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Un trou boueux

Une fiction traduite par inglobwetrust.

Un peu d'aide

Applejack, de tous les poneys dans cette petite communauté soudée de Poneyville, aimait aider ses amies. Oui, en effet, c’était de ça dont il était question. N’y avait-il pas eu une fois où Madame le Maire avait organisé une énorme cérémonie de merci-pour-avoir-sauvé-la-ville-AJ où ses amies avaient dit l’une après l’autre à quel point elle était d’une grande aide ? Ouaip m’sieur, c’était ça ! Alors, aucune surprise à la retrouver là, en train d’aider une amie, pas vrai ? Parce qu’Applejack était le genre de poneys qui était toujours très heureux d-

C’était trop. Applejack éclata de rire.

« Applejack », dit la voix guindée du poney en face d’elle. « Tu permets ? Il n’y a rien de drôle. »

À grande peine, Applejack parvint à garder son rire sous contrôle, mais, au nom d’Equestria, il était impossible pour elle d’arrêter de sourire d’un air narquois. Pas face à ça ! Ouaip, on allait se rappeler longtemps de cette Olympiade des Sœurs Poney.

« Va droit au but, Rarity, ne fais pas attention à moi. »

Donc, apparemment, Rarity et Sweetie avaient eu une petite dispute hier, et maintenant, Sweetie ne parlait plus à sa sœur. Du très bon « Applejack, dis à ma non-sœur que… » business.

Pendant qu’Applejack estimait que Sweetie finirait par ne plus y penser, Rarity semblait très sérieuse à l’idée de faire amende honorable- ce qui était assez admirable de sa part, selon Applejack- alors, Applejack, toujours prête à aider, était restée debout tard hier soir à planifier les détails du plan pour que Rarity se rachète auprès de Sweetie. Elles avaient un assez bon plan, comme elle le disait elle-même, et elle était sûre que cela rapprocherait Rarity et Sweetie en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, mais, et c’était là le problème, d’une certaine façon, cela impliquait que Rarity saute dans un gros tas de boue.

Au départ, cela était parti comme une blague. Vous voyez, hier soir, après que les pouliches soient allées se coucher, et que les conseils d’Applejack pour ‘être une bonne sœur’ commençaient à s’assécher en nombre, Rarity avait eu une soudaine prise de conscience. Une prise de conscience vraiment dramatique, Rarity faisant sa Rarity. Après tout, elle irait courir avec sa sœur dans la course de demain. Le problème était que Sweetie ne parlait même pas à Rarity, comment cela pourrait-il arriver ?

Cela les avait découragées pendant un moment jusqu’à ce qu’Applejack dise négligemment que les poneys qui tombaient dans le trou en ressortaient méconnaissables à cause de la boue, alors, peut-être qu’elle pourrait essayer ça ? Au lieu d’un non immédiat, ou peut-être même un signe de colère d’une Rarity qui avait été trop maussade durant cette soirée pour s’amuser, elle avait eu un hésitant : « tu penses… tu penses que ça pourrait marcher ? »

Applejack ne s’attendait pas à ça.

Pour faire court, la prude licorne se tenait maintenant devant de la boue puante, amenée ici par sa propre bêtise.

Rarity tendit un sabot, le laissant flotter au-dessus de la surface pendant un moment avant de le rétracter comme si le trou était rempli de serpents. Elle était toujours bien distinguée, la crinière bouclée et stylée, et ses poudres mystérieuses bien appliquées.

Eh bien…

Euh…

Mince. Fond de teint, poudre blush. Des mèches, avec du mascara pour les cils, et du brillant pour son pelage. Du fard à paupières et de l’eyeliner aussi.

Applejack se sentait toujours un peu gênée de connaître ces mots.

« Oh, avant que j’oublie, je t’ai dégote un tuba », ajouta Applejack, avec un sourire innocent.

« Excuse-moi, un tuba ? »

« Ben à moins que t’aie prévu un truc de magie d’licorne pour t’aider à respirer… » Applejack tendit le sabot en arrière et sortit un tout nouveau tuba d’un de ses sacs de selle avec ses dents. Il était rose et vert citron et bleu brillant, de la taille de Rarity. C’est pour ça qu’Applejack l’avait choisi, parce qu’il avait l’air de sa taille, sans doute pas à cause des couleurs saccadées. Elle le remua pour lui faire montrer. « … ou t’auras bechoin de cha. »

Avec un mouvement du cou, Applejack lança le tuba vers Rarity, qui l’attrapa avec sa magie. Puis il flotta au niveau de son visage.

« C’est… si profond ? »

« Sucre d’orge, tu vas devoir t’allonger et enfoncer ta tête en-dessous si tu veux que ça marche », répliqua Applejack.

« Tu veux que je mette ma tête en-dessous de cette chose !! » s’exclama Rarity, les yeux écarquillés. « Comme, en-dessous ? »

Applejack fixa le trou, puis Rarity. « Ben, je crois bien que tu vas devoir le faire. Au cas où t’aurais pas remarqué, sucre d’orge, j’suis orange. J’pense que l’jeu en vaudra pas la chandelle si ma tête se transforme d’un coup en blanc », expliqua Applejack, ajoutant : « Pense à toutes les pièces que tu vas économiser sur tes bains de boues au spa. »

Masque facial, l’idée lui remplit la tête. Elle lui dit de se taire. Des fois, être volontairement ignorant sur certains sujets était un dur labeur.

« Oui, bien sûr », dit Rarity, qui étira à nouveau son sabot, tapotant timidement sa surface. Applejack soupira. La licorne était vraiment de mauvaise humeur aujourd’hui. Applejack avait eu l’espoir de provoquer une sorte de querelle, ou une dispute, ou quelque chose.

« Bon, tu ferais mieux de te- »

« Oui, oui, donne-moi une minute », l’interrompit Rarity. « J’ai besoin d’un moment pour me préparer… mentalement. »

Se préparer mentalement ? Au nom de quoi avait-elle besoin de se préparer mentalement pour ça ? Bon, Rarity était vraiment étrange par moments, et c’était la vérité.

Applejack s’écarta pour laisser de l’espace à la licorne, mais tout ce qu’elle faisait, c’était fixer la boue. Quand elle finit par se pencher en avant, le sourire d’Applejack grandit en se préparant à profiter de l’instant, mais la licorne se déroba à nouveau. Son sourire se dissipa et Applejack poussa un soupir exaspéré.

« Ecoute, Rares, on n’a pas beaucoup de temps. Granny va bientôt lancer la course et j’ai besoin d’aller voir nos sœurs avant que je manque à l’appel. »

Juste parce que Sweetie et Bloom formaient seulement les deux tiers des Chercheuses de Talent, ne voulait pas dire qu’Applejack voulait les laisser seules et sans surveillance trop longtemps. Les Chercheuses s’étaient assez bien comportées récemment – pour Applejack, cela signifiait qu’un désastre était imminent, aussi sûr que deux et deux font quatre, et quand il arriverait, elle ne voulait pas que cela arrive près de sa ferme, pour changer.

Rarity continuait son concours de fixation avec la boue, reconnaissant Applejack avec un seul hochement de tête. Sa poitrine se levait et s’affaissait durant ses quelques profondes inspirations. Applejack serra les dents. Elle aurait vraiment dû voir ça arriver.

Mais pourquoi la licorne ne sautait pas dans la boue juste comme elle avait dit qu’elle le ferait ? Ce n’était pas difficile. Applejack pouvait comprendre l’envie habituelle de Rarity d’éviter la saleté. Vu tous les cosmétiques qu’elle portait, Applejack pouvait comprendre qu’un poney ne voulait pas gâcher tout le travail effectué, mais elle savait ce qu’elle allait faire aujourd’hui. Bien sûr, tout ce maquillage et coiffage avait bien dû lui prendre au moins une heure, mais c’était de sa propre faute pour l’avoir fait en sa propre conscience. Pourquoi s’était-elle dérangée à le faire ?

Devenant impatiente, Applejack recula d’un pas. « La boue ne va pas te faire mal, Rarity. Regarde. »

Avec son meilleur ‘yeehaa’, elle passa devant Rarity en galopant à toute vitesse pour atterrir en plein milieu du trou boueux. Elle était épaisse et gluante, juste le bon dosage d’eau et de saleté, et lui arriva jusqu’à la taille.

Rarity poussa un gémissement aigu, faisant un bond en arrière pour éviter les quelques gouttelettes qui se dirigèrent vers elle. Elle inspecta rapidement ses flancs, pour chercher toute trace de saleté, songea Applejack.

« Applejack ! Tu as presque- »

« Bon sang, Rarity, tu y vas dedans de toute façon ! »

« Je- » Rarity s’évanouit pendant un instant. « Ce que je veux dire, c’est que même si je vais me… salir dans un moment, ce n’est pas très gentil d’éclabousser de la boue vers un autre poney. »

Soupirant, Applejack sortit du trou. La licorne recula de quelques pas quand elle le fit. « Tu vois Rarity ? Je vais bien. Ça fait pas mal du tout. »

« Je peux voir ça, Applejack », répliqua Rarity sur un ton irrité, choisissant ses verbes. « Je sais que la boue ne fait pas de mal aux poneys. Je ne suis pas une idiote. »

« Alors c’est quoi le problème ? »

« C’est juste… Je… » Le visage de Rarity se tortilla et son expression semblait…. Peinée ? « Je… »

« Allez, Rarity, c’est juste un peu de boue. Moi et Big Mac, on est tous le temps boueux. » Des images de Chercheuses sans surveillance parvenant à mettre en feu l’une de ses granges lui remplirent la tête. Elle était impatiente de revenir. « Bien sûr que ta crinière va être décoiffée, mais c’est pas si important. »

« Je… » Rarity se mordait la lèvre avec force, avant de tourner la tête et de pousser un grognement qui sonnait comme celui de quelqu’un qu’on étranglait. Avant qu’Applejack puisse réagir, elle se retourna, et, tête baissée, recula au grand galop.

Applejack ferma ses yeux et enfonça son visage dans son sabot. Pourquoi est-ce que ce poney avait besoin de rendre tout si compliqué ?

Après quelques profondes respirations, elle rouvrit ses yeux et fut accueilli par la vue de la boue. Elle leva les yeux. Le soleil était haut dans le ciel, les gradins étaient presque installés, et des bannières colorées étaient accrochées tout autour. Déjà, des petits groupes de poneys vagabondaient autour de la piste. De l’autre côté, Mac était occupé à installer la scène. Il agita le sabot quand il la vit, alors Applejack fit de même. Ni Apple Bloom, ni Sweetie n’étaient visibles dans le coin.

Elle baissa les yeux vers la boue. C’était, comme elle l’avait observé, un mélange parfait de saleté et d’eau. Il faut vraiment travailler dur pour qu’elle soit bien, pas si fine pour que ça ne soit pas seulement de l’eau brune, pas si épaisse pour qu’un poney ne se noie pas dedans et soiT proprement recouvert. Quelqu’un tombait dedans chaque année, et regarder quiconque en sortait, le pelage complètement couvert de boue, faisait partie du fun de cette journée. Des sourires partout.

Cela sentait un peu, maintenant qu’elle y pensait. Le ruissellement des champs avait sans doute dû s’y mélanger à un moment, mais cela ne la rendait pas dangereuse. Applejack s’avança, tendit le sabot et toucha la surface. Il y avait quelques plaques de gazon qui avaient réussi à rester ensemble, et il y avait encore certaines des feuilles en décomposition de l’an dernier à la surface. En fait, peut-être même qu’ils auraient encore dû mélanger une fois ou deux, parce qu’il restait encore quelques grumeaux, pour dire la vérité.

Applejack soupira. « Bien sûr que c’est pas plaisant », se dit-elle, « mais ça se lave. »

Secouant sa tête, elle se retourna et remarqua, à sa grande surprise, que Rarity n’était pas allé bien loin. Vers Josh et Marcel, une paire de pommiers à proximité.

Contre son avis, Applejack décida de retenter sa chance. Elle trotta là où se trouvait Rarity, assise dans l’ombre de Marcel, penchée face au tronc. Son choix de compagnie était vraiment approprié. Applejack avait toujours pensé que Marcel était le genre d’arbre qui aimait prendre de grands airs.

« Écoute, euh, sucre d’orge… », commença-t-elle.

Rarity tourna la tête. « Oh. Bonjour Applejack. »

Un moment passa, durant lequel Rarity se mit sur ses sabots. En le faisant, elle redressa sa queue avec une ruade de ses pattes tout en ajustant en même temps sa crinière. Elle ne semblait pas remarquer ce qu’elle faisait.

« Rarity… »

Quoi qu’Applejack s’apprêtait à dire resta silencieux. Rarity était quelqu’un d’expressif, et son visage comportait des centaines d’expressions. Mais maintenant, Applejack voyait l’une de celles qui était la plus rare sur le visage de Rarity. La sincérité.

« Je ne pense pas que je puisse le faire », fut tout ce qu’elle dit. Sa voix était douce, calme, et pas vraiment comme Rarity. Même sa diction très distinguée était portée disparue.

« Qu’est-ce que tu veux dire, tu ne peux pas le faire ? »

« Juste ça », dit Rarity. » Je ne pense pas que je puisse le faire, Applejack. »

« Écoute, Rarity, je sais que c’est pas facile pour toi », dit Applejack, luttant pour venir avec un laïus d’encouragement. Elle s’avança pour poser un sabot réconfortant sur l’épaule de Rarity, mais y renonça. Ce n’était sans doute pas une bonne idée, vu qu’il était couvert de boue et tout. « Je sais que tu fais beaucoup d’efforts pour être au top, mais Sweetie appréciera vraiment ça. Alors, fais-le pour elle. Qu’est-ce que t’en dis ? » Elle mit son sourire le plus encourageant sur son visage.

Le résultat n’était pas celui qu’espérait Applejack. Rarity semblait même encore plus abattue. « Je sais que c’est pour Sweetie. La seule raison pour laquelle je veux le faire, c’est pour Sweetie. C’est juste que quand j’essaie d’y aller et de m’élancer, je ne peux pas. »

Applejack resta silencieuse. Elle voulait répondre, dire à Rarity que la boue ne serait pas un problème si elle cessait d’être si guindée pendant juste une seconde, mais quelque chose lui dit de l’écouter.

« Tu dois sûrement t’inquiéter pour ton maquillage, pas vrai ? »

« Eh bien, je ne voulais pas en parler, mais… »

Rarity détourna les yeux. « C’est juste que… ça ne me semble pas bien de sortir sans quelque chose », dit-elle. « Je me sens mal toute la journée si je ne le fais pas.

« Je ne sais pas comment tu fais », elle fit signe du sabot vers les flancs boueux d’Applejack. « Quand je regarde ce trou, tout ce que je vois, c’est la boue s’accrochant à mon pelage, grimpant jusque dans les cheveux, puis ma peau et… » Rarity grimaça, « … et ça me recouvre complètement. Et je sais qu’avec assez de lavage, ça partira, mais… » Elle chancela. « Je veux retrouver ma sœur, et tout ce que j’ai à faire, c’est être un peu sale, c’est tout, et je pensais que je pouvais le faire, mais en fait je ne peux vraiment pas, et qu’est-ce que ça dit sur moi ? »

Applejack s’éclaircit la gorge en essayant de penser à quelque chose à dire. Ses sabots et pattes semblaient très intéressants pour le moment. Elle remarqua qu’elle devrait sans doute les arroser avant d’aller chercher Bloom et Sweetie.

De l’autre côté de la piste, Granny Smith clopinait vers là où Mac avait installé la petite scène. Applejack la regarda grimper dans son rocking-chair.

C’était idiot. Rarity faisait juste sa Rarity et si elle écoutait la voix de la raison pendant un simple fichu moment, elle verrait qu’elle faisait une montagne de rien du tout et-

Applejack se rappela d’un temps pas si lointain, s’excusant de ne pas avoir pris au sérieux les peurs d’un autre poney aux yeux vieux et connaisseurs. Ils avaient été déçus, mais été aussi compréhensifs. Ils lui faisaient vouloir essayer un peu plus fort, être un meilleur poney. Elle avait écrit sa première lettre pleine de bonne foi à la princesse à l’époque, et qu’est-ce qu’elle avait dit ?

« Tu ne peux pas aller dans la boue », dit Applejack. Ce n’était pas une question.

« Je ne peux pas aller dans la boue », répéta Rarity. « Je ne peux pas. »

« Rarity, je sais que j’te dois des excuses, je savais pas que la boue était si, si… » Applejack cherchait le bon mot. Mal ? Terrifiant ? La terrifiante saleté ? Elle ne comprenait toujours pas, mais ça ne rendait pas la chose fausse non plus.

« Oh, non, non, non », répondit Rarity. « C’est moi l’idiote ici. »

Applejack faillit rire. Les deux étaient flancs contre flancs, faisant toutes les deux de leur mieux pour ne pas se regarder l’une l’autre. Ce genre de conversation était déjà assez étrange pour elles.

« Écoute, Rarity, tu n’as pas à faire ça, tu sais », dit Applejack. « Bien sûr que Sweetie est plutôt en colère contre toi maintenant, mais elle finira par te pardonner. C’est ce que font les sœurs. Tu verras. Dis-juste que t’es désolée quand elle le fera, et la prochaine fois, essaie de ne pas faire les mêmes erreurs. Pas besoin de te forcer à faire tout ça. »

Applejack arrêta de regarder l’herbe, et regarda en coin pour voir comment elle le prenait.

« Non, Applejack, ce n’est pas acceptable. » La voix de Rarity était cassée. « Ce n’est pas acceptable que… qu’être un peu boueuse est plus important que ma propre sœur. Je ne le veux pas. »

« Écoute, il y a sans doute d’autres façons de- » commença Applejack, mais elle fut stoppée.

« Non, j’ai dit que je ne le veux pas. » Rarity fixa intensément Applejack. « Je veux que tu me rendes un service. » Rarity tourna le dos. Elle se redressa, levant la tête bien haute et fermant les yeux. « Jette-moi dans le trou. »

« Rares ? »

« Je veux. Que. Tu. Me. Jettes dans le trou », répéta Rarity, les yeux toujours fermés. « Tu es plus forte que moi. Je veux que tu me prennes. Et peu importe ce que je dis ou ce que je fais. Je veux. Que. Tu. Me. Jette. Dans le trou. »

Applejack regarda Rarity, puis le trou, puis à nouveau Rarity. En le faisant, son imagination pensa à cette crasse brune et visqueuse qui s’enroulait autour d’elle, remontant jusqu’à ses cheveux jusqu’à ce qu’elle ait l’impression de suffoquer. Ces feuilles pourries de l’an dernier restaient collées dans sa crinière, et la puanteur des champs remontait dans ses narines.

« Rarity, je vais pas te jeter là-dedans si c’est pour te faire mal. »

« La boue ne va pas me faire mal, tu l’as dit toi-même- »

« Rares ! »

« Applejack, nous sommes amies depuis longtemps. Je veux que tu fasses ça pour moi. J’ai besoin que tu sois courageuse pour moi, parce que je ne suis pas assez courageuse. Fais… » Les yeux toujours fermés de Rarity se froncèrent. « Fais-le. »

Applejack fixa la forme rigide que constituait l’autre jument, silencieuse pendant un moment.

« Bon, d’accord. » Applejack se lécha les lèvres. « J’vais l’faire. »

Prête mentalement, elle baissa la tête et chargea, prête à harponner sa nuque sous la taille de son amie. Un petit cri aigu s’échappa de l’autre poney en étant jeté au-dessus du dos d’Applejack.

Les secondes suivantes passèrent dans un flou constitué de membres s’agitant et de mouvements alors qu’Applejack titubait vers le trou aussi vite qu’elle le pouvait. Rarity n’essaya pas vraiment de s’échapper, mais elle lutta tout de même d’une façon paniquée et peu coordonnée. A la surprise d’Applejack, elle n’utilisa pas de magie ou ne dit rien, mais Applejack fut frappée deux fois, assez fortement pour laisser des marques.

Elles arrivèrent ensemble à la piscine, et avec un mouvement, Applejack jeta l’autre poney. Il y eut un gros splash suivit par quelques gémissements de fausset qui firent grimacer Applejack. Elle ne pouvait pas regarder. Elle enleva son chapeau et se cacha derrière.

Après une seconde ou deux, les bruits d’éclaboussures et les gémissements cessèrent. Prudemment, Applejack regarda par-dessus son chapeau. Au milieu de cette piscine improvisée se trouvait une vague forme de poney sous un monticule de boue brune. En un clin d’œil, deux grands yeux bleus se firent voir. Un sabot tremblant se leva au-dessus de la surface pour inspecter.

« Ça… ça va, Rarity ? » demanda Applejack, toujours cachée derrière son chapeau. Elle remarqua qu’elle se mordait la lèvre.

« Eh bien, oui, Applejack », la réponse vint après un moment. « Je crois que oui. Après tout, c’est juste un peu de boue. » La jument d’habitude immaculée rit avec hésitation. « En fait, maintenant que je suis là, ça n’a pas l’air si horrible que ça. »

« T’es sûre ? » lui redemanda-t-elle.

« Oui, Applejack », répondit-elle. « Je vais bien. »

« Heureuse de l’entendre », dit Applejack, se sentant un peu plus soulagée. Elle connaissait assez bien son amie pour savoir que si elle était à nouveau têtue comme une mule, elle devait sans doute avoir raison, et cela suffirait pour le moment. « T’as l’air bien, part’naire. »

« Ris si tu veux, mais avec un peu d’effort, je devrai trouver un moyen d’enlever ça », répliqua Rarity. « Toi, en revanche, tu as l’air d’une meule de foin, comme toujours. »

Applejack éclata de rire, mais dans sa tête, ajouta : ouaip, têtue comme une mule. Elle ira bien.

Les flancs et la croupe maculés de boue de Rarity apparurent quand elle se mit à quatre pattes. Elle secoua sa tête. « Eh bien, j’imagine que je dois juste attendre ici jusqu’à ce que ça commence. »

Applejack chercha à nouveau dans son sac de selle pour sortir le second objet dont aurait besoin son amie. « Tiens, t’auras bechoin de cha », dit-il, jetant un vieux et bosselé Stetson en direction de Rarity. Il tomba sur la corne de Rarity, atterrissant parfaitement sur la tête de son amie.

Les yeux bleus clignèrent malgré l’épaisseur de boue. « Applejack, tu en as donc plus qu’un ? »

« Ne te mets pas à le crier sur les toits, t’entends ? » grogna Applejack. « J’ai une réputation à conserver. Bon, voilà le- »

« Oh non », la coupa Rarity, regardant le tuba. « Juste parce que je suis assise là, couverte de saleté, portant un Stetson, ne veut pas dire que je n’ai pas de normes. Il y a des lignes que je ne franchirai pas. »

« Sucre- »

« Hum, hum, hum. » Les yeux disparurent à nouveau, quand un sabot se leva. D’une certaine façon, la pile de boue en forme de poney parvenait à tenir son nez en l’air. « N’oublie pas, Applejack, que je suis une licorne. Fais ton boulot et ne t’inquiète pas pour moi de ne pas être vue. »

Une lueur teintée de bleu apparut près du front de Rarity, visible malgré que sa corne soit cachée par le chapeau.

« Oh, et, Applejack », dit Rarity, s’arrêtant au milieu de son sort. « Pas un mot de tout ça à Sweetie ou aux autres. Compris ? »

La lueur brillait de plus en plus, faisant cligner les yeux d’Applejack. Quand elle fut enfin capable de voir, tout ce qui restait était le tas de boue. Les touffes de gazon sur la boue semblaient complètement paisibles. Elle leva un sourcil.

Bon, il valait mieux laisser les trucs de licorne aux licornes. Rarity serait quelque part là-dedans et il valait mieux ne pas trop songer à où exactement.

« Je t’ai entendue, Rares », dit Applejack. « T’inquiète pas, mes lèvres sont cousues. »

Avec un rire, Applejack partit au petit trot vers la ferme pour s’arroser.

Ouaip, aider ses amies. C’était essentiellement ce qu’elle faisait.

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