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My little Arcadia : Piracy is magi [...]

Une fiction écrite par AuBe.

Chapitre 10

Chapitre 10

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Chaque coup porté rendait sa respiration plus difficile.
Il avait renoncé il y avait de cela une éternité à discerner avec quoi il était frappé – matraque électrique, fouet à électro-plasma ou tout autre gadget technologique – et se contentait uniquement d’encaisser la douleur. Seul l’instant présent méritait sa concentration. Un coup. Encore un. Encore un autre. Inspirer. Expirer. Un coup. Inspirer.

Peut-être était-il en train de crier. Il n’en savait rien. Peu importait. Expirer. Un coup.

Il n’était pas resté attaché au fauteuil très longtemps. Assez pour sentir le poison de l’injection illumidas se répandre dans ses veines – deux fois – et diffuser dans tous ses muscles une brûlure glacée insoutenable, assez pour convulser – deux fois également –, mais en fin de compte ses bourreaux avaient apparemment décidé qu’il serait plus intéressant d’user de méthodes traditionnelles.

Il avait été menotté face au mur, bras en l’air et torse nu. En théorie, tout le monde avait admis de longue date que ce n’était pas la meilleure façon d’obtenir des aveux d’un prisonnier et que les moyens chimiques étaient bien plus efficaces. Par tradition, la bastonnade restait néanmoins un excellent préliminaire à ce que certains nommaient toujours « un interrogatoire dans les règles ». En pratique, les Illumidas s’octroyaient « simplement » un peu de bon temps avant de passer aux choses sérieuses.
… Ce qui était de très mauvais augure quant à la suite des festivités : cela signifiait que, bien qu’il ne parvienne plus à le concevoir, ses souffrances allaient encore empirer. Et que la délivrance d’un sérum de vérité ne serait pas pour tout de suite.

Chaque coup porté intensifiait les rires et les moqueries des soldats.
Chaque coup porté…
Un coup. Inspirer. Un coup. Expirer. Un coup. Arcadia. Un coup. Ar. Ca. Dia. Un coup.

Inspirer.

Ses épaules et son dos n’étaient plus que chairs à vif. Le sang dégoulinait sur sa peau, imbibait le tissu de son pantalon, giclait sur le sol, sur les murs, sur les soldats, la pièce était rouge, les Illumidas étaient rouges, l’air était rouge, l’air était brûlant, l’air était poisseux.

Inspirer.

Inspirer.

Tenir. Se concentrer sur l’instant. Un coup. Un autre. Un autre. Et encore. Et encore. Et encore. Arcadia, Arcadia, Arcadia. Ils allaient bien finir par se lasser.

Expirer.

Peut-être était-il en train de crier.
Peut-être.
Crier.
Noir.

———————

Rien ne se présentait comme elle l’avait imaginé.

— Euh… Hého ?

Beaucoup moins assurée que quelques minutes auparavant, Rainbow Dash jeta un œil prudent à l’angle du couloir avant de poursuivre son exploration. Elle répugnait à le reconnaître, mais ce bâtiment (cet hôpital, si toutefois il s’agissait bien d’un hôpital) possédait un je-ne-sais-quoi d’angoissant.

Déjà, il était immense, et ses proportions (à taille humaine, évidemment) accentuaient l’impression d’écrasement qu’elle ressentait.
Ensuite, il était vide. Peut-être existait-il d’autres étages, mais en tout cas celui qu’elle parcourait était désert. Si elle se trouvait dans un hôpital, où se cachaient les malades ? Et les médecins ? Le seul humain qu’elle avait entraperçu avait surgi d’une pièce pour s’éclipser dans un couloir d’un pas pressé, sans lui accorder le moindre regard. Rainbow Dash se serait vexée de ce manque flagrant d’intérêt (alors qu’elle était le poney le plus cool d’Equestria, rappelons-le) si elle ne s’était pas en même temps débattue avec une boule d’incertitude au fond de son estomac.
Enfin, il bruissait d’échos étouffés, de rumeurs, de… cris ? La pégase sentait peser sur elle une menace diffuse et inexprimée dont elle ne pouvait définir la provenance, qui grandissait inexorablement et qui l’oppressait chaque seconde un peu plus. Mais ce n’était pas de la peur, non. Elle n’avait pas peur.

— Par T’rall ! Je ne sens plus mes bras ! Il m’a épuisé, ce salaud !

Rainbow sursauta. Sans réfléchir, elle se jeta dans la première cachette qu’elle trouva : la partie inférieure d’un meuble de rangement, qui contenait un carton de médicaments à moitié vide, mais surtout assez de place pour y camoufler un poney. La pégase à la crinière arc-en-ciel referma la porte sur elle au moment même où trois humains tournaient le coin du couloir, riant et parlant fort.

— Plains-toi ! Ce sont les servo-moteurs du fouet qui font tout le boulot !
— Eh, je ne te permets pas ! C’est du matériel de précision qui demande une grande dextérité et une excellente condition sportive !

Trois humains qui ne devaient pas être de la même race qu’Harlock, d’ailleurs : ils étaient verts.

— Ne crois pas que je vais compatir à ton sort. On a tous vu que t’as pris plaisir à frapper de toutes tes forces, pas vrai ?
— Clair. Et avec ce que je lui ai mis, il ne risque pas de nous emmerder avant un bout de temps !

Ils étaient verts et ils ne parlaient pas comme des médecins. Ils ressemblaient plutôt à des soldats, jugea la pégase tout en retenant son souffle tandis qu’ils passaient devant sa cachette sans paraître remarquer sa présence. Des soldats excessivement sadiques et vicieux.

Le monde des humains lui apparut soudain beaucoup moins cool.

— Va quand même falloir faire gaffe. Faudrait pas qu’il clamse avant qu’il se soit mis à table.
— T’inquiète donc pas. Le pirate est coriace. J’te parie qu’il supporterait même un deuxième round !

Rainbow Dash écarquilla les yeux. Le pirate ?
Harlock. Par Celestia.

———————

— Bon. Okay. Tu as bien compris la manœuvre ?
— Yep, m’sieur Bob. J’suis parée !

Applejack ponctua sa phrase en exhibant son harnachement : deux sacoches sur ses flancs, des jumelles autour du cou, et une montre holographique autour de son paturon avant gauche.

— Très bien. Alors c’est parti. Tu m’appelles dès que tu es en place. Tu… euh… sauras te servir de la radio avec tes, hum, sabots ?

La terrestre leva un sourcil étonné.

— Bien sûr ! Aucun problème !

D’accord, les boutons sur la montre qui permettaient d’activer la radio (c’était une invention géniale ! Il fallait absolument qu’elle ramène ça à Ponyville ! Elle pourrait en donner une à Applebloom, par exemple, et ainsi être toujours capable de la contacter où qu’elle soit !), les boutons, donc, étaient un peu petits, mais elle ne comprenait pas pourquoi Bob, Kei et tous les humains en général semblaient croire qu’elle aurait des soucis à utiliser ce genre d’objet. Tout ça parce qu’ils n’avaient pas de sabots, eux, mais des « mains ». Pfeuh.

— D’accord. Parfait.

Le barman semblait soudain réticent à la laisser participer à l’opération de sauvetage qu’ils avaient passé l’après-midi à planifier. Agacée, Applejack secoua sa crinière. Il hésitait parce qu’elle n’était qu’une petite pouliche, c’était ça ? C’était trop tard, à présent. Elle avait tout préparé, elle avait un rôle à jouer, et elle était impatiente de passer à l’action. Elle ne niait pas le danger, non, mais elle saurait se défendre. Elle avait tout ce qu’il fallait dans ses sacoches – des armes humaines, pour se battre contre les humains s’il le fallait. Ou contre les « Illumidas », plutôt, puisqu’il semblait que c’était ainsi que se nommaient les humains verts.

— J’y vais ! lança-t-elle. On va leur faire voir ce qu’il en coûte de s’attaquer à nos amis, pas vrai ?
— Sûr, répondit le barman. Sois prudente, fillette.
— Applejack, corrigea-t-elle machinalement avant de s’éloigner.

———————

Rainbow Dash avait l’impression d’avoir été plongée en plein cœur d’une aventure de Daring Doo. Il ne s’agissait pas de sortir du labyrinthe d’un temple millénaire mystérieux mais du dédale de couloirs d’un hôpital lugubre, elle ne cherchait pas à éviter une tribu indigène sanguinaire mais des soldats a priori tout aussi sanguinaires, et elle ne comptait pas sauver le monde civilisé de l’effondrement mais simplement se sauver elle-même (et Harlock, à condition qu’elle le trouve… et si toutefois il était bien dans le même bâtiment qu’elle).
Et, bien sûr, il ne s’agissait pas d’un livre mais de la réalité. La pégase arc-en-ciel ne niait pas qu’elle avait toujours rêvé se retrouver en pareille situation pour faire valoir son formidable potentiel d’héroïne, mais elle aurait préféré ne pas être une héroïne solitaire. Les exploits ne valaient le coup d’être vécus que si d’autres étaient présents pour les admirer, non ?

Elle soupira. Ses amies lui manquaient. Où étaient-elles, en ce moment ? L’avaient-elles laissée dans cet endroit en la pensant en sécurité ? Cherchaient-elles à la sortir de là ?

Après avoir vérifié que le couloir était toujours vide, Dash se planta devant une nouvelle porte, puis leva un sourcil intéressé. Ah, celle-là ne s’ouvrait pas par magie lorsqu’elle arrivait. Cela signifiait donc qu’il fallait qu’elle entre : dans les livres de Daring Doo, le trésor se cachait toujours derrière la porte verrouillée.
Elle hésita. Dans les livres de Daring Doo, la porte verrouillée ne s’ouvrait qu’après avoir résolu une énigme complexe, déchiffré un code antique dont la signification s’était perdue depuis des générations ou trouvé les clés d’un mécanisme secret dissimulé dans les murs. Il semblait que cette porte-ci appartenait à la même catégorie : non seulement elle était fermée, mais en plus elle n’avait pas de poignée.

La pégase plissa le front. Elle ne voyait rien qui puisse tenir lieu d’énigme ou de code antique à proximité. Restait donc le mécanisme secret. Et justement, elle apercevait un boîtier à gauche de la porte et à mi-hauteur du mur.

Rainbow prit une grande inspiration : elle allait devoir voler. Ses ailes tremblaient un peu tandis qu’elle les sollicitait, mais elles parvinrent néanmoins à la maintenir en l’air. Au vu de l’effort que cela lui demandait, il était inutile qu’elle songe à de quelconques acrobaties aériennes, mais cela suffirait : tout ce qu’elle voulait, c’était rester au niveau du boîtier pour réussir à ouvrir cette porte.
Alors… Il y avait des chiffres, mais rien qui indique lesquels constituaient la bonne combinaison. Il y avait une touche ornée du symbole d’une clé, mais rien ne se produisit lorsque Rainbow la poussa du sabot. Frustrée, la pégase testa une série de touches, les unes à la suite des autres, puis toutes en même temps. Sans succès. Le boîtier écopa d’une ruade.

S’en échappèrent une gerbe d’étincelles, aussitôt suivies de crépitements et d’une odeur de brûlé.

Puis la porte s’ouvrit.

———————

Le barman referma nerveusement la main sur la crosse de son fusil d’assaut. C’était du suicide. Il le savait. Son « plan » possédait trop d’inconnues, trop d’hypothèses bancales, trop de présuppositions optimistes. Pour que cela fonctionne, il fallait une diversion convaincante, il fallait que les Illumidas mordent à l’hameçon, il fallait que son contact – qui était un médecin au-delà de tout soupçon – accepte de s’exposer et de risquer sa carrière, il fallait que le chemin soit dégagé, il fallait qu’Harlock comprenne la manœuvre en cours et profite de l’occasion… Du suicide. Mais avait-il vraiment le choix ?

— Euh… M’sieur Bob ? Vous m’entendez ? J’suis prête !
— Bien reçu. À mon signal.

S’il ne tentait rien, le gamin était perdu.
Maintenant ou jamais.

———————

Rainbow Dash n’avait pas trop su à quoi s’attendre une fois de l’autre côté de cette porte. Tout au plus avait-elle imaginé qu’il s’agissait d’un « endroit important » de l’hôpital, étant donné que l’accès en était interdit aux visiteurs.
Une chose était sûre, elle ne s’était pas attendue… à ça.

— Capitaine ? Capitaine Harlock ?

C’était forcément lui. Elle reconnaissait sa silhouette longiligne, sa crinière brune, les mèches ébouriffées qui masquaient son regard…
Elle avait envie de vomir.

La pièce, éclairée par deux gros projecteurs, était inondée d’une lumière blanche agressive, artificielle et éblouissante. L’air était imprégné d’une odeur âcre et métallique… une odeur de sang. Il était impossible de s’y tromper. Tout était constellé d’éclaboussures rougeâtres : les parois, le rare mobilier, le plafond, le sol… Du sang. Du sang partout.

La pégase s’aperçut soudain qu’elle laissait des empreintes écarlates derrière elle.

Elle hoqueta.

— Capitaine ? Réveillez-vous !

Prostré contre un mur, Harlock était recroquevillé en position fœtale et restait sourd à ses appels. Les yeux écarquillés en un mélange de terreur, d’incrédulité et de dégoût, Dash ne pouvait détacher son regard des innombrables plaies parallèles qui striaient le dos de l’humain. Qui donc était assez cruel pour s’acharner ainsi ? songea-t-elle.
Et surtout, pourquoi ?

— Capitaine…

Elle se força à tendre une patte, à poser un sabot sur l’épaule d’Harlock, à exercer une légère pression pour le faire réagir. Le contact chaud et poisseux du sang lui provoqua un haut-le-cœur.

Dans les livres de Daring Doo, tout avait pourtant l’air si facile…

Elle vomit.

———————

— Maintenant, fillette ! Go, go, go !

Applejack ne prit pas la peine de corriger (ni de se demander ce que « gogogo » voulait dire). Plus le moment pour les palabres, place à l’action.
Elle se saisit de ce que le barman avait appelé « une grenade fumigène » et, d’une ruade bien calibrée, la projeta à l’intérieur du hall de l’hôpital.

———————

Jumelles en mains, Kei scrutait chaque mouvement d’Applejack depuis le toit de l’immeuble voisin. Les alarmes de sécurité de l’hôpital retentirent à l’instant même où la première grenade explosait. Avec une témérité exemplaire (ou une méconnaissance certaine des dangers des armes à laser), la ponette orange se lança ensuite dans une galopade effrénée, slalomant entre les passants affolés et ne s’arrêtant que pour envoyer d’autres fumigènes. Et c’était qu’elle visait bien, en plus ! constata Kei avec admiration.

La jeune femme fronça les sourcils : les Illumidas n’avaient pas tardé à réagir et, déjà, des soldats surgissaient de l’épais nuage de fumée, se déployaient en éventail autour de l’entrée et profitaient de chaque opportunité de terrain pour se mettre à couvert.

Kei eut un sourire carnassier. Aveuglés par les fumigènes, les Illumidas peinaient à déterminer la direction de l’attaque. Elle avait donc l’avantage… pendant quelques secondes.

Elle reposa ses jumelles, puis ajusta sa visée à travers la lunette de son fusil d’assaut.

———————

Une diversion.
Le barman serra les mâchoires. Ils disposaient de combien ? Une, deux minutes ? Chaque seconde gagnée était précieuse, chaque Illumidas que lui et les filles distrairaient serait un Illumidas en moins en train d’empêcher Harlock de s’enfuir.

Le barman fixa la porte latérale de l’hôpital, celle-là même par laquelle il avait fait entrer Harlock et le poney à peine deux jours auparavant. Un seul garde y était en faction, avec l’air blasé du planton qui ne s’attend à rien d’autre qu’une longue veille inintéressante.

Bien sûr, il était évident que d’autres soldats devaient patrouiller à l’intérieur du bâtiment, mais l’objectif du barman n’était pas de se débarrasser de tous les Illumidas. Il était néanmoins bien décidé à causer un maximum de grabuge en un minimum de temps. Qui sait ? S’il était assez efficace, les soldats penseraient peut-être avoir affaire à plus d’un Octodian isolé ?

Armes aux poings et fumigènes parés, il franchit les portes vitrées au moment exact où l’alarme se déclencha.

———————

Rainbow Dash sursauta lorsqu’une sirène stridente sur deux tons se mit à hurler dans le couloir. Bon sang, elle avait frôlé la crise cardiaque ! Est-ce qu’ils soignaient vraiment des malades, dans cet hôpital ?

Un humain entra soudain dans la pièce, arrachant à la pégase un cri de saisissement.

— Qui êtes-vous ? couina-t-elle d’une voix qui était beaucoup trop apeurée pour qu’elle puisse en être fière (elle devrait absolument omettre ce détail lorsqu’elle raconterait ses exploits héroïques).
— Je ne suis personne ! haleta l’humain. Vous ne m’avez pas vu ! Mais je suis content que vous soyez là, suivez-moi ! Vite !

Rainbow Dash haussa un sourcil devant l’incongruité de l’affirmation. Bien sûr que si, elle l’avait vu ! Cet humain était-il fou ? La pégase le scruta, soupçonneuse, tentant de discerner les traces d’un piège, d’une tricherie ou d’un monstre qui se serait déguisé en humain (tome six des aventures de Daring Doo, même si le monstre s’était déguisé en poney terrestre, cette fois-là). Rien de suspect n’était toutefois visible. L’humain roulait des yeux affolés et jetait sans cesse des regards derrière lui comme s’il craignait qu’un véritable monstre ne surgisse à sa suite. Sans un mot de plus, il saisit Harlock par-dessous les épaules et le traîna hors de la pièce, dans le couloir et jusqu’à ce qui ressemblait à un escalier de service. Un escalier qui comptait tellement de marches qu’il devait bien descendre jusqu’au Tartare.

Dash eut une infime hésitation. Cet humain était de la même couleur qu’Harlock, il était vêtu d’une blouse de médecin et non pas d’un uniforme de soldat, et il semblait vouloir les faire sortir d’ici. Il avait tout de même de bonnes chances d’être un allié.

La pégase lui emboîta donc le pas.
De toute façon elle n’avait pas beaucoup d’autres choix.

———————

Ses grenades expédiées, Applejack galopa jusqu’à la voiture où l’attendait Fluttershy. La pégase jaune piaffait sur place.

— Applejack, il faut partir ! Est-ce que tu sais faire marcher cette machine ?
— On attend Kei ! C’est le plan !

Nerveuse malgré tout, Applejack étudia les boutons, manettes et pédales. Elle ne savait pas faire marcher cette machine, mais elle avait observé le barman s’en servir. Il « suffisait » de pousser ce levier et de tourner le volant. L’endroit devenait beaucoup trop dangereux. Elle n’avait lancé que des fumigènes inoffensifs, mais les Illumidas ripostaient avec le même genre de projectiles qu’Harlock avait utilisé contre le dragon. La terrestre n’osait même pas imaginer ce qui se passerait si « cela » la touchait, elle ou Fluttershy.

Et elle n’allait pas patienter pour connaître la réponse.

———————

Kei n’attendit pas la deuxième vague de soldats pour abandonner sa position. Elle avait fait un joli carton, mais maintenant qu’elle était repérée elle n’avait plus aucune chance.

Lorsqu’elle arriva à l’aéro-camionnette de Bob, parquée dans une rue perpendiculaire à celle de l’hôpital, Applejack était déjà installée à la place du conducteur. Kei la poussa sans ménagement.

— Ce n’est pas le bon moment pour se familiariser avec la technologie !
— Et Rainbow Dash ? rétorqua Applejack.
— Bob s’en occupe ! Nous, on a fait notre job ! Maintenant on dégage !

Le barman lui avait donné plusieurs points de repli. Kei fit rugir le moteur. C’était une bonne occasion de mettre en pratique les meilleures tactiques du captain pour semer des poursuivants.

———————

Au rez-de-chaussée, c’était l’apocalypse. Il y avait de la fumée, des cris et des « bzzt » intermittents comme si un duel magique était en train de se régler à coups d’éclairs. Étant donné la situation actuelle, Dash supposa néanmoins que tout ceci n’avait rien à voir avec la magie, et que éclairs ou non, ces choses la viseraient ainsi qu’Harlock dès qu’ils les repéreraient.

L’humain qui les avait conduits dans cet enfer s’était évaporé. Quant à Harlock… Harlock semblait avoir plus ou moins repris connaissance, mais de toute évidence pas assez pour être d’une quelconque aide. Sporadiquement, il faisait une misérable tentative pour avancer, toutefois Rainbow Dash doutait qu’il soit vraiment conscient de son environnement… ou du fait qu’elle était avec lui.

Sans plus se préoccuper de dissimuler la panique qui l’avait envahie, la pégase tourna la tête de tous les côtés, cherchant désespérément une issue. Elle se retourna à temps pour empêcher Harlock de s’écraser face contre terre.

Le capitaine réagit soudain à sa présence en s’agrippant à elle.

— Il faut… dehors… murmura-t-il faiblement.

Dash ne put retenir un sourire nerveux. Oui, ils étaient d’accord. Mais comment ?
Là-bas, peut-être…
Il y avait un peu moins de fumée. Un rectangle de lumière. Un espoir. À condition que ces éclairs ne la touchent pas.
N’y pense pas. Pars d’ici. Quitte cet endroit, c’est ta seule chance.

Sans plus réfléchir, la pégase porta Harlock du mieux qu’elle pouvait, puis visa l’ouverture qu’elle avait repérée avec une seule idée en tête : sortir. Sortir vite.

———————

À travers la fumée, le barman aperçut soudain Harlock, qui progressait moitié à quatre pattes, moitié soutenu par un poney. L’Octodian était loin d’être certain que le gamin soit en bon état (c’était même plutôt le contraire, d’ailleurs), ni qu’il l’avait vu, mais au moins le pirate allait-il dans la bonne direction – c’est-à-dire non pas vers lui, mais vers le parking des ambulances.

Là-bas, il y avait des véhicules prêts à décoller qu’Harlock pourrait sans problème « emprunter », et avec le bordel que le barman avait foutu la voie était à peu près dégagée. Bob lâcha un soupir. Il ne pouvait rien faire de plus.

Il n’avait plus qu’à disparaître avant de se faire prendre.

———————

Harlock sentit confusément qu’on le soulevait, qu’on le poussait dans un escalier, il tenta de poser ses pieds sur le sol et de faire quelques pas, mais il était traîné plus qu’il ne marchait. Finalement, il tomba à genoux sur le carrelage, sentit l’odeur âcre d’un fumigène, entendit les sifflements aigus de lasers malgré le bourdonnement continu qui emplissait ses oreilles, et comprit vaguement qu’une bataille était en cours quelque part.
Et que cela avait très certainement un rapport avec lui.

La capitaine se concentra. Il savait que toute cette agitation impliquait probablement une réaction de sa part, mais quoi ? Sa tête tournait. La seule chose à laquelle il réussissait à penser, c’était qu’il avait mal et qu’il resterait bien allongé par terre. Avec effort, il parvint néanmoins à produire quelques soubresauts qui, il fallait bien l’avouer, étaient d’une efficacité toute relative pour avancer.

Ses doigts accrochèrent soudain quelque chose de soyeux.

— Eh ! Pas mes plumes !

Oh, tiens. Un poney. Rainbow Dash, d’après la couleur.
Il voulut dire « ramène-moi à l’Arcadia, Tochiro saura quoi faire, il faut que le doc me soigne et on devrait trouver de l’aide dehors », mais il doutait que tous les mots aient franchi ses lèvres. Il sentit toutefois que Dash se mettait en mouvement. Instinctivement, il crispa ses doigts sur la crinière (ou les plumes) du poney, et il se retrouva à l’extérieur sans avoir compris comment il avait fait pour y arriver.

Toujours est-il qu’il était à présent à quatre pattes, non pas dehors, mais plutôt dans un parking couvert, au milieu de trois cadavres d’Illumidas et en face d’une ambulance.

— Et maintenant ? répétait Rainbow Dash en boucle et d’un ton à la limite de l’hystérie. Et maintenant ? Ils vont nous rattraper ! Il faut qu’on s’en aille !

S’en aller. Ah, oui. L’Arcadia.
Puisant dans ses dernières ressources, Harlock rampa jusqu’à l’ambulance, se hissa péniblement dans le poste de pilotage, repoussa une mèche de cheveux de ses yeux pour empêcher sa vision d’être aussi floue (en vain), puis, en tâtonnant, parvint à démarrer l’appareil, à décoller et à quitter le parking, non sans avoir percuté un autre véhicule au passage. Ou un pilier. Ou des gens. C’était sans importance.

Enfin, à bout de forces, Harlock se laissa glisser au sol. Rainbow Dash le fixait comme s’il allait continuer à lui montrer l’exemple, mais la pégase allait devoir se débrouiller.

— Prends les commandes, souffla-t-il d’une voix rauque.
— Quoi ? Mais je ne sais pas…

Trop tard pour argumenter. Un voile noir de plus en plus insistant menaçait de l’engloutir. Harlock ferma les yeux.

— Tu sais voler ? Tu sais piloter !

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