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Sensation

Une fiction traduite par inglobwetrust.

Chapitre 10

Ça a été une sacrée journée, et vu comment j’étais crevé, j’aurais sans doute prendre la nuit pour y réfléchir, mais chaque fibre de mon être criait, « Va trouver Braeburn, TOUT DE SUITE ! »

Holli a jeté un œil de derrière mon lit, puis s’est levé lentement avant de marcher vers moi. Elle s’est arrêtée et m’a regardé dans les yeux, et sa position était désaxée, comme s’il essayait de tirer une logique de tout ce qu’elle voyait. Finalement, elle a souri et a hoché la tête. « Va le chercher, mon sucre. »

Je me suis mis droit, et le bas de ma mâchoire frémissait. Je ne pouvais pas m’empêcher de sourire, mais j’ai trouvé le self-control nécessaire pour baisser la voix jusqu’à un bon niveau pour parler. « Merci, Holli. » Je suis arrivé jusqu’à son cou et l’ai amené tout près de moi pour lui faire un gros câlin. C’était sans doute trop serré, mais elle ne semblait pas s’en soucier.

Holli m’a proposé son aide pour nettoyer la chambre. C’était gentil de sa part de me donner un coup de sabot, mais j’avais la bougeotte pendant tout ce temps. Je devais me mordre la langue pour m’empêcher de lui demander d’aller plus vite, et après ce qui avait eu l’air de durer des heures, on est allés en bas. Holli a pris son écharpe du sol et la remise en un seul mouvement.

On a tous les deux ignoré le bordel dans le salon. Je savais qu’il était toujours là. Je savais qu’il m’attendrait toujours la prochaine fois que je passerais la porte et que je ne pouvais pas le laisser éternellement dans cet état, mais je ne pouvais pas me résoudre à nettoyer. Non, j’avais des choses plus importantes à faire.

Dehors, Holli s’est envolée avec un rapide, « Bonne chance ! »

J’ai refermé la porte, et il n’y avait plus aucune distraction.

J’ai décollé encore plus vite qu’à n’importe quel show. Une traînée d’éclairs craquait derrière moi. Je voulais, j’avais besoin d’aller au verger, de dire à Braeburn à quel point j’étais désolé, et plus vite je le trouverais, plus vite on se sentirait mieux.

Je ne voulais pas seulement m’excuser. Je voulais m’assurer qu’il allait bien et que j’écouterais ce qu’il avait essayé de me dire. Je devais le remercier pour avoir passé du temps avec moi et pour avoir été l’ami dont j’avais besoin, même si je ne méritais pas sa bonté. Je devais… mettre les choses au clair.

Je voulais aussi lui dire que j’avais pensé à lui en baisant une jument. Je me disais qu’il apprécierait.

Une brise fraîche de fin d’après-midi me poussait par derrière, et je sentais un orage dans le vent. Tout passait devant moi, flou, mais le monde n’avait jamais été aussi clair depuis des mois. J’avais une mission. Je pouvais exactement voir ce que j’avais besoin de faire, et je savais les étapes que j’avais besoin de faire pour l’accomplir. Les seules pensées qui surnageaient étaient le chemin vers le verger.

Voler à l’ouest. Passer à travers les nuages. Trouver le lac. Hé, beau gosse. Passer la plage. Remonter le chemin. Sentir les pommes. Presque là.

Le verger de pommes est entré dans mon champ de vision, et ma mission a buté contre le premier obstacle. Ma tête me faisait mal, rien qu’en pensant à encore naviguer dans ces arbres. « Merde », je crachais. J’ai remonté juste avant d’arriver aux arbres. Le vent a changé de direction sur moi, et j’ai flotté quelques mètres au-dessus du verger, le scannant et secouant la tête. ‘Ce verger est immense’, j’ai pensé. Je m’étais évanoui pendant la majeure partie de mon petit tour avec Braeburn, alors je n’avais pas beaucoup de souvenirs pour m’aider à naviguer.

Mon pouls était comme irrégulier, et je tournais la tête dans un million de directions. Je mordillais ma lèvre, hésitant entre deux choix : mon adrénaline qui me disait de continuer à voler, mais la partie logique de moi qui voulait un plan. Le soleil commençait à se coucher, et de grands nuages noirs se dirigeaient vers moi. Chercher une aiguille jaune dans une botte de foin verte était déjà assez dur, et ça ne serait pas plus facile avec les lumières éteintes et la pluie qui tombait.

La panique a battu la logique, alors avec un grognement, j’ai décollé. J’ai essayé de voler en cercles autour du verger, mais je continuais à sortir du schéma à chaque fois que je pensais avoir vu quelque chose. Je suis descendu vers un endroit, juste pour trouver un vieux chariot ou un lopin de terre là où je pensais avoir vu un poney. Je n’allais nulle part les arbres étaient un peu trop denses pour voir quelqu’un marcher en dessous d’eux, et j’essayais constamment de reprendre de l’altitude pour avoir une meilleure vue au cas où j’aurais manqué un poney dans les arbres.

Après une heure ou un truc comme ça, j’ai remarqué à quel point ma tête me martelait. Mes ailes tremblaient. Je devais vraiment me concentrer pour continuer à aller à une vitesse décente, mais je ne pouvais pas en demander plus à mon cerveau sans risque de manquer quelque chose. Mes yeux étaient lourds, et l’adrénaline que j’avais ressentie en quittant ma maison avait disparu depuis longtemps. Au lieu de me sentir poussé à continuer, l’anxiété prenait le pas. Mon cerveau continuait à me montrer des images d’échecs et de blessures et tous les pires scénarios d’un acrobate aérien volant en haut d’un orage. Ils commençaient tous à devenir désagréablement probables.

Mon manque de succès n’aidait pas. ‘Et si je ne le trouvais pas ? Et si il ne voulait pas me parler ?’ Mon cœur saignait. ‘Et si il était totalement dingue de moi et lui parler réveillerait une vieille blessure ?’

Il commençait à faire noir, et une goutte d’eau a touché mon oreille. C’était un mauvais signe, mais au moins, ça m’a reconcentré. J’ai retiré le brouillard qui recouvrait mon esprit, assez longtemps pour avoir quelques pensées lucides. « Okay », je parlais à voix haute pour garder mon esprit en place. « Il y a de l’orage, il est tard, et je n’ai vu personne. » Je devais prendre de grandes inspirations en réfléchissant dans ma tête. « S’il n’est pas dehors, il est… à la ferme de sa tante. Okay. » J’ai encore inspiré. « Okay. Trouver la maison, trouver Braeburn et s’y écraser pour la nuit. » Mon cœur a un peu bondi, et je me devais de rire. « Ha ! Dormir pour la nuit. »

Mes ailes ont protesté, mais je les ai battues assez fort pour gagner de l’altitude. Après avoir fait des spirales vers le haut et avoir chancelé quelques fois, j’avais une bonne vue de la majorité du verger. La pluie commençait à tomber plus régulièrement. J’entendais le tonnerre au loin. Le soleil était presque couché, et j’ai cherché au plus profond de mes souvenirs pour affiner ma recherche sur l’endroit où pouvait se trouver la ferme.

La pénombre n’aidait pas, mais après avoir scanné encore quelques fois, j’ai trouvé une clairière avec la ferme au milieu, un petit point rouge dans un grand anneau vert, ma cible.

Mon corps entier s’est bloqué pendant une seconde quand j’ai réalisé que j’allais faire face à Braeburn, assez pour tomber de quelques mètres. Je me suis immédiatement maudit pour être un tel couard.

‘Ne sois pas un trou du cul. Il est temps d’y aller, Soarin’ Avec un coup mental dans les flancs, j’ai foncé vers la ferme. Mon corps était tendu et au bord de l’implosion, mais par miracle, je ne me suis pas écarté de ma course. La pluie tombait plus fort, le vent frappait mon visage et mes poumons brûlaient alors que je cherchais de l’air, lourd et plein d’humidité avec l’odeur des pommes et de l’écorce d’arbre. J’ai volé avec tout ce qui me restait, me retenant juste assez pour empêcher une traînée d’éclairs de se former derrière moi. Pas besoin de tenter le sort encore plus que je ne le faisais déjà.

Je suis arrivé dans un angle raide, et quand je me suis rapproché de la maison, une lumière s’est allumée dans la cuisine, et j’en ai presque fait une crise cardiaque. J’ai atterri sur le sol boueux et j’ai glissé jusqu’à m’arrêter. Mes sabots me faisaient mal, mais je galopais en avant, abaissant la distance entre moi et la porte blanche. Ma respiration était lourde. Pourtant, à cet instant, je n’aurais pas pu m’empêcher de sprinter, même si je l’avais voulu.

La maison se rapprochait alors que mes sabots frappaient la douce terre.

Vingt mètres.

Dix mètres.

J’y étais. J’enfonçais mon sabot dans la porte et l’ouvrais. « Braeburn ! »

« AAH ! » Ce n’était pas la bonne voix. Le poney à l’intérieur est tombé de sa chaise, et je me suis un peu éteint quand j’ai vu son pelage rouge avec un truc vert sur son flanc. Ma mâchoire était serrée, et j’ai secoué violemment ma tête avant de regarder à nouveau. Le poney restait de la même couleur. Je restais là, complètement immobilisé, avec un sabot tenant la porte ouverte tandis que la pluie commençait à tomber derrière moi.

Cet étalon terrestre rouge -le mec était bâti comme une BÊTE- a mis un long moment pour se reprendre. Il a grogné depuis le sol, puis s’est lentement levé, s’est étiré, et a secoué sa crinière blonde. Il a inspiré profondément, a pris la chaise sur laquelle il se tenait et la remis droite. Il y avait quelque chose de fluide dans la façon dont il se déplaçait, quelque chose que je n’attendais pas venant d’un gars aussi grand.

La pluie crépitait dehors, et une brise portant l’odeur de plantes mouillées est revenue dans mon nez. La pièce était calme, comme si toute la maison était groggy. Je sentais mes muscles se détendre tandis qu’une partie de mon anxiété et de mon excitation fondait dans une indifférence fatiguée.

Après une longue pause, l’étalon rouge a fini par me regarder. Sa tête s’est inclinée quand il m’a regardé de haut en bas, et sa lèvre inférieure est ressortie. Il y a eu un silence assez inconfortable avant qu’il parle enfin d’une voix grave, folklorique. « ‘Soir. »

« Euh… bonjour. » Il ne m’avait pas invité à entrer, mais il n’avait pas essayé de me jeter dehors, et mon sabot commençait à se fatiguer à tenir la porte. J’ai pris ça comme un signe et je suis entré, en essuyant mes sabots sur le tapis et en enlevant la pluie de mon pelage. C’était comme si j’étais à nouveau dans un brouillard. Bon, j’avais encore de la motivation, alors j’ai fait quelques pas dans la maison. Un ressort rouillé a poussé un gémissement fantomatique quand la porte s’est refermée.

La cuisine était la même que dans mes souvenirs, mais elle avait l’air bien plus froide cette fois. Le soleil chaud ne venait plus depuis une fenêtre ouverte, l’odeur des tartes était partie, et au lieu de l’étalon jaune avec la douce crinière, j’avais ce grand gars avec la moitié d’une pomme verte comme marque de beauté. Je savais assembler les pièces du puzzle -c’était sans doute quelqu’un de sa famille. « Je… cherche quelqu’un. Est-ce que Braeburn est là ? »

« Nnnon. » Il avait toujours ce regard contemplatif sur son visage, mais je n’en déduisais rien. Ses yeux se sont déplacés vers quelque chose sur le comptoir, et ses ailes se sont repliées contre sa tête, gênée. Je n’étais pas inquiet jusqu’à ce qu’il arrive vers l’évier et rince une bouteille de whisky vide. Les mouvements lents et son discours ont levés quelques drapeaux rouges -je pensais qu’il devait être bourré, et avec sa taille, je devais m’inquiéter s’il était bourré et en colère. En plus, tu sais, je venais juste de faire irruption dans sa maison !

Mais bon, j’avais été loin, et je n’allais pas reculer. « Oh, euh… Est-ce que vous savez où il est ? » Ça n’est pas sorti aussi bien que ça sonnait dans ma tête.

« Ouaip. » L’étalon rouge a secoué la bouteille, l’a reposé et a fermé la fenêtre au-dessus de l’évier. Le loquet a craqué quand il a refermé la fenêtre.

Je levais les yeux au ciel, je ne voulais pas avoir à gérer un autre gros malin ce soir. J’avais déjà assez de mal à me gérer moi-même. Je faisais signe du sabot et dit platement, « Vous savez, vous ne m’aidez pas beaucoup. »

« Nnnnon. » Sa voix était assez sèche, quelque chose que j’ai à peine remarqué -j’étais trop distrait à me demander où Braeburn avait pu aller. L’étalon rouge a marché vers le bureau, et j’ai trotté après lui.

Je ne pouvais pas cacher l’agacement dans ma voix, mais au moins, j’ai trouvé comment éviter les questions oui-non. « Bon, où est-il allé, dans ce cas ? »

« Ailleurs. »

‘Putain !’ Il s’est déplacé vers une autre fenêtre et l’a refermé, coupant l’air et la pluie fraîche qui entraient. L’éclair a traversé le ciel dehors, suivi de près par un énorme coup de tonnerre. Je voulais lui crier dessus, mais j’étais trop fatigué pour mettre de l’énergie dans mes mots. « Bon. Alors vous pourrez au moins me dire s’il va bien ? »

L’étalon rouge a soupiré et a marché vers moi, puis est passé devant moi. Il aurait pu m’écraser si je n’avais pas bougé. « Eh bien… », a-t-il expliqué, « si vous voulez savoir, il est un peu secoué. » Ça ne m’a pas surpris, mais c’était quand même douloureux de l’entendre. L’étalon est retourné à la cuisine et s’est arrêté à la porte. « L’a dit qu’il avait eu un visiteur qui n’était pas très gentil. » Mes ailes sont retombées.

Il y a eu une autre pause, comme s’il calculait quelque chose. Il a regardé la poignée de porte pendant une seconde, et puis le verrou . A travers mon brouillard mental, j’ai réalisé que quelque chose était bizarre dans la façon dont il agissait. « Et voir un gentil poney comme lui se faire maltraiter, ça. Me. Rend. Fou. »

Il a refermé la porte avec un THWAK strident, et ça m’a frappé. Ça m’a frappé comme une tonne de briques. Mes yeux se sont écarquillés, et tous mes membres étaient comme faits de plomb.

Il a tourné lentement sa tête vers moi. Son regard était aussi glacé par le dégoût que brûlant de rage. Il a froncé les yeux, et a grogné à un rythme lent et terrifiant qui insistait lourdement sur chaque mot. « Mais je… j’imagine que tu sais pas c’qui s’est passé, pas vrai ? »

Je me suis forcé à respirer, et mes yeux s’élançaient tout autour de moi. Partout où je regardais, j’étais coincé. Fenêtres : fermées. Portes : verrouillés. La seule sortie semblait être les escaliers du côté opposé de la maison, au niveau de la cuisine, et il se tenait entre eux et moi. Même si je parvenais à aller dehors, je savais que je ne pouvais pas voler dans l’orage, et il m’attraperait dans le verger avant que j’atteigne le premier arbre.

Il était grand. J’étais fragile. Il fulminait. Je frissonnais. Il pouvait me casser comme une allumette, et mon esprit a pensé à chaque os de mon corps en train d’être cassé, un à un, en commençant par les ailes.

Sa voix devenait plus grave et plus sérieuse. « Et j’imagine aussiiiiii…. » Il insistait sur chaque mots. Il s’est avancé vers moi comme un énorme cumulus prêt à écraser un petit et incroyablement sexy papillon avec une seule fraction de ses pouvoirs. « … que tu sais rien sur ces…. » Il a regardé mes ailes et a serré les dents. « … plumes bleues que j’ai trouvé sous le canapé, pas vrai ? »

Mes genoux tremblaient. Mes dents claquaient. Ma gorge se refermait. Le tonnerre grondait dehors tandis que l’étalon se mettait en face de moi, et même avec le cou penché et ses yeux si près des mieux que je pouvais compter ses cils, il me survolait comme un tsunami de fureur rouge.

J’ai avalé la boule dans ma gorge. Même si mes pensées cherchaient désespérément un moyen de m’en sortir, quelque chose dans mon cœur m’a poussé à couiner, « O-Où est B-Braeburn ? »

Il a frappé le sol du sabot et a cassé une planche avec un crack qui me rendait malade. Les éclairs traversaient ses yeux. « On s’en fiche ! Tu lui referas pas d’mal, t’as pigé ?! » Négligemment, j’ai baissé les yeux juste à temps pour voir son sabot voler vers mon visage. Il m’a frappé sur le menton -assez fort pour que je me morde ma lèvre et goûte immédiatement du sang- et m’a forcé à lui faire face. « Regarde-moi dans les YEUX et dis-moi que tu feras plus d’mal au cousin Brae, ou tu seras encore plus désolé qu’un renard pris dans un poulailler. » Il fulminait de rage, et il n’y avait aucun ralentissement qui détendrait ses mots. J’ai hésité, et il a craché, « Parle maintenant, l’ami ! Tu vas le laisser tranquille ? »

Je me suis tortillé. J’ai hésité. Je devais sortir de là, mais dans la pénombre de la cuisine derrière lui, j’ai vu qu’il y avait des yeux verts. Ils étaient pleins de colère, mais ils ressemblaient à ceux de Braeburn. Les voir m’a assez calmé pour murmurer, « Je ne peux pas. »

« Hm ? » Il a reculé sa tête et levé un sourcil, gardant un sabot sur ma mâchoire.

J’étais fatigué, dans tous les sens du mot. Mes jambes tremblaient toujours, et je pensais que j’allais m’évanouir, mais j’ai continué à parler. « Je ne peux pas. J’ai merdé et il a été blessé. » Ma respiration était lourde. « Il est l’étalon le plus gentil et le plus tendre que j’ai rencontré, et il m’a amené ici quand j’avais besoin d’aide, et j’ai eu peur et je l’ai insulté et je ne peux même pas me rappeler de toutes les merdes que j’ai dû dire, et je dois réparer ça. » Mes yeux étaient un peu mouillés. « Je dois m’excuser auprès de lui. »

L’autre étalon a reposé son sabot au sol, mais je l’ai à peine remarqué. Au lieu de ça, je continuais à chialer, mes yeux toujours fixés sur les siens. « Je suis tellement, tellement désolé ! L... l’abandonner comme ça était la chose la plus stupide que j’ai jamais faite, et je suis désolé, et il mérite au moins de le savoir, pas vrai ?! » Mes émotions continuaient à ressortir en me rappelant de chaque détail de cet après-midi. Ma voix a repris une tournure normale, et j’ai senti mon visage se détendre un peu. « Braeburn est spécial, et il a subi des trucs difficiles dernièrement, et il a besoin d’avoir du soutien, plus qu’il n’en a, hein ? »

Le gros poney rouge s’est assis. Il a détourné les yeux et a regardé l’orage par la fenêtre. Il a pris une longue et lente inspiration et a réfléchi, « Ouaip. »

J’étais prudent, mais petit à petit, j’ai senti mon corps arrêter de trembler et se détendre. Toute la rage l’avait quitté, et ce qui restait était plus comme du chagrin et de la contemplation, et mon cœur a repris un rythme normal. C’était comme s’il avait une aura autour de lui qui te faisait te sentir en sécurité, comme si tu le resterai tant qu’il était avec toi et ne te considérait pas comme une menace.

Moi aussi, j’ai regardé dehors. C’était la tempête. Je me suis assis, et pendant quelques minutes, aucun de nous deux n’a parlé. Tout ce qu’on pouvait entendre, c’était la pluie qui battait contre les fenêtres avec un coup de tonnerre pour nous empêcher de nous mettre trop à l’aise.

J’ai arrêté de trembler, mais ça m’a quand même demandé beaucoup de volonté pour briser le silence. « Désolé pour m’être invité ici. »

Il s’est tourné vers moi et a soupiré. « Macintosh Apple. » Il a tendu le sabot. « Mes amis m’appellent Big Mac. »

J’ai regardé son énorme sabot, puis j’ai fini par tendre le mien et le lui secouer. Un petit sourire est arrivé jusqu’à mon visage. J’ai parlé lentement et calmement. « Je suis Soarin ! Heureux de te rencontrer, Big Mac. »

« Ne m’appelle pas comme ça. »

Ma tête s’est inclinée sur le côté. « Mais tu… » Mon corps tremblait à nouveau. « Oh. »

« Ouaip. » Il s’est levé et a marché lentement devant moi. « Tu peux rester en haut ce soir. »

« Ouais, je devais aller -attends attends attends attends attends ? » Il est retourné dans le bureau, puis a pris une couverture froissée et l’a allongé sur le canapé. Ce canapé. J’ai gémi un peu, à la fois à cause des souvenirs de ce canapé et du fait qu’un étranger qui ne m’aimait pas m’invitait à passer la nuit ici. « C’est bon », j’ai marmonné mollement. « Je peux vol- »

CRACK ! Juste à temps. Mes ailes tremblaient en me rappelant de tous ces horribles manuels du ‘Vol en toute sécurité ‘ que j’avais dû lire en grandissant. La seule chose pire que s’écraser était de se faire frapper par un éclair (puis s’écraser). « Nnnon ! » Il a fini de faire le lit. « En plus, si t’es sérieux pour t’excuser auprès de Braeburn, ben, alors… » Il a baissé les yeux au sol et a refermé ses yeux. Je connaissais ce regard -il luttait avec ses pensées. « Y’a quelque chose que tu d’vrais voir. »

Mes oreilles ont pivoté vers lui. « Vraiment ? Qu’est-ce que c’est ? »

Macintosh a bâillé. « D’main matin. » Il s’est écrasé sur le canapé, et après quelques contorsions, il a réussi à mettre presque tout son corps dessus. Ses jambes pendaient sur le côté.

Je soupirais. « Est-ce que tu veux au moins du lit ? »

« Nnon. Je dors toujours en bas quand je rends visite à la tante Honeycrisp. Éteins les lumières, tu veux ? » Il s’est blotti dans le canapé et a fermé ses yeux, alors je me suis retourné, j’ai traversé la cuisine, et j’ai éteint les lumières en bas des escaliers.

J’ai levé les yeux vers la montagne de bois en face de moi, à peine visible dans la maison sombre.

Mes ailes voulaient tomber, et je ne voulais pas percuter quelque chose en l’air, alors je me suis résigné à ramper sur les marches grinçantes. Mon corps entier était lourd. J’avais faim, mes sabots me faisaient mal, et la simple idée de dormir me donnait envie de m’assoupir. Je voulais abandonner et m’endormir sur les marches.

Mais je ne sentais plus ce trou dans ma poitrine. Tout crevé que j’étais, je sentais quelque chose à sa place. C’est… assez bizarre à décrire. C’était comme une petite flamme qui me disait de continuer, mais pas comme un feu qui te brûle. Plus comme la chaleur que tu ressens quand tu fais quelque chose de bien. Je pense que c’est logique.

Non, je n’avais pas trouvé Braeburn, mais j’essayais, et ça voulait dire quelque chose, non ? J’avais commencé, et même si mon corps me disait que j’avais désespérément besoin de nourriture, repos, et d’aspirine, ce dont j’avais le plus besoin était un peu plus qu’un peu de réconfort, quelque chose pour me dire que ce que je faisais était bien et que ce n’était pas simplement un énorme gâchis, quelque chose pour me laisser savoir que j’approchais de plus en plus de ce petit poney jaune.

Je me suis levé moi-même sur la dernière marche, et le sol a couiné quand je traversais le sombre couloir. La seconde pièce à gauche avait un lit à l’intérieur, et après m’être arrêté à la salle de bains dans le couloir, j’y suis entré.

Il faisait noir –noir noir- mais je ne voulais pas me risquer un énorme mal de crâne en allumant la lumière, surtout vu que les éclairs dehors me donnaient une silhouette assez claire de la pièce toutes les quelques secondes. C’était clairsemé, avec juste un lit, des commodes et sans doute quelques trucs aux murs. Le lit était petit, à peine assez grand pour moi, et il n’avait pas été fait depuis la dernière fois qu’un poney y avait dormi. ‘Hé’, j’ai ricané. ‘Normal qu’il veut pas dormir là.

A l’éclair suivant, je suis arrivé sur le lit et m’y suis assis, les yeux vers la fenêtre. L’orage continuait à grossir, et la pluie continuait à marteler sur le toit, et j’étais soudain très, très heureux d’être à l’intérieur. D’une façon bizarre, j’étais trop fatigué, trop tendu pour dormir, et le tonnerre dehors était de toute façon trop fort, alors je me suis assis là, à fixer le vide pendant un moment.

« Arrête. » C’est sorti comme un murmure, et je n’avais pas vraiment essayé de dire quelque chose. Je savais même pas à qui je parlais. « S’il te plaît, arrête. » J’ai fermé les yeux et baissé la tête tandis que l’eau frappait contre la vieille et sombre maison. J’ai pensé à tout ce qui était arrivé aujourd’hui, de m’être fait sortir du tableau à la destruction de mon salon en passant par les cris contre Holli qui venait ici, et je me sentais… étourdi.

« Juste… arrête, okay ? Je ne peux pas gérer autant de merde à la fois. » J’ai baissé les yeux et vu rapidement ma marque de beauté. Ça m’a rappelé la pomme contusionnée de Braeburn. « Mais je le ferais si je le dois. »

Mon corps entier tremblait. Ce n’était pas parce que la pièce était froide, mais j’étais fatigué au-delà de mes limites. Je voulais me casser en deux, mourir, et en finir. Mais au lieu de ça, j’ai laissé mon corps tomber sur le côté et s’écraser sur le lit, prêt pour une autre nuit sans sommeil.

Puis ma tête a frappé l’oreiller.

Avec un petit souffle, une odeur familière de pomme et de sueur a rempli mon nez. C’était doux et sexy, et c’était comme si quelqu’un avait appliqué un baume apaisant sur mon cerveau. J’ai gémi en ressentant ça et enfoncé mon visage dans l’oreiller pour le sentir encore. « Mmm… » C’était faible, mais c’était là, et j’ai frissonné en frottant mon visage dessus. Mes muscles arrêtaient de me faire mal. Mes ailes se détendaient et se dépliaient naturellement. J’ai fermé les yeux et respiré son odeur, et chaque partie de moi se sentait un petit peu mieux.

Après encore quelques profondes inspirations, un doux sourire s’est dessiné sur mon visage. J’ai tiré les couvertures et je me suis blotti dedans, en murmurant, « Je serais là bientôt, Brae. » J’ai bâillé. « Je serais là bientôt. »

Jamais je ne me suis endormi aussi vite de toute ma vie.

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Note de l'auteur

J'espère que vous serez de plus en plus nombreux à lire cette histoire, qui mérite tellement plus que les 30-40 vues qu'ont les derniers chapitres. L'écriture est de plus en plus prenante, et je vous garantis que vous ne lâcherez plus cette histoire à partir d'un certain moment.

Enjoy.

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