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Discors Consentus

Une fiction écrite par Nochixtlan.

Chapitre 15 : Nightmare Night

Le jour déclinait rapidement, et le soleil couchant baignait les rues d’une lueur mordorée, agrandissant les ombres projetées sur le sol et les murs, comme autant de créatures fugitives lancées aux trousses du commando de récupération médicale.
Loki n’en faisait aucun cas et avait pris la tête du groupe, avantagé par les coussinets de ses pattes qui atténuaient le bruit de ses pas. A chaque angle de rue, il vérifiait que rien ne rôdait dans l’ombre à l’aide de son œil valide et de son odorat surdéveloppé. Lorsque la voie était libre, il traversait en courant, suivi par Harmonie, Rarity et Pinkie qui faisaient de leur mieux pour rester discrètes.
Il leur fit faire des tours et des détours, prenant tantôt à droite, puis à gauche, suivant des rues jusqu’au bout et en quittant d’autres dès le début. Harmonie s’était vite désorientée, n’ayant aucune idée d’où se trouvait l’hôpital dans la mer d’habitations qu’ils traversaient et étriquait leur champ de vision.


- Tu es sûr que c’est le bon chemin ? J’ai l’impression qu’on est complètement perdus…
- Non, mais je sais que nous y sommes presque. L’affaire de deux ou trois rues.
- Tu es sûr de toi ?
- Mais oui. On prend la prochaine à gauche, puis à droite, puis il nous restera plus grand-chose.
- Et si on suivait ce panneau ? Demanda Pinkie en pointant l’objet du sabot, un indicateur à fond vert qui indiquait « Hôpital, 500 m sur la droite ».


Loki fit une moue dépitée. Se ridiculiser ainsi lui donnait des envies de suicide. Sous le regard amusé d’Harmonie et Rarity, le coyote prit à droite en trottinant, préférant se concentrer à nouveau sur d’éventuelles odeurs en suspension dans l’air et des bruits attestant d’une quelconque présence. Mais l’air restait pur et le silence continuait son règne.
Comme le promettait le panneau, le parking de l’hôpital apparut bientôt au bout d’une avenue. Le commando traversa rapidement la surface de bitume, qui accueillait encore quelques voitures aux vitres brisées et aux ailes rayées et enfoncées. Il avait dû se passer quelque chose de terrifiant ici, et de nombreuses traces de sang à proximité des véhicules laissaient planer d’inquiétantes conclusions.

L’hôpital en lui-même était un bâtiment très largement étiré, culminant à une hauteur de quatre étages, et dont chaque chambre était agrémentée d’un balconnet pour le bien-être des patients.
Les portes automatiques de l’entrée avaient été détruites, le cadre en métal défoncé et le verre brisé.
Rarity, grâce à son regard exercé à repérer les plus petits détails, découvrit un maigre indice sur ce qui s’était passé. Sur une pointe de verre encore accrochée au cadre, elle trouva, englués dans une tache de sang séché, une touffe de poils noirs et épais.


- Une idée sur la provenance de ceci ? demanda-t-elle à la cantonade.
- On dirait des poils, fit Loki.
- Merci Captain Obvious, on n’avait pas remarqué, dit Harmonie. Des poils de quoi ?
- J’en sais rien, répondit le coyote en examinant plus attentivement l’objet. Ils sont vraiment très épais, je ne sais vraiment pas de quoi ça peut provenir.
- Quoi que ce soit qui ait laissé ces poils, c’était énorme. Il faut au moins être un ours pour causer un tel carnage, commenta Rarity.
- Il n’y a pas d’ours dans cette région, contra Loki.
- Echappé d’un zoo ou d’un cirque, peut-être ? tenta Harmonie.
- Pas un ours, trancha Loki, catégorique.

Il coupa court au débat en entrant dans le bâtiment, prenant bien garde de ne pas poser les coussinets sur un morceau de verre.
Il régnait à l’intérieur un désordre sans nom. Les sièges de la salle d’attente avaient été renversés, les distributeurs automatiques avaient été éventrés, les registres de l’accueil éparpillés. Le chaos était total.
Les panneaux « sortie » rivés au plafond pendaient misérablement, retenus seulement par leurs câbles d’alimentation. Les murs portaient d’énormes traces d’éraflures, un peu comme si quelqu’un avait raclé la peinture avec une râpe de la taille d’une planche à repasser.
En plusieurs endroits, le sol présentait des creux étranges, des sortes de points d’impact d’un objet extrêmement lourd. Une crainte sourde de ce qui pouvait encore rôder dans l'ombre de la bâtisse gagna le petit commando.


- Sainte Celestia, que s’est-il passé ici ? souffla Rarity.
- Quelqu’un a fait une sacrée fête, on dirait, répondit Pinkie.
- Ca a dû être très amusant, effectivement, grinça Harmonie devant l’étendue du carnage.

Sans mot dire, Loki continua à avancer, tous les sens en éveil. Il se guida à l’aide des panneaux indicateurs, et se dirigea vers le bloc opératoire. S’il y avait le matériel de chirurgie nécessaire à aider Applejack quelque part dans cet hôpital, c’était bien par là.
Une porte à double battant fermait l’accès au couloir du bloc, pour garantir une meilleure stérilité de l’air ambiant. Dès que Loki poussa l’un des battants, il fut assailli par une odeur effroyable. Il eut un mouvement de recul si violent qu’il se coinça la tête entre les battants de la porte d’accès.
Il se dégagea prestement, et secoua la tête en soufflant par les narines pour tenter de se débarrasser de l’odeur.


- Qu’est-ce qui ne va pas ? s’enquit Harmonie.
- Ca pue la charogne là-dedans ! Stérilité de l’environnement de travail mon œil ! Notez le jeu de mot admirable, n’est-ce pas ? Non, sérieusement, il y a un truc qui pourrit là-dedans depuis au moins six semaines. C’est une infection.

Harmonie poussa à son tour un des battants, et ne put réprimer un haut-le-cœur et une grimace de dégoût lorsque le remugle de cadavre en décomposition vint au contact de ses narines.
Le peu d’air infecté qui passa à travers le couvert des portes et qui se porta jusqu’aux poneys les fit tourner de l’œil.
Rarity se couvrit le museau avec son écharpe, et Loki, Harmonie et Pinkie firent de même. L’odeur devint plus supportable, à condition d’avoir l’estomac bien accroché.
Loki pénétra dans le couloir totalement obscur, suivi de sa sœur qui trouva après quelques tâtonnements l’interrupteur qui actionna les lampes au plafond et illumina le couloir.
Le couloir descendait légèrement, et marquait un coude vers la gauche à environ quinze mètres, avant de redescendre. Une cage d’ascenseur se trouvait en bout de couloir, un ascenseur large et caractéristique des hôpitaux.
Là encore, la porte avait été violemment enfoncée et délogée de son support, avant d’être rejetée un peu plus loin. Le commando était de plus en plus inquiet sur ce qui avait bien pu pénétrer dans ce bâtiment.
Ils avancèrent prudemment, continuant à suivre les panneaux, longeant les murs du couloir descendant en prêtant attention aux moindres signes qui auraient pu signifier une présence, l'angoisse montant alors qu'eux même descendaient sur le plan incliné.
Plus ils avançaient, plus l’effluve se faisait fort. Lorsqu’ils parvinrent au niveau du coude, ils aperçurent, à l’extrémité du couloir, de larges traces de sang séché. Loki ne put résister, et, après s’être assuré que rien ne viendrait les troubler dans leur expédition, fila vers les traces, et remonta leur piste.


- Loki, non ! appela Harmonie entre ses dents.


Rien à faire. Le coyote trottinait sur la piste sanglante. Le reste du commando n’eut pas d’autre choix que de le suivre.

- La vache ! Venez voir ça ! appela Loki.

Si elle attrapait le coyote, Harmonie comptait bien en faire une descente de lit. Il ne prenait aucune précaution, et risquait de les faire repérer. La jeune femme ne pouvait sortir de son esprit l'image des murs éraflés et de la porte d'entrée défoncée par une masse considérable, et la peur de rencontrer la créature à l'origine de ce carnage la tenaillait.

Le reste du commando accéléra le pas. L’odeur était presque insoutenable.
Un nuage de mouches fit bientôt son apparition. Leur bourdonnement incessant n’était guère de bonne augure pour Rarity, qui sentait qu’elle n’aimerait pas ce qu’elle allait voir.
Dès qu’elle put jeter un œil à l’intérieur de la salle à l’intérieur de laquelle se trouvait le coyote, elle se détourna et courut vomir tripes et boyaux dans un coin. Son estomac se vida d’un trait, et rien que le souvenir immédiat de ce qu’elle venait de voir lui arracha un second haut-le cœur maladif.
Harmonie était blême, et le goût de la bile lui remontait dans la bouche. Le spectacle qui s’offrait à elle était purement dantesque.
Une grande créature était couchée sur le côté, les entrailles mises à nues. Les côtes avaient été écrasées, et il ne restait du crâne qu’un amas de chair noircie et d’os brisés.
La bête avait été complètement déchiquetée, par une créature d’une violence rare.


- Oh mon Dieu, laissa-t-elle échapper.
- C’est quoi ? fit Pinkie, qui elle aussi avait pâli devant le pestilentiel spectacle.
- C’est bien la question que je me pose, dit calmement Loki. Je n’ai jamais vu de bête comme celle-là. Par contre, j’en ai déjà entendu parler…Ca ne te rappelle rien, Harmonie ?


La jeune femme se força à regarder la créature, malgré le malaise qu’elle lui inspirait.
Elle était énorme, et devait bien atteindre un mètre cinquante au garrot, pour environ quatre de long.
Elle avait un pelage fauve, tirant sur le roux, un poitrail large et des pattes qui avaient apparemment dû déployer une grande puissance du vivant de l’animal. Sa queue était longue, fine, et portait une touffe de poils noirs épais à son extrémité. Une crinière du même genre lui courait le long de l’échine. Il ne faisait plus de doute que les poils qu’avait trouvé Rarity avaient appartenu à cette bête.
Ce qui restait de la gueule du monstre évoquait à Harmonie un canidé, et les oreilles étaient longues et pointues, avec une touffe de poils à leur extrêmité qui leur donnait l’allure de cornes.
Elle avait déjà lu une telle description. Un livre qu’elle-même et Loki avaient lu dans leur jeunesse.
Cette bête était de la même espèce que celle qui avait jadis terrorisé le Gévaudan, celle que le film le Pacte des Loups avait tenté de faire passer pour un lion.

- Elle a bel et bien existé, et doit avoir la même origine que cette bestiole-là, dit Loki. Ca a à voir avec les démons, j’en mettrais ma patte à couper.
- Excuse-moi de te couper dans tes réflexions, Loki, mais je crois qu’on devrait plus se préoccuper non pas de cet animal, mais plutôt de ce qui l’a mis dans un tel état, objecta Rarity, la voix un peu cassée.
- Elle a raison, approuva Harmonie. Tu as vu la manière dont les os ont été broyés ?
- Je ne pense pas que ce qui lui a fait ça soit encore dans le coin. Je n’ai rien senti d’autre.
- Ca m’étonnerait que tu sente autre chose, vu l’odeur de ce machin-là, dit Pinkie.
- Mouais. Possible. Mais je pense quand même pas que ce qui est responsable soit encore dans le coin.
- En tous cas, nous l’espérons, dit Rarity, qui n’avait toujours pas osé se rapprocher de la salle.


- Arrête de regarder, je te dis qu’ils vont bien, Twilight ! maugréa Rainbow. Sinon on aurait déjà entendu des cris.
- Pas à une telle distance. Ca fait bien vingt minutes qu’ils sont là-dedans.
- Ils sont peut êtres perdus, j’en sais rien, moi. Mais il n’y a pas de quoi s’inquiéter.
- Elle a raison, sucre d’orge, renchérit Applejack. Tu pense bien qu’avec Pinkie dans l’équipe, on l’aurait entendu hurler de toute façon. Et Loki devrait être suffisamment doué pour ne pas se perdre, après tout il peut suivre sa propre odeur pour retrouver son chemin. Viens t’asseoir, tu vas prendre froid.

C’était tout Applejack. Toujours à materner tout le monde. Twilight ne bougea pas néanmoins. Elle venait d’apercevoir quelque chose.
Malgré l’obscurité de la nuit, elle était persuadée d’avoir vu une silhouette traverser une rue.
Elle surveilla encore quelques instants, mais ne vit rien de plus. C’était probablement juste un insecte qui était passé dans son champ de vision.
La licorne se détourna et vint s’asseoir à côté d’Applejack, près du feu et de ses amies, dans l’attente du retour des autres.
Elle gardait néanmoins un mauvais pressentiment.


- C’est trop génial, j’ai toujours su que la Bête du Gévaudan existait ! fit Loki en trottinant avec enthousiasme, suivant toujours les panneaux vers le bloc.
- Ce qui serait trop génial, ce serait de trouver le matériel dont on a besoin et de nous tirer d’ici, rétorqua Harmonie en sifflant entre ses dents.

Ils parvinrent à un croisement. Non contents de s’être enfoncés probablement sous terre, le groupe était confronté à un choix : un panneau indiquait d’un côté le bloc opératoire, de l’autre la réserve de la pharmacie.


- Mieux vaut ne pas perdre de temps et faire deux groupes, proposa Rarity. Je ne tiens pas à rester enfermée ici plus longtemps.
- On a pas vraiment le choix. Loki et Rarity, vous allez chercher le matériel de chirurgie, Pinkie, tu viens avec moi.
- Oui, monsieur ! fit le poney rose.
- On se retrouve à la sortie de l’hôpital, OK ? termina Harmonie.
- Compris, dit Loki.

Le groupe se sépara en deux, et chacun partit dans la direction qui lui était assignée.

Comme toujours, Loki ouvrait la marche, partant en avant de Rarity pour vérifier si la voie était libre.


- Loki, tu n’es plus obligé de faire ça, tu sais. Nous ne sommes que deux. Nous courons plus de risques en marchant ainsi éloignés.
- Pas sûr. Comme ça, si quelque chose vient par devant, tu auras plus de temps pour fuir.
- Ne dis pas de bêtise. A ce niveau, s’il y a quoi que ce soit qui vive dans cet endroit, il connaît les lieux bien mieux que nous et attaquera par derrière. Et s’il parvient à m’avoir en silence, tu es fichu. Cesse de jouer les héros.
- Je ne joue pas les héros, protesta le coyote en s’arrêtant afin de laisser Rarity gagner du terrain sur lui et de marcher côte à côte.
- Oh que si. Tel un gentleman, tu marches en avant de la damoiselle effarouchée pour réceptionner les pièges et les dangers à sa place. c’est très galant de ta part, mais aussi un peu stupide. Et avec une conduite pareille, j’imagine que si nous tombions face avec une quelconque créature hostile, tu me dirais de fuir pendant que tu la retarderais.
- Probablement. Mais c’est surtout parce que tu es un poney et moi un coyote. Je pense être capable de courir plus vite et être un poil plus agile. J’aurais de meilleures chances de m’en sortir. Ce n’est pas de l’héroïsme, c’est de la stratégie.
- Si tu le dis. Je reste sceptique tout de même. Et si ta vitesse et ton agilité ne suffisaient pas ? Tu risques de te faire tuer, et je me ferais tuer peu après. Tu serais mort pour rien.
- C’est juste. Mais qu’est-ce qui te prends, tout d’un coup, à te préoccuper de mon sort ?
- Je m’inquiète pour toi, c’est normal. Avec ton attitude actuelle, tu prends des risques inconsidérés, et je ne veux pas qu’il t’arrive autre chose.
- Hé bien, moi qui croyais que tu avais quelque chose contre moi depuis la claque que tu m’as mise…
- Ca n’a rien à voir. Tu avais fait preuve d’une arrogance et d’un irrespect qu’il fallait calmer. Ca m’a outrée.
- Et j’avouerai que c’était bien normal. J’aurais dû te remercier.
- Ne te donne pas cette peine, c’est oublié. Pour revenir à notre sujet précédent, je pense qu’il vaut mieux que tu gardes à l’esprit que les vrais héros ne sont pas ceux qui meurent pour un idéal sur le champ de bataille. Ce sont ceux qui les gagnent, en fuyant un combat perdu pour préparer le suivant, et qui gagnent à chaque fois en expérience et sont à chaque fois plus forts.
- Les morts ont toujours tort, c’est ça que tu veux dire ?
- En un sens, oui. Et les vivants ont de nombreuses histoires à écrire et à raconter.
- Et quelle histoire dois-je écrire ?
- La nôtre, répondit Rarity.
- Pardon ? s’étrangla Loki.
- Celle de notre voyage, et de notre victoire finale sur Discord, enchaîna un peu vite la licorne. Nous devons être plus prudents que ça.
- D’accord.

Ils marchèrent tous deux encore quelques instants, côte à côte dans le couloir aux lumières tremblotantes, à la recherche du local où étaient entreposés les outils chirurgicaux.
Loki goûta ces instants avec délice. Malgré l’angoisse qui lui tenaillait le ventre d’avancer vers l’inconnu et de pouvoir être tué à chaque instant par une quelconque créature née des ténèbres, il éprouvait un intense bonheur de marcher ainsi, seul, côte à côte avec Rarity.
Il n’était pas sûr si les sentiments qu’il nourrissait n’étaient pas nés justement parce qu’il les avait niés un temps, ou parce qu’ils étaient réels. Il ne savait si la possibilité de leur mort à chaque instant les attisait, ou s’ils grandissaient d’eux-mêmes. Toujours était-il que, bien malgré lui – ou à cause de lui-même ? – il était amoureux de la licorne. De sa prestance, de sa beauté, de ses airs de Lady, de sa sagesse toute récemment découverte. Il avait beau se dire qu’elle était un poney et lui un coyote, rien n’y faisait.
Il repensa à Spike, le jeune dragon auquel Rarity et Twilight faisaient souvent allusion. Celui qui avait offert à Rarity le magnifique rubis en forme de cœur qu’elle portait au cou. Rarity ne semblait pas entretenir un amour réel pour le dragon, ou du moins c’est ce qu’en avait conclu Loki en analysant ses propos, les termes employés et le ton sur lequel la licorne discourait. Mais que penserait-il si jamais – mais cela n’arriverait probablement pas – Loki en venait à séduire Rarity ? Ce serait terrible pour lui d’apprendre qu’après un unique voyage, l’objet d’un amour apparemment sans limites offrait son cœur à un autre ?
Et pourtant, Loki ne savait trop que penser. Le lapsus de Rarity avait allumé une étincelle d’espoir dans l’esprit du coyote, ajouté au fait qu’elle ne semblait pas témoigner d’animosité envers lui, contrairement à ce qu’il croyait après avoir essuyé une claque au final parfaitement justifiée.
Loki s’efforça de ne pas trop réfléchir à ce qui pourrait advenir de lui et Rarity. Ils étaient là pour Applejack, pas pour régler des histoires de cœur.
Et il fallait être vigilant. Il avait quelque peu baissé sa garde, et devait se ressaisir.

- Nous y sommes, je crois, dit Rarity.

Une porte à battant hermétique arborait l’étiquette « Accès au bloc opératoire ». Il était probable que les recherches s’arrêtaient ici.
Loki poussa la porte et la tint pour Rarity, qui actionna l’interrupteur afin d’apporter un peu plus de clarté à l’endroit.
La pièce était remplie de meubles abritant sans aucun doute les outils nécessaires, et renfermait également un autoclave utilisé pour stériliser les instruments. Elle s’ouvrait sur le bloc à proprement parler par une seconde porte hermétique au fond de la pièce.


- Bon, c’est parti, dit Loki.


Il ouvrit un tiroir à la volée, et entama la fouille de l’endroit dans un coin de la pièce, tandis que Rarity débutait ses recherches de l’autre côté.



Harmonie et Pinkie marchaient du plus vite qu’elles le pouvaient, espérant arriver rapidement au local de stockage des médicaments. La jeune femme ne voulait vraiment pas rester longtemps dans ce bâtiment, surtout depuis qu’ils avaient tous les quatre découvert le cadavre de la Bête. Le barguest, comme elle avait décidé de l’appeler, en référence aux chiens noirs monstrueux des légendes anglaises. Et si d’autres se trouvaient encore dans le bâtiment ? Ils n’auraient aucune chance de s’en tirer. Ils connaîtraient les lieux, ils seraient plus rapides et plus forts que la jeune femme et Pinkie.


- Ca ne va pas ? s’enquit Pinkie.
- Si, si, tout va bien. Je suis juste un peu inquiète.
- Il ne faut pas. Si on s’inquiète, on ne sera pas assez concentrées pour trouver les médicaments dont on a besoin pour Rainbow Dash, Applejack et Loki.

Harmonie fut presque choquée de cet élan de sagesse venant de la ponette. Elle était pourtant la personne d’ordinaire la plus enjouée et la plus folle qu’elle ait rencontrée, mais la succession de malheurs qui s’était abattue sur le groupe l’avait radicalement transformée, et avait réduit la folie et l’entrain habituels de Pinkie au silence. C’était un nouveau poney auquel la jeune femme avait à faire, bien que la Pinkie ordinaire refasse surface de temps à autres, comme lorsqu’Harmonie avait décidé de séparer le groupe et qu’elle l’avait traitée de « monsieur ». Ce dédoublement de la personnalité n’était qu’une source d’inquiétudes supplémentaire pour Harmonie, bien que sur le moment, elle eût plus la crainte d’être découverte par un barguest.
Elles progressaient toutes deux dans un silence relatif, les sens en éveil, se fiant aux pancartes indicatrices pour s’orienter vers la réserve de médicaments. Il fallait cependant faire vite, et coupler vitesse et discrétion n’était pas simple.
De plus, l'obscurité relative des couloirs, le clignotement des néons du plafond, ainsi que de nombreuses traces d'origine innommable sur les murs mettaient Harmonie dans un profond émoi. La crainte qu'elle ressentait depuis le début de leur expédition dans le bâtiment hospitalier s'amplifiait au fur et à mesure de leur progression. Elle et Pinkie se trouvaient à présent sous terre, dans un environnement sombre, qui rappelait sans trop chercher l'ambiance du film d'horreur Silent Hill.
Si l'enfer existait, c'était probablement ce à quoi il ressemblait, se dit la jeune femme.
Et l'Enfer était peuplé d'horreurs indicibles.

Au bout de quelques minutes, sans avoir croisé une seule trace de vie, elles se trouvèrent devant leur objectif : la porte d’entrée de la réserve pharmaceutique. Harmonie poussa doucement la porte, et alluma les lampes du plafond à l’aide de l’interrupteur situé à quelques centimètres du battant. Avec un léger grésillement, la pièce s’illumina, et fit apparaître des dizaines et des dizaines de rayonnages. C’était un vrai labyrinthe de noms et de catégories qui s’offrit alors au poney et à la jeune femme.


- Merde, souffla cette dernière.

Pinkie se mit sans attendre à la recherche de ce dont elles avaient besoin, se rappelant qu’il leur fallait des sédatifs et des anti-inflammatoires. Se fiant à nouveau à des panneaux, elle scrutait les étagères, espérant trouver un nom de catégorie connu. Harmonie vint la seconder rapidement, et passa en revue les lignes et les colonnes, tentant de trouver aussi vite que possible le matériel nécessaire.
Au bout de plusieurs minutes de recherche, Harmonie et Pinkie avaient fini par remplir le sac que portait Harmonie de médicaments en tous genre, estimant qu’ils pouvaient être utiles sans toutefois trop en connaître les effets.


- Harmonie, il y avait du feu quand on est entrées ? demanda Pinkie.
- Non, pourquoi ?
- J’en sais trop rien…

Harmonie suivit le regard de Pinkie, et s’aperçut qu’une fumée d’un noir d’encre et d’une épaisse comme de la poix montait à l’autre bout de la pièce, en roulant sur les murs.


- Qu’est-ce que c’est que ça ?

La source commença à bouger, en même temps qu’une épouvantable odeur de soufre assaillait les sinus de Pinkie et Harmonie. L'instinct de la jeune femme lui hurlait de décamper à toute vitesse.


- Pinkie, tu sais courir ? demanda Harmonie.
- Oui, répondit nerveusement le poney.
- C’est le moment où jamais ! cria Harmonie en piquant un sprint vers la sortie.

Pinkie se mit à détaler aussi vite qu’elle put, dépassant Harmonie, sans savoir ce qu’elles fuyaient. Elle jeta un coup d’œil par-dessus son épaule.
Une ombre énorme venait d’arriver au niveau de l’angle du mur. Une fumée vaporeuse se déversait en volutes sur le sol et dans les airs. La chose se tourna, et deux yeux rouges apparurent. Pinkie put discerner dans la fumée un corps gigantesque, simien, hérissé de pointes le long de l’échine et des épaules, et présentant une musculature aussi monstrueuse que surdéveloppée. La tête portait une longue paire de cornes qui jaillissaient du front de la créature. Une longue queue fine fouettait l’air derrière le monstre, et des pieds aux sabots fendus martelaient le sol tandis qu’il avançait. En comparant avec la hauteur des étalages, le poney put estimer la hauteur de la bête à plus de trois mètres.
La chose s’élança aux trousses des deux fuyardes, en poussant un rugissement venu des entrailles de la terre qui fit trembler les murs. L’intérieur de sa gueule rougeoyait comme de la lave, et le contraste entre cette gueule flamboyante et la silhouette d’encre mit au jour des crocs surdéveloppés comme des défenses de sanglier.
Elle courait d’une manière vaguement simiesque, mais sa taille lui permettait d’atteindre une vitesse suffisante pour gagner du terrain sur Pinkie et Harmonie. Elle s’engouffra dans le couloir en s’aplatissant un peu, se mettant à ramper. Elle perdit de la vitesse, mais atteignait tout de même une célérité menaçante.
Pinkie et Harmonie prenaient autant de coudes que possible, mais la bête continuait à les talonner. Ses cornes rayaient le plafond, et les profondes éraflures sur les murs qu’Harmonie avait repérées plus tôt étaient causées par des pointes osseuses qui jaillissaient des bras hypertrophiés de la bête.
Si c’était bien cette chose qui avait massacré le barguest, elle était tout à fait capable d’avoir décimé le personnel de l’hôpital et les habitants de la ville.
Et il y avait fort à parier qu’elle aurait raison d’elles deux.


Une fois les bandages, le crochet et le fil de suture dans le sac de Rarity, le duo sortit lentement de la pièce, Loki vérifiant que la voie était libre.
Il passa la tête par l’entrebâillement de la porte, et vérifia que rien ne s’aventurait dans le couloir. La voie était libre.
Il sortit, tenant la porte pour Rarity et veillant à ce qu’elle se referme sans bruit. Instinctivement, il repéra les cachettes qui s’offraient à eux dans le couloir. Peu avant le croisement, une cage d’ascenseur vide pouvait offrir une protection efficace. Il n’avait pas fait le repérage plus tôt, tout occupé qu’il était à discuter avec Rarity.
Ils avancèrent discrètement, longeant les murs. Au croisement, Loki vérifia à nouveau si la voie était libre.
A gauche, rien.
A droite, une Bête humait l’air à la recherche d’une proie.
Loki ne put réprimer un juron. Il fit volte-face et plongea dans la cage d’ascenseur, entraînant Rarity avec lui, qui avait à peine eu le temps de voir la bête au bout du couloir adjacent.
Le couloir étant relativement sombre à cause de lampes défectueuse, la cage était par conséquent dans le noir complet. Ils étaient totalement hors de vue.
La bête avait entendu le bruit de leur retraite précipitée. Elle avança vers le couloir que venaient de quitter le coyote et la licorne en faisant cliqueter ses griffes sur le lino. Elle reniflait bruyamment, afin de pister ses proies.
Loki craignait qu’elle ne les repère. Malgré cela, la bête se contenta de se poster au croisement, et de continuer à renifler l’air. Il remarqua alors qu’une puanteur effroyable régnait dans leur cachette à lui et Rarity. Tant mieux, cela masquerait leur propre odeur, et ils restaient invisibles aux yeux du prédateur.
Les murs tremblèrent sous l’effet d’un violent bruit de basses. La bête gronda, et fit demi-tour en faisant monter un grognement sourd de ses entrailles. Elle trotta dans la direction opposée de celle où elle était arrivée.
Loki s’accrocha au bord de la cage d’ascenseur, et observa le départ de la bête. Il entendit Rarity bouger derrière lui, et un faible craquement résonna dans l’air.


- Qu’est-ce que… fit Rarity.

Elle fit luire l’extrémité de sa corne, afin de voir sur quoi elle avait marché, et poussa un cri aigu.

- Rarity, qu’est-ce…

La bête avait entendu le cri de détresse de la licorne et était revenue sur ses pas, au croisement. Elle humait l’air plus fort, et dressait les oreilles pour s’orienter.
Rarity respirait très vite, en sifflant à chaque inspiration. Elle était en proie à une panique sans nom, et s’était plaquée autant qu’elle le pouvait contre une paroi, près de Loki. La bête au dehors faisait pivoter ses oreilles afin de capter au mieux la provenance du son, sentant la panique qui émanait de ses proies, et persuadée d’obtenir un repas facile. Elle retroussa les babines, et des gouttes de salive tombèrent de sa gueule aux crocs meurtriers.
Loki commençait à paniquer lui aussi. Si la licorne ne se calmait pas, la Bête allait sauter dans cette cage d’escalier et les massacrer tous les deux sans possibilité d’échappatoire. Son rythme cardiaque s’accéléra, et il ne savait plus comment réagir.


- Rarity, calme-toi, chuchota-t-il en prenant à tâtons le visage de Rarity entre ses pattes. Calme-toi, je t’en supplie !


Rien à faire, Rarity était de plus en plus apeurée, et Loki devenait à son tour de plus en plus nerveux. La panique embrumait son esprit, et il était incapable de prendre une décision cohérente. Il entendait la bête approcher, grondant sous l’excitation de sa capture toute proche.
Et Rarity qui commençait à sangloter nerveusement…
Sans réfléchir, Loki se pencha sur la licorne et colla ses lèvres sur les siennes.
Après un faible cri de surprise, Rarity se laissa faire, et se calma un peu. Loki se détendit également, et libéra Rarity, avant de la prendre dans ses bras et de la serrer contre lui. Rarity lui rendit son étreinte, et ils attendirent ainsi que la bête les trouve et referme ses mâchoires sur eux.

- AU SECOURS !! cria la voix aigüe de Pinkie, non loin.

Alors que la bête était presque penchée sur le couple, recroquevillé dans un coin de la cage d’ascenseur comme deux renards apeurés, elle marqua un temps d’hésitation. Elle tourna la tête, et vit Pinkie et Harmonie débouler à l’autre bout du couloir. Elle se planta au milieu de leur trajectoire, prête à leur sauter à la gorge.
Lorsqu’elle vit la créature de ténèbres aux yeux et à la gueule flamboyante surgir à l’autre bout du couloir, elle s’écarta et poussa un long hurlement guttural. Pinkie et Harmonie dépassèrent la bête et la cage d’ascenseur où se trouvaient Loki et Rarity, et le monstre d’ombre bifurqua pour acculer la Bête du Gévaudan. Sans prêter attention à la cage d’ascenseur, le monstre se rua sur le canidé et lui coupa toute retraite. Celui-ci eut beau aboyer et grogner autant qu’il le pouvait, il était condamné. Le monstre tendit une main énorme et saisit la bête, avant de la porter à sa gueule et de lui ouvrir le poitrail d’un coup de dents, dans un craquement d’os et un gémissement de douleur.
Loki et Rarity profitèrent de cette faible diversion pour bondir hors de leur trou et s’élancer à la suite d’Harmonie et Pinkie, tentant de trouver la sortie de l’hôpital en se fiant aux panneaux indicateurs.
Le démon ténébreux ne tarda pas à s’élancer à nouveau sur leurs traces. De toute évidence, il ne cherchait pas à se nourrir, mais juste à tuer. A tuer, démembrer, massacrer.

Loki et Rarity coururent à en perdre haleine. Les hurlements et grognements du démon qui les talonnait, rampant à une vitesse alarmante, ainsi que la terreur qu'il engendrait leur donnaient des ailes. Il parvinrent rapidement à retrouver la sortie de l’hôpital, et se ruèrent au-dehors. Harmonie et Pinkie s’étaient immobilisées contre un mur, près de l’entrée. Le couple ne comprit pas instantanément, mais les imita rapidement, préférant se fier instinctivement à leur expérience de quelques secondes auparavant. La situation ne laissait plus de place à la réflexion.
Le démon de ténèbres bondit hors du bâtiment comme un diable d’une boîte. Il fouetta l’air de sa queue avec colère, cherchant autour de lui où ses proies avaient disparu.
Soudain, un barguest surgit de derrière une voiture, et se jeta sur le monstre. Il planta ses crocs dans son épaule gauche, et s’arrima à l’aide de ses griffes sur le corps de son adversaire.
Quatre autres barguests embusqués apparurent, et sautèrent sur le monstre. L’un d’eux planta ses crocs démesurés dans ce qui devait être la gorge du démon, qui poussa un rugissement terrifiant. Il frappa le bras gauche sur un mur de la bâtisse, fracassant les vertèbres de la bête sur la surface bétonnée et la tuant sur le coup. Il saisit de son bras désormais libre le barguest qui se pendait à son cou, et serra la nuque de la bête jusqu’à ce qu’un craquement d’os n’annonce la mort de la créature, qui retomba sur le sol comme une poupée de chiffons, sous le regard horrifié des poneys, de la jeune femme et du coyote.
La force impie du démon était une menace des plus terrifiantes. Il fallait fuir, ou mourir. Encore.

Loki s’élança à travers le parking, filant comme une flèche. D’autres barguests arrivaient continuellement, et Loki évitait les mâchoires meurtrières de ceux qui essayaient de les refermer sur sa nuque dans leur course vers le démon pour venir en aide aux leurs.
Rarity, Pinkie et Harmonie tentèrent d’imiter le coyote, mais leur groupe faisait une cible nettement plus intéressante pour les prédateurs. Pendant que le gros de la meute affrontait le démon qui broyait les canidés et les démembrait tant qu’ils arrivaient, trois barguests encerclèrent les fuyards.
Harmonie tenta d’encocher une flèche, mais la première bête lui sauta à la gorge avant qu’elle ait pu positionner son projectile. Elle fut plaquée au sol, et tenta vainement de se protéger des mâchoires de la bête en plaçant son bras entre sa gorge et les dents de la créature, dans un réflexe purement instinctif, dicté par la panique. Les dents labourèrent la chair fine de son poignet, lui faisant pousser un cri de douleur. Avec sa main libre, elle saisit le couteau qui pendait à sa ceinture, le planta sous le menton de la créature, et le fit descendre le long de la trachée, s’éclaboussant de sang. Elle parvint à repousser le corps de la bête agonisante sur le côté, au prix d'un violent effort.
Le second barguest bondit vers Rarity. Pinkie dévia les crocs meurtriers d’un coup de sabots, tandis que la licorne tirait une flèche du carquois d’Harmonie et l’enfonçait aussi violemment qu’elle le pouvait dans la gorge du prédateur. Un grognement noyé accompagné par un flot de sang sortit des entrailles du monstre. Il s’éloigna de quelque pas, avant de s’effondrer sur le côté.
Le troisième, voyant que deux de ses semblables avaient été massacrés en un rien de temps, prit la fuite sans demander son reste.
Rarity et Pinkie aidèrent Harmonie à se relever dans l’urgence, et elles rejoignirent Loki qui était revenu sur ses pas pour leur prêter main-forte. Le commando à nouveau complet prit la fuite et remonta vers les collines, vers la relative sécurité qu’offrait le campement.
Loki s’assura qu’aucun barguest ne les suivait, et indiqua qu’ils pouvaient ralentir l’allure.
Ils stoppèrent leur course, et observèrent le combat qui faisait rage entre les barguests et le démon ténébreux, tentant de reprendre leur souffle et de ramener leur rythme cardiaque à la normale.
Le démon avait déplacé la ligne de front, et s’était replié à l’intérieur du bâtiment. Les barguests accusaient cinq morts de leur côté, mais n’abandonnaient pourtant pas le combat. Ils continuaient de lancer des aboiements menaçants, et évitaient de temps à autres les projectiles lancés par le monstre. Plusieurs d’entre eux firent le tour du bâtiment, cherchant une entrée par laquelle se glisser pour surprendre le monstre. Quoi qu’il en fut, le combat se déroulerait à l’abri des regards, et le commando reprit sa course vers le campement, heureux de s'être éloigné de cette ville maudite et hantée d'horreurs mortelles.

Harmonie serrait son poignet meurtri tandis qu’elle courait, espérant limiter les pertes de sang, sans grand espoir. En un sens, elle était heureuse d’être entrée dans cet hôpital, car elle n’aurait probablement pas survécu à une telle blessure, et aurait pu entraîner le trépas d’Applejack en requérant des soins dont le poney avait dramatiquement besoin.

La nuit était tombée depuis longtemps. La progression était par conséquent plus difficile, les obstacles au sol rendus invisibles par la noirceur de la nuit. Mais la lumière lointaine du feu guidait le petit commando, qui regagna enfin le camp malgré plusieurs chutes d’Harmonie qui trébuchait sur des cailloux ou des racines sèches apparentes. Elle en avait plus qu'assez, de la douleur, d'avoir peur. Elle voulait s'allonger dans sa tente, et dormir en espérant que tout cela n'était qu'un mauvais rêve.
Comme chaque soir.

Pendant le reste du trajet, un silence tendu s'installa entre Loki et Rarity, qui faisaient tout pour éviter de croiser le regard de l'autre, et le cherchaient en même temps. Ils marchaient chacun à l'opposé du petit groupe, mettant Harmonie et Pinkie entre eux, et pourtant essayaient continuellement de s'observer l'un l'autre. Heureusement, Harmonie était bien trop occupée à regarder le sol, afin d'éviter une mauvaise chute, pour observer leur petit manège, et Pinkie n'y prêtait aucune attention.
Twilight vint accueillir les héros du jour, et s’horrifia sur-le-champ de voir Harmonie couverte de sang et le poignet en lambeaux. Elle la força à s’asseoir près du feu, et demanda à Rarity de lui faire un bandage.
La licorne ouvrit son sac et en tira le matériel nécessaire, puis s’assit à côté d’Harmonie. Pendant ce temps, Pinkie alla s’installer à côté d’Applejack pour s’assurer qu’elle allait toujours bien, ce à quoi le poney de ferme répondit qu’elle accusait une forte fatigue, mais que, dans l’ensemble, elle allait bien.
Loki s’empara du réchaud, et entreprit de faire bouillir de l’eau, avant de faire bouillir le crochet de suture auquel Twilight avait déjà noué le fil de nylon qui servirait à maintenir la plaie d’Applejack fermée.
Après avoir bandé la plaie d’Harmonie, Rarity défit le bandage d’Applejack et nettoya la plaie, avant de s’atteler à la couture. Elle s’efforça de supporter la vue des chairs à vif de son amie, et d’ignorer ses tressaillements de douleur lorsque le crochet pénétrait la peau. Elle tenta de s’imaginer qu’elle cousait un simple morceau de tissu, comme elle l’avait si souvent fait.
Applejack serrait les dents autant qu’elle le pouvait, et tentait de paraître détendue devant les regards inquiets de ses amis.


- Vous en faites pas, ça ira mieux après, assura-t-elle, son semblant de sourire déformé en un rictus douloureux.

- Sinon, comment ça a été en bas ? demanda Rainbow Dash. On a entendu le bestiau brailler un grand coup, alors on a été voir, et ça a pas mal dérouillé, pas vrai ?
- C’était purement horrible, répondit Harmonie. Je ne sais pas ce qu’était ce monstre, ni ce que sont ces espèces de bêtes poilues.
- Je t’ai dit, c’est la Bête du Gévaudan ! se répéta Loki.
- Dis pas de bêtises, le calma sa sœur.
- Aucune idée non plus, je ne les ai pas vues de près, ajouta Twilight.
- Je te parie mon œil gauche que ce sont des chiens qui ont été déformés par les énergies démoniaques, comme les raptors de l’autre jour. Ca expliquerait pourquoi il y en avait autant et pourquoi ils étaient en pleine ville.
- Arrête, avec ton œil ! réprimanda Harmonie.
- Mieux vaut en rire qu’en pleurer, rétorqua Loki.
- Et cette grande chose noire ? demanda Twilight. Vous savez ce que c’est ?
- Sûrement un démon, répondit la jeune femme. Il sentait le soufre à plein nez, et avait vraiment une allure démoniaque, avec des sabots fendus aux pieds par exemple. Et il était planqué loin des rayons du soleil.
- Vous avez bien dû vous marrer! J'aurais bien aimé être en état d'aller dérouiller ce machin. Un bon coup dans le nez, comme avec le dragon près de Poneyville… glissa Rainbow.
- Tu peux t'estimer heureuse de ne pas nous avoir accompagné, lâcha Rarity avec dureté. On était loin de se "marrer", comme tu dis.
- Maintenant que j’y pense, il y avait quoi dans cette cage d’ascenseur qui t’as fait hurler, Rarity ?
La licorne mit son ouvrage sur le bras d’Applejack en pause, et expliqua en bafouillant un peu :
- Je...j’ai marché sur quelque chose qui a craqué, tu l’as entendu. Et quand j’ai éclairé pour vérifier ce que c’était, il y avait… un visage, à moitié dévoré, qui me regardait. Il y avait deux ou trois corps je crois, alors...j’ai paniqué.
- Je vois, fit Loki, laissant un silence gêné s'installer. D’où l’odeur, reprit-il avant que trop de questions ne se posent devant la gêne apparente de Rarity et du coyote. Je suis désolé de pas avoir trouvé meilleure planque.
- Ce n’est pas grave, c’était la meilleure du couloir. Mais…ça fait un choc, souffla Rarity, avant de pousser un profond soupir pour évacuer le stress renaissant et de reprendre la suture de la plaie de son amie.
- Je comprends, assura Loki.
- Ca a dû être vraiment terrifiant, osa Fluttershy.
- et encore, tu n’étais pas là pour voir les espèces de loups se battre avec le démon, renchérit Pinkie. Ca, ça faisait peur.
- Vraiment ? s’effraya Fluttershy.
- Ho oui. Je t’épargne les détails.
- Et sinon… côté médicaments, ça a été ? s’enquit Twilight, essayant de chasser les mauvaises pensées qui flottaient autour de chacun.
- Oui, impeccable, on devrait avoir tout ce qu’il nous faut, répondit Harmonie. En parlant de ça, on devrait faire la distribution, ajouta-t-elle en farfouillant dans son sac, et en tirant les boîtes de panacée une à une.


Twilight sentit quelque chose d’étrange. Elle s’avança vers Harmonie, et sa sensation se fit plus forte.
Elle sentait une énergie familière… une énergie qui lui rappela la maison, Equestria, Canterlot, la Princesse Celestia… une énergie qu’elle connaissait bien, mais qu’elle ne parvenait pas à identifier clairement.
Elle ne fit aucun cas de l’air étonné de la jeune femme, et lui intima de ne pas bouger. La licorne promena sa corne au-dessus d’Harmonie, cherchant la source de cette énergie inconnue et pourtant familière.
Elle s’arrêta au-dessus du poignet de l’étudiante. C’était là que se trouvait la plus forte trace d’énergie.
Dans le sang de la jeune femme.

- Tu… tu as quelque chose de bizarre dans le sang, informa Twilight. Une énergie étrange, que je connais. Rarity, essaie, toi.

Rarity acheva la suture du bras d’Applejack, coupa le fil et vint placer sa corne au-dessus de la plaie.

- Effectivement, il y a quelque chose. Mais de là à dire quoi, je donne ma langue au chat.
- Ca a quelque chose à voir avec Equestria, j’en suis certaine, affirma Twilight. Mais quoi ?
- Holà, je t’arrête tout de suite, je suis née sur Terre, et je suis une humaine. Je ne peux pas avoir de rapport avec Equestria.
- Et pourtant tu es née le soir même où tes parents m’ont trouvé, dit Loki. Et je ne viens pas de ce monde-ci, j’en suis certain.
- Ca ne veut rien dire, Loki…
- Peut-être que si, démentit Twilight. Si un portail s’est ouvert depuis le monde d’origine de Loki à ta naissance, il est possible que tu aie intégré des énergies de ce mode. Et si ce monde est Equestria…
- C’est impossible. Cela voudrait dire que j’ai une connexion avec Equestria. Pourtant, je l’aurais vue pendant nos régressions, n’est-ce pas Loki ?
- Oui, comme je l’ai fait. C’est étrange.
- Très étrange, confirma Twilight. Je vais plancher un peu sur la question pendant la nuit, je pense. Je ne peux pas me tromper sur un ressenti d’énergie.

Et pourtant, Harmonie doutait de cela. Quel lien pouvait-elle avoir avec Equestria ?
Et la lumière se fit dans son esprit.
Le lien avec Equestria existait bel et bien. La difficulté était de l’expliquer.
Car qu’elle le veuille ou non, elle était intimement liée à Discord.

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Note de l'auteur

Je suis nul en romance.

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