« Eh voilà, Monsieur Blaireau. Faites bien attention à ne pas utiliser cette patte maintenant », dit Fluttershy au petit animal en face d’elle, un sabot levant la patte bandée tandis que l’autre lui caressait doucement le dos. Le blaireau grogna d’un air ronchon pour lui répondre.
« Allons, allons, c’était son potager après tout. Si vous avez faim, venez me voir, d’accord ? » répondit Fluttershy, aussi patiente que possible. Elle reposa la patte du blaireau et la créature s’en alla. Fluttershy sourit et regarda autour d’elle. Dans son esprit, cette journée était parfaite. Le soleil réchauffait la colline où elle se trouvait, la rendant plus confortable pour les créatures qui venaient lui demander de l’aide. Elle préférait les soigner dans sa maison, où elle pouvait nettoyer chacune de leurs plaies ou écouter leurs problèmes, mais beaucoup d’animaux sauvages n’étaient pas à l’aise entre quatre murs, et elle faisait de son mieux pour s’en accommoder.
Cependant, sa prochaine invitée n’était pas un petit animal. Une figure masquée émergea de la forêt Everfree, se tournant vers Fluttershy une fois près d’elle. Fluttershy regarda cette figure approcher, ses nerfs s’apaisèrent en reconnaissant le poney derrière cette cape.
« B-Bonjour Zecora. Comment vas-tu ? » Fluttershy accueillit ainsi son amie zèbre lorsque Zecora s’avança vers elle et enleva sa cagoule. Zecora venait plus souvent en ville maintenant, et elle et Twilight la visitaient fréquemment, mais Fluttershy ne connaissait pas très bien le zèbre. Sa visite était certainement assez surprenante.
« Il est en effet le matin, mais je trouve que celui-ci est chagrin », répliqua Zecora. Fluttershy cligna des yeux. Les mots de Zecora étaient toujours bien choisis, mais assez difficiles à suivre pour la pégase.
« Il y a un problème ? » demanda-t-elle. Zecora hocha la tête.
« Désolée de te demander, mais il faut m’aider. Ou j’ai bien peur d’être bientôt en danger. »
« Une… faveur ? De quoi as-tu besoin ? » Fluttershy était rarement quelqu’un que l’on venait voir quand on avait un problème. Elle se demanda pourquoi Zecora n’avait pas été voir Twilight, ou peut-être Applejack. Elles savaient toujours quoi faire.
« Mon magasin a été visité par une bête. Je pensais que tu pourrais découvrir qui n’a plus toute sa tête. »
« Oh, je vois », cela faisait du sens. « Je, euh, je pense que je peux t’aider. »
« Mon cœur se réjouit de ta bonté. Quand seras-tu prête à y aller ? »
« Oh, nous pouvons y aller maintenant », lui dit Fluttershy. Zecora hocha la tête, se retourna et descendit la colline. Fluttershy la suivit et trotta derrière elle. Elle essaya de retenir un couinement lorsqu’elles entrèrent dans la forêt Everfree. Même au milieu de la journée, tout y devenait plus sombre, les arbres se refermant et formant un toit épais sous leurs têtes. Elle savait que la plupart des créatures là-dedans ne lui feraient pas de mal. Même les manticores étaient amicales, si on savait s’y prendre avec elles. Mais il y avait les dragons, et une hydre, et toute cette obscurité… les ombres elles-mêmes la menaçaient maintenant. Fluttershy n’avait jamais été douée avec l’obscurité.
« Tant que tu restes à mes côtés, je te promets que tu n’auras pas à t’inquiéter », lui dit Zecora, ayant apparemment remarqué sa nervosité. Fluttershy acquiesça, avala lourdement et essaya de s’arrêter de trembler. Zecora vivait dans la forêt Everfree après tout. Il n’y avait rien à craindre avec un guide aussi expérimenté, n’est-ce pas ? À part si un arbre tombait sur elles, ou si elles tombaient sur une cockatrice, ou si elles se retrouvaient coincées dans un marécage, ou coincées dans un marécage pendant qu’un arbre tombait sur elles lorsque des cockatrices les attrapaient…
Fluttershy réalisa qu’elle commençait à hyper-ventiler. Elle s’arrêta de respirer, mais avait la tête qui tournait. Respire, Fluttershy, respire. Souviens-toi de ce que t’a dit Twilight à propos de la respiration.
Fluttershy était sensible aux bruits de la forêt, après avoir passé la plupart de sa vie dans et autour de tels endroits, et était familière avec ses habitants. Elle connaissait le son de chaque oiseau, entendait le cri d’une mangouste au loin, connaissait les chemins en face d’elle. Cela la mit un peu plus à l’aise, et elle se détendit assez pour juste absorber tout ça. Beaucoup d’animaux vivaient dans ou autour de la forêt ; Fluttershy y était elle-même allée il y a peu pour déposer des grenouilles en trop dans un marécage tout proche. Elle trouva un peu de réconfort en sachant qu’elle pouvait tout autant tomber sur quelque chose d’amical ou pas. Et sans doute que ce qui avait dérangé Zecora ne devait être rien de plus que quelques rats qui ne comprenaient pas le concept des droits de propriété.
« Et voici ma maison ; c’est de l’autre côté que se trouvent mes potions. » Elles avaient atteint la maison de Zecora, qui faisait partie de la forêt Everfree et que même Fluttershy n’avait pas remarquée avant d’y arriver. Zecora l’amena au fond de l’arbre, vers un coffre en bois niché contre le tronc.
« Rien d’important ne me manquera, même si je me demande qui a bien pu faire ça. » Zecora tapota le coffre du sabot. Il n’était pas fermé à clé, mais avait un verrou solide.
« Des fois, les écureuils ou les ratons laveurs peuvent être parfois très curieux », sourit Fluttershy en donnant sa réponse. « Ils crochètent les verrous et crochets, tout ce qu’ils peuvent ouvrir. Ou les serrures aussi. » Zecora répondit dans la foulée, hochant simplement la tête.
« Si l’un d’entre eux en a mangé, j’ai bien peur qu’il ait besoin d’être soigné. »
« Tu veux dire que ça n’est pas de la nourriture ? » Les yeux de Fluttershy s’écarquillèrent. Zecora secoua sa tête d’un air triste et ouvrit le coffre. Il y avait quelques sachets en tissu, chacun de couleur différente et labellisé. Des herbes et des poudres, comprit Fluttershy, comme ceux que Zecora utilisait pour créer l’antidote contre la digiblague. De plus, quelques sachets étaient ouverts et vidés de leurs contenus.
« Pourquoi conserverais-je à manger ? La forêt me donne de quoi me sustenter. »
« Oh, mince. Alors, ils vont être malades pour avoir mangé ce qu’il y a là-dedans ? » demanda Fluttershy. Zecora hocha la tête.
« Oh non ! Nous devons, euh… nous devrions faire quelque chose. »
« Que faire d’eux ? » s’interrogea Zecora. « La forêt est grande, et nous ne sommes que deux. Je devrais suivre ton conseil et changer de loquet, mais les coupables ne seront pas rattrapés. »
Fluttershy hocha la tête de façon réticente, un regard triste sur son visage.
« Je pense que ces voleurs ne seront pas tués. Et si tu restais pour le thé ? »
« Oh, euh… » Fluttershy regarda autour d’elle. « Peut-être qu’ils n’ont pas été loin ? Est-ce que je peux regarder dehors ? »
Zecora acquiesça et recula, laissant de la place à Fluttershy. Une pauvre petite créature était là dehors, avec un gros mal de ventre, ou pire encore ! Fluttershy ne pouvait s’en aller en laissant cette pensée remplir sa tête. Elle étudia les alentours autour du coffre, espérant trouver un indice pour débusquer le coupable qui avait fouillé dans les provisions de Zecora. Le sol de la forêt Everfree était presque toujours doux, quelquefois boueux, et même les plus petits animaux devaient avoir laissé des traces. Il n’y avait rien autour du coffre, alors Fluttershy étendit un peu plus ses recherches.
« Oh, c’est étrange. Zecora, est-ce que tu portes des fers à cheval ? » Fluttershy trouva des traces de pas s’éloignant de la maison.
« Je n’en ai jamais portés ; les zèbres n’en ont pas besoin contrairement aux poneys », répliqua Zecora. Elle approcha Fluttershy, curieuse, et vit les traces.
« Hmm », elle fronça les yeux. « Je pensais que c’était un animal qui m’avait volée, mais on dirait bien que c’est l’œuvre d’un poney. »
« Tu penses que quelqu’un a volé ça ? » demanda-t-elle. Zecora acquiesça et Fluttershy comprit que la preuve était évidente. Mais elle ne pouvait pas comprendre pourquoi quelqu’un volerait, surtout chez Zecora. Personne ne saurait utiliser les herbes, et Zecora donnait toujours gratuitement ses produits – par exemple l’antidote pour la digiblague, où elle avait fait plus de mixture que nécessaire pour chaque poney, même après avoir été accusée de sorcellerie.
« Peut-être, peut-être qu’il y a une raison… » marmonna Fluttershy. Elle suivit lentement les traces, et Zecora était derrière. En plus de tout ça, elle se demanda où pouvait bien se diriger le poney. Les traces de sabot suivaient un petit chemin, plus une route naturelle entre les arbres qu’un vrai parcours, plus loin dans la forêt. Elle était si absorbée par le suivi qu’elle oublia tout autour d’elle, sans remarquer qu’elle allait plus haut et que la piste devenait de plus en plus tortueuse.
Elle finit par perdre le fil et regarda tout autour d’elle. Elle se tourna vers Zecora, qui semblait perplexe et intriguée. Elle était en bas d’une petite montagne, les arbres laissant la place aux rochers. Elle leva les yeux et voyait des caves du côté de la montagne, dont une juste en face d’elle, une faible pente menant droit dans sa bouche. Personne ne pouvait vivre là, n’est-ce pas ? Zecora vivait dans la forêt, c’était vrai, mais… une cave ?
« Est-ce… est-ce que quelqu’un d’autre vit dans le coin ? » demanda-t-elle. Zecora secoua sa tête.
« Il n’y a pas de place pour des poneys dans cet endroit ; pour autant que je le sache, il n’y a que moi. »
Prudemment, peureuse mais curieuse, Fluttershy commença à marcher sur le chemin rocailleux, sans être sûre de vouloir que Zecora ait tort ou raison. Elle fit quelques pas avant d’entendre un long grognement. Elle se figea, terrifiée de faire face à une bête énervée qu’elle venait juste de déranger. Mais elle reconnaissait le grognement comme le son d’un poney. Elle avait entendu beaucoup de grognements après cet incident avec les muffins d’Applejack.
« Euh, il y a quelqu’un là-dedans ? » demanda-t-elle du mieux qu’elle le pouvait. Le grognement s’arrêta. Fluttershy crut entendre quelqu’un haleter.
« B-bonjour ? » essaya-t-elle encore, en faisant un pas en avant.
« A-allez-vous-en ! Il n’y a personne ici ! » répondit quelqu’un. Fluttershy couina, reculant instinctivement. Cependant, quelque chose dans la voix la fit s’arrêter. Elle la reconnut, mais ne pouvait pas dire qui en était le propriétaire. Elle se tourna vers Zecora, qui lui fit signe de continuer, lui donnant un encouragement silencieux.
« Est-ce, euh, vous allez bien ? » elle s’avança. « Est-ce que, euh, vous êtes celui qui- »
« Dehors ! Euh, mmmm… » Elle entendit un zap, et de la fumée sortit soudainement de la cave. Fluttershy courut presque avant que Zecora ne la stoppe.
« Oh, c’était une mauvaise idée… » grogna la voix. La pégase avala lourdement et essaya de s’arrêter de trembler.
« C’est le son d’un poney en danger », dit Zecora. « Allons voir ce qui cause cette fumée. » Fluttershy hocha la tête et se retourna lentement. Elle savait que Zecora avait raison, même si la personne qui était là voulait clairement qu’on la laisse seule.
« E-est-ce que vous allez bien ? »
« S’il vous plaît… » La voix était si faible. Fluttershy se força à avancer vers la cave, avec Zecora sur ses talons. Ce qui était dans la cave toussa à nouveau, mais ne dit rien de plus. Fluttershy arriva à l’entrée de la cave.
« Bonjour ? » Elle cligna des yeux, incapable de voir dans la faible lumière. Un visage près du mur du fond toussa.
« J-je vous demande de partir ! Personne n’a le droit me voir ainsi… » Fluttershy finit enfin par reconnaître la voix.
« Trixie… ? » Elle entra dans la cave, les yeux s’ajustant à la lumière. C’était en effet la licorne bleue. Sa queue et sa crinière étaient déchirées, elle était couverte de griffures et d’entailles, et ses os étaient visibles. C’était difficile à imaginer, mais la marque de beauté l’identifia comme la showmare qui était venue et avait quitté Poneyville il y a un mois.
« Allez-vous-en… » Trixie grognait, haletait. Fluttershy entendait aussi son estomac grogner, et la licorne grimaça, les yeux embués. Sa tête glissa lentement contre le sol.
« Trixie ! » Fluttershy courut vers elle. Elle était froide, avait du mal à respirer et était en lambeaux. « Oh, euh… ne t’inquiète pas ! Z-Zecora ! »
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« Mmm, la Grande et Puissante Trixie aime ça… » gémit la licorne. Elle se sentait si chaude et confortable, et était en train de se réveiller. Dans son esprit, elle était au spa, une jument experte lissant ses sabots doucement jusqu’à ce qu’ils brillent tandis qu’elle se reposait sur une montagne d’oreillers.
« La masseuse, ensuite », ordonna Trixie, toujours à moitié endormie. Elle entendit un couinement. Cette fille du spa devait être timide. Trixie sourit : elle aimait quand elles étaient mignonnes et innocentes. Puis, soudainement, elle sentit une douleur dans son sabot qui la ramena à la réalité.
« Ouch ! »
« Oh, désolée. J’ai, euh, juste besoin d’enlever les échardes », la voix finit de réveiller Trixie. Elle ouvrit ses yeux, les refermant immédiatement lorsque la lumière attaqua ses pauvres rétines. Elle grogna, essaya à nouveau, jetant lentement un coup d’œil de derrière ses paupières.
Elle était sur quelque chose de doux, un lit pensa-t-elle, avec un oreiller derrière sa tête. Elle était sur son dos, les yeux levés vers un plafond jaune. Elle était bien installée, mais trop confuse pour profiter de la situation. Elle tourna sa tête pour regarder autour d’elle, grimaçant de suite en sentant à nouveau ses douleurs. Elle se força à les ignorer, et trouva un autre poney à ses côtés, assis sur un tabouret et tenant le sabot droit de Trixie. Une pégase jaune avec une longue crinière rose qui cachait à moitié son visage.
« Toi ! » l’accusa Trixie. « Qui es-tu ? Qu’est-ce que tu fais ? » Elle essaya de retirer son sabot. Elle était si faible qu’il bougea à peine dans le sabot de l’autre poney.
« Oh, je suis désolée ! Je devais les enlever avant qu’ils ne s’infectent. J’ai, euh, peur que certains le soient déjà… »
Trixie grogna. La pégase avait une pince à épiler entre ses dents pour enlever une autre écharde. Trixie la regarda, les yeux écarquillés. C’était plus grand qu’un cure-dent !
« Qu’est-ce qui s’est passé ? » demanda Trixie en grognant. Elle se sentait plus morte que vivante.
« Zecora a dit que tu as essayé de manger ses ingrédients. Tu t’es, euh, empoisonnée un peu… J’ai beaucoup de matériel médical, alors nous t’avons amenée ici. »
Trixie commença à dire quelque chose, mais se rappela de quoi parlait la pégase, au moins partiellement. « Oui, la sorcière-poney. Trixie n’était pas en… forme à ce moment. Elle a cru que la sorcière conservait de la nourriture, pas… ce que c’était. Quelle idiote. »
« C’est, euh, un zèbre… en fait… » dit timidement la pégase.
« Eh bien, même si la Grand et Puissante Trixie aime être pomponnée, elle en a assez. Elle doit s’en aller tout de suite. » Elle regarda la pégase, attendant une réponse. La ponette à la crinière rose la regarda simplement d’un air inquiet, puis hocha la tête.
« … Tu ne vas pas te disputer avec Trixie ? » demanda la magicienne, un peu hésitante. La pégase secoua sa tête.
« Eh bien », souffla Trixie. « C’est bon de voir quelqu’un avec un peu de bon sens. La Grande- » Elle lutta pour se mettre sur le côté, grimaçant à chaque mouvement, « et Puissante- », la pégase se leva pendant que Trixie sortit du lit, les yeux embués, « Trixie n’a pas- woah. » Elle tomba au sol. Elle grogna, essaya de se relever, mais elle n’arrivait pas à supporter son propre poids. Un affreux mal de ventre la fit crier un peu. Elle se tourna vers la pégase devant elle, qui la regardait avec ses grands yeux. Trixie la dévisagea.
« Est-ce, euh, tu veux manger d’abord ? » demanda Fluttershy. Sa voix n’était ni moqueuse ni sarcastique comme l’attendait Trixie. Elle le demandait en toute honnêteté. Trixie était stupéfaite.
« … la Grande et Puissante Trixie aimerait ça, oui », admit-elle, sans regarder son infirmière. La pégase trotta et laissa Trixie au sol. Trixie regarda autour d’elle depuis sa position peu avantageuse. C’était une petite chambre ensoleillée, pour ce qu’elle pouvait voir. Presque épouvantablement mignonne, avec du jaune, du vert et des accents rustiques, comme si elle venait d’entrer dans la maison du printemps lui-même.
Les pensées de Trixie furent interrompues par un petit clapotement. Elle trouva un bol de soupe devant elle. Elle leva les yeux pour voir la pégase sourire tendrement vers elle, elle qui était revenue pendant que Trixie était distraite. Trixie jeta prudemment un œil à la soupe, et se força à se pencher. Elle posa ses lèvres sur le bol et commença à boire. La soupe était si chaude, et si délicieuse.
« Tout va bien. Tu n’as pas besoin de pleurer. »
Trixie arrêta de boire et leva les yeux. « De quoi tu parles ? La Grande et Puissante Trixie ne fait… » Elle sentit un filet d’eau sur son visage. Elle amena un sabot sur ses joues, et il revint mouillé.
« La Grande et Puissante Trixie préférerait manger seule », dit-elle sèchement.
« Tu ne veux pas d’aide pour revenir dans le lit ? »
« Hmph. La Grande et Puissante Trixie est plus que capable de prendre soin d’elle. »
« Oh… d’accord. » Une fois de plus, alors que Trixie attendait un contre-argument, elle avait eu l’approbation en silence du poney. Elle disparut, et même si Trixie ne pouvait pas la voir, elle entendit une porte se fermer.
Seule, Trixie retourna vers sa soupe. Les larmes coulaient et elle n’avait plus la force de les retenir. Cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas mangé, encore plus longtemps depuis qu’elle n’avait pas mangé quelque chose de substantiel. La forêt avait semblé sans fin et plus épaisse à chaque fois qu’elle cherchait une sortie, et pleine de haine pour elle à chaque fois qu’elle cherchait de la nourriture. Il n’y avait pas d’herbe, rien. Les feuilles étaient amères, les baies étaient sans doutes empoisonnés, et ce qui ne l’était pas était d’habitude rare, à part quelques noix ou brins d’herbes. La forêt en elle-même était maléfique ; elle ne l’avait pas seulement affamée, mais aussi mis la peau sur les os, déchiré sa crinière et sa queue, et l’avait menacée à chaque recoin. Alors oui, elle se permettrait de pleurer, juste cette fois.
Elle dévora sa soupe, la gorge endolorie en buvant le chaud breuvage. Elle en but chaque goutte. Son ventre lui faisait mal et elle se sentait ballonnée, mais elle n’échangerait cette sensation pour rien au monde. Elle pensa qu’elle pouvait enfin se remettre sur ses sabots. Elle essaya deux fois avant d’échouer, pensant que la soupe l’avait rendue plus lourde. Elle regarda ses jambes, frustrée, et réalisa qu’elle saignait autour des sabots, là où les branches et échardes l’avaient coupée. Il y avait trop de douleur à sentir à cet instant, de la douleur sourde de ses muscles à la fraîcheur de ses coupures et l’agonie à l’intérieur. Elle avait trop mal pour aller quelque part.
« Euh… toi ici ! Poney ! La Grande et Puissante Trixie demande que tu viennes de suite ! » appela-t-elle, essayant de ramper vers là où elle pensait y trouver la porte. Elle n’entendit aucune réponse.
« Tu m’entends ! Viens !… s’il te plaît ? » supplia-t-elle. Elle entendit la porte s’ouvrir et parvint à voir la pégase s’approcher d’elle.
« Tu as besoin d’aide ? »
Trixie fit la grimace. « La Grande et Puissante Trixie a décidé, dans sa bienveillance infinie, de te demander tes services un peu plus longtemps. Tu es libre de revenir me pomponner. »
« Oh. Tu veux, euh, que je t’aide à te remettre dans le lit ? » demanda la pégase, agissant comme si elle n’avait pas entendu un seul mot de Trixie. Trixie grogna et détourna les yeux.
« … cela serait acceptable », marmonna-t-elle. Elle entendit la pégase trotter autour d’elle et sentit un tapotement sur ses flancs. Elle grimaça.
« Attention ! » cria-t-elle. Elle n’eut aucune réponse, et le poney continuait de la tapoter. Confuse, elle essaya de se relever elle-même, pensant qu’on l’aidait à le faire. Puis elle sentit la tête de l’autre poney aller en-dessous elle. Elle se retrouva mise sur le dos de la pégase, portée comme un sac de grains. La pégase se tourna sur le côté et déposa Trixie sur le dos. La magicienne s’allongea sur le dos, plaçant à nouveau sa tête contre l’oreiller. Elle regarda ses sabots levés en l’air et grimaça.
« Tu peux continuer à me dorloter maintenant », dit-elle à la pégase. L’autre poney acquiesça et reprit ses pinces à épiler.
« D-doucement ! » s’exclama Trixie, se rappelant de la douleur. La ponette jaune ferma ses yeux brièvement et hocha la tête. Trixie trouva le geste humiliant. Elle était… choyée.
« N-ne te fais pas d’idées, espèce de… de ! » Trixie essayait d’être intimidante. « Trixie est toujours grande et puissante ! Si tu avais vécu ce qu’elle a vécue, tu… ah… tu n’aurais même pas survécu ! » Elle bâilla. Le poids sur son estomac commençait à décliner, et le plat avait vidé toute son énergie en commençant à le digérer.
« Tu ferais mieux de dormir », dit la pégase, parvenant à garder les pinces d’un côté de sa bouche tout en parlant. Elle les remit en position et se pencha. Trixie se mordit la lèvre en sentant quelque chose sortir de sa jambe. La pégase soupira et abaissa son outil.
« Hmph, je suis sûre que c’est ce que tu veux. Que la Grande et Puissante Trixie soit à ta… ahhm, merci. » La pégase revint avec une serviette dans sa bouche. Elle commença à nettoyer le sabot de Trixie, et le tissu se retrouva tâché de sang, ainsi que quelque chose de vert. Fluttershy commençait à fredonner quelque chose.
« Qu’est-ce que tu fais ? La Grande et Puissante Trixie ne tombera pas dans ton piège. »
La pégase déposa la serviette et commença à chanter.
« Silence, plus de bruit, il est l’heure de se coucher… »
« Quoi ? Tu chantes ? »
« Silence, plus de bruit, il est l’heure de se reposer… »
« La Grande et… ahmmm… n’est pas une pouliche que tu peux- »
« Dors-bien, laisse le sommeil derrière toi… »
« Stop… ahhm, arrête ça... maintenant… »
« Va te coucher, laisse-le sommeil entrer en toi… »
« Grande et… puissante… mmmmmm. » Les paupières de Trixie se refermèrent, et sa respiration s’adoucit. Elle s’endormit lentement et la pégase attendit de l’entendre ronfler avant de se remettre prudemment au travail.
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