Trixie grogna et étira ses pattes en se réveillant. Ses jambes étaient comme remplies de plomb. Ses yeux s’ouvrirent pour révéler un plafond familier. C’était le milieu de la nuit, la Lune à moitié pleine lui offrant assez de lumière pour être vue. Trixie se demanda si elle pouvait passer une semaine sans s’évanouir. Elle leva les yeux vers son front, et se concentra un moment. Une lumière bleu pâle émana de sa corne.
« Ha ha ! » cria-t-elle d’excitation. Un murmure attira son attention. Elle regarda dans la pièce et trouva Fluttershy assise sur son tabouret, comme il y a une semaine. Trixie sourit. Elle regarda Fluttershy un moment, avant qu’une partie d’elle ne lui rappelle la situation. Son sourire s’éteignit. Elle se força à sortir du lit, de l’autre côté de Fluttershy.
« J’ai assez profité de toi », murmura Trixie. Sa corne continua à briller en enveloppant Fluttershy de son aura magique. Elle leva gentiment Fluttershy de son siège et la mit sous les couvertures. Elle la glissa dans le lit, et la borda.
« Désolée, Fluttershy. Je ne peux pas te garder avec moi. » Elle fit une pause, et se pencha instinctivement au-dessus du lit. Elle embrassa Fluttershy sur le front, pendant un long moment. La pégase marmonna dans son sommeil et sourit. Trixie recula, marcha autour du lit et prit la porte.
Elle lança un sort lumineux pour voir en descendant les escaliers. Elle était presque à la porte lorsqu’elle vit une silhouette bien trop familière à la fenêtre. Angel bondit et se mit devant elle et la porte.
« Tu sais où je vais, hein ? » demanda Trixie. « C’était l’offre. Je vais mieux maintenant, Angel. Blocage émotionnel, hein », sourit-elle d’un air triste. « Je ne peux pas rester ici pour toujours. Je sais ce qu’elle ressent, mais que puis-je faire ? Je n’ai pas de maison ici », elle leva magiquement le lapin. Angel se débattait, mais c’était inutile. Ses pouvoirs étaient de retour, et ça voulait dire qu’elle n’avait plus de place pour un autre poney dans sa vie. C’était ce que lui disaient ses souvenirs, en tout cas. Alors, elle ouvrit la porte et marcha dans la nuit.
Le chemin vers Poneyville semblait encore plus long que la nuit. Trixie avait le pas lourd. Elle regarda les étoiles. Depuis quand les nuits étaient-elles devenues si froides ?
« Peut-être que je suis toujours fatiguée. Je devrais attendre… non, non. Ça doit être ce soir. Oh, pourquoi dois-je- »
« Trixie ? C’est toi ? » dit une voix hors des ténèbres. Trixie leva les yeux, et Applejack marcha dans la lumière.
« Qu’est-… qu’est-ce que tu fais là ? » demanda Trixie. Applejack détourna les yeux.
« Je ne pouvais pas dormir, pas après ça. Je voulais m’assurer que toi et Fluttershy alliez bien. Qu’est-ce que… tu ne pars pas, n’est-ce pas ? »
« Tu l’as dit toi-même », répliqua Trixie. « Je ne peux plus ‘me reposer’ sur Fluttershy. Elle mérite… mieux. »
« Mieux ? Mieux ? » Applejack regarda Trixie comme si elle venait juste d’admettre qu’elle était la mère de Luna ou quelque chose du genre. Elle secoua sa tête. « J’te d’mande pardon, mais je pense que tu as tort. Je le saurais après tout, si j’ai bien appris quelque chose ce soir, c’est que c’est plus facile de se mentir à soi-même qu’aux autres. Je… j’avais tort sur toi. »
« Je… vraiment ? Mais, je veux dire, non, tu avais raison. J’ai trop profité d’elle… »
« Mon sucre d’orge, peut-être que tu ne l’as pas vu, mais tu as donné bien plus que tu n’as pris à Fluttershy. »
« Hein ? »
« Je ne l’ai jamais vue comme ça ce soir, pas même la dernière fois qu’elle a fait face à un dragon. Quand je t’ai fichue hors du Sugarcube Corner – ce pour quoi je suis vraiment désolée – elle a éclaté comme un feu d’artifice au festival d’été. Je ne pense pas avoir quelque chose comme ça avant. »
« Je… » Trixie avait oublié ce que Twilight avait dit plus tôt. « Toujours est-il que- »
« Écoute, tu sais pourquoi je suis venue avec les autres pour vous sauver ? On s’est fait mal, mais Fluttershy et moi sommes toujours amies. Et on n’abandonne pas ses amies. C’est pour ça qu’elle est partie te chercher dans la forêt Everfree, et elle a même affronté un dragon pour toi. Elle a aussi fait ça pour nous, mais seulement au dernier moment. Je ne l’ai jamais vue courir vers le danger, pas pour n’importe qui. Tu lui as donné de la force, Trixie, mis quelque chose en elle. Un peu de fierté aussi, mais c’est pareil. Et Rainbow n’arrête pas de parler de vous deux, et… » Applejack s’interrompit, et Trixie rougit malgré elle. Bien sûr, Dash ne pouvait pas se taire. En y repensant, Trixie savait pourquoi Dash n’arrêtait pas de parler de ça. Trixie était devenue familière avec elle ; et avec beaucoup d’autres poneys.
« Je sais que tu as eu une vie là-bas, et je ne peux pas te blâmer de vouloir la revivre. Mais, si tu veux… il y a une vie pour toi ici, Trixie. Tu as des amies, tu sais ? Tu as… tu as… je ne suis pas bonne à ça, désolée. »
« Une vie… ici. » L’idée ne lui avait jamais traversé l’esprit. Pas besoin d’acheter une nouvelle roulotte, ses économies lui permettraient de tenir quelques années, peut-être même pour loger dans quelque chose de modeste. Il y avait toujours une demande pour une showmare dans chaque ville qu’elle visitait, et celle-ci n’était pas différente. Elle pourrait demeurer à Poneyville. Et elle y avait des amies. La folie qui semblait suivre ce groupe, une routine ? L’aventure, l’excitation, les histoires qu’elle pourrait raconter !
« Je… je pourrais rester ici. »
« On aimerait t’avoir dans le coin. »
Trixie sourit. « Tu as raison. Merci, Applejack. »
« De rien. » Applejack leva son chapeau. « Hé. Comment ça se fait que je ne t’ai pas entendue t’appeler par ton propre nom ce soir ? »
Trixie cligna des yeux. « Je… » Elle venait juste de réaliser ce qu’elle avait fait lorsqu’Applejack le dit, et elle ne s’était pas désignée elle-même depuis l’incident avec le dragon. Elle gloussa.
« Quand j’étais une pouliche », dit Trixie à Applejack. « J’ai pensé que si je me désignais comme Grande et Puissante assez de fois, cela deviendrait vrai. C’est bête, n’est-ce pas ? »
« Pas vraiment », sourit Applejack. « Ça a marché, n’est-ce pas ? »
« Je pense… je pense que je suis heureuse de qui je suis », dit Trixie. « Si tu veux bien m’excuser, je dois revenir là où quelqu’un me manque. »
Applejack rit. « Bonne nuit à toi. » Sur ce, elles se séparèrent, chacune se dirigeant vers sa maison.
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Trixie se réveilla tôt le lendemain matin. Elle était trop anxieuse pour dormir, et ne s’était reposée que quelques heures. Elle se réveilla avec le bruit de sabots sur le bois, et leva la tête du canapé où elle dormait. Fluttershy descendait les escaliers, les yeux écarquillés, un petit paquet sur son dos. Elle semblait soulagée de voir Trixie.
« Trixie, je… j’étais si inquiète… »
« Fluttershy… nous devons parler. » Trixie se glissa hors du canapé, mais s’arrêta en voyant le paquet. « Qu’est-ce que c’est ? »
« Je… je, euh, voulais te donner ça après la fête… J’ai eu peur quand tu es partie. »
Trixie secoua sa tête. « Attends, quoi… ? » Fluttershy posa le paquet devant elle. Elle le défit magiquement, en en prenant grand soin. Le papier s’enleva et Trixie haleta. Bien pliés s’y trouvaient son chapeau et sa cape. Elle ne les reconnut presque pas – ils étaient d’un violet vif, et les étoiles semblaient briller comme des joyaux.
« Rarity les a réparés, j’espère que tu aimeras… désolée de ne pas les avoir eu plus tôt », sourit Fluttershy. Trixie sentit ses yeux s’embuer.
« Fluttershy, Je… oh Fluttershy ! » Trixie s’avança, enroulant ses sabots autour de Fluttershy pour lui donner un câlin, pressant ses lèvres contre celles de l’autre jument. Elle ne réalisa même pas ce qu’elle faisait jusqu’à ce que sa langue passe les lèvres de Fluttershy. Elle s’arrêta instantanément, et recula, le visage rouge.
« D-désolée, je ne voulais pas que- »
« Shh », répondit gentiment Fluttershy. Trixie s’arrêta, les yeux écarquillés.
« Fluttershy ? »
« Shh », répéta la pégase, en caressant sa joue. Elle se pencha, sa chaude respiration sur le visage de Trixie. Trixie la regarda dans les yeux, ces yeux qui lui avaient toujours tant dit. Maintenant, ils lui racontaient une histoire complète, l’histoire de son propre futur. Il promettait d’être excitant, un peu terrifiant, mais plein de joie. Un futur plein d’aventures et de drames, où chaque jour serait une histoire. Un futur qu’elles pourraient partager. Les lèvres de Trixie laissèrent Fluttershy l’embrasser. Elle était douce, mais pas trop timide. Il y avait une passion surprenante chez la jument. Qu’avait dit Applejack à Trixie ? Qu’elle avait donné de la force à Fluttershy ? En apparence, tandis que Fluttershy donnait plus de force au baiser, s’aventurant de plus en plus. Trixie ricanait en elle. La pégase avait du courage, mais elle était inexpérimentée, surtout comparée à Trixie elle-même. Elle décida qu’il était temps de commencer à rembourser Fluttershy pour sa gentillesse, au lieu de prendre.
Fluttershy était surprise mais ouverte aux baisers, et Trixie bougea pour lui montrer les endroits sensibles derrière l’oreille d’un poney, et le long de sa nuque – d’abord avec ses sabots bien sûr. Elle allongea Fluttershy sur le divan, où elles pouvaient s’étreindre l’une et l’autre sans avoir à se balancer sur leurs pattes. Trixie ne se souvint pas de combien de temps avait passé, ce qu’elles avaient fait, mais chaque seconde était du pur bonheur, et lorsqu’elles en eurent fini, elles étaient toutes deux exténuées. Trixie se retrouva au-dessus de Fluttershy pendant qu’elles se reposaient sur le canapé, se câlinant malgré la chaleur entre elles. Trixie se sentait vaguement étourdie après tout ça.
« Je vois ce que tu veux dire maintenant », dit Trixie avec un sourire. Fluttershy la regarda d’un air interrogateur.
« C’est la récompense de la gentillesse, c’est ça ? »
Fluttershy gloussa. « Oh, pas habituellement. »
Trixie rit en retour, se blottissant contre Fluttershy. « Je- » Elle fut interrompue par un coup à la porte. Trixie laissa avec réticence Fluttershy. La porte à peine ouverte que des confettis lui sautèrent à la tête. Elle recula lorsqu’un certain poney rose suivit l’explosion.
« Où vous étiez ? Allez, la fête va commencer. »
« Une fête ? On a- »
« La fête d’hier soir a été interrompue par madame grognon et madame tristoune. Hé, c’est comme des cousines ! J’adorerais avoir des cousins, mais- »
Trixie la regarda. « Qu’est-ce que tu vas faire ? »
« Alors, on a une fête d’urgence pour tout remplacer ! J’ai sorti les confettis d’urgence, le gâteau d’urgence, les jeux d’urgence, mais pas la trousse d’urgence de Mme Cake, même si les bandages sont très amusants ! Ils sont colorés et ils se collent à mon nez et me donnent les couleurs d’une pinata ! Ohmincemincemince, j’ai besoin d’une pinata d’urgence ! » Elle bondit tout autour de Trixie, qui ne pouvait que la regarder.
« Hé ! Pourquoi vous êtes toutes transpirantes ? » demanda Pinkie, faisant à son tour bondir les deux poneys.
« Une fête me semble tout à fait charmant, merci. Et si tu partais devant pour dire aux autres qu’on les rejoint plus tard », dit rapidement Trixie, en mettant dehors Pinkie.
« Oh, d’accord. Vous êtes sûres que vous allez bien- »
« Bien, bien », lui dit Trixie, en la poussant plus fort pour la mettre dehors. Elle soupira et s’essuya le front. Trixie se tourna à nouveau vers Fluttershy et sourit.
« On y va ? »
« Tu veux bien, après… »
« Allons, on parle de la Grande et Puissante… » ricana Trixie. « Désolée, les vieilles habitudes. »
« C’est bon. Je pense… » Fluttershy rougit. « Je pense que c’est… mignon. »
« Mignon ? Mignon ? Tu penses que je suis… mignonne », rit Trixie. « Je vais te montrer qui est mignonne, ma chère Fluttershy. » Elle concentra sa magie, et Fluttershy cligna des yeux en se faisant léviter hors du sol. Trixie amena la pégase à elle, remit la mèche de Fluttershy en arrière et l’embrassa sur le nez. Fluttershy gloussa, se roulant en boule comme un enfant tout en flottant.
« Dois-je te porter comme ça jusqu’au Sugarcube Corner ? » demanda-t-elle en la taquinant. Fluttershy gloussa à nouveau, secouant sa tête. Trixie sourit et reposa doucement Fluttershy.
« Je, euh, j’ai oublié de te demander… ta magie ? »
« Je… » Trixie détourna les yeux. « Twilight avait raison. Je n’en voulais pas. »
« Pourquoi ? »
« Au départ ? J’imagine que je pensais ne pas la mériter. Puis… je ne voulais pas te quitter. »
« Trixie… je, euh. »
« On en parlera une autre fois », répondit Trixie. « Viens, avant que Pinkie Pie ne revienne nous chercher ! » Et sur ce, les deux juments se dirigèrent vers la porte.
« Oh, attends ! » Trixie se retourna et regarda tout autour de la pièce. Durant leur moment intime, elle l’avait sentie tomber.
« Où est-ce que- oh bonjour », Trixie vit Angel sur le côté, frappant impatiemment du sabot.
« Euh… tu as tout vu, n’est-ce pas ? » demanda Trixie. Elle ne savait pas pourquoi elle se souciait d’un lapin, mais c’était Angel après tout, et c’était différent. Le lapin roula des yeux et tendit quelque chose. La plume.
« Oh, merci », dit Trixie. Elle lévita la plume, et prit sa cape et son chapeau. Elle les mit sur elle, comme si quelque chose en elle s’était restauré. Puis, elle posa la plume sur son chapeau, utilisant sa magie pour l’attacher, afin qu’elle ne tombe jamais. Voilà, maintenant, elle était enfin complète. Elle se tourna à nouveau vers la porte, voyant Fluttershy en train de l’attendre, souriant chaleureusement et les yeux qui en faisaient tout autant. Avec ces yeux, il n’y avait pas besoin de mots. Trixie revint vers elle et toutes deux se mirent en route vers la fête.
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« C’est la jument du jour ! » Applejack accueillit Trixie en arrivant au Sugarcube Corner. Elle la frappa dans le dos, pour ce qui devait être un salut amical ; Trixie était presque sûre qu’elle venait de lui déboîter l’épaule. Elle essaya de sourire vers elle.
« Oui, merci; » Elle recula légèrement d’Applejack. De l’autre côté se trouvait Fluttershy, Trixie leva les yeux au ciel et la pégase pouffa de rire.
« Alors… ça va entre vous deux ? »
« Oh, bien, bien », dit Trixie. Applejack la regarda bizarrement, mais Trixie garda son sérieux et fit son apparition à la fête. Elle vit Twilight et s’approcha d’elle, afin de discuter magie avec l’autre licorne. Malheureusement, Trixie se retrouva interceptée avant de pouvoir l’atteindre. Pinkie Pie lui blablatait quelque chose avant même qu’elle ne puisse remarquer la présence de la fêtarde.
« … et j’ai fait un nouveau punch ! Mais sa crinière n’est jamais revenue. » Pinkie Pie la regarda. Trixie était confuse.
« Excuse-moi ? »
« Tu penses quoi de la fête ? » demanda Pinkie. Trixie scanna la pièce. Des dizaines de poneys parlant, dansant, partageant du punch et des gâteaux, et-
« C’est très… est-ce que c’est une scène ? » Les yeux de Trixie s’écarquillèrent. Une petite plate-forme de bois était posée devant un mur, une lampe pendante au-dessus, comme un projecteur.
« Oh, je mets ça quand quelqu’un veut faire du karaoké, ou dire une histoire, ou faire un spectacle… »
« Vraiment ? »
« Je pense que ça serait… bien », dit Fluttershy de derrière. Trixie se retourna et lui sourit.
« Tu veux que… ? » Elle regarda autour d’elle. Twilight s’était approchée, et Rainbow Dash fit de même.
« Vous voulez que Trixie raconte une histoire ? » demanda Pinkie Pie. Les yeux de Twilight s’illuminèrent.
« Ça me semble être une excellente idée ! »
« Ouais ! » s’écria Dash. « La dernière était géniale ! »
« Vous voulez que je… ? »
« Est-ce que Trixie va raconter une autre histoire ? » La petite pouliche orange de la dernière fois se frayait un chemin entre les jambes des autres. « Tes histoires sont toujours cools ! Comme Rainbow Dash ! »
« Doucement, p’tite », ricana Dash. « Mais l’histoire avec l’Ursa Minor a rendu Twilight cool. Twilight ! »
« Merci », railla la licorne. Rarity et Applejack remarquèrent l’agitation et s’approchèrent du groupe. Trixie se retrouva entourée de visages souriants.
« Qu’est-ce qui se passe ? » demanda Applejack.
« Trixie va raconter une autre histoire ! » dit Pinkie Pie. Trixie fixa Applejack.
« C’est une excellente idée. » Elle leva son chapeau. Trixie sourit et acquiesça.
« D’accord, d’accord, je connais une bonne histoire. » Trixie s’avança jusqu’à la scène. Les poneys se regroupèrent autour. Lorsqu’elle grimpa sur la plate-forme de bois et se retourna, elle constata que tous les yeux étaient dirigés sur elle. Trixie sourit. C’est là qu'elle avait sa vraie place. Ses yeux cherchèrent Fluttershy, près du fond, avant qu’elle ne commence.
« Laissez-moi vous racontez l’histoire de… la magicienne et de la jeune fille », commença-t-elle. Sa corne s’illumina, et un brouillard prit possession de la scène. Le bois craquait sous ses pas et le nuage cachait Trixie du public. Trixie cacha sa corne avec son chapeau et forma un solide mur avec le brouillard. Dessus, elle peignit des scènes lumineuses, simples mais belles, comme des images dans un livre.
« Dans un bois très lointain… » narra Trixie, montrant sur ce qu’elle disait contre le brouillard. « Vivait une jeune fille, aussi sage que Celestia elle-même, chargée de protéger un petit hameau », elle peignit la scène d’un petit château et de maisons aux toits de chaume, plaçant au premier plan une pégase avec une longue crinière. « La jeune fille observait tout depuis sa demeure, poneys et créatures. Elle amenait la paix là où elle passait, et avait une cour de poneys forts et sages. »
« Puis, un jour, une magicienne arriva sur le territoire de la jeune fille. » Elle dépeignit une licorne bleue habillée avec une cape. Elle fit marcher la jument vers le château.
« La magicienne était forte et loquace, et eut une audience avec la jeune fille. » Elle changea la scène vers une salle de trône, posant la jeune fille sur le trône, entourée de cinq autres juments. « Mais la magicienne était hautaine, et défia la cour de la jeune fille. Cette dernière chargea une de ses amies, une fermière connue pour son dur travail et sa sagesse, de répondre à son défi, mais la magicienne retourna ses outils contre elle et l’écarta. » Elle enveloppa le poney terrestre et la licorne s’avança. « Puis, le chevalier le plus courageux et loyal de la jument s’avança, mais la magicienne créa un orage pour le combattre, refusant de faire face au chevalier. » Pour l’effet, Trixie envoya un vent frapper le nuage, faisant attention de faire tenir le brouillard qu’elle utilisait. « La couturière de la jeune fille était la suivante à lui faire face – beaucoup considéreraient cela comme une modeste profession. Mais la magicienne mit à mal la fierté de la couturière et ruina son travail. La magicienne semblait aussi puissante qu’elle le clamait. »
« Durant tout ce temps, » Trixie baissa sa voix, juste assez pour capter l’attention de tout le monde. « Une autre des conseillères de la jeune fille regarda tout. Une sage, jeune de cœur mais à la sagesse infinie. Elle ramena à la raison la magicienne, et cette dernière quitta la cour, assurée de sa supériorité, de sa victoire. »
« Ce que la magicienne ne savait pas était que, pendant que les royaumes de la jeune fille étaient en paix, ils étaient entourés de bois sombres où aucun poney n’osait s’aventurer. Ces bois sombres se nourrissaient de la noirceur contenue dans le cœur de certains poneys. La puissance et la fierté de la magicienne fut remarquée, et la forêt envoya une bête pour la défier, pour voler son pouvoir. La bête avait de grandes dentes et de grandes griffes, et arriva dans la nuit, détruisant les terres de la jeune fille. La magicienne défia la bête, afin de prouver qu’elle pouvait offrir une meilleure protection au royaume que ne pouvait le faire la jeune fille. » Trixie dépeignit une scène sombre, gardant la bête cachée, à part des dents brillantes et des yeux rouges. L’imagination des poneys faisait le reste. « Mais la bête était prête à combattre la magicienne, et les sorts de la jument échouèrent à détruire la bête. La créature s’avança de plus en plus, et les sorts de la magicienne ne firent rien pour diminuer la faim de la bête et son pouvoir. »
« Et puis… » La voix de Trixie devint un murmure. Elle éteignit chaque lumière dans la pièce, laissa la scène disparaître, et plongea la foule dans l’obscurité totale. Ensuite, elle enleva son chapeau, laissant sa corne briller de plus en plus, afin de couper le brouillard, et la foule haleta en cœur.
« Apparut l’avisée », dit Trixie, laissant le temps pour les mots de faire leur effet. Elle dessina deux yeux rouges derrière elle dans le brouillard, donnant l’impression à la foule que la bête la regardait. Elle plaça entre eux une licorne avec la crinière comme un ciel étoilé.
« L’avisée s’avança vers la magicienne, ignorant ses cris disant que sa magie était inutile. » Trixie amena la licorne bleue sur scène. « La magicienne ne pouvait que regarder avec admiration l’avisée défaire la bête. La créature se défendit, refusant d’être distraite par les tentatives de l’avisée, luttant contre ses forces. Dans un dernier souffle de magie qui rivalisait avec le lever du soleil lui-même, l’avisée fit léviter la bête et la renvoya dans les profondeurs de la forêt, et elle ne revint plus jamais ! » Elle frappa des sabots pour jouer l’écho, et laissa disparaître les yeux rouges derrière elle. Elle regarda la foule. Tout le monde était bouche bée, chaque poney se penchant pour capturer ses prochains mots.
« La magicienne, honteuse, refusa l’aide de l’avisée par la suite. Elle n’avait jamais vu autant de pouvoir, et l’avisée, après avoir défait une créature aussi puissante, retourna en ville pour aider à la nettoyer, comme le reste de la cour et la jeune fille elle-même. Elle ne demandait aucune récompense pour ses actes. La magicienne quitta la ville, gênée de voir ses pouvoirs si inutiles, ses mots si vides.
« Mais notre histoire ne s’arrête pas ici », dit Trixie. « La magicienne voulut courir dans les bois du royaume de la jeune fille, afin de s’y reposer. Cependant, la colère l’aveugla, et elle courut jusqu’à tomber dans les bois sombres qui avaient essayé de la capturer. » Trixier montra des images d’arbres d’où semblaient sortir des griffes, envoyant des dizaines d’yeux rouges vers la foule. Elle décida d’y aller directement, et commença à jouer le rôle de la magicienne en narrant ses propres épreuves.
« La forêt lutta pour réclamer son prix, piégeant la magicienne de tous les côtés ! » Trixie sauta sur le côté en amenant plus bas l’ombre d’un arbre. « La magicienne était encore fougueuse, mais la forêt était trop forte. » Elle amena une fumée noire autour d’elle, et elle fit semblant de se cabrer pour l’éviter. « La magicienne lutta chaque nuit, refusant de se soumettre à la forêt. Si elle ne pouvait pas l’avoir, la forêt la tuerait, et la magicienne perdit un peu plus espoir à chaque nuit qui passait. » Les ombres l’entouraient de plus en plus. Elle se mit à genoux, et une ombre plus grande que les autres plongea sur elle, la faisant s’évanouir sur la scène.
« La magicienne était fichue », murmura-t-elle depuis le sol, fermant ses yeux. « Sa magie brisée, et son corps aussi. La forêt avait gagné. Elle se prépara à affronter la mort. Le froid et l’obscurité prirent possession d’elle… » Une fois de plus, elle cacha sa corne, plongeant la foule dans le noir. Elle attendit, comptant les secondes dans sa tête, et se releva.
« Et puis vint la jeune fille ! » cria-t-elle, sa corne brillant juste assez pour être vue sous son chapeau. Elle retira le brouillard autour d’elle, et la lumière disparut. Son public s’éclaira, mais la luminosité était concentrée sur la scène, dessinant la jeune fille à la longue crinière en train de descendre à l’endroit où une licorne brisée se tenait prostrée sur un fond sombre.
« La forêt était sensible aux ténèbres qui rongeaient le cœur d’un poney. Et c’est pour cette raison qu’elle ne pouvait pas atteindre la jeune fille, peu importe la façon dont elle essayait, parce que le sien était pur. La jeune fille n’avait peut-être ni le pouvoir de l’avisée ou la puissance des chevaliers, mais elle avait en elle une lumière qui pouvait guider un poney du plus profond des abysses ! La magicienne n’y était pas encore, mais s’en approchait, lorsque la jeune fille s’en alla la sauver, allant même jusqu’à la porter elle-même sur son dos. Elle refusait de risquer la vie de quelqu’un dans cette forêt sombre, et elle refusait de laisser la magicienne mourir. Elle était chargée de la protection de tous les poneys de son royaume, et elle ne pouvait laisser la magicienne seule après avoir appris son erreur. Elle fit revenir la magicienne dans sa maison, et commença à la soigner. Pour tout le monde, la magicienne était déjà morte, mais la jeune fille put lui toucher son pauvre cœur et lui rappeler qu’elle était en vie, alors qu’elle l’avait presque oublié. La jeune fille, avec tous ses devoirs, trouva malgré tout le temps de rester au côté de la magicienne, refusant de la voir mourir sous ses soins, même quelqu’un d’aussi méchant que celle-ci.
« ‘Pourquoi ?’ lui demanda une fois la magicienne. La jeune fille sourit et lui dit, ‘Parce que c’est juste’. La jument refusa la vérité, et demanda une nouvelle fois, ‘Pourquoi ?’ ‘Parce que c’est juste’, répondit la jeune fille. Et une fois de plus, la magicienne refusa. Elle reposa la question une troisième fois, ‘Pourquoi ? Pourquoi m’aider, moi, moi qui ai amené tant de terreur sur ton royaume ? Pourquoi prendre soin de moi, même après que tu m’aies ramenée des enfers ? Pourquoi fais-tu cela ?’ Et une fois de plus, la jeune fille sourit, et avec une tendresse toute maternelle, elle lui dit, ‘Parce que c’est juste’.
« La magicienne se soigna grâce aux bons sabots de la jeune fille. Elle n’était pas aimée par la cour, mais elle prit le temps de les connaître, et elles aussi. Il y avait de la force en chacune d’entre elles : la loyauté du chevalier envers la jeune fille faillit tuer la magicienne. » Trixie s’arrêta pour éviter de ricaner, et de casser l’ambiance. « La couturière, avec son œil averti, vit même quelque chose grandir au sein de la magicienne. Quelque chose que lui avait donné la jeune fille, même si elle ne le savait pas.
« Mais avant que la magicienne puisse tout découvrir, la forêt repartit à l’attaque. Elle ne pouvait pas toucher la jeune fille, mais un terrible dragon le pouvait. Une nuit, le dragon vint au château de la jeune fille, et la kidnappa durant son sommeil. Seule la magicienne était réveillée, gardée au côté de la jeune fille pendant qu’elle guérissait. La magicienne paniqua et espionna le dragon durant son chemin dans la forêt. Elle appela un messager pour alerter la cour, mais ne pouvait plus attendre ! Elle courut dans les bois, guidée par une force encore plus puissante que la magie, une force encore plus ancienne que la forêt elle-même ! » Trixie allégea un peu son ton, contrastant avec les ombres grossissantes qui dominaient la scène.
« La magicienne trouva le dragon dans sa cave, se préparant à manger la jeune fille. Elle n’hésita pas, et entra dans la cave, demandant que la jeune fille soit relâchée. Elle s’offrit elle-même, corps et âme, à la place de la vie de la jeune fille. La forêt demanda au dragon d’accepter, car la vie de la magicienne servirait mieux ses noirs desseins que le sacrifice de la jeune fille. La magicienne se soumit, mais à sa surprise, la jeune fille refusa.
« ‘Pas sans toi’, dit la jeune fille, refusant de quitter le dragon. ‘Je ne peux pas partir sans toi’.
« ‘Pourquoi ?’ demanda la magicienne, craignant que le dragon les prenne toutes les deux. Elle regarda la jeune fille dans les yeux, et comprit pourquoi. La jeune fille savait que si elle restait, elle échouerait dans sa mission de protection. Mais la magicienne, durant sa résidence au château et en ayant appris la sagesse de la cour de la jeune fille, avait pris quelque chose d’elle. Quelque chose qu’elle n’avait pas voulu prendre, mais qu’elle n’abandonnerait jamais. Le cœur de la jeune fille.
« La magicienne comprit. Elle comprit pourquoi la jeune fille prenait soin d’elle, pourquoi l’avisée était si puissante, pourquoi elle faisait face à un dragon. Une force encore plus puissante que la magie les guida toutes les deux, une force encore plus ancienne que les arbres. L’amour, mes poneys. La jeune fille avait appris à la magicienne à aimer.
« L’amour en elle alimenta la magie de la magicienne, et elle se libéra du dragon, tout en défendant la jeune fille. Le feu du dragon ne pouvait pas les brûler, et aucune griffe ne pouvait les toucher. » Elle dépeignit le feu de façon presque trop réaliste, faisant reculer l’audience en dessinant deux poneys faisant face à un terrible dragon. « Et les deux fuirent la forêt, la forêt qui ne pouvait à présent plus toucher la magicienne, pas avec l’amour dans son cœur. Elles s’enfuirent, et retournèrent à la cour de la jeune fille.
« Mais cette histoire n’est pas terminée, mes amis. Pour ses services, la jeune fille offrit de nouvelles robes à la magicienne, de la haute couture qui rendait Celestia elle-même jalouse. Mais cette égoïste et avare magicienne, qui avait volé le cœur de la jeune fille, voulait quelque chose d’autre, quelque chose en plus. Elle se tint devant la jeune fille et dit, » Trixie se mit sur ses deux sabots, et créa un projecteur qu’elle pointa vers la foule. La foule était choquée et tout le monde se retourna pour voir qui était au centre des lumières – Fluttershy. Fluttershy elle-même semblait incrédule.
« Jeune fille, oh ma chère jeune fille ! » cria Trixie, de vraies larmes dans ses yeux. Elle tendit son sabot vers Fluttershy, qui l’approcha timidement. « Je te fais une promesse, belle jeune fille. Je serai tienne jusqu’à ce que mon pelage devienne blanc et que ma magie disparaisse, et ensuite, je serai toujours à toi. Dis-moi que tu m’auras, dis-moi que j’aurai une maison où je pourrai accrocher ma cape et reposer mon cœur ! » Fluttershy s’avança, et Trixie l’aida à grimper sur scène. Fluttershy avait ses sabots sur les épaules de Trixie. Trixie chercha son visage, et sourit devant ce qu’elle vit.
« Et sur ce, la jeune fille dit… » l’encouragea-t-elle. Fluttershy avala lourdement.
« Oui. S-s’il te plaît, reste avec moi, sois d-dans ma vie. P-protège-moi, et j’essaierai de faire de même. Je… je ne veux plus jamais te p-perdre à nouveau. »
« Et la magicienne et la jeune fille se regardèrent dans les yeux », dit Trixie, sans faire attention à la foule. Elle laissa sa magie disparaître, illuminant à nouveau la pièce. « Et elles savaient toutes les deux que, tant qu’elles seraient ensembles, rien de mal ne leur arriverait… » murmura-t-elle, « et elles ne seraient jamais seules. » Elle se pencha et embrassa Fluttershy, sourde aux acclamations du public.
FIN
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