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Arcanum Bellum ~ quand la mémoire [...]

Une fiction écrite par Jycrow.

Chapitre 01 - Rien ne doit être retrouvé

Crimson Jaden se réveilla. Sa tête lui faisait mal et tous ses membres étaient engourdis, comme s’il se réveillait d’un sommeil de plusieurs jours sur un sol pas très confortable. Il remarqua que le ciel était légèrement noir et que l’on pouvait le voir encore parsemé d’étoiles. Un frisson le parcourut et la licorne au pelage beige en déduisit immédiatement qu’il se trouvait à l’extérieur et que le jour se levait. Crimson remit plusieurs mèches noires, parmi sa crinière d’un vert de jade, derrière son oreille droite et chercha ses lunettes de son sabot. Introuvables. Cela le dérangeait, mais ça n’était pas sa principale préoccupation, ces dernières n’étant que purement esthétiques. Non, ce qui l’intriguait vraiment, c’était sa mémoire floue. Très floue.

Il se souvenait de son identité : Crimson Jaden, licorne de vingt-trois ans et alchimiste particulièrement doué. Il savait également qu’il prenait part à un étrange conflit entre deux groupes fanatiques des Alicornes mais lui-même ne savait plus à quel camp il appartenait. Et il était – ceci étant la plus importante des informations – le père adoptif d’une jeune pégase nommée Lyla, actuellement hospitalisée à Canterlot et plongée dans un profond coma. Mais bien qu’il tentait du mieux qu’il puisse de se remémorer pour quelle raison elle se trouvait dans cet état, il ne parvint à rien hormis l’obtention d’une sensation de tristesse et de culpabilité.

Alors que Crimson se torturait l’esprit, son sabot toucha quelque chose. Une lettre, visiblement rédigée par sa mère au vu du style d’écriture qu’il reconnut, quand bien même ces mots étaient saccadés comme si la destinatrice… pleurait ? En effet, la licorne aperçut des larmes séchées çà et là à quelques endroits de la missive. Sa curiosité étant attisée, il fit léviter le message et le lut mentalement.

« Mon cher fils,

Quand tu te réveilleras, tes souvenirs seront brouillés. Cela est parfaitement normal, ton père et moi l’avons fait pour te sauver. Si tu lis ces quelques mots, cela veut dire que tu es encore en vie et cela nous soulage fortement, même là où nous sommes. Nous nous sommes fait attaquer par ton frère, Sanderoy, partisan du Concordat du Jour. Il a trahi notre famille… il va nous tuer, ton père et moi, j’en suis sûre. Mais toi, tu seras sain et sauf. On fera tout pour que ce soit le cas et ni Sanderoy ni ses acolytes ne nous en empêcheront. Et vu que tout le savoir en ta possession pouvant t’être dangereux fut scellé, tu ne leur seras plus d’aucune utilité et ils cesseront de te pourchasser. Mais reste tout de même sur tes gardes, mon chéri…

Nous avons foi en toi. Nous t’aimons et nous voulons que tu vives. Il est trop tard pour nous, mais ça n’est pas le cas pour Lyla et toi. Protège-la. Restaure le nom de notre dynastie… Cela peut paraître injuste de te demander ça, mais vaincs ton frère !

Si tu as bien suivi nos conseils, tu devrais te trouver aux alentours de Ponyville. Vas-y et rends-toi dans la petite maison, n°23, se trouvant près de la bibliothèque en forme d’arbre. Tu devras trouver l’un de nos alliés du Conclave Nocturne se nommant Silver Song.

Sois fort. Nous t’observerons de là où nous allons. Nous t’aimons et t’aimerons toujours. »

Crimson relut la lettre une seconde fois avec une boule dans la gorge. Il venait de comprendre que ses parents l’avaient sauvé d’une mort certaine. Il ne connaissait pas les méthodes de son frère mais ce qu’il l’imaginait pouvoir faire à sa mère et son père le répugnait. Comment avait-t-il pu faire ça ? Crimson n’en savait rien mais se jura de demander ça à Sanderoy lorsqu’il le reverra. Et quand ce sera le cas… il vengera ses parents.

Il se releva difficilement, maudissant le sol inconfortable et épousseta sa veste blanche. Vêtement qu’il ne remarqua qu’à l’instant et lui confirmant effectivement qu’il était un bon alchimiste. Car, après tout, quel poney digne de ce nom se baladerait sans sa blouse de laboratoire ? Toutefois, bien qu’il se sentît à l’aise dans son uniforme de travail, ça n’était pas des plus discrets.

La licorne se hâta donc de se rendre là où ses parents lui conseillèrent d’aller : chez le dénommé Silver Song. Le lieu lui disait quelque chose, il était déjà probablement venu ici mais il ne s’en souvenait guère. Tout ce qu’il savait, c’était que ses parents devaient être incroyablement doués pour être capables d’effacer – tantôt complètement, tantôt partiellement – certains compartiments précis de la mémoire. Une sorte d’hypnose ? Dans tous les cas, je me renseignerai plus tard. Il faut que je me rende au n°23 avant que d’autres poneys me voient, pensa Crimson.

Il chercha de vue le fameux arbre servant de bibliothèque et, sans surprise, il la trouva assez facilement. Puis, il galopa le plus silencieusement possible jusque-là et observa les alentours pour trouver sa destination. 19… 21… ah, voilà, 23.

Il frappa deux coups rapides et légers, puis un troisième un peu plus fort. La licorne fut étonnée dans un premier temps car, juste après avoir fait cela, il se rappela qu’il s’agissait du « code d’entrée » pour les membres du Conclave. Décidément, il va falloir que je m’habitue à cette étrange amnésie ; quoi que m’aient fait maman et papa, ce fut du bon travail.

Crimson sortit de ses pensées une fois que la porte s’ouvrit et qu’on le tira précipitamment à l’intérieur. Et ce ne fut pas Silver Song qui l’accueillit.

Dans la maison se trouvait, en plus de lui, quatre poneys. Parmi ceux-ci, une pégase siégeait, endormie et ligotée sur une chaise, au milieu de la pièce où se trouvait auparavant une table, à en croire les marques sur le tapis. Et devant elle se tenait une licorne à la fourrure menthe, assise confortablement – et dans une étrange position – dans un sofa, qui considérait le présumé scientifique d’un regard intrigué. Ce dernier ne put voir que sa tête, lorsqu’elle se retourna pour le voir. Les deux autres étaient tous deux des pégases. Celle ayant tiré Crimson dans la pièce s’éloigna sans un mot vers ce qui devait être la cuisine et l’autre resta là, à reluquer le nouvel arrivant.

—Qui es-tu ? s’enquit-il après un court instant. Je ne pense pas t’avoir déjà vu.

—Quelqu’un qui ne comprend pas très bien ce qu’il se passe, répondit-il en étudiant celui qui venait de parler. J’étais censé retrouver un certain Silver Song, pas des gens bizarres en train de faire je ne sais quel rituel. Et vous, vous êtes ?

Son interlocuteur semblait choqué par la réponse de l’alchimiste et, s’il n’avait pas tourné la tête en direction de la licorne assise, il aurait certainement voulu le calmer d’un bon coup de sabot. Alors, en tentant de garder son sang-froid, il se présenta :

—Night Wing, espion du Conclave Nocturne et garde de Sa Sainteté Luna. Maintenant, veuillez décliner votre…

—Oh ? Il me semblait qu’aucune des deux ne savait à propos de nous, le coupa-t-il.

Crimson regarda quelques secondes le pégase puis continua :

—Oooooooh… je vois, elle n’est pas au courant. Bien joué, admirable tromperie. Ah, oui, je m’appelle Crimson Jaden et, comme vous aurez très certainement pu le remarquer, je suis quelqu’un qui travaille dans des laboratoires pour nos chers alliés de la nuit.

Il n’attendit même pas une réponse qu’il dirigea vers celle qui semblait être retenue en otage, sans contourner aucun meuble. Crimson grimpa donc par-dessus le sofa, frôlant la licorne assise au passage, et grimpa sur la table afin d’observer la prisonnière de plus près.

—Mmh… intéressant, murmura-t-il, avant de renifler le cou et les ailes du poney ligoté. Mmhmmh, très intriguant, même ! Que lui avez-vous fait ?

Il tourna la tête vers celle qui l’observait d’un air neutre depuis son arrivée et s’assit devant elle. Il put désormais remarquer sa cutiemark ; une lyre dorée qu’il crut reconnaître. Il voulut parler mais Lyra, se grattant le menton, le devança.

—Jaden… oui, je pense avoir déjà entendu ton nom. Jaden… Jaden…

—Et toi, t’es qui ? interrogea-t-il nonchalamment

La concernée lui rendit un petit sourire amical et se leva. Ensuite, elle marcha en position bipède – et avec une facilité déconcertante – jusqu’à arriver près d’un mur vierge de décoration. Tout à coup, elle activa sa magie et fit valser Crimson contre ce mur et posa son avant-bras sur la gorge de l’alchimiste.

—Je suis la générale Lyra Heartstrings et je te demande de faire preuve d’un minimum de respect envers ton supérieur, Crimson Jaden, lui dit-elle froidement mais en gardant son sourire. Et ton nom de famille vient de me faire tilt… un certain Sanderoy Jaden a éliminé quelques-uns de mes meilleurs éléments. Je suppose que tu ne m’en voudras pas si je doute un peu de toi, vu que vous possédez tous les deux le même nom.

Le scientifique déglutit difficilement. La force qu’utilisait la licorne était remarquable et une étrange sensation émanait de son regard, ce qui lui donnait froid dans le dos. Elle ne faisait pas dans la dentelle et ne il fut pas étonné de son grade de générale.

—Mon frère, Sanderoy, a trahi le Conclave, madame… il a tué nos parents et ceux-ci m’ont permis de me sauver mais… je ne peux vous en dire plus, je ne me souviens de rien d’autre, je vous le jure ! Je… je suis avec vous !

Lyra le scruta des yeux durant une bonne dizaine de secondes et cela mettait la pression à Crimson. Puis, elle relâcha son emprise et dit d’une voix un peu plus sympathique :

—Je sais, tes parents m’ont écrit. Mais je voulais vérifier qu’ils ne mentent pas et que tu sois bien la personne décrite.

Le scientifique ne prononça pas un mot. Il digérait seulement ce qu’il venait d’entendre. La générale acheva son explication :

—Tu seras donc sous ma tutelle, Jaden, tout comme le furent tes parents. Mais avant toute chose, je pense que je vais devoir éclairer ta lanterne sur ce qu’il se passe ici… cette pégase, vois-tu, est une chevalière du Concordat du Jour. Comme l’avait prédit Octavia, Silver Song s’est fait enlever…

—Pourtant, il n’y a aucune trace de combat, il ne s’est pas défendu ? demanda Crimson, reprenant peu à peu son souffle.

—Je pense surtout que l’enlèvement est la façon officielle de le dire, se corrigea Lyra. Il s’agirait plutôt d’une trahison. Octavia le faisait surveiller depuis un certain temps… il fraternisait avec l’ennemi. Sachant que je vis ici, à Ponyville, elle me demanda d’intervenir si un quelconque problème se présentait.

—Et c’est ce qu’il se passa. La générale Heartstrings nous aida à vaincre cette pégase. Sans elle, nous aurions fait un certain raffut et nous nous serions fait repérer… encore merci, générale, fit Night Wing avec une révérence.

—Cette chevalière semblait coriace pour vous, en effet. Elle maîtrisait le vent… original, pour un poney de cette race, ironisa la licorne menthe. Quoiqu’il en soit, nous ne sommes quand même pas arrivés à temps, Silver Song était déjà parti. Il ne restait plus que… mmh… Chaser, c’est ça ? Bref, elle n’avait pas senti ma présence, du coup j’ai rapidement pu la calmer. Et maintenant, il va falloir lui retirer un maximum d’information.

—Je pense pouvoir m’occuper de ça, se proposa Crimson avec un regard confiant. Sans vouloir me vanter, j’ai un certain talent d’orateur et, en plus de ça, je pourrais créer quelques poisons – ou placebos – pour la faire parler. Je présume que ce sera ma première mission sous vos ordres, ma générale ?

—Intéressant… oui, on pourrait dire ça. Moi, par contre, je vais devoir partir. Ce petit incident n’est pas le plus gros souci du Conclave donc, en tant que chevaliers, vous pouvez vous en occuper. Par contre, l’histoire de cet assassin qui ne s’en prend qu’à l’Arcanum Bellum…

Lyra se tut et passa son sabot sous son menton et réfléchit. Il était vrai qu’il y avait un bon nombre de problèmes au sein de la guerre secrète, actuellement. Comparé à la trahison de Silver Song, ce tueur en série du nom de Lo-Ki – assez présomptueux pour s’autoproclamer « Dieu de la tromperie » – qui tranchait dans les troupes des deux camps n’était pas une mince affaire.

Durant ce silence, la pégase au pelage orangé et à la crinière bleu royal revint de la cuisine avec un plateau où se trouvaient quatre tasses et une théière. Elle remarqua que la licorne était sur le point de partir.

—Ah ? Vous partez, générale Heartstrings ? demanda-t-elle d’une façon neutre. Je venais de trouver un thé d’une qualité incroyable, dans les armoires. Vous ne voulez pas rester en boire un ?

—Désolé, mais je dois impérativement partir, refusa poliment Lyra. Je dois envoyer un rapport au quartier général et je dois aller me renseigner sur ce Lo-Ki. D’après certaines de mes sources, il serait aux alentours de Ponyville. Quant à toi, Night Wing, tu sais ce que tu dois faire…

En guise de réponse, le concerné ne fit qu’hocher la tête.

—À quoi ressemble-t-il, cet assassin ? interrogea Crimson, curieux.

—Malheureusement, nous ne le savons pas. Il est incroyablement discret et doué… mais nous l’aurons, j’en suis certaine. Et je m’occuperai personnellement de son cas, répondit-elle avec rancœur. Allez, je file… oh, c’est vrai, j’allais oublié : quand la porte se fermera derrière moi, notre otage se réveillera. Une simple technique d’hypnose.

La pégase orange garda un visage impassible, posant le plateau sur un meuble à côté d’elle. Les deux autres poneys opinèrent du chef et, juste après, leur supérieure quitta la maison. Comme elle l’avait dit, à la seconde où l’on entendit le bruit de la porte claquer, Reina Chaser se réveilla.

Sans prendre en considération la membre du Concordat, Crimson dit à voix haute :

—Eh bien, elle n’est pas si méchante que ça, pour une générale du Conclave.

—Il s’agit du poney le plus sympathique parmi eux, répondit Night Wing avec un petit sourire, puis se tourna vers les deux autres. Je m’excuse, mais je vais également devoir m’éclipser. J’ai une mission à remplir en tant qu’espion… je ne peux vous en dire plus. Vous allez devoir vous occuper d’elle sans moi. Au revoir.

Et, lui aussi, quitta la demeure du duc de l’Art. Il ne restait plus que Crimson et sa mystérieuse alliée qui avait visiblement préparé du thé. Et l’otage.

—Hum… il ne me semble pas que nous nous soyons présentés l’un à l’autre, n’est-ce pas ? Mon nom est Crimson Jaden, enchanté.

—Fearless Wind, rétorqua-t-elle d’un ton monotone. Ravie de faire ta connaissance, gamin.

Ravie ? Et… gamin ? Drôle de jument, celle-là.

—Heu, ah ah… oui.

Un silence gênant commença à régner dans la pièce. Silence qui fut brisé par le troisième poney présent.

—Et sinon, vous comptez me tuer quand ? demanda-t-elle avec un sourire de défi.

Les deux membres du Conclave se tournèrent vers elle. Puis, Fearless soupira, se dirigea vers le bureau où Silver Song écrivait ses compositions et s’y installa confortablement.

—T’as dit que tu t’en occupais, gamin. Alors, je t’en prie, elle est tout à toi, dit-elle en sortant une pipe d’un de ses sacs pour ensuite l’allumer et la fumer.

Et en plus de ça, elle fume. À croire que les poneys normaux n’existent pas dans la vraie vie, songea Crimson, à la fois amusé et interloqué. Il se dirigea vers la pégase ligotée et s’installa devant elle.

—Personne ne tuera personne, voyons. Nous ne sommes pas là pour nous entretuer, si ? N’est-il pas plus simple de discuter calmement ?

—Toi, je sens que tu vas me faire chier…

—Allons, allons, cessez de faire l’enfant, Chaser, dit l’alchimiste avec un faux air de reproche. Vous pouvez faire très simple : vous nous dites où se trouve Silver Song, et vous vivrez sans aucun souci ! N’est-ce pas quelque chose d’alléchant ? Ne tenez-vous pas à la vie ?

—Personne ne tuera personne, et là tu me menaces ? T’es pas très crédible comme mec, provoqua Reina.

Crimson grimpa sur la table et se rapprocha de la pégase. Il lui dit ensuite avec un grand sourire :

—C’est vrai, c’est vrai… des légendes racontent que je suis lunatique, par moments. Et là, on va se marrer tous les deux. Rien que vous et moi, ici et maintenant, on va jouer à un petit jeu, lui chuchota-t-il dans le creux de l’oreille. Dans ma poche, j’ai une seringue dont moi seul connais le contenu. C’est quelque chose qui ne fait rien si vous dites la vérité, mais qui vous apportera d’insoutenables douleurs si vous mentez sans pour autant que vous puissiez mourir, bien sûr, auquel cas ça n’est pas drôle. Dans mon autre poche, j’ai un couteau qui me permettra de couper vos liens si vous nous dites la vérité. Et si vous le faites, nous vous libérerons sans vous faire de mal.

Fearless observa le scientifique, curieuse de ce qu’il comptait vraiment faire. Reina, quant à elle, se sentait bien moins à l’aise qu’avant. Il avait le don de l’oppresser et de l’énerver en même temps, une sensation étrange. Elle tenta toutefois de répondre sans laisser paraître son changement d’état :

—Un tel poison n’existe pas. Je ne suis ni chimiste ou autre, mais je sais ce qui est possible ou pas. De plus, je doute vraiment que tu m’laisses partir… je connais les règles de l’Arcanum Bellum.

—Mais les règles sont faites pour être brisées, ma chère, rétorqua-t-il avec un sourire réconfortant. Je suis peiné de voir que vous ne me croyez pas, je vous l’avoue. Enfin, voyez par vous-même…

Crimson sortit de sa veste une petite seringue contenant un liquide transparent, ayant tendance à virer au bleu en fonction de sa position par rapport à la lumière environnante, et l’approcha du cou de Reina.

—Pas très glorieux pour un père adoptif, lâcha-t-elle d’une façon presque inaudible.

Mais ces paroles n’échappèrent pas à l’alchimiste. Il se stoppa net dans son mouvement et resta immobile pendant un certain temps. Ces quelques mots suffirent à lui restaurer une toute petite partie de sa mémoire concernant sa fille. Ce sont eux… Ce sont eux… C’est le Concordat qui…

Son regard changea du tout au tout. Il devint plus glacial et l’otage le remarqua. Sans aucune forme d’hésitation, Crimson planta l’aiguille dans le bras de la pégase et en injecta le liquide aux reflets bleutés. Il n’affichait aucun sourire et n’éprouvait plus aucune pitié à l’égard de Reina après ce qu’elle venait de dire – s’il en avait éprouvé un instant, tout du moins.

L’échange qu’ils eurent ne dura qu’un court moment.

—Alors, où se trouve Silver Song ? interrogea-t-il sèchement.

—Dans ton cul.

—J’ai vérifié, il n’y est pas. Dernière chance parce que je suis gentil : où se trouve Silver Song ?

—Tu ne le sauras jamais, beau gosse, nargua-t-elle avec un drôle de sourire.

—Sale histoire, j’ai envie de dire. Tant pis, je vous avais prévenu, soupira Crimson. Dans trois secondes, votre estomac se contractera et vous ferra souffrir. Trois… deux…

Il n’eut même pas besoin de prononcer le dernier chiffre que la pégase fut prise d’une atroce douleur au niveau de l’abdomen. Une sorte de crampe, mais qui s’amplifiait au fur et à mesure que le temps s’écoulait.

—Ensuite, ce sera vos yeux et vos ailes. Vous aurez une impression d’écrasement sur vos globes oculaires et que quelqu’un broie les os de vos membres emplumés un par un. Trois… deux…

Et Reina ressentit tout ce qu’il venait d’annoncer. Elle voulut hurler, mais en fut empêchée par le sabot du scientifique qui vint se placer sur ses lèvres afin qu’elle ne puisse émettre aucun son. Ses yeux semblaient vouloir s’exorbiter et à chaque cliquetis des aiguilles de la montre de son bourreau, elle sentait une partie de ses ailes se briser.

—J’ai l’antidote pour arrêter tout ça, expliqua-t-il en gardant le sabot sur la bouche de l’otage. D’un coup, vous ne ressentirez plus aucune douleur. Mais ça, c’est seulement si vous nous dites où se trouve notre allié.

Elle pleurait. Son agonie était horrible. Elle voulait que ça s’arrête, que tout s’arrête. Cela ne faisait qu’un mois depuis son engagement au Concordat du Jour. Et elle ne s’attendait pas à ça. Alors, avec difficulté, elle hocha deux fois la tête assez rapidement.

Oh… pas très fiable comme soldat, vu sa réaction. Je la cuisine encore un peu, et ça sortira tout seul, se dit-il mentalement. Il ôta son sabot afin que Reina puisse parler.

—Bien, bien. Alors, je répète ma question, où se trouve…

—Dans un manoir à l’est de Canterlot, il se situe dans une petite clairière accessible par les jardins du château ! Je vous en prie, arrêtez, supplia-t-elle.

—Désolé, mais je ne vous crois pas, lui répondit-il avec un grand sourire. Maintenant, votre allez sentir votre langue être brûlée au fer blanc. Trois… deux…

Et à nouveau, il ne termina pas son décompte que la pégase se vit recevoir le sabot du scientifique l’empêchant de hurler pour exprimer sa douleur. Puis, il le retira quand il vit qu’elle voulait parler.

—He hous en prie… h’est ha vérihé… hhoppez-hà… pihié, tenta-t-elle d’articuler tout en fondant en larmes.

—D’un coup, toute douleur disparaîtra. Trois… deux… un.

Et comme il le dit, elle ne ressentait plus rien. Elle était juste essoufflée. Les larmes coulaient le long de son visage. La chevalière du Concordat était dans un état complet de choc.

Tout en restant muet, Crimson tourna autour de Reina et, une fois derrière elle, l’enlaça tendrement, comme pour la rassurer.

—Vous voyez, dit-il d’une douce voix, ça n’était pas si dur. Et, comme je l’ai dit plus tôt, je vais vous libérer.

Il sortit de sa seconde poche le couteau dont il avait fait mention auparavant et le présenta devant la pégase.

—Je ne vous avais pas menti, j’ai bien un couteau pour dénouer vos liens, continua le scientifique sur un ton rassurant.

Et cela semblait faire son effet, l’otage se calma petit à petit et ferma les yeux, laissant couler une ou deux dernières larmes. Cela l’empêcha de remarquer un léger détail. Un détail important.

—Ah, oui, c’est vrai, s’exclama Crimson. Vous avez les salutations de la générale Heartstrings !

D’un coup, la licorne déplaça rapidement la lame afin qu’elle tranche ce qu’elle devait trancher. Ça n’était pas de la corde.

En fin de compte, Reina Chaser regrettait d’avoir rejoint l’Arcanum Bellum. Elle ne s’imaginait pas que ça pouvait être aussi dangereux de jouer avec les poneys de l’ombre. Et le pire dans tout ça était que jamais personne ne retrouvera son corps parce que, dans cette occulte guérilla, rien ne doit être retrouvé.

Mais Reina Chaser se vit mourir en arborant quand même un sourire satisfait car, finalement, elle sut tout de même accomplie sa véritable mission. Lo-Ki devait certainement être fier d'elle.

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Note de l'auteur

Eh voilà. Ce chapitre était, comme vous avez très certainement pu le remarquer, consacré à l'un des nombreux personnages principaux : Crimson Jaden. Les deux autres personnages (Night Wing et Fearless Wind) seront également développés dans des chapitres ultérieurs. En espérant que ce premier chapitre vous ait plu ! /)

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Jycrow
Jycrow : #15619
Merci bien, je prends note de tes conseils. Je modifierai très certainement ces parties et je prendrai un peu plus de temps sur la relecture et la réécriture (oui, je l'avoue, j'ai été un peu rapide pour le post de ce premier chapitre ^^'). Mais pour ma défense, je vais quand même dire que ceux à l'intérieur de la maison savait qu'il devait appartenir au Conclave, vu qu'il connaissait le "mot de passe" pour entrer (2 coups puis 1 coup)
Modifié · Il y a 3 ans · Répondre
Diggite
Diggite : #15605
Bon, maintenant je peux me prononcer. Certaines tournures de phrases passent difficilement pour moi, (je citerais la dernière comme exemple), ensuite on sent un peu trop le cote scénario préparé d'un rp, ce passage par exemple: "—Night Wing, espion du Conclave Nocturne et garde de Sa Sainteté Luna. Maintenant, veuillez décliner votre…", Crimson est un pur inconnu, mais bon, disons lui tout en cash au moins c'est fait. Essaye de broder plus ton scénario, quitte à rajouter des dialogues. Voila, essaye de modifier ces quelques points et ta fiction gagneras déjà en qualité ^^ mais je demande à en voir plus avant de parler du scénario.
Il y a 3 ans · Répondre

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