Il est en ce monde des lieux dont la magnificence nous leurre ; des lieux dont la beauté transcendantale corrompt l’esprit et muselle la raison ; des lieux chargés d’une force émotionnelle telle que nul, en leur sein, ne serait capable d’accepter la vérité universelle dictant l’inévitable déréliction qui guette, telle une ineffable épée de Damoclès, le moindre objet extrait de la Création.
La salle du trône de Canterlot est de ces endroits qui paraissent immortels ; représentation tangible de la sagesse et de l’harmonie, elle est pour tout sujet d’Equestria le phare éternel qui, même aux heures des plus sombres périls, restera à jamais inaltéré et ralliera dans son éclatante lumière ceux qui se sont perdus dans les ténèbres.
Et pourtant, en cet instant fatidique, il ne s’agissait plus que d’une ruine. Pire : d’un champ de bataille.
De nombreux trous et éclats se distinguaient sur la majorité des murs, souillant la noble pierre de la corruption des combats, laissant les moellons auparavant parfaitement ajustés disloqués et branlants. Parfois encore, et même si l’affrontement touchait dorénavant à son terme, on pouvait voir et entendre des pans s’effondrer sèchement en un bruit de torrent rocailleux, vaincus tant par les chocs répétés que par l’inexorable attrait de la gravité. Les larges dalles de marbre laiteux aux veines carmins constituant le sol étaient elles aussi fendillées en des motifs fractals disharmonieux, brisant l’harmonie ignée par leur virulente complexité chaotique, et les tapis et tapisseries étaient désormais soit calcinés, soit grossièrement déchirés. Les tentures martyrisées pendouillaient ainsi mollement, doucement ballotées au rythme d’une brise malséante, brise qui s’était impudemment invitée en ce lieu sacré après que les gracieux vitraux eussent tous ensemble été soufflés par une seule attaque d’envergure.
C’était là un spectacle désolant, l’incarnation d’une ruine incognoscible à la force évocatrice terrassante, à même de briser jusqu’au cœur le plus endurci pour quiconque vivait sous la bannière des Deux Sœurs.
Ce blasphème fait à ce lieu n’étant pourtant qu’un commencement, un avant-goût de l’insondable ignominie qu’elle recelait car cette souillure avait aussi frappé les deux déesses à la pureté virginale qui y siégeaient. Celestia et Luna étaient toutes deux au sol, le corps meurtri, traversé par de multiples contusions et des blessures profondes autrement plus inquiétantes. De ces dernières ruisselait un sang écarlate brillant tel de nobles rubis et jurant fortement au milieu de la ruine environnante ; même à terre et défaites, leur essence paraissait encore étinceler de leur grandeur divine.
Leurs cornes étaient toutes deux noircies, fendillées, et les ailes de la princesse Luna étaient brûlées, méconnaissables ; l’un des membres dorsaux de l’alicorne solaire se trouvait quant à lui coincé dans un angle sans aucun doute non-naturel, et très certainement source d’inconcevables douleurs. La cadette au pelage à la couleur de nuit gisait inconsciente, finalement terrassée par les vicieux coups qui lui avaient été portés et Celestia reposait sur elle, les pattes avant ceintes autour du corps inconscient de la Sélène monarque dans une attitude de protection sororale sans aucun doute dérisoire.
La princesse d’albâtre était toujours alerte, les yeux levés vers sa Némésis, figés dans une brûlante expression de défi. Si ce regard pouvait paraître inébranlable, un examen plus poussé laissait cependant voir de discrets spasmes agiter fugacement ses paupières, symptôme incontrôlable des souffrances intolérables qui parcouraient jusqu’au moindre recoin de son corps, lui interdisant tout mouvement.
L’Ennemi lui jeta un bref coup d’œil dédaigneux et se détourna rapidement d’elle, puis il partit dans un rire profond et grave qui fit vibrer la salle entière, jusqu’à ses massifs piliers. Cette lamentable résistance, au lieu de distiller en lui un quelconque doute, ne faisait que rendre sa victoire plus éclatante.
Le marbre, au contact de ses sabots engoncés dans de lourdes protections d’acier, fondait et bouillonnait, comme si l’infamie de cet être était telle que la noble roche se montrait incapable de soutenir sa présence. Une chape d’ombre paraissait entourer l’abominable licorne et l’air se distordait autour de lui, l’habillant d’une aura d’irréalité aussi terrifiante que pertinente : jamais, et ce dans nul univers existant, n’aurait dû apparaître un être aussi abject que le roi Sombra, et sans doute le monde lui-même le repoussait, cherchant vainement à le vomir hors de ce plan de la réalité.
Sa crinière éthérée de la couleur ténébreuse des plus profonds abîmes s’agitait avec haine, griffant en permanence les alentours de ses extrémités vaporeuses ; l’on aurait dit qu’une conscience propre et furieuse l’habitait. A cela s’ajoutait une odeur fétide caractéristique : celle vomitive produite par une charogne laissée à baigner dans un reliquat d’eau saumâtre et stagnante sous un soleil brûlant ; sans aucun doute provenait-elle de la cape moisie d’hermine et de satin qu’il portait sur son encolure, souvenir putréfié de ce qui avait été un noble habit et désormais chargé des insupportables odeurs de carnage que son possesseur n’avait fait que disséminer au cours des siècles.
Il se reprit à nouveau à pousser son terrible rire et le son de l’effondrement de gravats vint l’accompagner, roulant avec lui alors que les vibrations sourdes finissaient d’achever les liens fragiles qui unissaient encore les pans meurtris des murs et des colonnades. Puis, une fois cette exultation terminée, il se concentra vers les six corps qui flottaient autour de lui, piégés dans une gangue de magie noire d’une couleur améthyste iridescente et figés dans une posture de souffrance infinie.
C’était ainsi qu’allaient finir les six porteuses des éléments de l’Harmonie ; elles qui durant tout ce temps avait été si fières de la puissance que leur avait offert l’arbre de l’Harmonie payaient désormais le prix de leur suffisance. L’affrontement avait été puéril et grotesque ; ce qui avait commencé comme un face à face traditionnel s’était rapidement transformé en une méprisable partie de cache-cache lorsque ces pouliches se rendirent finalement compte de leur impuissance face à ce qu’était le véritable pouvoir : celui des arcanes obscures héritées de ténébreuses et antiques civilisations, dont le souvenir avait depuis longtemps disparu face à l’incoercible érosion du temps ; un savoir blasphématoire initialement formé dans les profondeurs d’inconcevables et innommables dimensions, et auxquels seuls les véritables élus, ceux qui dédient jusqu’à la plus infime parcelle de leurs âmes aux Ténèbres, peuvent avoir accès. Soulignant ce fait, la corne de Sombra était incandescente, fumante ; à ce point chargée d’énergie maléfique qu’elle prenait une teinte rouge brûlante traversée de veines d’un blanc et d’un jaune étincelant ; même un corps à ce point dévolu à l’obscurité ne pouvait contenir entièrement cette puissance chtonienne.
Il observait ainsi, triomphant, celles qui allaient devenir le prochain jouet de ses tourments et de ses fantaisies les plus vicieuses et outrageantes. Elles étaient toutes pitoyables, vulgaires sacs de chair dont la pathétique fierté s’était immédiatement envolée au moment où leurs esprits infantiles avaient réalisé leur incommensurable faiblesse.
L’un de ces êtres, cependant, détonnait du lot ; elle continuait vainement d’essayer de se dégager de cette prison occulte pour se lancer à nouveau à la gorge de la licorne, et ce en dépit des échecs manifestes de ses précédentes tentatives ainsi que des souffrances innommables qui en avait résulté. Le roi Sombra plongea ses yeux d’un rouge infernal, d’un vert malade et d’un noir d’oubli, ceints de terrifiants braseros violacés nauséeux, dans ceux magentas de la jument et n’eut en retour une expression de défi à ce point farouche qu’elle en tenait presque de la démence ; même brisée, terrassée et acculée, elle refusait ne serait-ce que d’envisager l’idée de la défaite.
L’être démoniaque, incarnation de l’ignominie la plus perfide, eut alors un sourire profondément malsain, glaçant le sang de l’ensemble des autres juments présentes. Il s’approcha doucement de la pégase cyan, qui continuait quant à elle ses inutiles tentatives d’évasion, et posa lentement l’un de ses sabots avant sous le menton de la captive, faisant ainsi roussir les poils situés à son contact et à proximité immédiate. La délicate peau de prisonnière tremblota violemment, non en raison de la douleur mais à cause de la révulsion viscérale que ne pouvait que provoquer un tel toucher.
Alors, et de sa voix de stentor, du même son grave, pesant et rocailleux que celui d’une éruption sous-marine, il prononça lentement cette unique phrase qui roula en une vague d’horreur sur l’assemblée :
« Qu’est qu’un roi sans sa reine ? »
Toutes les juments tressaillirent, comme sous le coup d’une douleur encore plus atroce que toutes celles qui avaient précédé. Le corps de Luna lui-même, alors que l’alicorne se trouvait toujours plongée dans un état proche du coma, se recroquevilla face à l’abomination qui venait d’être proférée en ce lieu. Cela avait été l’élément de trop. Sombra, inique licorne concupiscente, pantin des forces des ténèbres les plus sombres, au cœur aussi aride et noir que les déserts d’onyx inlassablement battus par les vents au sommet de montagnes oubliées, venait désormais d’atteindre les tréfonds de l’infamie. A cet instant, le cœur de chaque poney vivant à travers le pays se serra ; tous se retrouvèrent traversé par une terrible une appréhension prémonitoire qui sautait à une vitesse inimaginable d’individu en individu, résultante de l’intense lien qui les unissait autour des Deux Sœurs.
Ainsi, bien que la vilénie tant que la perfidie du ténébreux roi fussent telles qu’elles en étaient devenues légendaires, à même de faire trembler tant le poulain que le soldat le plus endurci, il était désormais nécessaire d’ajouter une nouvelle horreur à un palmarès qui se distinguait pourtant déjà par son atrocité infernale.
D’ici peu, tous allaient découvrir avec terreur et révulsion que le roi Sombra, abjecte injure faite à Equestria et à l’univers entier, être vil et corrompu qui jamais n’aurait dû apparaître dans une quelconque dimension, était nanti en plus de son long cortège d’indignités d’une expression orale absolument déplorable.
L’horreur ne faisait que commencer pour le peuple équin.
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Foutus conformistes, ils ne comprendrons jamais! *s'envole aux côtés de Brocco dans une spatule volante propulsée par un moteur fonctionnant à l'uranium et au pastis*
Le texte est lourd, c'est sûr et c'est fait exprès. Je suis sûr que si tu nous avais pondu une fic avec une telle fin et en gardant le même style, tu aurais atteint sans doute les 100/200K mots.
Et ce serais génial. Tout y est, les descriptions (peut être un peu trop mais chapeau quand même), les dialogues ( oh wait) et surtout ce registre soutenu et de la peur que tu nous sort tout droit de l'espace :O
Tu es le meilleur, hands down!
Je vais décidément m'intéresser à tes autres fics.
Keep up the good work bro!
En effet, cette fiction peut paraître étrange car techniquement, il ne s’agit pas d’une histoire mais plutôt d’une situation ; je suis simplement parti de la phrase bancale de Sombra pour brosser autour, en exagérant jusqu’à la limite pour créer ce contrepied final. En fait, il s’agissait plus d’un exercice de style visant à déterminer jusqu’où il était possible d’aller en lourdeur sans tomber dans l’imbuvable. Comme vous l’avez tous fait remarquer, c’était juste et il ne fallait pas aller plus loin.
Après, je comprends totalement que pour certains, cela puisse donner l’impression d’y aller franco, sans le moindre préliminaire ni même un petit bonjour. D’un autre côté, tout cela a l’air bien trop classique pour mériter un réel approfondissement (même si j’ai dorénavant envie d’écrire sur Sombra).
@Especiel : Si tu te souviens d’où sont ces erreurs, ça m’intéresserais de les connaître afin de pouvoir effectuer une correction.
@Toropicana : Héhé, quand je planifie mes retours en Europe, j’essaye de joindre l’utile à l’agréable. Bon, si je t’avais croisé, je ne sais pas si je t’aurais reconnu (Toro ? Ici ?) mais il est vrai que ce genre de fest devient vite onéreux quand on manque de moyens. Bon, ce n’est rien à côté d’un certain festival qui se déroule à Clisson… En tout cas, si un jour tu as l’occasion d’y faire un tour, n’hésite pas. Malgré quelques défauts, le Motocultor est un excellent fest.
C'est court, niveau scénario, il n'y a rien, mais la richesse du vocabulaire et les descriptions complètes sans être assomantes rééquilibrent largement la donne. Sûr, ça aurait été trèèès lourd de suivre un texte comme ça sur un chapitre plus long voire même plusieurs chapitres, mais là, 1600 mots, c'est la bonne taille pour un texte de ce genre. À lire !
Je plussoie quelques point avec Toropicana, je ne comprend pas comment s'en est arrivé là, les descriptions faites dans la fic me paraissent incomplète, seulement bouchées par un vocabulaire extraordinaire X))
Personnellement ma première impression est positive si je ne m’assomme pas avec le poids du texte à lire, j'ai cru que j'allais asphyxier xD
J'ai aussi remarquer quelques phrases étrangement tourné, avec faute ou pas et des répétition bizarre. Fait pour ou étourderie de l'auteur, nous ne sauront sans doute jamais xD
Bravo, moi je suis soufflé par la richesse du texte ^^
Bon sinon c'était pas mal, ultra lourd à lire mais bien écrit. Après quand je pense qu'on m'a reproché d'y aller trop vite avec mon Sombra à moi, maintenant t ça me fait bien rire que certain n'hésite pas à foncer carrément dans le tas avec le méchant vraiment violent sans préparer un plan d'attaque. C'est pour ça que le tag WTF est là ?
T'étais au Motocultor ? Putain ! J'étais à deux doigt d'y aller si j'avais pas eu mon souci financier, sachant que j'y habite à 20km... :(