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Là où tout a commencé

Une fiction écrite par Plénitude.

Beginning and End

En ce beau matin, trois poneys se baladaient dans un endroit des plus inhabituels, la forêt Everfree. S’il était un lieu de cauchemar et de terreur en tout Equestria, si l’on faisait abstraction du Tartare, c’était bien ces bois odieux. Cependant, Trixie, Derpy et sa petite pouliche Dinkie ne semblaient pas plus inquiètes que cela. Leurs sabots émettant un son feutré sur la terre recouverte d’humus sombre, elles se dirigeaient vers les anciennes ruines du château des deux Princesses. Trixie riait encore en voyant le petit visage émerveillé de la fille de son amie lorsqu’elle avait annoncé qu’elle avait quelque chose à y faire. La petite licorne mauve avait eu de grands yeux scintillants d’excitation et il n’y eut pas longtemps à attendre avant qu’elle ne sautille gaiement autour de sa pégase de mère en répétant “S’il te plaît” inlassablement, ce à quoi Derpy avait répondu par un petit rire avant d’accepter la requête en serrant la petite fille entre ses sabots. Trixie ne l’avouerait sans doute jamais mais des scènes comme ça lui réchauffaient le coeur. Le flot de ses pensées fut interrompu par un petit cri d’émerveillement.

 

“Regardez ! C’est le château des Princesses !”

 

En effet, face au trio, se dressaient les murs délabrés de ce qui avait été jadis le centre de l’attention de tout un peuple. Alors qu’elles se dirigeaient vers la lourde porte de bois, Derpy déclara :

 

“L’Everfree est devenu bien plus calme depuis que l’arbre d’Harmonie a regagné ses pouvoirs. Avant ça, ce château était lugubre…”

 

“C’est vrai. L’arbre protège à nouveau la forêt donc ce n’est pas étonnant que l’endroit soit moins hostile.” Trixie regarda au delà des frondaisons et ajouta. “Même le soleil arrive à filtrer à travers les arbres maintenant.”

 

“Dinky, attends-nous ma chérie !” dit la pégase en se mettant à la poursuite de sa petite fille qui, excitée comme une puce et ennuyée par la discussion, s’était mise en tête d’entrer dans le château la première. “Désolé Trixie. On se retrouve plus tard.”

 

La jeune maman tenta donc de rattraper à tire d’ailes Dinky avant de disparaître dans le château. Trixie leur souhaita une bonne exploration en riant, puis se dirigea vers la bibliothèque royale. Son mentor lui avait dit qu’elle trouverait sans doute des informations sur l’étrange coffret que leur avait offert l’arbre d’Harmonie. Cependant, après plusieurs visites infructueuses, Trixie s’était demandé si elle ne perdait pas son temps… jusqu’à sa dernière visite. Hier soir, alors qu’elle parcourait les rayons interminables et recouverts de poussière de la bibliothèque, elle avait par mégarde actionné un mécanisme secret. Elle avait alors découvert une salle ronde où trônait, seul, un large ouvrage à la couverture intacte, comme s’il venait d’être relié. Cependant, Trixie avait senti qu’il dégageait une aura magique impressionnante. Curieuse, elle avait alors déverrouillé le lourd livre sans trop de difficulté. Elle n’était pas la Grande et Puissante Trixie Lulamoon, élève émérite de la Princesse Luna, pour rien.

 

Ce qu’elle y avait découvert l’avait laissé sans voix. Il s’agissait du journal intime des Princesses. Enfin “Journal Intime” n’était pas le bon terme. C’était un recueil d’évènements écrits de façon désordonnés à l’encre orange et à l’encre bleue narrant les frasques de la vie de Coro… de Célestia et Luna au fil des ans. Blagues, escapades, moments de joie et de dispute, le livre en était rempli. C’était d’ailleurs assez ennuyeux pour elle. Même s’il s’agissait d’un objet de valeur pour son mentor, cela ne le rendait pas particulièrement palpitant. Malgré cela, ou peut-être à cause de cela, elle avait continué sa lecture et avait incidemment remarqué que l’encre orange cédait peu à peu sa place au bleu. Les thèmes abordés étaient également moins réjouissants. Ce changement important avait ravivé sa curiosité et elle avait été absorbée par la description du ressenti de Luna sur les ravages que causait Corona… mais alors qu’elle s’approchait de la fameuse bataille finale, Trixie remarqua que toutes les autres pages étaient aussi noires que l’encre et transpiraient de magie. Fatiguée et frustrée, elle était rentrée chez elle, bien déterminée à lire la suite.

 

Et aujourd’hui, elle se tenait là, le livre à ses sabots, ouvert à la première page noire. Elle se doutait qu’il s’agissait là d’un passage que Luna ne voulait pas qu’on lise et elle aurait dû respecter le choix de son mentor mais sa soif de connaissances et sa fierté l’empêchait de refuser le challenge. Rejetant sa cape si singulière en arrière dans un geste théâtral pour un public invisible, elle fit luire sa corne d’un halo violet avant de projeter un petit éclair de la même couleur vers les pages qui lui voilaient la suite de l’Histoire. Le livre lui-même riposta avec un éclair bleuté qui frappa son homologue violet pour débuter une lutte magique.

 

Trixie sentait que même si le sort était ancien et affaibli par les ans, il se défendait suffisamment bien pour la faire transpirer, ses paupières closes se crispant sous l’intense concentration que la dissipation du sort lui demandait. Lorsqu’elle sentit que le livre avait le dessus, un sentiment désagréable de frustration se forma en elle… sentiment dont elle se servit avantageusement, son orgueil et son refus d’abandonner lui donnant l’énergie suffisante pour vaincre la décharge bleutée… La tête lui tournait mais elle avait vaincu.

 

“La grande et Puissante Trrrrrixie réussit une fois de plus !” dit-elle en s’inclinant théâtralement.

 

Interrompant un moment le flot de satisfaction qui la faisait agir de façon aussi ridicule, Trixie regarda le livre avec un petit air supérieur avant de se rendre compte que seule la première page n’était plus noire. Au lieu de cela, quatre lignes d’une encre luisante trônaient au centre de celle-ci. La licorne bleue se mit à lire à voix haute, un sourcil relevé face à l’étrangeté de la chose :

 

Ceci est le testament de mes adieux,

Aux sentiments honnis que provoque l’Histoire.

C’est de la royauté dont j’ai prononcé les voeux.

Que repose ici ce que je ne veux plus voir.

 

A ces mots, les pages sombres luirent avec un éclat aveuglant et Trixie, dont les yeux brillaient pareillement, pu lire la suite de l’Histoire.

 

******

 

Ce fut le son des rires et des chants enveloppant la base précaire des derniers résistants au règne sans partage de Corona qui réveilla l’alicorne de la Nuit d’une de ses rares siestes. Le soleil brûlant de sa soeur n’avait pas quitté le ciel depuis des jours et les terres verdoyantes d’Equestria avaient peu à peu pris le jaune vomitif de la sécheresse réduisant les plantes à des versions squelettiques et grotesques de ce qu’elles avaient jadis été et affectant de façon importante le mental de ses étalons. Il n’y avait qu’ici, sur un terrain ne devant pas excéder la centaine de kilomètres carré, que des nuages salvateurs se trouvaient afin d’occulter les rayons mordants et ainsi protéger de l'assommoir de la chaleur les troupes hétéroclites de la Princesse Luna. Elle avait employé sa magie ainsi que celle, naturelle, de l’Everfree Forest pour garder ses troupes fraîches.

 

Sortant de sa tente sommaire, elle jeta un regard sur son campement. Des tentes carrées d’un blanc sale s’organisaient sur plusieurs rangées entrecoupées d’espaces laissés pour permettre aux poneys de manger dans des sortes de mess improvisés. Luna soupira tristement, ses nerfs avaient été mis à rude épreuve ces derniers jours et ses trop rares périodes de sommeil étaient infestées de cauchemars. Elle ne voulait même pas se regarder dans un miroir ne sachant que trop bien ce qu’elle y verrait, une jument à la crinière bleutée totalement lisse et au regard fatigué… Elle s’étira sommairement mais s’interrompit un instant, surprise par un rire qu’elle ne connaissait que trop bien. Se retournant rapidement, elle se retrouva face à face avec… Sen, le prince Vadras et capitaine de sa garde personnelle. Un pelage sombre et des ailes de cuir rappelant celles des chauve-souris vampires. Le bel équidé possédait un fort trait distinctif, des yeux aux pupilles verticales et aux iris violets, une couleur qui était marque de la royauté chez les siens. Revêtu d’une armure complète recouvrant l’intégralité du corps, elle protégeait des sabots à la nuque en laissant suffisamment d’espace pour les libres mouvements des ailes, sur le bord desquelles se trouvaient les typiques Laminas, de fines lames aussi tranchantes qu’un rasoir. Cela le rendait presque intimidant. En effet, il aurait été véritablement intimidant sans cette manie absurde d’avoir une tige d’herbe dans la bouche. Cela lui donnait un air détaché selon lui.

 

“C’est un trop rare plaisir que de surprendre une beauté au réveil. Je ne te vois pas souvent la crinière lisse en dehors du privé.” ajouta t-il avec un petit sourire.

 

Elle rougit momentanément, fit luire sa corne et prononça quelques mots à voix basse, provoquant un changement radical dans sa crinière qui passa d’un bleu calme et à l’aspect lisse, à l’allure brillante et évanescente qui était la marque de son rang. Sen rit doucement et ajouta en regardant dans la direction des chants.

 

“Il semblerait que Pyro et Écho animent encore la soirée… Tu veux qu’on y fasse un tour ?” dit-il en posant un regard concerné sur l’alicorne. “Les troupes ont besoin de te voir et tu as besoin de te vider le crâne. Et puis, voir tes deux élèves faire leur numéro est toujours marrant, tu ne trouves pas, Selena ?”

 

“Et bien, il est rare que tu m’appelles ainsi en dehors du privé, capitaine de la garde Senestrim Regalia.” répondit elle avec un petit air provocateur, le sourire retrouvé, tiquant toujours lorsqu’on l’appelait par son nom de naissance.

 

“D’accord, d’accord. Ma langue a fourché, mais ne m’appelle plus comme ça, c’est tellement pompeux comme nom.” dit-il en levant ses yeux reptiliens au ciel.

 

Ils se dirigèrent en riant vers la source du vacarme et purent voir assembler autour d’une grande table de bois des poneys de tous les horizons. Pégases, licornes, poneys terrestres et vadras, tous hilares devant le spectacle ridicule de deux licornes qui, jouant sur la table, employaient leurs magies pour mettre en image des histoires allant des blagues grivoises les plus évidentes à d’autres acadabrantesques et dont la logique ridicule ne faisaient qu’ajouter à l’ambiance festive. Les licornes carmin et céruléenne repérèrent Luna dans l’audience et vinrent se téléporter près d’elle, provoquant la surprise d’abord puis l’hilarité à nouveau lorsqu’ils se mirent à parler à un débit d’enfer:

 

“Mon frère, que penses-tu de notre Princesse adorée ?” dit la licorne carmin.

 

“Et bien, ma soeur, elle est magnifique.” répondit son homologue céruléen.

 

“Tu veux l’honorer ?”

 

“Evidemment, elle me donne la tri…” commença-t-il avant de se faire magiquement jeter contre la table, la tête en bas par sa soeur, la corne plantée dans le bois superficiellement.

 

“Il semblerait qu’il en soit tout retourné.” dit-elle avec énergie avant de rejoindre son frère pour poursuivre leur numéro enthousiaste.

 

Luna et Sen apprécièrent le spectacle pendant quelques temps. A une époque, elle aurait trouvé cela étrange de voir des soldats rire et s’amuser à la veille d’une bataille et les aurait, sans doute, accuser de prendre à la légère les combats à venir et de mésestimer leurs adversaires. Mais maintenant, après tant de combats, après tant de luttes, elle comprenait à quel point des moments comme ceci étaient précieux et utiles. Nombreux furent ceux qui avaient péri lorsque Corona avaient pris les rênes du pouvoir, finissant brûler au dernier degré, réduits à l’état de cendres ou tuer par ses serviteurs magiques. Luna se doutait que la sécheresse et la famine avait dû frapper plusieurs endroits et que son peuple souffraient des jeux sadiques de sa soeur qui voulait sa fin. Mais en cet instant, elle oublia tous ses soucis pour se joindre au chant et aux éclats de rire et elle fut même étonnée de voir son général et ami, l’imposant et mortellement sérieux poney terrestre Buckler, se joindre aux festivités, lui d’habitude si strict. Quelque part, elle se demandait si ce n’était pas un peu inquiétant.

 

Plus tard ce jour-là, sans doute en fin de soirée mais qui aurait pu le savoir lorsque le soleil était aussi fixe que les étoiles dans le ciel, elle ainsi que Sen, Pyro, Écho et Buckler se retrouvèrent dans sa tente pour finaliser leur plan pour le lendemain. Ils étaient tous en armure sauf les deux licornes qui étaient vêtues de capes éclatantes. Leurs regards étaient fixés sur la Princesse de la Nuit. Buckler, dans son armure d’or de général, brisa le lourd silence de sa voix grave.

 

“Princesse, d’après nos informations, Corona nous attaquera demain matin… Même si je ne comprends pas pourquoi elle n’a pas décidé de nous écraser alors que nous nous regroupions, ce repos est tout ce qu’il fallait à vos troupes pour regagner le moral et des forces. Cependant, le problème reste le même, nous possédons une centaine de licornes capables de nous défendre des projectiles mais nous manquons nous-même de force à distance. Envoyer les pégases et les poneys terrestres au combat sans savoir ce que Corona invoquera demain serait de la folie.”

 

“Au moins aussi fou que Corona, cette dégénérée s’amuse à se savoir gagnante dans l’affaire et ça la rend arrogante.” déclara Sen. “La seule solution est de rester sur une position défensive et laisser les licornes protéger au mieux nos troupes. Tant que Miss Feu-au-cul ne nous attaque pas directement, les boucliers devraient tenir et peu importe ce qu’elle invoquera, ce sera forcé de venir au contact.” Il émit un petit rire et dit en levant le sabot autour duquel un bracelet de cristal bleu se trouvait. “Et là nos troupes pourront faire le ménage.”

 

“Le ménage ?” dit Buckler en haussant un sourcil, le visage imperturbable. “Prince Senestrim, le but de l’opération n’est pas de vaincre les armées de Corona, si la Princesse arrive à la vaincre et à la purifier, les armées disparaîtront d’elles-même. Nous devons simplement faire diversion et user sa magie… Votre père enverra-t-il des troupes comme promis ?”

 

“Je vous ai déjà dit de ne pas m’appeler comme ça, Buckler… Mais oui, mon père malgré le fait qu’il me déteste au dernier degré devrait honorer sa promesse. Si je peux bien lui accorder quelque chose, c’est le fait que ce vieux fou est la personne la plus honorable que j’ai pu rencontré.”

 

“Fort bien. Princesse, êtes vous certaine de pouvoir la purifier ?” Le regard du poney en armure dorée était confiant et demandait simplement confirmation.

 

Elle prit alors la parole pour la première fois dans la soirée. Se raclant la gorge, le regard droit elle observa chaque membre de l’assemblée et dit avec une voix évoquant la noblesse.

 

“Mon plan n’est pas le plus sûr, je le conçois. Mais je sais que je peux ramener ma soeur à la raison, dussé-je employer les éléments d’Harmonie pour cela. Tout est prêt et je sais qu’elle tombera dans le piège. Son arrogance depuis qu’elle est devenu Corona a été manifeste.” Elle se tourna vers Sen et dit “Respecte ta part du plan, laisse ton second gérer les vadras durant la bataille.” Puis vers Buckler. “Nous avons besoin que vous empêchiez les troupes d’interférer avec mon combat contre Corona, ces créations ne devraient pas m’attaquer tant que vous tenez la ligne.”

 

Buckler frappa le torse de son armure d’or en signe d’assentiment. Le prince quant à lui se contenta de sourire et de hôcher la tête. Soudain, les deux élèves de Luna firent entendre leurs voix.

 

“Maîtresse, vous semblez avoir oublié…” commença Pyro, la licorne au pelage rouge.

 

“... que Corona peut également invoquer des mastodontes…” poursuivit Écho.

 

“... et que nos boucliers ne tiendraient pas face à ces terribles monstres…” continua Pyro.

 

“... Ma soeur et moi pouvons cependant faire en sorte de tenir la ligne…”

 

Leurs regards étaient sérieux mais leurs sourires désamorçaient la tension. Ils ajoutèrent de concert, rejetant leurs capes en arrière dans un claquement théâtral. :

 

“Notre mentor saura prendre la bonne décision.”

 

“Espérons que nous n’aurons pas à en arriver là.”

 

Ils s’inclinèrent ensemble et lui souhaitèrent la bonne nuit, suivit de près par un Buckler qui observait avec une gravité certaine les deux licornes mais Buckler avait toujours un regard grave, aussi n’était-ce sans doute qu’une impression. Senestrim et Luna restèrent seuls dans la tente. Il s’approcha d’elle et, sans dire un mot vint frotter sa nuque contre la sienne dans un geste d’affection, ils restèrent ainsi quelques minutes et Luna murmura doucement.

 

“Je pense que nous devrions aller dormir… Nous devons être prêt à la recevoir.”

 

“Comme tu le souhaites, Selena. Nous sommes tous avec toi, les troupes et moi.”

 

“J’ai de la chance, je crois, de pouvoir compter sur vous.”

 

“Tu crois ? Et moi qui pensait que tu étais sûre.” la taquina-t-il.

 

Elle sourit et le poussa gentiment du bout du sabot, causant un petit son métallique. Il comprit le message et la laissa seule dans sa tente. Elle se dirigea vers son lit et s’y allongea avec un petit soupir de satisfaction, elle ferma les yeux et appela silencieusement celle qui partageait sa vie depuis l’enfance. Une de ses plus précieuses amies. Elle se représenta mentalement un grand espace vide, du blanc à perte de vue, et c’est dans cette espace qu’elle apparut.

 

“Oui, Selena ?” demanda une grande jument noire au casque d’argent et aux yeux de nuit.

 

“Oh, Nighty…” répondit Luna en serrant mentalement la jument entre ses sabots, en larmes. “Pourquoi est-ce que c’est moi qui doit m’en charger ? Pourquoi est-ce que c’est moi qui doit vaincre ‘Tia ? Pourquoi est-ce qu’ils se sont tous tournés vers moi ? Pourquoi moi ?”

 

Les portes étaient ouvertes et l’inquiétude, le stress intérieur de Luna se déversaient. Elle avait réussi à faire forte figure devant tous mais lorsque l’on creusait suffisamment loin… Elle était désemparée, elle avait vu sa soeur lentement céder face à la folie sans rien pouvoir faire pour l’empêcher, la voir devenir l’ombre d’elle-même, assoiffée de pouvoir et désirant l’écarter du pouvoir au point de vouloir la… Elle ne put finir cette pensée. Comment pouvait-elle se retourner contre sa soeur ? Était-elle supposée mettre de côté tous ces jours de bonheur ? N’avait-elle pas le droit de refuser ?

 

“Tu ne peux pas faire cela. Tous se sont tournés vers toi car tu es l’incarnation de tout ce en quoi ils croient, une juste dirigeante proche des siens et les défendant contre la cruauté. Tu es forte, Selena, et c’est pour ça que tu n’as pas le droit de faiblir… Tel est le fardeau de la royauté. Gouverner de façon juste et aimante est extrêmement dur. Utopique pourrait-on dire. Et si c’est seule que tu dois affronter tes peurs, tu peux toujours compter sur ceux qui croient en toi et t’aiment. Je ne prendrai pas ta place pour combattre Célestia… mais je te protégerai. Repose-toi, Selena, puisses-tu avoir un sommeil sans rêves.”

 

L’espace blanc fut bientôt englouti dans le noir alors que la Princesse de la Nuit se laissait vaincre par la fatigue, son corps comme son esprit cherchant la paix.

 

***********

 

Le lendemain matin, à ce qui devait être l’aurore, des centaines de poneys en armure attendaient en cohortes. Tous raclaient et tapaient nerveusement le sol du sabot, le son du métal perturbant le silence. Buckler, à la tête des terrestres et des pégases, se tenait fièrement à leur tête, son partisan luisant de magie contre son flanc. Le vent soufflait silencieusement dans sa crinière sombre et son regard se posa sur les licornes en première ligne parmi lesquelles se trouvaient Pyro et Écho, impressionnants dans leurs tenues de magiciens, se démarquant de l’armure d’argent de tous les soldats. Pégases et Vadras portaient un bracelet bleuté tandis que les lances des terrestres formaient une forêt impénétrable.

 

Soudain, troublant le calme mortel, une figure solennelle attira l’attention de tous. Ils avaient déjà vu leur Princesse revêtir l’armure de combat mais en cet instant, elle avait dépassé la notion de noblesse et était désormais la vivante représentation d’une déesse en Equestria. Sa nébuleuse crinière était un univers et elle était le héraut de la Justice. La déesse dépassa les licornes et se retrouva seule, à la lisière entre l’ombre et la lumière, entre le royaume de Corona et celui, libre, de Luna. Ce fut d’une voix de stentor qu’elle déclara au monde emplie de lumière :

 

“Corona, vile dictatrice d’Equestria. Nous, Luna, véritable dirigeant d’Equestria et de son peuple, te sommons de cesser tes jeux futiles et de venir nous affronter. Tous refusent ton joug et que l’Harmonie Nous en soit témoin, Nous réduirons la farce qu’est ton règne en poussière que le vent du Temps emportera pour ne jamais rester en mémoire ! Corona, pitoyable créature, montre toi ou abandonne le trône que tu as obtenu par la fourberie, la violence et la terreur pour ne jamais reparaître en Equestria !”

 

L’écho de ses mots résonna longtemps et alors que celui-ci semblait lentement mourir dans l’infini. Le soleil se fit plus brillant et plus chaud et une lumière éclatante aveugla un instant les armées lunaires puis le sol trembla alors que le soleil semblait avoir heurté la terre… Lorsque Luna ouvrit les yeux à nouveau, elle vit une figure trop connue se dresser au loin devant elle. Une grande jument blanche portant une armure noire et or et dont la cutie mark en forme de soleil n’était que trop reconnaissable. Le rire emplie de dédain qui résonna alors dans la vallée frappa Luna comme un marteau mais elle n’en laissa rien paraître.

 

“Vile dictatrice ? Pitoyable créature ? Ô ma soeur, comme tu es hilarante. Je n’avais jamais entendu pareilles moqueries depuis nos quatre ans. Et ce “nous” royal que tu emploies est d’un désuet, tu devrais vraiment penser à autre chose.” Elle rit à nouveau. “Mes chers sujets, voulez-vous vraiment m’affronter ? Vous savez tous que vous ne pouvez me vaincre, je suis le Soleil, déesse incontestée. Je pardonnerai à tous ceux qui quitteront le combat futile de ma soeur ici présente. Vous n’avez pas besoin de deux dirigeantes ! Mes très chers sujets, toute cette douleur est-elle vraiment nécessaire ? Implorez mon pardon et je vous l’accorderai… Si vous décidez de m’affronter…” Elle gloussa. “Et bien, disons que les cendres n’ont aucun regret.”

 

Un certain trouble agita les rangs de l’armée lunaire. Maintenant que Corona était là en tenue de combat dans toute sa puissance divine, le doute et la peur commençaient à les ronger. Le son de métal s’accentua alors que les troupes transpiraient. Soudainement, une voix grave s’éleva dans les airs :

 

“Soldats lunaires, quel est votre réponse ?”

 

Tous observèrent le général en armure d’or qui venait de prendre la parole et virent son courage, cette vision frappa les troupes et Luna demanda à son tour.

 

“Soldats, donnez votre réponse !”

 

Le ton était emplie d’une confiance et d’une autorité absolue. En réponse, les terrestres pointèrent leurs lances vers Corona dans un ensemble parfait, le scintillement magique de leurs armes défiant l’alicorne solaire. Pyro et Echo se mirent à rire.

 

“Licornes, Pégases, Vadras, votre réponse est attendue. Laisserez vous des terrestres vous volez la vedette ?” dirent ils ensemble.

 

Les licornes sourirent et leurs cornes luisaient, créant une multitude de boucliers violets reflétant les flammes de la crinière et la queue de Corona. Dans un bruit d’ailes se déployant, les poneys ailés décollèrent du sol, tendirent chacun la patte portant le bracelet bleue et hurlèrent ensemble en concentrant la magie de leurs corps en ce seul endroit.

 

“Lames !”

 

Tous les bracelets scintillèrent et, comme ordonnée, des lames magiques bleutées aussi grande qu’une patte de pégase jaillirent des cristaux créant une large lumière bleue nuit qui venait se disputer à la lumière jaune du soleil. Toutes les troupes observaient avec hostilité le tyran et se préparait à l’affronter, elle et ses troupes encore à venir.

 

“Voilà leur réponse, pitoyable Corona. Nous t’avions prévenue. Ton règne de tyran s’arrête aujourd’hui !” déclara Luna, dont la voix semblait plus forte maintenant que des centaines de poneys avaient réaffirmés leurs dévotions.

 

Corona resta un instant surprise, la mâchoire légèrement ouverte. Comment pouvaient-ils la défier ? Elle, la déesse suprême et absolue de tout Equestria, l’incarnation du soleil, celle qui donnait la vie et la faisait prospérer ou au contraire la réduisait en cendres aussi fines que le sable… COMMENT POUVAIENT-ILS ?

 

L’alicorne se mit à rire mais ce rire-ci n’avait aucun dédain, aucun mépris. C’était de la folie et de la haine, rien de plus.

 

“Moi, un Tyran ? Lulu, ma petite Lulu… Je ne mérite pas ce titre… C’est un titre qui lui revient de droit !” dit-elle alors qu’elle concentrait sa magie dans sa corne, provoquant une onde de choc sous l’impossibilité de la concentration et du pouvoir qu’elle employait.

 

Lentement, des fils de lumière et de flamme se réunirent en une forme complexe et imposante. Luna observait sans comprendre la phrase de sa soeur. Elle hurla à ses troupes de se tenir prêtes et de ne pas craindre l’apparence de ses créations. Lorsqu’elle refocalisa son attention sur la créature, ses yeux se figèrent… Sa soeur était devenue folle...

 

Au milieu des plaines brûlées se tenait, dans toute son immensité, une créature colossale faites d’écailles et de piques. Sa queue aussi épaisse qu’une dizaines de troncs d’arbres fouettait l’air avec violence et ses yeux aux pupilles verticales étaient aussi noirs que les abysses. Comme pour annoncer sa naissance, l’invocation cracha une gerbe de flammes bleues en direction du ciel et déploya ses puissantes ailes. L’alicorne blanche vint doucement caresser le reptile dans une farce d’affection, son regard braqué sur les armées de sa soeur avec un petit sourire.

 

“Lulu, mes très chers parjures, je ne vous présente pas votre ancien seigneur et maître, Tirek le Tyran.” dit-elle avant d’éclater de rire, à peine secouée par l’emploi phénoménal d’énergie. Tisserande de mort, elle fit apparaître également de nombreuses autres créatures cauchemardesques faites de lumières et de flammes. Harpies, manticores, hydres, catoblépas…

 

Luna sentit une vague de peur parcourir le coeur de ses troupes. Tirek, dragon cruel, ancien oppresseur qu’elle et sa soeur avaient vaincu il y a fort longtemps se trouvait devant eux. Bien qu’il s’agisse d’une création, il lui ressemblait en tout point et c’était tout ce dont avait besoin sa soeur. Un tel mastodonte arriverait à bout de leurs défense... Alors que Luna se remettait de sa surprise, deux licornes passèrent devant elle et les mots qu’elle entendit alors… elle aurait préféré ne jamais les entendre.

 

“Il est temps pour vous, mentor…” commença Pyro.

 

“... de nous donner l’ordre.” termina Écho.

 

Luna les observa sans comprendre et fit non de la tête. Elle savait qu’elle ne pouvait pas accepter la suite. Elle avait sous-estimé le poids de la situation… Le rire de Corona résonnait dans le lointain et elle cracha son ordre avec une voix qui fit trembler les pierres même.

 

“Anéantissez-les, mes mignons. Hérétiques et parjures doivent brûler !”

 

Meuglements, hurlements, crissements lui répondirent… et ils chargèrent, le terrible tyran en première ligne, traversant les airs avec célérité, ses yeux de prédateur fixant Luna avec un but très clair.

 

“Donnez-nous l’ordre !” répèterent-ils avec colère alors que les troupes lumineuses s’approchaient en masse guidées par le simili Tirek.

 

Luna fut secoué par cette différence de ton et ce fut suffisant pour qu’elle se reprenne. Elle dirigea son sabot caparaçonnée vers les armées solaires et elle prononça les mots suivants avec toute la force du monde pour cacher sa détresse.

 

“Pyro, Écho, je vous ordonne de tenir la ligne par tous les moyens possibles !”

 

Frère et soeur soupirèrent de soulagement, leurs regards s'adoucirent et ils dégrafèrent leurs capes et se débarrassèrent de leurs chapeaux qui avaient été leurs uniformes d’élève.

 

“A vos ordres, Mentor.” dirent-ils en choeur.

 

Les élèves de la Princesse sortirent de leurs capes deux petites sphères faites d’un cristal noir. Ils sourirent et avant d’exécuter le dernier ordre, se livrèrent à une dernière excentricité.

 

“Ma soeur, il est l’heure du requiem…”

 

“Mon frère, je crois que nous lui avons fait de la peine…”

 

“Rattrapons nous alors et offrons lui un dernier rappel.”

 

“Cela me paraît un minimum, surtout pour elle.”

 

“Le rôle d’un élève est d’apprendre…” déclara à voix haute la licorne céruléenne en direction des monstres.

 

“Le rôle du comédien est de divertir…” poursuivit son homologue sanguin.

 

“Dernière leçon, dernière représentation… Le rôle d’un ami est de protéger !” conclurent-ils sans peur.

 

Ils avalèrent tous deux les étranges sphères et firent luire leurs cornes, faisant ainsi courir la magie dans leurs veines. Comme deux gloutons, les cristaux noirs se nourrirent de magie, du sang et de l’énergie et crûrent. S’insinuant avec une rapidité impressionnante dans les artères et dans le coeur des étranges poneys, elles crûrent tant et si bien qu’elles recouvrirent leurs pelages comme une armure avant de continuer à grandir et donner naissance à deux titans. Noirs, bipèdes, deux brasiers rouges en guise d’yeux, des béhémots jumeaux se dressaient en lieu et place des deux élèves. Luna tentait d’empêcher ses pattes de trembler… Son regard ne se détachait pas des deux masses adamantines qui avaient été ses amis. Silhouette immobile sur son promontoire, ses yeux s’embuèrent un instant et, elle n’en fut pas certaine mais elle crut voir les deux géants lui sourirent avant de se jeter dans une charge défensive contre le dragon de lumière. Elle se débarrassa de l’eau qui lui masquait la vision, sa résolution revenue. Elle n’avait pour le moment pas de larmes à verser. Elle prit son essor et lança une décharge magique vers une Corona hilare. Est-ce que c’était la futilité du sacrifice qui causait cet éclat ? Elle se servit de la colère que cette possibilité générait pour augmenter l’intensité de l’attaque.

 

“Corona !”

 

Les ailes de flammes de l’alicorne blanche se déployèrent et elle se mit à la poursuite de sa soeur. Son rire accompagnait chacune de ses actions comme un spectre railleur. Luna attaqua à nouveau, esquivant les traits brûlants de son adversaire qui venaient réduire en cendres les arbres et les plantes. Tels deux anges de l’aube et du crépuscule, les deux soeurs ennemies s’affrontaient au dessus de l’Everfree Forest, le choc de leurs rayons faisant trembler le champ de bataille à chaque tir.

 

“Tu penses pouvoir me vaincre avec aussi peu de pouvoir, petite soeur ? J’ai toujours été plus puissante que toi même sans mes pouvoirs actuels. Penses-tu vraiment avoir la moindre chance ?”

 

Corona ponctua sa phrase en créant de petits globes lumineux aussi brûlant qu’une fournaise qu’elle projeta à une vitesse ahurissante sur le corps de sa soeur honnie. L’impact des sphères sur son pelage la fit hurler de douleur et son vol fut moins assurée. Prise par une décharge d’adrénaline, Luna riposta. Les nuages se mirent à tourner au dessus de leurs têtes et finirent par les entourer alors qu’un cyclone ravageur se formait, déracinant les arbres comme s’il avait s’agit de mauvaises herbes et les emportaient dans le mur infranchissable d’air et d’eau.

 

“Un combat dans l’oeil du cyclone ? Je vois que tu as amélioré tes goûts, petite soeur !” hurla Corona pour couvrir le vacarme de la destruction.

 

Elle projeta ses ailes de flammes en avant, créant ainsi une mer de flammes à chaque battement que l’alicorne nuit esquivait avec peine, son aile droite la faisant souffrir. Luna devait changer de stratégie… Elle chargea donc sa soeur de front et la percuta brutalement, les faisant toutes deux tomber dans le cyclone pour se faire balloter comme des feuilles mortes.

 

Corona avait perdu de vue son agaçante petite traîtresse de soeur et ce jeu n’avait durer que trop longtemps. Concentrant ses pouvoirs démesurés, elle provoqua une violente onde de choc autour d’elle annihilant en un instant le colossal cyclone et éclaircissant le ciel de ses nuages noirs. Tous les déchets de la forêt retombèrent avec fracas sur le sol désolé. Corona observa de façon frénétique les alentours. Où pouvait bien se trouver sa soeur ? Un reflet du soleil dorénavant visible sur une armure le lui indiqua.

 

“Ne sommes-nous pas nostalgique ?” dit la dictatrice en voyant vers quoi se dirigeait sa soeur. “Une confrontation au château familial, je peux apprécier cela, stupide petite soeur… Ton plan est aussi évident que le soleil dans le ciel.”

 

Dans le même temps, en contrebas, la bataille faisait rage. Les deux titans étrangement agiles en dépit de leurs tailles monumentales avaient forcé le dragon à se battre sérieusement en lui brisant une aile. Unis depuis la naissance, les titans frappaient avec une synchronisation parfaite les écailles du dragon, la magie dans leurs corps de cristal permettant de blesser les créations de Corona. Cependant… la contrefaçon de Tirek était puissante et rusée. D’un mouvement de sa puissante queue, il fit perdre l’équilibre à l’un des titans et plongea ses crocs dans l’épaule du second, crachant directement ses flammes infernales sur le corps sans défense du béhémot. Le bras droit rougeoya jusqu’à devenir blanc puis se brisa avant de heurter lourdement le sol dans un bruit de tempête.

 

De son côté, Buckler tentait de contenir l’avancée des créatures de lumière. La forêt de lances tenait à distance les créatures les plus imposantes mais les pégases et les Vadras se faisaient lentement dominer par la nuée de créatures volantes, faisant s’écraser au sol plus d’un combattant. Le général transperça une manticore de son partisan, l’embrochant comme s’il n’avait s’agit que d’une botte de paille et retira avec violence son arme, laissant son adversaire disparaître dans le néant, des filaments lumineux s’échappant vers le ciel. S’essuyant le front, il observait le ciel au dessus de l’Everfree et espérait que sa Princesse s’en sortait, le cyclone avait disparu et il ne savait pas si c’était une bonne nouvelle. A peine eut-il fini cette pensée qu’il balaya d’un coup de sabot puissant un catoblépas, empêchant l’ignoble bête de projeter son souffle mortel sur lui et l’acheva d’un coup d’estoc dans la nuque.

 

“Soldats, serrez les rangs !”

 

*******

 

Luna battait violemment des ailes, son coeur battait si fort qu’on aurait cru qu’il voulait lui sortir de la poitrine. Elle sentit l’air se réchauffer derrière elle. Elle se projeta sur la droite d’un mouvement subtil de l’aile. Une sphère incandescente vint s’écraser avec violence contre l’une des tours du château, provoquant sa chute et un début d’incendie là où elle avait frappé. Tentant de perdre sa soeur en volant sous la tour s’écroulant, elle évita plusieurs blocs de pierre devant peser plusieurs centaines de kilos. La tour dans sa chute vint défoncer le toit donnant sur la salle du trône et elle s’y précipita… Mais pas assez vite. Dans sa précipitation, Corona avait simplement attendu et lancé un rayon brûlant sur l’aile de sa soeur, la faisant s’écraser sans douceur contre le tapis rouge qu’elles avaient tant de fois foulé.

 

Luna se mit à tousser, de la poussière fraîchement tombée du toit délabré s’insinuant dans ses naseaux. Elle se remit difficilement debout et fit face à une Corona qui souriait avec arrogance. L’alicorne blanche frappa le sol d’un sabot et fit apparaître la statue des éléments d’Harmonie derrière elle.

 

“Un plan aussi évident contre moi… Vraiment ? Lulu, ma petite Lulu, je suis vexée. Combien de fois avons nous vaincu les grands méchants de l’Histoire de la même manière, hmmm ?” Elle se retourna en riant. Rire qui se bloqua dans sa gorge. “Où sont les éléments ? Ils ne sont pas censés quitter ce lieu !”

 

Ses yeux fixaient avec colère le complexe présentoir, cherchant à percer un possible sortilège de dissimulation. Mais soudain, sa vision se troubla et se teinta de rouge. Aveuglée, elle entendit un rire qu’elle ne connaissait que trop bien, suffisant et arrogant, cynique et moqueur.

 

“Et bien que se passe-t-il, ‘Tia ? Pour une représentante du soleil, tu n’es pas une lumière.” dit-il en nettoyant l’une de ses Laminas d’où perlait le sang de l’alicorne. “Cela casse le mythe… même les déesses saignent.”

 

“Sen… prince des rats volants…” dit-elle avec rage tout en éclaircissant magiquement son regard, levant son regard vers l’impudent.

 

Elle remarqua soudain les fontes que portaient le vadras et ses yeux s’écarquillèrent en comprenant qu’elle avait été dupée et répondit sans hésitation en projetant un rayon mortel vers celui qui se moquait d’elle.

 

Le rayon orangé parcouru de petits éclairs écarlates vint s’écraser contre un bouclier bleuté d’une puissance incommensurable. Les sacoches de Sen s’étaient mises à luire.

 

“J’ai beau avoir confiance en toi, je t’avoue que mon coeur a raté une dizaine de battements, là.” déclara-t-il en se tournant vers Luna.

 

Luna lui adressa un sourire rapide et sortit les éléments de ses fontes et se servit de leur puissance combinée pour empêcher Corona de bouger. La déesse terrorisée se débattait, lançant sort après sort contre l’impénétrable bouclier de sa soeur.

 

“Je ne peux pas être vaincu comme ça ! Je suis Corona, divine souveraine d’Equestria. Cela ne peut pas…”

 

“Reviens à la raison, ‘Tia !” l’interrompit Luna avant de laisser la vague arc-en-ciel, symbole de l’Harmonie s’enrouler autour de l’alicorne déchue.

 

Les six joyaux retombèrent doucement au sol. L’alicorne avait perdu crinière et queue enflammées et ses yeux étaient désormais bien plus doux. Ce fut Célestia qui se releva… ou qui tenta de se relever. Le sort d’entraves n’était pas levé et la corne de Luna brillait toujours. Des larmes perlèrent au coin des yeux de Célestia.

 

“Je suis libre, Luna, ma soeur. Je suis redevenu comme avant… Par l’harmonie… Qu’est-ce que j’ai fait ?” Elle semblait véritablement choquée par ses propres actions, ce qui rassura Luna, l’influence de Corona avait disparu. Elle tira un peu sur ses membres et demanda un peu effrayée. “Pourquoi ne me relaches-tu pas ?”

 

“C’est la condition que j’ai imposé.” répondit Senestrim en lui adressant un regard mortellement sérieux, alors qu’il s’approchait d’elle, sa lame bleutée au sabot. “Et elle a été accepté.”

 

“Une condition ? Tu vas m’exécuter !” cria-t-elle presque. “Luna, fais quelque chose ! Tu ne peux pas laisser faire ça !”

 

“En échange de ta purification, je devais accepter que tu perdes le droit de vivre en Equestria et… d’utiliser la magie.” dit-elle en se touchant la corne. Des larmes perlaient à ses propres yeux mais elle ne détourna pas le regard. “Je suis simplement heureuse que tu sois de retour mais le monde ne te pardonnera pas, je ne peux pas juste te purifier et te laisser vivre à mes côtés. Tu as fait trop de mal, ‘Tia. Et maintenant, tu dois en subir les justes conséquences.”

 

Senestrim posa sa lame contre la corne d’alicorne de Célestia. Il observa Luna et demanda son assentiment, son regard était résolu mais il savait que ce qu’il faisait était cruel. Luna acquiesça. Et ce simple mouvement de tête projeta le regard de Célestia de l’incompréhension au désespoir le plus total… et le désespoir se mua en colère, en frustration et en haine. Tout se passa très vite. Senestrim leva son sabot, le sol trembla, le regard de Luna s’emplit de terreur et une sphère aveuglante de chaleur enveloppa le vadras et l’alicorne blanche, engloutissant toute la pièce dans un océan de blancheur.

 

“Sen !” hurla-t-elle, toujours aveugle.

 

Usant de la magie pour retrouver la vue, elle se retrouva devant une Célestia sous le choc qui n’avait pu récupérer les pouvoirs scellés de Corona et… les jambes de Luna cédèrent sous son propre poids. Une statue de cendre. C’était presque grotesque, il était là, figé dans son mouvement, mais recouvert d’une patine sale d’un gris noir écoeurant. Le bracelet bleu n’avait pas été totalement détruit et ce fut son poids qui fit s’écrouler et la statue et le coeur de Luna. Alors que son esprit menaçait de se briser face à tant d’émotions, une petite voix lui murmura.

 

“Il est de mon devoir de la protéger…”

 

En lieu et place de la gardienne de la Nuit se trouvait son alter ego ténébreux. Empêchant “Luna” de se laisser emporter par la haine, Nightmare Moon, dans toute sa nocturne grâce avait pris sa place et l’avait laissé dans un coin de son esprit. La jument de cauchemar ressentit alors la haine et la détresse de la situation et en eut le souffle coupé. Le tas de cendre lui déchirait le coeur et alimentait son envie de vengeance. Profitant de la surprise de sa soeur, elle chargea et vint écharper la nuque de sa soeur de sa corne sombre. Prise au dépourvu par cette attaque physique, Célestia perdit l’équilibre, hurlant de douleur. Elle tenta une riposte et fit donc usage de sa corne... mais tomba presque inconsciente quand un sabot en armure la frappa à ce niveau.

 

“Règle n°1 du combat contre une licorne : frappez la corne lorsqu’elle luit.” dit avec rage Nightmare Moon.

 

Célestia ne comprenait pas ce qui se passait et se remit difficilement sur ses pattes. Le tournis était si violent qu’elle manqua de vomir. De multiples lumières dansantes s’agitaient devant ses yeux. Elle tenta à nouveau de lancer un sort mais fut accueillie par un coup encore plus fort que le précédent et cette fois-ci perdit connaissance.

 

“Certaines n’apprennent jamais.”

 

Nightmare Moon se dirigea vers les éléments d’Harmonie qui traînaient sur le sol et les fit graviter autour d’elle et, dans sa rage, en absorba toute l’énergie. Tous les joyaux perdirent leurs couleurs pour s’effriter et devenir aussi inertes et froids que des rochers. Soulevant le corps inconscient de l’alicorne pour la mettre sous le soleil, Nightmare Moon déversa toute la magie des éléments dans un dernier sort. Recouvrant le corps de l’alicorne solaire, des chaines arc-en-ciel la lièrent lentement à l’astre qu’elle représentait et un ordre impérieux de la jument noire l’y envoya en un instant…

 

Seule dans la salle du trône délabrée, Nightmare Moon hurla de douleur se forçant à regarder directement le soleil, s’en blessant les yeux la faisant pleurer et de douleur et d’un maelström d’autres sentiments envahissants.

 

“Est-ce que ça en valait la peine ? Hein ! Gouverner vaut-il de perdre famille, ami, espoir, dignité ? Répond moi ! Est-ce que ça en valait la peine ! Grande gamine avec du pouvoir, c’est tout ce que tu es, jugeant, tuant sur un caprice parce que tu le peux ! Tu es une pitoyable excuse pour un être vivant ! Tu m’entends ? Une créature vile, ignoble, égoïste et égocentrique, cruelle et veule ! Tu mérites ton sort et bien plus encore. Je te conchie, toi et tout ce que tu représentes, Corona, Célestia, créature qui se prend pour une déesse ! Tu n’es… Tu n’es… Tu n’es qu’un être abject…” Le hurlement qu’elle poussa à ce moment-là n’était que de pure tristesse. “ ‘Tia, ma soeur… je suis toute seule…”

 

Elle ferma les yeux et se représenta un espace blanc avec difficulté. Une forme calme de Luna apparut devant Nightmare Moon. Elle lui demanda :

 

“Qu’est-ce que tu crois être en train de faire ?”

 

“Je te protège de toi-même, Selena. Je n’existe que pour te protéger, c’est la raison de mon existence, mon amie. Et en tant que dirigeante d’Equestria, tu ne peux pas te permettre de devenir un autre tyran… et donc, je vais faire en sorte d’atténuer au plus toute cette tristesse et ce désespoir. Cloisonner tes personnalités. Ne plus souffrir.”

 

Luna prit la place de Nightmare Moon, ou plutôt le changement fut forcé. Luna retrouva ses émotions bien présentes mais bien moins étouffantes. Dans son espace mental, elle dit :

 

“Nighty, je ne peux pas te perdre toi aussi… Pourquoi est-ce que tout le monde doit disparaître ? Pourquoi tout ceux que j’aime...”

 

“C’est le fardeau d’une dirigeante immortelle… Je t’aime, c’est pour cela que cela doit être fait.” Elle caressa la crinière de Luna et dit en tremblant légèrement. “Tu sais ce que tu as à faire, n’est-ce pas ?”

 

“Oui…” dit-elle en quittant à contrecoeur l’étreinte de son amie. “Adieu, Nighty.”

 

“Adieu, Selena et… si tu le peux… souviens-toi de moi avec le sourire.”

 

Lentement, l’espace blanc fut englouti par les ténèbres des méandres de son esprit et avec lui celle qui avait été sa première amie.

 

Plus tard, sur le champ de bataille vide de tous élémentaires de lumière, les troupes se réjouissaient. La lune avait repris sa place dans le ciel et les rayons argentées de la Lune venaient embrasser les deux figures immobiles des géants de cristal noir qui étaient étendus l’un à côté de l’autre, l’un complètement déformé par endroit et l’autre n’ayant plus de bras.

 

Le père de Senestrim discutait avec Buckler, remerciant son arrivée providentielle alors que le roi des Vadras s’excusait platement d’avoir laissé la distance mettre en péril sa dette d’honneur. Plusieurs soldats s’occupaient des rites funéraires des membres de leur race, refusant de les laisser pourrir comme c’était souvent le cas durant les guerres.

 

La dernière vision que Trixie eut fut celle d’une Luna accueillie en triomphe par ses troupes, sauf que le visage de son mentor n’exprimait pas l’allégresse…

 

*******

 

Le sort s’arrêta brutalement et elle se retrouva devant une Derpy et une Dinky aux regards inquiets qui serrèrent entre leurs sabots la magicienne. Ils lui dirent qu’elles avaient entendu des sanglots et des cris venant de la bibliothèque mais qu’en voyant que Trixie avait l’air d’être sous l’emprise d’un sort, elles avaient paniquées et étaient sur le point d’avertir le plus rapidement possible la Princesse quand elle était revenue à elle. Dinky qui pensait que c’était de sa faute d’une façon ou d’une autre ne cessait de s’excuser et Derpy était simplement trop heureuse de voir que son amie était de retour, saine et sauve, de son aventure.

 

Pour la première fois de toute sa vie, la grande et puissante Trixie comprenait ce que la véritable solitude était pour avoir fusionné avec Luna durant toute la durée du sort, et elle venait de comprendre à quel point pour elle comme pour son mentor, être entourée et aimée par des gens de confiance était quelque chose de précieux.

 

Trixie regarda par la fenêtre en direction de Canterlot. Elle devait rendre visite à quelqu’un et lui dire à qu’elle point elle comptait pour elle...

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Kawete
Kawete : #33267
Le texte est cohérent de bout en bout, et même si l'histoire est déjà connue dans le sens inverse elle reste surprenante. Tu fais en sorte que le lecteur soit captivé avec des techniques ô combien utilisées mais efficaces. Au final on ne remarquera que quelques scènes confuses, des scènes d'action notamment qui mériteraient d'être un peu plus détaillées, pour ne pas avoir à relire la phrase pour la compréhension. Mais le facteur temps est probablement le fautif.
Une bonne fic qui mérite d'être lue.
Il y a 2 ans · Répondre
Plénitude
Plénitude : #9990
Je vais clarifier une chose puisque cela ne semble pas clair. Le Lunaverse est un univers construit sur la base suivante : "Les Mane6 sont remplacées par les Background6, nommément Derpy, Trixie, Lyra, Carrot Top, Vinyl et Lyra (si je ne me plante pas) et tous ce qui c'est passé pour Nightmare Moon a eu lieu à la place pour Célestia dont le nom corrompu est Corona."

Je ne suis pas l'auteur du Lunaverse comme je le mentionne dans le synopsis de l'histoire étant donné qu'il s'agissait d'une fiction faite pour un challenge, un petit concours de rapidité. Le Lunaverse peut facilement être retrouvé en détails via une petite recherche google.

Sur ce,

Plénitude logging out.
Il y a 3 ans · Répondre
Enis
Enis : #9969
Duoanimation26 décembre 2014 - #9820
tt est inverser ici, c'est corona version nightmare moon de celestia

Ok..
Donc..
Tu à inversé tout MLP?
Il y a 3 ans · Répondre
Duoanimation
Duoanimation : #9820
Enis22 décembre 2014 - #9629
Attend...
TRIXIE ET L'ÉLÈVE DE LUNA!!!?
Et c'est qui Corona?
tt est inverser ici, c'est corona version nightmare moon de celestia
Il y a 3 ans · Répondre
rainbownuit
rainbownuit : #9648
corona est version nightmare moon de celestia
Il y a 3 ans · Répondre
Enis
Enis : #9629
Attend...
TRIXIE ET L'ÉLÈVE DE LUNA!!!?
Et c'est qui Corona?
Il y a 3 ans · Répondre
Plénitude
Plénitude : #9620
Absolument pas. Il s'agit de personnages que je n'ai pas réellement tiré de quelque part si ce n'est peut-être de Zepar et Furfur d'une série de romans. ^^
Il y a 3 ans · Répondre
Acylius
Acylius : #9597
Pyro et Écho me font penser à Pile et Face dans FF9. Est-ce que c'est de là que vient l'inspiration ?
Il y a 3 ans · Répondre

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