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Lady Apple Tree

Une fiction écrite par Hotaru.

Lady Apple Tree

Il fut une époque où j’étais une petite pouliche comme toutes les autres. Je me souviens que j’avais une famille et des amies qui m’aimaient. Je vivais dans un ranch isolé dans un coin d'un village. J’y vivais avec mon grand-père et mes nombreuses sœurs et j’étais sûrement l’une des pouliches les plus heureuses du village. Enfin, je n’en suis plus très sûre… Ça fait longtemps que tout le monde m’ignore. Soudainement et inexplicablement, on ne m’appelait plus pour manger, mes sœurs ne voulaient plus jouer avec moi, mon grand-père semblait me fuir… et finalement, ils ont tous quitté la ferme en me laissant derrière eux. Je suis restée toute seule pendant très longtemps…

Au sein du village, c’était pareil ; aucun poney ne faisait attention à moi. Alors j’ai décidé de rester dans la réserve de pommes de la ferme qui fut vidée après le départ de ma famille. Et j’y restai… j’y restai pendant une longue période… Plus aucun poney ne voulait de moi, plus aucun habitant ne se souvenait de moi, ma vie avait changée du jour au lendemain, comme ça… sans que je puisse en comprendre la raison. J’étais subitement si seule… Délaissée par tous mes proches… Mais qu’avais-je fait pour qu’on me déteste tant? J’aimerais bien le savoir…

Un jour, alors que je traînais dans le ranch, toute seule comme d’habitude, des poneys pénétrèrent la ferme de ma famille. Sans que j’aie à m’en étonner, ils m’ignoraient tous, eux aussi. Intriguée, je les suivis jusqu’à l’ancienne demeure de ma famille où ils s’installèrent –d’ailleurs, au sujet de ma famille, je me demandais où ils pouvaient être de leur côté. Ils me manquaient tellement…

Rapidement, le décor de l’intérieur fut changé et ces inconnus s’installèrent dans la ferme. Il y avait une pouliche de mon âge, son frère, sa grand-mère et ses parents. Et comparé à moi, cette ponette-là n’était pas mise à l’écart. Elle était très proche de sa grand-mère et passait tout son temps à s’amuser avec son petit frère. C’était une pouliche aimable et d’une grande gentillesse. Par la suite, j’appris qu’elle se faisait appeler « Lady Apple Tree » ou simplement « Lady ». C’est vraiment un joli nom. Cela me fit penser que moi, j’avais oublié mon nom…

Depuis l’arrivée de ces étrangers, je m’ennuyais beaucoup moins. Je suivais leur quotidien comme on suivrait les écrits d’un auteur au talent prodigieux. C’était très divertissant et… plutôt nostalgique. La vie parfaite et sans soucis de ces poneys me rappelait perpétuellement que moi aussi j’avais un jour vécu comme Apple Tree. Le sens de l’humour de son père me rappelait celui de mon grand-père bien aimé qui était tout aussi mauvais et les farces de son frère me rappelaient mes chères et tendres sœurettes… Si seulement je pouvais les rejoindre là où ils étaient désormais, si seulement je pouvais retrouver ma vie normale de pouliche… pensais-je, alors que je surveillais les aventures de Lady.

Lady Apple Tree et sa grand-mère avaient pour habitude de se poser sous un des pommiers du verger dans un coin tranquille pour discuter et passer du temps ensemble. Je les suivais là-bas tous les jours et écoutais leurs discussions avec curiosité. Je m’étais attaché à la gentille petite dame qu’était la grand-maman de Lady. Elle avait beaucoup de savoir et était un poney très spirituel. C’était presque comme si elle était aussi ma grand-mère, je l’aimais autant que Lady l’aimait et parfois, j’avais même l’impression qu’elle me fixait du regard et quand je lui souriais, elle semblait me sourire aussi. Bien que c’était tout à fait normal, cela semblait très étrange lorsqu’on était invisible aux yeux de tous, étrangement agréable, en réalité…

Une fois, alors que la ponette et sa grand-mère étaient assises aux pieds de leur pommier préféré, comme elles avaient l’habitude de le faire, elles eurent une drôle de conversation. La mamie de Lady expliqua quelque chose de curieux à sa petite-ponette, elle lui dit :

- Mon enfant, tu dois savoir que la vie n’est pas toujours comme dans un conte de fée. Tôt ou tard, tu rencontreras des problèmes qui seront difficiles ou bien impossibles à résoudre. Dans ces moments-là, tu auras besoin de te confier à quelqu’un qui te comprenne et ce quelqu’un ne pourra pas toujours être tes parents.

- Alors à qui dois-je me… confiter ? avait interrogé la petite Lady, maladroitement.

Et c’est exactement ce que j’aurais moi-même demandé.

- Aux pommiers. Confies-toi aux pommiers. Ils seront toujours là pour t’écouter et te soutenir dans les moments compliqués, tu peux avoir confiance en eux. Quand tu te sens mal, assieds-toi sous un pommier et raconte lui tes soucis et tu verras, tu te sentiras tout de suite beaucoup mieux. Je le fais tout le temps et je me sens apaisée.

Apple Tree promit à la mère de sa mère qu’elle suivrait son conseil lorsqu’elle aura besoin de réconfort, mais pour l’heure, tout se passait au mieux dans sa vie banale de poney alors il n’y avait aucune raison qui la pousserait à aller pleurer son malheur aux pommiers. D’ailleurs, comment un arbre pourrait-il apaiser un poney ? Après tout, ce n’était qu’un végétal incapable de comprendre ce qu’il lui était dit… Avec tout le respect que je lui devais, la grand-mère de Lady avait vraiment d’étranges idées parfois...

Plus le temps passait, plus Lady Apple Tree grandissait et sa grand-mère se faisait vieille. Moi par contre, j’étais toujours la petite pouliche que j’avais été ; je ne vieillissais pas.

Lady allait à l’école depuis six ans et s’était fait beaucoup d’amis. Son frère qui était un froussard à l’époque était de plus en plus brave. Leurs parents avaient débuté un business avec les pommes du verger ; ils en faisaient du cidre, des tartes aux pommes et un tas d’autres desserts à base des fruits de la ferme qui étaient sans doute les plus délicieux du village ! Chaque jour, la mère de Lady se rendait en ville afin de vendre les délices qu’elle avait préparés tandis que son mari et son fils s’occupaient des pommiers et des récoltes de fruits. C’était leur routine quotidienne que je guettais sans jamais m’en lasser. En même temps, qu’avais-je d’autre à faire ?

Seulement plus tard, la mamie d’Apple Tree tomba gravement malade. D’après le docteur, sa santé s’était faite trop fragile pour la protéger contre la maladie ; ses jours étaient comptés. J’avais beaucoup de peine pour la pauvre Lady, elle ne supportait pas de voir sa grand-mère dans un tel état. Depuis que la dame était clouée au lit à cause de sa maladie, la petite n’avait pas arrêté de pleurer. Personne ne pouvait la réconforter, pas même sa mère à qui la pouliche était pourtant si attachée. Maintes fois, alors que Lady se réveillait en pleine nuit pour vérifier les conditions de sa grand-mère, j’essayais de communiquer avec elle, mais rien à faire, elle continuait à m’ignorer. Pourquoi personne ne me voyait ? Pourquoi le monde entier avait-il décidé de m’abandonner ? C’était un mystère que j’avais beaucoup de mal à élucider, mais au fil du temps, j’avais fini par me faire une raison.

Au final, la grand-mère mourut après deux semaines de lutte contre la maladie. Au moment de sa mort, tous les membres de la famille s’étaient rassemblés dans sa chambre et avaient beaucoup pleuré. Je me suis sentie très triste pour tous ces poneys qui allaient devoir continuer leur vie sans mamie… mais il y a une chose qui m’interpella : lorsque l’âme de la grand-mère avait quitté son corps, et que tout le monde dans la pièce avait commencé à paniquer, une ombre blanche s’était formée au-dessus du corps désormais inanimé ; il s’agissait de l’esprit de grand-mère. Elle avait oublié toutes les personnes autour d’elle et m’avait fixé moi. Moi. Celle qui était ignorée de tous. Pour la première fois depuis très longtemps, une personne avait réellement fait attention à moi.

A ce moment-là, la grand-mère de Lady me sourit, son sourire était éclatant de blancheur, puis, elle me fit un signe du sabot avant de se volatiliser dans les airs. Cet évènement m’ébahi, je n’avais jamais rien vu de tel et il me semble que… j’étais la seule à l’avoir vu…

En tout cas, après la mort de l’ancienne, plus personne n’avait ouvert la bouche. La ferme était plongée dans un silence glacial. Le jour de l’enterrement, ils étaient tous habillés en noir et s’étaient rendus au cimetière. La pluie était au rendez-vous, un orage inondait les rues. Durant l’enterrement de la défunte, tout le monde s’était remis à pleurer, c’était difficile de se retenir, mise à part Lady Apple Tree. Cette dernière se contentait d’observer la tombe de sa grand-mère, inexpressive. Quelques temps après, elle s’était brusquement retournée et avait quitté l’endroit en galopant. Aucun poney ne réussit à la retenir, elle était insensible aux appels de ses parents.

Je la suivis jusqu’au verger des pommes où elle s’arrêta devant un pommier et éclata en sanglot. Elle ne mit pas très longtemps avant de s’effondrer aux pieds de l’arbre et en continuant à pleurer, elle posa son sabot avant gauche sur l’arbre et le caressa doucement. Lady murmurait parfois des « pourquoi elle ? » entre ses sanglots. La pauvre… Quelle scène horrible… Si seulement je pouvais la serrer dans mes bras et la réconforter… si seulement elle pouvait me remarquer… Moi aussi j’étais si triste, si elle savait ! J’aurais tellement voulu qu’elle sache qu’elle n’était pas la seule, que j’avais énormément de peine pour elle et que je voudrais que grand-mère soit encore là ! Mais ce n’était pas possible… pour la seule et unique raison que j’étais invisible aux yeux de tous. Personne ne me rendait jamais mon regard, ni mon sourire et personne ne me répondait jamais, je suis sûre qu’ils ressentaient du dégoût en repensant à celle que j’étais…

Quelques temps après ce triste jour, les habitants de la ferme reprenaient petit à petit leurs activités. Ils n’avaient pas oublié grand-mère, elle existait toujours dans le cœur de chacun d’entre eux. Mais tout le monde naît et meurt un jour, non ? Il ne faut pas s’en faire. On le sait tous. Enfin, Lady par contre, ne semblait pas s’y faire. Elle passait tous ses jours à l’extérieur sous un pommier –le pommier sous lequel grand-mère s’asseyait jadis aux côtés de sa petite-pouliche- et une fois la nuit tombée, elle s’enfermait dans sa chambre. Depuis ce malheureux incident, Lady Apple Tree n’avait pas une seule fois adressé la parole à un poney. A vrai dire, je m’inquiétais beaucoup pour elle. Lorsque je la suivais jusqu’au verger pour la guetter comme je le faisais toujours, je la surprenais entrain de tenir une conversation à elle toute seule. Comme si elle se parlait à elle-même. Au début, j’écoutais chacun des mots que Lady prononçait, elle parlait de sa grand-mère en décrivant à quel point elle lui manquait, elle parlait de sa vie à l’école en décrivant ses journées comme si elle écrivait un livre et enfin, elle parlait de sa famille en disant qu’elle ne la comprenait pas. En réalité, Lady n’avait jamais supporté que tout le monde aie reprit le cours de leur vie en s’adaptant à l’absence de grand-mère. Elle en voulait même à son petit frère qui était bien vite passé à autre chose. Comme si elle voulait que le monde entier sombre dans le chagrin parce que mamie n’était plus… Ce serait une pensée bien terrible ! Mais pourquoi avait-elle si subitement changé ?

En suivant le déroulement de sa vie tous les jours qui suivirent, je me suis bien vite rendue compte que Lady Apple Tree n’était plus du tout la pouliche aimable et pleine de joie que j’avais appris à connaître. Chaque journée qui se succédait était la même que la précédente. Elle restait assise dans le verger et parlait de ses problèmes au vide. Si ce n’était pas moi, alors je peinais à comprendre à qui pouvait-elle être en train de révéler tous ses secrets… Quand soudain, je me rappelai du jour où sa grand-mère avait dit à Lady de se confier aux pommiers si le besoin lui en venait. C’était donc ça… Cela voulait-il dire que Lady se sentait malheureuse ? Très sûrement… Mais pourquoi ? Elle aussi était amenée à vieillir et mourir tôt ou tard… C’était le cycle parfois injuste de la vie. Quoi qu’on fasse, on n’y peut rien. Mais alors, pourquoi je ne semblais pas vieillir, moi aussi ? Quand viendra le jour où je comprendrais enfin ce qu’il m’était arrivé ?

Quel que soit la saison, Lady sortait parler aux arbres comme toujours. Elle avait beaucoup grandi et était de moins en moins sociale. Je dirais même qu’elle se montrait plutôt agressive envers le monde autour d’elle. Son frère n’osait plus l’approcher, ses amis l’avaient quittée et elle ne semblait pas le moins du monde en être affectée. Même ses parents préféraient rester distants. De toute manière, que pouvaient-ils faire, les pauvres ? Ils avaient déjà tout essayé, Lady était devenue complètement irraisonnable. La mère de cette dernière ne pouvait pas s’empêcher de se faire du souci pour elle, sa fille passait son temps dehors et ne mangeait plus beaucoup.

Une fois, alors que Lady dînait en compagnie de sa famille, elle avait renversé le contenu de son assiette sur la table et l’avait balancé contre un mur. Indubitablement, le plat s’était cassé en mille morceaux en provoquant un bruit énorme. Moi qui, à l’époque, jouais à embêter leur chat en tirant sur sa queue, avait eu la peur de ma vie lorsque je l’entendis ! La mère de Lady avait hurlé et son père avait tenté de comprendre les raisons de ses actes en la questionnant, mais la petite avait refusé de répondre. Sans un regard en arrière, Lady était allée s’enfermer dans sa chambre.

« Si tu savais, Lady Apple Tree, à quel point tes parents s’inquiétaient pour toi… »

Sa mère ne dormait plus la nuit et son père semblait constamment énervé. Tout avait si vite dégénéré… Grand-mère était comme une entité protectrice, maintenant qu’elle nous avait quittés, rien ne serait plus jamais comme avant…

Dès lors, lorsque je suivais Lady jusqu’aux pommiers, je n’écoutais plus ce qu’elle racontait. Ses discussions avec les végétaux étaient toujours les mêmes. Alors qu’elle restait là à se plaindre à la nature, je profitais du beau temps et cherchais des animaux à déranger. Je sais que c’est mal, mais les animaux étaient les seuls qui ne m’ignoraient pas et comme je n’avais jamais été très amie avec eux, je les embêtais pour jouer !

Même en hiver, la pauvre Lady ne restait pas à la maison pour se chauffer avec les autres. Elle préférait le verger. Je dois avouer que même si je savais que c’était dur pour elle, je comprenais de moins en moins son attitude. Pourquoi se comporter ainsi tandis que toute sa famille se faisait un sang d’encre pour elle ? Lady était devenue un poney très étrange. En plus de l’animosité qui s’était emparé d’elle, elle était froide et totalement insensible.

Ce n’était plus des jours ou des mois, mais des années plus tard, Lady Apple Tree n’était toujours pas redevenue celle que nous aimions tous. En fait, c’était encore pire. Elle agressait brutalement son frère lorsqu’il avait le malheur de se trouver sur son chemin et plusieurs fois, elle avait gravement blessé son père alors qu’il tentait de l’arrêter. Sa mère, cette pauvre jument, en était à un stade où elle piquait des crises de folie à la vue de son enfant depuis un terrible jour… Quelques mois après son seizième anniversaire, Lady était arrivée en face de sa parente qui coupait du bois à la place de son mari puisque ce dernier était tombé malade. Elle avait posé un regard vide et complètement dépourvu d’émotions sur sa génitrice et avait froidement demandé :

- Que fais-tu ?

- Je coupe du bois pour le feu de la cheminée ! C’est bientôt de nouveau l’hiver et il faut être prêt ! lui apprit sa mère, insoucieusement en essayant de paraître le plus affectueuse possible.

- De quel bois s’agit-il ? La ponette continua de l’interroger, d’un air menaçant.

- Oh, simplement le bois d’un des pommiers du verger. Tu sais, le plus vieil arbre tout au fond de la ferme, celui qui ne procurait même plus de pommes.

La malheureuse aurait dû se taire. Ce qui suivit ne fut pas beau à voir du tout… Moi qui avait assisté à cette scène, je suis très bien placée pour dire que c’était de loin le pire spectacle que le village n’avait jamais donné…

Prise d’une colère soudaine et incontrôlable, Lady arracha la hache que tenait sa mère et la poussa en arrière. Avant que la ponette mère de deux enfants ne comprenne ce qu’il lui était arrivé, son avant-bras gauche fut tranché. Insensiblement, Lady avait dépourvu sa propre mère d’un de ses membres… sous mes yeux…

- Voilà ! Est-ce que tu aimes la sensation qu’on ressent lorsqu’on est haché ?! La prochaine fois, tu réfléchiras à deux fois avant de t’en prendre à un de mes pommiers, sale traître !

En disant cela, Lady avait déserté les lieux…

Sa mère hurlait si fort que je me sentais terriblement tendue, je tombais à terre et bouchai mes oreilles avec mes petits sabots en pleurant. Le bras qui lui avait été ôté bougeait toujours en fonction qu’elle se débattait. J’avais terriblement peur, je voulais aider mais je ne pouvais rien faire…

« Je suis désolée ! Je suis vraiment désolée ! » Lançais-je. Je savais d’avance que mon aide ne lui apporterait rien, personne ne me voyait. Ce qu’il me restait à faire était d’espérer du fond du cœur que quelqu’un arrive rapidement pour la sauver. Que très peu de poneys passaient devant la ferme quotidiennement, il était fort probable que personne ne vienne la sauver et là… lorsque tout son sang se serait échappé de son corps, elle ne vivrait plus ! Et pour arranger les choses, le frère de Lady et son père étaient tous deux de sortie ! Son papa, étant malade, était chez le docteur et son frère était à l’école ! « Pourquoi ?! Pourquoi avoir fait ça ?! » Hurlais-je en pleurant, mais personne ne m’entendait… « Je suis désolée ! Tellement désolée ! Je ne peux rien faire pour aider !! » Mais même si je hurlais de toutes mes forces, aucun poney ne me remarquait…

Heureusement, un agricole qui était de passage emmena la maman de Lady à l’hôpital et elle fut sauvée. Personne ne peut imaginer à quel point je fus soulagée d’apprendre qu’elle était saine et sauve… même si dépourvue d’avant-bras gauche et handicapée à vie. Seulement, elle avait reçu un choc émotionnel et hurlait à chaque fois qu’elle croisait sa propre fille. Si seulement je pouvais aider… J’avais déjà tellement essayé sans succès… « Je suis désolée » était la dernière chose que je pouvais dire…

Suite à cet incident, le père de Lady plongea dans une profonde dépression. Il ne savait plus quoi faire pour sa fille. En même temps, il l’aimait et ne pouvait pas lui faire du mal, mais d’un autre côté, elle était devenue bien trop dangereuse pour le village tout entier. Guettant les pommiers désormais jour et nuit, elle empêchait sa famille de travailler dans la ferme et sans pommes, comment la famille allait se débrouiller ? Et lorsqu’un poney de l’extérieur entrait par hasard dans le verger, elle n'hésitait pas une seule seconde à le tuer sans scrupule… Alors un soir, tandis que Lady Apple Tree était adossée à un de ses chers pommiers, contant sa vie misérable aux arbres, son frère s’introduit en douce dans le verger et l’écouta parler.

Je savais ce qu’elle disait à chaque fois. Elle parlait toujours de choses complètement insensées, impossible de comprendre un seul mot de ses dires… mais ce soir-là, elle dit quelque chose de si sombre et cruel que je ressenti comme une crampe au niveau de l’estomac… du dégoût. C’était une crampe qui aurait pu me faire vomir toutes mes entrailles… et j’ai le sentiment que le frère de Lady était dans le même état de choc et incapacité que moi.

Ses idées étaient barbares. Elle parlait de meurtre. Elle décrivait aux pommiers de quelle manière exactement elle allait se débarrasser des membres de sa famille un par un et garder la ferme pour elle-même. Elle ne pouvait que plaisanter ! Dites-moi qu’elle plaisantait…! Où était passée la Lady Apple Tree bienveillante et sympathique qui galopait innocemment dans les champs du village ? Où était la pouliche que tout le monde aimait tant ? Ça allait trop loin… Beaucoup trop loin…

Effrayé et tremblant de partout, le cadet repartit en vitesse prenant ses jambes à son cou jusqu’à la maison. Il était allé rapporter ce qu’il avait entendu à ses parents. De son côté, Lady était parfaitement au courant qu’elle avait été espionnée mais n’avait pas pour autant arrêté sa conversation avec les pommes afin de chasser l’intrus. Néanmoins, suite au départ du garçon, elle avait murmuré « Je vais commencer par lui ».

- Non… soufflais-je. Elle ne peut pas… Lady écoutes-moi ! Ca suffit les bêtises, arrêtes d’être aussi abominable !

Je savais qu’elle ne me répondrait pas. Après tout, mes efforts étaient toujours en vain… Tenter d’intervenir était simplement inutile, aucun poney ne me voyait de toute façon… mais pourtant, mais pourtant… je ne pouvais pas me résoudre à abandonner. Il s’agissait là d’une famille que j’avais observée pendant si longtemps, je m’étais attachée à chacun d’entre eux comme on s’attache à un personnage de livre, j’avais suivi leurs existences depuis leur arrivée à la ferme, ils avaient été comme une famille pour moi… une famille qui m’avait acceptée parmi eux malgré la haine que portait le village à mon encontre. Mes propres sœurs m’avaient laissée derrière elles… Mais eux, même s’ils ne me répondaient pas quand je parlais, ils ne m’avaient jamais lâchée comme l’avait fait mon grand-père… Lady était comme une sœur pour moi. Je ne pouvais que faire mon maximum pour l’empêcher de commettre les pires erreurs de sa vie, et ce… même si j’étais complètement impuissante face à la folie qui rongeait son âme…

- Lady Apple Tree… ne fait pas ça… s’il te plaît… Redeviens celle d’avant… Ta grand-mère n’aurait pas voulu te voir ainsi…

Sa grand-mère… maintenant que j’y pense, c’est elle qui lui avait conseillé d’aller voir un pommier si elle ne se sentait pas bien… mais pourquoi les choses se passaient-elles ainsi ? Pourtant, grand-mère n’était pas le genre à vouloir le malheur de ses enfants… Et si… Et si elle savait que ça arriverait ? Non. Quoi qu’il arrive, je ne dois pas douter d’elle. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que quelque chose ne tournait pas rond avec les arbres du verger…

Cette nuit-là, j’enquêtai sur les pommiers de la ferme jusqu’au lever du soleil. Malheureusement, je ne trouvai rien de suspect… Et c’est avec effroi et désespoir que je découvris, une fois que tout le monde était éveillé, que je n’aurais pas dû quitter Lady des yeux…

Le corps frigorifié du cadet de la famille avait été retrouvé dans sa chambre le lendemain… il était complètement meurtri… son expression décrivait de la terreur… En fait, il avait était tué d’une bien étrange manière… une longue branche d’arbre avait poussée dans le matelas de son lit et lui avait transpercé la gorge avec puissance… Un petit symbole prouvait que c’était Lady la meurtrière. Car oui, une pomme bien rouge et juteuse était accrochée au bout de la branche. Pourquoi… pourquoi n’ai-je pas pu la retenir… ? Dans cette histoire, j’étais la seule à être au courant de ses intentions… J’étais la seule à pouvoir l’arrêter… enfin, seulement si elle ne refusait pas de me répondre… Étais-je condamnée à rester l’éternelle spectatrice de cette histoire d’épouvante ? Ce n’était vraiment pas ce que je voulais… Je me sentais si coupable… « Je suis tellement désolée tout le monde… je ne m’excuserais jamais assez… »

Il ne restait maintenant, que les parents de Lady. Ils ne savaient plus comment réagir face aux actions de leur fille. En fait, sa mère étant mentalement instable depuis l’incident du bras haché n’avait même pas été mise au courant de la mort de son fils. Monsieur Apple était persuadé qu’elle ne le supporterait pas, mais cacher la vérité à sa femme jusqu’à la fin de sa vie était encore plus dur que d’accepter la mort de l’enfant… j’en étais sûre…

Bouleversée par les attitudes de Lady, je n’osais plus m’approcher d’elle, même si je savais qu’elle ne pouvait pas me tuer. J’étais triste pour elle… triste pour ses parents, son frère et sa grand-mère… j’étais triste pour tout le mal qu’elle avait fait et tous les gens qu’elle avait rendus malheureux… Et surtout, j’étais triste de ne pas pouvoir les aider.

Après avoir longuement réfléchit, le père de Lady décida finalement que la dernière possibilité était d’assassiner sa fille de ses propres sabots. Bien sûr, j’étais complètement contre cette idée ! Mais… même si je m’y opposais, m’écouterait-on ?

Lady Apple Tree n’était plus elle-même, elle n’avait rien de celle qu’elle était censée être devenue. Une pouliche si gentille ne serait jamais devenue ce qu’elle était. Il fallait s’y faire, la véritable Lady n’existait plus. Elle était morte avec sa grand-mère.

Une nuit, alors que Lady dormait allongée sous un pommier, monsieur Apple quitta la grange et rejoignit sa fille dans le verger. Je le suivis de près. Une fois en face de la ponette qui devait avoir dix-huit ans le lendemain, il sortit un couteau de son sac à selle.

- Non ! Hurlais-je. Je vous en prie, donnez-lui une dernière chance ! Ne tuez pas Lady !

Monsieur Apple éleva son arme dans le ciel, ferma les yeux, inspira puis expira et rouvrit les yeux. Une lueur de résolution mélangée à de la peur était visible dans ses yeux. Ne comptait-il pas vraiment tuer son propre enfant ? Comment pouvait-il faire une chose pareille ?! Même si c’était la dernière solution, on ne tue pas sa fille comme ça ! Il doit y avoir un moyen de la sauver !

- Reposez cette arme immédiatement ! Ne faites pas ça ! Ecoutez moiiiiiiiiiii !! Implorais-je alors que mon visage était inondé de larmes.

Tandis qu’il abaissait son couteau en espérant la tuer d’un coup brutal dans le cerveau, je courrai jusqu’au père de Lady et me jeta sur lui pour l’arrêter mais au moment où j’aurais dû l’avoir propulsé à quelques mètres de la ponette pour empêcher sa mort, un événement très inattendu arriva… Sans aucune difficulté, j’avais traversé le corps de monsieur Apple. Je n’avais rien pu faire pour l’arrêter, absolument rien. J’étais invisible, j’étais transparente, j’étais un esprit errant… Durant tout ce temps je… j’étais morte et je ne le savais pas. Mais comment… Quand…

Lorsque je me tournai vers Lady et son père, elle était couverte de sang et son assassin sanglotait. Moi, et bien moi… je n’étais qu’un fantôme qui avait assisté à la scène. Je n’avais rien pu faire pour empêcher ça… Je regrette tellement…

Enfin, une grande fumée vert fluo s’échappa du corps de Lady et disparu. Il s’agissait sûrement de la fausse Lady Apple Tree qui avait causé tous ces ennuis disparaissant après avoir détruit des vies d’innocents. Mais bon… le seul moyen de s’en débarrasser était certainement de la tuer, enfin de compte… Autrement, elle aurait été encore plus dangereuse par la suite… sûrement… Même si Lady était morte… c’était mieux que si elle continuait de tuer des gens, non ?

« Je vous en supplie, pardonnez-moi… J’ai été complètement inutile… »

Cent ans plus tard

Les cris très aigus d’un petit bébé étaient audibles dans chaque coin de Sweet Apple Acres. Même le chien avait pris peur et aboyait comme un fou. Il faisait beau. Le soleil éclairait le verger. De très belles pommes avaient poussées cette année, ce sera encore une période de récolte chargée pour la ferme. C’était un jour splendide, le moment parfait pour la naissance d’un joli petit poney magnifique et encore tout pur ! Décidément elle avait attendu le bon moment pour naître cette petite coquine !

- Viens Aurore ! On regarde ce qu’il se passe !

- Oui ! J’arrive tout de suite !

Le bébé était une fille. Elle avait les cheveux tous roses et un magnifique pelage jaune, elle était différente du reste de sa famille mais c’est ce qui la rendait unique ! Sa grande sœur avait les larmes aux yeux tant elle était émue, elle avait enfin une sœur ! J’étais très heureuse pour elle ! Son frère aussi semblait ravi. Quelle jolie petite famille !

- Je vais l’appeler ; Apple Bloom ! s’exclama la mère du nouveau-né en serrant son enfant contre elle.

Tout le monde consentit à son choix. C’était un nom charmant, en effet ! Leur grand-mère, Granny Smith, avait fait beaucoup de tartes aux pommes pour l’occasion et le père d’Apple Bloom venait tout juste de rentrer de sa cueillette de pomme. En passant, il envoya un de ses fruits en direction de sa fille aînée, Applejack, qui l’attrapa sans trop de difficulté.

- ça c’est ma fille, et ouais ! Z’êtes tous les enfants adorés de papa !

- Câlin collectif ! s’écria Applejack en serrant son père et son frère en même temps.

- Ouah ! T’en as d’la force toi ! T’vas bientôt m’broyer les os si tu continues comme ça ! lança son parent pour plaisanter.

Toute la petite compagnie éclata de rire sans trop de raison et une fête pour célébrer l’arrivée du bébé débuta. Tout était bien comme ça l’avait toujours été chez les Apple. J’étais très fière de cette nouvelle génération de la famille… Ils étaient tous si joyeux ! Et cette fois-ci, moi et Lady nous ne laisserons rien leur arriver ! Tant que nous veillerons sur Sweet Apple Acres, il n’y avait rien à craindre !

Au fait, je me présente, je m’appelle Aurore, je suis morte un siècle ou deux dans le passé. Cent ans plus tôt, une famille a emménagé dans la ferme qui était jadis mon foyer familial et j’ai suivi leur quotidien jusqu’à ce que ça dégénère. Après la mort d’une ponette qui s’appelait Lady Apple Tree, son père, qui avait sombré dans la folie, tua sa femme avant de lui-même se suicider. Et alors que je retrouvais lentement ma solitude d’autrefois, Lady, qui était redevenu une petite pouliche chaste, apparu dans la réserve de pommes où j’avais recommencé à me cacher et devint ma seule et unique amie. Ensemble, nous étions invisibles pour tous les poneys du village car nous sommes toutes les deux des âmes perdues qui ont été chassées de leurs corps par une force maléfique.

J’expliquai à Lady tout ce que j’avais vécu et elle en fut très surprise. Lorsque je lui racontai ce qu’elle avait fait après le décès de sa grand-mère, elle n’arrivait pas à croire qu’elle ait pu faire de telles choses et elle était très désolée pour les ennuis qu’elle avait causés, en effet, elle n’était pas consciente de ses actes du tout… Et comme moi, elle avait presque tout oublié.

Tous les jours, nous jouions à différents jeux et avons passé tout notre temps ensemble jusqu’à la venue de la famille d’Applejack. A leur arrivée, ils avaient entièrement reconstruit la ferme et l'avait nommée "The sweet Apple Acres" sans pour autant toucher aux pommiers du verger et une nouvelle ville nommée "Ponyville" fut construite tout autour à la place de l'ancienne qui avait été abandonnée depuis des années. Bientôt, la mère d'Applejack trouva son âme soeur et eut deux enfants avc lui, Big McIntosh et Applejack. Aujourd'hui, Apple Bloom naquit aussi à son tour. Moi et Lady, nous nous fîmes la promesse de protéger coûte que coûte les nouveaux habitants de la ferme pour que plus personne ne souffre d’un quelconque maléfice. Et nous étions bien déterminées à tenir notre parole.

- Lady Apple Tree ? Dis-je en m’adressant à la pouliche fantomatique en face de moi.

- Oui ? Répondit-elle en me souriant.

- Tu es ma seule et unique meilleure amie.

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Note de l'auteur

Puisque je suis une grande fan de gore et de poneys, voilà ce que j'ai fait ! J'espère que vous avez aimé et n'oubliez pas de partager vos ressentis en commentaire ! (Si vous tombez sur une faute d'orthographe ou de grammaire, dites le moi surtout !)

Comme je l'ai dit dans la description du os, la couverture est dessinée par moi. Vous l'aurez deviné, sur la couverture c'est Aurore, donc le fantôme que nous avons suivi tout le long du one-shot, et la bannière c'est une sorte de représentation du verger de pommiers... même si ce ne sont pas des pommiers ^^". (Le dessin est fait avec un logiciel appelé GIMP 2, j'ai dessiné sur l'ordinateur avec ma souris, c'était plutôt difficile... je voudrais tellement avoir une tablette graphique ! TwT)

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Hotaru
Hotaru : #33106
@Sliter Des problèmes avec Lord Of muffins ? Comment ? *sors de sa cachette*
Modifié · Il y a 2 ans · Répondre
Sliter
Sliter : #33085
@Hotaru pour moi aussi c'est amusant ^^ MAINTENANT! Mince c'est pas le bon cailloux, tu es encore plus dure à trouver que Boulder déjà que j'ai de gros problèmes politiques et géopolitique avec LordOfMuffin :(
Il y a 2 ans · Répondre
Hotaru
Hotaru : #33079
@Sliter pff chuis pas troublée ! Une page entière de commentaires rien que de nous deux c'est pas ce que je qualifierait de "pollué" xD c'est amusant de discuter avec toi (tu dois sûrement être flatté xDD)

*se cache sous un petit cailloux" tu me trouveras pas
Il y a 2 ans · Répondre
Sliter
Sliter : #33063
Heeuu @Hotaru je veux casser l'ambiance mais on a je crois polluer une page entier de commentaire nan ?.... Ha ah ce n'étais qu'un leurre maintenant tu es troublé et je peut t'attraper!
Il y a 2 ans · Répondre
Hotaru
Hotaru : #33056
@Sliter oh non ! Tu ne m'auras pas ! *prends ses jambes à son cou*
Il y a 2 ans · Répondre
Sliter
Sliter : #33035
Vite une pokeboule sur @Hotaru sauvage !
Il y a 2 ans · Répondre
Hotaru
Hotaru : #33030
@Sliter je suis SAUVAAAAAAGE
Il y a 2 ans · Répondre
Sliter
Sliter : #33021
@Hotaru bon ba j'ai plus qu'a attendre mais c'est pas grave, je ne peux qu'imaginais une hotaru sauvage rendre visite a ces cousins ^^ c'est mignon~
Il y a 2 ans · Répondre
Hotaru
Hotaru : #33010
@Sliter haha c'est trop tard mnt, je viens de rentrer et j'ai pas pris mes cousins avec moi x) mais je vais chez mes cousins côté maternel demain (j'étais chez mes cousins côté paternel jusque là... en fait, on profite des vacances pour les voir (chuis en vacs moi, et oé)) la suite... chais pas elle sera pour quand, j'ai plus qu'à la poster mais bon... xD
Il y a 2 ans · Répondre
Sliter
Sliter : #32952
Au pire tu prend tes cousins avec toi dans tes bagages comme ça tu passe du temps avec eux chez toi et on a la fic, tous le monde est gagnant gagnant ^^
Il y a 2 ans · Répondre

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