la rue avec son fusil. Des chars et des unités solaires patrouillaient, avec l'air plus détendu. Il ne devait plus y avoir de danger. La licorne bleue se demanda combien de poneys avaient pu s'échapper de la gueule du loup. Avec un peu de chance, la Princesse avait pu s'en sortir. Le sniper se demandait ce qui allait se passer par la suite. Avec cette défaite, l'armée républicaine allait avoir du mal à tenir face aux forces ennemies.

Ils étaient passés si prêt de la victoire.

Il entendit quelqu'un pénétrer la chambre derrière lui, s'approcher, et le nouveau venu lui posa le sabot sur l'épaule. Il releva son fusil, et quitta la fenêtre, laissant l'autre soldat s'occuper de la surveillance. Il sorti de la chambre, et se dirigea vers les escaliers.

Ils étaient cinq à s'être cachés dans cette maison, dont Lady Rarity, qui avait rejoint leur unité peu après avoir perdu de vue celle d'Applejack, au début de l'assaut. A présent, ils étaient tous coincés, obligés d'attendre que les choses se tassent pour se mêler à la population et s'enfuir. Il atteignit le living, où se tenaient Rarity et un autre soldat. Le dernier surveillait la vieille ponette qui vivait là, et qu'ils avaient enfermée à la cave. Pas très sympa, mais vital.

Rarity était couchée sur un coussin, le regard perdu dans le vide. C'était sa première bataille, et c'était une défaite atroce. Ils avaient été massacrés. Purement et simplement massacrés.

Rarity eu un rire nerveux. Et elle n'avait tué personne ! Elle avait préféré s'occuper d'autres choses, comme le passage de munitions, la transmission d'ordres par la magie, le pansement des blessures, mais elle avait été incapable de tirer sciemment sur un être vivant. Ce n'était pas son monde. Son monde était celui de la beauté, de la couture, des rires même faux, des coups de poignards sociaux dans le dos, pas de la violence, du sang, du camouflage, des balles et de la mort.

Elle n'aurait jamais dû venir. Mais comment aurait-elle pu se défiler ? Twilight avait fait une sortie, à ce qu'elle avait compris, Rainbow Dash avait combattu dans le ciel et Applejack... avait violemment massacré des ennemis à la pelle. Si on omettait les deux ponettes qui avaient eu la sagesse de s'exiler dès le début du conflit, tout le monde avait mis le sabot à la pâte, s'il fallait utiliser un euphémisme particulièrement osé.

Un sentiment étrange avait envahi Rarity quand Celestia était apparue au balcon de son château. Une certaine sérénité. Il ne pouvait y avoir qu'une raison pour laquelle elle s'était montrée : mettre fin à cette folie. Ça ne pouvait être rien d'autre. Sauf si elle avait été mise au courant de l'arrivée des renforts, et qu'elle voulait faire diversion. Rarity secoua la tête. Elle ne savait plus quoi penser des personnes qui l'entouraient. Elle ne pouvait plus faire confiance à personne.

Elle leva les yeux vers la licorne bleue, le sniper qui avait pris la tête de l'escouade qui l'avait "recueillie" après que les autres chefs se soient fait abattre. Un tireur d'élite avec des lunettes. L'idée en soi avait quelque chose d'étrange, mais il se débrouillait relativement bien. Et surtout, il était intelligent. Assez pour comprendre rapidement que l'ennemi avait intercepté leurs communications. Assez pour faire ce que l'ennemi ne s'attendait pas à les voir faire : rester sur place. Depuis qu'ils étaient ici, ils n'avaient pas eu de problèmes. Par contre, ils étaient dans l'incapacité de communiquer avec qui que ce soit et n'avaient aucune idée de comment se déroulait la bataille. Et puis, Rarity se sentait coupable pour la grand-mère attachée dans la cave.

Soudain, il y eu du bruit à l'étage, suivit d'une détonation sec. Four Eyes fit signe aux autres, et ils se cachèrent dans la pièce. Rarity se plaça devant le canapé, invisible depuis l'entrée du salon, l'autre soldat se plaça derrière la porte, pistolet au sabot. Eyes, lui, se mit derrière un placard collé au mur, de façon à avoir une vue sur qui entrait dans la pièce. Ils entendaient des bruits de sabots, des claquements caractéristiques d'un pas tranquille, qui se rapprochaient. Ils s'arrêtèrent avant d'entrer dans la pièce.

-Chouette, une partie de cache-cache.

Eyes vit Spitfire entrer dans la pièce, mais s'arrêter à peine après avoir mis les sabots à l'intérieur.

-Sunshine, Sunshine, dit-elle en se plaçant un sabot sur les yeux.

Elle sortit son pistolet, le plaça sur la porte, et tira une balle. Le soldat qui se trouvait derrière tomba, une trace sanglante en travers du front. La licorne à lunette entendit un petit gémissement venir du canapé.

Merde...

-Ladybug's awake, fit la pégase en découvrant ses yeux.

Spitfire se tourna vers le canapé. Eyes vit une ombre derrière elle, le soldat chargé de la surveillance de la ponette âgée, un couteau au sabot, prêt à bondir.

Il sauta soudainement sur la pégase, mais celle-ci se retourna et dans un mouvement fluide le fit tomber à terre, récupérant son couteau au passage. Un couteau duquel s'écoulait du sang. Eyes baissa les yeux. La gorge du malheureux était ouverte.

-Clap your hooves... Elle tapa dans ses sabots.

Eyes sorti lentement son pistolet de son étui, et le pointa dans la direction de Spitfire. La pégase tourna brusquement la tête vers lui. Il tira un coup, mais l'ancienne Wonderbolt avait utilisé sa vitesse légendaire pour se jeter sur lui, et le plaqua contre le mur, un sabot en travers de la gorge. Il l'avait manqué.

-And do a little shake ! dit-elle en plaçant son pistolet sur la tempe d'Eyes.

-Arrêtez !

Rarity était sortie de sa cachette, et pointait un pistolet vers Spitfire. La pégase tourna sa tête vers elle, un air nonchalant sur le visage. Puis elle appuya sur la détente, et le corps de Four Eyes s'effondra à ses pattes. Elle se tourna vers la Lady, et s'approcha.

-Miss Rarity. Ça me fait plaisir de vous voir.

Rarity tremblait, l'arme toujours pointée devant elle. La pégase avait tué tout le monde, mais elle ne parvenait toujours pas à ouvrir le feu. Spitfire contourna son arme, et posa le sabot dessus, déclancha le mécanisme qui désengagea le chargeur, qui tomba par terre, et tira la culasse pour faire sauter la balle chargée. Rarity regardait toujours devant elle, les larmes aux yeux. Spitfire approcha son museau de son oreille, et lui chuchota :

-C'est Sparkle qui va être contente.

Puis elle lui lécha l'oreille, et éclata de rire. Rarity laissa retomber son arme. Spitfire appela des renforts à la radio, un sourire toujours affiché sur le visage. La licorne, elle, regardait le sol, incapable de penser.

Son esprit était toujours ailleurs, quand des pattes puissantes la soulevèrent et la menèrent à l'extérieur, lui passant des chaînes autours des pattes, et qu'on la conduisait au donjon.

---

Celestia regardait la ville, d'où s'élevaient de longues colonnes de fumée. Son palais était ruiné, mais retrouverait rapidement sa splendeur. Tout comme la ville, dès qu'elle serait débarrassée de ses cadavres. On réparerait les maisons, les rues, et tout rentrerait dans l'ordre.

Oui, tout rentrerait dans l'ordre, comme avant, et la Princesse était décidée, même s'il fallait une décennie, un siècle, à effacer cette guerre de la mémoire collective. Ce serait dur, mais ce serait fait. Ce monde ne devait pas connaitre une horreur telle que celle-ci.

La Princesse luttait contre le chagrin qui lui enserrait le cœur. Tant de poneys étaient morts. Elle finirait par retrouver Luna, qui, selon les dires de Raindrop, s'était échappée, mais Celestia savait qu'elle avait perdu sa sœur à tout jamais.

Celestia se souviendrait. Pour l'éternité. Elle savait que sa peine ne s'achèverait qu'avec sa vie.

Au loin, l'astre solaire commença à monter, tandis que la Lune descendait pour retourner à son sommeil.

La Bataille pour Canterlot était terminée, une magnifique journée s'annonçait.

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