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[NOUVELLE] Place des amants - Cadea [...]

Une fiction écrite par DreamerScene.

Cadeau du ciel

Un jeudi. Les pégases de Cloudsdale venaient de terminer leur ronde pour dégager les nuages de coton qui cachaient les premiers rayons du soleil. Plus bas, un jeune poney terrestre les admirait.

Depuis qu'il était tout petit, Space Desir, un étalon bleu chargé de la conservation du patrimoine dans Poneyville, avait toujours rêvé de voler. Né terrestre, il n'avait de cesse de s'imaginer fendant les nuages à coup de sabot, lui aussi. Et depuis lors, il observait les pégases accomplir leur devoir quotidien. Et à chaque fois, il était émerveillé.

Ce matin, il s'était levé tôt, pour un travail important sur la statue de la Victoire du labyrinthe de la ville. Il avait enfilé sa fidèle cravate pourpre aux stries vertes, coiffé sa crinière châtain foncé, et s'était soigneusement brossé les dents. A sa dernière visite, le dentiste l'avait quelque peu sermonné. Depuis, il faisait bien plus attention à son hygiène ! Il passait toujours par la place du marché afin de s'acheter son déjeuner habituel, dans un petit restaurant dont il connaissait le propriétaire depuis son plus jeune âge ; sandwich à l'omelette et aux herbes. Un pur délice.

Space affectionnait particulièrement le tintement de la clochette, quand elle se faisait percuter par la porte. Dal Sapore, le grand maitre de la pizza du coin, n'eut pas besoin de se retourner pour connaître l'identité de son client. Il l'accueilli comme il se devait :

« Mah ! Qué voilà mon petit Spacci favori ! »

Il l'enlaça avec poigne, mais gentillesse. Cette force de la nature au grand cœur, était réputée pour être constamment de bonne humeur. Il savait comment remonter le moral de ses clients. Et parfois, l'organisatrice des plus grandes fêtes, Pinkie Pie en personne, venait pour animer des festivités aussi endiablées que surprenantes dans ce restaurant qui n'avait pas son pareil.

Déposant Space à terre, il lui tendit un petit sac en papier contenant son sandwich préféré à l'intérieur. Dal Sapore se permit d'ajouter :

« Travail bien, comprendo ? »

Le jeune terrestre lui sourit :

« Pas de soucis. »

Lorsqu'il s'arrêta à la sortie de la ville, afin de regarder le vol gracieux des pégases responsables de la météo, il contemplait une équipe poussant des nuages d'orage en direction de la ville céleste. Sont attention fut attirée par un bruit. Comme si la foudre venait de tomber. La seconde d'après, il aperçu dans la même direction un objet non identifié qui descendait à grande vitesse vers le sol. Il se rendit compte, trop tard, que c'était un poney qui tombait en piquer droit sur lui :

« Ecartez-vous !! Tenta d'avertir le météore à sabot. »

Puis, l'impact. Le poney percuta brutalement Space et l'emporta dans une série de tonneaux. Quand ils s'arrêtèrent enfin, les deux se retrouvèrent à plat ventre, dans la poussière, et un sale état.

Space reprit ses esprits le premier. Un peu sonné, il secoua la tête pour se remettre les idées en place. La cascade lui avait infligé quelques éraflures et des bleus de part en part, mais rien de vraiment sérieux. Il se releva, et put alors remarquer le projectile qu'il avait rencontré. C'était une jument. Un petit pégase jaune pâle à la crinière et à la queue châtains. Elle possédait l'uniforme de l'équipe météorologique de Cloudsdale. Elle était inconsciente.

Après avoir appelé les secours, Space accompagna le pégase jusqu'à l'hôpital de Poneyville, où une équipe de médecins la prit en charge. Elle faisait peine à voir, et visiblement, elle était bien plus atteinte que l'étalon. Les urgentistes la conduisirent en salle d'opératoire sur le champ. L'intervention dura trois heures. Space attendit pendant tout ce temps. A un moment, une infirmière est venue lui poser des questions sur lui, ce qui s'était produit, et sur ses liens avec la blessée.

L'opération terminée, on emmena le pégase en salle de réveil, et Space fut conduit à la chambre qui allait l'accueillir. En voyant passer le brancard, il lança un regard à la convalescente. Elle était de petite taille, ne faisant surement pas son âge. Mais Space la trouva immédiatement très jolie. Avec des trais fins, mais déterminés. Ce devait être une véritable bucheuse. Très souriante, à voir les rides de ses joues. Elle semblait très paisible. Mais le poney médecin devant lui, lui fit entendre un tout autre son de cloche :

« Elle a les deux ailes cassées. Le sabot arrière droit est brisé, on a été forcés de retirer le fer. Et elle a deux gros hématomes sur le flanc droit et sur la croupe. De plus, elle a été brulée de partout. Probablement frappée par un éclair. Elle va devoir rester environ quatre mois ici, si ce n'est plus. »

Space ne put qu'acquiescer bêtement de la tête. Ensuite, une question lui tarauda les lèvres :

« Vous savez quand elle se réveillera ? »

« Sur ce point, aucun problème. Heureusement, la tête n'a pas été touchée. Ou très peu. Elle ouvrira les yeux dans une heure ou deux. Le temps que l'anesthésie se dissipe. Lui répondit-elle, en le rassurant d'un sourire. Par contre, elle risque d'être un peu faible, alors il faudra la ménager pour aujourd'hui. »

Ce n'est que quarante minutes après que le petit pégase leva les paupières. La première chose qu'elle vit, fut cet étalon à la robe bleu très sombre, dont la crinière presque noire faisait tout le charme en lui donnant un côté gentleman de Jumanhattan. En lui montrant un air aussi rassurant que rassuré, Space Desir entreprit de lui parler un petit peu :

« Bonjour, mademoiselle. »

Il affichait un sourire en coin pour ne pas la brusquer. Elle le regardait. On ne pouvait savoir ce qu'elle pensait ou comment elle se sentait, son expression hébétée restait figée, comme pétrifiée par une Coquatrice. Ses yeux étaient à moitié ouverts et sa bouche ne bougeait pas.

Space Desir reprit :

« Vous l'avez échappé belle ! Si vous aviez été moins chanceuse, vous auriez pu finir amnésique. »

Il eu un rire gêné, conscient que cela n'avait rien de drôle. Il continua :

« Au moins, vous n'avez rien qui mette votre vie en danger. Mais le docteur ma dit que votre récupération prendrai pas mal de temps. J'en suis vraiment désolé. »

Il baissa les yeux, comme si il se sentait en partie coupable de ce qui s'était passé.

« Je vais vous laisser vous reposer. Vous en avez besoin. Je reviendrai demain pour voir comment vous allez. »

Cette déclaration le fit un peu rougir. Il avait toujours été un peu timide envers les juments.

« Alors... A demain. »

Et tandis qu'il s'apprêtait à quitter l'établissement, le jeune pégase leva doucement le sabot, et le déposa sur celui de Space. Elle murmura quelque chose, mais sa voix était imperceptible :

« Me***... »

Space décida de ne pas en tenir compte. De peur que cela fut un reproche. Il s'en alla sans demander son reste.

Il arriva à la mairie. Madame le Maire le salua, en ajoutant, légèrement courroucée :

« Dites-donc, Mr Desir. Vous vous offrez des grasses mâtinés, à présent ? Je vous rappelle qu'il s'agit d'un travail urgent. »

« Pardonnez-moi, madame. Mais j'ai eu un contre-temps. »

Madame le Maire leva un sourcil, et eu un sourire en coin, l'esprit plein d'idées :

« Et puis-je savoir de quel genre ? »

Space confirma les pensées de sa patronne sans en avoir conscience :

« Euh... Une jument m'est tombée dessus. »

La maire se mit alors à sautiller dans tout l'accueil, les lèvres retroussées en une expression d'euphorie exorbitante. Elle revint comme une folle vers son employé :

« Je le savais ! Dites-moi tout ! Elle vit ici ? C'est une licorne ? Elle est plus âgée que moi ? Est-ce que je l'ai renvoyée récemment ? »

Madame le Maire a toujours eu un petit faible pour Space. Elle le trouvait mignon, certes, mais elle appréciait beaucoup sa timidité, qui lui donnait un aspect presque enfantin.

Ce dernier s'était couché et couvert la tête de ses pattes avant. Et arrière, s'il avait pu. Sa patronne s'écarta un peu et s'éclaircit la voix. Lui se releva, et entama les explications :

« En fait, elle a reçu un éclair et est tombée du ciel. Elle m'a percuté et a été gravement blessée. Sa vie n'est pas en danger, mais elle va rester longtemps à l'hôpital. »

Le Maire reprit vite son sérieux :

« Et vous ? Vous allez bien ? »

« Ne vous en faites pas. Je n'ai que quelques bleus. Mais je me sens un peu responsable. »

« Mais vous savez pertinemment que rien de tout ça n'est votre faute. »

« Oui, mais... »

Elle l'interrompit :

« Taratata ! On ne discute pas, jeune poney. Aller vous mettre au travail. Cela vous fera du bien. »

En réalité, ce ne fut pas la culpabilité qui empêchait Space de se concentrer sur son travail du jour. Mais il ne pouvait pas arrêter de penser à elle. En la voyant, il avait ressenti quelque chose de bizarre. Il la trouvait vraiment très belle. Son visage lui plaisait. Et quand elle lui a attrapé le sabot... Même sans avoir saisi ses paroles, le contact a remonté jusqu'à son cœur. Sur le moment, il ne s'en était pas rendu compte. Mais en se rappelant cette sensation de toucher, le sang circula plus vite en lui. De toute manière, il allai la revoir demain. Alors autant se concentrer aujourd'hui.

Même rentré chez lui, il avait toujours le visage de cette jument à l'esprit. Et il ne voulait pas le chasser.

Le lendemain, Space ne suivit pas sa routine habituelle. Il alla chercher une grande pizza pour deux. Il avait toujours entendu parler de la nourriture d'hôpital. Toujours le même bouillon. Infect selon beaucoup ! Il fallait dire que la priorité dans ces endroits était le sauvetage par prise de cachets et d'intraveineuses ; avec un ou deux petits coups de scalpel au cas où...

Il arriva dans la chambre de la jeune jument à peu près à l'heure du déjeuner. En passant devant l'accueil, le regard affamé de l'infirmière dirigé vers son repas l'avait poussé à passer du pas au triple galop en un temps record.

Elle dormait encore. Mais selon les diagnostics du docteur et l'électro-encéphalogramme, elle était bien plus en forme qu'hier. Space n'osa pas la réveiller, et en profita pour admirer son visage de près. Elle était absolument magnifique. On aurait dit une enfant. Et pourtant, derrière cette innocence extérieure, devait surement se cacher un sacré caractère, ainsi qu'une sensibilité pure. Space eut beaucoup de mal à détacher ses yeux émeraude de ce visage d'ange tombé du ciel. Mais il prit finalement son courage à deux sabots, et lui effleura la joue avec l'un d'eux. Elle ouvrit lentement les yeux.

Lorsqu'ils furent grand ouverts, elle lui sourit d'abord, et se leva ensuite. Une fois assise, calée contre l'oreiller, elle entama la conversation :

« Je vous attendais avec impatience, monsieur. Ca me fait vraiment plaisir que vous passiez me voir. »

Space rigola comme un poulain tellement ces mots lui firent plaisir. Son visage était devenu une bouilloire bouillante. Il enchaîna :

« Je me demandais. Comment vous vous appelez, mademoiselle ? »

« Zephyr Proud. Et vous ? »

« Moi c'est Space Desir. Enchant de vous connaître, Zephyr. »

« Moi de même, Space. »

Chacun tendit son sabot pour serrer celui de l'autre. Un courant électrique les traversa tout deux. Ils ne le montrèrent pas le moins du monde, mais cela les déstabilisa. Au plus profond de leur esprit. Ils n'étaient pas du tout superstitieux, mais il y avait des signes que même les plus sceptiques ne pouvaient pas ignorer. Pour se redonner une contenance, Space sortit sa pizza :

« Vous avez faim ? J'ai pris une pizza un peu grosse pour moi tout seul. »

Malgré son attention, il se sentait quand même stupide. Heureusement pour lui, elle hocha la tête :

« Oh ! J'ai une faim de loup ! »

Le pégase n'avait pas touché au repas déposé à son chevet. Tant mieux. Le couteau en plastique allait servir à quelque chose.

La pizza aux trois fromages était savoureuse. Ils semblaient satisfaits de leur déjeuner. La pâte croustillait entre leurs dents. Un morceau de salade se coinça entre celles de la régisseuse météo. Space l'ayant vue, ne tenait pas à manquer une petite blague, et pouffa déjà en apercevant la petite intruse verte qui faisait tache sur la blancheur de la dentition de sa voisine.

Après avoir terminé la pizza, Zephyr se sentit le devoir de dire à son sauveur :

« Je ne pourrais jamais assez vous remercier, Space. D'abord vous me secourez en m'empêchant de m'écraser sur le sol, vous m'envoyer à l'hôpital et vous venez de sauver mon estomac. Vous êtes vraiment très gentil. »

C'en fut plus qu'il ne pouvait en supporter et il perdit la faculté de placer un mot complet devant l'autre. Alors il inspira profondément et reprit :

« C'est normal, mademoiselle. N'importe qui l'aurait fait à ma place. »

A ce moment-là , une ombre de chagrin passa dans le cœur de Zephyr, et son expression devint comme déçue :

« Malheureusement, ce n'est pas tout à fait vrai... »

Elle n'en dit pas plus. De peur de trop parler. Gêné d'avantage encore, Space se permit une question à risque :

« Comment vous vous sentez, aujourd'hui ? »

Son sourire revint, mais la tristesse se trouvait toujours dans ses yeux :

« J'ai beaucoup moins mal, maintenant. Alors je vais mieux. Et c'est grâce à vous. »

Un sourire à la fois joyeux et fier se dessina sur la face de l'étalon. Soudain, une horloge sonna treize heures. Space devait partir au travail. Il s'excusa et fonça vers la porte. Mais juste un instant encore :

«Attendez ! Est-ce que je vous reverrai ? »

« Oui, ne vous en faites pas. Je reviendrai vous voir tous les jours, si je le peux. »

Ils se saluèrent, mais Zephyr avait encore une dernière chose à avouer :

« Space ! Vous savez ce que je vous ai murmuré hier. »

Il fut interloqué et resta suspendu à ses mots avec un regard curieux :

« Je vous ai dit "merci". »

Et juste avant de quitter la pièce, il répondit, le plus doucement qu'il pouvait :

« De rien. »

Et il sortit... puis rerentra :

« Au fait, vous avez quelque chose entre les dents. »

Zephyr prit un miroir, et découvrit la salade rebelle. Space ressortit en riant.

Dans son esprit, Zephyr repensait à Space. Elle aurait dévoré chacun de ses gestes un peu maladroits. Chacun de ses mots, bien prononcés, ou bégayés. Chacune de ses expressions quasi-théâtrales. Elle adorait sa carrure élégante. Et elle avait remarqué une petite étincelle de jeunesse dans ses yeux. Cela lui plaisait. Ce devait être un élève sérieux et un bon vivant. Et il débordait de bonnes intentions et de bienveillance. En repensant à ces détails, les souvenirs de sa famille lui revinrent en mémoire.

Un père négligent, une mère cruelle. Une grande sœur méprisante. Un petit frère infâme. En fait, elle n'arrivait jamais à se remémorer un seul bon souvenir de ce qui s'appelait "sa Famille". C'était bien pour cela qu'elle les avait quitté. Pour vivre sa passion. La météo.

Elle avait toujours été une plaie pour ses parents. Elle était destinée à devenir mannequin dans un journal de beauté de Canterlot. Elle était sensée devenir la "pompe à fric" de sa famille déjà très aisée.

Non. Il en était absolument hors de question. Ce qu'elle avait toujours voulu, c'était sa liberté. C'était vivre dans un lieu qu'elle aimerait. Vivant une existence qu'elle aimerait. Avec, peut-être, quelqu'un qu'elle aimerait. Et qui l'aimerait aussi.

Et cet accident, était-ce un signe ? Un signal pour lui annoncer que son bonheur serait complet ? Jusqu'ici, tout c'était passé comme elle l'avait rêvé. Est-ce que ce rêve deviendra-t-il une réalité ?

Elle eut un sourire d'espoir qui persista tandis qu'elle s'endormait.

La fin de la semaine approchait. Et Zephyr eu un flash soudain qui la fit presque sauter au plafond, malgré ses ailes hors d'usage. Elle se mit à paniquer.

En effet, elle avait totalement oublié de prévenir l'usine météo de Cloudsdale pour son accident ! Et comme elle ne s'était pas présentée de toute la semaine, elle risquait très gros. Son patron pourrait même très bien la renvoyer pour absence non justifiée.

Incapable de sortir de son lit, elle appuya sur le bouton d'appel d'urgence pour faire venir une infirmière.

Bien installée, en train de lire le journal, la standardiste, Still Emergency remarqua le voyant rouge sur le tableau de bord, accompagné de cet insupportable sonnerie suraiguë, à vous faire exploser les tympans. Elle ralla franchement en lançant son journal, sans le vouloir, sur l'ordinateur. Ce dernier n'apprécia pas trop le choc et à se brouilla instantanément. Des milliards de fourmis se mirent à pulluler sur l'écran. Still revint dessus et paniqua aussi :

« Mais c'est pas vrai ! »

Elle pianota comme une dératée en espérant un miracle. Le clignotant d'urgence insistât. Et plus il la harcelait, plus les nerfs de l'infirmière se resserraient pour former une boule prête à éclater. Elle hurla sans s'en rendre compte :

« J'arrive, je vous dis ! »

Décidément, l'électronique n'était vraiment pas son fort. A court d'idée et folle de rage, elle éteignit manuellement l'appareil. Elle le fixa, haletante, parée à le fracasser tout aussi manuellement si jamais il manifestait une quelconque contre-offensive. Rien. Elle fonça enfin en direction de la chambre de Zephyr.

Still Emergency passa la porte de la chambre 73, complètement décoiffée, respirant comme si elle revenait d'un marathon, et regardant sa patiente de façon à lui annoncer « Si je suis venue pour rien, vous ne sortirez jamais d'ici vivante ». Elle tînt un tout autre discours :

« Excusez mon arrivée tardive. Un souci technique. »

Zephyr dégluti avant de lui bégayer :

« Euh... Ce-ce n'est rien... »

La standardiste l'interrompit sans vergogne. Ayant hâte de retourner se détendre en lisant les ragots sur la noblesse de Canterlot :

« Qu'est-ce que vous désirez, mademoiselle ? »

Le ton pressant poussa le pégase a vite réagir :

« Je voudrait téléphoner... S'il vous plaît ? »

En quelques secondes, Zephyr reçu un téléphone à touche entre les pattes avec son combiné en pleine tête, et Still retrouva son journal. En rallumant l'unité centrale, l'écran afficha un fond bleu chargé de milliards de caractères impossible à déchiffrer. Il faudra attendre une semaine avant qu'un nouvel appareil n'arrive, une de plus pour que les coupures sur les pattes de Still Emergency disparaissent, et encore une autre pour qu'elle retrouve son calme et arrête d'aboyer sur tous les appareils électriques qu'elle croisait ; allumés, ou non.

Après s'être frotté le front, le pégase jaune composa le numéro d'une amie qui travaillait avec elle a l'usine. Elle non plus, elle ne l'avait pas mise au courant. Et la connaissant, sa allai barder. Zephyr pris une grande inspiration et attendit la fin de la sonnerie.

Caring Waft retira enfin son casque de chantier et libéra ses courts cheveux magenta aux reflets roses. A peine eut-elle le temps de le ranger dans son casier que son téléphone portable vibra dans la poche de son gilet fluorescent. Certes, il était interdit de transporter un effet personnel sur soi pendant les heures de travail, mais il fallait bien vivre dangereusement. Elle ne reconnu pas le numéro et décrocha, interloquée. Elle a toujours été très curieuse, pour ne pas dire impétueuse :

« Allô ? Caring Waft à l'appareil. »

« Salut, ma vieille. »

En reconnaissant le timbre de cette voix entre mille, Le pégase vert foncé pris un ton bien moins sympathique :

« Et c'est seulement maintenant que tu me rappel ? Je te signal que j'étais morte d'inquiétude ! J'espère que tu as une raison en béton parce que sinon, je peux te dire que je vais te faire la tête pendant des décennies ! »

« J'ai eu un accident, et je suis à l'hôpital, là . »

La voix de Caring changea de nouveau pour devenir inquiétée :

« Qu'est-ce qui t'es arrivé ? T'es tombée dans le coma ?! »

Zephyr la rassura immédiatement. Car Caring pouvait facilement s'inquiéter pour peu de chose. Alors quand cela devenait sérieux, un vrai trublion :

« Je vais bien. Je ne me suis pas ratée mais je suis en vie et je n'ai pas été inconsciente longtemps. »

« Permets-moi d'en douter, parce que sept jours sans aucune nouvelle, avoues que ce n'est pas naturel. »

« Je sais. Pardonne-moi de n'avoir prévenu personne. Et surtout toi. Mais je te promets que je vais bien. »

« Bon. Tu es dans quel hôpital ? »

« Celui de Poneyville. »

« D'accord. J'arrive tout de suite. Bisous. »

Rien que de savoir que sa meilleure amie allait venir dessina un large sourire sur la face de la jument.

Quelques minutes plus tard, Caring Waft s'était installée sur un fauteuil et Zephyr restait clouée sur son matelas. Elles s'enlacèrent chaleureusement. Le pégase vert se sentait déjà bien mieux en voyant que la santé de son amie était plutôt bonne. Ce qui lui fit le plus peur fut l'état des ailes de cette dernière. Elle balbutia, blême :

« Non mais tu as vue tes ailes ?! Elles sont tordues dans tous les sens ! C'est horrible ! »

Zephyr ne l'avait même pas remarqué. Elle n'y avait pas pensé. On lui avait bien dit que l'incident ne l'avait pas épargné, mais elle n'avait pas cherché à en voir le résultat détaillé. De plus, les anesthésiants que l'on lui injectait en permanence neutralisaient la douleur. Maintenant qu'elle le voyait clairement, elle eu froid. Elle eu peur. Comment cela se pouvait-il ? Ses ailes étaient complètement discontinuées, asymétriques. Elles n'étaient plus droites. Il manquait clairement des plumes. Et l'os du bout de celle de droite était visible. Zephyr se dit alors que même si elle pouvait les sentir, elle n'aurait certainement pas réussi à leur faire faire le moindre mouvement.

Elles essayèrent toutes les deux de ne plus accorder d'attention à ce spectacle épouvantable. Ce fut très difficile, mais elles y parvinrent. La jument jaune raconta ce dont elle se souvenait et ce qu'on lui avait raconté. Caring faisait des commentaires à presque chacune de ses phrases. Et bien sûr, elle demanda des détails sur le fameux Space Desir. Le prince charmant qui l'avait sauvé du pire. Caring était elle-même en couple avec un pégase plutôt costaud et imbu de lui-même, mais qui se révélait toujours être un véritable marshmallow. Surtout avec elle. Elle s'était souvent efforcée de placer son amie d'enfance avec un bel étalon. Mais Zephyr ne lui a jamais facilité la tâche :

« C'est dingue, quand même ! Quand c'est un gars que je te présente, ça ne marche pas, et quand je ne m'en mêle pas, tu rencontre quelqu'un avec qui sa risque de marcher. C'est l'hôpital qui se fiche de la charité ! »

Zephyr ne se gêna pas pour pouffer :

« Ne te méprends pas, hein ! Ce n'est pas comme si j'étais amoureuse de lui. »

Caring plissa les yeux, pencha la tête et montra un sourire aguicheur à son amie. Ses sourcils bougèrent de bas en haut :

« Arrête ton char. Il est adorable, c'est vrai. Et plutôt mignon, mais... »

Elle fut interrompue par le bruit d'un poney qui toqua à la porte. Et la voix de l'intéressé se fit entendre, légèrement étouffée par le mur :

« Zephyr, c'est Space. Je peux entrer ? »

Des présentations s'imposèrent. En lui serrant le sabot, Caring avait presque envie de lui faire peur en jouant au dure-à -cuir. Mais elle se retint. De crainte qu'il ne se carapate. Elle le trouva plutôt pas mal. Un peu frêle, mais il avait l'air à croquer. Ca changeait des brutes d'athlètes dont était rempli Cloudsdale. Malgré cela, la jument verte n'eu pas à se forcer pour le regarder droit dans les yeux, telle une coquine entremetteuse. Zephyr siffla un coup pour lui faire les gros yeux. Caring ricana, et conclu sa visite :

« Aller, j'y vais. Je vous laisse entre vous. »

Elle fit un clin d'œil à son amie et lui susurra à l'oreille :

« Si jamais tu organise un truc avec lui, tu m'invite, hein ! Je ne voudrais manquer ça pour rien dans tout Equestria. »

Pour toute réponse, Zephyr grogna. Les deux pégases se serrèrent dans leurs pattes et Caring sorti, non sans jeter un dernier regard à l'étalon.

Enfin seuls. L'intervention du pégase les avait bien fait rire.

L'après-midi passa si vite, qu'ils ne se quittèrent qu'au crépuscule. Entre-temps, ils en ont profité pour regarder le coucher de soleil par la fenêtre. Leurs yeux s'emplirent d'émerveillement devant les couleurs flamboyantes de l'astre à demi-caché par l'horizon. Le rouge et l'orange se partageaient l'espace. Une petite touche de violet bleuté s'immisçait innocemment entre les deux, et se blottissait. En voulant montrer leur enthousiasme, ils se retournèrent vers l'autre. Space, qui avait pris le fauteuil laissé par Caring, toucha alors le museau de Zephyr avec le sien. Par inadvertance. Ils s'excusèrent chacun leur tour, en s'écartant à la hâte. Leurs joues s'échauffèrent :

« Pardon... fit Space, un peu honteux. »

« Non non. C'est moi. Ricana Zephyr. »

Tous les deux décidèrent alors de se séparer. Zephyr retint Space un moment pour lui laisser un baiser sur la joue. Et elle lui murmura, en lui tenant le sabot :

« Merci pour tout. »

Son regard dégageait une sincère reconnaissance. Et une touche d'affection. Le début d'une histoire. Space sourit, clairement ravi d'entendre cela. Il n'arrivait pas à rétorquer quoique ce fût. Trop heureux de ces remerciements.

La porte claqua doucement. Mais chacun de leur côté, leur cœur et leur visage rayonnaient de joie.

Il était dix-neuf heure quarante lorsque Caring Waft vînt solliciter son patron. Elle toqua à la porte de son bureau, sur laquelle une plaque indiquait "Nous sommes responsables de la pluie comme du beau temps. Soyons responsables ensemble." C'était le slogan de la boîte. Depuis un discours du chef de l'entreprise après un incident dans la machinerie pour la fabrication des arcs-en-ciel. Caring se rappelait d'ailleurs a quel point il était furieux à ce moment-là .

Le patron invita le pégase à entrer. Il était installé devant des piles et des piles de feuilles. Caring n'y prêta pas de réelle attention, mais des tas aussi gros étaient toujours matière à impressionner. Cela prouvait la quantité de travail qu'il avait sur les épaules.

Le fameux patron de l'agence météorologique de Cloudsdale était un pégase assez costaud, bien que l'on se l'imaginait souvent un peu plus grand. Une robe couleur de boue, une crinière et une queue sombres soigneusement présentée, grisonnante mais qui lui donnaient un aspect sage et sérieux. Une moustache noire achevait le tableau. Caring s'amusait à le voir entourer de petits poulains rieurs, et lui, en bon grand-père, qui leur racontait des histoires. Même avec son costume à cravate, il avait une mine de papy. Enfin, surtout avec le costume.

« Bonsoir, mademoiselle Waft. Je suis désolé, mais il avait falloir faire vite. Je dois finir de m'occuper de tout ça d'ici à demain. Je crois que je vais engager un ou une secrétaire pour me donner un coup de sabot. Vous seriez intéressée ? »

La jument lâcha un petit rire amusé :

« Monsieur. Vous me voyez vraiment assise à un bureau, à m'occuper de milliers de papiers dix heures par jours ? »

Toujours dispersé dans ses documents, Le patron acquiesça par un petit grognement distrait. Il reprit :

« Alors, que puis-je pour vous ? »

Elle avança de quelques pas, et devint grave d'un seul coup :

« C'est au sujet de Zephyr Proud. Vous vous rappelez qu'elle n'a pas donné signe de vie depuis une semaine ? »

« Comment pourrais-je l'oublier ! Vous savez quelque chose ? »

« Oui. Elle a eu un accident. Et personne n'avait rien vue. »

Les sourcils du patron se froncèrent. Son regard devint quelque peu dubitatif. Et sa voix suivit :

« En êtes-vous certaine ? C'est tout de même dommage qu'il n'y ait ni ordonnance, ni même de nouvelle. »

« Je vous le jure monsieur ! Je la connais. Et elle ne manquerait pas à ses obligations sans bonne raison. »

« Le fait que vous vous connaissiez, me pose déjà un problème. Qui me dit qu'elle ne vous a pas envoyé pour inventer une fausse justification ? »

A l'intérieur, Caring s'agaçait. Elle se sentait outrée d'être soupçonnée de la sorte. Elle connaissait la vérité, et elle ne supportait jamais qu'on la remette en doute. En particulier au sujet de ses proches. Alors elle décida d'inventer quelque chose qui le forcerait à la croire. Quel éclair de génie ! Elle le fixa droit dans les yeux et lui rétorqua avec un aplomb déstabilisant :

« Monsieur. L'accident l'a sévèrement touchée. Les médecins ont même posé le risque qu'elle pourrait ne plus jamais voler. »

Son supérieur hiérarchique revînt vers elle. Pour la jauger. Il savait distinguer le vrai du faux, par expérience. Le pégase pensera plus tard que ce qui l'a rendu si convaincante ce soir-là, était peut-être le fait qu'au fond d'elle-même, elle avait le pressentiment que c'était vrai. Ou que cela allait le devenir.

Quoi qu'il en fût, il l'avait cru. Et a accordé son arrêt maladie à Zephyr. La jeune jument pu rentrer tranquillement chez elle, fière de son acte d'amitié.

Durant le reste du mois, les visites de Space Desir se sont succédées à un rythme qu'il ne semblait pas contrôler. A chaque fin de journée, il était impatient de retrouver Zephyr Proud, qui l'attendait sagement.

Madame le Maire n'arrêtait pas de charrier son conservateur et le forçait à lui dire tout ce qui se passait entre lui et Zephyr.

L'étalon a presque faillit subir un véritable interrogatoire digne des pires prisons d'Equestria :

« Très bien, monsieur le mystérieux ! Vous allez tout me dire sur votre relation avec ce jeune pégase. VUE ? »

Le plus drôle, c'était qu'elle était très convaincante, au point d'effrayer son employé pour de vrai.

Du côté de la jument, certains soir, les infirmières venaient la voir quatre part quatre pour lui lancer des avalanches de questions sur ce "beau petit poney". Elles restaient pendues ses lèvres, et lorsqu'on les appelait pour des interventions, elles partaient l'air ronchon. Zephyr évacuait des soupirs de soulagement, tant cela était embarrassant.

Presque deux mois de sont écoulés. Les douleurs commençaient enfin à quitter le corps de Zephyr. Personne n'aurait pu prévoir une chose pareille. Au début de l'après-midi, le soleil venait tout juste de quitter le zénith. Le docteur qui s'occupait de l'observation du pégase est venu la voir. Son allure ne présageait rien de bon. Son ton se voulait tout de même maîtrisé, professionnel :

« Mademoiselle Proud. Comment vous sentez-vous aujourd'hui ? »

Zephyr ne nota pas vraiment la mine de son interlocuteur :

« Je n'ais plus mal nulle part. Ca fait du bien de ne plus avoir à utiliser d'anti-douleur. »

Le médecin perdit la force d'esprit de la regarder dans les yeux. Zephyr l'aperçu cette fois-ci. L'étalon gris sombre sortit une feuille où était inscrit des tas de mots compliqués, propres au domaine de la médecine. Il dit :

« J'ai une mauvaise nouvelle à vous apprendre. »

Lui regardait sa feuille, elle le fixait lui, serrant les sabots l'un contre l'autre de plus en plus fort :

« C'est grave ? »

« Nous devons vous opérer de nouveau. »

« Pourquoi ? »

« Vos ailes ont peut-être subit bien plus que nous le pensions. Il y a un petit os, situé au niveau de l'articulation centrale de votre aile gauche. Il vous permet tout bonnement de replier cette dernière. Nous devons essayer de le réparer d'urgence. En espérant qu'il soit encore réparable. »

Sa patiente eu alors la voix qui tremblait autant que les membres :

« Et si ce n'est pas le cas ? Je ne pourrais plus voler, c'est ça ? »

« C'est pour ça que nous vous prendrons ce soir. L'opération aura lieu vers vingt-et-une heure. »

Il s'approcha d'elle et posa un sabot compatissant sur son épaule. Il le faisait à chaque fois que la réalité qu'il démontrait à un patient était trop difficile à supporter. Il savait ce que c'était. Une sentence. Une exécution qui vous anéantissait et vous confisquait toute espérance. Il voulu lui redonner du courage :

« Ne perdez pas espoir. Il faut que vous y croyiez. Si vous y parvenez, alors la bataille est à moitié gagnée. Je viendrai vous chercher tout à l'heure. Reposez-vous en attendant. »

Pendant que les pas du docteur s'éloignaient dans le couloir, Zephyr n'arriva plus à retenir ses larmes. Elle éclata en sanglots.

Space passa le sace d'entrée de l'hôpital. Il avait pensé qu'elle pourrait avoir faim. Il a demandé à Dal Sapore de préparer un plat de spaghetti bolognaise de sa spécialité. Un vrai régal. Il était tellement pressé d'accomplir son rituel devenu quotidien qu'il trottait gaiement en traversant les corridors blancs qui formaient une architecture serpentine.

La chambre de Zephyr. Il toqua. Pas de réponse. Etrange... Il retenta, toujours rien. Il entra.

La convalescente dormait. Il s'approcha. Finalement, ce que l'on disait était vrai. Quand on dormait, on perdait toute nos barrières. Un visage endormi semblait tellement innocent. Tellement doux. Aucune défense. On se laissait juste emporter par le sommeil. Comme si notre âme quittait temporairement notre corps. C'est beau, une personne qui dort.

L'étalon bleu hésita à la réveiller. Pourquoi s'était-elle assoupie maintenant ? Avait-elle mal dormi cette nuit ?

Space dégluti et lui caressa doucement le ventre. Elle ouvrit les yeux en prenant son temps. En se retournant, elle vit Space qui lui souriait en disant :

« Désolé. Je voulais juste te dire bonjour et te dire que j'avais apporté de quoi manger. Je vais te laisser dormir. »

Son visage joyeux s'effaçait au fur et à mesure que celui de Zephyr s'emplissait de supplication. Ses yeux réverbéraient son besoin de compagnie. Elle voulait qu'il reste avec elle. Elle lui prit le sabot, comme au premier jour, et elle l'attira vers lui. Elle passa ses pattes autour de son cou, se serra. L'étalon senti alors qu'elle pleurait. Il la prit dans ses sabots en lui caressant le bas du dos. En dessous de ses ailes brisées :

« Qu'est-ce qui t'arrive, Zephyr ? »

Elle lui révéla ce qu'elle-même avait appris il y a quelques heures. Space ne savait pas quoi lui répondre. Mais il devait dire quelque chose. Elle était terrorisée. Et elle ne pouvait pas supporter ça toute seule. Mais que pouvait-il faire ? Le médecin a dit qu'il fallait l'opérer de nouveau. Il ne pouvait rien faire pour que la guérison soit assurée. Alors il trouva simplement des mots :

« Il faut que tu garde espoir. C'est normal que tu ais peur. Mais je suis avec toi. Je ne te laisserai pas toute seule. Je te le promets. »

Il posa un sabot sur le sien, et l'autre sur son épaule. Le contact apaisa un peu la jument. Elle saisi doucement la patte la plus haute pour la diriger sur sa joue, elle ferma les yeux, et se laissa aller à toute cette bonté que diffusait l'étalon. Space la regardait, à la fois content de cette approche, et pourtant très stressé par la situation.

Et si l'opération échouait ? Et si Zephyr ne pouvait plus jamais voler ? Elle ne s'en remettrait pas.

Cette pensée le tétanisa. Il ne voulait pas qu'il lui arrive quelque chose. Ca plus que tout. Il allait rester ici. L'attendre. Il n'était pas question qu'elle traverse cette épreuve toute seule.

Ils patientèrent jusqu'à l'heure prévue. Le docteur avait tenu parole. Il était venu lui-même la chercher accompagné de deux autres infirmières. Il lui glissa des mots réconfortants, à elle et  Space, et l'emporta vers le lieu où toute la vie du pégase allait se jouer.

Space avait profité des quatre heures de chirurgie pour aller chercher quelques affaires chez lui pour passer la nuit. Il aurait voulu prévenir Caring Waft, mais il n'avait aucun moyen d'y parvenir. Alors il s'installa et prit son mal en patience. Quatre heures à se ronger les sangs, l'attente fut insupportable et il n'arrivait pas à trouver le sommeil.

C'était une salle un peu étroite. Juste assez grande pour y faire passer quelques poneys, un brancard, et les plateaux de matériel médical. La lumière blafarde éclairait les murs verts et les ustensiles rutilants. Le docteur, qui commandait les opérations avait installé un drap assortie au lieu sur le dos de sa patiente. Les ailes ressort aient par de petits orifices dans le tissu. L'électro-encéphalogramme traçait des diagonales régulières.

Le chef agrippa l'aile gauche de Zephyr et la tira doucement vers lui, jusqu'à ce qu'un petit bruit sec se fasse entendre. L'aile était à présent étirée. Les choses sérieuses pouvaient commencer :

« Scalpel, je vous prie. Adressa-t-il à l'une de ses assistantes. »

Le membre intéressé reposait sur un petit porteur qui le maintenait en l'air. La lame de l'instrument se déposa avec précision sur une petite bosse qui faisait office de jointure. Le mouvement était déterminé, réfléchi. Le sang coula.

Une heure et demie du matin. Le lit fut redéposé dans la chambre 73. Space s'était endormie. Il était paisible. Un sommeil sans rêve s'était emparé de lui. Zephyr dormait aussi. Dans cette chambre, la lumière douce de la lune passa sur eux, comme un contact doux, une caresse, un frôlement attentionné. Ils baignèrent dans le halo argenté de l'astre nocturne. Il semblait les embrasser.

La lune se couchait pour laisser place à l'aurore. Elle s'étendit sur toute la surface d'Equestria, comme une mère aimante entourant son enfant de ses pattes protectrices. Mais ce ne fut qu'aux environs de midi que Space ouvrit les yeux. La nuit à été longue et pénible. Il était encore épuisé et, quand sa mémoire se réveilla à son tour, il tourna la tête en direction du lit d'hôpital. Il prit son courage à deux sabots et se leva pour aller voir son état.

Zephyr, toujours sous l'emprise de Morphée, respirait normalement. Ses expirations étaient comparables à des soupirs. De soulagement, ou de résignation ? Seul le temps possédait la réponse. En voyant son visage en apparence serein, l'étalon eu l'impression qu'elle rêvait.

Il prit la décision de la réveiller, de la même manière que la veille. En lui secouant doucement le ventre. Elle se réveilla tout pareillement. Mais en le regardant, elle ne lui offrit rien d'autre qu'un sourire tranquille. En le lui rendant, Space passa le sabot sur le front de la jument. Ce geste la fit refermer les yeux. Elle était repartie.

Space était rentré chez lui. Dès qu'il avait ouvert la porte d'entrée, il vit le clignotant rouge de son téléphone qui s'allumait et s'éteignait. Il avait des messages. Un seul, pour être exact. De la part de Madame le Maire. Elle exigeait de lui des excuses pour ne pas s'être présenté au travail depuis deux jours. Bien que le ton était un peu enjoué, il savait qu'il aurait à répondre de son absence. Il allait avoir besoin de bien du courage pour s'expliquer sans provoquer une réaction surdimensionnée de sa patronne.

Il devait repasser à l'hôpital dans quelques jours. Et ce serait seulement après cette échéance qu'ils sauront si l'opération avait fonctionnée. Encore attendre. Space était exténué de devoir patienter. Il n'avait jamais fait que cela. Attendre. Etant petit, ses parents lui disait de les "attendre" lorsqu'il avait besoin d'eux. Un papier à signer pour qu'il puisse participer à la sortie scolaire. Un dessin qu'il avait fait et qui les représentait tous les trois. L'annonce de sa réussite à l'examen d'entrée à l'Ecole Supérieure de l'Histoire Equine. Ses Parents étaient souvent absents. Même si ils se trouvaient dans la même pièce que leur fils.

Attendre son premier rendez-vous, qui n'est jamais venu. Attendre pour obtenir un entretien d'embauche, qui lui a permit de faire le travail qu'il aimait. Il n'y a toujours eu que lui qui attendait quelque chose d'autrui.

Seulement, aujourd'hui les choses étaient différentes. Aujourd'hui, quelqu'un d'autre l'attendait lui. Le destin était au rendez-vous. Il avait aidé cette jeune jument. Lui qui avait vécu paisiblement depuis longtemps, cette vague est venue provoquer un raz-de-marée qui avait emporté sa petite existence composée uniquement du quotidien. Cette jument était un cadeau. Un cadeau du ciel.

Oui. A la seconde où il l'avait observé après l'incident, il avait su. Il aimait ce pégase. Il voulait être auprès d'elle. Et elle aussi, le voulait. Elle lui avait dit. A de multiples reprises. Par ses questions. Ses regards. Ses sourires. Quel meilleur moyen de montrer ses sentiments à un poney ?

Cette nuit, Space dormi bien. Ses rêves étaient remplis d'image de Zephyr.

Cinq jours après l'opération. L'étalon terrestre déglutit avant de passer le sace. Il n'en pouvait plus. Il fallait qu'il sache.

En approchant de la porte de la chambre, il entendit des voix. Deux, féminines, particulièrement fortes. Il les connaissait toutes les deux. Il se risqua à frapper. Les voix se turent, et il entra.

Zephyr était assise dans son lit, la tête baissée, l'air maussade. Caring était là aussi. Son visage transmettait une colère certaine. Elle regardait par la fenêtre, impassible. L'atmosphère de la chambre en était lourde. Space prononça timidement :

« ... Salut... »

Les paroles de Caring furent bien plus sèches :

« Salut. »

Et Zephyr n'osait pas dire un mot. Elle se triturait les sabots, l'un contre l'autre. Space se dirigea vers le côté droit du lit, et fit voyager ses yeux entre les deux amies. Il s'adressa à la malade :

« Vous vous êtes disputées, c'est ça ? »

Le pégase vert se retourna violemment :

« En même temps, vous vous étiez bien cachés de me dire que tu risquais de ne plus jamais voler ! Hein, Zephyr ! »

Celle-ci grelotait. Caring continua :

« Ton ami l'étalon, à la limite, il n'avait aucun moyen de me contacter. Mais toi... Pourquoi j'ai l'impression que tu ne me fait plus confiance ? Pourquoi tu me cache tout en ce moment ? Il y a une raison à ça ? Je veux bien comprendre que ça t'ai traumatisé, mais tu aurais quand même pu me le dire, à un moment ou à un autre. Parce que si je n'étais pas venue aujourd'hui, je ne serais toujours pas au courant. On est amies, non ? Alors pourquoi ? »

En parlant, ses yeux s'étaient embués. Elle n'allait pas pouvoir retenir ses larmes encore longtemps. Ses lèvres commençaient déjà trembloter. Zephyr inspira un grand coup, et dit alors :

« C'est parce que je ne voulais pas que tu t'inquiète. Parce que je sais que tu te serais fait un sang d'encre pour moi. Et je sais que tu aurais eu du mal à le supporter. Mais toi, tu dois vivre. Tu dois travailler. Tu comprends ? »

Elle fit une pause, puis reprit, les yeux dans ses yeux :

« Quand le docteur me l'a annoncé, j'étais détruite. J'avais tellement peur. Et je crois que si Space n'avait pas été là , je ne l'aurai pas supporté non plus. J'avais besoin de compagnie. Et je ne voulais pas que tu ne t'en fasses pour moi. »

De l'eau se mit à couler sur ses joues :

« Mais je sais bien que j'ai eu tort. J'aurais dû te prévenir. Tu aurais été là , avec moi. Avec nous. Je suis vraiment désolée. Je t'aime, tu sais. Tu es ma meilleure amie et ça, rien ni personne ne pourra y changer quoique ce soit. »

Cette fois-ci, les juments laissèrent exploser leurs émotions. Caring galopa pour étreindre son amie comme jamais elle ne l'avait fait :

« Moi aussi je t'aime ma petite Zephyr. Mais par pitié. Au nom de notre amitié, ne me cache plus des choses aussi importantes. »

« C'est promit. »

Space resta spectateur de ce spectacle magnifique. Il était témoin de la magie de l'amitié. Deux ponettes qui montraient leur amour l'une pour l'autre, malgré les obstacles. Malgré les difficultés. Zephyr et caring séchèrent leurs pleures et restèrent encore un peu dans les pattes l'une de l'autre.

Le docteur apparu enfin. Il affichait une neutralité à vous glacer. Il tenait une chemise beige, contenant très certainement les résultats des dernières radios de sa patiente.

Les trois comparses ne le quittèrent pas une seule seconde des yeux. Leur cœur battait à tout rompre et ils se préparaient à encaisser n'importe quelle réponse. Intérieurement, ils priaient. Le médecin prit la parole, comme face à un auditoire :

« Nous avons terminé les analyses. »

Le suspense était à son comble. Zephyr ne pu se retenir :

« Alors ? Comment va mon aile ? »

Et un sourire se dessina sur le visage bourru du docteur :

« L'os a été réparé. Votre aile sera guérie d'ici un ou deux mois. Vous pourrez voler de nouveau mademoiselle Proud. »

Caring et Space sautèrent, de bonheur, au cou de Zephyr, qui retint un cri du cœur pour exprimer son soulagement. Le cauchemar était enfin terminé. L'orage était passé. Ils ont réussi l'épreuve. Ils pouvaient enfin reprendre leur souffle. Même le docteur fut ému par cette réaction qu'il ne contemplait pas si souvent chez ses patients. Il était content d'avoir accompli sa mission avec succès.

Deux mois plus tard, Zephyr fut entièrement rétablie après cinq mois entiers passés à vivre auprès d'autres malades et blessés. Cette liberté de mouvement lui avait tellement manqué...

Deux autres mois de rééducation plus tard, le pégase pu de nouveau goutter à l'appel du ciel. Space Desir, le poney qu'elle aimait le plus au monde, et Caring Waft, son amie, qui s'apparentait d'avantage à une sœur, étaient présents pour son ultime essaie.

Elle déploya ses ailes. Fit un bon, et retrouva toutes ces sensations qui rendaient l'expérience du vol si formidable. Le vent qui vous fouettait la face, le bleu céleste et les couleurs multiples de la terre ferme qui se partageaient votre champ de vision. Vous deveniez la frontière entre les deux. Vous pouviez faire tout ce que vous vouliez. Vous étiez libre. Zephyr ressentit tout cela.

Mais pendant qu'elle retrouvait toutes ces choses qu'elle n'avait pas pu éprouver durant tout ce temps, une pensée lui traversa l'esprit. Ce dernier fit un retour en arrière, et ce qu'elle y vit lui provoqua un haut-le-cœur. Elle revoyait Space. Elle se souvînt alors de sa présence, de ses regards empathiques, de ses caresses pleines de gentillesse, de ses attentions. Elle ne contrôlait plus ses son cœur qui lui susurrait :

« Tu l'aime. Tu es amoureuse de lui. Tu as besoin de lui. Alors descend. Va le voir. »

Elle eu un temps de réflexion. Puis sa décision fut prise. Elle atterrie auprès de ses deux compagnons. Elle posa les sabots au sol, juste devant l'étalon bleu, et le toisa. La seconde d'après, son nez s'était collée au sien. Space regardait la jument aux yeux fermés, stupéfait. La mâchoire inférieure de Caring avait touché l'herbe parterre. Ses yeux menaçaient de sortir de ses orbites.

En se retirant, Zephyr posa un regard doux sur celui qu'elle venait d'embrasser. Ses joues étaient brûlantes, tout comme celle de l'étalon, qui restait pétrifié par l'audace du pégase.

Caring avait reprit ses esprits. Mais il semblait que ce n'était pas le cas des tourtereaux. Elle les voyait rester là, l'un béat et l'autre tout timide. Ca n'allait pas du tout ! Elle devait prendre la situation en sabots.

Elle se faufila jusqu'à eux, tel un félin près à bondir sur sa proie. Elle avait même adopté son air espiègle, qu'elle ne prenait que lorsqu'une idée saugrenue, ou complètement délirante, la poussait à agir. Elle les atteignit enfin. Son visage était visible entre ces deux jeunes amoureux. Elle prit le crane de chacun, et les colla l'un contre l'autre, en s'assurant que les lèvres se rencontraient bien. Space et Zephyr passèrent de la stupéfaction, à la passion. Les fenêtres de leurs yeux se refermèrent et ils s'abandonnèrent. De son côté, le pégase regarda son oeuvre, très fière d'elle.

Pour fêter le rétablissement complet de sa nouvelle chérie, Space invita Zephyr à diner pour fêter l'évènement. Il l'emmena dans le restaurant de Dal Sapore, ou ils dégustèrent la même pizza trois fromages qu'ils avaient mangé pour leur première entrevue. Caring est venue aussi, accompagnée d'un pégase couleur chair, au crin blanc, assez musclé, qui devait sûrement être son petit ami. Ils passèrent tout le repas à discuter, à rire, et à faire des jeux. Le chef du restaurant les observait de temps en temps, et souriait en voyant ce petit groupe d'amis et d'amoureux. Son petit Spacci avait trouvé fer à son sabot. En sortant du restaurant, les deux couples se séparèrent. Space et Zephyr choisirent de poursuivre la soirée en allant tous les deux se promener dans le parc de la ville.

Assis sur un banc, Space avait entamé une discussion sur la beauté de la lune. Ils en sont venus à des sujets plus intimes. Ce fût à cet instant que Zephyr expliqua sa situation familiale compliquée. Space n'eut rien de spécial à dire, mis à part qu'il avait longtemps été seul, après avoir été chassé de chez lui, parce que ses parents trouvaient qu'il ne fournissait aucun effort. Ils étaient restés en contact, mais les relations continuaient de se tendre. Il lui décrivit aussi son premier rendez-vous amoureux auquel sa prétendante n'avait jamais porté le moindre intérêt. Leur vie à tous deux se déliait, comme une confession qui leur permettrait de tourner la page sur le passer et entamer un nouveau chapitre de leur existence. Un chapitre où ils partageraient tout. Ensemble.

Space passa sa patte derrière le cou de Zephyr. Elle sentit cette invitation et s'approcha de lui, pour qu'enfin leur corps se touche. Le sabot de l'un dans le celui de l'autre, le petit pégase pencha alors la tête pour la déposer délicatement sur l'épaule de l'étalon. Ils sont restés un petit moment comme cela, à observer le ciel noir, illuminé par la lumière apaisante de la lune et celle, plus discrète, des étoiles :

« Merci pour tout, Space. Dit-elle. »

Il fût interloqué :

« Pourquoi ? »

« C'est toi qui m'a sauvé la vie. Aussi bien en m'emmenant dans cet hôpital qu'en m'offrant ton amour. »

Il rougit. Il chercha un moment ce qu'il pouvait lui répondre, son cœur fût bien plus vif :

« Tu sais, aider quelqu'un qui s'est blessé est assez normal, pour moi. Il faut s'entraider entre poneys. Mais je n'aurais jamais imaginé que cela signerait un changement aussi important dans ma vie. »

Elle se retourna face à lui. Il fit de même. Ils se regardèrent. Contemplèrent les yeux de l'autre, en se souriant tendrement :

« Mais je heureux que cela se soit produit. »

Et puis, leur visage se rapprochèrent, tandis qu'un tambour battait dans leur poitrine :

« Je t'aime. Déclarèrent-ils en chœur. »

Leurs lèvres se touchèrent, et ils s'embrassèrent. Zephyr posa ses sabots sur le visage de Space, comme pour ne pas que celui-ci s'échappe. Le terrestre pris ses hanches avec douceur, mais assurance. Et lorsque leur bouche se détachèrent, une idée leur vint en tête. Une idée folle. Le désir l'emporta sur la fierté. La passion sur la raison. Le cœur a ses propres raisons, que la raison ignore.

Ils rentrèrent dans la maison de Space, et leurs baisers reprirent. Ils sentaient la chaleur monter. Tous les deux firent une courte pause pour s'admirer, puis s'embrassèrent à nouveau. Zephyr commença à faire entrer sa langue dans la bouche de Space, qui fit de même. Ils rougirent de bonheur, de plaisir, d'amour.

Space accompagna Zephyr vers sa chambre. Elle était bien rangée, et le lit était fait. Elle en fit la remarque, ce qui leur donna envie de rire. Puis, le jeune pégase s'allongea, le dos, sur le matelas moelleux. Space vint sur elle et lui prit la bouche une nouvelle fois. Les lumières s'éteignirent. Le noir se fit. Ils étaient seuls, tout l'un pour l'autre.

Depuis ce soir, beaucoup de choses avaient changé. Tous les deux eurent le temps de se marier. De fonder une famille avec leurs deux fils. D'ailleurs, des rumeurs couraient, selon lesquelles, Zephyr attendrait une petite pouliche.

Chaque soir, ils se retrouvaient. Ils se donnaient l'un à l'autre, et s'embrassaient une dernière fois avant de tomber dans le sommeil de ceux qui s'aiment.

FIN

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Note de l'auteur

Voilà ! Enfin terminé !!

Chères lectrices, chers lecteurs,

J'ai l'immense plaisir de vous présenter la version finale de ma première fiction !^^
Commentez à foison, et je vous attends pour de nouvelles histoires.

ET n'oubliez pas : VIVE LES DEUX SOEURS, VIVE EQUESTRIA !

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DreamerScene
DreamerScene : #49073
Merci beaucoup ^^

Pour ce qui est des perso, quelqu'un m'a donné l'idée de faire 2 autres fic sur leur passé respectifs. ET puis, je vais éditer cette histoire pour développer un peu plus. Parce que c'est vrai qu'en fait, la partie résumée retire quelque chose à l'histoire.

Après, pour les dialogues, quand on ne se connaît pas, on a pas tellement de chose à se dire...

Mais je vais m'occuper de rectifier des choses.

Merci infiniment, ça me donne encore plus envie d'écrire ^^
Il y a 4 mois · Répondre
Raxacoricofallapatorius
Raxacoricofallapatorius : #49067
C'était... Cool ?

Franchement ouais, c'était cool ! J'ai souris, c'est pas une histoire qui prend la tête, c'est mignon tout plein et... Et merde quoi, ce restaurant Italien je veux le voir dans la série !!

Nan franchement, vraiment pas mal pour une première fois, même si j'avoue que les dialogues sont un peu rapides des fois !

C'est vrai que niveau perso' j'pense que t'aurais pu développer un peu plus, mais sinon c'était bien. Et je me suis bien imaginé la scène de l'infirmière affamée.

Une chose à dire, bravo ! Continues d'écrire, j'pense que tu pourras faire de belles choses !
Il y a 4 mois · Répondre

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