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L'épilogue d'Athéon

Une fiction écrite par Toropicana.

La chute de l'Empire

“Halte !”

 

Ainsi fut le premier mot qu’un Equestrien lança à un poney de cristal, à une jument pour être précis. Elle avait parcouru tout une contrée enneigée pour parvenir au milieu de cette grande forêt afin de mettre le sabot sur ce château. Si les gardes n’étaient pas étonnés de voir un poney presque transparent leur parler, c’est bien parce que la ponette portait un chaperon bien épais pour se protéger du froid, puis pour se dissimuler des rares passant afin de ne pas attirer l’attention.

 

On lui avait dit tellement de choses sur Equestria et ses dangers, pourtant, la seule difficulté qu’elle rencontra fut le blizzard qui entourait son chez soi. Les rares poneys qu’elle rencontrait sur sa route étaient trop occupés à travailler la terre pour la remarquer, mais aucun d’entre eux ne montrait le moindre signe d'hostilité, jusqu’à tomber face à ce garde.

 

“Je demande à rencontrer les Princesses Celestia et Luna, demanda-t-elle. Je viens au nom d’Athéon, souverain de l’Empire de Cristal.”

 

Avec autant de protocole dans sa façon de s’exprimer, les deux soldats restèrent sans réponse le temps de cogiter un peu, jusqu’à ce que l’un d’entre eux ouvre la grande porte pour la laisser entrer. Toutefois, le garde appela un autre étalon à l’intérieur pour lui ordonner de l’escorter. On la surveillait de près, mais pour être franc, elle s’attendait à beaucoup plus de résistance pour parvenir à entrer dans la bâtisse royale.

 

L’architecture était loin d’être aussi belle que celle de l’Empire, mais cette femelle aurait été folle de dire que les lieux étaient immondes à regarder, au contraire. L’intérieur était sobre, peu lumineux mais apaisant, avec des tapisserie dorées d’un côté, et bleu foncé de l’autre, tout le long du couloir qui allait la mener vers la salle des trônes. Oui, pas qu’un seul. Avec ces toiles sur les murs, la messagère comprit vite à l’aide les dessins qui les ornaient, que deux princesses régnaient sur cette grande et vaste contrée, comme on le lui avait dit.

 

Il n’y avait pas de grande porte épaisse pour séparer le couloir de la salle principale, comme si elles n’avaient pas peur qu’un ennemi puisse parvenir jusqu’ici. En même temps, si elles étaient capables de battre un esprit malsain comme Discord, qui oserait se dresser contre Celestia et Luna ? Les deux alicornes étaient assises de chaque côte de la salle, chacune en dessous d’une grande tapisserie à sa couleur et son image. La jument en chaperon se positionna au centre tout en restant à distance, puis se prosterna. Elle évitait de trop les dévisager, mais de sa vie, jamais elle n’avait vu d’aussi magnifiques juments.

 

Celestia arborait une longue crinière rose qui flottait sans cesse au gré de l’air comme du gaz, faisant passer son pelage de nacre comme secondaire ainsi que sa cutie mark représentant ce pourquoi elle siégeait sur ce coussin royal rouge. Il en était de même pour Luna qui avait un crin bleu, mais qui avait la même volupté que celle de sa sœur. Cependant, sa fourrure était ce qui se faisait le plus voir, elle était d’un bleu nuit et brillante, et sur ses flancs une cutie mark qui noircissait son pelage avec un croissant de lune pour lui montrer également la place qu’elle partageait avec sa sœur.

 

Et dire qu’à l’Empire de Cristal, certains les prenaient encore pour des juments incapables de diriger à bon escient Equestria. C’était difficile à croire rien qu’en les regardant, ainsi que par la pureté qui se dégageaient de leurs voix.

 

“Bien le bonjour, commença Luna en s’inclinant légèrement. Que pouvons-nous faire pour toi inconnue ?

 

-Je suis venu pour délivrer un...

 

-J’aimerais que tu te présentes, coupa Celestia sans monter le ton. Aussi, montre nous qui se cache derrière ce chaperon.”

 

C’était si peu demandé, mais... Si soudain. En même temps, il était impoli de se montrer devant des poneys royaux sans se présenter. Aussi, bien que le royaume ne semblait pas en danger ni en guerre, il valait mieux pour les Princesses prendre des mesures, surtout après tout ce qui s’était passé. Cela allait être un grand moment pour la messagère, elle allait révéler l’existence de sa race au monde, elle serait la première jument de cristal à se montrer devant des équestriens.


Ainsi, la ponette enleva son chaperon en dénudant le nœud de sa capuche avec sa bouche, révélant alors un pelage bleu clair. Puis après avoir enlevé la totalité de son vêtement, elle se dressa fièrement devant les alicornes, montrant ainsi sa crinière bleu foncé, et une cutie mark représentant un parchemin et une horloge. Luna entrouvrit légèrement la bouche, Celestia dressa un grand sourire.

 

“Je me nomme Saphir, messagère du Roi Athéon, souverain de l’Empire de Cristal. Ce nom n’évoque peut-être rien pour mais...

 

-Nous connaissons les poneys de cristal, coupa une nouvelle fois la jument solaire.

 

-Que... Comment ?”

 

Ce fut à son tour de rester bêta. Elle qui s’attendait à devoir raconter ce qu’étaient son royaume et son histoire, son rôle allait être simplifié finalement. Cependant, on lui avait certifié que personne en Equestria ne connaissait l’Empire, et en deux secondes, on le lui avait prouvé l’inverse. Celestia ne put s’empêcher de pouffer discrètement en voyant la ponette dans l’embarras. Ce fut alors Luna qui lui expliqua la raison de ce savoir, dans un ton des plus neutres.

 

“Nous savons que votre peuple reste méfiant vis-à-vis de nous, qu’il se cache du monde pour ne pas se mettre en danger face aux horreurs qu’auront vécus nos sujets. Nous savons aussi que des poneys issus de votre Empire nous observent à l’insu des habitants pour veiller à ce que rien ne puisse les entraver, et que vos terres sont impénétrables grâces aux sortilèges de votre Reine, conclu-t-elle durement.

 

-Mais nous respectons cela, ajouta sa soeur pour remettre à l’aise Saphir qui s’était recroquevillée. Tant que vos intentions ne sont pas obscures, alors qu’il en reste ainsi si cela vous permet de mieux dormir sur vos deux oreilles.

 

-Je... J’ai du mal à comprendre. Comment... Comment vous savez que nous existons ? questionna-t-elle sans cacher son désarroi.

 

-Ne vois-tu pas qui nous sommes ? s’écria l’alicorne bleue. Nous sommes le jour et la nuit. Ma sœur ensoleille vos journées et garde un œil sur tous les peuples, qu’ils soient équestriens ou non. Quant à moi, je suis la nuit. Je suis celle qui illumine vos soirs, mais aussi la jument qui veille sur votre sommeil et ainsi que vos rêves. D’apparence, vous êtes peut-être différent, mais... Vos cauchemars, quant à eux, sont pareils.

 

-Il se trouve que j’ai à de multiples occasions fait la rencontre de votre Reine, ajouta Celestia. Je l’ai connue avant même qu’elle ne bâtisse votre citadelle, et lorsque les choses se sont fortement gâtées dans les parages. Bien que je lui voue une grande sympathie, j’ai bien peur que notre façon de gouverner n’ait pu aboutir à une alliance, surtout en période de crise et ceux, malgré mes multiples propositions.”

 

Saphir était perdue. Tout ce que l’on lui avait dit était en partie faux. Des équestriens connaissaient leurs existences, mais surtout, ces deux grandes juments connaissaient personnellement la Reine Rouge, avant même que celle-ci ne construise le château. Quels âges devaient-elles avoir dans ce cas ? Elle se sentit soudainement trahie par tout ce qu’on lui avait raconté, l’Empire vivait dans le mensonge, tout ça pour les garder captifs alors que tout un monde ouvert et plein de vie les attendait...

 

Ne te méprends pas, fit Celestia en voyant la jument chanceler de gauche à droite. Il n’y a que nous dans Equestria qui connaissons votre existence. Et mise à part le Roi et sa compagne, je ne pense pas que quelqu'un d'autre sache que nous sommes aux courants.

 

-Mais j’imagine que les choses vont peut-être changer avec ton arrivée. La reine Rouge a peut-être décidé de s’unir avec notre peuple.

 

-J’ai bien peur que je soit ici pour des mauvaises nouvelles. Cela fait une année que notre chère souveraine nous a quittés”, révéla-t-elle avec mélancolie.

 

C’est alors que la nouvelle tomba sur les deux alicornes comme une pierre dans le cou, surtout à Celestia qui abaissa les oreilles. Elle leva même la croupe de son coussin pour se rapprocher de la messagère qui ne le vit pas tout de suite. Cette dernière était à la limite de s’effondrer en l’arme. La Reine Rouge était morte depuis peut-être plus d’un an maintenant, mais la douleur était encore présente.

 

Saphir sursauta lorsqu’elle sentit une présence l’entourer avec des plumes. Son cœur faillit exploser lorsqu’elle comprit qu’il s’agissait de l’alicorne solaire qui venait la consoler en personne.

 

“Toutes mes sincères condoléances, dit-elle. J’imagine que cet épreuve doit être difficile à traverser pour votre Roi. Je suis de tout coeur avec lui.

 

-Il... Il se trouve que lui aussi n’en a plus pour très longtemps.”

 

La situation était encore plus grave qu’elle et Luna ne le pensaient, si bien que les deux sœurs se regardèrent un moment pour comprendre alors la véritable raison qui avait poussé cette petite jument à venir. Quant à la ponette de cristal, elle était si bouleversée par ce qui arrivait à ses souverains qu’elle ne put contenir les larmes qui débordaient de ses yeux, mais en silence. L’Empire de Cristal n’allait plus avoir de dirigeant, et sans quelqu’un pour s’occuper du Cœur, la cité était vouée à se perdre dans le blizzard éternel.

 

“J’imagine que votre venu ici est appel au secours, en déduisit Luna.

 

-Nous somme prêtes à venir et prendre toutes les mesures qu’il faudra, proposa sa soeur en se baissant vers la ponette qui séchait ses larmes.

 

-Non... Non pas la peine. Nous avons déjà prévu un nouveau Roi qui sera capable d’alimenter le coeur.

 

-Alors quelle est donc la raison de ta venue ?” demanda enfin Luna avec une pointe d’impatience.

 

C’est alors que Saphir se recula et se positionna droite face au Princesse, prête à exécuter ce que l’on lui avait dit de faire une fois devant les deux Princesses.

 

“Lorsque sa nouvelle majesté sera couronnée, j’ai l’honneur de vous annoncer que ce dernier vous invitera à s’entretenir avec lui pour des futurs échanges entre nos deux royaumes.

 

-Nous en seront très enchantées, répondit Celestia avec sourire.

 

-C’est une bonne occasion pour terminer le chemin de fer”, enchérit Luna.

 

Les deux juments savaient de quoi l’alicorne lunaire parlait. Il existait bien une gare aux abords de l’Empire, mais elle était en dehors du dôme. Il existait également un chemin inachevé qui partait d’une ville appelée Canterlot qui avait commencé à partir dans une direction inconnue des poneys travailleurs, tout cela avant que Tirek n’arrive avec ses menaces, puis enfin le règne de Discord qui clôtura toute tentative d’alliance entre les deux sœurs et la Reine Rouge.

 

Visiblement, la jument lunaire avait déjà une idée derrière la tête. Alors que Celestia en était encore au stade de leur montrer qui elles étaient vraiment en disant du bien d’Equestria, sa sœur quant à elle en était déjà à planifier des accords commerciaux.

 

“Je transmettrai le message à mon Roi, fit-elle en se reculant tout en courbant l’échine. Merci pour m’avoir reçue et écoutée.

 

-Êtes-vous certaine de repartir déjà ? Après tout ce chemin ? observa l’alicorne blanche. Nous sommes prêtes à vous héberger une nuit pour vous reposer.

 

-C’est très gentil de votre part mais le temps est compté j’en ai bien peur.

 

-Il est impoli de refuser une proposition d’une Princesse, rugit Luna. Regardez-vous, vos pattes sont sur le point de se dérober sous votre poids, et votre estomac crie famine. Vous allez vous mettre en danger inutilement. Garde !”

 

Une paire de soldats déboula alors autour de la jument bleu qui faillit faire une crise cardiaque.

 

Je veux que cette jument ait une de nos chambres royales pour cette nuit. Veillez à ce qu’elle soit repue et lavée. Je veux également une diligence volante prête pour l’aurore qui l'emmènera vers les montagnes de cristal.

 

“À vos ordres ! crièrent-ils ensemble.

 

Mais calmement, ils prirent soin d'emmener la ponette vers un autre couloir. On ne lui laissa même pas le temps de dire quoi que ce soit, mais au moins, Luna était certaine que Saphir ne pourrait dire que du bien d’Equestria après de tels services à son égard. Cela fit pouffer discrètement sa sœur qui cachait son museau souriant derrière l’un de ses paturons.

 

“Qui a-t-il ? Ai-je fait quelque chose de mal ? s’entêta alors la jument de la nuit.

 

-Non Lulu, tu as été parfaite. Exemplaire je dirais. Cependant, dit-elle en se rapprochant de sa soeur, ne va pas trop vite.

 

-À propos de quoi ? Du chemin de fer ? Mais n’est-ce pas ce qu’il faut faire pour qu’un échange se fasse entre deux royaume ?

 

-L’Empire de Cristal est encore méfiant vis-à-vis de nous après tout ce qui s’est passé. Il ne vaut mieux pas les brusquer tu ne crois pas ? Ce n’est pas comme si le temps était compté pour nous...

 

-Ma soeur, coupa-t-elle avec sévérité. Ce peuple aura besoin d’aide si...

 

-Chaque chose en son temps, coupa Celestia à son tour mais d’un ton toujours très calme. De toute façon, il nous faudra parler avec le nouveau Roi lorsqu’Athéon sera mort.

 

-Je préfère tout de même reprendre la construction du chemin de fer, et s’il le faut, j’en payerai les frais moi même si les choses ne se passent pas comme prévu, insista Luna. À présent je dois me reposer pour la prochaine nuit, si tu veux bien.

 

-Fait donc ce qui te chante Luna.”

 

Même sa moitié absente, Celestia resta toujours sur son coussin, à songer au futur par rapport à l’Empire de Cristal, mais surtout à sa soeur. Luna était plus jeune qu’elle, son expérience aussi. Elle jugeait du tac-au-tac et prenait des initiatives trop rapidement. Néanmoins, elle s’était améliorée depuis que Discord avait été vaincu, et son choix de s’occuper de cette jument venant de loin avait été un très bon exemple.

 

Cependant, il était facile de la contrarier. Et pour une jument maîtrisant les pouvoir de la nuit, cela pouvait être dangereux.



***



Une vague de fraîcheur s’empara de tout l’Empire, sauf que contrairement au froid qui venait des montagnes, elle avait eu le don de réchauffer tous les cœurs. Un nouveau Roi allait gouverner la cité, avec assez de magie pour faire tourner le Cœur aussi longtemps que la Reine Rouge l’avait fait. Mais surtout ce nouveau souverain allait lever ce dôme, faire disparaître ce blizzard éternel et ainsi dévoiler l’Empire de Cristal au monde.

 

Sombra maudissait de toute son âme les conseillers qui, en plus de ne pas revenir sur leurs choix, avaient fait passer le mot au plus d’habitant possible. Et comme si ça ne suffisait pas, on envoya une messagère pour aller prévenir les deux Princesses d’Equestria que dès son couronnement, elles étaient invitées à se rendre ici pour parler affaires. L’étalon priait pour que la jument en revienne traumatisée afin de couper le conseil dans son élan.

 

Quant à Athéon, il n’avait plus la force de rester assis sur son trône. Ses derniers jours, il allait les vivre dans sa chambre, allongé dans son lit à compter les secondes qu’il lui restait au côté de plusieurs docteurs dont Karan. Lors de sa mort, un nouveau souverain allait devoir monter sur le trône dans la journée suivante, sans quoi il n'y aurait plus d'Empire.

 

Et dire que Sombra avait peaufiné son sortilège afin de réécrire la magie du Cœur. Il était sûr et certain qu’avec ce sort, il pourrait en avoir le contrôle et donc ne pas avoir à devenir Roi. Sauf que l’envie n’y était pas. Depuis cette dispute avec les conseillers - très vite étouffée - il était certain qu’en les laissant avoir la souveraineté, des choses catastrophiques allaient arriver, le laissant une nouvelle fois impuissant. Il ne voulait pas revoir le chaos qu’il avait vécu lors du règne de Discord.

 

Peut-être que le mieux à faire était de monter sur trône après tout.

 

Lorsque qu’il n’était pas dans son labo à cultiver sa magie ou en jurant sur le conseil, le magicien n’hésitait pas à prendre l’air en allant s’allonger dans l’herber près des fleurs de sa femme. L'absence de cette dernière était justifiée, elle était avec Athéon pour l’accompagner dans ses derniers instants. Mais pour tout dire, même présente, Sombra ne passait plus beaucoup de temps avec, sans arrêt torturé par l’avenir de cet endroit. Souvent, il se demandait comment un lieu aussi magnifique pouvait avoir vu le jour avec des habitants tous autant naïfs les uns que les autres.

 

Il en avait une vague idée, et elle se nommait la Reine Rouge. Sa façon de diriger cet endroit l’avait amené à devenir tel qu’il était maintenant, et on osait lui reprocher d’avoir été trop dure avec eux, alors que sans elle, ils auraient été anéantis par les ravages du draconnequus. Le pire, c’est que ce scénario pouvait se reproduire, et il avait beau se torturer les méninges, la seule solution pour esquiver cette erreur serait de prendre la couronne.

 

Et au final, ça n’avait pas l’air si terrible qu’il le pensait. C’était même devenu tentant.

 

“Chéri ?”

 

C'était Karan, la jument blanche devait en avoir terminé pour aujourd'hui avec le Roi. Sombra se contenta de lui lancer un doux regard puis de lui sourire, mais ne bougea pas de sa place, préférant rester par terre, le ventre contre l'herbe fraîche. Bien évidemment, sa femme le rejoignit et se colla contre lui, posant sa tête dans son cou pour profiter de sa chaleur enivrante. Elle s'occupait d'un poney sur le point de mourir, un être qui lui était cher qui plus est. La présence jeune et vivante de son mari ne pouvait que lui faire du bien.

 

Sombra aussi devait l'admettre. Avec tout ce stress encaissé à cause de ce futur incertain, sans compter ses recherches sur le Cœur de Cristal, les moments de détentes étaient devenus si rares qu'à l'instant présent, profiter de la douceur de son épouse le détendit comme jamais.

 

Ni l'un ni l'autre ne voulait briser ce moment de détente, animé par les oiseaux chantant le beau temps, rafraîchis par une légère brise de printemps lorsqu'un nuage passait sous le soleil. Ce moment était peut-être le dernier qu'ils allaient profiter de la sorte, car une fois Athéon mort, tout allait changer.

 

"Le Roi s'inquiète à ton sujet, fini par lâcher Karan toujours posée contre son étalon très spécial.

 

-Suis-je le seul à trouver ça étrange qu’un mourant s’inquiète pour un autre ?

 

-Il m’a fait entendre que la réunion ne s’était pas passée comme prévu, qu’il y a eu une dispute entre le conseil et toi. C’est vrai ?”

 

Avant de répondre, l’étalon au crin de jais prit une grande inspiration avant de soupirer lentement. Il savait qu’elle n’aimerait pas entendre ce qui s’était passé, mais c’était sa femme, il ne pouvait pas trop lui cacher une part de sa vie. De plus, c’était un coup à se la mettre à dos, chose inacceptable alors qu’il allait être sur le point de monter sur le trône.

 

“C’est de la politique tu sais. Il y a toujours des hauts et des bas, surtout lorsque les choses sont sur le point de changer. Mais rassure-toi Karan, ce n’est rien de grave.

 

-Pourtant, le Roi avait l’air vraiment inquiet. Il a même peur que tu lui tournes le dos et que tu refuses la couronne. Et puis je ne suis pas dupe, dit-elle un peu plus durement en relevant la tête. Depuis quelques jours, tu es comme... Absent. Et si tu me disais ce qui se passe vraiment ?”

 

C’était bien sa femme, douée en soin, nulle dans la connaissance magique mais loin d’être naïve. Il allait vraiment devoir tout dire, mais d’une certaine manière. Ainsi, elle pourrait alors rejoindre sa cause et donc définitivement remettre les paroles du conseil en doute si la future reine se mettait également contre eux.

 

“Regarde le palais, dit-il en désignant la grande bâtisse. Regarde autour de nous et de ce que cet endroit est devenu avec l’aide de notre ancienne Reine. N’est-ce pas merveilleux ? Alors imagine qu’un jour que tout ça va disparaître parce que le conseil décide de mettre un terme à ce régime en ouvrant ses portes à Equestria.

 

-Je croyais que tout était rentré dans l’ordre là-bas.

 

-Tu sais très bien que les crises reviennent toujours à la charge chez eux, tu le sais autant que moi.”

 

-Sombra, combien de temps encore allons-nous vivre dans la peur ? demanda-t-elle en se levant puis en s’étirant. Un jour il faudra tourner la page et commencer à aller de l’avant. Les habitants de l’Empire nous ont acceptés et aidés comme personne, ne crois-tu pas qu’il est temps pour nous de faire pareil en acceptant leurs choix ?

 

-En laissant tous les dangers d’Equestria entrer ici et revoir ce qui s’est passé avec Discord ?

 

-N’oublie pas qu’il ne s’agit pas de notre royaume à l’origine. Penses-y.”

 

Karan ne put s’empêcher de laisser sortir un soupir. Elle savait que son mari pouvait être borné, mais à ce point-là, c’en était inquiétant. Pire, si elle n’arrivait pas à le raisonner sur la situation, alors qui le pouvait ?

 

Elle s’éloigna de lui sur ses dernières paroles. La discussion avait été courte, mais il n’en fallait pas plus pour voir que l’étalon était en pleine psychose, persuadé que tout irait mal si on levait ce bouclier. Néanmoins, Karan espéra qu’en le laissant ne pas avoir le dernier mot, Sombra y réfléchirait avant de commettre une erreur. Elle ne voulait pas se mettre en colère non plus, la jument savait que l’étalon traversait une phase difficile qui mettait en jeu tout un peuple.

 

Du moins, c’est ce qu’elle croyait. La vérité est que Sombra se mit à penser encore plus négativement que jamais. Si personne n’était avec lui, même sa propre femme, comment allait-il s’en sortir ? Comment ferait-il pour vivre dans un royaume où personne ne l’écouterait ? À quoi bon lui demander d’être Roi s’il n’allait faire que de suivre des ordres... Des ordres qui conduiraient l’Empire à sa perte.

 

Il était hors de question pour lui de laisser des équestriens sales avec le cœur plein d’avidité venir ici pour souiller ce lieu sacré, ce serait une insulte à la Reine Rouge, surtout après tout ses efforts.

 

Sombra marchait dans la rue, cultivant encore sa haine contre tous ceux qui n’était pas d’accord avec sa façon de penser. Des passants hésitèrent à se courber sur son passage, tout le monde était sûr qu’il allait être le nouveau Roi. Encore fallait-il que lui le veuille, car l’option de fuir d’ici lui effleura souvent l’esprit... Mais pour aller où ? Lorsque Equestria était entre les mains de Discord, aller nulle part était toujours mieux que de rester là-bas, mais ici... Il ne pouvait pas se le permettre. Pourquoi fuit un lieu qui est encore bon ? Certes, pour sa part, il était au bord du gouffre, mais il avait largement les capacités de le sauver.

 

Même si pour cela, il fallait utiliser la manière forte.

 

Durant un long moment, le futur souverain mit au point un plan qui obligerait les conseillers à fermer les frontières de l’Empire. Mais une jument bleue érigeant un large sourire se présenta devant lui. Pire, elle courba l’échine.

 

“Je ne suis pas Roi bon sang ! Du moins pas encore...

 

-Oh ! Pardon. J’ai pensé qu’Athéon était déjà... enfin peut-importe. Je suis la messagère qui...

 

-Merci, je le sais ! dit-il sèchement. Si vous avez quelque chose pour moi alors faites vite !

 

-Euh... À vrai dire c’est pour tout l’Empire que j’ai un message, et une très bonne nouvelle !”

 

Sombra l’avait reconnue, Saphir lui avait déjà fait par de messages venant du Roi. Il savait également qu’elle avait été chargée de livrer un message aux Princesses, et ça allait être par son retour qu’il serait possible de voir si l’Empire pourrait faire confiance à Equestria.

 

Et ce grand bonheur qu’elle affichait ne put que confirmer les pires craintes de Sombra. Son périple dans le royaume avait été sans encombre, et sa rencontre avec les Princesses plus que réjouissante. Si le conseil venait à savoir cela, il pouvait dire adieu à ses espoirs de garder ce dôme scellé.

 

Il fallait faire quelque chose.

 

“Elles m’ont même prêté un carrosse pour... Mais qu’est-ce que... !!

 

-Maintenant écoute-moi bien !” coupa-t-il en saisissant sa tête.

 

Il avait également braqué son regard dans le sien, la corne luisante et les yeux fumant d’une aura violette. Il avait plongé son esprit dans celui de la jument à la recherche de ses souvenirs passés à Equestria pour les éliminer puis les remplacer par des faux. Un sort facile à faire pour une licorne de son niveau. Il faillait désormais des images négatives de là-bas, cauchemardesque. La venue de cette ponette allait être une aubaine pour lui finalement.

 

“Ton séjour à Equestria a été...

 

“Chéri ? Que fais-tu ?” coupa soudainement la voix de son épouse.

Il repoussa la messagère à la seconde où il l’entendit. Si Karan le voyait en train de comploter, ou ne serait-ce utiliser de la magie noire, cela allait tout compromettre. Pour effacer tout soupçon, il tapota l’épaule de la jument bleue en lui faisant des louanges.

 

“Tu... Tu avais peut-être raison à propos d’Equestria, Saphir viens de me dire que tout est en ordre là-bas ! se rattrapa-t-il.

 

-Vous voulez que je vous raconte sur le chemin pendant que je vais jusqu’au château ? proposa cette dernière. J'imagine que le conseil n’attend que ça.

 

-Et comment ! lança Karan. Tu viens avec nous Sombra ?

 

-Je vais vous rejoindre plus tard, dit-il en s’éloignant vers sa maison. J’ai encore des choses à régler.”

 

Cette chose, c’était l’élaboration d’un nouveau plan qui allait faire tomber le conseil une bonne fois pour toute, c’était malheureusement la seule alternative qui lui permettrait de prendre cet endroit avant qu’Equestria ne s’en charge. La notion de “sauver” avait disparu de son vocabulaire. Il était désormais question de s’en emparer afin de perpétuer les règles de la Reine Rouge.

 

Dire que sa femme n’en avait absolument pas conscience. Cependant, elle était certaine d’avoir vu des dents pointues lorsque son époux avait souri dès la venue de la messagère qu’elle accompagnait.



***



“En êtes-vous certaine ? insista Rubis qui était autour de la table avec ses congénères. Nous voulons être sûrs qu’Equestria soit un lieu sûr avant d’y laisser entrer n’importe qui.

 

-Je n’ai pas rencontré la moindre présence hostile, affirma Saphir qui s’était assise sur le sol à côté de Karan. Je n’ai rien différencié des poneys vivant là-bas mise à part le physique. Et les Princesses sont prêtes à nous venir en aide aux moindres problèmes.

 

-C’est une bonne chose, fit Diamant. L’une d’entre elle pourrait s’occuper du coeur si jamais Sombra ne prend pas le trône.

 

-Ne dites pas de sottise ! s’offusqua Émeraude. Les Princesses dirigent leurs royaumes, pas le nôtre. Et je ne vois pas pourquoi il refuserait la couronne après ces charmantes nouvelles.

 

-D’autant qu’il fut le premier à être au courant, ajouta Pyrite en regardant la seule licorne femelle des lieux.

 

-J’imagine que cela va le détendre un peu maintenant”, conclu Karan qui dressait un timide sourire.

 

Le sort en était jeté. Elle et son mari allaient diriger l’Empire, elle le réalisait à peine. Même si c’était Sombra qui allait grandement s’en charger, même si le conseil allait aussi appliquer les directives, tout ça lui donnait le vertige. Elle ne savait pas si sa sagesse était à la hauteur, être à l’écoute des habitants. Elle en tremblait à vue d’œil, si bien qu’Améthyste alla la rassurer en posant un sabot sur son épaule.

 

“Si ça peut vous rassurer, vôtre rôle consistera juste à poser votre croupe là-bas, dit-elle en pointant le trône avec humour, et de sourire.

 

-Je ne pourrais plus m’occuper de mes fleurs...

 

-Voyons, tout un tas de poney le feront pour vous.”

 

La plaisanterie était la seule façon de la détendre. Mais derrière ce sourire se cachait beaucoup de nostalgie, car elle ne pourrait plus se lever dès les premiers rayons du soleil pour humer le parfum de la rosée du matin. À là place, des juments iraient la réveiller depuis sa chambre royale pour la laver et l’habiller sans qu’elle ait besoin de lever le moindre sabot. Ce n’était pas non plus une sombre futur qui attendait le couple, mais désormais, il n’y aurait plus autant de liberté dans leurs gestes et paroles.

 

“Je ne remplacerai pas Athéon !”

 

Une nouvelle fois, l’étalon sombre était intervenu dans la salle sans se faire remarquer jusqu’à hurler son désaccord qui fit sursauter tout le monde.

 

“Je... J’ai bien peur de ne pas avoir compris mon chère, bégaya Émeraude.

 

-Oh que si tu as très bien compris ! fit Sombra en collant son front contre le sien. Je refuse de prendre le trône d’un Roi qui laisse son Empire s’effondrer. Il n’est pas question pour moi de payer les pots cassés et d’être le responsable d’une hécatombe !

 

-Vous perdez la tête Sombra, reprenez-vous ! s’offusqua Rubis.

 

-C’est vous qui perdez la tête en croyant les paroles de n’importe qui ! accusa-t-il en pointant la messagère.

 

-Eh ! Je ne suis pas n’importe qui !”

 

Le mâle tournait en rond, grognant, fusillant du regard le moindre poney qui le regardait dans les yeux. Personne ne l’avait vu aussi énervé, aucun équidé n’osait bouger d’un crin ou de dire le moindre mot. On aurait dit qu’il allait sauter à la gorge du moindre récalcitrant.

 

-Calmez-vous Sombra, rassura Pyrite d’une voix suave. Nous comprenons votre inquiétude, nous savons tous que vous et votre compagne avez enduré durant la période chaotique. Mais Saphir est une ponette de confiance, et si elle dit que tout va pour le mieux à Equestria, que les Princesses sont prêtes à nous venir en aide et que les poneys vivant là-bas n’ont rien de différent, alors je ne peux que la croire.

 

-Et vous ne vous êtes pas dit qu’elle a pu être ensorcelée afin de...

 

-Sombra ça suffit !”

 

Cette fois, c’était sa femme qui avait monté le ton. Elle en avait marre de le voir sans arrêt en pleine psychose, de ne pas savoir ce qu’il voulait, autant qu’un poulain qui réclamait des sucreries avant de les jeter pour les redemander après. Là, c’était toute une population qui dépendait de lui, et pour elle, le choix n’était même pas envisageable.

 

Karan avait pris la tête de son mari entre ses sabots pour coller la sienne au maximum. Elle ne voyait que ça à faire pour le raisonner.

 

“Tu vas prendre le trône, et sauver cet endroit tout en écoutant ce que le peuple veut en retour ! Il n’est pas question de les abandonner à leurs sort, pas après tout ce qu’ils ont fait pour nous ! Fais-le bon sang !”

 

Sombra resta sans voix un instant, comprenant qu’il n’avait jamais vu son épouse en rage avant aujourd’hui. Mais ses paroles le menèrent vers une autre voix, vers un sombre raisonnement. La charité n’était pas quelque chose de gratuit dans ce monde. Cela le fit sourire quand même.

 

“Chérie... Tu viens de me faire réaliser quelque chose...”

 

Dans un regard perdu, il embrassa la tête de la jument blanche puis il s’en écarta pour s’avancer vers les conseillers. Son sourire était grand, mais tranchant.

 

“Maintenant je sais pourquoi vous nous avez fait entrer ici alors que d’autres auraient pu avoir la même chance. Auriez-vous fait la même pour des terrestres, des pégases ?

 

-B... Bien-sûr, répondit Émeraude en tremblant. Nous sommes prêt à aider tout poney en danger...

 

-MENTEUR !! hurla-t-il. Vous saviez pertinemment que le temps était compté pour la Reine Rouge et Athéon, et avoir deux licornes douées en magie ne pouvait pas tomber mieux ! Avouez-le !

 

-Il est vrai que nous avions besoin de licornes, fit Diamant, mais jamais nous n’aurions laisser le moindre poney mourir de froid derrière notre dôme.

 

-Je ne peux pas croire que l’on puisse en donner tant en toute gratuité sans qu’il y ait une demande de faveur !”

 

C’était peine perdue. Tous les poneys de la salle perdirent tout espoir de le raisonner, ne serait-ce par lui dire que sans lui, tout le monde allait mourir de froid. Karan subissait la pire des sentences : elle était épouse avec cet étalon qu’elle croyait si gentil et reconnaissant. Il y avait quelques semaines, même avec la peur au ventre, il n’aurait même pas réfléchi à dire oui, rien que pour sauver cet endroit. Son comportement actuel le rendait méconnaissable, elle n’y croyait pas. Cependant, cela ne l’empêcha pas de voir ses yeux se déchirer avant de verser des larmes en abondance, ses sanglots incontrôlables la firent tomber sur le côté. Même les caresses d’une Améthyste compatissante ne la sortirent pas de son chagrin.

 

“Vous pouvez penser ce que vous voulez. En tout cas il est clair que vous n’êtes pas digne de diriger cet Empire, soupira durement Diamant qui commençait à tourner les ergots.

 

-Ne dites pas ça voyons, le contredit Émeraude. Sans lui nous sommes perdus !

 

-Il est hors de question pour moi d’être sous le règne de cet obstiné, dit-il avant de quitter les lieux.

 

-Non ! Ça ne devait pas se passer comme ça ! paniqua l’étalon vert. Nous étions si proche d’avoir enfin sauvé ce si belle endroit. Pourquoi faites-vous cela Sombra ? Pourquoi nous abandonner alors que vous avez les moyens de nous sauver ?

 

-Au contraire, je vous sauve d’une longue agonie”, répondit-il en prenant également le chemin de la sortie.

 

Personne ne parvenait à réaliser ce qui venait de se passer. Ils étaient à un crin de tout résoudre, sans compter les bonnes nouvelles de Saphir. Mais il avait suffi d’une phrase venant de Sombra pour tout faire échouer. L’Empire de Cristal allait disparaître dans le blizzard éternel.

 

Pas question pour les conseillers d’en rester là. Améthyste, toujours auprès de la licorne en pleurs, demandait à ses partenaires de mettre en œuvre la solution de secours. Car même s’ils étaient certains que l’étalon cornu allait reprendre le pouvoir, il était préférable de prévoir le pire.

 

L’évacuation. Sans Cœur de Cristal, cette cité n’avait plus aucun intérêt. Dès le lendemain matin, Saphir repartirait pour Equestria avec des moyens de locomotion plus rapide afin de prévenir les Princesses. Les conseillers quant à eux auront la tâche de prévenir tous les poneys pour un départ imminent des lieux, et de s’y préparer dans les plus brefs délais. Le chemin allait être rude à travers la neige, mais en s’y préparant à l’avance, ce ne serait qu’un obstacle à franchir si on prend en compte qu’Equestria est un bon endroit où vivre.

 

Un garde arriva depuis des marches d’escalier, marchant vers la ponette blanche qui ne parvenait pas à contenir son malheur. Jusqu’au parole de celui-ci.

 

“Le Roi vous demande Dame Karan.”

 

Son désarroi de lui soumettre un tel ordre alors qu’elle versait toutes les larmes de son corps était visible. Cependant, avec son aide, elle se releva, renifla un coup puis essuya d’un revers de patte les traces de ses sanglots. Le Roi avait sans doute besoin de ses talents, ça ne se refusait pas. De plus, il ne valait mieux pas pour lui de savoir que l’Empire allait disparaître dès sa mort.



***



La chambre d’un mourant, ça ressemble souvent à la même chose : rideau clôt, odeur de renfermé, atmosphère lourde, luminosité à son point le plus bas et un tas de poneys autour du lit pleurant la future disparition de l’agonisant. C’était comme ça que la Reine Rouge était partie.

 

Athéon répugnait ce genre de cérémonie funéraire. Il savait que son départ n’allait pas se faire dans la joie non plus - d’autant qu’il n’avait pas d’ennemi réclamant sa mort - mais avant de partir, il voulait avoir une vision encore belle et vivante du monde des vivants. Rideau et fenêtres ouverts laissaient entrer la douceur tiède de l’extérieur, le tout accompagné d’une odeur enivrante : un poney était en train de faire cuire du pain ou des gâteaux quelque part dans la cité. Ça au moins il allait le regretter une fois mort, mais il en aurait assez profité lorsqu’il était encore capable de marcher.

 

Une petite pointe de déception lui pinça le cœur en observant l’extérieur. Il n’aurait pas le droit à un beau couché de soleil, car un orage se préparait à l’horizon. Mais au moins, le vieil étalon savait mieux que quiconque que l’on ne pouvait pas avoir ce que l’on voulait, puis ses derniers instants n’étaient pas dans la douleur. Il se sentait juste de plus en plus fatigué, mais aucun mal ne l’empêchait de penser ou de parler calmement. Devait-il remercier sa défunte femme ? Probablement, en plus il n’allait peut-être pas tarder à le faire.

 

On frappa timidement à la porte, et après son accord, il vit une jument blanche qu’il ne connaissait que trop faire son entrée. Un large sourire se dessina sur son visage, contrairement à Karan qui faisait tout pour ne pas exploser en larmes.

 

Elle se mit alors à la tâche en commençant à prendre une serviette par télékinésie pour la tremper dans un seau d’eau. Mais avant de commencer à nettoyer le souverain, celui-ci l’arrêta d’un geste du sabot.

 

“Karan, ce n’est pas pour cela que je t’ai fait venir. Et puis on m’a tellement lavé que je pourrait éblouir un miroir si le soleil n’était pas caché par les nuage.”

 

Même mourant, il parvenait à garder son sens de l’humour, mais juste de quoi faire pouffer la ponette qui détournait sans arrêt le regard.

 

“Diamant m’a mis au courant, avoua-t-il en prenant une mine plus sombre. Puis j’ai encore de bonnes oreilles. Je suis vraiment désolé, je sais que Sombra compte beaucoup pour toi.”

 

Cette fois, il parvint à lui faire couler quelques larmes. Et comme si ça ne suffisait pas, le Roi tendis ses sabots vers la ponette pour l’étreindre, de quoi la faire encore plus craquer. Il savait que son royaume allait mourir, et pourtant, il devait être à l’heure actuelle le plus optimiste des poneys. Devait-il délirer, ou avait-il une idée derrière la tête ? Ces questions, Karan se les posa l’espace d’un instant, car elle était beaucoup trop préoccupée par le comportement inimaginable de son époux.

 

“Je crois que tout ça est de ma faute, dit-il alors qu’il avait toujours la licorne entre ses pattes. Je ne l’ai pas assez mis en garde .

 

-Co... Comment pouvez-vous vous excuser alors que vous en avez fait tant pour lui ?

 

-Je vais te raconter une histoire.”

 

Il desserra son étreindre pour se rallonger doucement. Néanmoins, il invita Karan à poser sa croupe sur le lit tout en lui tenant toujours un sabot avec les siens, le caressant doucement sur le dessus. Athéon l’appréciait vraiment beaucoup, comme il avait apprécié Sombra jusqu’à ce que celui-ci se perde. Sauf que cette fois, il n’allait pas faire la même erreur.

 

“Lorsque ma femme fabriquait le Cœur de Cristal, elle se faisait tellement de soucis pour ses habitants qu’elle ne parvenait pas à se démarquer de ses sentiments pendant sa conception. Avant de le terminer, elle avait donné des ordres aux poneys d’une extrême sévérité pour être sûre que l’Empire ne sombre pas. Avec le coeur, normalement, elle n’avait plus à agir de la sorte mais...”

 

Il fit une pause, car même s’il ne souffrait pas, parler autant le fatiguait un peu. Karan en profita pour poser un autre sabot le sien, pour le soutenir moralement dans son histoire.

 

“Le fait est qu’avoir utilisé autant de magie durant ses furieuses directives l’a fait basculer. Des poneys sont passés à la trappe vous savez ? Je l’ai vue faire des choses et des choix impardonnable. Aujourd’hui encore je m’en veux de ne pas l’avoir raisonnée à temps. J’étais peut-être trop amoureux, plaisanta-t-il.

 

-Si je comprends bien, le Cœur de Cristal est ce qui l’a rendue aussi... autoritaire ?

 

-On ne pouvait plus rien lui refuser. J’imagine que l’on ne fait rien d’aussi difficile sans y laisser quelques plumes. Sombra a suivit le même chemin, je le crains. Il est doué en magie, mais jeune. De plus, ce qu’il a vécu à Equestria sous le règne de Discord ne l’a pas aidé à combattre le mal qui sommeillait en lui.”

 

La ponette n’était pas en mesure de dire quoi que ce soit. Elle savait exactement de quoi il parlait. Athéon avait vu sa jument sombrer de la même manière, Karan savait que Sombra avait une part d’instabilité en lui. Si en plus, ce dernier s’était acharné à travailler sur un artefact aussi puissant, cela était prévisible en y réfléchissant bien.

 

“Je crois que c’est également de ma faute. J’aurais du l’arrêter tant qu’il en étant encore temps, s’excusa-t-elle.

 

-Ne rejetez pas la faute sur vous, dit-il d’un ton rassurant. Cela n’engage que lui de ne pas avoir su s’arrêter à ses propres limites. Quoi qu’il en soit, Sombra ne doit pas être Roi.”

 

Il avait employé un ton plus ferme, de quoi surprendre la jument. Karan avait entendu Athéon le vouloir souverain tellement de fois que le voir dire l’inverse était presque une blague. Mais bon... Encore fallait-il que la licorne mâle le veuille pour en arriver à une conclusion pareille.

 

“Si cela peut vous rassurer, il ne compte plus prendre le trône.

 

-Il faudra tout de même rester vigilant et garder un œil sur lui. Être sous l’influence de la magie noire n’a rien de bon et donne de très mauvaises idées, expliqua-t-il. Son esprit borné le mènera à des intentions hostiles.

 

-Vous... Vous pensez qu’il serait prêt à prendre la couronne de force !? s’indigna-t-elle.

 

-Je ne l’espère pas mais... Soyez sur vos gardes.

 

-De toute façon, il n’y aura plus d’Empire si les choses ne s’améliorent pas. Sans licorne, personne ne peut prendre le trône, déprima-t-elle.

 

-Vous vous trompez, je vois encore une licorne digne de prendre la relève.”

 

En plus de l’avoir dit en souriant, Athéon n’arrêtait pas de regarder Karan, droit dans les yeux. Et cela ne se fit pas attendre, la ponette était assez intelligente pour comprendre où il voulait en venir.

 

“Mon Roi je... Non.. Non !

 

-Si, répondit-il en souriant encore.

 

-Je... Mais enfin je ne m’y connais pas en magie puis... Je... Je sais pas...”

 

Elle en perdait ses mots. Déjà que de siéger aux côtés de son mari lui paraissait absurde, alors si en plus on allait faire d’elle la souveraine principale... Il n’y avait pas de mot pour décrire son désarroi. Elle-même ne savait pas quoi faire, Karan tournait en rond dans la chambre en se tenant la tête de temps en temps.

 

“Vous êtes vraiment adorable lorsque vous ne savez pas quoi faire, ria-t-il.

 

-Ce n’est pas drôle mon Roi ! Vous êtes sur le point donner le trône à une jument qui n’y connaît rien à tout ça !

 

-Calmez-vous, dit-il sans dissiper son sourire. Je croyais que vous connaissiez le fonctionnement du coeur non ? Si c’est la magie qui vous inquiète, sachez que vous n’avez rien à faire d’autre que de faire luire votre corne.

 

-Et... Et les décisions !? Je n’en prends déjà pas beaucoup pour moi, alors imaginez un peuple...”

 

Elle se rapprocha du lit pour poser sa tête sur les draps, non loin d’Athéon qui ne manqua pas de lui caresser la crinière. À cet instant, il se croyait agir comme un père expliquant avec sérénité la future tache de ses enfants. Le vieux poney ne cachait pas que Sombra et Karan aurait pu être les poulains qu’il auvait toujours voulu avoir.

 

“Il y a un conseil pour les prendre ces décisions, pour t’aider à choisir la meilleur voie à prendre. Je peux comprendre ton désarroi, mais tu aimes cet Empire et ses habitants, je me trompe ?

 

-Après tout ce qu’ils ont fait pour nous ? Évidemment ! répondit-elle sans réfléchir.

 

-Et bien dit-toi qu’il est l’heure pour toi de leur rendre service en les sauvant d’une catastrophe.”

 

Athéon avait véritablement un don pour apaiser les cœurs, et ceux dans toutes les circonstances possibles. Il était si doué dans la matière que l’idée de gouverner pour sauver tout un peuple parut moins lourde à Karan. Du moins, c’est ce qu’elle pensa jusqu’à ce que le nom de son mari lui revienne en tête.

 

“Mon époux risque de ne pas le prendre en bien si sa propre femme ne...

 

-Sombra n’est plus en mesure de penser sainement pour le moment, coupa-t-il. Et si cela peut vous rassurer, cela a même une chance de le remettre dans le droit chemin. Après tout, si sa propre épouse lui tourne aussi le dos...”

 

Encore des sages paroles. Mais sur le coup, Karan y croyait difficilement, elle avait vu l’état de Sombra, plus borné que jamais. Elle était même terrifiée que celui-ci aille jusqu’à lui lancer des représailles, expliquant vraiment à quel point son état le rendait méconnaissable. Mais si elle devait aller jusque-là pour sauver les habitants, alors elle le ferait.

 

“Je ne sais pas si je serai à votre hauteur, dit-elle.

 

-Ça c’est certain, on ne fait pas mieux que moi comme Roi, taquina-t-il. Mais vous ferez une très bonne Reine.

 

-Je... Je vais vous laisser, finit-elle par dire. Tout ça m’a... Un peu bouleversée.

 

-Vous en avez besoin. Essayez tout de même de relativiser car tout cela pourrait être pire n’est-ce pas ?

 

-Merci pour votre sagesse, fit-elle en passant la porte.

 

-Merci à toi Karan.”

 

S'il y avait bien un poney qui lui manquerait dès sa mort, ce serait Athéon. Et dès son départ, la vie de la ponette blanche changerait plus qu’elle ne l’aurait imaginé. Rien que d’y penser lui donnait une crise d’angoisse. Mais penser également que son choix allait sauver ce royaume lui redonnait de la force.

 

Il ne lui restait plus qu’à l’annoncer au conseil, ce qui ne l’inquiétait pas en comparaison de devoir l’annoncer à Sombra. Peut-être même qu’elle demanderait à une paire de gardes de l’accompagner.



***



Le tonnerre illuminait agressivement sans cesse l’Empire, grondant dans tous les recoins. De lourds nuages recouvraient la totalité de la cité, ne laissant qu’une maigre chance au soleil d’éclairer l'horizon tel une ligne jaune qui parvenait à démarquer le sol et le ciel noir. Aucune goutte de pluie ne tomba ce soir là.

 

Tous les poneys étaient rentrés chez eux, l’obscurité étaient déjà là que minuit était encore loin de sonner, et la violence des éclairs laissait présager que le plus fou qui oserait s’aventurer dehors se ferait griller la croupe.

 

Même si dans les familles on ne prêta guère attention à ce temps étrange, de la haute tension s’élevait dans l’une des maisons. Karan n'eut le droit qu’à un “Bonne chance” de son compagnon après la nouvelle. Enfin... La jument s’attendait à une dispute, voir plus mais l’étalon n’en n’avait visiblement plus rien à faire de l’Empire, si bien qu’il esquiva le dîner pour aller se cacher dans son laboratoire et faire silence.

 

La ponette craignait le pire, comme par exemple que celui-ci s’en aille et ne l’abandonne. C’était le plus horrible des dilemmes que l’on puisse lui infliger : son époux qu’elle aimait plus que tout au monde ou tout un peuple. Et le pire, c’est que sa bonne conscience ne pourrait que la mener vers le deuxième choix. Karan allait être la plus malheureuse des Reines.

 

Elle alla se coucher seule, l’esprit chamboulé par tout ce qui allait lui arriver. Elle pria toute son âme pour que Sombra ne s’en aille pas, qu’il reste et qu’un jour, il accepte que l’Empire doit perdurer en s’ouvrant à Equestria. Mais surtout, qu’il redevienne le Sombra qu’elle avait connu : un étalon gentil, serviable et généreux ; pas la licorne bornée et égoïste.

 

Son pire cauchemar faillit survenir alors que la nuit était tombée. La foudre l’empêchait de dormir, mais malgré le bruit assourdissant des éclairs, Karan reconnut le bruit d’une porte s’ouvrir et se fermer. Immédiatement, elle se jeta à la fenêtre et manqua de hurler en voyant que son époux était sorti, chaperon sur le dos. Mais l’horreur se transforma en curiosité : il marchait en direction du château. Par ailleurs, la bâtisse était éclairée par une faible lumière violette provenant des nuages.

 

Elle ne voyait cependant pas la corne de Sombra qui brillait sans cesse, devenue rouge comme du métal en fusion ; ni ses yeux vert luisant qui dégageaient une aura violette.

 

Malgré l’heure tardive, la même table de quartz était toujours occupée par les membres du conseil. La fatigue se lisait sur leurs visages, les nerfs étaient en ébullition. La journée n’avait été que rebondissements : entre la bonne nouvelle de Saphir, très vite effacée par le choix consternant de Sombra mettant en péril la citadelle puis Karan choisie par Athéon, les conseillers ne voulaient plus qu’une chose.

 

“Que l’on en finisse par pitié ! supplia Pyrite en s’étirant contre la table.

 

-Il faut que l’on se mette d’accord avant, fit Émeraude avec sérieux. Récapitulons : vue que Karan sera la Reine, bien que sa sagesse et sa gentillesse soient sans égales, ses capacités en magie ne nous permettront pas d’avoir une bonne défense.

 

-Ce qui nous oblige donc à recourir aux Princesses, conclut directement Rubis.

 

-L’arrivée massive de poneys équestriens ici risque de nous compliquer la tâche cependant, ajouta Géode. Ne devrions-nous pas prendre des mesures en accords avec les alicornes ?

 

-Je croyais que c’est ce que nous voulions tous pourtant, argumenta la jument rouge comme son nom.

 

-Il est vrai mais n’allons pas trop vite. Karan n’a aucune expérience dans la diplomatie et elle aura encore besoin de temps pour apprendre à faire les bonnes décisions, fit Diamant. Voilà donc pourquoi notre message destiné aux Princesses ne servira qu’à les faire venir dans le but de la mettre en confiance, ainsi qu’au peuple.

 

-Voilà ! conclut une bonne fois pour toute l’étalon noir qui avait râlé. Nous enverrons Saphir dès la première heure demain matin leurs délivrer ce message. Maintenant, je vous propose d’aller tous au lit.

 

-Pas si vite !”

 

Pour la deuxième fois de la journée, un étalon vint tout interrompre. Cependant, les gardes présents se mirent en travers de son chemin, ils avaient vu de leurs propres yeux Sombra rejeter toutes les offres. Les conseillers mirent un peu plus de temps à le reconnaître sous son chaperon, mais il n’y avait qu’une licorne mâle dans cet Empire.

 

“Désolé mon ami mais nous en avons terminé pour ce soir, lui dit le poney vert.

 

-Et à ce que je sache, vous avez clairement rejeté notre proposition de prendre la couronne, fit Diamant avec un ton sec. Par conséquent, vous n’avez plus votre mot à dire.

 

-Il faut croire que je me suis fait mal comprendre.”

 

Ce qui arriva par la suite dépassa l’imagination de tous les poneys présents dans la salle. À peine eurent-ils le temps de remarquer que son regard était luisant qu’un bruit de craquement se fit entendre, accompagné par deux hurlements d’agonie. Et pour cause : des cristaux noirs avaient jailli du sol, juste en dessous des deux gardes qui se retrouvèrent empalés.

 

“Oh non ! cria Améthyste profondément choquée. Mais qu’avez-vous fait !?

 

-Je remets juste les choses au clair, répondit-il dans un naturel effrayant.

 

-Comment osez-vous !? s’indigna la jument rouge. Tuer des gardes de cristal après tout ce que nous avons fait pour vous !?”

 

Sombra s’avança alors vers eux, leurs donnant un mouvement de recul collectif. En pénétrant dans la salle, il se permit d’enlever le chaperon afin de révéler son dos recouvert par une petite cape rouge bordée en fourrure de lynx des neiges. Tous les conseillers la reconnurent, c’était ce que portait la Reine Rouge.

 

“Il est vrai que j’ai refusé votre proposition. Mais parce que je savais que c’était VOUS qui alliez prendre le pouvoir et faire de moi un pantin pour contrôler le Cœur. Alors je vais rectifier les choses : non seulement je vais m’emparer du pouvoir mais vous allez disparaître, avertit-t-il en faisant briller plus fortement sa corne.

 

-Tu rêves mon gars !”

 

Hors de question pour Diamant de se laisser menacer par ce cornu. Il se mit à galoper vers la table à toute vitesse pour sauter dessus afin de bondir sur l’étalon dans l’intention de le neutraliser. Le conseiller avait compris dès le début que Sombra était en train de faire un coup d’état, sauf que pour l’ancien garde de la Reine Rouge, ce n’était même pas envisageable de se laisser à nouveau piétiner. L’ancienne dirigeante lui en avait fait voir de toutes les couleurs déjà.

 

Sombra fut étonné de voir que pour un poney de son âge, Diamant en avait encore à revendre. Mais cela ne le fit pas reculer au contraire. Il fit luire sa corne afin de faire briller l’une de ses pattes avant, puis se mit en garde pour recevoir l’ancien soldat comme il se doit.

 

Tout se passa très vite, si bien que personne n’eut le temps de voir que la licorne avait décroché un puissant coup de sabot dans la joue du poney de cristal, si fort qu’on le vit percuter un autre mur, très loin de l’étalon sombre. Les conseillers connaissaient leur camarade comme celui qui devait porter le mieux son nom, et pourtant, il ne se releva plus jamais, car Sombra l’avait frappé tellement fort qu’il lui avait fait tourner la tête presque un tour sur elle-même, lui cassant la nuque tout simplement.

 

“Diamant non ! pleura Améthyste qui se jeta sur le corps de ce qui était un ami.

 

-Je vais vous répéter ma proposition, fit le magicien d’une voix plus sombre. Je vous laisse encore la possibilité de partir d’ici ou je me chargerai de vous faire disparaître moi-même !

 

-Monstre ! hurla la jument violette. Vous allez le payer !”

 

Sombra voulut lui dire quelque chose, mais des bruits de galop venant de toutes parts l’interrompirent. Des gardes de cristal déboulèrent de tous les côtés, lance en sabot, encerclant le responsable de ce triple meurtre qui donna un coup de sang à beaucoup de soldat. Deux de leurs camarades et un vétéran étaient passés à la casserole, un ordre de la part des conseillers et une dizaine d’autres se chargeraient de les venger.

 

“Vous n’avez aucune chance de fuir maintenant ! Rendez-vous ! cria Rubis qui devait être la responsable de cet arrivée soudaine de garde.

 

-Cessez ce massacre tout de suite, pour l’amour d’Athéon ! supplia Emeraude.

 

-Oh... Parce pour vous c’est cela un massacre !?” hurla soudainement Sombra.

 

Son élan de fureur ne se limita pas seulement à pousser la voix, mais également à invoquer un puissant sort de répulsion invisible qui envoya la totalité des gardes qui l’entourait dans le décor. Puis, lentement, mais durement, il se rapprocha du poney vert qui s’était recroquevillé contre la table principale alors que Sombra s’était collé à lui, presque museau contre museau.

 

“Un massacre, c’est ce qui se passait tous les jours à des centaines de poneys lors du règne chaotique, mourant lentement dans la violence et le sang par poignées tandis que vous étiez bien au chaud dans vos familles. Dire que vous osez cracher sur la Reine Rouge, sans elle, vous auriez eu ce genre de scène tous les jours ! Et c’est ce qui se passera lorsque ce dôme disparaîtra et en laissant entrer les Princesses ! Je n’ai cessé de vous le répéter ! Comment dois-je vous le faire comprendre !?”

 

Derrière lui, il sentait que les gardes reprenaient leurs esprits, et qu’ils n’allaient pas seulement l’encercler, mais en découdre une bonne fois pour toute. La rage d’avoir perdu trois des leurs ainsi que de mettre en danger les membres du conseil allaient les rendre plus forts. Le combat allait être rude, Sombra allait devoir y mettre toute sa fureur.

 

“Il est peut-être temps de vous montrer un petit aperçu de ce que j’ai vu à Equestria.”

 

Et digne d’une pièce de théâtre, l’étalon se retourna vers la petite troupe, corne rougeoyante.

 

Acte I : Le premier garde qui voulut l’atteindre se fit transpercer par un fin rayon de pure magie noire, mais un autre poney armé d’une lance surgit de derrière pour lui atteindre de visage. Par réflexe, Sombra parvint à l’esquiver en se baissant, puis il se cabra rapidement pour saisir le soldat qui était au-dessus de lui afin de le forcer à tomber sur la tête. Enfin... Tomber était un bien grand mot, la licorne lui fracassa le crâne contre le sol tout en lui brisant le cou au passage. En l’espace de quelques secondes, il avait tué deux combattant, montrant très clairement qu’il n’allait pas y aller dans la dentelle. Cependant, cela n’arrêta pas tous les autres qui s’élancèrent en même temps.

 

Acte II : Alors que le combat faisait rage comme l’orage qui gagnait en intensité, Émeraude s’était caché sous la table. Le reste du conseil s’était reclus dans un coin, du moins pour les deux seules juments, car Géode et Pyrite prirent les armes et tentèrent de garder à distance la furie qui commençait à envahir toute la salle. Pensant que la licorne était trop occupée à se battre, le conseiller vert prit ses pattes à son cou puis s’élança vers la sortie, pas seulement pour sa vie, mais aussi pour prévenir le maximum d’habitants qu’une catastrophe allait arriver. Cela n’échappa à Sombra malheureusement. Il invoqua un morceau de cristal tranchant puis le fit voler vers la gorge d’Émeraude qui s'effondra au sol, sabot sous le menton pour désespérément arrêter l'hémorragie qui noyait ses poumons.

 

Acte III : Les cadavres commençaient à se faire en nombre dans la salle du conseil. Il était possible de voir des gardes tués par leurs propres lances s’ils n’avaient pas eu la malchance de s’être fait tordre le cou. L’investigateur de cette tuerie n’avait cependant aucune égratignure, le sang qui souillait son pelage ne lui appartenait pas, et plus il en tuait, plus leurs morts étaient violentes, plus la rage et la puissance magique devenaient de plus en plus grandes. Tôt ou tard, il allait la libérer. Il ne se retint pas sur sa force lorsqu’un soldat voulut lui donner un coup de tête qu’il attrapa à la bouche avec ses deux pattes avant, chaque sabot sur une partie de la mâchoire, pour lui la arracher en deux dans un grognement animal. Il ne resta alors plus que quatre soldats, galopant tous en même temps des quatre côtés vers lui dans le maigre espoir de lui venir à bout.

 

Acte IV : Améthyste se faufila à travers tout ce chaos pour rejoindre l’étalon égorgé qui n’arrivait plus qu’à émettre des gargouillements ignobles. La jument lavande n’hésita pas à se salir les paluches pour stopper en vain le sang qui inondait maintenant le sol, et ne put se concentrer d’avantage sur Émeraude lorsque qu’un bruit assourdissant lui vrilla les tympans. Sombra se mit à hurler comme jamais, faisant ressortir du sol une importante quantité de magie si puissante qu’elle vaporisa les quatre derniers étalons capables de se battre. Et ce n’était pas tout... La déflagration verticale transperça le plafond pour s’élever jusque dans les cieux, faisant effondrer une bonne partie du château. Des morceaux s’écroulèrent sur le conseiller pour l’achever, comme Améthyste qui voulut s’enfuir jusqu’à ce qu’un des piliers soutenant la salle ne lui tombe sur le dos. La lourdeur de cette colonne lui broya la colonne vertébrale. Elle ne mit pas longtemps à succomber, mais elle resta suffisamment longtemps en vie pour voir Pyrite et Géode subir le même sort.

 

C’est sur son dernier soupir que cette fureur se termina.

 

À lui tout seul, Sombra avait anéanti toute la garde de cristal, un bon tiers du château et cinq des conseillers. Le sang se mêlait aux gravas, les gémissement de martyr animaient l’ambiance macabre. L’étalon ne se fatigua pas à les achever car plus ses victimes souffraient, plus il gagnait en puissance. Être baigné de magie noire accentuait ce besoin enivrant de vouloir faire du mal, convertissant la compassion et le regret en plaisir hypnotisant et vital.

 

Rubis, en boule dans un coin, qui n’avait pas été touché par l’avalanche de roche, s’était caché le museau entre ses pattes, attendant son jugement dernier. Elle se retenait par tous les moyens de ne pas vomir devant le massacre sanglant auquel elle avait assisté, priant pour que le meurtrier quitte les lieux dans l’espoir de l’avoir oublié. Sauf qu’une force invisible la saisit par le cou, assez fort pour l’empêcher de crier. La ponette se fit traîner sur une longue distance, se débattant en vain même lorsque qu’elle se fit soulever par la seule force magique de la licorne pour la mettre à hauteur de son regard.

 

Mais alors que le regard verdoyant du sombre magicien transperçait celui de la jument rouge, cette dernière cessa petite à petit de se débattre jusqu’à ne plus bouger d’un crin. L’étalon stoppa même son emprise sur elle en la déposant délicatement sur ses quatre sabots dans une marre de sang. Normalement, la ponette aurait détalé d’horreur, mais ses yeux avaient prit la même teinte que ceux de Sombra. Ils étaient également vides, dénués de tout sentiment.

 

“Va me chercher Saphir, ordonna-t-il d’une voix grave et gutturale.

 

-Oui maître, répondit-elle sans émotion.

 

-Non, pas “maître”. À présent je suis ton Roi !

 

-Oui mon Roi”, répéta-t-elle.

 

Et d’un seul geste du sabot, Rubis se tourna puis marcha vers la sortie en esquivant les décombres et les cadavres sans y prêter la moindre attention. À présent, le prétendu nouveau souverain avait besoin d’une chose pour lui donner la stature qu’il allait être sur le point de dérober, et elle se trouvait dans la chambre d’Athéon.

 

Mais un couinement de douleur l’interpella, un gémissement qui se trouvait à ses sabots. En voyant la jument à qui il appartenait, Sombra eut le souffle coupé.



***



Tandis que son mari se rapprochait de plus en plus du château, Karan hésita longtemps avant de mener sa curiosité vers la priorité de ses envies. Alors que la foudre frappait encore de part en part de l’Empire sur les maisons pointues, sans qu’aucune goutte de pluie ne tombe, la ponette au crin rosé prit de quoi se couvrir du vent violent puis se mit à suivre les traces de Sombra. Elle l’avait perdu de vue depuis longtemps, mais le château n’était pas difficile à rejoindre heureusement. De plus, il n’y avait qu’une partie encore éclairée, et elle avait assez arpenter le lieu pour reconnaître la salle du conseil.

 

Elle mit plusieurs minutes à y aller, s’immobilisant de peur dès qu’un éclair s’abattait un peu trop près. Mais étrangement, aucun ne tombait sur le sommet de la citadelle. Cependant, il y avait cette lumière violette qui vrombissait au dessus, donnant aux murs de quartz la même couleur. C’était à la fois beau comme terrifiant.

 

Un cri féminin sortit Karan de sa contemplation, elle se mit sans tarder au galop vers sa destination. Arrivée en haut des escaliers, la jument pouvait entendre des bruits de luttes et des cris, mêlés à des lumières rouges et vertes ne provenant pas de dehors. Discrètement, elle voulut pencher la tête, mais son champ de vison fut brouillé par le corps d’un garde s’écroulant devant elle. Il avait un énorme trou dans le ventre qui fumait encore.

 

La licorne manqua de crier en se mettant une patte devant la bouche, choquée de voir un poney mort aussi violemment. Qui était capable d'accomplir une telle atrocités ? Qui dans cet Empire pouvait infliger un tel acte à des gardes de cristal ? Tremblante de toute sa chaire, Karan tenta une nouvelle fois de voir qui était le responsable.

 

Peut-être qu’elle n’aurait jamais dû le faire en fin de compte, car la première chose qu’elle vit fut de voir son époux prendre la mâchoire d’un étalon pour lui ouvrir le visage en deux, et ce, dans un cri de pure rage. Ce n’était pas Sombra qu’elle voyait, ou alors elle se refusait d’y croire car ce monstre qui massacrait tout le monde lui ressemblait beaucoup trop. Karan s’était postée à l’entrée, contemplant le funeste spectacle qui se déroulait devant son museau, ne bougeant pas d’un sabot même lorsqu’il désintégra le reste des gardes encore vivants. Seules des larmes coulants sur ses joues montraient à quel point son coeur devait s’être déchiré de voir le poney qu’elle aimait tant devenir le pire des tueurs.

 

Le seul son qu’elle produisit fut le cri de douleur qu’elle fit lorsqu’un morceau de cristal pointu se planta dans son échine, assez gros pour la transpercer. Et pourtant, elle avait beau avoir cet énorme morceau de roche dans le ventre qui ne lui laissait aucune chance de survivre, voir son mari devenir l’élément du mal incarné lui faisait encore plus mal.

 

Sombra resta sans voix et immobile tant qu’il observait son épouse respirer rapidement, que les dernières larmes coulaient encore. Elle n’arrivait pas à pleurer, mais ne détourna pas les yeux de l’étalon jusqu’à son dernier soupir. La licorne noire ne savait pas comment réagir, il venait de voir la jument qu’il aimait plus que tout mourir sous ses yeux, par sa faute, en lui donnant la plus horrible des visions possibles de son être.

 

De la tristesse commença à le gagner, puis de la colère, colère qui se répercuta vers les conseillers déjà morts. S’ils avaient coopéré dès le début, Sombra n’aurait pas eu besoin d’en venir à çà. Mais pire encore, il finit par se persuader que s’était également de la faute de Karan, car si elle aurait rejoint son raisonnement, tout aurait pu rentrer dans l’ordre.

 

Il savait au fond de lui que le responsable de cette hécatombe, c’était lui, mais cette part de son esprit s’envola pour toujours au moment même où sa femme ferma les yeux pour l’éternité, ne laissant que de la place pour le mal absolu.

 

Par ailleurs, quelque chose d’autre se mit à grandir en lui, l’obligeant à se tordre dans tous les sens jusqu’à grogner. Ça lui tiraillait les entrailles, prêt à jaillir et exploser de lui. Toute cette violence qu’il avait créée s’était ancrée profondément mais n’attendait plus qu’à exploser. Et ce fut dans un hurlement de douleur que tout se mit à vibrer autour, à changer de couleur, de plus en en plus intensément, allant du violet jusqu’au blanc.

 

Dehors, ce qui surplombait le ciel se rassembla soudainement en une énorme masse d’énergie noire. Elle se fracassa alors sur le château et tout ce qui se trouvait autour pour se répandre dans tout l’Empire, tel de l’encre qui se déversait. Tout ce qui tomba sous son passage changea : les maisons avaient perdu en couleurs pour devenir plus sombre avec une architecture plus tranchante et penchée comme si l'érosion était passée par là depuis des milliers d’années, et le sol avait perdu ses mosaïques pour être remplacé par de vulgaires dalles noires fissurées. Quand au château, il n’avait jamais été aussi effrayant avec ses cristaux noirs et pointus dépassant de toutes parts, le sommet remplacé par deux piques rouges et des murs de jais dont la rugosité pouvait probablement arracher la peau du premier qui oserait s’y frotter.

 

Sombra aussi avait changé : sa corne avait gardé sa teinte rouge sang ; le dessus de son museau s’était noirci jusqu’à sa crinière qui n’étaient plus qu’un amas de magie noire à l’état pur. Mais le plus effrayant, ce devait être l'armée de poignard qui composait ses dents, surtout les canines avant, et ses yeux reptiliend, du plus terrible des prédateurs.

 

Il était devenu l’essence même de la magie des ténèbres, qui coulaient désormais dans ses veines.

 

Sombra ne se donna pas la peine de frapper avant d’entrer dans la chambre du Roi, surtout qu’elle allait lui appartenir lorsqu’il aurait enfin le trône. Pour cela, il devait s’emparer de la couronne, et se débarrasser du porteur. Pour ça il n’aurait pas à se fatiguer, Athéon était mourant, et pas de doute qu’il succomberait en sachant que tout ceux qui aspirait à le remplacer étaient morts.

 

Le Roi était dans son lit, Sombra ne prêta même pas attention sur son état. S’il dormait ou non, s’il était mort... Ça n’avait aucune importance de toute façon, plus rien ne pourrait l’arrêter. Posé sur un chevet, l’objet royal se mit à flotter jusqu’à sa tête. Sa couleur dorée perdit alors en brillance, jusqu’à la perdre totalement pour devenir d’un sombre gris mat. Les parures qui la décoraient s’évaporèrent pour laisser place à deux piques tranchantes de chaque côté de sa tête pour remettre plus en valeur son obscure crinière.

 

Il avait enfin une coiffe à l’image de son Empire.

 

“Monstre !” fit une faible voix dans son dos.

Alors qu’il se regardait dans la glace, Sombra put voir également dans le reflet qu’Athéon s’était levé de son lit. Vu son regard et son propos, pas de doute qu’il devait savoir ce qui s’était passé en dessous.

 

“Qu’as-tu fais ? Qu’est devenu le Sombra loyal que j’ai connu ?

 

-Naïf, ajouta ce dernier. Il ne voyait que la moitié des choses alors que tant de méfaits se tramaient devant ses yeux.

 

-Pourquoi avoir fait ça ? Pourquoi ce massacre ? Pourqu-ARG!!”

 

Jusqu’ici, le futur souverain était resté clément en lui laissant une chance d’aller se coucher pour attendre patiemment sa fin, mais Sombra ne se retint pas longtemps de l'envelopper dans du cristal de jais qui lui recouvrait tout le corps mis à part le visage. Athéon souffrait le martyr comme jamais il ne l’avait ressenti dans sa vie, comme si des milliers d’aiguilles lui rentraient dans la chair en s'enfonçant de plus en plus loin.

 

“Je vous ai prévenu vous et tous les autres qu’ouvrir votre dôme allait mettre l’Empire en danger ! lui dit-il avec fureur en collant son museau contre le sien. Après tout ce que j’ai fait pour vous aider, vous vous êtes laissés aveugler par les caprices d’un peuple niais alors que le mal est à l’extérieur !

 

-Le mal... c’est v... vous !

 

-Un mal nécessaire pour continuer à faire de cet Empire ce qu’il devait être dès le début !”

 

Sombra se retourna pour quitter la chambre. Mais il ne relâcha pas son emprise sur le Roi, au contraire. Dans un regard noir et rempli de mille colères, la sombre licorne fit briller sa corne pour compresser le cristal qui emprisonnait Athéon, l’écrasant sans retenu, le tout dans un horrible bruit de craquement osseux.

 

Et lorsqu’il quitta la chambre, le cristal s’envola comme de la poussière dans les airs, ne laissant aucune trace. Comme si Athéon n’avait jamais existé.

 

Malgré toute cette tourmente, malgré la mort du Roi, le Cœur était encore en train de tourner sur lui même. Dans quelques minutes, il allait s’arrêter, faisant alors tomber le dôme qui protégeait les lieux. Mais avant que cela n’arrive, un fort revers de sabot fit sortir l’artefact de son socle.

 

Sombra devait se débarrasser de cette chose qui n’avait pas été affectée par sa déferlante de ténèbres, mais plus tard car maintenant que la protection s’était envolée, le froid allait se répandre dans toutes les rues et les maisons. Cela allait probablement poser des problèmes... Mais aussi montrer à tous les poneys que l’on ne pouvait pas avoir ce que l’on voulait. Cela allait les endurcir, puis de toute façon, le nouveau Roi avait autre chose à faire.

 

Ruby revint vers lui, accompagnée par une jument bleue, terrifiée par l’entourage qui s’était métamorphosé. Elle voulut s’enfuir à la seconde où son regard croisa celui de Sombra mais une force lui collant les pattes au sol l’obligea à lui faire face. C’est alors qu’un énorme mal de tête la fit crier de douleur, quelque chose était en train de lui pénétrer l’esprit sans ménagement, jusqu’à avoir le regard vide et une démarche maladroite. Saphir n’était plus qu’un légume à l’écoute de son souverain, mais il n’y avait pas que ça.

 

“Retourne à Equestria pour dire aux alicornes qui est donc le nouveau Roi de l’Empire, et ne prononce mon nom qu’uniquement en leurs présences.

 

-Oui mon Roi, dit-elle avant de se mettre en route vers le blizzard sans rien d’autre que son pelage pour la couvrir.

 

-Quand à toi, fit-il envers l’autre ponette rouge. Je veux que tous les habitants soient devant le château dans les plus bref délais.”

 

Et comme sa camarade, elle se mit au travail. Dans quelques instants, tous les poneys de cristal allaient connaître leurs nouveau Roi, et vivre la période la plus sombre que l’Empire n’ai jamais connue.



***



“Halte !”

 

Bien que les gardes reconnurent très vite la jument bleue, sa façon étranger de marcher et son absence de réponses les obligèrent à se mettre en travers de son chemin. De plus, à part sa couleur, son apparence était méconnaissable à cause de son corps devenu cadavérique, le pelage mat et sans brillance caractéristique de sa race, ses crins sales et les blancs de ses yeux vert pâle. Contre toute attente, la ponette se laissa tomber en avant vers l’un des poneys qui fut obligé de la rattraper avant sa chute.

 

Elle gémissait, soufflait des petits mots qui ressemblaient à ceux de “Princesses”. De toute évidence, il ne fallait pas laisser Saphir dans cet état, et de toute urgence. En temps normal, on l’aurait emmenée vers l’infirmerie mais le lieu était sur le chemin de la salle du trône. Puis s’il y avait quelqu’un capable de la remettre en état, c’était bien Celestia ou Luna.

 

“Princesses ! cria-t-il en courant avec la souffrante sur son dos. Nous avons trouvé cette jument devant les portes et elle demande à vous voir.

 

-Que se passe-t-il ? demanda Luna en se levant de son trône tandis que Celestia avait le museau dans un parchemin. Mais c’est... Oh bon sang ! Saphir !”

 

Immédiatement, l’alicorne bleue prit la ponette contre elle en tentant de la garder debout sous son aile. De la magie semblait s’en écouler tel des milliers d’étoiles. Ce devait être un sort de guérison, mais la messagère se contentait juste de lutter pour garder les paupières ouvertes, la tête qui ne cessait pas de se balancer de gauche à droite comme si d’une seconde à l’autre elle s’apprêtait à tomber. La grande jument du soleil posa la lettre et haussa un sourcil en observant la scène.

 

Il y avait quelque chose de louche avec Saphir, et pas seulement sur son état critique.

 

“Fais attention ma soeur, il y a quelque chose de pas normal en elle, prévint-elle en faisant briller sa corne.

 

-Que s’est-il passé ? demanda Luna.

 

-Il y a un nouveau Roi à l’Empire de Cristal”, dit-elle sur un ton machinale.

 

C’est alors que Celestia écarquilla les yeux, elle venait de trouver ce qui n’allait pas.

 

-Son nom est...

 

-Non ! hurla la jument du soleil. Ne le prononce pas !

 

-Sombra-ARG !”

 

Immédiatement après, elle s’effondra sur le sol, retenu au dernier moment par les pattes de Luna qui semblait dépassée. Saphir avait perdu ce vert qui polluait son regard, mais également la vie.

 

“Saphir ? Saphir !? Répond-moi ? s’affola Luna qui tenait encore le corps de la ponette. Non ! Saphir ! Que s’est-il passé Celestia ?

 

-Un sort de magie noire, dit-elle simplement d’un neutre effrayant alors que sa petite soeur était au bord des larmes. Elle a été hypnotisée pour venir nous dire qui est le nouveau Roi, mais ce sort était si puissant qu’il l’a gardée en vie sans boire ni manger pendant probablement longtemps... Trop longtemps, déduisit-elle en observant le cadavre de cette jument qui avait la peau sur les os.

 

-Un nouveau Roi ? Sombra ? Mais qui cela peut-il bien être ? demanda encore l’alicorne dont la voix s’était un peu enraillée vers la colère.

 

-Nous allons bientôt le découvrir. Prend tes armes.”

 

La suite, tout Equestria la connaît. Elle est écrite sur tous les bouquins d’école pour poulains, et gravée sur les vitraux du palais de Canterlot. Les deux alicornes firent voyage directement en vol vers l’Empire pour se battre contre le terrifiant Sombra. Sa magie noire étaient trop violente et trop brute pour qu’elles usent des éléments, ou peut-être que ce ne fut pas nécessaire car elles en virent à bout en peu de temps.

 

Ce que l’histoire sait un peu moins par contre, c’est que ce combat n’aurait pas été gagné sans Luna. Dire que ce Sombra se prétendait être capable de manipuler les rêves de n’importe quel poney, le malheureux eut la mauvaise idée de le faire sur la gardienne, ou même la genèse des cauchemars.

 

Celestia ne le vit pas directement, et pourtant, c’était bien une preuve qu’en Luna il y avait une immense magie qui grondait.

 

Autre erreur de sa part, lors de leur rentrée en grande pompe pour célébrer cette victoire, ce fut la jument solaire qui annonça la victoire. Le peuple était bon, mais le peuple était naïf. Ils ne criaient pas “Vive les Princesses”, mais “Vive Celestia”. Bien sûr, c’était toujours elle que le peuple voyait, c’était elle qui illuminait leurs journées. Sauf que ce manque de reconnaissance, bien que Luna en avait conscience à cause de son statut qu’elle avait accepté, ne pouvait la laisser passer à côté de ce que l’on appelait la jalousie.

 

Le temps aura suffit à Luna pour devenir Nightmare Moon, le temps de laisser grandir cette méprise qui se transforma en colère, au point d’obliger Celestia à utiliser les Éléments de l’Harmonie contre sa propre soeur.

 

Non, Sombra ne fut pas l’origine de sa chute par sa défaite, mais il fut néanmoins un facteur de plus pour l’attirer de plus en plus vers le gouffre.

 

En parlant du loup, celui-ci dut attendre un millénaire de froid et de solitude dans les montagnes de cristal. Un millénaire à germer sa colère qu’il infligerait à tout ceux qui s’était mis sur son chemin et à ceux qui oseraient faire de même une fois libéré.

 

À la seconde où son Empire sortit de sa malédiction, il ne perdit pas de temps à contre-attaquer pour se débarrasser de ce couple princier. Mais dans sa fureur aveuglante, il échoua lamentablement, humilié, anéanti.

 

Et puis...

 

On le croyait mort, on l'avait oublié. Mais il est de retour, l'un des plus grands antagonistes d'Equestria revient, prêt à déferler sa soif de pouvoir et de vengeance.

 

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Acylius
Acylius : #20909
La transition vers Oblivion's King est bonne, mais moi j'aurais quand même mis les trois astérisques pour séparer cette partie du reste.
Modifié · Il y a 3 ans · Répondre
Toropicana
Toropicana : #20908
@Acylius oai donc c'est bien ce que je dis en fait, j'ai pas accentué les détails et le reste sur la dernière partie, on sait tous que les Princesses vont botter le cul à Sombra puis après que Lulu va passer du côté obscure. J'aurai très bien pu m'arrêter à la dernière réplique de Cel mais j'avais vraiment envie de placer la dernière phrase ^^.
Il y a 3 ans · Répondre
Acylius
Acylius : #20906
La toute fin, après la dernière réplique de Célestia.
Modifié · Il y a 3 ans · Répondre
Toropicana
Toropicana : #20904
@Acylius tu parles de quelle partie ? Celle du massacre ou après ? Parce que si c'est la dernière, j'ai pas pas vraiment voulut me répéter sur ce qui s'est passé avec NMM et tout le reste, je pense que tout le monde sait déjà ce qui s'est passé, cette partie passe un peu comme un épilogue.
Il y a 3 ans · Répondre
Acylius
Acylius : #20903
Je dois bien avouer que j'aime assez ta manière de lier les histoires de Sombra et de Discord. J'ai un faible pour les fictions qui font des liens entre les différents éléments du canon, que ce soit au sein d'une même génération ou entre des générations différentes.

Par contre, la dernière partie de ce chapitre a l'air d'avoir été écrite à la va-vite. Non seulement elle laisse un air brouillon, mais le fait qu'il n'y ait pas du tout de séparation avec le reste du chapitre en estompe l'importance.
Il y a 3 ans · Répondre

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