Septième et dernière fatalité

Cinquante ans après les évènements

Tout avait semblé subitement plus calme depuis la mort de la princesse Celestia. Bien sûr, Luna s’étant retrouvée à gouverner seule, avait dû rassurer les poneys sur l’absence de son aînée. L’apprentissage de la mort de celle-ci fut pour tout équestrien un choc aussi assourdissant que le son funèbre de milliers de cloches tintant à l’unisson. Ils allaient même jusqu’à soupçonner Luna de l’avoir tuée de ses propres sabots pour régner seule, et peut-être pouvoir un jour étendre la nuit éternelle. Ils la soupçonnaient en partie car d’après son nouveau physique, elle ressemblait étrangement à Nightmare Moon, quoiqu’elle continue de se faire appeler Luna. Et elle avait pourtant réussi à les rassurer, même si cela eut pris plusieurs années, en continuant le cycle jour nuit en manœuvrant le soleil. De plus, même s’ils avaient effectivement raison de l’accuser de sororicide, elle avait fait porter le chapeau à son ami parti en ermite loin de la civilisation, afin d’éviter une révolte qui aurait pu entraîner sa propre mort. Même si les équestriens avaient continué à s’agiter pendant plus d’une décade, la tension s’affaissa finalement et le système politique du pays se stabilisa de nouveau.

La mort de la princesse Twilight et des cinq autres membres de l’Harmonie eurent aussi attisé la fureur des poneys. Mais comme pour Celestia, toutes les fautes de ces tragédies eurent été rapportées au même meurtrier. Pendant très longtemps justement, ce mystérieux tueur avait été recherché partout afin d’être capturé mort ou vif. Mais jamais personne ne l’eut vu, et Luna non plus depuis la mort de sa sœur.

Au bout de près de vingt ans, on avait cessé de le rechercher, même si les gardes restaient attentifs. Mais l’affaire du régicide avait petit à petit été oubliée par l’animation de l’actualité. Donc finalement, tout parut plus calme cinquante ans après, même si c’était un silence de mort un peu effrayant, puisque le temps s’écoulait comme si rien ne s’était produit ces dernières décennies. La mort de la dirigeante solaire avait pourtant provoqué la fin d’un âge assez monumental.

À son sujet, Luna avait continué de l’aimer malgré son aveu qu’elle aimait les équestriens plus qu’elle-même. En réalité, cela lui avait paru plus comme une révélation capitale, que comme un coup de poignard au cœur. Elle la respecta encore plus et eut veillé à ce qu’elle eût un enterrement digne de sa personne, au panthéon de Canterlot. Elle eut même fait le serment au nom de sa mémoire de maintenir Equestria dans l’Harmonie et l’unité. N’ayant plus de sœur à aimer, elle finit par aimer les équestriens autant que sa sœur, et à se dévouer corps et âme à eux. Au bout de cinquante ans, elle ressemblait à Celestia, à l’exception qu’elle se rappela qu’elle n’était pas sa grande soeur.

Comme pour l’accoutumée de sa grande sœur, la cadette avait repris les raines de ses tâches diurnes. Elle qui avait l’habitude de se dresser, telle une muraille face aux ténèbres harcelant sans se lasser les poneys du fond de leurs rêves, elle croyait le travail de Celestia plus reposant et plus simple. Mais en réalité, elle s’était vite trompée : non pas car c’était plus compliqué qu’il n’y paraît, mais car elle s’ennuyait. Elle n’aurait jamais imaginé à quel point le travail de Celestia, et en particulier de rencontrer des poneys à la chaîne venue pour demander l’arrangement de un ou deux problèmes pouvaient être barbants. Ils ne peuvent pas se débrouiller tout seul, ces idiots ?, pensait Luna. En y repensant d’ailleurs, elle se demandait comment Celestia avait pu supporter un devoir aussi rasoir pendant plus de mille ans. Elle la respectait encore plus à chaque fois qu’elle y songeait.

À ce propos, aujourd’hui, elle avait travaillé toute l’après-midi de cette manière. Elle qui avait déjà beaucoup de travail la nuit, c’était toujours avec des cernes qu’elle essayait de travailler quelques fois le jour. Et quand c’était le cas, elle était sollicitée de tellement de côtés, qu’à l’arrivée de la nuit, elle s’écroulait comme une vieille carpette dans son lit. Heureusement que les nobles étaient présents pour l’aider, sinon elle n’oserait pas imaginer l’enfer.

Le crépuscule s’annonça et le voyant, Luna se dit que la chaîne de poney à rencontrer était bientôt achevée. Il n’y avait personne dans la salle du trône à part elle et un garde qui avait tourné le dos pour accueillir le prochain poney. La princesse profita du moment où personne ne la regarda pour bailler du plus fort qu’elle le put, sans se prendre la peine de se couvrir la bouche.

"Il y en a encore d’autre à rencontrer ?", demanda-t-elle au garde qui avait le nez dans l’embrasure de la grande porte.

"Il n’en reste plus qu’un votre majesté.", dit-il en tournant la tête.

Réjouie d’entendre qu’il n’en reste qu’un dernier, elle s’efforça donc un peu de prendre son temps avec ce poney finaliste.

"Eh bien ? Qu’attendez-vous pour le faire rentrer ?"

"Eh bien heu… Il est un peu bizarre. Il est entièrement voilé d’un vêtement gris, et il porte un masque de comédie au visage."

"Un masque de comédie ?", Luna, interloquée d’une telle subtilité.

"Oui.", confirma le soldat. "On lui a demandé de le retirer et aussi d’abaisser sa capuche pour qu’il vous soit plus présentable. Mais il a dit que s’il le faisait, vous auriez des cauchemars."

L’alicorne noire ne put s’empêcher d’éclater de rire.

"Ce n’est pas grave. Laissez-le rentrer." dit-elle après s’être calmée. "S’il tient à le garder son masque, alors qu’il le garde."

Le garde haussa des épaules et en regardant en direction de la porte ouverte à moitié, il fit un signe du sabot pour commander à l’invité d’entrer. Celui-ci s’y attela mais avançait à un rythme lent, sans forcément que ce soit voulu. La porte se referma, le garde se mit dans un coin, et lui, fit face à la seule dirigeante actuelle d’Equestria, la princesse Luna. Généralement, c’est le poney venu solliciter la princesse qui parle en premier dans ce genre de rendez-vous. Mais comme il ne disait rien, ils se toisèrent du regard dans un court silence qui pourtant pour le garde parut presque éternel. La gouvernante parla.

"Eh bien… dis-moi ce que tu es venu chercher ici."

"Je désire vous parler seul à seul.", dit-il d’une voix ancienne. Elle fit signe au garde de se retirer, il se retira. L’étranger s’assit et se mit à parler. "Je suis venu ici pour me confesser, et vous demander deux choses."

" …Parle."

Il récita d’une voix posée. "Je suis un psychopathe, un meurtrier récidiviste. J’ai tué des poneys qui pourtant n’étaient même pas responsables de mon sort. J’ai mis à mort des innocents. J’ai torturé de façon inéquine une de mes victimes. J’ai vendu le bonheur de toute une population à un connard. J’ai volé les éléments de l’Harmonie temporairement, provoquant ainsi des cataclysmes par delà tout Equestria. Et j’ai détruit la vie de quelqu’un de sûrement formidable, et que pourtant je ne connaissais pas. Et le pire, c’est que, Elle, n’a jamais connu le nom de sa bête noire."

Au fur et à mesure qu’il confessait ses horreurs passées, Luna s’était levée et approchée de lui. Cette voix, quoiqu’un peu usée par le temps, lui semblait très familière. Arrivée tout près de lui, elle s’assit à son tour sur le sol marbré et froid du palais et lui retira le masque avec ses sabots. La moitié droite de son visage avait été défigurée, laissant presque apparaître son crâne sous les tissus musculaires. Seule la partie gauche était intacte, même si une cicatrice la traversait.

"Phoenix… c’est toi ?", Luna, ne croyant pas à la vision qu’elle avait. "Je… je te croyais mort après tous ce temps."

Il ria légèrement. Un rire vieux. "Luna… tu sais bien qu’il en faut plus que ça pour m’enterrer."

La jument gloussa. "La dernière fois que je t’ai vu user de ton sens de l’humour, tu n’avais que treize ans." Elle le dévisagea, autant en apparence qu’en profondeur. "Tu as changé. Tu ne ressembles plus au Phoenix déterminé à tuer ma sœur."

"Oh… je sais.", dit-il d’une voix remplie de regret. "Après tout ce temps passé à philosopher sur mes trente ans de vie dans ma grotte… j’ai fini par réaliser qu’en faîte, Celestia avait raison depuis le début à mon sujet. Et aussi, il y avait les paroles de la princesse Twilight, juste avant que je ne la tue : elle m’a fait énormément réfléchir sur mon existence, et aussi sur la sienne. C’est alors que j’ai finis par comprendre que je n’étais que l’élément d’une malheureuse fatalité et que… J’ai l’impression que je me suis fait manipuler, mais je ne vois pas par qui."

Luna ne répondit rien, à l’écoute de son vieil ami. Celui-ci soupira.

"Je me suis comporté comme un authentique salaud, n’est-ce pas ?", dit-il avec un sourire nostalgique.

"Ca tu peux le dire." répondit Luna avec le même rictus.

"Bref… je suis donc venu te demander deux dernière choses, avant que je me décide à vraiment quitter ce monde.", dit-il changeant de sujet.

"Je t’écoute."

"La première chose que je demande, c’est que tu me pardonnes pour avoir été l’origine de la mort de ta sœur. Et que par la même occasion, tu m’affranchisses de cette poursuite judiciaire à mon égard."

"Nous vous accordons notre pardon pour avoir provoqué indirectement la mort de la princesse Celestia notre sœur, pour avoir trahis l’empire de cristal, ainsi que pour tous vos meurtres, quels qu’ils soient. Nous, Luna, princesse et dirigeante d’Equestria, Nous vous libérons de vos péchés.", eut-elle dit d’une voix solennelle et tenue. Elle s’empressa cependant d’ajouter. "Tu sais Phoenix. Après tout le temps que t’as passé à rester invisible, il n’y a plus aucune force de l’ordre qui te recherche. Tout le monde te croit mort ici."

Ice fut un peu surpris. "Oh, je vois. Apparemment, rester dans une grotte, coupée de toute information extérieure nous donne du retard sur l’actualité, à ce que je vois."

"Et quelle autre faveur veux-tu que je te remplisse ?", enchaîna-t-elle souriante, ignorant totalement son commentaire.

"J’aimerais, avant de m’en aller, recevoir un baiser de ma seule vraie amie, en signe d’adieu."

Luna fut à présent un peu plus mélancolique. Il était vrai qu’avec son âge avancé, il allait partir bientôt… très bientôt. Pas que cela la fasse souffrir particulièrement, mais en partant, il emportait avec lui cet instant où sa propre vie avait basculé. Bref, une partie importante d’elle. Elle s’emplissait de nostalgie en contemplant le visage monstrueux de Phoenix, un visage qui repousserait le désir de n’importe quelle jument à embrasser un étalon. Et pourtant, la belle et immortelle déesse de la lune lui déposa un baiser, sans dégoût, sur ses lèvres.

Elle lui rendit son masque de comédie qu’il posa de lui-même sur son visage, afin de dissimuler le démon qu’il avait été jadis. Ils se relevèrent.

"Tu n’es pas un monstre Phoenix.", lui dit-elle compatissante. "T’es juste un pauvre poulain dont la vie a déraillé à cause d’une malheureuse fatalité."

"Je le sais Luna.", répondit-il mélancolique. Il se retourna. "Adieu."

"Adieu mon ami."

Puis il quitta les lieux.

Elle soupira, comme pour faire mine de tourner la page. Elle retourna s’asseoir sur son trône et regarda Canterlot par la fenêtre. Le soleil continuait à descendre dans le ciel, faisant naître ainsi le crépuscule. Luna comprit qu’il sera bientôt temps d’intervertir les astres. Mais elle avait encore du temps devant elle, et comme elle avait terminé ses rendez-vous « très important », elle ne sut plus quoi faire. Elle se résigna à attendre et convoqua un domestique pour qu’on lui apporte une lime. Elle le reçut comme convenu et se mit à raffiner la forme de ses sabots.

Une tempête couleur guimauve eut l’air de naître dans les airs, pour ensuite se transformer en un siphon d’où s’échappait des éclairs, tonnant dans la vaste salle. Luna reconnut ce tourbillon entre mille. Elle n’en fut pas surprise du tout et garda son regard rivé sur ses sabots qu’elle taillait, comme si elle était blasée du spectacle qui se déroulait sous ses yeux. Elle fit même un discret mouvement négatif de la tête.

Et du tourbillon, il en sortit un draconequus habillé d’une chemise jaune avec des palmiers et d’un bob blanc, et il portait des lunettes de soleil et tenait une valise débordante de trucs en tout genre.

"Alloah tout le monde !", disait-il tout joyeux. "Je suis rentré de mes vacance !"

"Salut Discord… ", dit Luna, blasée.

Discord baissa légèrement ses lunettes noires et afficha un air de surprise.

"Luna ?" Il regarda ensuite le soleil présent dans le ciel, puis Luna ; puis le soleil, puis Luna ; puis le soleil, puis Luna. Il complimenta alors. "Ce n’est pas que ton nouveau look m’écœure – au contraire je trouve ça classe – mais… ce n’est pas Celestia qui est ici à cette heure de la journée normalement ?"

"’Tia est décédée.", répliqua-t-elle blasée.

Discord fut encore plus surpris, à un point que ses lunettes de soleil se décrochèrent de son nez pour s’envoler en battant des branches, un peu à la manière d’un papillon. "Comment ça, décédée ? Depuis quand ?"

"Seulement très peu de temps après ton départ, il y a eu un… un incident ; qui l’a conduit inévitablement à la mort."

"Un incident ?", dit-il en clignant frénétiquement des paupières. "Ah bah bravo ! Il suffit que je m’absente à peine deux semaines pour la planète Naboo dans une très, très lointaine galaxie ; pour que vous, les filles, commencez déjà à faire des âneries !"

"Deux semaines ?" répondit-elle en haussant un sourcil. "Ca s’est produit il y a cinquante ans Discord."

Et là, Discord prit ses yeux pour les secouer comme des dés dans sa patte de lion, avant de les remettre en place. Non, il ne rêvait pas.

"Cinquante ans ? Tu plaisantes là j’espère ?"

Luna soupira d’exaspération. "Discord… ‘Tia et moi t’avons pourtant prévenu, tout comme Twilight, que voyager dans l’espace-temps à travers l’univers pouvait entraîner des voyages dans le temps involontaires, que ce soit dans le futur, ou dans le passé. T’es effectivement resté là-bas deux semaines, mais tu es revenu cinquante ans plus tard sur le voyage de retour. T’aurais pu éviter cela mais comme à ton habitude, tu nous as snobées."

"Oh… je comprend mieux maintenant." Puis il eut comme une révélation. "Mais… mais ça veut dire que si on a basculé cinquante ans dans le futur… Oh… " ses yeux s’humidifièrent. " …Fluttershy… "

"Et oui Discord, je suis désolée… " dit Luna totalement indifférente, continuant à se limer les sabots. "Fluttershy est morte, comme ses amies, et ce depuis longtemps déjà."

"Et Twilight ? Elle est immortelle depuis qu’elle est alicorne, non ?"

"C’est vrai, mais elle n’a pas supporté la perte de ses amies. Elle est morte, noyée dans son chagrin, et ce depuis longtemps déjà." se répéta-t-elle comme pour souligner à quel point elle en était blasée.

Discord tripota sa barbiche, comme pour réfléchir. "Hmm… C’est navrant. Et moi qui voulait leur raconter mes vacances, voila que je n’ai plus rien à faire."

Luna lui sourit, plus blasée du tout. "Justement, à propos de tes vacances, dis-moi ce qu’il y a sur Naboo. Pour une fois qu’il se passe quelque chose dans ce palais aussi morne."

"Oh… et bien… ", le draconequus se remémorant ses deux dernières semaines. "Naboo est une planète tropicale où il fait assez beau. Il y fait même très chaud d’ailleurs. Il y avait de splendides monuments, on pouvait se baigner, et la culture de cette civilisation était pour le moins original. J’attendais à me faire remarquer par rapport à mon apparence. Mais il y a tellement de bestioles bizarres là-bas que ça leur semblait totalement banal de voir un draconequus se promener dans leurs rues." Il posa sa valise pour l’ouvrir. "J’ai aussi rapporté un souvenir."

"Oh ?", fit une Luna souriante, avec la curiosité d’une pouliche.

Discord en sortit une sorte de petit bâtonnet non pas composé de bois, mais de métal.

"Qu’est-ce que c’est ?" questionna la princesse.

"Je n’ai pas très bien compris les explications du marchand, mais il m’a dit qu’il s’en servait pour couper des fruits à la peau ou à l’écorce dure avant que je le lui achète. Un peu comme découper des noix de coco.", donna-t-il en exemple.

"Ce truc peut découper des noix de coco ?", dit Luna, très sceptique. "De quelle manière ?"

Discord appuya sur ce qui ressemblait à un bouton rouge, se trouvant sur le bidule en métal. Un grand trait luminescent vert surgit alors du petit bâton métallique, à la grande surprise de l’alicorne.

"Pas mal le coup de la lame cachée dans le manche n’est-ce pas ?", questionna-t-il avec un ton vantard.

"Je ne vois pas en quoi il est nécessaire d’avoir une lame aussi longue pour découper des noix de coco."

"Oh… ça je sais. À vrai dire, ça ressemble plus à une épée brillante qu’à un outil de cuisine. Je comptais l’offrir à Fluttershy, puisqu’elle aimait la couleur verte… mais maintenant qu’elle est morte… " Il éteignit l’étrange objet avec un gros soupir de regret.

"Bah… tu peux toujours le poser sur sa tombe. Je suis sûre qu’elle appréciera.", tenta Luna de le réconforter.

"Où est-elle ?"

"Elle est enterrée au panthéon de Canterlot avec ses amies. C’est là-bas que tu la trouveras."

"Eh bien Luna, je t’en remercie. À une prochaine fois."

"Attends encore un peu Discord !", l’interpella vivement la princesse de la nuit avant qu’il ne claque des doigts. "T’as une idée de comment t’occuper à l’avenir ?"

Le draconequus réfléchit quelques secondes, et se rendit vite compte qu’en effet, il s’ennuiera bien assez vite. "Heu… non. Je t’avoue bien que non."

"Si tu veux, je te laisse gouverner l’empire de cristal." proposa-t-elle sur un ton plutôt joyeux.

"Mais heu… ? Pourquoi voudrais-tu que je dirige l’empire de cristal ? Ce n’est pas Cadance qui s’en charge d’habitude ?" puis il ajouta, comme en devinant. "Eh bien peut-être parce que Sombra est revenu, il a tué Shining Armor et Flurry Heart et que depuis Cadance s’est suicidée. Et qui d’ailleurs, la perte de l’empire face au retour surprise de Sombra est très liée au fameux incident impliquant la mort de Celestia ?"

Luna avait les yeux grands ouverts. "Comment l’as-tu deviné ?"

"Juste une intuition.", répliqua Discord. "Bon… je suppose que Sombra a été détrôné depuis le temps."

"Justement.", dit Luna, voulant passer tout de suite aux choses sérieuse. "Actuellement, le trône de cristal est vacant et les poneys de cristal sans chef. Je voulais te proposer de le prendre. Après tout, tu ne peux pas être pire roi que Sombra, non ?"

"Je suis désolé, mais non. Je ne ressens aucunement l’envie de régner sur des poneys à qui je ne dois rien."

"Quand je parlais de régner Discord, je parlais de régner comme au temps où tu semais le chaos par le passé.", dit-elle d’un sourire aguichant. "Je parlais du temps où tu t’amusais à faire des cochons volants, du temps des bisons qui dansaient avec des tutus, du temps où il pleuvait du chocolat au lait, du temps où tu balançais des verres explosifs… "

"Mais heu… pourquoi m’encourages-tu à refaire ça ? Je ne comprends pas.", dit-il confus.

"Je dis ça car les éléments de l’Harmonie sont accrochés à l’arbre et ne vont plus en repartir ; tes amis sont morts ; Fluttershy est morte ; bref… il n’existe plus aucun poney pouvant te donner une raison de t’empêcher de le faire ; et tu n’as pas grand-chose d’autre à faire pour éviter l’ennui. Et pour éloigner le chaos d’Equestria, je t’offre donc l’empire de cristal comme terrain de jeu. Qu’est-ce que tu en dis ?"

Discord hocha négativement de la tête. Il sembla même très irrité. "J’en ai marre de vous voir toutes à dire en permanence que le chaos, c’est le mal. Sombra est mauvais et fait le mal, mais pas moi. J’aime le chaos parce que je trouve ça marrant. Et je le répands tout simplement parce que je trouve ce monde grisé et barbant cruellement en manque de couleur. Si les poneys n’apprécient pas le chaos, c’est tout simplement car ils n’ont pas le sens de l’humour. Et s’il l’avait, il se rendrait vite compte à quel point le chaos ajoute de la joie et du rire. Alors arrêtez de me voir comme quelqu’un de particulièrement méchant qui vaudrait mieux écarter en cas danger."

"Et pourquoi les poneys de cristal ne partageraient pas le même sens de l’humour que toi ? Pourquoi refuserais-tu de le leur apprendre ?"

Discord écquarquilla des yeux en entendant ces deux questions. Là, elle venait de toucher un point sensible. Il se remit à tripoter sa barbe, ce stimulus l’ayant toujours aidé à réfléchir clairement.

"Souviens-toi aussi Discord que quand j’étais pouliche, tu arrivais toujours à me faire rire avec ta magie chaotique. Si j’avais participé à ta pétrification, c’est tout simplement car je ne pouvais pas accepter, tout comme ‘Tia, que tu imposasses ta vision des choses à des poneys qui ne pussent l’accepter."

"Oui, mais je suis sûr que si les poneys de cristal ne l’acceptent pas, tu vas arriver pour m’arrêter. J’en suis persuadé."

"Même pas.", rétorqua Luna.

"Hein ?"

"J’ai promis sur la tombe de ma sœur que je veillerai sur Equestria en son absence. Je sais que j’aurai beaucoup de mal à t’arrêter. Alors je t’offre l’empire de cristal pour qu’en échange tu laisses les équestriens en paix. Et, encore une fois je te le dis, pourquoi les poneys de cristal n’accepteraient-ils pas ta vision des choses ? Peut-être riront-ils ?"

Le draconequus se gratouilla nerveusement la barbe, vraiment intéressé par l’offre. "Hmmmmmmm… J’ai besoin de réfléchir un moment. Mais je te remercie sincèrement pour ce gentil cadeau."

"Oh mais de rien, c’est tout à fait naturel.", répondit Luna souriante.

"tout à fait naturel ? Vraiment ?" Discord, étonné par ces dires. Juste avant de claquer des doigts pour se téléporter ailleurs, il lâcha comme un au revoir. "Je trouve que t’as changé Luna… vraiment."

Et Luna se retrouva de nouveau seule. Elle méditait sur la dernière parole du draconequus, la tête posée sur le sabot, coude sur l’accoudoir du trône. Il fut vrai que depuis l’expérience vécue auprès d’Ice Phoenix, en fusionnant avec son double, et en entendant les paroles de sa sœur sur l’amour pour son peuple ; quelque chose semblait l’avoir transformé, l’avoir fait grandir. Elle avait compris la puissance du serment de Phoenix envers sa sœur, du serment de Celestia envers son peuple, et elle savait qu’abandonner les poneys de cristal à un avenir potentiellement fatal, était une chose écœurante en soi. Mais quand vous avez prêté serment sur une tombe, quand vous avez fait une promesse avec la détermination de l’accomplir au nom de l’amour que vous portez à celui à qui vous avez fait la promesse ; jusqu’où irez-vous pour la paix et le bonheur de ce poney à qui vous avez prêtez serment, que ce soit par amour, par honneur ou par haute estime ?

Luna murmura. "Oui Discord… Je sais… J’ai changé."