Chapitre 4 : Open doors

« Relâchez-moi tout de suite ! » se plaignit-il alors que Celestia le retenait prisonnier à l’aide de sa magie d’alicorne. « Je demande le droit à une chute adéquate à ma mort ! »

A côté d’eux, la paladine lâcha un long soupir de soulagement… et s’en surprit aussitôt, pourquoi son saut par cette fenêtre l’aurait bouleversée ?

« Pourquoi votre propre vie a-t-elle aussi peu d’importance à vos yeux ? » s’enquit Celestia, prenant le ton d’une mère qui parlerait à son enfant avec intérêt.

« Je préfère mourir plutôt que de vivre un millier d’années supplémentaires dans la solitude ! » gronda-t-il, en essayant toujours de se défaire de l’emprise de la princesse alicorne.

« Un millier d’années supplémentaires ? » répéta Celestia avec étonnement. « Que voulez-vous dire par là ? »

Il cligna des yeux au lieu de l’alicorne ; il venait de réaliser ce qu’il avait eu le malheur de dire. Pendant un instant, il se contenta simplement de la regarder et finit par lâcher ;

« Nah… Il faut que je me jette par cette fenêtre ! » Il tentant de se dérober en faisant des mouvements de natation. « Je ne retournerai pas dans le donjon ! »

« Nous devons encore nous décider à ce sujet… » Réalisa Celestia. « Maintenant s’il vous plait, cessez de gigoter pendant que ma sœur et moi-même essayons d’évaluer votre cas. »

Durant un instant, il n’arrivait pas à cerner ce qu’elles avaient l’intention de faire, mais la seconde d’après, il ressentit un léger pincement à l’intérieur de lui-même et comprit. Elles tentaient de voir à travers son esprit… Mais ça n’arriverait pas. Pas tant qu’il portait encore son titre. Il ferma les yeux et se concentra. Il n’arriverait pas à les stopper de force, mais peut-être qu’il arriverait à les tenir distraites assez longtemps pour qu’elles n’arrivent plus à se concentrer.

Alors que la paladine ne se doutait de rien, un véritable combat télépathique était sur le point d’éclater.

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« C’était… très inattendu. » Luna regarda autour d’elle, perplexe. Alors qu’elles pénétraient la conscience du nécromancien, elle et sa sœur s’étaient retrouvées en plein milieu d’une vaste étendue de blanc infini. Il n’y avait aucune issue, rien.

« Penses-tu qu’il s’agit là d’un mécanisme de défense ? »

« On dirait bien, en effet. Voyons à rester vigilantes. Je ne voudrais pas finir en plein dans une autre de ses… » Sa phrase fut violemment interrompue lorsqu’elle percuta une porte en bois en voulant changer la direction qu’elle prenait.

« D’où est-ce que ça vient ? » interrogea Luna alors que sa sœur se massait le nez. « Ce n’était très certainement pas ici juste un instant plus… Regarde ! » S’exclama-t-elle, toute excitée. « Il y a un petit écriteau là-dessus ! »

Celestia se pencha sur la porte ; et comme l’avait dit sa sœur, il y avait bien un petit écriteau accroché à la porte. Tout d’abord vierge, les mots se mirent soudainement à s’aligner : “Il n’y avait rien tout à l’heure ? Et soudain il y a une porte !” Les mots restèrent immobiles un instant avant de disparaître. De nouvelles lettres apparurent “Je suis une porte.”

Luna arqua un sourcil. « Il se moque de nous là, non ? Pense-t-il vraiment qu’une si petite barrière nous tiendrait à l’extérieur ? »

Elle poussa la porte avec sa magie. Ne fut pas sa surprise lorsqu’elle s’aperçut que ça n’avait même pas bougé d’un iota ! Elle laissa une petite fumée d’irritation s’échapper de son nez avant de recommencer.

« Pourquoi… je n’arrive pas à l’ouvrir ? Rien ne peut battre ce genre de pouvoir ! »

Celestia l’observa quelques temps. « Attends un peu, Luna. » Elle s’avança vers la porte et l’inspecta avec attention. « Incroyable… » Murmura-t-elle.

« Quoi ? »

« Tu te battais contre toi-même… » Répondit Celestia, ne pouvant retenir un petit sourire. « La porte s’alimente de ta propre magie… c’est donc ça, l’art de la corruption. »

Sur l’écriteau, de nouvelles lettres apparurent, prenant la place de celles qui y avaient été quelques temps plus tôt, “Non ce n’est pas ça. Essayez de l’ouvrir encore une fois, ça va fonctionner à coup sûr !”

« Il se moque de nous ! » La magie de Luna se changea en colère, mais Celestia parvint de justesse à la retenir.

« Calme-toi, ma sœur… concentre-toi… Repousse-le loin de ta magie en premier. Ensuite, nous pourrons réessayer. »

“Bon sang… Ne pouvons-nous pas plutôt parler de cela ?”

« Je crains de vous décevoir, mais il faut que nous le voyons nous-même pour en être sûres, » répondit la princesse du soleil. « Es-tu prête, ma sœur ? »

Luna dévisagea la porte d’un air mauvais. « Je le suis. »

Elles concentrèrent leur magie sur la porte et la poussèrent. Pendant un moment, ça n’avait pas bougé plus que ça mais ensuite, la porte céda et ouvrit sur… rien. Il n’y avait rien derrière elle, ça ne menait nulle part. Ce n’était rien de plus qu’une porte ouverte au milieu d’une chambre blanche large de façon continuelle. De nouveaux mots s’alignèrent “Mauvaise porte… Réessayez.”

Luna était sur le point de claquer la porte par frustration jusqu’à ce que sa sœur l’arrête.

« Ne le laisses pas te duper aussi facilement, ma chère sœur. Regardes plutôt là-haut, au-dessus de l’encadrement de la porte. »

Luna plissa les yeux, elle aperçut une dizaine de petites boucles attachées à la partie supérieure de l’encadrement. En dessous, on pouvait distinguer des plis en plein dans le vide blanc en face d’eux.

« Mais qu’est-ce que… » Elle se stoppa lorsqu’elle reconnut ce qu’elle était en train d’observer. « Ce sont des rideaux ! Ce n’est rien de plus qu’une ruse ! »

« Très bien, maintenant, voyons ce que contient son esprit, » lâcha Celestia en attrapant les rideaux. Elle les tira sur le côté dans un mouvement rapide.

Derrière les rideaux, il y avait un vieil étalon assit dans une baignoire. En les voyant, il lâcha un petit cri de surprise.

« Il y en a assez avec les illusions, » murmura la princesse à la crinière multicolore en franchissant la porte, suivie de près par sa sœur, cette dernière rougissait jusqu’aux oreilles.

Lorsqu’elles s’avancèrent dans la pièce, les sœurs alicornes se retrouvèrent dans un vide ténébreux. Tout autour d’elles, elles pouvaient distinguer des images et des petites fenêtres chacune détenant un souvenir, une pensée, le tout tourbillonnait autour des deux poneys ailés. Tout ce qu’un esprit pourrait contenir était présent. Celestia attrapa une des fenêtres et l’approcha d’elle en regardant les images qui y défilaient.

« Voyons maintenant à qui nous avons à faire… » Lâcha-t-elle.

Le souvenir prit vit, dévoilant ainsi un petit fragment de la vie du nécromancien. Il était dans leur château, elles pouvaient tout suivre de son point de vue ; la manière dont il marchait dans les halls, la manière dont il s’était approché de la porte qui menait dans la pièce, la façon dont le nécromancien avait accouru jusqu’en face de lui et… Les deux princesses firent un pas en arrière en frissonnant.

« Qu’est-ce que… ? Oh ciel… » Lâcha Celestia, surprise. « Comment a-t-il fait pour se voir lui-même ? C’est impossible… » Son visage vira aussi pâle que celui d’un cadavre. « Luna… » Appela-t-elle sa sœur avec une petite voix.

« Oui, ma sœur ? »

« Te rends-tu compte où exactement nous sommes ? »

« Même si je n’arrive pas à me l’expliquer, on dirait bien que nous sommes dans l’esprit de l’un de nos gardes… »

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La paladine fut prise de surprise lorsque les princesses et le nécromancien rouvrirent leurs yeux en même temps. Alors que les princesses semblaient légèrement irritées, lui portait le plus large sourire espiègle qu’elle n’avait jamais vu.

« Très bien ! » Il mit ses mains derrière la tête. « Le premier round me revient. Qu’allez-vous dire, maintenant ? Deux manches sur trois ? » Il se tourna vers Luna. « C’est plutôt facile de t’énerver pour quelqu’un qu’on dit être si sage. »

« Tu continues à te payer nos têtes ? » répondit Luna, sur un ton énervé.

« Quand ça en vient à déployer ta force, tu es plutôt douée, je te l’accorde. Mais ça s’arrête là. Est-ce que tu te rends compte que je pourrais très facilement t’envoyer en face d’une très longue tour des esprits de chacun de vos gardes ? »

Celestia s’approcha de lui et le regarda dans les yeux. « Pourquoi nous tenir en dehors de votre conscience ? Tout ce que nous souhaiterions serait de confirmer si vous êtes une menace pour notre univers ou non. Si vos actes prouvent que vous êtes bel et bien la personne qui a endossé tous les crimes que la paladine vous accuse d’avoir commis ou non. »

Elle le regarda d’un air concerné.

« Nous, les humains, nous n’aimons pas cela quand les autres se mêlent de ce qu’il se trouve dans nos têtes. Alors, non. Je refuse votre offre, bien que ça ait l’air d’être amusant. Ma magie restera ma magie. Maintenant, rendez-moi service je vous prie, jeter moi hors de cette fenêtre. »

Celestia fronça les sourcils. « Nous n’espérons pas vous tuer ! » Puis, elle réfléchit pendant un instant et continua ; « et si vous nous y guidiez ? »

Il arqua un sourcil ; « Pardon ? »

« Nous vous laisserons nous guider à travers vos mémoires. Comme cela, vos connaissances resteront sauves et nous pourrons voir si vous êtes une menace ou non. »

Il ricana. « Et que pensez-vous, ma chère princesse, que j’ai à vous montrer ? »

« Tout ce qui concerne Calindria, ce qu’elle vous voulait et sa chasse après vous. Aussi, les évènements qui ont succédé votre apparition ici tout comme tout ce qu’il s’est passé depuis lors, » il sembla sur le point de protester, « Ou bien, nous pouvons tout aussi rester ici et continuer à jouer à ces petits jeux jusqu’à ce que nous trouvions une solution qui nous permettra de percer votre défense. Et je sens que nous avons plus de temps que vous n’en avez. »

« Vous en seriez surprises… » Il sembla réfléchir à ses paroles avant de lâcher un soupir. « Très bien, mais rien de plus. »

Tous les trois refermèrent leurs yeux et se concentrèrent une nouvelle fois. Cette fois-ci, les alicornes se trouvèrent dans un autre lieu. Un tourbillon d’images visiblement sans fin tournait avec force tout autour d’elles. L’esprit du garde n’était rien du tout comparé à l’immense quantité de connaissances dans cet endroit.

« Voyons voir… » Elles entendirent sa voix. « Par où commencer ? »

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Quand ils rouvrirent pour la énième fois leurs yeux, la paladine était plus que désireuse de savoir ce qu’elles avaient appris.

« Alors ? » demanda-t-elle avec enthousiasme, « qu’avez-vous découvert ? »

Celestia relâcha enfin le nécromancien de l’emprise de sa magie, elle le fit ceci dit, avec un petit sourire de satisfaction.

« Premièrement, il est innocent. Du moins, vos accusations se sont révélées fausses. » Les efforts de la paladine pour retenir sa bouche de s’ouvrir en grand se soldèrent en un échec. « Et il y a encore quelque chose de très intéressant à votre sujet… » Le nécromancien la regarda d’un air inquiet. Elle se tourna vers la paladine ; « Saviez-vous qu’il a sauvé votre vie ? »

« Comment ?! » lança la paladine, complètement déconcertée.

Elle regarda le nécromancien avec insistance, attendant peut-être qu’il lui explique par lui-même ce que ces… absurdités signifiaient.

« Je ne vois pas de quoi elles parlent… Vous vous êtes sûrement égarées. » Essaya-t-il de paraître indifférent.

« Lorsque le sort de portail qu’il a utilisé a fait effet sur votre corps aussi et non seulement le sien, il a puisé dans la plus grande partie de ses pouvoirs pour assurer votre protection. Sans son aide, vous seriez probablement perdue dans l’espace-temps, » elle s’adressa ensuite au nécromancien ; « C’était très aimable de votre part. »

Il leur accorda un air désapprobateur ; il avait souhaité que ce détail fut resté ignoré. Il aperçut l’expression incrédule de la paladine : « Ne me regardes pas comme ça, je n’ai rien fait du tout. »

« Tu m’as… sauvé la vie ? » répéta-t-elle, décidément, c’était très difficile d’y croire. « Mais pourquoi as-tu… »

« Vous savez quoi ? » Il croisa les bras sur le torse. « Je viens de me décider… » Il se redirigea vers la fenêtre, « Je vais sauter quoi que vous disiez. »