Chapitre 6

« Bon, tu veux la bonne ou la mauvaise nouvelle ? »

« Hmm ? » Golden leva la tête de son bol de flocons d’avoine et regarda White en face de lui, qui revenait tout juste de recevoir le planning de la semaine. « Chmpspfscronchchmpof ! »

« Mec, parle-pas la bouche pleine. C’est sale, et en plus je pige rien », répondit White en tenant la feuille entre ses sabots.

Golden leva un sabot et goba d’un coup les flocons d’avoine qui l’empêchaient de s’exprimer, et dit enfin : « La bonne ? »

White rebaissa les yeux sur la feuille et annonça : « Alors, la bonne, c’est que la princesse Celestia, ET la princesse Luna partent après-demain en déplacement à Trottingham, et que ta chérie sera du voyage. »

Golden dut se retenir pour ne pas exploser de joie au milieu du réfectoire plein de gardes. Il décida plutôt de sourire à pleines dents, exposant les restes d’avoine collés dessus.

« Si ta copine voyait ça… » soupira White, forçant immédiatement son ami à refermer sa bouche et à se lécher les dents.

« Et la mauvaise ? » demanda-t-il en laissant échapper des bruits de succion d’entre sa mâchoire.

« La mauvaise, c’est que des changelins ont été signalés aux abords de la ville, et que la sécurité sera renforcée dans l’hôtel où on crèche, ainsi que dans la ville », expliqua White.

« Et donc ? » Golden leva un sourcil.

« Et donc, tu prends de gros risques si tu te balades dans la ville avec Midnight. Y’aura des gardes partout qui seront prêts à vous sauter dessus s’ils vous voient ensemble », l’avertit White. À cette nouvelle, Golden baissa la tête, la mine sombre. White essaya immédiatement de lui remonter le moral. « Hé, je me suis un jour promis de ne jamais laisser mon pote tirer une tronche comme celle que tu tires en ce moment. Alors, lève la tête et t’inquiète pas pour Midnight, on trouvera un moyen pour que tu la revoies », dit-il calmement.

Golden sourit et laissa son menton être soutenu par l’un de ses sabots sur la table, l’air pensif. Une idée lui vint très vite à l’esprit. « T’as le nom de l’hôtel et notre numéro de chambre ? » demanda-t-il. White baissa la tête vers la feuille, plissa les yeux et acquiesça. « Alors, j’ai un plan. »

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Le lendemain matin, le moment de la relève approchant, Golden devenait de plus en plus nerveux. La sueur coulait sur son front, et il se tourna vers White, en quête de soutien. « Et si ça marche pas ? C’est une super mauvaise idée ! Mais qu’est-ce qui m’a pris ?! »

White s’avança vers lui et posa son sabot sur sa bouche. « Hé, hé, doucement, jusque-là, y’a pas eu de souci, alors viens pas tout gâcher en paniquant. Encore cinq minutes et tu pourras faire ce que tu veux. Respire un grand coup et… sois naturel », dit-il en enlevant doucement son sabot.

Golden inspira profondément et se reprit, souhaitant que le temps passe plus vite et qu’il soit déjà à six minutes plus tard. Il ne put toutefois s’empêcher de légèrement paniquer et de sentir son cœur s’accélérer quand Starry et Midnight se firent voir depuis le bout du couloir. Surtout quand la batponey lui fit son discret clin d’œil quotidien, sachant déjà qu’ils allaient pouvoir bientôt se revoir en dehors de Canterlot.

Sept heures sonna. Salut. Échange de postes. Yeux qui se croisent. Corps qui se frôlent. Au moment du départ de Midnight et Starry, White lança un petit caillou qui frappa le casque de la jument. Elle s’arrêta net et se retourna pour essayer de comprendre d’où venait ce projectile, et manqua de pousser un cri de surprise en découvrant le spectacle devant ses yeux.

Golden avait déployé ses ailes et avait écrit dessus. Sur la gauche, « CHAMBRE 92 », et la droite « 20H ? ». Elle hocha rapidement la tête, montrant son approbation. Golden sourit et le temps sembla se figer quelques secondes.

« Midnight, qu’est-ce que tu fiches ? » aboya Starry en constatant l’absence de la batponey à ses côtés. Il se retourna, et Golden replia rapidement ses ailes justes au moment où Starry tourna la tête. Midnight reprit rapidement sa marche en avant et ne répondit rien, sous le regard noir de son lieutenant. Quand ils tournèrent dans un coin et disparurent hors du champ de vision des gardes, Golden poussa un énorme soupir de soulagement, et essuya la sueur sur son front.

« Pfiou, c’est pas passé loin », souffla le pégase, en reprenant son souffle et en laissant son cœur reprendre un rythme normal. « Je pense qu’elle a pigé le message. »

« Ouais », acquiesça White. « Maintenant, t’as juste à prier pour qu’une jument sexy ne passe pas devant toi d’ici la fin de journée si tu veux pas qu’elle se fasse des idées. »

La sueur coulait à nouveau sur le front de Golden. Son cœur s’accéléra et la panique s’empara à nouveau de lui. « Oh Celestia… »

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À cause de la sécurité renforcée, et de la présence de gardes supplémentaires, les batponeys et gardes royaux voyageaient dans deux wagons séparés, ce qui empêcha Golden de croiser Midnight, et le rendit encore plus impatient et nerveux pour la suite. Luna visitait une autre partie de la ville, et ils ne purent pas se croiser en journée, car le déplacement conjoint des deux Princesses n’était prévu que pour le lendemain.

Aux côtés de Celestia, Golden remarqua qu’en effet, le nombre de gardes postés dans la ville avait été accru. Impossible d’échapper à leur présence à chaque rue. Le plan de San Franciscolt ne pourrait pas être répété une seconde fois. Mais Golden avait déjà une idée en tête, et un rapide coup d’œil aux alentours de l’hôtel confirma l’option choisie.

Le soir venu, au Pony Plaza, une batponey sortit par une fenêtre sur les coups de vingt heures, non sans avoir vérifié qu’aucun poney ailé ne faisait de ronde dans le coin. Un rapide calcul sur la configuration de l’hôtel la fit se poser devant une fenêtre éclairée du troisième étage, qui était restée entrouverte en prévision. Midnight colla sa tête contre la vitre, et vit une chambre composée de deux lits simples avec un pégase blanc à la crinière blonde assis sur l’un d’eux, dos à elle.

Aussi discrètement que possible, elle ouvrit la fenêtre et flotta dans la pièce, avant de se jeter sur le pégase, qui n’eut pas le temps de réagir avant de se faire clouer au sol par la batponey. Elle avait toujours les yeux fermés quand elle parla.

« Salut ! Alors, je t’ai manqué ? » sourit-elle avant de rouvrir les yeux.

« Ravi de te rencontrer, Midnight », dit une voix qui n’était pas celle du pégase avec qui elle devait passer la soirée. La batponey recula d’un coup et tomba les quatre fers en l’air, commençant un peu à paniquer. Pourtant, c’était la bonne chambre, elle en était sûre ! Et si… non… Elle avait tout calculé… Attends, Golden n’avait pas parlé de son ami... ?

« White Spear, c’est ça ? » tenta-t-elle, en se remettant sur ses sabots.

« Tout juste », sourit le pégase. « Je dois l’avouer, tu es bien mieux sans ton armure. Je comprends pourquoi Golden craque pour toi… » ajouta-t-il en faisant un mouvement de sourcils qui fit rougir Midnight. Alors il craquait vraiment pour elle ? Bien sûr, elle s’en doutait, mais le savoir de source proche la remplit d’une joie intérieure qui la fit un peu rougir, bien malgré elle. « Hé, il mentait pas quand il parlait de tes cou- »

« WHITE !! » hurla Golden en déboulant hors de la salle de bains, complètement rouge au niveau des joues comme pour s’assortir à celles de Midnight. « Je t’avais dit de la boucler ! » s’énerva-t-il, mais plus sur le ton de la blague, sans réelle colère derrière. Il se tourna vers la batponey et se calma, souriant de façon éblouissante. « Salut, Midnight, je… je suis content que tu sois là… et… je… »

Midnight vint à sa rescousse et s’avança vers lui, le prenant dans ses sabots pour lui faire un gros câlin. Un peu surpris au début, Golden fit de même et retourna le câlin, fermant momentanément les yeux pour profiter de l’instant aussi longtemps que possible. Elle n’avait pas prévu de faire ce geste au départ, mais le revoir comme cela, hors du travail, lui fit comprendre à quel point il lui avait manqué. « Salut Golden, moi aussi, je suis contente de te revoir », dit-elle doucement.

Si seulement il n’y avait pas eu White Spear, ils auraient pu rester collés ensemble pour un bon moment. « Aww, vous êtes vraiment mignons tous les deux, j’ai presque l’impression de gêner », dit l’étalon en brisant leur instant de bonheur partagé. Midnight relâcha son étreinte et tourna la tête vers White.

« Tu es vraiment comme Golden t’a décrit », lui dit-elle.

« Séduisant, doté d’un charme fou et extrêmement bien bâti ? » blagua-t-il. Midnight jeta un œil complice vers Golden.

« Nan, blagueur à deux balles et un ami extrêmement pénible », rit-elle avant de faire un hoof-bump à Golden, qui se régalait. C’était si rare de voir White recevoir la monnaie de sa pièce.

White riait néanmoins et se calma assez pour répondre, « Golden, celle-là, tu ne la laisses pas filer. » Son ami soupira et s’avança vers lui, avant de passer un sabot autour de son cou.

« Midnight, je te présente mon ‘ami’ White. White, je te présente Midnight », dit-il pour faire les présentations avant de finir par frotter son sabot sur la crinière de son ami. « Comme tu le vois, on est… » il le relâcha, « super-potes. »

Midnight étouffa un rire en posant son sabot sur sa bouche. « Ouais, je vois ça. Bon, on décolle ? On n’a pas toute la soirée », dit-elle en déployant ses majestueuses ailes, ce qui fit siffler White, qui reçut un coup d’épaule de Golden. Le pégase s’avança à hauteur de la batponey, et déploya aussi ses ailes. Tous deux s’avancèrent vers la fenêtre, parés à sortir dans la nuit. Golden ne put s’empêcher de lancer une dernière pique en tournant la tête vers son ami.

« Bonne soirée à t’astiquer l’armure. »

Midnight éclata de rire et Golden rit mesquinement en décollant aux côtés de la batponey, juste à temps pour entendre White s’exclamer : « On avait dit pas de blague devant les juments ! »

Golden et Midnight flottèrent quelques secondes dans le ciel nocturne avant de se poser à l’arrière du bâtiment, car l’entrée principale était surveillée par deux batponeys. Le silence régnait, avec seulement les bruits étouffés de la ville comme son audible.

« Alors, le programme de la soirée ? » demanda Midnight en repliant ses ailes. « J’imagine qu’il va falloir trouver autre chose vu que tout le monde a l’air d’être sur les dents. »

« Ouais. Mais j’ai un plan en tête. C’est toujours un peu risqué, mais moins que si on restait dans le coin », expliqua mystérieusement Golden. La jument leva un sourcil, curieuse d’en entendre plus.

« Et c’est ? »

« Tu verras. Suis-moi et on y sera vite. » Il déploya ses ailes et s’apprêta à décoller quand un bruit plus fort que les autres se fit entendre. Midnight tendit ses oreilles touffues et se retourna rapidement pour voir la porte de service s’entrouvrir derrière eux. Instinctivement, elle prit l’étalon par les sabots et se jeta avec lui dans un buisson à proximité, prenant au dépourvu Golden, qui ne put s’empêcher de lâcher un « Hé ! Qu’est-ce- »

« Shhh !! » le pressa Midnight en posant un sabot sur ses lèvres. Un garde venait d’ouvrir la porte et faisait une ronde à l’arrière de l’hôtel. Ses bruits de sabots se faisaient de plus en plus proches de là où se cachait la batponey et le garde, serrés tout près l’un de l’autre. Golden n’aurait pas dit non à ce que l’instant dure plus longtemps, surtout que son nez était enfoncé dans la crinière de la jument. Mais il retint son souffle et s’empêcha de respirer dedans. Son cœur s’accélérait et il pouvait aussi sentir celui de Midnight faire de même, sa poitrine contre la sienne. Finalement, les pas s’éloignèrent et après un rapide coup d’œil dehors, la batponey se releva.

Golden mit un peu de temps à se relever, encore un peu choqué et troublé. Midnight l’observa quelques secondes. « C’est pas toi qui est censé protéger quel que soit le danger ? » sourit-elle en tendant le sabot pour aider l’étalon à se relever.

« Hein, oh… ouais. Désolé, je l’avais pas vu venir celui-là. Merci, Midnight », bredouilla-t-il en acceptant le sabot. « Bon, décollons tout de suite. Ça vaudra mieux pour nous », ajouta-t-il en déployant ses ailes et en décollant, suivi de près par Midnight. La batponey ne dit pas un mot du voyage, passant simplement un sabot dans sa crinière bleu nuit. Golden la regarda de temps en temps, repensant à cet instant d’intimité partagée dans ce buisson, en espérant que ça ne soit qu’un début.

Les deux traversèrent les faubourgs de Trottingham avant d’arriver vers une petite colline éloignée. Golden fit un signe de tête en direction de Midnight et descendit pour s’y poser, atterrissant en douceur sur l’herbe fraîche. La batponey semblait un peu perplexe, et jeta un œil tout autour d’elle. De l’herbe à perte de vue, et quelques arbres, rien de plus. Les lumières de la ville semblaient lointaines, et seul le bruit de quelques animaux nocturnes venait perturber la tranquillité et le calme du lieu.

« C’est ça ton plan ? Une nuit en forêt ? » demanda Midnight, confuse en retombant sur le pégase.

Golden sourit et posa sa croupe au sol. Il replia ses ailes et s’allongea sur le dos, toujours sous le regard perplexe de la batponey. « Fais comme moi », demanda-t-il calmement.

Midnight resta immobile quelques secondes, avant de hausser les épaules et de faire comme demandé. Elle s’allongea à côté de Golden, et tourna la tête vers lui. « Et ? »

L’étalon tourna aussi sa tête vers elle et dit simplement, « Lève les yeux. »

Lentement, la batponey remit sa tête droite, et ses yeux se tournèrent vers le ciel étoilé. « Quoi ? On passe la soirée à regarder les étoiles ? » se moqua-t-elle. « C’est, genre, super mielleux. Je te l’ai déjà dit que j’étais pas ce genre de jument. »

Golden tourna à nouveau sa tête vers elle. « Je sais, mais c’est pas comme si on avait beaucoup de choix ce soir. Et puis, c’est beau de voir les étoiles, non ? J’adore faire ça quand je peux », expliqua-t-il.

« C’est pas interdit dans le code des gardes royaux d’aimer un truc de Luna ? »

L’étalon amena un sabot sur son menton et posa à son tour une question. « Est-ce que les batponeys ont interdiction de profiter du Soleil ? »

Midnight sembla un peu surprise de l’absurdité de sa question, mais répondit néanmoins. « Ouais, je vois où tu veux en venir. C’est juste que pendant longtemps, c’était Celestia qui alignait la Lune et les étoiles, et pour nous les batponeys, ça nous rappelle ce que nous étions sans notre Princesse », détailla la jument.

« Logique. Mais quand même, tu trouves pas ça beau ? Ça me rappelle quand je faisais ça avec mon père à Fillydelphia. » Une idée lui vint et il tendit le sabot vers une série d’étoiles plus lumineuses que les autres. « Là, regarde, c’est la Grande Ourse. Là-bas, Orion et… Tu sais pourquoi on l’appelle comme ça ? »

Pendant quelques minutes, Golden continua sa leçon en tendant le sabot ici et là, tandis que la batponey buvait littéralement ses paroles. Elle n’avait jamais pensé que des gardes royaux puissent aimer quelque chose qui était si lié à Luna, et elle regarda d’une autre façon les astres lumineux. Ils n’avaient jamais semblé aussi beaux que dans la bouche du pégase.

Quand Golden en eut fini, Midnight ne dit rien pendant quelques instants, ses yeux reflétant les étoiles au-dessus d’elle. Elle finit par tourner la tête vers l’étalon. « Ouais, c’est beau, surtout quand c’est dit comme ça. »

Les oreilles de Golden se dressèrent et lui aussi tourna la tête vers la batponey. « C’est super mielleux ce que tu viens de dire. Je croyais que t’aimais pas ça », sourit-il. Midnight grogna, prise au piège et retourna sa tête vers les étoiles.

« C’est de ta faute, tu m’as eue, maudit garde ! Je savais qu’il ne fallait pas faire confiance à un garde de Celestia ! » dit-elle, joueuse. Golden saisit la perche tendue.

« Ho, j’ai trouvé ton point faible ? Hmmm, attends un peu… » Il fit une brève pause. « Tes yeux sont plus beaux que toutes les étoiles du ciel réunies », commença-t-il en prenant une voix grave et sensuelle.

« Quoi ? Tu te fiches de moi ? » sourit Midnight en tournant sa tête vers lui. Golden ne s’arrêta pas.

« Je volerais jusqu’aux plus hauts cieux d’Equestria si tu me le demandais, j’irais même jusqu’à la Lune ! Je me couperais les deux ailes si c’était la condition pour avoir un seul baiser de toi. Ton corps est encore plus beau que celui d’une Princesse, tes sabots sont plus doux que de la soie de Saddle Arabia… » Midnight ne savait pas si Golden le disait avec une certaine sincérité, mais elle était vraiment flattée et aussi un peu gênée devant tant de compliments. Le jeu avait toutefois assez duré.

« Stop ! Stop ! Hé, si tu veux jouer au romantique, on peut être deux », le coupa-t-elle. Lentement, elle glissa son corps vers celui de Golden, et grimpa au-dessus de lui. L’étalon fit un effort intense pour essayer de rester calme, et parvint à dire :

« Si tu penses me battre sur les compliments, laisse-tomber. Tu n’as aucune chance. »

Midnight ferma à moitié ses yeux, et passa son sabot sur sa poitrine. « Qui a dit qu’on pouvait utiliser que des mots ? »

Sans qu’il puisse réagir, Midnight posa ses lèvres sur celles de Golden, qui poussa un petit cri de surprise qui fut vite étouffé par la bouche de la batponey. Midnight frotta ses douces lèvres sur celles plus rugueuses de l’étalon, qui avait l’impression de rêver. Jamais une jument ne l’avait embrassé avec une telle passion, et son esprit s’éteignit pour se concentrer sur la seule chose devant ses yeux, la ravissante batponey qui connectait sa bouche avec la sienne.

Il se fondit dans le baiser et laissa Midnight mener la danse. La batponey avait amené ses sabots pour les poser de chaque côté de la tête de Golden, le mettant complètement à sa merci. Et il adorait ça. La sensation de ses crocs rendait le tout un peu plus excitant, et Golden se surprit en passant délicatement sa langue dessus. Midnight le sentit et amena la sienne pour la repousser, avant de l’enfoncer dans la bouche de l’étalon, qui n’en demandait pas tant pour un premier baiser avec la jument. Il sentit sa langue passer sur ses dents avant de retourner à la danse que toutes deux menaient. Golden avait depuis longtemps fermé les yeux et avait levé ses sabots pour caresser le dos et la crinière de la batponey, qui avait déplié ses ailes, tout comme l’étalon qui les faisait s’entremêler.

Leur baiser dura encore quelques secondes jusqu’à ce qu’ils se rappellent que l’air était nécessaire pour survivre à cet instant, aussi magique soit-il. Midnight recula la première, laissant un mince filet de salive connecter leurs lèvres comme restes de cet instant. Golden rouvrit les yeux, et inspira d’un coup une grande bouffée d’air frais. En se léchant les lèvres, il pouvait encore sentir le goût de celles de Midnight. La batponey était restée au-dessus de lui, et souriait malicieusement.

« Alors, j’ai gagné ? », haleta-t-elle en s’allongeant sur sa poitrine. Toujours sous le choc, Golden ne dit rien pendant quelques secondes et leva doucement un de ses sabots pour le laisser reposer sur le dos de Midnight. Enfin, il répondit.

« Ou… ouais… » souffla-t-il, toujours en quête de sa respiration. « C’est… C’était… whouah… T’es incroyable… »

« Ouais, je sais. On me le dit souvent. Dingue, aussi. Folle, dangereuse, inconsciente… Tu crois que tu pourras supporter ça ? » demanda-t-elle en amenant son propre sabot vers la crinière blonde de Golden.

« Je veux bien tenter le coup », répondit l’étalon. Pendant quelques instants, ils restèrent là, allongés dans l’herbe, à se regarder dans les yeux tout en passant un sabot dans la crinière de l’autre, à simplement profiter de l’instant. Jamais Golden ne s’était senti aussi bien de toute sa vie, et même le caillou qui lui transperçait le dos ne pouvait pas briser la joie qui coulait abondamment dans ses veines.

L’étalon fut pourtant le premier à faire cesser le silence. « Midnight, est-ce que toi et moi on est… ? »

« En couple ? » finit-elle pour lui. « Je sais pas. Tu me plais, on est sortis ensemble, on s’est embrassés, on est l’un sur l’autre… Mmm… » Elle amena ses sabots pour les poser sur son menton. « Est-ce que je te plais ? »

« Oui », répondit instantanément Golden.

« Alors, ouais, on est ensemble », déclara-t-elle. « Hou, ça rend le tout encore plus risqué et… encore plus excitant », finit-elle d’une voix sensuelle. Golden sourit et ferma momentanément ses yeux, avant de les rouvrir d’un coup.

« Attends, je veux qu’on le fasse dans les formes. Après tout, on est des soldats, faut se plier aux règles », expliqua-t-il, encouragé par l’instant de bonheur qu’il vivait et l’excitation ressentie, de celle qui lui faisait se sentir invincible. Midnight leva un sourcil et le pégase se releva lentement pour mettre sa croupe au sol. La batponey recula et laissa l’étalon lui prendre le sabot dans les siens.

« Golden, si tu fais ce que je crois que t’es en train de faire… »

« Midnight, veux-tu être ma petite amie ? »

« … Tu ferais mieux de pas le faire… » finit en riant Midnight. Golden la fixa pendant de longues secondes avant qu’elle ne soupire et amène son autre sabot dans les siens. « Ouais, Golden. T’as gagné. Je veux être ta petite amie », déclara-t-elle solennellement en levant les yeux au ciel. « Et là, j’suis censée t’embrasser, c’est ça ? »

Golden hocha la tête. « Je sais que t’aimes pas les trucs romantiques, mais ouais, ça serait pas mal pour le coup. » Midnight s’avança vers lui et passa un sabot dans sa nuque pour qu’il se penche vers elle. Elle lui murmura :

« Je crois que je pourrais apprendre à aimer ça avec toi. » Et elle l’embrassa, plus tendrement qu’avant, avant de le relâcher au bout de quelques secondes quand une interrogation s’invita dans son esprit. « Golden, tu sais qu’on pourra pas faire ça tous les jours quand on reviendra à Canterlot, hein ? »

« Je sais, alors je rendrai chaque seconde mémorable quand on se reverra », promit-il avant de l’embrasser à nouveau. « Mais fais gaffe, je serai super romantique parfois », l’avertit-elle après l’avoir relâché. Midnight posa à son tour ses lèvres sur les siennes.

« Je sais, et je veux bien l’être aussi », dit-elle avant de reculer. « Et je ne veux l’être avec personne d’autre que toi. Et répète surtout pas ça à quelqu’un. C’est que entre toi et moi », sourit-elle avant de caresser la joue de l’étalon avec son museau, en passant ses sabots autour de son cou. Golden sourit aussi et fit de même. Sans hésiter, Midnight lui murmura à l’oreille.

« Je t’aime, Golden. »

L’étalon sentit son cœur s’accélérer un peu et se réchauffer encore plus en l’entendant prononcer ses mots. « Wouah, ça fait à peine cinq minutes qu’on s’est embrassés et je t’ai déjà contaminé avec mon côté fleur bleue. Ouch ! » s’écria-t-il après que la batponey lui ait légèrement mordillé l’oreille. Il rit légèrement. « Je t’aime aussi, Midnight. »

« Même si je suis une batponey, ton ennemie mortelle ? »

« Ouais. Même si ça veut dire que les ennuis ne font que commencer. » Il recula, soudain l’air grave et tint fermement la batponey de chaque côté. « Midnight, il faudra faire attention quand on se reverra. Tu comprends ? Je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose à cause de moi », expliqua-t-il.

Midnight ne perdit pas son calme et sourit. « T’inquiète, je ferai gaffe. J’espère que… on se reverra vite hors de la relève. Promis, on trouvera une solution. » Elle lui refit un câlin et l’inquiétude que pouvait éprouver Golden fondit dans son étreinte. Il en profita pour enfin renifler sa crinière. De la lavande. Son nouveau parfum préféré.

Pour ne pas trop éveiller les soupçons, ils décidèrent de rentrer à l’hôtel à peu près deux heures après leur départ. Le vol se fit en silence, comme à l’aller, si ce n’est qu’ils étaient un peu plus proches l’un de l’autre et qu’ils n’essayaient plus de ne pas se faire voir de l’autre quand ils se regardaient. Typiquement le genre de clichés dont se serait moqué Midnight auparavant. Mais pas ce soir.

Arrivés devant la fenêtre de la chambre de Golden, Midnight resta dehors à flotter, tandis que Golden posait les sabots au sol. Il se retourna une dernière fois vers la batponey. « Je ne travaille pas samedi prochain. Si tu es libre, tu peux passer dans la chambre où je vis avec White à l’école des gardes. C’est pas dur, c’est celle avec un drapeau de Fillydelphia sur la fenêtre. Euh, enfin, c’est pas comme si je te demandais de passer la nuit avec moi et… je… » bégaya l’étalon en triturant inconfortablement ses sabots.

Midnight posa un sabot sur sa bouche. « C’est bon, j’ai pigé, je sais que c’est Canterlot et… ouais. C’est noté, je m’arrangerai pour venir après la relève. Et je ferai attention en venant. » Elle retira son sabot et se pencha pour embrasser tendrement Golden, avec une douceur qui sonnait comme un avant-goût en vue de leur prochaine rencontre. « À samedi, Golden. » Elle s’éloigna lentement de la fenêtre, en entendant l’étalon lui murmurer :

« À samedi, Midnight. Prends soin de toi. » Il la regarda s’en aller et disparaître dans la nuit. Il poussa un long soupir et s’avança vers la salle de bains, un peu surpris de ne pas encore voir son ami White. À peine avait-il fait quelques pas qu’il sentit un sabot lui tapoter l’épaule. Il leva les yeux au ciel et se retourna lentement.

« White, si tu nous espionnais, je te jure que… » Il s’arrêta en constatant que c’était encore Midnight. « Oh, tu as oublié quelque chose ? » demanda-t-il.

La batponey hocha la tête. « Ouais. Ça. » Elle descendit au sol et l’embrassa à nouveau, en faisant durer un peu plus longtemps le baiser, passant leurs sabots autour de ceux de l’autre pour renforcer l’intensité de l’étreinte. Tous deux fermèrent les yeux et les rouvrirent dès que Midnight rompit le baiser. « Je t’aime, Golden. À plus. » Elle s’éloigna en brossant sa queue sous le menton de l’étalon, envoyant des picotements dans tout son corps. Elle déploya ses ailes et passa par la fenêtre, en direction de sa propre chambre, et disparut pour de vrai dans la nuit.

« À plus, Midnight. Je t’aime. » La pièce était depuis longtemps vide quand il murmura ces mots à voix basse, et avec un grand sourire sur les lèvres. Après de longues secondes passées à la fenêtre, il regarda les étoiles, les remerciant silencieusement pour l’aide apportée ce soir-là. Il garda le même visage souriant jusqu’à son lit, où il s’effondra, en fermant les yeux. La soirée avait été plus que satisfaisante, et sans accroc.

« Alors, ça s’est bien passé ? » Une voix le sortit de sa rêverie. Il vit une masse blanche bouger à côté de lui sous les draps.

« White ? » Il tira la couverture et découvrit l’étalon caché dans le lit. « T’es quand même pas resté caché là tout le temps ? » demanda-t-il, incrédule.

Son ami tourna les yeux de gauche à droite, avant de répondre. « Noooooooon. » Golden fronça les yeux. « Peut-être ? »

« Raaaah, t’es impossible ! » grogna-t-il. Il ramena la couverture sur White et l’enferma dedans, avant de se jeter sur lui, d’humeur joueuse. « Ça se fait pas d’espionner comme ça ! »

« Hé, c’est aussi ma chambre, alors l’espionnage, tu oublies », se défendit-il. Il inspira longuement et demanda : « Bon, vu ce que j’ai entendu, ça s’est bien passé, non ? »

Golden reposa sa tête sur le lit et fixa le plafond. « Ouais, complètement. On a regardé les étoiles, on a ri et… on s’est embrassés », expliqua-t-il, l’air un peu timide.

« Oh ? » fit semblant de s’étonner White. « Donc vous êtes ensemble maintenant ? » demanda-t-il même si la réponse était évidente.

« Hmm hmmm », fredonna l’étalon. « On a promis de se revoir samedi dans notre chambre à l’école, alors… euh… » Il cherchait les mots.

« C’est bon, j’ai pigé », le coupa White. « J’irai ‘m’astiquer l’armure’ ailleurs. » Ils rirent tous les deux et White se dégagea de sa prison de coton. Il se tortilla un peu et secoua la tête avant de s’asseoir sur le lit, juste à côté de Golden. « Sérieux, mec, je suis fier de toi. Mon petit poulain a tellement grandi ! » s’exclama-t-il en le prenant dans les sabots.

« Arrête, on dirait ma mère… » soupira Golden, avant de retourner le câlin, laissant le silence pendre dans la pièce pendant quelques instants. « Tu sais, les sabots de Midnight sont plus doux que les tiens… »

« Shh… On est bien là, viens pas tout gâcher… »

« Et sa crinière sent meilleur. »

« Chut… »

« Et son haleine ne put pas le foin frit… »

« Tu vas te taire un peu ? »

« Et sa voix est plus… MMMMMM ! »

White avait posé son sabot sur la bouche de Golden. Il soupira. « Je crois que j’ai pas fini d’entendre parler d’elle. »

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Quelques étages plus haut, un batponey finissait de ranger des documents officiels, quand un coup se fit entendre à la porte de sa chambre.

« Entrez », dit-il de sa voix grave.

La porte s’ouvrit et un garde entra, saluant avant de déclamer son identité : « Soldat Evening Glow, capitaine ! » Moon Dancer leva un sourcil devant ce visiteur inattendu.

« Que faites-vous ici, soldat Glow ? J’ai pourtant précisé de ne me déranger qu’en cas d’urgence ! » tonna-t-il. « J’espère que c’est le cas, ou sinon je vous botterai le flanc jusqu’à Canterlot ! »

Evening Glow sourit de façon machiavélique, montrant ses crocs brillants avant de parler. « Je crois que vous ne serez pas déçu, capitaine… »